B. METTRE FIN À UNE SITUATION DE « SURTRANSPOSITION » QUI RISQUE DE PORTER PRÉJUDICE AUX SOCIÉTÉS FRANÇAISES FRAGILISÉES PAR LES CONSÉQUENCES DES CRISES RÉCENTES

L'article 10 du projet de loi vise à modifier les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce. Ces dispositions prévoient, pour les sociétés par actions (société anonyme, société à responsabilité limitée, société en commandite par actions et société par actions simplifiée), que dans le cas où les capitaux propres d'une société deviennent inférieurs à la moitié de son capital social, l'assemblée générale des actionnaires ou les associés se réunissent dans un délai de quatre mois pour décider de dissoudre ou non la société. En cas de non dissolution, la société dispose alors de deux exercices comptables pour remédier à la situation, faute de quoi toute personne intéressée est en droit de demander sa dissolution .

Le Gouvernement fait valoir que le droit en vigueur est bien plus sévère que la règle prévue à l'article 58 de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 6 ( * ) . Il s'agit d'une situation de « surtransposition » 7 ( * ) . Cette directive a en effet laissé une marge de manoeuvre plus souple aux États membres, la dissolution n'étant pas imposée. Il y aurait donc un risque de dissolution excessif et accru comparativement aux autres entreprises de l'Union européenne .

Le Gouvernement propose donc de modifier la nature de la sanction à laquelle s'expose l'entreprise dont les capitaux propres deviennent inférieurs à la moitié de son capital social, en remplaçant la dissolution par l'obligation d'apurer les pertes au moyen d'une réduction du capital social, jusqu'à un minimum qui serait fixé par décret en Conseil d'État.

Cette modification , qui maintient une double sanction (la réduction du capital social et, à défaut, la dissolution judiciaire), mais dans un délai plus long (quatre exercices comptables), a été jugée justifiée par la commission , à l'aune des conséquences économiques des crises récentes (covid-19, guerre en Ukraine) ainsi que des nouvelles modalités de financement des sociétés.


* 6 Le paragraphe 1 de l'article 58 de la directive prévoit qu' « en cas de perte grave du capital souscrit, l'assemblée générale doit être convoquée dans un délai fixé par les législations des États membres afin d'examiner s'il y a lieu de dissoudre la société ou d'adopter toute autre mesure ».

* 7 La « surtransposition » peut être définie comme « l'adoption ou le maintien de mesures législatives ou réglementaires allant au-delà des exigences minimales d'une directive ». Cela peut concrètement se traduire par « le fait d'exercer un choix entre plusieurs options ouvertes par la directive ou de décider d'utiliser ou non les possibilités de dérogation qu'elle autorise peut également conduire à une surtransposition, dans la mesure où ces choix peuvent créer des obligations plus strictes pour les destinataires de la norme » (rapport d'information n° 532 sur les moyens de lutter contre la transposition des directives européennes dans le droit français, fait par Alice Thourot et Jean-Luc Warsmann au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, décembre 2017, p. 5).

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