II. L'ARTICLE 31 : UN VÉHICULE BALAI DE RATIFICATION DE HUIT ORDONNANCES, INSCRIT TROP TARDIVEMENT À L'ORDRE DU JOUR

A. SUR LA FORME, LES CONDITIONS DANS LESQUELLES CES RATIFICATIONS SONT PROPOSÉES AU PARLEMENT NE SONT PAS SATISFAISANTES

Alors que le délai effectif de ratification s'est élevé en moyenne à 1 an, 1 mois et 7 jours (soit 403,5 jours) lors du précédent quinquennat, il aura fallu 5 ans, 3 mois et 2 jours (soit 1 919 jours) pour que les huit ordonnances de l'article 31 soient examinées en commission par la première chambre. Il faudra encore ajouter à ce décompte le temps d'examen de ce projet de loi, avant son éventuelle adoption.

Ordonnance

2015-616

2015-1245

2015-1246

2015-1247

2015-1248

2019-1110

2021-485

2021-1370

Temps avant l'examen dans la première chambre*

7 ans, 6 mois et 3 jours

7 ans et 2 mois

7 ans et 2 mois

7 ans et 2 mois

7 ans et 2 mois

3 ans, 1 mois et 7 jours

1 an, 7 mois et 16 jours

1 an, 1 mois et 17 jours

*décompte arrêté au mercredi 7 décembre 2022

Pour cinq ordonnances de 2015, c'est la première fois, depuis le record de l'ordonnance n° 2011-78 du 21 janvier 2011 4 ( * ) , que la ratification interviendrait deux mandats après la publication .

Sans exagérer l'impact de ce « découplage », le rapporteur juge qu'il serait de bonne pratique, pour la lisibilité des débats autant que pour la sécurité juridique des principaux intéressés, d'inscrire les projets de loi de ratification à l'ordre du jour dans des délais plus raisonnables.

L'examen de ces dispositions au Sénat intervient à contretemps, le véritable débat ayant eu lieu au sein du Conseil de l'UE et du Parlement européen il y a parfois plus de quinze ans.

Alors qu'en moyenne, entre 2007 et 2022, une loi de ratification promulguée comportait en moyenne 3,2 ratifications, le présent article en contient 8 à lui seul . Cela nuit à l'exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité du débat parlementaire, d'autant que la plupart de ces ordonnances adaptent le droit à plusieurs textes européens, et non à un seul. Enfin, toutes les dispositions des ordonnances ne sont pas à proprement parler des dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (par exemple modalités de classement des IG par l'INAO).

Dans ces conditions, bien qu'il ne s'agisse pas d'une obligation pour la ratification d'ordonnances, il eut été intéressant pour le Parlement de disposer d'une étude d'impact , même sommaire.

B. DES DISPOSITIONS MATÉRIELLEMENT DISPARATES MAIS UTILES

En vigueur depuis plusieurs années, et tirant les conséquences de règlements européens, d'application directe 5 ( * ) , ces ordonnances ont suscité très peu de réactions de la part des syndicats et autres acteurs du monde agricole. Elles relèvent, pour l'essentiel, du « toilettage technique » (mise à jour de références juridiques, abrogation de dispositions figurant maintenant dans le droit de l'UE) et appellent peu d'observations particulières sur le fond .

La France a été à l'initiative de nombre des dispositions européennes justifiant les ordonnances et bénéficie de plusieurs d'entre elles, à commencer par la reconnaissance de nouvelles mentions valorisantes, indications géographiques ou l'encadrement plus strict de la production vitivinicole. La France est en effet le premier producteur de vin en valeur au sein de l'Union européenne, et la défense des indications géographiques au niveau européen et dans les accords commerciaux figure parmi ses priorités.

L'intérêt de ces mesures ne doit pas empêcher de faire preuve de vigilance dans le contrôle de leur application. S'agissant de la libre prestation de services, l'ordre des vétérinaires a ainsi alerté le rapporteur sur certaines dérives liées à l'optimisation fiscale ou à des entorses aux règles sanitaires, réitérant sa proposition d'un référentiel européen commun de formation vétérinaire.

Enfin, soucieux de ne laisser passer aucune surtransposition injustifiée , le rapporteur a jugé que le maintien de standards plus élevés en matière de santé végétale, animale (catégories de maladies) et de sélection génétique était justifié par un motif d'intérêt général suffisant.


* 4 Ratifiée 9 ans, 10 mois et 13 jours après sa publication, dans le DDADUE économique et financier de 2020.

* 5 Seule l'ordonnance n° 2015-1245 transpose une directive, sur les qualifications professionnelles (« DQP »).

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