C. LE DÉFI CRUCIAL DE LA DÉCARBONATION DU TRANSPORT AÉRIEN SUPPOSE UN APPUI PUBLIC STRUCTUREL AUX ACTIVITÉS DE RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT

1. Un enjeu déterminant pour l'avenir du transport aérien qui fait déjà l'objet de concours publics

Sa décarbonation constitue l'enjeu déterminant du transport aérien en général, et de l'industrie aéronautique en particulier, dans les années à venir. Elle suppose des investissements massifs , notamment en recherche et développement.

À travers le Corac , des financements publics y sont consacrées dans le cadre d'une feuille de route pluriannuelle élaborée par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) avec la filière. Elles ont été renforcées dans le cadre du plan de soutien annoncé en juin 2020. Toutefois, ces financements complémentaires, programmés entre 2020 et 2022 étaient déjà engagées aux deux-tiers en septembre 2021 . Selon la DGAC, ils devraient être intégralement consommées en 2022 .

Les régions et acteurs locaux ne sont pas en reste et contribuent également, à leur échelle, à la transition du secteur. À titre d'exemple, l'axe 2 du plan Ader IV de la région Occitanie y consacre des financements tandis que cette même région, en association avec le pôle de compétitivité Aerospace Valley, développe depuis février 2021 le projet Maele (mobilité aérienne légère environnement responsable) qui doit produire un démonstrateur d'avion vert pour l'aviation légère.

2. Un besoin d'inscrire les concours publics dans le temps long et de les assoir sur des trajectoires concertées

Compte-tenu des investissements considérables qu'induit la transition écologique de la filière aéronautique, une inscription des concours publics dans le temps long apparaît nécessaire . La Cour des comptes estime ainsi que les dispositifs actuellement mis en oeuvre « pour favoriser la transformation de la filière et le passage aux avions du futur ont un horizon temporel trop limité pour apporter des réponses à la hauteur des enjeux » . Le rapporteur spécial partage la conviction qu' il est nécessaire d'apporter davantage de visibilité concernant les financements publics susceptibles d'être consacrées à ce défi de long terme. Au regard de l'ampleur de la transformation à accomplir et des enjeux en présence, comme la Cour des comptes, il considère que ces financements devront s'établir à un niveau nettement plus élevé que les montant qui y étaient consacrés jusqu'en 2019 .

Le plan d'investissement France 2030 apporte de nouvelles perspectives en ce sens qui devront être concrétisées . Ce plan comporte un volet aéronautique. Ce dernier vise à soutenir la production, d'ici 2030, du premier « avion bas carbone ». Il s'agirait de promouvoir la conception d'un appareil régional, hybride électrique ou alimenté à l'hydrogène, qui entrerait en service en 2030 après le développement d'un démonstrateur dès 2028. L'appareil serait la première marche vers la conception d'un aéronef moyen-courrier à propulsion hydrogène d'ici 2035. Le plan prévoit de consacrer 1,2 milliard d'euros à cet objectif. La loi de finances initiale pour 2022 a ouvert ces 1,2 milliard d'autorisations d'engagement ainsi que 150 millions d'euros de crédits de paiement dès l'exercice 2022 sur le nouveau programme 424 « Financement des investissements stratégiques » de la mission « Investissements d'avenir » rebaptisée « Investir pour la France de 2030 ».

Si le rapporteur spécial se félicite que l'État renforce, sur le long terme, son soutien à la transition écologique du transport aérien, il note que la gouvernance et le pilotage de ce programme, notamment sa coordination avec le Corac, doivent encore être précisés .

Notamment pour calibrer de manière efficiente les soutiens publics structurels qui seront nécessaires, le rapporteur spécial partage la recommandation de la Cour des comptes visant à ce que des scénarios industriels de décarbonation du secteur aérien les plus précis possibles soient conçus . Il note que, dans sa note de décembre 2021, le Corac a lancé de premières pistes.

Par ailleurs, le rapporteur spécial s'interroge quant au phasage des choix des grandes orientations technologiques visant à aboutir à une décarbonation du secteur aérien.

Un défi aussi considérable que le développement de l'avion à hydrogène , véritable révolution qui implique notamment de revoir radicalement l'architecture des aéronefs, induit le choix d'une technologie de rupture et placera la France parmi les prescripteurs d'une nouvelle norme à l'échelle mondiale . Aujourd'hui, sur ce projet de propulsion hydrogène, la France et l'Europe sont sans doute pionnières, mais pourront difficilement prendre le risque de l'isolement. Compte-tenu des enjeux considérables d'une telle option stratégique, notamment en matière d'investissements, un tel choix suppose des étapes de validations intermédiaires.

Le rapporteur spécial considère qu' à court et moyen-terme, le développement de l'usage des carburants alternatifs durables (les SAF) est une option technologiquement réaliste . Elle doit en effet permettre d'obtenir des résultats rapides en termes de réduction des émissions sans exiger pour autant d'investissements massifs dans les infrastructures d'approvisionnement. Inversement, l'option de l'hydrogène induit une transformation profonde du modèle et des infrastructures aéroportuaires. Le rapporteur spécial note qu'à ce stade, le Corac continue de garder ouverte les deux options et consacre environ 10 % de ses financements à la propulsion hydrogène.

La temporalité la plus adaptée pourrait conduire à privilégier les SAF à court et moyen-terme , puis , lorsque l'hypothèse apparaîtra réglementairement et technologiquement mature, d'envisager la faisabilité de l'avion à hydrogène.

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