II. APRÈS UNE QUASI-DÉCENNIE D'ATTENTISME, LA FRANCE DOIT SOUTENIR UN EFFORT CONSÉQUENT SI ELLE VEUT MAINTENIR SON INFLUENCE AU SEIN DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

A. COMPARÉE À SES PARTENAIRES, LA FRANCE A MANQUÉ DE VOLONTARISME AU DÉTRIMENT DE SON INFLUENCE EN TANT QUE FINANCEUR DU SYSTÈME ONUSIEN

1. Les contributions financières constituent un vecteur assumé d'influence au sein des organisations internationales

Les auditions conduites et les documents obtenus par les rapporteurs ont confirmé que les contributions internationales constituent un levier d'influence majeur, intégré comme tel dans la stratégie des États et des organisations internationales .

Ainsi, pour certaines organisations, un « ticket minimal » de contribution est requis pour participer au conseil d'administration ou aux instances dirigeantes.

C'est par exemple le cas pour l'Office de secours et de travaux des Nations-Unies pour les réfugiés de Palestine et du Moyen-Orient (UNRWA) pour lequel une contribution minimale de 5 millions de dollars est requise pour siéger au conseil.

L'UNICEF conditionne, également, l'accès à son conseil d'administration au versement d'une contribution minimale tandis que celui du Fonds pour la consolidation de la paix de l'ONU est limité aux douze premiers contributeurs.

Le ministère des affaires étrangères a également pu indiquer que certains des principaux contributeurs à des organisations internationales pouvaient être amenés à se réunir au sein de groupes de donateurs (« donor groups ») permettant de négocier en dehors des instances officielles.

En outre, le montant des contributions intervient dans la répartition, par nationalité, des emplois de chaque organisation . Les postes d'encadrement revenant plus aisément à des ressortissants de donateurs importants.

La France semble assumer parfaitement cette mobilisation du levier financier afin de peser sur les choix des organisations que ce soit dans leur gestion ou leurs activités.

Ainsi, en 2019, afin de marquer notre attachement à la sécurité collective , mais dans le contexte, néanmoins, de la désignation imminente du prochain chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, il a été décidé d' une hausse du financement au Département des opérations de maintien de la paix .

À l'inverse, les échanges conduits par les rapporteurs avec plusieurs acteurs et observateurs de notre participation au système multilatéral ont montré que, par exemple, la faiblesse de nos financements à certains programmes , comme le Programme Alimentaire Mondial, en comparaison d'autres États, pouvait être un facteur limitant notre influence au sein de cette organisation .

Cette situation pourrait, également, se vérifier s'agissant du Programme des Nations Unies pour le Développement puisque nos contributions y demeurent modestes.

Afin d'évaluer et de mettre en perspective la situation et la stratégie d'influence de la France au regard de ses contributions aux organisations internationales, les rapporteurs ont analysé les données concernant environ 40 organisations internationales rattachées au système onusien.

Liste des organisations internationales placées sous revue par les rapporteurs

Catégorie

Code (anglais)

Code (français)

Libellé

Contributions totales
en 2020 (M$)

Part des contrib. obligatoires

Part des contrib. volontaires

ONU

UN

ONU

Organisation des Nations-Unis

5 279,1

58,4 %

41,6 %

Départements

DPKO

DPO

Département des opérations de paix

7 220,8

95,5 %

4,5 %

Tech Bank

Tech Bank

Banque de technologies pour les pays les moins avancés

0,8

-

100 %

UNODC

ONUCDC

Office des Nations unies contre les drogues et le crime

269,5

-

100 %

Fonds et programmes

UNCDF

FENU

Fonds d'équipement des Nations unies

21,7

-

100 %

UNDP

PNUD

Programme des Nations Unies pour le développement

3 155,6

-

100 %

UNEP

PNUE

Programme des Nations Unies pour l'environnement

387,2

55,5 %

44,5 %

UNFPA

UNFPA

Fonds des Nations Unies pour la population

873,4

-

100 %

UNHABITAT

ONU-HABITAT

Programme des Nations Unies pour les établissements humains

77,8

-

100 %

UNICEF

UNICEF

Fonds des Nations Unies pour l'enfance

3 521,0

-

100 %

WFP

PAM

Programme alimentaire mondial

7 416,6

-

100 %

Agences
spécialisées

FAO

FAO

Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture

1 178,0

41,1 %

58,9 %

ICAO

OACI

Organisation de l'aviation civile internationale

140,8

56,6 %

43,4 %

IFAD

FIDA

Fonds international de développement agricole

372,4

-

100 %

ILO

OIT

Organisation internationale du Travail

599,3

67,7 %

32,3 %

IMO

OMI

Organisation maritime internationale

54,3

83,1 %

16,9 %

ITU

UIT

Union internationale des télécommunications

133,6

92,6 %

7,4 %

UNESCO

UNESCO

Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture

488,7

53,7 %

46,3 %

UNIDO

ONUDI

Organisation des Nations Unies pour le développement industriel

161,2

52,9 %

47,1 %

UNWTO

OMT

Organisation mondiale du tourisme

17,9

90,9 %

9,1 %

WHO

OMS

Organisation mondiale de la Santé

2 576,1

19,4 %

80,6 %

WIPO

OMPI

Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

30,4

65,1 %

34,9 %

WMO

OMM

Organisation météorologique mondiale

95,1

80,8 %

19,2 %

Autres entités

UNAIDS

ONUSIDA

Programme commun des Nations Unies sur le VIH

257,8

-

100 %

UNHCR

HCR

Haut-Commissariat pour les réfugiés

3 432,9

-

100 %

UNITAR

UNITAR

Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche

16,0

-

100 %

UNRWA

UNRWA

Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient

709,5

-

100 %

UNSSC

UNSSC

École des cadres du système des Nations-Unies

4,6

-

100 %

UNU

UNU

Université des Nations-Unies

55,5

-

100 %

UNV

VNU

Volontaires des Nations-Unies

26,0

-

100 %

UNWOMEN

ONU-Femmes

ONU-Femmes

348,6

-

100 %

Organisations apparentées

CTBTO

CTBTO

Organisation du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires

137,9

98,4 %

1,6 %

IAEA

AIEA

Agence internationale de l'énergie atomique

754,8

61,4 %

38,6 %

IARC

CIRC

Centre international de recherche sur le cancer

35,3

75,3 %

24,7 %

ICC

CPI

Cour pénale internationale

176,9

99,7 %

0,3 %

IOM

OIM

Organisation internationale pour les migrations

1 399,0

3,8 %

96,2 %

ITC

CCI

Centre du commerce international

33,1

-

100 %

ITLOS

TIDM

Tribunal international du droit de la mer

12,7

98,3 %

1,7 %

OPCW

OPCW

Organisation pour l'interdiction des armes chimiques

92,9

78,8 %

21,2 %

PAHO

OPS

Organisation panaméricaine de la santé

212,2

49,6 %

50,4 %

UNFCCC

CCNUCC

Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

47,7

68,9 %

31,1 %

UNITAID

UNITAID

Unitaid

202,9

-

100 %

WTO

OMC

Organisation mondiale du commerce

233,3

95,2 %

4,8 %

Total

42 261,0

32,2 %

67,8 %

Source : commission des finances du Sénat

Le montant total des contributions ainsi placées sous revue s'élève
à 42,2 milliards de dollars en 2020
dont environ 1,1 milliard correspondent à des contributions françaises, soit 0,9 milliard d'euros au taux de change retenu par la direction du budget pour 2020.

Dès lors, les dépenses sous revue ne forment qu'une partie du montant des contributions versées par la France en 2020 , évalué par les rapporteurs à environ 5,6 milliards d'euros.

En effet, il ne s'agit ici que des seules contributions versées au système onusien à l'exclusion de plusieurs organisations telle que, par exemple et pour information :

- l'Agence spatiale européenne (1,4 milliard d'euros versés en 2020) ;

- le Fonds européen de développement (842 millions d'euros versés en 2020) ;

- l'Association internationale de développement de la Banque mondiale (346,5 millions d'euros versés en 2020) ;

- l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (197 millions versés en 2020) ;

- l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire,
CERN (153,5 millions d'euros versés en 2020) ;

- le projet de réacteur nucléaire ITER (151,9 millions d'euros
versés en 2020) ;

- le Fonds africain de développement (148,9 millions d'euros
versés en 2020).

Les rapporteurs ont fait le choix d'exclure les organisations hors du système onusien du champ de l'analyse systématique qu'ils ont produite pour des raisons d'opportunité et des considérations de nature technique.

Au plan de l'opportunité, la plupart de ces organisations ont une dimension soit strictement européenne (ESA, FED et CERN) soit limitée aux pays occidentaux (OTAN).

A l'inverse, les institutions du système onusien sont ouvertes à l'ensemble des pays et l'analyse des contributions qu'elles perçoivent permet ainsi de mettre à jour des dynamiques de concurrence sur un plan véritablement international et non régional.

Du reste, les institutions placées sous revue se caractérisent par une importante diversité et sont, pour nombre d'entre elles, des organisations où la recherche d'influence présente un caractère stratégique pour les États : Organisation mondiale de la santé (OMS), Organisation mondiale du commerce (OMC), Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ou encore, en raison de son rôle dans la production des normes, l'Union internationale des télécommunications (UIT).

Au plan technique, enfin, le système onusien est à ce jour le seul ensemble à produire et mettre à disposition des données fines, comparables et exploitables pour un aussi grand nombre d'organisations.

Cette situation plaide, d'ailleurs, aux yeux des rapporteurs pour que l'État se dote d'un outil de veille permettant de centraliser sur longue période les informations relatives aux versements effectués par l'ensemble des donateurs à l'ensemble des organisations internationales.

Recommandation n° 8 : Développer au sein de l'État un outil de veille permettant de suivre sur longue période et pour l'ensemble des organisations internationales, l'évolution des contributions versées par l'ensemble des donateurs.

Pour l'ensemble de ces motifs, les rapporteurs se sont appuyés sur les données fournies par le Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination (CEB) pour mettre à jour des tendances dans l'action des États en matière de contributions aux organisations internationales.

Le premier constat qui doit être dressé est celui de la place prépondérante qu'occupent les États-Unis dans le système onusien dont ils assurent près du tiers des financements (11,6 milliards de dollars en 2020) loin devant l'Allemagne (5,7 milliards de dollars) pourtant deuxième contributeurs et la France, septième contributeur.

Le second constat qui peut se dégager est celui de l'importance qu'occupent, pour un certain nombre d'États, les contributions volontaires dans le total des versements qu'ils opèrent.

Ainsi, en 2020, les contributions volontaires constituaient le levier principal de financement du système onusien pour l'ensemble des huit premiers financeurs à l'exception de deux États, la Chine et la France.

Principaux contributeurs au système des
Nations-Unies en 2020

(en milliards de dollars)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Or, comme les rapporteurs le préciseront infra , cette situation révèle une orientation discutable de la stratégie d'influence de la France.

En effet, si la progression des contributions obligatoires de la Chine , sous l'effet du dynamisme de son économie , lui permet de limiter et de cibler davantage ses investissements sous forme de contributions volontaires , la France se trouve quant à elle dans une situation tout à fait différente. Son poids dans l'économie mondiale se réduit, ce qui se traduit par un ralentissement de la croissance de ses contributions obligatoires .

Alors que ce même contexte a conduit ses partenaires , comme l'Allemagne et le Royaume-Uni, à investir significativement le terrain des contributions volontaires, la France a trop faiblement réagi.

2. Le poids de la France dans le financement du multilatéralisme s'est réduit

Entre 2013 et 2020, la France est parvenue peu ou prou à maintenir son rang en matière de contributions aux organisations du système onusien.

Ainsi, alors qu'elle était le 8 ème contributeur financier à ces institutions en 2013 elle se classait 7 ème en 2020, non sans avoir été rétrogradée à la 10 ème place en 2014 puis entre 2017 et 2019.

Évolution de la place de la France dans le classement des contributeurs étatiques aux organisations onusiennes 7 ( * ) entre 2010 et 2020

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Malgré ces résultats qui peuvent être salués en termes de classement, les rapporteurs observent que la part que représente la France dans l'ensemble des contributions gouvernementales au système des Nations-Unies n'a cessé de chuter sur la période.

Ainsi, alors qu'elle assurait 3,7 % des financements en 2010, elle ne contribuait plus, en 2020, qu'à hauteur de 2,7 %.

Or, plus que le classement - qui constitue pour autant un indicateur de tendance utile -, c'est davantage la part des ressources apportées par un État qui commande la réalité de son influence au sein d'une organisation.

Part de la France dans l'ensemble des contributions étatiques perçues par les organisations du système des Nations-Unies entre 2010 et 2020

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Cette dynamique trouve son explication dans la contraction tendancielle de la part qu'occupe la France dans l'ensemble des financements perçus sous forme de contributions obligatoires. En effet, alors qu'elle versait 7 % des contributions obligatoires bénéficiant au système onusien en 2010, elle ne représentait plus que 5,1 % de ces versements en 2020.

Part de la France et d'autres pays dans l'ensemble des contributions obligatoires perçues par les organisations des Nations-Unies entre 2010 et 2020

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Néanmoins, cette situation n'est pas propre à la France et affecte la plupart des pays occidentaux . Ainsi, tant l'Allemagne, que le Royaume-Uni ou les États-Unis ont vu chuter sur la période la part de leurs contributions obligatoires dans l'ensemble des versements.

Elle trouve l'une de ses principales explications dans l'affaiblissement de la part qu'occupent ces États dans l'économie mondiale alors que cet indicateur constitue l'une des principales variables des barèmes intervenant dans le calcul des contributions obligatoires.

Ainsi, les parts respectives du revenu national brut (RNB) du Royaume-Uni, des États-Unis, de la France et de l'Allemagne se sont réduites de 1,1 à 2,0 points de pourcentage entre 2005 et 2020.

Variation du poids du revenu national brut de plusieurs
pays dans le revenu mondial brut entre 2005 et 2020

(en points de pourcentage)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

En sens inverse, le poids de la Chine dans l'économie mondiale mesuré comme le rapport entre son RNB et le RNB mondial a progressé
de 12,7 points de pourcentage sur la même période.

Cela s'est traduit par une hausse très sensible (+ 9,5 points de pourcentage) de la part des contributions obligatoires versées par la Chine entre 2010 et 2020 dans l'ensemble des financements perçus sous cette forme par les organisations du système onusien.

Évolution du poids de la Chine et de la France dans l'ensemble des contributions obligatoires perçues par les organisations du système onusien entre 2010 et 2020

(en pourcentage)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

En parallèle - et quoique dans une moindre ampleur -, la part des contributions obligatoires versées par d'autres pays émergents , comme le Brésil, l'Arabie Saoudite ou la Turquie, a progressé sensiblement entre 2010 et 2020.

Évolution du poids de certains pays émergents dans l'ensemble des contributions obligatoires perçues par les organisations du système onusien entre 2010 et 2020

(en pourcentage)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Cette situation s'explique par une légère progression du poids de leur RNB dans l'ensemble (+ 0,2 point de pourcentage entre 2005 et 2020 pour l'Arabie Saoudite) ou par une contraction bien moins sensible que celle constatée dans les pays occidentaux (- 0,2 point de pourcentage sur la même période pour la Turquie).

Compte tenu du recul de leur poids dans l'ensemble des contributions obligatoires, les pays développés - dont la France - ont été appelés à renforcer significativement le niveau de leurs contributions volontaires pour maintenir, a minima , leur influence au sein du système onusien.

3. La France a fait preuve d'attentisme dans l'évolution de ses contributions volontaires au prix d'une perte d'influence dans le système onusien

Or, en matière de contributions volontaires, l a France se trouvait dans une situation particulièrement difficile au début des années 2010.

Explication méthodologique :
le recours à une moyenne glissante sur trois années

Pour l'examen des contributions volontaires versées par chaque pays à chacune des organisations bénéficiaires sur la période 2010-2020, les rapporteurs ont décidé de recalculer une moyenne glissante sur trois années.

En d'autres termes, le montant retenu pour l'analyse au titre d'une année N correspond à la moyenne des versements effectués en (N-2, N-1 et N). Par construction, cela implique que les données sont au mieux prises en compte à partir de l'année 2012 dans la mesure où l'année de départ de la période du jeu de données est l'année 2010. Toutefois, afin de renforcer l'homogénéité des informations disponibles, le choix a été fait de retenir la période 2013-2020.

La décision de travailler en « moyenne glissante sur trois ans » se justifie par les modalités de versements des contributions volontaires par les États. En effet, si certains d'entre eux décaissent chaque année leurs contributions, d'autres versent un montant important au titre d'une année puis ne versent rien ou très peu l'année suivante. Un exemple éclairant réside dans la situation des versements du Japon au Fonds international de développement agricole (FIDA).

Évolution des contributions volontaires au Fonds international de développement agricole

(en millions de dollars)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

En effet, le Japon verse ses contributions volontaires au FIDA par cycle contrairement, par exemple, à la France. Ainsi, si l'on cherchait à comparer la place qu'occupe le Japon dans le financement de l'organisation en 2011, on parviendrait à la conclusion que le pays ne contribue pas et n'exerce, par suite, aucune influence sur cette dernière. Cette analyse serait naturellement erronée en ce qu'elle ignorerait le poids des financements passés.

En recalculant une moyenne glissante sur trois ans des versements, on obtient à l'inverse une courbe de tendance des contributions japonaises qui permet de comparer l'effort financier du pays à celui de ses partenaires. Cette méthode n'empêche pas, par ailleurs, de mettre à jour les tendances de fonds comme, dans le cas présent, la forte augmentation des contributions chinoises sur la période.

Source : commission des finances du Sénat

Ainsi, en 2013, la France n'assurait que 0,9 % des contributions volontaires au système onusien en moyenne glissante sur trois année s ce qui la situait à la 22 ème position .

Classement des principaux financeurs du système onusien en contributions volontaires en 2020

(en pourcentage des contributions volontaires
perçues par le système onusien)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

La France a néanmoins réagi de façon sensible à compter de l'année 2017 en faisant passer le montant moyen de ses contributions volontaires d'environ 200 millions de dollars à plus de 380 millions
de dollars.

Évolution du montant et du poids des contributions volontaires françaises au système onusien

(en millions de dollar - en pourcentage)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Cet effort lui a permis d'augmenter son poids dans l'ensemble des contributions volontaires versées au système onusien qui est ainsi passé
de 0,9 % en 2013 à 1,6 % en 2020.

Évolution comparée du montant des contributions volontaires au système des Nations-Unies

(en millions de dollar)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Pour autant, l'effort consenti en faveur du système
onusien (+ 179 millions de dollars) peut difficilement se comparer à celui fourni par nos partenaires et plus particulièrement par
l'Allemagne (+ 2 940 millions de dollars) , le Royaume-Uni ou encore la Suède.

Quoique que substantiel le renforcement des contributions françaises a donc été limité en comparaison de nos partenaires , ce qui s'est traduit par de moindres gains d'influence au sein des organisations internationales.

Ainsi, sur la période 2013-2020, la France a rejoint le groupe des cinq principaux contributeurs volontaires de cinq nouvelles organisations portant le nombre total d'organisations où elle se trouve dans cette situation à six.

Dans le même temps, l'Allemagne parvenait à devenir l'un des principaux contributeurs volontaires de 18 nouvelles organisations internationales, portant le nombre total des organisations concernées à 26.

Évolution du nombre d'organisations du système onusien où le pays figure parmi les cinq principaux contributeurs volontaires

(en nombre d'organisations)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

Cet accroissement des écarts en termes de capacités d'influence entre la France et ses partenaires sur le terrain des contributions volontaires est d'autant plus problématique qu'il se manifeste également lorsque l'on tient compte des contributions obligatoires.

Or, et comme les rapporteurs l'ont mentionné plus avant, certains États comme la Chine bénéficient de l'inertie générée par la hausse mécanique de leurs contributions obligatoires et ont beaucoup moins besoin de mobiliser le vecteur des contributions volontaires pour gagner en influence.

Ainsi, en tenant compte de l'ensemble des contributions versées à titre obligatoires ou volontaires, la France n'a rejoint le groupe des cinq premiers contributeurs d'une organisation que dans quatre cas
entre 2013 et 2020
et - surtout - a été dépassée sur ce point par la Chine
dès 2018
.

Évolution du nombre d'organisations du système onusien où le pays figure parmi les cinq principaux contributeurs obligatoires et volontaires

(en nombre d'organisations)

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

En définitive, les rapporteurs observent que la stratégie de renforcement des contributions volontaires mise en oeuvre par la France entre 2013 et 2020 s'est avérée attentiste et a produit des résultats mitigés .

En effet, nos contributions volontaires ont évolué en moyenne annuelle dans des proportions bien moins importantes que celles de l'Allemagne, de la Chine et du Royaume-Uni.

Ainsi, le taux de croissance annuel moyen de nos contributions se situe, pour l'essentiel des organisations bénéficiaires, entre - 15 % et + 15 % là où nos partenaires n'ont pas hésité, sur la même période, à faire croitre chaque année la majorité de leurs contributions de + 10 % à + 70 %.

L'évolution moyenne des contributions volontaires de certains États peut présenter un caractère spectaculaire qui témoigne autant qu'il dévoile leurs priorités stratégiques.

Ainsi, la Chine a augmenté le montant de ses contributions volontaires à l'Union internationale des télécommunications (UIT) d'environ 60 % chaque année pendant sept ans.

La circonstance que l'UIT constitue l'une des enceintes de définition des standards internationaux en matière de télécommunication n'est probablement pas fortuite.

Synthèse du degré d'investissement financier et de l'ampleur des gains d'influence retirés par plusieurs pays dans l'évolution de leurs contributions volontaires au système des Nations-Unies

Lecture : le désengagement de la France dans le financement de l'Union internationale des télécommunications (- 20 % par an en moyenne sur la période 2013-2020) s'est traduit par un recul de son influence mesurée par son poids dans l'ensemble des financements perçus par l'organisation sous la forme de contributions volontaires. En sens inverse, la Chine a poursuivi une stratégie de financement volontariste en faveur de cette organisation (+ 60 % par an en moyenne sur la période 2013-2020) ce qui lui a permis d'accroitre de près de 7 points de pourcentage la part qu'elle occupe dans les ressources de l'organisation sous forme de contributions volontaires.

* La période d'examen diffère selon l'organisation et le pays concerné. Elle est fonction de l'année à partir de laquelle le pays a effectué sa première contribution volontaire à l'organisation. Pour l'essentiel, cette période est de sept ans, couvrant les années 2013 à 2020. Le montant des contributions est regardé en moyenne glissante sur trois années conformément et pour les raisons évoquées dans la note méthodologique figurant en début de partie.

Source : commission des finances d'après les données publiées par l'ONU

La contrepartie de notre plus faible appétence à renforcer nos contributions volontaires sur la période réside dans les moindres gains d'influence enregistrés comparativement à nos partenaires.

En effet, la part de la France dans l'ensemble des contributions volontaires perçues par une organisation ne s'est renforcée sensiblement qu'envers l'Organisation internationale du travail (OIT).

A l'inverse, la Chine a enregistré des gains d'influence très importants auprès de l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (+ 7 points de pourcentage dans l'ensemble des contributions volontaires entre 2013 et 2020), de l'Organisation météorologique mondiale (+ 10 points de pourcentage) et de
l'Union internationale des télécommunications
(+ 7,5 points de pourcentage).

Il peut être relevé que ces gains d'influence ont sans doute contribué à permettre à la Chine d'obtenir ou de conserver, pour ses ressortissants, les postes de directeur général de l'ONUDI (2013), de Secrétaire-général de l'UIT (2014 et 2018) ou, encore, de sous-Secrétaire général de l'OMM (2016).

L'Allemagne et le Royaume-Uni ont, également, sensiblement renforcé leur influence au sein de plusieurs organisations internationales .

Par exemple, l'Allemagne est devenue le premier financeur de l'Institut des Nations unies pour la formation et la recherche (UNITAR) et de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).

De ce point de vue, elle a su se constituer comme un financeur prépondérant et critique pour certaines organisations ce qui réduit d'autant plus l'influence des financeurs minoritaires.

Tel est, par exemple, le cas s'agissant d'UNITAR, organisation dont l'Allemagne apportait, en 2020, plus du tiers des financements.

Dans ce contexte, l es moyens dont dispose et qu'entend mobiliser la France pour préserver et renforcer son poids au sein des organisations internationales du système onusien apparaissent central pour les rapporteurs.


* 7 Se référer au tableau page 43 et 44 pour connaître la liste des organisations concernées.

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