EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
CHAPITRE Ier
Dispositions relatives au droit de la consommation
Article 1er
Modification des obligations des exploitants
d'infrastructures de recharge en carburants alternatifs
et des sanctions et contrôles applicables
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à modifier les obligations des exploitants d'infrastructures de recharge en carburants alternatifs ainsi que les sanctions et les contrôles applicables en cas de manquement à ces obligations.

La commission, sur la proposition du rapporteur, a conforté l'article en adoptant un amendement ( COM-42) pour :

- étendre la compétence de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à l'ensemble des dispositifs de paiement prévus par le droit européen ;

- garantir l'absence de doublons entre les sanctions administratives mises en oeuvre par la DGRCCF et celles appliquées par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) ;

- permettre à l'ensemble des zones non interconnectées au réseau dit « métropolitain continental » (ZNI), dans le respect du cadre fixé par la loi organique, de bénéficier de la dérogation à l'obligation d'installation d'infrastructures de ravitaillement en hydrogène permise par le droit européen.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une insuffisante prise en compte des nouvelles obligations européennes relatives aux infrastructures de recharge en carburants alternatifs dans les contrôles et les sanctions par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

A. Les agents de la DGRCCF disposent de pouvoirs de contrôle et de sanctions étendus

Institué par l'ordonnance dite « Consommation », du 14 mars 20163(*), issue de la loi dite « Consommation », du 17 mars 20144(*), l'article L. 511-7 du code de la consommation fixe les infractions et les manquements pouvant être recherchés par les agents habilités de la DGCCRF.

Parmi ces infractions et manquements figurent les règles européennes en matière de paiements transfrontaliers (3°)5(*), de virements et de prélèvements (6°)6(*) ou de commissions d'interchange (20°)7(*).

Récemment, la promotion, directe ou indirecte, de produits et de services financiers par les personnes exerçant l'activité d'influence commerciale par voie électronique a été ajoutée à la liste de ces infractions et manquements, par la loi dite « Influenceurs », du 9 juin 20238(*).

De plus, le code de la consommation prévoit des sanctions liées à l'information des consommateurs (articles L. 131-1 à L. 131-7), aux pratiques commerciales interdites (articles L. 132-1 A à 132-24-2) et aux pratiques commerciales réglementées (articles L. 132-25 à L. 132-28). Au sein de ces dernières pratiques sont visées la publicité comparative (article L. 132-25), les offres et opérations promotionnelles proposées par voie électronique (article L. 132-26) et l'appellation boulanger et enseigne de boulangerie (articles L. 132-27 à L. 132-28).

B. Le règlement « Afir » prévoit de nouvelles obligations en matière d'infrastructures de recharge en carburants alternatifs

Le règlement sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs, dit « Afir »9(*), du 13 septembre 202310(*), vise à fixer des objectifs contraignants et de cadres d'action nationaux pour réaliser un tel déploiement, modifiant ainsi une précédente directive du 22 octobre 201411(*).

En matière d'électromobilité, le règlement prévoit l'installation de parcs de recharge à 60 kilomètres (km) d'intervalle, d'une puissance totale de 600 kilowatts (kW), le long du réseau routier central, d'ici le 31 décembre 2027, et du réseau routier global, d'ici le 31 décembre 2035 (article 3)12(*).

S'agissant de l'hydrogène, il propose l'installation de stations d'hydrogène ouvertes au public à 200 kilomètres d'intervalle, d'une capacité minimale cumulée d'une tonne par jour et équipée d'un distributeur d'au moins 700 bars, le long du réseau routier central, ainsi qu'une station dans chaque noeud urbain, d'ici le 31 décembre 2030 (article 6).

Ces infrastructures de recharge doivent disposer de paiements électroniques et de facturations transparentes (articles 5 et 7).

Complémentairement, le règlement fixe des objectifs d'alimentation électrique des ports maritimes et intérieurs (articles 9 et 10), de fourniture d'électricité aux aéronefs en stationnement (article 12), d'approvisionnement en méthane liquéfié dans les ports maritimes (article 11), de développement de technologies et de systèmes de propulsion à hydrogène ou par batterie des infrastructures ferroviaires non électrifiables (article 13).

Pour la mise en oeuvre de ces dispositions, les États membres doivent élaborer et transmettre à la Commission européenne un projet de cadre d'action national pour le développement du marché des carburants alternatifs dans le secteur des transports et le déploiement des infrastructures correspondantes (article 14). Ce cadre d'action fait l'objet d'une évaluation et d'un suivi (articles 17 et 18).

Fait notable, le règlement prévoit la mise à disposition d'informations pertinentes, cohérentes et claires s'agissant des véhicules à moteur mis sur le marché qui peuvent être rechargés ou ravitaillés régulièrement. Cette mise à disposition doit être réalisée, tout à la fois, par les fabricants, dans les manuels d'utilisation des véhicules et sur les véhicules, par les exploitants, dans les points de recharge et de ravitaillement, ainsi que par les distributeurs, chez les concessionnaires automobiles. De plus, une expression graphique, si elle existe, doit être apposée de manière visible par les exploitants des points d'avitaillement, sur les pompes et les pistolets, et par les fabricants, à proximité immédiate des bouchons de remplissage des véhicules ainsi que dans les manuels de remplissage de ces véhicules (article 19).

C. Le Sénat s'est déjà prononcé sur l'intérêt, mais aussi les limites du règlement « Afir »

La commission des affaires économiques, dans le rapport d'information sur le volet « Énergie » du paquet Ajustement 55 »13(*), a en effet, préconisé, s'agissant du règlement précité :

- de renforcer les objectifs contraignants de déploiement des infrastructures de recharge électrique, a minima celles destinées aux véhicules utilitaires légers ;

- de mieux intégrer le gaz naturel liquéfié (GNL), le gaz naturel comprimé (GNC), le biogaz liquéfié (bio-GNL) et le biogaz comprimé (bio-GNC) ainsi que les différents biocarburants et les carburants synthétiques ;

- de renforcer et d'anticiper l'objectif prévu pour les infrastructures de recharge à hydrogène ;

- d'appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone dans l'appréciation des carburants durables.

Ces travaux ont donné lieu à l'adoption d'une proposition de résolution européenne (PPRE)14(*) commune aux commissions sénatoriales des affaires économiques, de l'aménagement du territoire et du développement durable et des affaires européennes.

II. Le dispositif envisagé - Un renforcement des pouvoirs de contrôle et de sanction des agents de la DGCRRF en matière d'infrastructures de recharge pour carburants alternatifs

L'article 1er vise à modifier les obligations des exploitants d'infrastructures de recharge en carburants alternatifs ainsi que les sanctions et les contrôles applicables en cas de manquement à ces obligations.

Le I permet aux agents de la DGCCRF de contrôler le respect par les exploitants de bornes de recharge électrique ouvertes au public des éléments suivants :

- acceptation des paiements électroniques, comme les lecteurs de cartes de paiement et les dispositifs sans contact, à l'exception des dispositifs utilisant une connexion internet dont les codes QR15(*) ;

- proposition d'une option permettant soit d'effectuer une recharge à l'acte, soit d'utiliser une autre solution de recharge contractuelle ;

- proposition de prix raisonnables, aisément et clairement comparables, transparents et non discriminatoires ;

- proposition d'un prix de l'électricité livrée par kilowattheure (kWh) et de frais éventuels d'occupation en prix par minute, avec une information claire et anticipée16(*) permettant une comparaison17(*) ;

- proposition d'un prix de l'électricité ad hoc, comprenant tous les éléments de prix, avec une information claire, aisée et anticipée18(*) permettant une comparaison19(*) ;

- surveillance du marché des infrastructures de recharge, dont les pratiques commerciales déloyales affectant les consommateurs ;

- signalement du lieu exact des infrastructures de recharge sur les aires de stationnement et de repos le long des réseaux routiers transeuropéens de transport.

Le I vise également à contrôler le respect par les exploitants de points de ravitaillement en hydrogène ouverts au public des éléments suivants :

- acceptation des paiements électroniques, comme les lecteurs de cartes de paiement et les dispositifs sans contact ;

- proposition de prix raisonnables, aisément et clairement comparables, transparents et non discriminatoires ;

- proposition d'un prix ad hoc de l'hydrogène par kilogramme, avec une information claire, aisée, anticipée20(*) permettant une comparaison ;

- proposition d'une option permettant d'utiliser une autre solution de ravitaillement contractuelle.

Enfin, il a aussi pour objet la mise à disposition par les distributeurs d'informations pertinentes, cohérentes et claires chez les concessionnaires automobiles.

Le II applique une sanction administrative de 3 000 euros pour une personne physique et de 15 000 euros pour une personne morale, en cas de manquement aux obligations précitées.

Le III exonère les collectivités territoriales régies par l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion) et Saint-Martin de l'application des objectifs pour les infrastructures de ravitaillement en hydrogène des véhicules routiers.

III. La position de la commission - De nouvelles modalités de contrôle et de sanctions utiles aux administrations, ne soulevant pas l'opposition des acteurs économiques ou locaux

A. Les contrôles proposés correspondent globalement aux besoins des administrations interrogées

Entendue par le rapporteur, la DGCCRF a indiqué que la disposition répondait aux besoins en matière d'information et de protection des consommateurs.

Pour autant, elle a précisé que la mise en oeuvre de ces nouvelles missions nécessiterait des moyens humains supplémentaires en termes d'équivalents temps plein (ETP) supplémentaires.

C'est la raison pour laquelle dans sa contribution transmise, la DGCCRF précise : « Le rythme de création de stations de recharge pour véhicules électriques dépasse largement l'érosion progressive du nombre de stations-service. On notera toutefois que certaines stations de recharge sont implantées dans les stations-service. Le nombre d'établissements que la DGCCRF est en charge de contrôler devrait toutefois être en hausse sur l'ensemble des missions (carburants, recharge électrique, hydrogène). Cela nécessitera quelques ETP supplémentaires. »

Si certaines obligations prévues par le règlement ne sont pas visées, c'est, selon la DGCCRF, parce qu'elles relèvent de la compétence d'autres administrations :

- la Banque de France, pour les dispositifs de paiement sur Internet ;

- la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), pour les caractéristiques techniques des points de recharge ou d'avitaillement, l'apposition d'informations dans les manuels, les véhicules ou ces points de recharge ou d'avitaillement, et, plus généralement, les objectifs d'installation en matière d'électricité, d'hydrogène ou de méthane liquéfié.

Sollicitée par le rapporteur, la Banque de France a rappelé qu'elle exerçait une mission de surveillance de la sécurité des moyens de paiement, prévue à l'article L. 141-4 du code monétaire et financier.

Elle a affirmé que la compétence en matière de vérification des dispositifs de paiement sur Internet relevait plutôt de la DGCCRF : « Il n'y a aucune raison de différencier la responsabilité du contrôle de ces points a et b d'une part et du point c d'autre part : ces contrôles, qui sont de même nature et qui ne concernent pas la sécurité mais la question de la vérification du respect, par les commerçants, du choix du législateur de permettre l'accès à un certain (ou plusieurs) type(s) de moyen(s) de paiement donné(s) dans un cas particulier, devraient donc tous incomber à la DGCCRF. »

Le rapporteur estime que la compétence en matière de contrôle des dispositifs de paiement sur Internet, qui ne semble à première vue être réclamée ni par la DGCCRF, ni par la Banque de France, doit pourtant bien être confiée à une administration, faute de quoi le c du 1 de l'article 5 du règlement n° 2023/1804 du 13 septembre 2023 ne serait pas pleinement intégré au droit national.

À la demande du rapporteur, et pour éviter tout vide juridique, la DGCCRF, a admis la nécessité d'une habilitation, en ces termes : « Puisqu'il s'agit de contrôler la présence du moyen de paiement (et non pas de savoir par nous même si le moyen de paiement particulier du c est ou n'est pas sécurisé, ce pour quoi nous aurons besoin des compétences de la Banque de France), une habilitation sur l'ensemble du 1 serait requise. »

De son côté, la DGEC, entendue par le rapporteur, a affirmé préférer des modifications réglementaires, plutôt que législatives, des contrôles et des sanctions à sa disposition.

La contribution transmise par la DGCCRF indique en effet : « La DGEC a prévu d'habiliter ses agents par la voie réglementaire de manière à ce qu'ils puissent contrôler et sanctionner l'ensemble des dispositions du règlement Afir qui la concernent. La DGEC a considéré qu'une habilitation de niveau législatif n'était pas nécessaire (les agents du MTECT sont habilités dans la partie réglementaire du code de l'environnement). »

Le rapporteur prend acte du choix ainsi opéré.

Il constate que la précédente directive du 22 octobre 2014 a été transposée par un décret du 12 janvier 201721(*). Il relève aussi que l'article L. 142-20 du code de l'énergie fixe le pouvoir d'enquête du ministre de l'énergie et l'article L. 142-37 celui de recherche et de constatation des agents habilités par lui. Enfin, il note que les articles L. 353-4 et L. 641-4-2 du code de l'énergie se contentent de fixer le principe de l'obligation d'interopérabilité des infrastructures de recharge ouvertes au public, dont les modalités sont précisées par un décret en Conseil d'État.

Sur ce fondement a été pris un décret n° 2021-1561 du 3 décembre 2021 relatif à l'obligation d'interopérabilité de l'infrastructure de recharge ou de ravitaillement en carburants alternatifs ouverte au public.

Interrogée plus en détail sur les modifications réglementaires envisagées, la DGEC a précisé que le nouveau cadre européen implique « des modifications d'adaptation du décret n° 2017-126 du 12 janvier 2017 qui sera, par la même occasion, intégralement codifié dans le code de l'énergie, ce qui complétera la compétence de contrôle sur les éléments du ressort du ministère chargé de l'énergie ».

B. La sanction proposée reprend les montants maximaux d'ores et déjà prononcés en matière de consommation

Lors de son audition, la DGCCRF a précisé que les montants proposés - de 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale - de même que les conditions visées - en l'espèce, la référence au chapitre II du titre II du livre V du code de la consommation - correspondent aux dispositions déjà prévues par ce code.

Aussi a-t-elle indiqué dans sa contribution transmise au rapporteur que « ces montants correspondent en effet aux montants d'amende administrative prononcés à l'encontre d'une personne physique (3 000 euros) ou d'une personne morale (15 000 euros). Ces montants sont les montants maximums pouvant être prononcés par l'administration dans le cas de manquements à la réglementation. Toutes les amendes administratives présentent ces montants maximums et sont prononcés dans les conditions prévues par le code de la consommation. »

Le rapporteur prend acte du choix ainsi effectué.

Il constate que la rédaction est calquée sur celle en matière d'information précontractuelle (L. 131-1 à L. 131-6 du code de la consommation), de numéro de téléphone d'assistance (L. 132-21 du même code), de recueil du consentement (L. 132-22 du même code) ou d'offres ou d'opérations électroniques (L. 132-26 du même code).

Cependant, il relève que les montants proposés sont très supérieurs à ceux prévus par le code de l'énergie : ainsi, l'article R. 553-4-3 du code de l'énergie prévoit une amende administrative dont le montant maximal est de 300 € en l'absence d'interopérabilité des infrastructures de recharge pour carburants alternatifs.

De plus, il s'interroge plus globalement sur l'articulation entre les sanctions appliquées par la DGCCRF, au titre de la consommation, et celles appliquées par la DGEC, au titre du code de l'énergie, estimant nécessaire d'éviter tout cumul de sanctions administratives.

C. Les exonérations envisagées pour l'installation de stations d'hydrogène répondent à des nécessités territoriales

Au cours de son audition, la DGCCRF a précisé que l'exemption prévue en matière d'installation d'infrastructures de ravitaillement en hydrogène des véhicules routiers dans les collectivités ultramarines (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion, Saint-Martin) leur a été soumise à consultation au préalable.

C'est la raison pour laquelle elle a indiqué, dans la contribution transmise au rapporteur : « Le conseil territorial de Saint-Martin, les assemblées de Guyane et de Martinique, le conseil départemental de Mayotte et les conseils régionaux et départementaux de la Guadeloupe et de La Réunion ont été saisis de cette disposition à titre obligatoire le 20 octobre 2023. »

Le rapporteur relève que le Gouvernement recourt uniquement à la dérogation prévue pour les régions ultrapériphériques, prévue au a du paragraphe 5 de l'article 6 du règlement n° 2023/1804 du 13 septembre 2023, et non à celle pour les îles relevant de la définition des petits réseaux connectés ou des petits réseaux isolés, prévue au b du même 5.

Cela ne permet pas de couvrir les autres ZNI, telles que la Corse ou les îles d'Ouessant, de Molène, de Sein et de Chausey22(*).

Or, une adaptation de l'obligation d'installation précitée peut également y être pertinente, sous réserve du respect de la compétence dévolue en matière d'énergie à certaines ZNI par la loi organique.

À la demande du rapporteur, et pour garantir la sécurité juridique, la DGEC est en effet convenue que « la loi organique s'applique [...] si un territoire est compétent dans un domaine ».

D. La disposition proposée ne soulève pas de difficulté particulière parmi les acteurs économiques interrogés

Dans le cadre de ses travaux, le rapporteur a pris l'attache des principaux acteurs économiques concernés.

L'Association pour le développement de la mobilité électrique - France (Avere-France) et le groupe EDF lui ont indiqué ne pas s'opposer à l'évolution proposée.

En revanche, ils se sont interrogés sur l'articulation des sanctions prévues par le code de la consommation avec celles prévues par le code de l'énergie.

De leur côté, ni France Hydrogène, ni France gaz n'ont fait part de difficulté particulière.

***

En définitive, dans un souci de complétude, le rapporteur a proposé un amendement (COM-42) visant à :

- étendre la compétence de la DGCCRF à l'ensemble des dispositifs de paiement prévus ;

- garantir l'absence de doublons entre les sanctions administratives mises en oeuvre par la DGRCCF et celles appliquées par la DGEC ;

- permettre à l'ensemble des ZNI, dans le respect du cadre fixé par la loi organique, de déroger à l'obligation d'installation d'infrastructures de ravitaillement en hydrogène.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Adaptation du code de la consommation au règlement
sur la sécurité générale des produits (RSGP)
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à adapter le code de la consommation au nouveau cadre issu du règlement européen (UE) 2023/988 du Parlement et du Conseil du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits (RSGP), applicable à compter du 13 décembre 2024.

La commission a adopté deux amendements de précision juridique.

I. La situation actuelle - L'obligation de sécurité générale des produits, inscrite au code de la consommation, découle de directives européennes

A. L'obligation de sécurité générale des produits vise principalement les producteurs et les distributeurs

1) Le cadre européen relatif à la sécurité générale des produits

La directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits fixe notamment :

i) une obligation de sécurité générale pour les produits de consommation non alimentaires ;

ii) les pouvoirs des États membres afin d'assurer le contrôle des obligations des producteurs et distributeurs de ces produits ;

iii) les obligations d'échange d'informations des autorités nationales dans le cadre du dispositif d'alerte rapide sur les produits dangereux, « Rapex ».

Cette directive s'applique aux produits de consommation non alimentaires23(*) dans la mesure où ils ne sont pas régis par une législation d'harmonisation sectorielle de l'Union européenne24(*).

2) L'obligation de sécurité des produits au sein du code de la consommation

Le chapitre Ier du Titre II du Livre IV du code de la consommation25(*) fixe l'obligation de sécurité générale des produits et précise notamment :

- les acteurs concernés par cette obligation : les producteurs et les distributeurs26(*), dont les définitions sont issues de la directive 2001/95/CE ;

- le champ des produits concernés, qui, conformément à la même directive, exclut les antiquités et les produits d'occasion nécessitant une réparation ou une remise en état lorsque cela est explicitement mentionné27(*) ;

- les contours de cette obligation de sécurité : les produits sont présumés satisfaire l'obligation de sécurité générale, fixée en référence à la « sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre »28(*), lorsqu'ils sont conformes à la réglementation spécifique ayant pour objet la santé et la sécurité du consommateur ou à certaines européennes ou nationales29(*).

Le chapitre II prévoit des mesures d'application et notamment les modalités d'interdiction et de réglementation des produits ne satisfaisant pas à l'obligation de sécurité générale.

Le chapitre III détaille les obligations des producteurs et des distributeurs en matière de sécurité des produits. Le producteur doit notamment se tenir informé des risques des produits qu'il commercialise et fournir au consommateur les informations utiles à leur évaluation30(*). Les distributeurs ont quant à eux l'interdiction de fournir des produits dont ils savent qu'ils ne satisfont pas à l'obligation de sécurité générale : ils sont donc soumis à des obligations de transmission d'informations, de traçabilité et de collaboration aux actions des autorités administratives et des producteurs31(*). L'article L. 423-3 détermine les actions à mener par les producteurs et les distributeurs lorsqu'un produit ne satisfait pas à l'obligation de sécurité générale : par exemple une information des autorités compétentes et des consommateurs, le retrait ou le rappel des produits.

Les manquements aux obligations de sécurité des produits non alimentaires sont actuellement appréhendés par la DGCCRF sous le prisme des pratiques commerciales trompeuses32(*), punies d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 300 000 euros. En effet, le chapitre II (« Sécurité ») du Titre V (« Sanctions ») du code de la consommation ne traite que des sanctions relatives aux manquements aux obligations de sécurité des produits alimentaires.

B. Les places de marché en ligne ne sont pas spécifiquement visées par ce cadre relatif à la sécurité générale des produits

Conformément à l'article 13 de la directive e-commerce33(*), transposé à l'article 6. I. 2 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (« LCEN »)34(*), les fournisseurs de places de marché sont assimilés à des hébergeurs de contenus numériques, qui ne peuvent donc voir leur responsabilité engagée pour les produits dangereux vendus sur leur interface dès lors qu'ils agissent promptement pour les retirer de leur interface lorsqu'ils ont eu connaissance de leur caractère dangereux.

Les places de marché en ligne ne sont donc en théorie pas soumises aux obligations des distributeurs en termes de vérification de la sécurité des produits. En pratique toutefois, compte tenu du contrôle que certains fournisseurs de places de marché peuvent opérer sur les vendeurs présents sur leur interface, l'administration a pu opérer des requalifications de leur statut vers celui de distributeur. C'est à ce titre que la plateforme Wish a été enjointe à se mettre en conformité avec ses obligations en matière de retrait et de rappel de produits en juillet 2021.

En dehors de la requalification vers le statut de distributeur, le code de la consommation prévoit néanmoins que les places de marché puissent être mobilisées afin d'assurer la sécurité des produits proposés aux consommateurs. À la suite du règlement (UE) 2019/1020 du 20 juin 2019 sur la surveillance de marché et la conformité des produits35(*), la loi portant diverses dispositions d'adaptation du droit de l'Union européenne du 5 décembre 2020 a introduit un article L. 521-3-1 au code de la consommation, qui donne à l'administration un pouvoir de réquisition numérique, lui permettant, lorsqu'elle constate un manquement en matière de conformité et de sécurité des produits en ligne et que l'auteur n'est pas identifié ou n'a pas déféré à une injonction :

- d'ordonner à un opérateur de plateforme l'affichage d'un message avertissant les consommateurs de l'accès à un contenu illicite ;

- d'ordonner, pour les infractions les plus graves, le déréférencement, la restriction d'accès voire le blocage du nom de domaine des interfaces en situation de manquement.

II. Le dispositif envisagé - La rénovation du cadre européen relatif à la sécurité générale des produits à l'aide d'un règlement implique des adaptations du droit interne

A. Le nouveau règlement relatif à la sécurité des produits (RSGP) entend améliorer le cadre européen actuel, notamment dans l'encadrement des pratiques des places de marché en ligne

En se substituant à des directives, le règlement européen sur la sécurité générale des produits (RSGP) vise à appliquer de manière plus uniforme les règles de sécurité relatives aux produits au sein de l'Union européenne. Dans le rapport d'analyse d'impact accompagnant la proposition de règlement, la commission estime qu'en révisant le cadre à l'aide d'un règlement, le montant du dommage causé aux consommateurs par les produits dangereux, estimé à 19,3 milliards d'euros, devrait baisser d'environ 1 milliard d'euros au cours de la première année de mise en oeuvre du règlement, puis de 5,5 milliards d'euros au cours des dix prochaines années. En incluant également les produits ayant l'apparence de denrées alimentaires, jusqu'alors régis par une directive de 198736(*), adoptée à une époque où le cadre juridique relatif était moins exigeant, le RSGP entend clarifier et harmoniser le cadre relatif à la sécurité de ces produits.

De plus, le RSGP procède aux améliorations suivantes :

- il améliore l'efficacité des systèmes de rappels de produits dangereux, via la refonte du système Rapex, renommé Safety Gate ;

- il renforce les obligations de tous les acteurs de la chaîne de valeur, par exemple en matière de mise en place de processus internes et de coopération avec les autorités de surveillance nationales. Au-delà du distributeur et du producteur, il introduit la notion d'« opérateur économique », qui inclut le fabricant et son éventuel mandataire, l'importateur, le distributeur et l'éventuel prestataire de services d'exécution de commandes ;

- il renforce la coopération des fournisseurs de places de marché en ligne en matière de sécurité des produits. Leurs obligations spécifiques, prévues à l'article 22, incluent notamment leur enregistrement sur Safety Gate, la création d'un point de contact unique dédié à la communication avec les autorités nationales sur la sécurité des produits dans chaque État membre, ainsi que la mise en oeuvre de processus internes en matière de sécurité des produits. Le RSGP rappelle également que l'obligation de « conformité dès la conception » des interfaces, conformément au règlement 2022/206537(*) sur les services numériques, est applicable en matière de sécurité des produits. Enfin, il précise les pouvoirs des autorités nationales pour mettre en oeuvre l'injonction de retrait d'un contenu dangereux d'une interface en ligne - déjà prévue par le règlement 2019/1020 et l'article L. 521-3-1 du code de la consommation.

B. Les adaptations du code de la consommation rendues nécessaires par le RSGP sont néanmoins limitées

Les dispositions d'un règlement étant directement applicables, il importe pour le législateur de ne pas retranscrire intégralement son contenu dans l'ordre normatif national mais de modifier les dispositions du droit national lui étant incompatibles.

Ainsi, l'article 2 du présent projet de loi vise à adapter le code de la consommation, notamment en :

- tirant les conséquences de la définition de l'« opérateur économique » prévue par le règlement 2023/988 : les définitions inscrites à l'article L. 421-1 ainsi que l'intitulé du titre du chapitre III sont donc modifiées ;

- posant, à l'article L. 421-2, l'obligation de sécurité générale des produits en référence au règlement 2023/988 et non plus en référence à « la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre » comme cela est actuellement le cas à l'article L. 421-3. La portée de cet article serait donc restreinte à la sécurité des services ;

- abrogeant certains articles : en effet, un certain nombre de précisions, posées par le RSGP et donc directement applicables, n'ont plus à être mentionnées au code de la consommation. Tel est le cas, par exemple, de la non-application de l'obligation de sécurité générale aux antiquités et aux produits d'occasion38(*), ou des obligations respectives des producteurs et des distributeurs définies aux articles L. 423-1 et L. 423-2.

L'article précise également les sanctions applicables en cas de non-respect par les fabricants et les importateurs de leurs obligations prévues par le RSGP. Il s'agit d'une des seules dispositions pour lesquelles le législateur national dispose d'une marge d'appréciation : l'article 44 du RSGP précise seulement que ces sanctions « doivent être effectives, proportionnées et dissuasives ». Le présent projet de loi fait donc le choix de calquer ce régime de sanction sur le régime applicable aux manquements aux obligations en matière de sécurité des produits alimentaires39(*), à savoir cinq ans d'emprisonnement et 600 000 euros d'amende, montant pouvant être porté de manière proportionnée aux avantages tirés du délit à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel. Les manquements des distributeurs seront quant à eux fixés par décret en Conseil d'État et punis de contraventions de 5e classe, comme les manquements aux règles de sécurité alimentaire.

Enfin, les obligations des fournisseurs de places de marché en ligne ne nécessitent pas d'adaptations au sein du code de la consommation :

- le RSGP vise les places de marché en ligne mettant en relation des consommateurs avec des professionnels (« BtoC ») tandis que le code de la consommation, en son article L. 111-7, admet une définition plus large de la place de marché en ligne, incluant la mise en relation de consommateurs entre eux. Néanmoins, la cohabitation des deux définitions n'est pas contraire au RSGP, ce dernier ne s'appliquant qu'aux plateformes permettant la conclusion de contrats à distance entre consommateurs et professionnels. La mise en relation des consommateurs entre eux est quant à elle visée par d'autres dispositions du code de la consommation ;

- le pouvoir de l'administration de formuler une injonction à l'égard des fournisseurs de plateforme en ligne afin de retirer un produit dangereux, d'en rendre l'accès impossible ou d'afficher un avertissement explicite, prévu par l'article 22, point 4, du RSGP, est quant à lui déjà prévu par l'article L. 521-3-1 du code de la consommation.

III. La position de la commission spéciale - Assurer le respect du droit européen tout en veillant à la cohérence du droit interne

La commission est sensible aux objectifs poursuivis par le RSGP en termes d'harmonisation de l'application du cadre juridique relatif à la sécurité des produits dans l'Union européenne et de renforcement des diligences des différents acteurs, notamment des places de marché en ligne. D'après la DGCCRF, en 2020, sur 129 tests de produits achetés sur 10 places de marché en ligne différentes, 32 % des produits étaient en situation de manquement par rapport aux obligations de conformité et de sécurité.

La commission constate que le présent article vise effectivement à adapter le code de la consommation au nouveau règlement sur la sécurité générale des produits, qui sera en vigueur le 13 décembre 2024. Parmi les modifications du code de la consommation opérées, la commission salue la création d'un régime de sanctions propre aux manquements des fabricants en matière de sécurité des produits.

Elle propose s deux amendements de précision juridique :

- un amendement COM-47 visant à aligner la définition de l'opérateur économique du code de la consommation sur celle du RSGP ;

- un amendement COM-48 visant à ce que les adaptations du code de la consommation au RSGP entrent bien en vigueur le 13 décembre 2024, comme le RSGP.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3
Demande d'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance pour modifier
la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale
et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à l'adaptation de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 à diverses règles européennes applicables.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à mieux encadrer la demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance.

I. La situation actuelle - Une nécessaire adaptation de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 aux observations de la Commission européenne

La loi n° 2023-451 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux a été promulguée le 9 juin 202340(*). Si la majeure partie de ses dispositions sont entrées en vigueur depuis cette date, d'autres dispositions devraient entrer en vigueur à une date différée, tandis qu'aucune mesure réglementaire d'application n'a encore été adoptée.

D'initiative parlementaire et transpartisane, les députés Arthur Delaporte et Stéphane Vojetta en étant à l'origine, cette loi, fortement soutenue par le Gouvernement et adoptée à l'unanimité des deux chambres, constitue aujourd'hui la première législation nationale au monde spécifiquement dédiée à la régulation de l'influence commerciale.

L'activité d'influence commerciale relevant des services de la société de l'information, au sens de la directive 2015/1535 du 9 septembre 201541(*), cette législation est soumise à une procédure d'information auprès de la Commission européenne. En conséquence, le 14 août 2023, la Commission européenne a transmis au Gouvernement ses observations, qui appellent une adaptation de la loi n° 2023-451 à diverses règles européennes applicables.

II. Le dispositif envisagé - Une demande d'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance pour adapter la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023

Alors qu'il n'était pas prévu, lors de la transmission initiale du projet de loi pour avis au Conseil d'État, de modifier la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023, le Gouvernement a finalement saisi le Conseil d'État de façon rectificative à trois reprises afin d'ajouter un article à cet effet. Après avoir premièrement envisagé, lors des deux premières saisines rectificatives, une modification de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 selon la procédure législative ordinaire, le Gouvernement a modifié l'avant-projet de texte pour demander une habilitation à légiférer par voie d'ordonnance lors de la dernière saisine rectificative.

Ainsi, le présent article 3 a pour objectif d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à l'adaptation de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 aux règles européennes suivantes :

- la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur42(*), dite « directive e-commerce » ;

- la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur43(*) ;

- la directive 2015/1535 du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information44(*), dite « directive SMTD » ;

- la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels45(*), dite « directive SMAD » ;

- le règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE46(*), dit « règlement DSA ».

Sans connaître le contenu du projet d'ordonnance envisagé par le Gouvernement, dont l'élaboration est en cours, les observations de la Commission européenne, l'exposé des motifs du projet de loi ainsi que les différentes saisines rectificatives du Conseil d'État permettent tout de même d'identifier les éventuelles modifications suivantes de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 :

- la précision éventuelle de la définition de l'activité d'influence commerciale prévue par l'article 1er, sous réserve qu'une telle activité entre bien dans le périmètre d'application de la directive Smad ;

- la précision du régime des interdictions de promotion fixé à l'article 4 au regard des exigences de l'article 3 de la directive -commerce définissant le principe du pays d'origine, afin de préciser que :

o l'interdiction de la promotion de la chirurgie esthétique s'applique lorsqu'il peut y avoir des risques pour la santé des personnes ;

o ce sont les produits, les actes, les procédés, les techniques et les méthodes non thérapeutiques dont la promotion est interdite lorsqu'ils sont présentés comme comparables, préférables ou substituables à des actes, à des protocoles ou à des prescriptions thérapeutiques ;

o la mention d'interdiction aux moins de dix-huit ans pour la promotion de jeux d'argent et de hasard doit être claire, lisible et compréhensible sur tout format utilisé, et non plus durant l'intégralité du visionnage ;

- la modification des obligations d'affichage des publications des personnes exerçant l'activité d'influence commerciale fixées à l'article 5 par rapport aux exigences de l'article 3 de la directive e-commerce sur le principe du pays d'origine et à celles de l'article 7 de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales, pour préciser que :

o l'intention commerciale d'une publication doit être explicitement indiquée par le recours aux mentions « Publicité » ou « Collaboration commerciale » ou par une mention équivalente adaptée aux caractéristiques de l'activité d'influence et au format du support de communication utilisé ;

o les mentions « Images retouchées » et « Images virtuelles » doivent être claires, lisibles et compréhensibles, sur tout support utilisé, et non plus durant l'intégralité du visionnage ;

- la modification de l'article 9, par rapport aux exigences de l'article 3 de la directive e-commerce sur le principe du pays d'origine, pour préciser que l'obligation de désigner une forme de représentation légale sur le territoire de l'Union européenne concerne, en plus des autres conditions déjà fixées par la loi, les personnes exerçant l'activité d'influence commerciale qui ciblent un public en France ;

- la suppression de l'article 10, qui avait été introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs et dont les dispositions ne sont toujours pas entrées en vigueur, par cohérence avec l'entrée en application du règlement européen sur les services numériques ;

- la suppression de l'article 11, précédemment introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs et dont les dispositions ne sont toujours pas entrées en vigueur, par cohérence avec l'entrée en application du règlement européen sur les services numériques ;

- la suppression de l'article 12, précédemment introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative des rapporteurs et dont les dispositions ne sont toujours pas entrées en vigueur, par cohérence avec l'entrée en application du règlement européen sur les services numériques ;

- la suppression de l'article 15, précédemment introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, par cohérence avec l'entrée en application du règlement européen sur les services numériques ;

- la suppression de l'article 18 de coordination qui prévoit une condition suspensive à l'entrée en vigueur des articles 10, 11, 12 et 15.

III. La position de la commission - Une demande d'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance partiellement justifiée

Les auditions et les échanges ont conduit le rapporteur pour la commission a jugé partiellement justifiée la demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance.

Il est en effet indispensable de tirer les conséquences sur le plan juridique, et dans les meilleurs délais, des observations de la Commission européenne transmises au Gouvernement le 14 août dernier. Le rapporteur rappelle ainsi que le projet d'ordonnance doit faire l'objet d'une notification préalable auprès de la Commission européenne et que cette ordonnance ne peut être promulguée qu'à l'issue de la période de statu quo qui sera fixée par la Commission européenne.

Le rapporteur est par ailleurs conscient de la nécessité pour le Gouvernement d'analyser le récent arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 9 novembre 202347(*) et ses effets en matière de réglementation des services de la société de l'information, ce qui inclut, mais pas seulement, la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023.

En effet, cet arrêt modifie et précise, de façon conséquente et inédite, l'interprétation que les États membres doivent avoir du paragraphe 4 de l'article 3 de la directive sur le e-commerce. La CJUE considère ainsi que « des mesures générales et abstraites visant une catégorie de services donnés de la société de l'information décrite en des termes généraux et s'appliquant indistinctement à tout prestataire de cette catégorie de services ne relèvent pas de la notion de « mesures prises à l'encontre d'un service donné de la société de l'information », au sens de cette disposition »48(*).

Toutefois, le rapporteur estime que le délai d'habilitation pourrait être réduit dans la mesure où les observations de la Commission européenne sont connues par le Gouvernement depuis le 14 août dernier et que ce projet d'ordonnance est déjà en cours d'élaboration, d'autant plus que le Gouvernement envisageait à l'origine une modification de la loi n° 2023-451 selon la procédure législative ordinaire.

Le rapporteur considère également que le périmètre de la demande d'habilitation pourrait être précisé, dans la mesure où les observations de la Commission européenne comme l'exposé des motifs du projet de loi sont suffisamment explicites quant aux articles de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 devant faire l'objet d'une abrogation et ceux susceptibles d'être modifiés.

Par conséquent, la commission a adopté l'amendement COM-49 du rapporteur qui modifie l'article 3 de ce projet de loi afin :

- de réduire le délai d'habilitation de neuf à six mois ;

- de préciser que les articles 1er, 4, 5 et 9 de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023, et non l'ensemble des dispositions de cette loi, sont susceptibles d'être modifiés ;

- d'abroger directement, et non par ordonnance, les articles 10, 11, 12, 15 et 18 de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023. En effet, si les dispositions des quatre premiers articles n'entreront en vigueur qu'au 17 février 2024, il est préférable, par souci de sécurité juridique, de réduire la période transitoire pendant laquelle ces articles seront en vigueur. Or, cet objectif ne peut pas être atteint en l'état car l'ordonnance envisagée par le Gouvernement ne serait promulguée qu'à l'automne 2024.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

CHAPITRE II
Dispositions relatives au droit des sociétés
Article 4
Ratification de l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs
et opérations transfrontalières des sociétés commerciales
et diverses améliorations de ce même régime
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à ratifier l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et apporter diverses améliorations de ce même régime.

La commission a adopté l'article 4 modifié par un amendement rédactionnel et de coordination.

L'ordonnance du 24 mai 2023 a été prise par le Gouvernement conformément à l'article 13 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture qui a habilité le Gouvernement à assurer la transposition de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières49(*).

L'objectif de cette directive est de faciliter la réalisation des opérations transfrontalières (fusion, scission, transformation) de sociétés commerciales au sein de l'espace européen, en mettant en place une procédure commune d'une part, et, d'autre part, en instaurant des règles de protection des salariés, des créanciers et des actionnaires. Les greffiers des tribunaux de commerce se sont également vu confier un rôle de contrôle des éventuelles fraudes.

En outre, la loi du 9 mars 2023 précitée imposait d'une part au Gouvernement de prendre son ordonnance de transposition dans un délai de trois mois à compter de sa promulgation, l'ordonnance prise le 24 mai 2023 respecte donc ce délai, et, d'autre part de déposer un projet de loi de ratification dans les trois mois suivants la publication de l'ordonnance. Le Gouvernement a déposé un projet de loi de ratification à cette fin devant le Sénat le 21 juillet 2023, ce second délai a donc été respecté.

Dès lors, la ratification de l'ordonnance du 24 mai 2023 n'appelle pas d'autres d'observations de la part du rapporteur sur la procédure.

Concernant le contenu des modifications proposées, le rapporteur constate que le II de l'article 4 du projet de loi du Gouvernement prévoit seize modifications formelles, modifiant uniquement le code de commerce, qui sont relatives aux régimes national et européen des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales.

L'ensemble de ces modifications rassemblent, in fine, des coordinations ainsi que des corrections ou précisions rédactionnelles dans les articles du code de commerce impactés par l'ordonnance du 24 mai 2023.

Les travaux du rapporteur ont toutefois mis en exergue la nécessité d'apporter plusieurs modifications rédactionnelles supplémentaires afin d'assurer la bonne opérationnalité du dispositif proposé par le Gouvernement à l'article 4. Sur proposition du rapporteur, la commission a donc adopté un amendement COM-45.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Article 5
Demande d'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance pour transposer la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil
du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes
et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées
et à des mesures connexes
et harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants
relatifs à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes
au sein des organes des sociétés commerciales

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes.

La commission a adopté un amendement pour encadrer les choix de transposition du Gouvernement s'agissant, notamment, du respect des spécificités du droit interne (application d'un quota d'au moins 40 % de membres des organes de gouvernance des sociétés cotées et des autres grandes entreprises), du renoncement à la création de nouvelles sanctions en cas de non-respect de l'objectif de parité et de la nécessité de choisir un organisme disposant des moyens nécessaires pour veiller au respect des objectifs de parité par les sociétés concernées.

Elle a adopté l'article 5 ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Un objectif ambitieux de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance et de direction des sociétés cotées les plus importantes

A. La parité femmes-hommes au sein des sociétés commerciales : un objectif européen ancien intégré avec difficultés au droit national

1) L'égalité est une valeur fondatrice de l'Union européenne, la parité femmes-hommes dans la vie économique en est son corollaire

L'Union européenne promeut depuis 1957 l'égalité entre les femmes et les hommes, et notamment en matière de salaire50(*).

Lors de la négociation du Traité de Maastricht signé en 1992, onze des douze États membres ont adopté, en parallèle, un accord sur la politique sociale dont l'article 6, paragraphe 3, fait référence à un mécanisme favorisant les femmes dans leur vie professionnelle.

Le traité d'Amsterdam51(*) signé en 1997 a modifié l'article 119 du traité instituant la Communauté européenne (TCE) visant à intégrer le mécanisme précité et qui est relativement similaire à un dispositif de discrimination positive pour les membres du sexe sous-représenté.

Les évolutions subséquentes des traités européens ont maintenu l'égalité entre les hommes et les femmes comme valeur essentielle de l'Union européenne52(*) d'une part et, d'autre part, l'obligation de promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes53(*).

Ainsi, l'article 157, paragraphe 4, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) prévoit que « Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un État membre de maintenir ou d'adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle ».

2) La traduction de cet objectif en matière de parité femmes-hommes au sein des entreprises françaises a connu un obstacle juridique constitutionnel

Dès 2006, le Parlement avait cherché, en adoptant la loi n° 2006-340 du 23 mars 2006 relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, à assurer une représentation plus équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance des sociétés commerciales. L'article 22 du projet de loi, dans son titre III, prévoyait une proportion maximale de 80 % d'administrateurs du même sexe dans ces organes, ce qui revenait à instaurer un quota de 20 % pour les membres du sexe sous-représenté. Cette obligation avait vocation à s'appliquer à toutes les sociétés, peu importe leur taille.

Néanmoins, le Conseil constitutionnel a considéré, d'office, ces dispositions contraires à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

En effet, il a jugé d'une part que « si la recherche d'un accès équilibré des femmes et des hommes aux responsabilités autres que les fonctions politiques électives n'est pas contraire aux exigences constitutionnelles rappelées ci-dessus, elle ne saurait, sans les méconnaître, faire prévaloir la considération du sexe sur celle des capacités et de l'utilité commune ; que, dès lors, la Constitution ne permet pas que la composition des organes dirigeants ou consultatifs des personnes morales de droit public ou privé soit régie par des règles contraignantes fondées sur le sexe des personnes », et, d'autre part, « qu'en imposant le respect de proportions déterminées entre les femmes et les hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance des sociétés privées et des entreprises du secteur public, au sein des comités d'entreprise, parmi les délégués du personnel, dans les listes de candidats aux conseils de prud'hommes et aux organismes paritaires de la fonction publique, les dispositions du titre III de la loi déférée sont contraires au principe d'égalité devant la loi »54(*).

Une révision de la Constitution a donc été nécessaire pour permettre l'introduction de quotas au sein des conseils d'administration des sociétés commerciales. Depuis la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, le deuxième alinéa de l'article 1er de la Constitution permet à la loi de favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales55(*).

B. L'instauration progressive et efficace de quotas dans les conseils d'administration et de surveillance

1) Un dispositif ambitieux...

a) Le principe des quotas et les entreprises concernées

La révision constitutionnelle de 2008 a permis l'adoption de la loi « Copé-Zimmermann » du 21 janvier 2011 qui a fixé, de manière progressive56(*), des quotas par sexe dans les conseils d'administration et de surveillance des grandes sociétés commerciales (sociétés anonymes et sociétés en commandite par actions).

(1) La société anonyme (SA)...

Concernant la SA, le deuxième alinéa de l'article L. 225-17 du code de commerce prévoit de manière générale que son « conseil d'administration est composé en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes ». L'article L. 225-18-1 du code précité prévoit précisément que « la proportion des administrateurs de chaque sexe ne peut être inférieure à 40 % à l'issue de la plus prochaine assemblée générale ayant à statuer sur des nominations » et « lorsque le conseil d'administration est composé au plus de huit membres, l'écart entre le nombre des administrateurs de chaque sexe ne peut être supérieur à deux ».

Les SA concernées sont celles qui sont cotées sur les marchés financiers et celles qui, pour le troisième exercice consécutif, emploient un nombre moyen d'au moins 250 salariés permanents57(*) et présentent un montant net de chiffre d'affaires ou un total de bilan d'au moins 50 millions d'euros.

Par ailleurs, les SA ont la possibilité de choisir entre un modèle dualiste - caractérisé par un directoire et un conseil de surveillance - et un modèle moniste - avec un conseil d'administration.

Ainsi, outre les conseils d'administration, les conseils de surveillance sont concernés par l'obligation de respecter une composition d'au moins 40 % de membres du sexe sous-représenté, comme en témoigne l'article L. 225-69-1 du code de commerce. Cependant, si le droit interne prévoit, à l'article L. 225-58 du code de commerce, que « la composition du directoire s'efforce de rechercher une représentation équilibrée des femmes et des hommes », aucune disposition ne lui impose de respecter une composition d'au moins 40 % de personnes du sexe sous-représenté. Il s'agit toutefois d'une situation relativement marginale puisque le modèle dualiste largement minoritaire en France est aujourd'hui en déclin58(*).

(2) La société en commandite par actions (SCA)

Concernant la société en commandite par actions (SCA), son conseil de surveillance est soumis au même impératif de parité que celui de la société anonyme59(*). Les SCA concernées sont les mêmes que les SA.

(3) Les sociétés par actions simplifiées et les sociétés d'assurance

La loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle, dite « loi Rixain », a étendu les exigences de la loi Copé-Zimmermann aux sociétés d'assurances mutuelles mais seulement à compter du 1er janvier 2027 au plus tôt60(*).

La société par actions simplifiée (SAS) a été exclue du champ de la loi Copé-Zimmermann dans la mesure où le législateur voulait maintenir la liberté d'organisation qui caractérise l'organisation de la gouvernance de la SAS, et donc son attractivité.

Dès lors, le champ de la loi « Copé-Zimmermann » s'approche fortement (sous réserve de la forme juridique de la société, à savoir une SA ou une SCA) des deux catégories économiques que sont les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises (GE)61(*). Si ces deux catégories d'entreprises constituent moins de 0,2 % du nombre d'entreprises en France, elles représentent en revanche plus de la moitié des salariés62(*).

Nombre d'entreprises de taille intermédiaire (ETI)
et de grandes entreprises (GE) en France en 2020

 
 

Source : selon l'Insee63(*)

(4) La particularité des entreprises et établissements publics : un objectif de parité à géométrie variable

Cette spécificité est rappelée par l'ancien vice-président du Conseil d'État, Jean-Marc Sauvé, qui indiquait en introduction d'un colloque en 2016 que « L'entreprise publique est un protée sans définition juridique unique »64(*). Pour autant, dans sa jurisprudence, le Conseil d'État65(*) considère qu'une entreprise appartient au secteur public si la majorité au moins de son capital est détenue, directement ou indirectement, par des personnes publiques. Suivant cette définition, en 2017, l'Insee dénombrait 1 751 entreprises publiques66(*).

L'État intervient en effet dans l'économie selon différentes modalités mais sa qualité d'actionnaire (principal ou majoritaire) n'empêche pas que l'entreprise qu'il possède relève du droit commun des sociétés. Dès lors que cette société prend la forme juridique d'une SA ou d'une SCA, la parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance doit s'appliquer conformément à la loi Copé-Zimmermann.

Certaines entreprises publiques sont régies par la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public (dite « loi DSP ») si elles rentrent dans l'une ou l'autre des deux catégories mentionnées à l'article premier, soit :

- les établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) de l'État autres que ceux dont le personnel est soumis à un régime de droit public ;

- les autres établissements publics de l'État (EPA) qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial lorsque la majorité de leur personnel est soumise aux règles du droit privé.

La loi Copé-Zimmermann s'applique également à ces entreprises publiques conformément à l'article 6-1 de la loi du 26 juillet 1983 précitée. La règle de parité est la suivante : « L'écart entre le nombre de femmes et le nombre d'hommes membres du conseil d'administration ou de surveillance nommés par décret en application des 1° et 2° de l'article 5 ne peut être supérieur à un. » Les personnes ainsi nommées correspondent aux représentants de l'État et aux personnalités qualifiées. Les représentants des salariés sont exclus de l'objectif de parité. Le non-respect de l'objectif de parité entraîne la nullité de la nomination.

L'article 52 de loi Sauvadet du 12 mars 201267(*) a également prévu une obligation de parité pour les organes de gouvernance des EPA dont le personnel est majoritairement de droit public et les EPIC de personnel de droit public. Néanmoins, ce quota de 50 % ne s'impose que pour la catégorie des personnalités qualifiées, les autres membres de l'organe de gouvernance, soit les représentants de l'État et les représentants du personnel ne sont pas concernés par cette règle parité.

Le paysage juridique des entreprises et des établissements publics apparaît donc relativement morcelé. Comme le relevait le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE), en 2021, « les obligations paritaires visant les membres du conseil d'administration ou de surveillance peuvent relever de lois différentes [...] et les dispositions à appliquer ne sont pas identiques, notamment en ce qui concerne la comptabilisation des représentants du personnel. »68(*).

Le HCE poursuit son constat en relevant que « certaines structures publiques n'entrent tout simplement pas dans le champ des lois, telles que les groupements d'intérêt public (GIP) et groupements d'intérêt économique (GIE), sans que cela soit logique, ou certaines filiales d'entreprises publiques enregistrées sous forme de société par actions simplifiée (SAS) ou encore les régies faute de disposer d'un véritable conseil d'administration. »69(*).

Il relève enfin que « cette grande hétérogénéité rend complexe la constitution d'une liste détaillée de tous les établissements et entreprises publics concernés par les obligations paritaires »70(*), ce que le rapporteur constate encore aujourd'hui et regrette fortement, alors que l'État a une obligation d'exemplarité en matière de promotion de l'égalité des femmes et des hommes.

Cette situation est d'autant plus regrettable que le nombre d'entreprises ou établissements concernés n'est pas négligeable. Selon le bilan du HCE, en septembre 2020, « le nombre d'entreprises publiques concernées aujourd'hui par des obligations paritaires est de l'ordre de 1 500 environ et que le nombre d'EPIC concernés, au niveau national et local, s'élève à 1 437 établissements » tandis que le nombre d'EPA concernés par les obligations de parité serait d'environ 30 00071(*).

Par ailleurs, les représentants du personnel qui siègent au sein des conseils d'administration et de surveillance ne sont pas pris en compte pour le respect de l'objectif de parité, à l'instar de ce qui est prévu par la loi Copé-Zimmermann.

Ainsi, le HCE notait qu'en 2020, les femmes représentaient seulement 30 % des membres des conseils d'administration et de surveillance des entreprises et établissements publics, soit près de 15 points de moins que dans les entreprises du secteur privé. Néanmoins fin 2015, les femmes représentaient 30 % des présidents de ces organes.

b) Les sanctions du non-respect des quotas

La loi Copé-Zimmermann du 21 janvier 2011 a prévu un double dispositif de sanctions en cas de non-respect du quota de 40 % de personnes du sexe sous-représenté dans les conseils d'administration et de surveillance des sociétés concernées.

En premier lieu, toute nomination d'un administrateur intervenue en violation du quota de 40 % et qui n'a pas pour effet de remédier à l'irrégularité de la composition du conseil est nulle72(*).

En second lieu, la rémunération des membres du conseil d'administration (ou de surveillance) dont la composition est irrégulière est temporairement suspendue, jusqu'à ce qu'elle devienne régulière73(*). À certains égards, ce dispositif s'apparente, indirectement, à une forme de sanction financière à l'encontre des membres du conseil d'administration ou de surveillance.

Toutefois, le Parlement a estimé qu'il était nécessaire de renforcer le régime des sanctions en cas de non-respect de la règle de parité au sein du conseil d'administration ou de surveillance.

Ainsi, l'article 189 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte », a prévu la nullité des délibérations auxquelles a pris part l'administrateur irrégulièrement nommé dans l'hypothèse où cette nomination serait nulle en raison du non-respect de l'obligation de parité au sein du conseil. Cet article, en renforçant de manière significative le caractère contraignant de la règle de parité, a donc supprimé le mécanisme qui permettait d'éviter des nullités en cascade74(*).

Ces sanctions semblent davantage efficaces à l'égard des plus grosses entreprises car l'application de la loi par les plus petites capitalisations boursières est encore imparfaite, comme l'a souligné Denis Terrien, président de l'Institut français des administrateurs (IFA) : « La loi est faite pour les sociétés visibles et, de fait, elle est moins efficace pour les autres75(*) ».

En outre, dans un rapport de 2021 sur le bilan de l'application de la loi Copé-Zimmermann, la délégation aux droits des femmes du Sénat déplorait que « L'État manque d'outils et surtout de moyens pour contrôler l'application des dispositifs de parité qu'il a instaurés. Certaines sociétés, notamment parmi les entreprises de taille intermédiaire, les ETI, n'ont pas connaissance des obligations de parité qui pèsent sur elles et ne font l'objet d'aucun contrôle en la matière »76(*).

Par ailleurs, concernant les entreprises publiques soumises à la loi DSP du 26 juillet 1983, ce texte prévoit également la nullité de la nomination intervenue en violation de l'objectif paritaire de composition du conseil d'administration ou de surveillance. Néanmoins, à l'inverse du droit commun des sociétés, cette nullité n'entraîne pas celle des délibérations auxquelles a pris part le membre irrégulièrement nommé77(*).

2) ...qui connaît un réel succès...

a) Pour les conseils d'administration et de surveillance

« La France se situe aujourd'hui au premier rang mondial en termes de féminisation des conseils d'administration des grandes entreprises cotées » selon le bilan dressé en 2021 par la délégation aux droits des femmes du Sénat concernant l'application de la loi Copé-Zimmermann78(*).

Source : Ethics & Boards, mars 2021

Entre 2010 et 2021, la proportion de femmes dans les conseils d'administration et de surveillance des sociétés du SBF 12079(*) s'est accrue de 13 % à 46 %.

b) Pour les comités de ces organes de gouvernance

Le succès de la loi Copé-Zimmermann ne s'arrête pas à la seule composition des conseils d'administration et de surveillance car il se manifeste aussi au sein des comités spécialisés80(*) des organes sociaux des sociétés. En effet, en 2022, la parité femmes-hommes est également atteinte au sein des 414 comités spécialisés des sociétés du SBF 12081(*). En moyenne ces entreprises disposent de 3,5 comités par conseil et la taille moyenne de ces comités est de quatre ou cinq membres, en moyenne 49 % des membres de ces comités sont des femmes.

Source : SpencerStuart82(*)

Néanmoins, les femmes sont présentes à hauteur de seulement 34 % au sein du comité stratégique des conseils d'administration et de surveillance, soit une différence de 15 points avec le taux moyen de la présence féminine au sein de ces comités. Ce comité a des activités et finalités différentes selon les sociétés mais il s'agit dans l'ensemble d'un comité ayant vocation à prendre les décisions importantes de la société (investissements de grande envergure par exemple).

3) ...mais avec quelques tempéraments

Les bons résultats en matière de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance des SA et des SCA méritent d'être effectivement nuancés pour plusieurs raisons.

En premier lieu, les SAS ne sont pas soumises à la loi Copé-Zimmermann. Cette forme juridique de société commerciale est caractérisée par sa liberté d'organisation. Le législateur a donc fait le choix de ne pas imposer le respect d'un quota parmi l'éventuel organe de gouvernance que les actionnaires auraient décidé d'instituer. Les personnes entendues par le rapporteur ont pu souligner que certaines sociétés ont parfois choisi la forme juridique de la SAS pour éviter de respecter les quotas en matière de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance.

En second lieu, certaines sociétés cotées du CAC 40 ne sont pas soumises au quota de 40 % prévu par la loi Copé-Zimmermann car elles sont domiciliées dans des pays étrangers (aux Pays-Bas notamment) qui n'imposent pas de quotas, à l'instar d'Airbus dont le conseil d'administration est composé de 25 % de femmes, Stellantis dont le CA comprend 27 % de femmes et ArcelorMittal dont le CA comprend 30 % de femmes83(*).

En troisième lieu, la féminisation des plus hautes instances de gouvernance des sociétés du CAC 40, au 1er janvier 2022, demeure perfectible. En effet, « les femmes occupent 3,75 % des 80 postes de président et/ou directeur général des entreprises du CAC 40 (2,5 % en 2021) : 0 femme PDG, 2 femmes présidentes du conseil d'administration, 1 femme directrice générale »84(*).

Source : Grandes Écoles au Féminin et Roland Berger85(*)

Enfin, comme le relève la délégation aux droits des femmes du Sénat dans le bilan tiré de l'application de la loi Copé-Zimmermann : « trop peu de femmes sont donc encore représentées au sein des conseils d'administration et de surveillance des entreprises hors grandes capitalisations boursières »86(*). En effet, les auteures de ce rapport soulignent que « la parité reste limitée dans les conseils d'administration et de surveillance des plus petites capitalisations boursières (moins d'un tiers), des entreprises non cotées de plus de 250 salariés (moins de 25 % de femmes), et encore plus, des petites et moyennes entreprises (PME) n'entrant pas dans le champ d'application de la loi (environ 18 % de femmes) »87(*).

C. L'objectif de parité femmes-hommes s'applique de manière très partielle aux administrateurs salariés

Les administrateurs salariés correspondent à deux catégories : les salariés qui siègent du fait de cette seule qualité ou les salariés qui sont également actionnaires et siègent donc en raison de cette « double casquette ».

1) Les administrateurs représentant les salariés actionnaires

Ils doivent être désignés dans les sociétés anonymes cotées si la participation des salariés dépasse le seuil de 3 % du capital social88(*). De même pour les sociétés anonymes employant, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins 1 000 salariés permanents dans la société et ses filiales françaises, ou au moins 5 000 salariés permanents dans la société et ses filiales françaises et étrangères89(*).

Ils sont désignés, classiquement, par l'assemblée générale des actionnaires90(*). Toutefois ils ne sont pas pris en compte dans la détermination du nombre minimal et maximal d'administrateurs ou pour l'application du quota paritaire prévu par la loi Copé-Zimmermann.

2) Les administrateurs représentant les salariés obligatoirement91(*) nommés

Ils doivent siéger au sein des conseils d'administration et de surveillance des SA ou SCA employant, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins 1 000 salariés permanents dans la société et ses filiales françaises, ou au moins 5 000 salariés permanents dans la société et ses filiales françaises et étrangères.

Si l'organe (conseil d'administration ou de surveillance) compte jusqu'à huit membres, au moins un représentant des salariés doit y siéger et s'il en comprend plus de huit, ce sont au moins deux représentants des salariés qui doivent siéger. Néanmoins, si des administrateurs siègent déjà en raison d'autres mécanismes (sociétés relevant du secteur public ou privatisé ; nomination volontaire de la société), la société n'est pas obligée de désigner des administrateurs salariés supplémentaires.

Les conditions de nomination des administrateurs salariés (du CA ou du CS) doivent être prévues dans les statuts de la SA. Il existe quatre modalités de désignation alternatives étant précisé que deux seulement sont paritaires.

Les différents modes de désignation des administrateurs salariés92(*)

(1) L'élection de l'administrateur par les salariés de la société et de ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français.

- ne sont électeurs que les salariés de ces sociétés dont le contrat de travail est antérieur de trois mois à la date de l'élection ;

- les candidats ou listes de candidats doivent être présentés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ;

- lorsqu'un seul siège est à pourvoir, chaque candidature doit comporter le nom de son candidat et de son remplaçant, qui doivent être de sexes différents. A contrario, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, chaque liste doit comporter deux fois plus de candidats que le nombre de sièges et être composée alternativement d'un candidat de chaque sexe - l'écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un sur chaque liste.

(2) La désignation de l'administrateur, selon le cas, par le comité de groupe, ou, dans les sociétés d'au moins 50 salariés, le comité social et économique ou le comité social et économique central. Si deux administrateurs sont désignés, ceux-ci doivent être de sexe différent.

(3) La désignation de l'administrateur :

- par l'organisation syndicale ayant obtenu le plus de suffrages au premier tour des élections professionnelles (comité social et économique) dans la société et ses filiales, directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français lorsqu'un seul administrateur est à désigner ; ou

- par chacune des deux organisations syndicales ayant obtenu le plus de suffrages au premier tour de ces élections lorsque deux administrateurs sont à désigner.

(4) Lorsqu'au moins deux administrateurs sont à désigner, la désignation :

- de l'un des administrateurs selon l'une des modalités fixées aux 1° à 3° ; et

- de l'autre par le comité d'entreprise européen, s'il existe.

Source : Mémento Francis Lefebvre, sociétés commerciales 2023

Ces administrateurs salariés ne sont pas non plus pris en compte pour le calcul de la parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance.

Néanmoins, les deux premiers modes de désignation sont caractérisés par des règles répondant à un objectif de parité alors que ceux passant par les organisations syndicales et le comité d'entreprise européen ne sont encadrés par aucune règle paritaire. À cet égard, un rapport de la direction générale du Trésor préconise d'harmoniser des règles paritaires pour les quatre modes de désignation93(*), ce que le rapporteur estime effectivement souhaitable.

D. La nécessité d'un nouveau souffle en matière de parité femmes-hommes pour les cadres dirigeants

1) La loi Copé-Zimmermann n'a pas eu pour effet de renforcer sensiblement la présence des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises

La loi Copé-Zimmermann a eu, en 10 ans d'application seulement, des effets notables en matière de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance des SA et des SCA, mais cette loi n'a pas eu l'effet de ruissellement escompté s'agissant des autres instances de pouvoir au sein des entreprises, à savoir les instances dirigeantes.

En effet les comités de direction (Codir) et comités exécutifs (Comex), à l'inverse des comités émanant des conseils d'administration ou de surveillance, sont composés de salariés (cadres dirigeants) de l'entreprise et ne sont pas soumis au droit des sociétés mais au droit du travail. C'est en particulier dans ces instances dirigeantes que la parité femmes-hommes connaît une certaine stagnation, le quota de 40 % prévu par la loi Copé-Zimmermann n'y étant pas applicable (à l'inverse de la loi Rixain, cf. infra).

À cet égard, l'observatoire Skema de la féminisation des entreprises relève qu'en 2022, si les sociétés du CAC 40 respectent l'objectif de parité au sein de leur conseil d'administration, tel n'est pas le cas au sein de leurs comités exécutifs, alors même que les femmes représentent 35,46 % de l'ensemble des cadres et 39,05 % de l'ensemble des salariés. Le vivier de candidates est donc bien présent. Un double plafond de verre en opposition avec l'absence de frein à l'accès des femmes au conseil d'administration existe bel et bien ainsi que le schéma ci-après l'illustre.

Source : Observatoire Skema de la féminisation des entreprises94(*)

Selon les informations transmises au rapporteur par l'Association française des entreprises privées (Afep), les Comex/Codir des sociétés du CAC 40 étaient composés de 4,24 femmes en moyenne (soit 28,90 % des membres) au mois de juillet 2023, et s'agissant des sociétés du SBF 120, les femmes étaient en moyenne au nombre de 3,59 femmes en moyenne (soit 27,18 % des membres).

2) La loi Rixain du 21 décembre 2021 impose aux grandes entreprises de publier dès aujourd'hui leurs statistiques en matière de parité femmes-hommes et de respecter des quotas dans les années à venir

Tirant les conclusions de l'application de la loi Copé-Zimmermann et de la persistance de certains freins d'accès des femmes aux postes d'encadrement les plus élevés au sein des entreprises, le Parlement a fait le choix d'imposer un objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes (30 % d'ici 2026 et 40 % d'ici 2029) parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes95(*) des sociétés comptant au moins 1 000 salariés pour le troisième exercice consécutif96(*).

Ainsi, au 1er mars 2026, si l'objectif de 30 % n'est pas atteint, l'entreprise concernée devra définir les mesures de correction nécessaires. À compter du 1er mars 2029, si l'objectif de 40 % n'est pas atteint, l'entreprise dispose d'un délai de deux ans pour se mettre en conformité, soit au 1er mars 2031. À l'expiration de ce délai, l'employeur encourt alors une sanction financière d'un montant maximum de 1 % de la masse salariale.

Toutefois, dans l'attente de ces échéances et depuis le 1er mars 2022, les entreprises concernées doivent publier annuellement les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes. Depuis le 1er mars 2023, ces écarts sont également rendus publics sur le site Internet du ministère du travail97(*).

3) L'entrée en vigueur prochaine de la directive « CSRD » imposera aux grandes entreprises de publier des informations relatives à la parité femmes-hommes

La directive (UE) 2022/2464 dite « CSRD » (Corporate Sustainability Reporting Directive) du 14 décembre 202298(*) impose, à compter du 1er  janvier 2024 et de manière progressive, de nouvelles règles de reporting aux grandes entreprises en matière de publication extra-financière.

Afin d'encadrer et d'harmoniser les publications des sociétés, la CSRD prévoit la création de normes de rapport sur la durabilité, dites normes « ESRS » pour (European Sustainability Reporting Standards).

Les normes ESRS vont notamment imposer des informations sur la proportion femmes-hommes au sein des conseils. Plus précisément, la norme GOV-1 paragraphe 21 prévoit que « L'entreprise publie les informations suivantes sur la composition et la diversité des membres des organes d'administration, de direction et de surveillance de l'entreprise : (a) le nombre de membres exécutifs et non exécutifs ; (b) la représentation des salariés et des autres travailleurs [....] ; (d) le pourcentage par genre et les autres aspects de la diversité dont tient compte l'entreprise. La mixité au sein du conseil d'administration est représentée par un ratio femmes/hommes moyen [...] »99(*).

L'obligation de publier un reporting de durabilité en application de la CSRD s'appliquera de manière progressive. Ainsi, les entreprises de plus de 500 salariés et de plus de 40 millions d'euros de chiffre d'affaires et/ou de plus de 20 millions d'euros de total de bilan feront leur premier reporting en 2025 avec l'année 2024 comme exercice de référence. Puis les entreprises qui satisfont au moins deux des trois critères suivants : 250 salariés, 40 millions d'euros de chiffre d'affaires, et 20 millions d'euros de total de bilan, feront leur premier reporting en 2026 avec les données de l'année 2025. Les SAS seront également concernées par l'obligation de déclaration extra-financière.

La confection de ces statistiques sera en outre facilitée par la mise en place du point d'accès unique européen (PAUE, ou ESAP en anglais, pour European Single Acces Point). En vertu d'un accord provisoire entre le Conseil et le Parlement européen le 23 mai 2023, l'UE est en effet sur le point de créer une plateforme d'accès unique aux informations publiques liées à la finance et à la durabilité concernant les entreprises et les produits d'investissement de l'UE. Celle-ci devrait être disponible à partir de l'été 2027 et faire l'objet d'une mise en place progressive. Elle n'impose aucune nouvelle obligation de communication d'informations sur les entreprises européennes, mais donnera accès aux informations déjà rendues publiques en application du droit européen. Les informations relatives à la représentation des femmes dans les conseils d'administration et de surveillance pourraient ainsi être parmi les premières publiées sur le PAUE.

4) Les objectifs de parité femmes-hommes pour les dirigeants de la fonction publique

La loi Sauvadet du 12 mars 2012 a imposé un taux minimal d'hommes et de femmes parmi les personnes nommées pour la première fois aux principaux emplois supérieurs et dirigeants de l'État, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière. Depuis 2020, le taux de 40 %100(*) de femmes pour les « primo-nominations101(*) » aux emplois supérieurs et dirigeants a été atteint dans les trois versants de la fonction publique.

La loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique102(*) a porté le taux des primo-nominations à 50 % mais de manière progressive jusqu'en 2028. À partir de 2027, les administrations devront respecter un taux minimal de 40 % de personnes de chaque sexe dans les emplois supérieurs et de direction. Enfin, ce texte instaure un index de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la fonction publique.

II. Le dispositif envisagé - Une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer la directive (UE) n° 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022

La directive comprend 14 articles et une annexe qui visent à harmoniser les règles en matière de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance des sociétés cotées européennes.

Dans la mesure où le droit français est, dans l'ensemble, relativement proche des règles prévues par la directive, le rapporteur a fait le choix de traiter les dispositions qui présentent les enjeux les plus importants en termes de transposition ou qui appellent des observations particulières.

A. La directive poursuit un objectif chiffré de parité femmes-hommes parmi les conseils des sociétés cotées

L'article 1er de la directive dispose que « La présente directive vise à parvenir à une représentation plus équilibrée des femmes et des hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées en établissant des mesures efficaces tendant à accélérer les progrès accomplis sur la voie de l'équilibre entre les femmes et les hommes, tout en accordant aux sociétés cotées suffisamment de temps pour procéder aux aménagements nécessaires à cet effet. »

Cette disposition de portée générale est conforme au droit français des sociétés (cf. supra) qui tend également vers cet objectif.

De manière plus précise, l'article 5 de la directive impose aux sociétés des États membres de répondre, au plus tard au 30 juin 2026, à l'un ou l'autre de ces deux objectifs chiffrés :

- au moins 40 % des postes d'administrateurs non exécutifs pour les membres du sexe sous-représenté ;

- au moins 33 % de tous les postes d'administrateurs, tant exécutifs que non exécutifs.

Objectifs européens alternatifs en matière de parité femmes-hommes dans les conseils

 
 

Des administrateurs exécutifs
et non exécutifs

Des administrateurs exécutifs

Le nombre de postes d'administrateurs doit être au plus proche de l'une de ces deux cibles, sans toutefois dépasser 49 %.

La directive précise, à son article 3, qu'un administrateur est « un membre d'un conseil, y compris un membre qui est un représentant des travailleurs ». Concernant cette notion, le rapporteur constate qu'en droit français, les représentants de salariés ne sont pas pris en compte dans la répartition par sexe des administrateurs, les représentants de salariés n'étant pas désignés par les organes de gouvernance de la société. Dès lors, si le quota de 40 % prévu par la loi Copé-Zimmerman semble, a priori, largement respecté par les sociétés du SBF 120 (avec une proportion de femmes de plus de 46 %), tel n'est plus forcément le cas au sens de la directive dans la mesure où les représentants de salariés devront être comptabilisés parmi les administrateurs.

Toujours selon cet article 3, l'administrateur exécutif est « un membre d'un conseil dans un système moniste qui est chargé de la gestion quotidienne d'une société cotée ou, dans le cas d'un système dualiste, un membre du conseil qui exerce les fonctions de gestion au sein d'une société cotée ». L'administrateur non exécutif est « un membre d'un conseil dans un système moniste autre qu'un administrateur exécutif ou, dans le cas d'un système dualiste, un membre du conseil qui exerce les fonctions de surveillance au sein d'une société cotée ».

En droit français, les deux définitions d'administrateur données dans la directive renvoient à la notion de mandataire social, au sens du droit des sociétés.

Source : code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées de l'Afep-Medef

Enfin, l'article 9 de la directive précise que ses dispositions sont des exigences minimales. En effet, « les États membres peuvent introduire ou maintenir des dispositions plus favorables que celles prévues dans la présente directive pour garantir une représentation plus équilibrée des femmes et des hommes dans les sociétés cotées établies sur leur territoire national. »

B. La directive (UE) n° 2022/2381 du 23 novembre 2022 s'applique aux seules sociétés cotées

Selon l'article 2 de la directive, seules les sociétés cotées sont concernées ; les micro-, petites et moyennes entreprises sont expressément exclues du champ d'application de la directive.

En droit français, l'objectif de parité au sein des conseils d'administration et de surveillance concerne les sociétés cotées et les sociétés d'au moins 250 salariés permanents et qui présentent un montant net de chiffre d'affaires ou un total de bilan d'au moins 50 millions d'euros à condition que cette société soit sous la forme juridique d'une SA ou d'une SCA. La SAS n'est pas soumise au quota de 40 % prévu par la loi Copé-Zimmermann.

À noter que selon la société boursière Euronext, la France compte plus de 800 sociétés cotées.

C. L'instauration d'un processus de sélection afin d'atteindre les objectifs de la directive qui n'est pas totalement étranger au droit français

1) Un dispositif de sélection voulu par la directive assorti d'un recours pour le candidat éconduit

L'article 6 demande aux États membres de mettre en place des processus de sélection des candidats pour l'exercice des fonctions d'administrateur. Le but recherché est de prévoir des critères clairs et neutres de sélection des candidats. C'est un outil qui aidera les entreprises à atteindre les objectifs de parité. L'objectivité recherchée doit permettre de mieux considérer les candidatures du sexe sous-représenté en réduisant les risques de stéréotypes.

Cette procédure de sélection n'oblige que les sociétés qui n'atteignent pas les quotas de représentation qu'elle a fixés : « Les États membres veillent à ce que les sociétés cotées qui n'atteignent pas les objectifs visés à l'article 5, paragraphe 1, point a) ou b), selon le cas, adaptent le processus de sélection des candidats ».

En outre, la directive réserve aux entreprises la possibilité de ne pas choisir le candidat du sexe sous-représenté, à qualifications égales, pour des « motifs ayant, sur le plan juridique, une importance supérieure, tels que la poursuite d'autres politiques en matière de diversité, invoqués dans le cadre d'une appréciation objective qui tient compte de la situation particulière d'un candidat de l'autre sexe et qui est fondée sur des critères non discriminatoires ». La portée de cette formulation n'est pas claire, dans la mesure où il n'est pas évident de comprendre ce qui peut, en même temps, revêtir un enjeu supérieur sur le plan juridique et ne pas être discriminatoire.

Enfin, la directive rappelle la nécessité de garantir l'existence d'un recours (juridictionnel ou administratif) au candidat éconduit. Il ne crée cependant, dans ce cadre, qu'une faveur probatoire au bénéfice du candidat du sexe sous-représenté, lorsque ce dernier établit posséder des qualifications égales à celles du candidat de l'autre sexe qui a été sélectionné : il incombe à la société de prouver l'absence de violation de l'obligation de préférer le candidat du sexe sous-représenté (sous réserve de l'existence d'un motif d'importance juridique supérieur).

Si cette violation est établie, les textes en vigueur en droit interne, s'ils étaient maintenus, sanctionnent par la nullité la nomination. Dans la mesure où elle protège un intérêt particulier - celui du candidat et de la société -, cette nullité ne peut être que relative. L'action en nullité leur est donc réservée.

2) L'objectif de parité dans le choix des directeurs généraux délégués au sein de la SA

Le droit interne n'est pas totalement étranger à ce mécanisme de sélection. En effet, l'article L. 225-53 du code de commerce prévoit des dispositions spécifiques s'agissant du choix du ou des directeurs généraux délégués (au nombre maximum de cinq). Le conseil d'administration est en charge de la nomination, sur proposition du directeur général, du ou des directeurs généraux délégués.

Selon l'article précité, le conseil d'administration « détermine à cette fin un processus de sélection qui garantit jusqu'à son terme la présence d'au moins une personne de chaque sexe parmi les candidats ». Il précise également que « Ces propositions de nomination s'efforcent de rechercher une représentation équilibrée des femmes et des hommes. »

Ce mécanisme n'est toutefois pas assorti d'un recours spécifique.

D. L'organe en charge de mettre en oeuvre les objectifs de parité dans les sociétés cotées

L'article 10 de la directive impose aux États membres de désigner un ou plusieurs organismes chargés de promouvoir, d'analyser, de surveiller et soutenir l'équilibre entre les femmes et les hommes au sein des conseils des sociétés cotées.

Dans sa réponse écrite au rapporteur, la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) du ministère de la justice indique que les missions de cet organisme peuvent se comprendre de la manière suivante :

- la promotion impliquerait la mise en oeuvre d'une stratégie de sensibilisation des différentes parties prenantes ;

- l'analyse viserait la récolte et l'étude des données disponibles, publication d'avis ou rapports ;

- la surveillance nécessiterait l'observation des comportements individuels et collectifs et l'alerte en cas de dégradation des situations observées ;

- le soutien devrait impliquer la formulation de recommandations.

À ce stade, la DACS a indiqué au rapporteur que le choix de cet organisme n'était pas encore arrêté et dépendrait notamment du champ d'application de la directive en droit interne (uniquement les sociétés cotées ou les sociétés couvertes par la loi Copé-Zimmermann).

E. La directive permet de suspendre certaines de ses dispositions, sous certaines conditions, que la France n'est pas certaine de pouvoir remplir

L'article 12, dans son paragraphe 1, indique qu'un État membre peut « suspendre l'application » des articles 5 et 6. Dans son paragraphe 3, il précise cependant que lorsque les conditions de la suspension « ne sont plus remplies  », les articles suspendus doivent s'appliquer au plus tard six mois après.

La possibilité de suspension n'est ouverte que dans deux cas de figure :

1. soit dans l'hypothèse où, dans l'État membre concerné, les membres du sexe sous-représenté occupent, en fait, au moins 30 % des postes de dirigeants non exécutifs ou au moins 25 % de tous les postes (exécutifs et non exécutifs) dans les sociétés cotées au 27 décembre 2022 ;

2. soit dans l'hypothèse où cet État membre exige déjà, en droit, que les membres du sexe sous-représenté occupent au moins 30 % des postes non exécutifs ou au moins 25 % de tous les postes (exécutifs et non exécutifs) dans les sociétés cotées.

Le Gouvernement estime que la France ne peut pas se prévaloir de la deuxième hypothèse, puisque le champ d'application de son dispositif n'est pas le même que celui de la directive102(*).

En revanche, le Gouvernement pense que la France pourrait se prévaloir de la première hypothèse, mais cette possibilité est hypothétique puisqu'il est difficile de savoir si toutes les sociétés couvertes par la directive - dont une partie marginale n'est pas couverte par le droit français (les sociétés cotées de moins de 250 salariés qui ont un chiffre d'affaires de plus de 50 millions et un bilan de plus de 43 millions) - respectent les seuils selon les modalités de calcul de la directive (en intégrant notamment les représentants des salariés).

La vérification de cette hypothèse demande une évaluation longue et minutieuse, société par société, pour calculer le respect du seuil européen. Statistiquement, sur un périmètre de plus de 350 sociétés, il est possible que l'une ou l'autre ne le respectât pas au 27 décembre 2022.

Enfin, le rapporteur constate avec regrets que la question de savoir si la France pouvait éventuellement suspendre les effets de la directive dépend de la mise à disposition de statistiques sur la parité femmes-hommes au sein des sociétés concernées par la loi Copé-Zimmermann. Or ses travaux ont mis en exergue l'absence de statistiques officielles établies par une administration ou un organe indépendant. En l'état, les statistiques publiques en la matière sont principalement établies par le monde des affaires (Ethics & Boards, Deloitte, SpencerStuart, l'Afep, etc.) ou le milieu universitaire (Skema Business School) et ces études ne peuvent légitimement fonder une demande de suspension des effets de la directive auprès de la Commission européenne.

III. La position de la commission - Une habilitation à légiférer par ordonnance acceptée mais selon des modalités précises

A. Le principe d'une habilitation à légiférer par ordonnance accepté

Le Gouvernement demande à transposer la directive par la voie d'une habilitation à légiférer par ordonnance, conformément à l'article 38 de la Constitution.

La DACS a indiqué au rapporteur que cette demande se fondait principalement sur trois considérations. La première est liée à l'incertitude de la possibilité de suspendre certaines dispositions de la directive en l'absence de statistiques officielles et conformes aux objectifs poursuivis par la directive. La deuxième raison tient au champ d'application de la transposition de la directive, que le Gouvernement n'a pas encore arrêté (cf. développements supra). La troisième considération porte sur la désignation du ou des organismes nationaux chargés d'assurer le respect des objectifs de parité prévus par la directive. À ce stade, le Gouvernement n'a pas encore choisi le ou les organismes pertinents, ce qui l'empêche de proposer une transposition par la voie législative classique.

Le rapporteur relève d'une part, qu'outre ces arguments, la France est particulièrement bien avancée en matière de parité femmes-hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance des grandes sociétés françaises. La directive (UE) 2022/2381 du 23 novembre 2022 a par ailleurs été inspirée de la législation française, de sorte que les enjeux de transposition sont limités.

Dès lors, la commission a accepté la demande d'habilitation à légiférer par ordonnance pour assurer la transposition de la directive 2022/2381.

B. Un encadrement limité, mais nécessaire de la marge de manoeuvre du Gouvernement dans la transposition de la directive

En vue de la rédaction de l'ordonnance de transposition de la directive 2022/2381, la commission, sur proposition du rapporteur, a souhaité fixer certaines orientations de transposition offertes par la directive.

En premier lieu, la commission a estimé nécessaire d'assurer une transposition de la directive conforme au droit français en matière de parité femmes-hommes au sein des instances de gouvernance des sociétés commerciales. En effet, son champ d'application actuel dépasse amplement celui des seules sociétés cotées visées par la directive (cf. supra). L'amendement COM-46 du rapporteur, adopté par la commission, permet donc de sanctuariser le droit existant et garantit une application uniforme des dispositions de la directive.

En second lieu, la directive prévoit des objectifs de parité alternatifs dont l'un d'eux (celui du quota de 33 % d'administrateurs exécutifs ou non exécutifs) est moins-disant que le quota français d'au moins 40 % de membres du sexe sous-représenté au sein des conseils de surveillance et d'administration. Dès lors, l'amendement COM-46 de la commission, permet également de s'assurer que le Gouvernement transposera la directive en respectant le droit national existant.

En second lieu, l'amendement COM-46 de la commission vise à harmoniser l'application de l'objectif de parité (et les sanctions de son non-respect) des entreprises privées à l'ensemble des entreprises publiques non encore assujetties. En effet, l'État se doit d'être exemplaire dans la totalité de ses émanations.

En quatrième lieu, si les administrateurs représentant les salariés peuvent être désignés selon quatre modalités alternatives, deux de ces dispositifs ne sont actuellement pas paritaires. Or, la commission a estimé qu'il était nécessaire de faire cesser cette différence, via l'amendement COM-46, dans la mesure où elle porte atteinte à la cohérence générale du régime des administrateurs représentant les salariés.

En troisième lieu, la directive (UE) 2022/2381 offre la possibilité de prévoir de nouvelles sanctions en cas de non-respect de l'objectif de parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance des sociétés cotées. Or le droit français prévoit déjà un triple dispositif de sanctions (nullité de la nomination de l'administrateur en violation du quota de 40 %, nullité de la décision du conseil dans lequel a participé l'administrateur irrégulièrement désigné et suspension de la rémunération des administrateurs en cas de non-respect du quota paritaire). Dès lors, la commission, en adoptant l'amendement COM-46 du rapporteur, a estimé ces sanctions suffisantes et inutiles d'en créer de nouvelles, notamment sur le volet financier.

Enfin, l'amendement COM-46 du rapporteur, adopté par la commission, impose également au Gouvernement de s'assurer que l'organisme, visé à l'article 10 de la directive pour veiller du respect du principe de parité au sein de sociétés concernées, serait doté des moyens nécessaires pour l'exercice de ses différentes missions.

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

CHAPITRE III
Dispositions relatives au droit bancaire, monétaire et financier
Article 6
Adaptation du droit bancaire, monétaire et financier au droit européen applicable aux dépositaires centraux de titres, à l'information des clients sollicitant un service d'investissement et à la transparence des transferts d'actifs numériques

Cet article poursuit trois objectifs distincts les uns des autres, ce qui participe d'une certaine illisibilité de ses dispositions.

Il vise tout d'abord à tenir compte de la fin de la « clause de grand-père » dont bénéficient les dépositaires centraux de titres (DCT) de pays tiers. La modification apportée au code monétaire et financier relève d'une simple mesure de coordination, qui anticipe l'adoption définitive du règlement européen modifiant le règlement du 23 juillet 2014 relatif aux DCT, dit « CSDR ».

Il clarifie ensuite les règles applicables à la transmission des informations par les prestataires de services sur investissement à leurs clients et clients potentiels. Les clients non professionnels auront toujours la possibilité de demander à ce que ces informations leur soient transmises sur support papier, et non seulement par voie électronique.

Enfin, cet article porte une demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour prendre toute mesure relevant du domaine de la loi et visant à transposer les dispositions de la 5e directive anti-blanchiment, telle que modifiée par le règlement du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs. Ce dernier apporte des modifications essentielles pour consolider les obligations auxquelles sont assujettis les prestataires de services sur actifs numériques en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

La commission a adopté l'article 6 modifié par deux amendements du rapporteur, l'amendement COM-21 vise à réduire le délai d'habilitation de neuf mois à six mois tandis que l'amendement COM-22 est rédactionnel.

I. Un encadrement strict de la fourniture et du fonctionnement des services financiers, des services d'investissement et des actifs numériques par le droit de l'Union européenne

Pour davantage de lisibilité, les trois dispositions modifiées par le présent article, distinctes les unes des autres, seront présentées successivement.

A. La révision en cours des règles relatives aux dépositaires centraux de titres

1) Des infrastructures essentielles au bon fonctionnement des marchés

Les dépositaires centraux de titres (DCT) font partie des infrastructures de marché nécessaires au bon fonctionnement des marchés financiers. Elles doivent permettre aux acteurs de ces marchés d'avoir confiance dans le fait que les transactions sur titres seront exécutées correctement et en temps voulu. Les DCT sont agréés par l'Autorité des marchés financiers (AMF), après consultation de la Banque de France (article L. 441-1 du code monétaire et financier [CMF]).

Le dépositaire central exploite un système de règlement de titres (« service de règlement ») ainsi que l'un des deux services de base suivants :

- l'enregistrement initial des titres dans un système d'inscription en compte (« service notarial ») ;

- la fourniture et la tenue centralisée de comptes de titres au plus haut niveau (« service de tenue centralisée de comptes » ou de « maintenance centrale »), dans le but notamment de s'assurer qu'il n'y a ni perte, ni création artificielle ou frauduleuse de titres.

Concrètement, un dépositaire central :

- enregistre dans un compte spécifique l'intégralité des instruments financiers composant chaque émission admise à ses opérations ;

- prend toutes les dispositions nécessaires pour permettre l'exercice des droits attachés aux instruments financiers enregistrés en compte courant ;

- transmet les informations nominatives relatives aux titulaires d'instruments financiers entre les personnes ayant accès au dépositaire central de titres et les personnes morales émettrices ;

- émet des certificats représentatifs d'instruments financiers de droit français à destination de l'étranger.

Les règles auxquelles sont assujettis les DCT sont définies au niveau européen, par le règlement 909/2014 du 23 juillet 2014 dit « CSDR »103(*), adopté à la suite de la crise financière. Il existe un seul dépositaire central en France, Euroclear France SA.

2) La mise en place d'une « clause de grand-père » pour les dépositaires centraux de titres de pays tiers

Le règlement européen précité du 23 juillet 2014 a introduit une « clause de grand-père » permettant aux DCT de pays tiers de continuer à proposer leurs services dans les pays de l'Union européenne. Cette clause désactive en effet la nécessité pour ces DCT de se conformer au régime de reconnaissance européen pour continuer leurs activités (cf. infra).

Toutefois, à la suite d'une évaluation conduite en 2021 et dans le cadre plus global de la présentation d'une nouvelle feuille de route sur l'Union des marchés de capitaux, la commission a publié une proposition de révision du règlement CSDR, le 16 mars 2022, afin de lever les obstacles identifiés dans la mise en oeuvre de ce règlement104(*). Les négociations du Conseil avec le Parlement européen ont commencé le 18 avril 2023 et un accord provisoire a été trouvé le 27 juin 2023.

Les principales évolutions concernent le régime de passeportage - c'est-à-dire la procédure qui permet à un DCT établi dans un État membre de l'Union européenne de fournir ses services dans un autre État membre - la coopération entre les autorités de surveillance, les services accessoires de type bancaire, la discipline en matière de règlement et la surveillance des DCT de pays tiers. En particulier, le futur règlement, dit « CSDR Refit », met fin à la « clause de grand-père » pour les DCT de pays tiers, qui seraient donc soumis au régime de reconnaissance. Ils pourraient continuer d'exercer leurs activités dans l'Union européenne105(*) :

- sans condition aucune pour les services de règlement-livraison au sein des États membres de l'Union ;

- à condition que la Commission européenne ait reconnu l'équivalence du cadre juridique du pays tiers et que le dépositaire ait été reconnu par l'Autorité européenne des marchés financiers (European Securities and Markets Authority, ESMA) pour les fonctions notariales et de maintenance centrale. À défaut, le DCT devra cesser ses activités dans l'Union à l'entrée en application du futur règlement ou demander une reconnaissance.

B. Une harmonisation européenne des supports de communication des prestataires de services sur investissement

Aux fins de garantir une protection uniforme des épargnants européens, les règles relatives à l'information des clients des prestataires de services d'investissement ont été encadrées au niveau européen, par la directive dite « MiFID II »106(*), relative aux marchés d'instruments financiers, telle que modifiée par la directive 2021/338 du 16 février 2021107(*), dite « Quick Fix ».

La modification du cadre européen par la directive « Quick fit » visait à soutenir la reprise économique à la suite de la crise sanitaire et économique liée à la covid-19. Elle faisait partie de l'initiative législative d'urgence « Capital Markets Recovery Package », proposée par la Commission européenne au mois de juillet 2020 et comprenant diverses mesures pour alléger des contraintes réglementaires jugées excessives et contreproductives, par exemple en matière d'informations transmises aux clients de prestataires de services d'investissement.

Les dispositions de la directive précitée ont été transposées par une ordonnance du 15 décembre 2021108(*), prise sur le fondement de la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances109(*).

L'article L. 533-12 du CMF dispose ainsi que toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées à des clients ou à des clients potentiels par un prestataire de services d'investissement autre qu'une société de gestion de portefeuille, doivent présenter un contenu exact, clair et non trompeur.

Les informations propres au prestataire, à ses services, aux instruments financiers et aux stratégies d'investissement proposés, aux lieux d'exécution ainsi qu'aux coûts et aux frais qui y sont liés doivent également être présentées « en temps utile » aux clients et aux clients potentiels. Ces informations, visées au II de l'article L. 533-12 du CMF, sont transmises par voie électronique. Toutefois, si le client est un client de détail, c'est-à-dire un client non professionnel, alors ce dernier peut demander à recevoir les informations sur support papier. L'article D. 533-15 du même code précise que les prestataires ont l'obligation d'informer les clients de détail qu'ils ont la faculté de recevoir gratuitement et sur support papier les informations précitées (III bis de l'article L. 533-12 du CMF).

La voie électronique est néanmoins devenue la modalité de communication par défaut pour les prestataires de services d'investissement à l'égard de leurs clients et de leurs clients potentiels.

C. Un encadrement des actifs numériques en voie de construction et de consolidation

Les actifs numériques (ou crypto-actifs) sont définis techniquement par l'AMF comme des actifs virtuels qui reposent sur la technologie de la chaîne de blocs (blockchain) à travers un registre décentralisé et un protocole informatique crypté. L'article L. 54-10-1 du CMF complète cette définition d'un point de vue juridique en disposant que « toute représentation numérique d'une valeur qui n'est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n'est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d'une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d'échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement » est un actif numérique.

1) En France, un premier cadre juridique mis en place par la loi Pacte

Instauré par la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises110(*) (loi « Pacte »), le régime français repose sur l'enregistrement des prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) et, pour ceux qui le souhaitent, sur leur agrément.

Le statut de PSAN couvre les activités suivantes :

- la conservation d'actifs numériques pour le compte de tiers ;

- l'achat-vente d'actifs numériques contre une monnaie ayant un cours légal ou contre d'autres actifs numériques (courtage) ;

- l'exploitation d'une plateforme de négociation d'actifs numériques (bourse) ;

- d'autres services sur actifs numériques comme la réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers, la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, le conseil, la prise ferme, le placement garanti et le placement non garanti.

L'enregistrement est obligatoire pour les PSAN opérant sur les activités précitées, tandis que l'agrément est optionnel. L'AMF est le guichet unique auprès duquel la demande d'enregistrement ou d'agrément doit être déposée.

Au 21 novembre 2023, 99 PSAN étaient enregistrées, un seul agréé. Trois PSAN ont été radiés de la liste l'enregistrement, un pour arrêt d'activité, un autre pour non-respect des exigences de l'enregistrement et le dernier à la suite d'une restructuration du prestataire enregistré111(*).

Dans le cadre d'un enregistrement, le demandeur doit transmettre :

1) des éléments relatifs à l'honorabilité et la compétence des dirigeants et actionnaires ;

2) des éléments relatifs au dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LBC-FT) : classification des risques (informations relatives à la clientèle, canal de distribution de chaque service fourni), organisation du dispositif LBC-FT (contrôle interne, diligences clients, formation du personnel), externalisation du dispositif de LCB-FT le cas échéant (prestations confiées à un organisme externe), dispositif relatif aux opérations suspectes (détection et traitement), dispositif en matière de gel des avoirs.

Pour les PSAN souhaitant être agréés s'ajoutent des exigences sur la situation des actionnaires et du PSAN, avec notamment l'obligation de disposer d'un contrat d'assurance civile professionnelle, et des exigences en matière de sécurité informatique, avec une certification de la sécurité offerte par les produits et/ou un rapport d'audit de sécurité.

À l'initiative du Sénat, et en réponse à plusieurs affaires de faillites ou de fraude sur crypto-actifs, dont celle de la société FTX, ces exigences ont été renforcées dans le cadre de l'examen du précédent projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne. L'article 8 de ladite loi112(*), introduit sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des finances, Hervé Maurey, prévoit la mise en place d'un « enregistrement renforcé » au 1er janvier 2024.

Concrètement, les PSAN qui souhaitent être enregistrés après cette date devront satisfaire à plusieurs conditions aujourd'hui seulement prévues pour l'agrément (article L. 54-10-3 du CMF) :

- disposer d'un système de gestion des conflits d'intérêts, d'un système informatique résilient et sécurisé et d'un dispositif de sécurité et de contrôle interne adéquat ;

- conclure avec leurs clients une convention définissant leurs missions et leurs responsabilités ;

- établir une politique de conservation et s'assurer de la mise en place des moyens nécessaires à la restitution dans les meilleurs délais des actifs numériques ou d'un accès aux actifs numériques détenus pour le compte de clients ;

- ségréguer les détentions de l'entreprise de celles des clients.

2) Au niveau européen, un cadre en construction et dont les principales dispositions devraient entrer en application en 2024

La réglementation européenne a d'abord appréhendé la régulation des actifs numériques par le prisme de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LBC-FT).

La 5e directive anti-blanchiment113(*) a fait entrer dans le champ des assujettis à la LBC-FT deux catégories de prestataires : les prestataires de services d'échanges entre monnaies virtuelles et monnaies légales ainsi que les prestataires de services de portefeuilles de conservation114(*). C'est d'ailleurs pour tenir compte de ces nouvelles règles que les exigences en matière de LBC-FT ont été imposées aux PSAN souhaitant exercer leurs activités en France, dans le cadre de l'enregistrement obligatoire par l'AMF. Plus généralement, les dispositions de la 5e directive anti-blanchiment ont été transposées par une ordonnance du 15 février 2020115(*), prise sur le fondement de l'article 203 de la loi Pacte.

Toutefois, cette appréhension par les seules exigences de la LBC-FT s'est rapidement révélée insuffisante au regard du développement rapide des actifs numériques et des enjeux soulevés en matière de protection des investisseurs, de stabilité du système financier mais aussi d'innovations financière et de sécurité juridique pour les utilisateurs. Le Conseil et le Parlement européen se sont donc accordés sur un règlement de grande ampleur pour encadrer les marchés des crypto-actifs. Il s'agit du règlement du 31 mai 2023, dit règlement « MiCA »116(*).

Le régime mis en place par ce règlement, qui s'inspire largement du système français des PSAN, pionnier au sein de l'Union européenne, a vocation à remplacer les cadres nationaux.

Il repose sur un agrément obligatoire pour les prestataires de services sur cryptoactifs (PSCA), dont les exigences sont proches de l'agrément optionnel français. Les prestataires agréés bénéficieront d'un passeport européen et pourront fournir leurs services dans tous les pays de l'Union. Ils devront, par ailleurs, publier des informations relatives à leur empreinte environnementale et climatique.

La plupart des dispositions du règlement MiCA entrent en application le 30 décembre 2024, avec une période transitoire au cours de laquelle les acteurs bénéficiant déjà d'un enregistrement ou d'un agrément en droit national pourront continuer à exercer leur activité sans avoir à demander l'agrément obligatoire PSCA. Les acteurs enregistrés au régime français des PSAN avant l'entrée en vigueur du règlement pourront donc exercer leurs activités jusqu'au 1er juillet 2026. L'article 143 du règlement prévoit toutefois que les États membres peuvent décider de ne pas appliquer ce régime transitoire ou d'en réduire la durée s'ils estiment que leur cadre national est moins exigeant que celui prévu par le règlement.

Il convient de noter que, comme pour les PSAN en France, tout acteur cherchant à être agréé comme un PSCA devra satisfaire à des exigences en matière de LBC-FT. De manière plus générale, des adaptations seront apportées au cadre français pour le rendre compatible aux dispositions du règlement MiCA, le Parlement ayant habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour procéder aux modifications nécessaires117(*). Le délai d'habilitation expire le 9 mars 2024.

3) Des inquiétudes persistantes quant à l'usage des actifs numériques aux fins de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme

En dépit de l'assujettissement de certains prestataires sur actifs numériques aux obligations en matière de LBC-FT, les crypto-actifs demeurent un vecteur privilégié de blanchiment et de financement du terrorisme. Ainsi, dans son rapport annuel 2022, Tracfin118(*) a de nouveau alerté sur le recours croissant aux crypto-actifs, lesquels sont utilisés aussi bien pour le blanchiment de fonds issus d'activités criminelles que dans des circuits de fraude fiscale ou de financement du terrorisme.

En particulier, Tracfin a souligné que le recours aux crypto-actifs constituait un nouveau vecteur de financement du terrorisme, dans la mesure où il sert d'alternative au démantèlement de réseaux traditionnels et permet de contourner les mesures de conformité mises en place par les professions financières. Parmi les signaux d'alerte que doivent repérer les PSAN figurent l'envoi de fonds vers des pays vulnérables en matière de LBC-FT ou encore le fractionnement des sommes pour l'achat de cryptoactifs.

Les risques associés aux crypto-actifs occupent ainsi une place prépondérante dans la dernière Analyse nationale des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme en France119(*). En effet, le simple fait de convertir une devise en actifs numériques, puis de reconvertir ces actifs en devise peut « s'avérer particulièrement efficace pour dissimuler l'origine légale des fonds ». L'Analyse conclut que la menace liée aux actifs numériques est « très élevée s'agissant tant du blanchiment que du financement du terrorisme » et que les vulnérabilités liées à la nature même de ces actifs sont elles aussi « élevées » (anonymat, infrastructures complexes, non-traçabilité des transactions, connaissances limitées des PSAN en matière de LBC-FT, etc.).

Dans le cadre de la mise à jour de ses lignes directrices120(*), le Groupe d'action financière (Gafi), l'organisme mondial de surveillance du blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, a émis une nouvelle recommandation sur les actifs virtuels. « Pour gérer et atténuer les risques émergeant d'actifs virtuels », la recommandation n° 15 incite ainsi les pays à « s'assurer que les prestataires de services d'actifs virtuels sont réglementés à des fins de LBC/FT, et agréés ou enregistrés, et soumis à des systèmes efficaces de surveillance garantissant qu'ils respectent les obligations applicables découlant des recommandations du Gafi ». En particulier, le Gafi estime que les pays devraient s'assurer que ces prestataires obtiennent et détiennent des informations exactes sur le donneur d'ordre ainsi que sur le bénéficiaire des transferts d'actifs virtuels (identité, numéro d'identification de comptes, informations nécessaires à la traçabilité des transactions).

Le règlement du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs et modifiant à cet effet la 5e directive anti-blanchiment121(*), dit règlement « TFR », a été adopté dans ce contexte, en reconnaissant que les « récentes évolutions intervenues au niveau international, en particulier dans le cadre du Gafi » rendent nécessaire de « réglementer des catégories supplémentaires de prestataires de services sur actifs virtuels jusque-là non couverts [par la 5e directive anti-blanchiment] et d'élargir la définition actuelle des monnaies virtuelles ». Les caractéristiques mêmes des actifs numériques - rapidité des transactions, portée mondiale, anonymat - renforcent le risque qu'ils soient utilisés à des fins délictueuses, y compris dans les situations transfrontières.

Dans ce cadre, le règlement TFR prévoit notamment :

- de définir les crypto-actifs en référence à la définition des actifs virtuels figurant dans les recommandations révisées du Gafi. Ce dernier définit un actif virtuel comme la représentation numérique d'une valeur qui peut être échangée de manière digitale ou transférée et qui peut être utilisée à des fins de paiement ou d'investissement ;

- d'inclure dans la liste des services sur crypto-actifs et des PSCA couverts par le règlement les prestataires de services sur actifs virtuels recensés comme tels par le Gafi et considérés comme étant susceptibles de soulever des préoccupations en matière de LBC-FT. Le Gafi vise ainsi les échanges entre actifs virtuels et monnaies fiduciaires, les échanges entre une ou plusieurs formes d'actifs virtuels, les transferts d'actifs virtuels, la conservation et/ou l'administration d'actifs virtuels ou d'instruments permettant le contrôle de ces actifs et la participation à et la prestation de services financiers liés à l'offre d'un émetteur et/ou à la vente d'actifs virtuels ;

- de s'assurer de la traçabilité des transferts de fonds et de crypto-actifs, essentielle pour prévenir et détecter le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ainsi, pour assurer la transmission des informations tout au long de la chaîne de paiement ou de la chaîne de transfert, le règlement impose aux prestataires de services de paiement de veiller à ce que les transferts de fonds s'accompagnent d'informations sur le donneur d'ordre et le bénéficiaire de fonds et aux PSCA de veiller à ce que les transferts de crypto-actifs soient accompagnés d'informations sur l'initiateur et le bénéficiaire de ces crypto-actifs (identité, adresse du registre distribué, numéro de compte, adresse, numéro du document d'identité officiel, numéro d'identification client) ;

- d'imposer aux PSCA de prendre en compte des facteurs de risques supplémentaires de certains transferts, par exemple ceux liés à des produits, à des transactions ou à des technologies conçus pour renforcer l'anonymat (portefeuilles confidentiels, services de mixage ou de brassage), y compris lorsque ces transactions sont effectuées avec des entités établies dans des pays tiers et qui ne sont ni enregistrées, ni agréées ni réglementées dans ce pays ou lorsque ces transactions sont effectuées avec des adresses auto-hébergées ;

- d'imposer aux PSCA de conserver les informations relatives aux transferts de crypto-actifs pendant cinq ans, afin de permettre l'accès à des éléments de preuve primordiaux dans le cadre d'enquêtes pénales pour des faits de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme ;

- de renforcer les compétences des autorités de supervision pour adopter des mesures de surveillance et infliger des sanctions proportionnées, effectives et dissuasives aux prestataires ne respectant pas ces nouvelles obligations. Les États membres doivent ainsi prévoir des sanctions et mesures administratives adaptées à l'importance de la LBC-FT.

Les dispositions du règlement entrent en application le 30 décembre 2024. Elles viennent compléter, dans un domaine connexe, celles de la directive dite « DAC 8 »122(*), relative à la coopération dans le domaine fiscal et publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 6 novembre 2023. Les informations qui devront être fournies par les PSCA sur les revenus tirés de transactions sur actifs numériques feront l'objet d'un échange automatique et obligatoire entre les administrations fiscales des États membres de l'Union.

II. Une adaptation du droit monétaire et financier aux évolutions récentes du droit européen en matière de services financiers, de services d'investissement et d'actifs numériques

A. L'adaptation du code monétaire et financier à la fin de la « clause de grand-père » pour les dépositaires centraux de titres de pays tiers

Le 1 du I du présent article modifie l'article L. 441-1 du code monétaire et financier (CMF), relatif à l'agrément des dépositaires centraux de titres par l'AMF, afin de prévoir que les DCT de pays tiers fournissant leurs services en France ne sont plus « autorisés » à le faire mais « reconnus » à cet effet. Il s'agit donc d'une coordination avec le futur règlement « CSDR Refit », dont la publication est imminente123(*), et qui prévoit la fin de la « clause de grand-père » pour les DCT de pays tiers. Le régime de reconnaissance s'appliquera désormais à ces DCT.

Le a) du 3 du I du présent article rend ces dispositions applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

B. La clarification des règles pour la transmission des informations par les prestataires de services sur investissement

Le 2 du I du présent article réécrit le III bis de l'article L. 533-12 du CMF afin de prévoir que les prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuilles transmettent à leurs clients ou à leurs clients potentiels toute information en lien avec la fourniture d'un service d'investissement ou d'un service connexe par voie électronique. Toutefois, si le client est un client non professionnel, donc un particulier, il peut demander à recevoir ces informations sur support papier, sans qu'il ne soit possible pour le prestataire de s'y opposer.

Une double clarification est donc apportée : formelle, en reprenant les termes du droit européen pour la notion de client non professionnel, et de fond, en visant non pas la liste d'informations prévue au II de l'article L. 533-12 du CMF, mais bien l'ensemble des informations liées au service d'investissement ou à un service connexe.

Le b) du 3 du I du présent article prévoit que ces dispositions s'appliquent en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

C. Une demande d'habilitation à légiférer par ordonnance pour l'adaptation du droit financier et monétaire aux nouvelles obligations en matière de transferts d'actifs numériques

Le II du présent article porte une demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour prendre toute mesure relevant du domaine de la loi et visant à transposer les dispositions de la 5e directive anti-blanchiment telle que modifiée par le règlement du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs (règlement TFR). Le Gouvernement pourrait également prendre par ordonnance les mesures visant à :

- assurer la cohérence et la conformité des dispositions du code monétaire et financier et d'autres codes ainsi que d'autres dispositions législatives non codifiées aux dispositions du règlement européen précité ;

- définir les compétences respectives de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) dans la mise en oeuvre des dispositions du règlement TFR. Les informations obtenues par le rapporteur sur cet aspect indiquent que la « ligne de partage » entre l'AMF et l'ACPR devrait être conservée : l'ACPR disposant d'une compétence générale en matière de supervision des exigences de LBC-FT. Il s'agira également de désigner l'autorité en charge de la supervision des représentants permanents des futurs prestataires de services sur crypto-actifs (PSCA - règlement MiCA) : en effet, aux termes du règlement TFR, les PSCA établis dans un autre État membre de l'Union européenne mais exerçant une activité en France devront y désigner un représentant permanent, assujetti à cet égard aux obligations de transparence prévues dans le règlement précité ;

- rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions résultant de cette ordonnance, pour celles qui relèvent de la compétence de l'État dans ces collectivités, et procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires pour Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le délai d'habilitation serait de neuf mois à compter de la promulgation de la loi et le projet de loi de ratification devrait être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

III. Des adaptations nécessaires au droit européen, mais un dispositif peu lisible et une demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance qui doit être davantage encadrée

La commission tient tout d'abord à souligner le caractère illisible et incohérent du présent article. Elle regrette que des dispositions d'ampleur, de portée et de contenu si différents aient été regroupées au sein d'un même article, au détriment de son intelligibilité.

A. Des mesures de coordination et de clarification pour assurer la pleine compatibilité du droit français au droit européen

S'agissant des règles relatives aux dépositaires centraux de titres (DCT) et aux supports de communication pour les clients de prestataires de services d'investissement, la commission relève qu'il s'agit avant tout de mesures de coordination destinées à assurer la pleine compatibilité et la pleine cohérence du droit monétaire et financier français avec le droit de l'Union européenne.

La fin de la « clause de grand-père » pour les DCT de pays tiers vise à renforcer le cadre applicable à ces infrastructures fondamentales pour les marchés financiers. Les personnes entendues par le rapporteur ont par ailleurs souligné qu'aucun acteur de la place financière de Paris n'avait manifesté d'inquiétude quant à la fin de la « clause de grand-père » pour les dépositaires centraux de titres de pays tiers.

L'anticipation en droit français de l'entrée en application du règlement modifiant le règlement CSDR, avec le remplacement de la notion de DCT « autorisés » par celle de DCT « reconnus », n'a pas d'impact sur les DCT de pays tiers. En pratique en effet, aucun DCT de pays tiers ne pouvait se prévaloir d'avoir été « autorisé » à exercer ces activités puisque ce qualificatif est applicable aux seuls DCT situés dans un État membre de l'Union européenne et pas encore agréé. La disposition prévue dans le code monétaire et financier n'était donc pas pleinement opérante. En revanche, préciser qu'il s'agit désormais des dépositaires « reconnus » est un impératif pour tenir compte de la fin de la « clause de grand-père » et de la pleine application du régime de reconnaissance.

Quant aux dispositions relatives aux supports de communication des prestataires de service sur investissements, la commission relève qu'il s'agit de mesures de clarification, formelles comme de fond. La précision apportée est toutefois importante : l'erreur rédactionnelle commise dans le cadre de l'ordonnance du 15 décembre 2021 transposant la directive du 16 février 2021 a, de fait, laissé entendre qu'était seule obligatoire la transmission aux clients des informations précontractuelles, alors que la directive vise à la fois les informations précontractuelles et postérieures à la fourniture du service d'investissement. L'écart entre les deux fragilise la base juridique sur laquelle l'AMF peut s'appuyer pour mener ses contrôles et vérifier que les prestataires de services sur investissement respectent bien leurs obligations d'information au regard de la directive précitée.

Par ailleurs, et s'agissant d'un point essentiel pour les publics éloignés du numérique, la commission tient à souligner que les particuliers, en tant que clients non professionnels, pourront toujours demander à disposer de ces informations sur support papier et non par voie électronique.

B. Une demande d'habilitation à légiférer par ordonnance qui doit être plus strictement encadrée

La commission s'est interrogée sur le caractère à la fois justifié et opportun de la demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer les dispositions de la 5e directive anti-blanchiment, telle que modifiée par le règlement européen du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs (règlement TFR). Cette méthode amoindrit en effet les pouvoirs et le contrôle du Parlement, sur des dispositifs pourtant essentiels pour consolider le cadre mis en place pour lutter contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme par l'intermédiaire des actifs numériques. La méthode est à regretter, puisque la transposition et l'adaptation du droit français auraient pu avoir lieu par la voie législative classique, dans un véhicule législatif ultérieur. À ce stade de sa présentation, et dans un esprit de responsabilité, il est toutefois difficile pour le Parlement de faire autrement que d'accepter l'habilitation.

Il y a en effet d'indéniables enjeux de coordination entre les modifications apportées par l'ordonnance qui doit transposer le règlement MiCA et les modifications qui devront être apportées au droit national pour le rendre compatible avec les dispositions du règlement TFR. Les deux textes ont par ailleurs été négociés ensemble au niveau européen et prévoient une même date d'entrée en application de leurs dispositions, le 30 décembre 2024.

En l'absence de visibilité sur le contenu de l'ordonnance précitée, il est en pratique impossible de procéder à des adaptions directes du droit monétaire et financier, au risque de créer des incompatibilités et de fragiliser la sécurité juridique du régime qui sera mis en place. Les travaux de rédaction de l'ordonnance ont débuté au mois de septembre 2023 dans le cadre de groupes de travail mis en place par le Haut Comité juridique de la place financière de Paris.

Pour autant, le délai d'habilitation prévu par le présent article, de neuf mois, apparaît trop long. L'ordonnance adaptant le droit français au règlement MiCA devra être prise avant le 9 mars 2024. De fait, au moment de l'adoption du présent projet de loi, ses dispositions seront connues ou en voie de finalisation. Un délai de six mois apparaît dès lors suffisant pour transposer le règlement relatif aux transferts de fonds et de crypto-actifs et assurer sa cohérence avec les dispositions de la future ordonnance précitée. Par ailleurs, les dispositions du règlement TFR doivent entrer en application le 30 décembre 2024. Avec la perspective plausible d'une promulgation de la présente loi en mars, un délai d'habilitation de six mois ainsi qu'un délai de dépôt du projet de loi de ratification de trois mois permettraient au Parlement d'avoir connaissance des dispositions d'adaptation du droit français avant l'entrée en application des nouvelles règles.

La commission a donc adopté un amendement du rapporteur pour ramener le délai d'habilitation de neuf mois à six mois ( COM-21) ainsi qu'un amendement rédactionnel ( COM-22) du rapporteur.

La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article 7
Extension de certains pouvoirs de contrôle de l'ACPR
aux collectivités ultramarines du Pacifique et à Saint-Pierre-et-Miquelon
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article poursuit trois objectifs.

Il vise tout d'abord à rendre applicable dans les collectivités ultramarines du Pacifique et à Saint-Pierre-et-Miquelon les actes d'exécution et les actes délégués pris sur la base de la directive « BRRD » de 2014 concernant le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.

Il s'attache ensuite à permettre à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) d'exercer son contrôle de l'exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles en étendant aux collectivités ultramarines du Pacifique les dispositions relatives aux pouvoirs des organes centraux envers leurs affiliés et celles relatives aux mesures prises par l'ACPR à l'égard des affiliés des organes centraux.

Enfin, il vise à rendre effectifs les contrôles de l'ACPR et de l'Autorité des marchés financiers (AMF) au sujet de l'obligation d'identification de la résidence fiscale et du numéro fiscal du client souhaitant ouvrir un compte bancaire ou financier dans les collectivités ultramarines du Pacifique.

La commission a adopté l'article 7 modifié par un amendement rédactionnel COM-23.

I. Des collectivités outre-mer non concernées par certains dispositifs de supervision bancaire et en matière fiscale

A. Les actes d'exécution et actes délégués de la directive du 15 mai 2014 dite « BRRD » ne sont applicables ni aux collectivités ultramarines du Pacifique ni à Saint-Pierre-et-Miquelon

Dans le contexte de la crise financière de 2007-2008, de nombreux établissements financiers européens, en particulier Royal Bank of Scotland, Bankia et Dexia, ont rencontré des difficultés nécessitant une intervention publique. Pour éviter une sollicitation excessive du contribuable, l'Union européenne a développé, dans ce contexte, un cadre pour organiser la gestion des crises bancaires. La directive du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et les entreprises d'investissement124(*), dite « BRRD », s'inscrit dans ce cadre de gestion de crise et permet la mise en oeuvre d'une résolution ordonnée des établissements de crédit en cas de défaillance. Constituant un des piliers de l'« union bancaire », elle a introduit plusieurs procédures :

- l'établissement d'un plan de résolution par les banques significatives détaillant leurs activités critiques et non critiques - les dernières pouvant être abandonnées en cas de résolution ;

- la constitution, par les banques significatives, de coussins d'absorption de perte et de recapitalisation (ressources « MREL », pour exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles) sous la forme de fonds propres et d'instrument de dette de long terme, mobilisables par les autorités de résolution pour préserver les fonctions critiques ;

- une procédure de résolution par laquelle une autorité de résolution (en France, l'ACPR, et au niveau européen pour les grandes banques, le Conseil de résolution unique) obtient le pouvoir de prendre des mesures extrajudiciaires exorbitantes du droit commun pour gérer une défaillance bancaire sans passer par le tribunal de commerce, en forçant des cessions d'actifs, des remplacements de dirigeants, des conversions de dettes, des dilutions et recapitalisations, etc.

Cette directive a été transposée par une ordonnance du 20 août 2015125(*), qui est venue compléter la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires126(*), qui avait confié à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) la mise en oeuvre du régime français de résolution bancaire grâce à la création d'un collège de résolution.

La résolution est complétée par un mécanisme de résolution unique et un fonds de résolution unique auquel contribuent les banques à hauteur de 1 % des dépôts couverts (77 milliards d'euros en 2024) et qui peut compléter les ressources « MREL » en cas de besoin, conformément à un règlement du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniforme pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d'investissement127(*).

Pour l'application complète et/ou l'ajustement des conditions d'application de la directive « BRRD », la Commission européenne a adopté, entre 2015 et 2023, une vingtaine d'actes délégués ou actes d'exécution. Pour rappel, un acte délégué est un acte non législatif adopté par la Commission pour compléter ou modifier certains éléments non essentiels d'un acte législatif128(*). Lorsque des conditions uniformes d'exécution des actes juridiquement contraignants de l'Union - dont la mise en oeuvre est normalement du ressort des États membres - sont nécessaires, ces actes confèrent des compétences d'exécution à la Commission129(*), qui peut alors prendre des actes « d'exécution ».

Les actes délégués et actes d'exécution liés à la directive « BRRD »

Entre 2015 et 2023, une vingtaine d'actes délégués et d'exécution en lien avec la directive « BRRD » du 15 mai 2014 ont été pris par la Commission. Ils comprennent notamment :

- le règlement délégué (UE)  2015/63 relatif au calcul et à l'ajustement du profil de risque des établissements et des contributions des banques aux fonds de résolution et aux informations que les banques sont tenues de communiquer afin que leur contribution à un fonds de résolution puisse être calculée ;

- le règlement délégué (UE)  2016/778 relatif aux circonstances et aux conditions dans lesquelles le remboursement des contributions d'un établissement à un fonds de résolution peut être partiellement ou totalement reporté, aux critères utilisés pour déterminer les activités, services et opérations de l'établissement essentiels à l'économie, et aux critères utilisés pour déterminer les activités fondamentales et les services associés ;

- le règlement délégué (UE)  2016/860 précisant les circonstances dans lesquelles l'exclusion de l'application des pouvoirs de dépréciation ou de conversion est nécessaire en vertu de l'article 44, paragraphe 3, de la directive 2014/59/UE ;

- le règlement d'exécution (UE)  2016/911 relatif à la forme et au contenu de la description des accords de soutien financier de groupe ;

- le règlement d'exécution (UE)  2016/962 relatif aux formats, modèles et définitions uniformes pour l'identification et la transmission d'informations à l' Autorité bancaire européenne (ABE) par les autorités compétentes et les autorités de résolution ;

- le règlement délégué (UE)  2016/1075 relatif, entre autres, aux normes précisant le contenu des plans de redressement, des plans de résolution et des plans de résolution de groupe ;

- le règlement délégué (UE)  2016/1400 relatif aux éléments minimaux à inclure dans un plan de réorganisation des activités et au contenu minimum des rapports sur sa mise en oeuvre ;

- le règlement délégué (UE)  2016/1401 concernant les normes relatives aux méthodes et aux principes de valorisation des engagements résultant de produits dérivés ;

- le règlement délégué (UE)  2016/1450 relatif aux critères de la méthode permettant d'établir l'exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles ;

- le règlement délégué (UE)  2016/1712 concernant les normes relatives aux informations sur les contrats financiers ;

- le règlement délégué (UE)  2017/867 relatif aux catégories de dispositifs devant être protégées en cas de transfert partiel de propriété ;

- le règlement délégué (UE)  2018/344 relatif aux normes techniques de réglementation précisant les critères relatifs aux méthodes de valorisation de la différence de traitement dans le cadre de la procédure de résolution (valorisation 3) ;

- le règlement délégué (UE)  2018/345 relatif aux normes techniques de réglementation précisant les critères de la méthode à utiliser pour évaluer la valeur de l'actif et du passif des établissements ou entités ;

- le règlement délégué (UE)  2019/348 relatif aux normes techniques de réglementation précisant les critères à appliquer pour évaluer l'impact de la défaillance d'un établissement sur les marchés financiers, sur d'autres établissements et sur les conditions de financement ;

- le règlement d'exécution (UE)  2021/622 relatif aux normes techniques d'exécution en ce qui concerne les modèles, instructions et méthodes de déclaration à l'Autorité bancaire européenne de l'exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles ;

- le règlement délégué (UE)  2021/1118 relatif aux normes techniques de réglementation précisant la méthode à utiliser par les autorités de résolution pour estimer l'exigence visée dans la directive 2013/36/UE et l'exigence globale de coussin pour les entités de résolution au niveau consolidé du groupe de résolution lorsque le groupe de résolution n'est pas soumis à ces exigences en vertu de la directive ;

- le règlement délégué (UE)  2021/1340 relatif aux normes techniques de réglementation définissant le contenu des clauses contractuelles relatives à la reconnaissance des pouvoirs de suspension en cas de résolution ;

- le règlement délégué (UE)  2021/1527 relatif aux normes techniques de réglementation concernant la reconnaissance contractuelle des pouvoirs de dépréciation et de conversion.

Source : EUR-Lex. « Faire face aux problèmes rencontrés
par les établissements financiers en difficulté. »

L'ensemble de ces actes, constituant des règlements, sont d'application directe en métropole. Toutefois, ils nécessitent l'adoption de mesures particulières pour leur application dans certaines collectivités ultramarines.

Ainsi, comme l'a rappelé la direction générale du Trésor au rapporteur, un vaste chantier de recodification du livre VII du code monétaire et financier dédié aux outre-mer, tant dans sa partie législative que réglementaire, a débuté en 2018 pour s'achever cette année avec la loi n° 2023-594 du 13 juillet 2023 ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer et la publication, le 14 novembre 2023, de la circulaire d'application du 10 octobre 2023 du nouveau livre VII.

Un nouvel article L. 712-7 rend ainsi applicables douze règlements européens à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna qui sont des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) où le droit européen ne s'applique pas. Selon la direction générale du Trésor, un arrêté doit être prochainement publié pour rendre applicables 270 actes d'exécution et actes délégués des douze règlements dont une grande partie porte sur les exigences prudentielles. Il précisera leurs conditions d'application dans ces PTOM, conformément au II de l'article L. 712-7.

De même, l'article L. 712-8 du code monétaire et financier prévoit que le ministre de l'économie arrête, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, les conditions dans lesquelles y sont rendus applicables les règles ou décisions relatives aux normes techniques de réglementation adoptées par la Commission européenne sur le fondement des deux règlements instituant l'Autorité bancaire européenne et l'Autorité européenne des marchés financiers.

Or, l'ACPR, qui dresse un inventaire de la réglementation prudentielle applicable dans les territoires ultramarins « non communautaires » pour vérifier qu'elle peut y exercer l'intégralité des contrôles prudentiels et de résolution comme en métropole, a constaté que les actes d'exécution et les actes délégués pris sur le fondement de la directive « BRRD » devaient être rendus applicables dans les PTOM pour combler les lacunes qu'elle a identifiées dans ses missions de contrôle. Selon l'ACPR, c'est un oubli lors des travaux d'extension de la réglementation métropolitaine qui expliquerait que les actes d'exécution et actes délégués pris sur le fondement de la directive « BRRD » n'aient pas été étendus à ces collectivités. Saint-Pierre-et-Miquelon est également concernée.

B. Des pouvoirs de supervision de l'ACPR sur les organes centraux et leurs affiliés incomplets dans les collectivités ultramarines du Pacifique

Par ailleurs, les pouvoirs de résolution de l'ACPR sont limités, en outre-mer, par le fait que certaines dispositions relatives aux organes centraux et aux pouvoirs du collège de résolution ne s'appliquent ni à la Nouvelle-Calédonie, ni à la Polynésie française, ni aux îles Wallis et Futuna. En métropole, les dispositions visant à reconnaître les organes centraux et leurs pouvoirs sur leurs filiales ainsi qu'à donner le pouvoir à l'ACPR d'agir à travers ces organes centraux découlent de la transposition de la directive 2019/879 modifiant la directive 2014/59/UE, dite « BRRD », en ce qui concerne la capacité d'absorption des pertes et de recapitalisation des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et la directive 98/26/CE130(*).

En vertu du principe de spécialité législative, l'application de ces dispositions aux collectivités du Pacifique doit être expressément prévue par la loi, ce qui n'est pas le cas.

Le V de l'article L. 613-49-1 du code monétaire et financier prévoit que dans le cas d'un groupe comprenant un organe central mentionné à l'article L. 511-30 et le réseau des établissements et sociétés affiliés à cet organe central, le collège de résolution de l'ACPR évalue si les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution sont réunies, et si c'est le cas, il prend des mesures de résolution coordonnées à l'égard de l'organe central et de l'ensemble des affiliés. Il peut alors exercer tous les pouvoirs de l'organe central prévus à l'article L. 511-31 en complément des mesures de résolution, notamment en vue de redistribuer entre l'organe central et l'ensemble des affiliés les ressources résultant de l'application d'une mesure de renflouement interne.

Il est précisé que l'article L. 511-30 détermine la liste des organes centraux qui, dans un groupe mutualiste, représentent les établissements de crédit et les sociétés de financement qui leur sont affiliés auprès de la Banque de France et de l'ACPR, conformément à l'article L. 511-31 qui détermine les pouvoirs des organes centraux sur leurs affiliés (adoption de mesures visant à garantir la liquidité et la solvabilité des établissements, interdiction ou limitation de la distribution de dividendes ou de rémunérations de parts sociales, contrôle du respect de dispositions législatives et réglementaires...). L'article L. 511-32 prévoit que les organes centraux concourent, chacun pour ce qui le concerne, à l'application des dispositions européennes directement applicables régissant les établissements de crédit et les sociétés de financement et saisissent, à ce titre, l'ACPR des infractions à ces dispositions.

Or les articles L. 783-4, L. 784-4 et L. 785-3 du code monétaire et financier, prévoient expressément que le V de l'article L. 613-49-1 du même code ne s'applique pas aux collectivités du Pacifique. De même, les articles L. 773-4, L. 774-5 et L. 775-4 du code monétaire et financier, qui régissent les organes de la profession et le secret professionnel relatif aux prestataires de services bancaires, s'ils prévoient l'application aux collectivités du Pacifique des articles L. 511-29 (adhésion obligatoire à un organisme professionnel ou à un organe affilié à l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement), L. 511-33 (secret professionnel) et L. 511-34 (transmission des informations relatives à la situation financière, nécessaires à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, à l'organisation de la détection des abus de marché et à la gestion des conflits d'intérêts aux entreprises du groupe), ne prévoient pas l'application des articles L. 511-30, L. 511-31 et L. 511-32 du code monétaire et financier. Le 1° de l'article L. 781-3 du code monétaire et financier rend par ailleurs explicitement inapplicables, dans les collectivités du Pacifique, les références aux organes centraux mentionnés à l'article L. 511-30.

Selon l'étude d'impact du projet de loi, la non-application du V de l'article L. 613-49-1 et des articles L. 511-30 à L. 511-32 du code monétaire et financier dans ces collectivités pose un problème de supervision pour deux entités affiliées ultramarines du groupe BPCE, puisque la Banque de Nouvelle-Calédonie et la Banque de Tahiti sont des établissements affiliés à l'organe central Caisse d'épargne d'Île-de-France.

C. Des pouvoirs de contrôle de l'ACPR et de l'AMF sur les dispositifs internes garantissant la transmission d'informations fiscales sur les titulaires de compte dépourvus d'effet sur les institutions financières des collectivités ultramarines du Pacifique du fait de leur compétence en matière de fiscalité

Selon les tableaux mentionnés aux I des articles L. 783-2, L. 784-2 et L. 785-2 du code monétaire et financier, l'article L. 612-1 du même code est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, sous réserve d'adaptations locales prévues aux II et III de ces articles.

En particulier, le 7° du II de l'article L. 612-1 prévoit que l'ACPR est chargée de veiller au respect de l'article L. 564-2, qui prévoit que les institutions financières soumises à l'obligation de réclamer au client qui ouvre un compte chez elles les informations nécessaires à l'identification de leurs résidences fiscales et, le cas échéant, de leurs numéros d'identification fiscale131(*), notamment pour respecter leurs obligations en matière de coopération administrative dans le domaine fiscal et les conventions conclues par la France permettant un échange automatique d'informations relatives aux comptes financiers en matière fiscale132(*), et qui en cas de défaut d'information doivent transmettre à l'administration la liste des titulaires de compte n'ayant pas satisfait à ces obligations133(*), mettent en place un dispositif de contrôle interne chargé de veiller spécifiquement à la mise en place et à la bonne application des procédures internes assurant le respect de ces dispositions.

L'article L. 621-20-6 prévoit que c'est l'Autorité des marchés financiers qui veille au respect de l'article L. 564-2 par les sociétés de gestion de placements collectifs, les succursales des sociétés de gestion européennes d'OPCVM et de FIA, les placements collectifs, etc.134(*)

L'article L. 564-2 prévoit donc que ce sont les institutions financières qui sont soumises au respect de certaines dispositions fiscales qui doivent mettre en place un dispositif de contrôle interne.

Or, les collectivités ultramarines du Pacifique étant compétentes en matière fiscale135(*), les institutions financières qui y sont situées ne sont pas soumises au respect de ces dispositions fiscales, et donc ne sont pas tenues de mettre en place un tel dispositif de contrôle interne, ce qui prive d'effet en la matière les articles L. 783-2, L. 784-2 et L. 785-2.

Pourtant, les identifications de la résidence fiscale et du numéro fiscal du client titulaire du compte font partie des informations dont la collecte est imposée en application de la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal136(*), dite « DAC » et modifiée à de nombreuses reprises depuis pour aboutir à « DAC 2 », qui transcrit en droit européen un standard international d'échange d'informations dans le domaine bancaire : la norme commune de déclaration (NCD) de l'OCDE, mise en oeuvre par traité multilatéral. La France est donc tenue de s'y conformer, y compris dans ses collectivités ultramarines : en effet, le non-respect de la norme DAC/NCD fait partie des critères retenus par la Commission européenne pour l'inscription d'une juridiction extra-européenne sur la liste européenne des États et territoires non coopératifs (couramment appelés « paradis fiscaux »).

II. Une extension des compétences de l'ACPR et de l'AMF aux collectivités ultramarines et, s'agissant de la directive « BRRD », à Saint-Pierre-et-Miquelon

A. L'extension de l'application des actes délégués et des actes d'exécution de la directive « BRRD » aux collectivités ultramarines du Pacifique et à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le du I introduit dans le code monétaire et financier un nouvel article L. 712-11 pour rendre applicable par arrêté les actes délégués et actes d'exécution de la directive « BRRD » du 15 mai 2014. Le  du I modifie l'article L. 712-9 du même code, qui encadre l'application aux PTOM des règlements mentionnés aux articles L. 712-7 et L. 712-8, de façon à mentionner également les actes délégués et actes d'exécution mentionnés au nouvel article L. 712-11.

B. L'extension des pouvoirs de résolution de l'ACPR sur les organes centraux et affiliés dans les collectivités ultramarines du Pacifique

Le II modifie les tableaux des articles L. 773-4, L. 744-4 et L. 775-4 pour rendre applicables respectivement en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ( du II) et aux îles Wallis et Futuna ( du II) l'article L. 511-30 et l'article L. 511-31 du code monétaire et financier à l'exception de son troisième alinéa137(*), ainsi que l'article L. 511-32 du même code.

Pour l'application de ces tableaux, le II prévoit également une rédaction de l'article L. 511-32 qui ne fasse pas référence aux « dispositions européennes directement applicables », ce qui ne fait pas sens pour les collectivités ultramarines du Pacifique et Saint-Pierre-et-Miquelon, mais aux articles L. 712-7 à L. 712-9 et L. 712-11.

Pour coordination, le  du II procède à l'abrogation de l'article L. 781-3 du code monétaire et financier.

Le du II prévoit que le V de l'article L. 613-49-1 du code monétaire et financier, qui autorise le collège de résolution de l'ACPR à prendre des mesures de résolution coordonnées à l'égard d'un organe central et ses affiliés, s'applique également en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.

Ainsi, selon l'étude d'impact, l'ACPR pourra agir en résolution par le biais des organes centraux sur leurs établissements affiliés exerçant dans les collectivités du Pacifique.

C. Extension du contrôle du respect d'obligations de déclaration fiscale par les institutions financières par l'ACPR et l'AMF aux collectivités ultramarines du Pacifique

Le III modifie les articles L. 783-2, L. 784-2, L. 785-2 d'une part, et L. 783-10, L. 784-10 et L. 785-9 d'autre part, pour prévoir que respectivement l'ACPR et l'AMF sont désormais compétentes, dans les collectivités ultramarines du Pacifique, pour contrôler l'application, par les institutions financières, de dispositions en vigueur ayant localement le même objet que celui prévu par l'article L. 564-2 du code monétaire et financier, lequel est actuellement dépourvu d'effet dans ces collectivités.

III. L'adoption de dispositions d'application du droit européen aux outre-mer

L'ensemble des dispositions prévues par le présent article n'ont d'autre but que de faire appliquer dans certaines collectivités d'outre-mer des dispositions permettant d'assurer le rôle de supervision de l'ACPR sur les activités bancaires prévu par les textes européens, ainsi que le contrôle, par l'ACPR et l'AMF, du respect de certains standards internationaux d'échange d'informations par les institutions financières avec l'administration. En ce sens, l'article ne se borne certes pas à introduire dans le droit français des mesures dont la transposition est obligatoire, mais il procède à une harmonisation bienvenue et qui ne pose aucune difficulté entre l'Hexagone et les collectivités visées.

S'agissant des dispositions relatives aux organes centraux et leurs affiliés, le présent article a scindé en deux celles concernant, d'une part, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, et d'autre part, les îles Wallis et Futuna. L'amendement rédactionnel COM-23 vise simplement à les regrouper pour éviter d'inutiles longueurs dans le présent article.

La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié.

Article 7 bis (nouveau)
Introduction d'un délai maximal de cinq jours
pour activer le mécanisme de garantie des dépôts

Cet article additionnel, issu d'un amendement du Gouvernement, vise à autoriser la mise en oeuvre du mécanisme de garantie des dépôts dans un délai de cinq jours maximum après la constatation de la non-restitution des dépôts par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, conformément aux dispositions prévues à l'article 3 de la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts. Il vise donc à assurer la correcte application du droit européen.

La commission a adopté l'article 7 bis ainsi rédigé.

I. Une mise en oeuvre du mécanisme de garantie des dépôts moins bien encadrée et moins précise que ne le prévoit le droit européen

Créée par la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière, la garantie des dépôts s'exerce dans la limite de 100 000 euros par l'intermédiaire du fonds de garantie des dépôts et de résolution, dont les missions sont définies par l'article L. 312-4 du code monétaire et financier.

Le système de garantie des dépôts a été rénové au niveau européen en 2014 dans le cadre de la mise en oeuvre de l'union bancaire, dont la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts constitue un pilier avec les dispositions concernant le redressement des banques et la résolution de leurs défaillances et celles touchant aux exigences de fonds propres.

L'article L. 312-5 du code monétaire et financier (CMF), dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière financière et transposant la directive 2014/59/UE dite « BRRD » et la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts138(*), prévoient que le mécanisme de garantie des dépôts, au titre duquel les établissements de crédit adhèrent au fonds de garantie des dépôts et de résolution139(*), est mis en oeuvre sur demande de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) dès qu'elle constate qu'un de ces établissements n'est plus en mesure de restituer immédiatement ou à terme rapproché les dépôts de leurs clients140(*). Cela signifie qu'il n'est en droit admis aucun délai entre cette constatation et la demande de l'ACPR.

Or, sur ce point, la directive 2014/49/UE est plus précise que l'article L. 312-5 puisqu'en son article 3, elle prévoit que l'autorité compétente - en France l'ACPR - doit établir le constat que l'établissement de crédit n'apparaît pas en mesure de restituer un dépôt « dès que possible, et en tout état de cause au plus tard cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois qu'un établissement de crédit n'a pas restitué les dépôts échus et exigibles ». La directive autorise donc la mise en oeuvre du mécanisme de garantie des dépôts dans un délai de cinq jours maximum après la constatation de la non-restitution des dépôts.

II. L'introduction d'un délai maximal de cinq jours pour activer le mécanisme de garantie des dépôts

Le présent article, issu d'un amendement COM-73 du Gouvernement, vise à modifier l'article L. 312-5 du code monétaire et financier pour assurer une transposition plus fidèle de la directive 2014/49/UE relative au système de garantie des dépôts.

Il prévoit que le mécanisme de garantie des dépôts est mis en oeuvre à la demande de l'ACPR lorsque celle-ci constate qu'un établissement de crédit n'est plus en mesure de restituer, immédiatement ou à terme rapproché, les dépôts, et au plus tard dans les cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois que cet établissement de crédit ne les a pas restitués.

Par ailleurs, le présent article, en modifiant les tableaux des articles L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 du code monétaire et financier, prévoit l'application de ces dispositions à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.

III. Un article qui permet une correcte application du droit européen

Le présent article vise simplement à prévoir le délai de cinq jours maximum, lequel n'était pas précisé jusqu'alors et laissait donc subsister un certain flou quant aux conditions concrètes de mise en oeuvre du mécanisme de garantie des dépôts, entre la constatation de difficultés à restituer les dépôts et cette mise en oeuvre. Il est en cela plus fidèle à la directive 2014/49/UE. S'il peut paraître éloigné des dispositions initiales du texte, il modifie bien la nature des compétences du superviseur, l'ACPR, dont l'étendue - géographique - est également modifiée par l'article 7.

Cet article ayant pour objectif d'assurer une correcte application du droit européen, le rapporteur a prononcé un avis favorable sur l'amendement qui en est à l'origine.

La commission a adopté l'article 7 bis ainsi rédigé.

Article 8
Compétences de la DGCCRF en matière de paiements transfrontaliers dans l'Union et pouvoirs d'enquête des autorités françaises
en matière de subventions étrangères faussant le marché intérieur
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à étendre l'application du règlement du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, ainsi qu'à adapter à ce nouveau règlement les dispositions encadrant les compétences de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en la matière.

Par ailleurs, cet article vise à conférer au ministre de l'économie et aux fonctionnaires qu'il a désignés ou habilités des pouvoirs d'enquête renforcés pour assurer l'application effective du règlement du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur. Il adapte cette disposition aux îles Wallis et Futuna.

La commission a adopté l'article 8 sans modification.

I. Un droit français qui ne tient pas encore compte de règlements de 2021 et 2022 relatifs aux paiements transfrontaliers et aux subventions étrangères faussant le marché intérieur

A. Le droit français n'a pas encore été adapté au nouveau règlement de juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers, remplaçant celui de 2009

Actuellement, en application du 3° de l'article L. 511-7 du code de la consommation, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est l'autorité compétente pour veiller au respect des dispositions relatives aux frais applicables aux paiements transfrontaliers et aux paiements nationaux correspondants - figurant anciennement aux paragraphes 1 et 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 924/2009 ainsi mentionnés dans l'article L. 511-7 du code de la consommation. Il s'agit pour la DGCCRF de contrôler l'alignement des frais entre ceux facturés pour des paiements transfrontaliers en euros et des frais facturés pour des mêmes paiements nationaux dans une autre devise. Ce contrôle peut prendre la forme d'enquête par les enquêteurs de la DGCCRF répartis sur le territoire et par des enquêtes par le Service national d'enquêtes de la DGCCRF141(*).

Un nouveau règlement concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union a toutefois été adopté le 14 juillet 2021142(*) : il établit des règles concernant les paiements transfrontaliers et la transparence des frais de conversion monétaire au sein de l'Union. Ce règlement s'applique depuis le 19 août 2021. Pour la France, il concerne les opérations de change effectuées par les établissements de crédit, les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique et les établissements de paiement agréés par l'ACPR, ainsi que les changeurs manuels enregistrés auprès de l'ACPR.

Le règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil
du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers
dans l'Union, ou « CBPR »

Le règlement du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union (CBPR, pour « cross-border payments regulation ») codifie et adapte un précédent règlement du 16 septembre 2009. Il vise à garantir un principe d'égalité des frais appliqués :

- aux paiements transfrontaliers en euros et aux paiements correspondants effectués à l'intérieur d'un État membre ;

- aux paiements transfrontaliers en euros dans l'Union et aux paiements nationaux correspondants réalisés dans la monnaie nationale d'un État membre n'appartenant pas à la zone euro dans lequel se trouve le prestataire de services de paiement de l'utilisateur de services de paiement.

Ce dispositif vise également à permettre la comparabilité des frais de conversion monétaire pour les paiements liés à une carte (exprimés sous la forme de marges de pourcentage sur les derniers taux de change de référence de l'euro disponibles). À cette fin, le CBPR met à la charge des prestataires de services de paiement et des parties fournissant des services de conversion monétaire à un distributeur automatique de billets ou à un point de vente (par exemple en France, les changeurs manuels) des obligations de transparence : affichage et délivrance d'une information précontractuelle. Des obligations d'informations sont également prévues lorsqu'un service de conversion monétaire est proposé par le prestataire de services de paiement du payeur en relation avec un virement.

Source : réponses de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution
au questionnaire du rapporteur

Il prévoit notamment, aux paragraphes 1 et 3 de l'article 3 - dispositions proches des paragraphes 1 et 2 du règlement de 2009 - que les frais pour les paiements transfrontaliers en euros ou dans la monnaie nationale de ces États membres devraient être les mêmes que pour les paiements correspondants au sein d'un État membre.

Il prévoit également en ses articles 4, 5 et 6 des dispositions applicables aux frais de conversion monétaire relatifs à des opérations liées à la carte ainsi qu'aux virements, et des mesures destinées à faciliter l'automatisation des paiements, qui précisent les obligations prévues par la directive sur les services de paiement143(*). Ces dispositions s'appliquent, pour l'article 4, aux prestataires de services de paiement et aux parties fournissant des services de conversion monétaire à un distributeur automatique de billets ou à un point de vente144(*), et pour les articles 5 et 6, aux prestataires de services de paiement.

Le droit français n'a toutefois pas été entièrement adapté à ces nouvelles dispositions. En particulier, l'article L. 511-7 fait encore référence au règlement précédent du 16 septembre 2009, pourtant abrogé par l'article 15 du règlement du 14 juillet 2021.

B. Le règlement de décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur vient combler un vide juridique, mais, bien que d'application directe, n'a pas reçu sa pleine effectivité en droit français

Le règlement (UE) 2022/2560 du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur a vu ses modalités de mise en oeuvre précisées par le règlement d'exécution (UE) 2023/1441 de la Commission du 10 juillet 2023. Ainsi que l'indique l'article 1er du règlement du 14 décembre 2022, celui-ci a pour objectif « de lutter contre les distorsions causées, directement ou indirectement, par les subventions étrangères ».

Selon l'étude d'impact du projet de loi, ce nouveau règlement comble un vide juridique en droit de l'Union, puisque la Commission ne disposait jusqu'alors d'aucun pouvoir pour remédier aux effets de distorsion, dans le marché intérieur, des subventions octroyées par des pays tiers. Le règlement comporte trois instruments : l'instrument « ex-officio », qui permet à la Commission d'ouvrir des enquêtes de sa propre initiative, l'instrument « concentrations » et l'instrument « marchés publics ou concessions », qui imposent l'un comme l'autre une obligation de notification des opérations significatives et à la suite de laquelle la Commission peut, en cas de distorsion, interdire la concentration ou l'attribution du marché, ou les autoriser si elles sont accompagnées d'engagements visant à remédier à cette distorsion.

Le règlement précise également, en son article 14, les modalités selon lesquelles les autorités nationales peuvent ou doivent prêter assistance à la Commission européenne dans le cadre des enquêtes menées en application de ce règlement. En particulier, le paragraphe 5 dispose qu'à la demande de l'État membre ou de la Commission, les agents de l'État membre peuvent prêter assistance à la Commission pour mener des inspections, le paragraphe 6 dispose que, lorsqu'une entreprise s'oppose à une inspection, l'État membre doit prêter assistance à la Commission en usant si nécessaire d'un pouvoir de contrainte pouvant s'appuyer sur une autorisation judiciaire, tandis que le paragraphe 7 dispose qu'à la demande de la Commission, un État membre est tenu d'exécuter toute inspection ou autre mesure d'enquête.

Or, si le règlement est d'application directe, les conditions concrètes d'application de ces dispositions nécessitent des précisions relatives à la nature des agents sollicités et de leurs pouvoirs d'enquête, lesquelles n'ont pas encore été introduites en droit interne.

II. Les conditions d'application des règlements concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union et relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur

A. S'agissant des paiements transfrontaliers, la compétence de la DGCCRF ferait désormais référence au règlement de 2021, lequel s'appliquerait dans les pays et territoires d'outre-mer

En modifiant le 3° de l'article L. 511-7 du code de la consommation, le II du présent article procède à l'adaptation de la référence textuelle pour déterminer la compétence de la DGCCRF quant au contrôle du respect des dispositions relatives aux frais applicables aux paiements transfrontaliers et aux paiements nationaux correspondants. Ses agents seraient désormais habilités à rechercher et à constater les infractions ou les manquements aux dispositions non plus des 1 et 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 924/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 modifié, concernant les paiements transfrontaliers dans la Communauté, mais à celles des paragraphes 1 et 3 de l'article 3 du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union.

Le I vise, en modifiant l'article L. 712-7 du code monétaire et financier, à appliquer ce même règlement à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.

B. La précision de la nature des pouvoirs d'enquêtes des autorités françaises pour contrôler l'application du règlement de 2022 sur les subventions étrangères faussant le marché intérieur

Le du III introduit un nouvel article L. 450-13 dans le code du commerce, qui prévoit que le ministre de l'économie et les fonctionnaires qu'il a désignés ou habilités disposent des pouvoirs qui leur sont reconnus par le livre IV du code de commerce pour la mise en oeuvre des paragraphes 5 à 7 de l'article 14 du règlement du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur. Ils consistent notamment à pouvoir « pénétrer dans tous lieux utilisés à des fins professionnelles et dans les lieux d'exécution d'une prestation de services, ainsi qu'accéder à tous moyens de transport à usage professionnel », « exiger la communication et obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des livres, factures et autres documents professionnels de toute nature [...] », et à « recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement, document ou toute justification nécessaire au contrôle »145(*). Les fonctionnaires habilités peuvent également « procéder à la pose de scellés sur tous les locaux commerciaux, documents et supports d'information dans la limite de la durée de la visite de ces locaux » sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judicaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter146(*).

Comme l'a rappelé la direction générale du Trésor au rapporteur, les agents français disposeraient ainsi des mêmes pouvoirs que ceux dévolus aux agents de la Commission européenne par l'article 14, paragraphe 2, du règlement (UE) 2020/2560, comprenant en particulier la possibilité d'accéder à tous les locaux, terrains et moyens de transport de l'entreprise ou association d'entreprises, de contrôler les livres et autres documents professionnels et à demander des explications sur ceux-ci à tout représentant ou membre du personnel, et encore d'apposer des scellés sur tous les locaux commerciaux et livres ou documents pendant la durée de l'inspection et dans la mesure où cela est nécessaire aux fins de celle-ci.

Les et du III prévoient l'application et les adaptations nécessaires de cet article aux îles Wallis et Futuna. Ils modifient pour cela les articles L. 950-1 et L. 954-9 du code de commerce.

III. Une adaptation nécessaire du droit français pour rendre effectifs les règlements européens concernant les paiements transfrontaliers et les subventions étrangères faussant le marché intérieur

Hormis la disposition prévoyant l'application du règlement concernant les paiements transfrontaliers aux PTOM, qui ne paraît pas indispensable au respect du droit européen, mais pour laquelle aucune difficulté n'a été identifiée par votre rapporteur et qui est même bienvenue, les dispositions comprises dans le présent article paraissent nécessaires à la correcte application du droit européen.

Le rapporteur s'était initialement interrogé sur l'absence de mention de l'ACPR comme autorité compétente pour veiller au respect des dispositions relatives aux frais de conversion monétaire pour les paiements liés à une carte ou en relation avec un virement, figurant aux articles 4 à 6 du CBPR. Toutefois, l'avis du Conseil d'État a permis de répondre à ces questionnements : il estimait en effet que les dispositions définissant l'ACPR comme autorité compétente pour l'application de ces dispositions, initialement contenues dans le présent article, n'étaient pas utiles : dans son avis du 14 novembre 2023, « le Conseil d'État observe que les dispositions du projet sont redondantes, à la fois, avec celles de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier qui habilitent déjà l'Autorité à contrôler le respect par les personnes soumises à son contrôle “des dispositions européennes qui leur sont directement applicables” et lui attribuent un pouvoir de sanction et avec celles du règlement 2021/1230 précité. Elles ne sont, par suite, pas nécessaires à l'exécution de ce règlement (CJCE, 11 février 1971, Fleischkontor c. Hauptzollamt Hamburg, aff. 39/70). Il propose, dès lors, de ne pas les retenir. » Cela a conduit le Gouvernement à les retirer du présent article.

Le rapporteur note que, pour l'application du règlement de juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers, l'ACPR devra s'assurer du respect par les prestataires de services de paiement ainsi que par tous les acteurs fournissant des services de conversion monétaire, qui sont sous sa responsabilité, de la transparence en matière de frais appliqués à la fois pour les virements et les opérations liées à une carte, conformément aux articles 4, 5 et 6 du règlement. Le contrôle de l'ACPR s'inscrira dans la supervision large des pratiques commerciales du secteur bancaire et des paiements qu'elle effectue déjà. Notamment, ces obligations de transparence touchent, en plus de l'information à destination des consommateurs lors de la réalisation d'une opération de conversion, à la publication permanente d'informations sur les frais pratiqués, ce que l'ACPR pourra vérifier au titre de cette supervision.

La commission a adopté l'article 8 sans modification.

CHAPITRE IV
Dispositions relatives à l'assistance internationale au recouvrement
Article 9
Mise en conformité de mesures de transposition
relatives à l'assistance mutuelle
en matière de recouvrement des créances fiscales
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à mettre en conformité le droit français avec l'article 23 de la directive 2010/24/UE du 16 mars 2010 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures. Il prévoit ainsi que, contrairement à la première transposition de cette directive assurée par l'article 59 de la loi de finances rectificative pour 2011, les données échangées dans le cadre de l'assistance internationale au recouvrement (AIR) peuvent être utilisées à d'autres fins que le recouvrement et la prise de mesures conservatoires, si cette utilisation est permise par le droit de l'État de provenance des données. Outre cette correction, le présent article assure une transposition plus complète de l'article 23 de la directive du 16 mars 2010, en encadrant les modalités de partage des informations reçues par la France dans le cadre de l'AIR avec un État tiers.

La commission a adopté l'article 9 modifié par un amendement rédactionnel COM-24.

I. Selon le droit européen, les données échangées dans le cadre de l'assistance internationale au recouvrement devraient sous certaines conditions pouvoir être utilisées à d'autres fins que le recouvrement, ce que ne permet pas le droit français

A. Le fonctionnement de l'assistance internationale au recouvrement (AIR)

Si les contribuables peuvent résider ou posséder des actifs hors du territoire national, les autorités fiscales ne sont en principe pas en mesure d'engager une action en recouvrement forcé. L'assistance internationale au recouvrement (AIR) permet dans ces conditions à l'administration fiscale d'un État d'obtenir l'aide d'un autre État pour assurer le recouvrement de l'impôt, et ainsi limiter l'évasion et la fraude fiscale.

Concrètement, le comptable public peut ainsi demander à d'autres États des renseignements sur un débiteur parti, ou résident à l'étranger, ou sur le patrimoine dont il peut disposer dans cet État, il peut également notifier ou signifier à des débiteurs domiciliés à l'étranger des actes préalables aux poursuites ou des actes qui résultent des poursuites engagées sur le sol français à l'encontre du débiteur domicilié à l'étranger, ou encore engager à l'encontre de ce débiteur le recouvrement forcé ou la prise de mesures conservatoires dans le cadre d'une convention fiscale multilatérale ou bilatérale147(*) prévoyant l'assistance au recouvrement ou dans le cadre de la directive 2010/24/UE du 16 mars 2010148(*) et de son règlement d'application 1189/2011 du 18 novembre 2011 modifié149(*), qui ont instauré un régime d'assistance mutuelle au recouvrement forcé des créances fiscales et douanières entre les États membres de l'Union européenne (UE).

Cette directive, qui crée un dispositif d'AIR au niveau européen, est entrée en vigueur le 1er janvier 2012. Elle a été transposée par l'article 59 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative de 2011 dans le livre des procédures fiscales (LPF), le code des douanes, le code rural et de la pêche maritime (CRPM) et le code général des impôts.

B. Une utilisation des données sollicitées dans le cadre de l'AIR à d'autres fins que le recouvrement de l'impôt trop limitée par le droit français par rapport au droit européen

L'AIR peut s'accompagner d'un échange de données entre administrations fiscales de différents États. Les données échangées peuvent être celles contenues dans une demande d'assistance au recouvrement de l'impôt ou celles reçues d'une autorité étrangère à la suite d'une demande de renseignement.

Ainsi, l'article L. 283 D du LPF, l'article 349 sexies du code des douanes et l'article L. 612-5 du CRPM prévoient la communication aux administrations des autres États membres de l'Union européenne de toute information « vraisemblablement pertinente » pour le recouvrement des créances fiscales (taxes, impôts et droits, sanctions, amendes, redevances et majorations administratives liées aux créances...) à l'exception de celle qui ne pourrait être obtenue pour le recouvrement de leurs propres créances de même nature sur la base de la législation en vigueur dans cet État. Les informations transmises ne peuvent contenir des renseignements qui révéleraient un secret des affaires ou un secret professionnel ou dont la communication serait de nature à porter atteinte à la sécurité ou à l'ordre publics. Il s'agit essentiellement de données d'identification du redevable, de ses codébiteurs, héritiers ou ayant droit et des tiers détenteurs. Figurent en outre sur les demandes les caractéristiques de la créance fiscale ainsi que le récapitulatif des actions déjà menées. Les informations échangées portent notamment sur l'identification du débiteur, la nature et la localisation des biens et comptes bancaires en sa possession, et peuvent être transmises sur demande ou de manière spontanée.

Les articles précédemment mentionnés prévoient également que les informations échangées dans le cadre de l'assistance internationale au recouvrement ne peuvent être transmises qu'aux fins de mise en oeuvre de mesures de recouvrement ou conservatoires portant sur les créances mentionnées.

Pourtant, le paragraphe 3 de l'article 23 de la directive 2010/24/UE énonçait que « l'État membre qui fournit les informations en autorise l'utilisation à des fins autres [que la mise en oeuvre de mesures exécutoires ou conservatoires en ce qui concerne les créances couvertes par la directive et que l'établissement et le recouvrement des cotisations sociales obligatoires] dans l'État membre qui les reçoit lorsque la législation de l'État membre fournissant les informations en permettrait l'utilisation à des fins similaires. » On observe donc une divergence entre cette disposition et celles retenues pour la transposition de la directive : la Commission européenne a constaté, en 2022, l'interprétation trop stricte de la directive par la France150(*).

Par ailleurs, le paragraphe 4 de l'article 23 autorise la transmission à un État membre tiers, à des fins de recouvrement, d'informations échangées entre deux États membres, l'État membre à l'origine des informations devant être informé de cette transmission et pouvant s'y opposer dans un délai de dix jours ouvrables. Le paragraphe 5 de cet article prévoit que l'autorisation d'utiliser, conformément au paragraphe 3, des informations transmises conformément au paragraphe 4 ne peut être octroyée que par l'État membre d'où proviennent les informations.

II. Une transposition complète de l'article 23 de la directive du 16 mars 2010 corrige le droit interne

A. La correction du droit interne

Les des I et II et le a) du du III modifient respectivement les articles L. 283 D du LPF, 349 sexies du code des douanes et L. 612-5 du CRPM de façon à ce que les administrations financières et les organismes payeurs compétents151(*) autorisent, dans le cadre de la transmission d'informations vraisemblablement pertinentes pour le recouvrement des créances fiscales, les administrations des autres États membres à utiliser les informations transmises à d'autres fins que ce recouvrement, dès lors qu'une telle utilisation est permise par la législation française dans le cadre national.

Réciproquement, selon les des I et II et le c) du  du III, modifiant les mêmes articles, les informations reçues dans ce cadre peuvent utilisées à toute autre fin que celle du recouvrement si une telle utilisation est permise dans l'État membre de provenance initiale des informations conformément à sa législation interne. L'administration bénéficiaire est soumise au secret professionnel dans les termes des articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

Le du II modifie par ailleurs l'article 346 sexies du code des douanes pour prévoir que les informations échangées dans le cadre de l'AIR peuvent être invoquées ou utilisées comme preuves par les administrations financières.

B. Une transposition complète de l'article 23 de la directive 2010/24/UE et une adaptation à l'évolution du droit européen

Les des I et II et le b) du du III transposent les paragraphes 4 et 5 de l'article 23 de la directive 2010/24/UE et organisent le partage des informations transmises par un État membre à la France avec un État tiers en complétant les articles L. 283 D du LPF, 349 sexies du code des douanes et L. 612-5 du CRPM. Il est nécessaire de demander une autorisation préalable à l'État membre de provenance, mais en l'absence de réponse de celui-ci dans un délai de dix jours ouvrables à compter de la date de demande d'autorisation, les informations sont transmises à l'État tiers.

En outre, pour la définition de l'organisme payeur compétent152(*) qui intervient dans l'AIR, le  du III modifie l'article L. 612-2 du CRPM et prévoit qu'il est désormais fait référence au règlement (UE) 2021/2116 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune, en lieu et place de la référence au règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil du 21 juin 2005 relatif au financement de la politique agricole commune.

Les des I et II procèdent à des corrections rédactionnelles.

III. Une adaptation nécessaire du droit français pour permettre l'utilisation des données échangées dans le cadre de l'AIR à des fins autres que le recouvrement, conformément à la directive 2010/24/UE

Les dispositions prévues par le présent article se bornent à corriger une erreur de transposition intervenue en 2011 et à compléter le droit français pour assurer une transposition complète de l'article 23 de la directive 2010/24/UE. Elles sont donc nécessaires et bienvenues.

Outre l'objectif de mettre en conformité le droit français au droit européen, ces dispositions permettraient de remplir des objectifs utiles. Selon la direction générale des finances publiques, en effet, les données utilisées à d'autres fins que le recouvrement pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, en matière d'action économique et de conseil aux opérateurs du commerce extérieur, mais aussi en matière de prévention et de soutien aux entreprises en difficulté.

La commission a toutefois adopté un amendement rédactionnel COM-24 du rapporteur portant sur les alinéas précisant que l'administration bénéficiaire des informations est « soumise au secret professionnel dans les termes des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ».

La commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.

TITRE II
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE
CHAPITRE Ier
Dispositions relatives aux batteries, à la collecte
et à la valorisation des déchets
Article 10
Devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service ou sur le marché des batteries

Cet article vise à préciser le régime de sanction et de contrôle applicable au devoir de diligence pour les metteurs en service et sur le marché de batteries.

La commission constate que le dispositif tire les leçons du devoir de diligence existant dans le domaine des minerais de conflit. Elle appelle le Gouvernement à achever la création d'un service à compétence nationale dédié spécifiquement au contrôle du devoir de diligence.

La commission a adopté deux amendements, visant à aligner le champ des entreprises assujetties à l'article avec celui prévu par le droit européen et à corriger une erreur rédactionnelle.

La commission a adopté l'article 10 ainsi modifié.

I. Le règlement 2023/1542 crée un devoir de diligence pour les producteurs de batteries, sur le modèle du mécanisme existant pour les minerais de conflit

A. Le devoir de diligence, qui concerne à l'origine le bois puis les minerais de conflit, reste d'application limitée

Le commerce international de marchandises est traditionnellement encadré par deux grands types de mécanismes :

- les mécanismes classiques de contrôle a priori (production d'une certification ou d'une autorisation) ;

- les mécanismes plus récents de devoir de diligence, dont la logique repose sur la responsabilité sociale des entreprises et sur un système de contrôle a posteriori du respect de leurs obligations de transparence et d'information sur l'origine des matières premières.

Traduction du terme juridique américain de due diligence, le devoir de diligence a été introduit en droit européen par le règlement 995/2010 du 20 octobre 2010153(*) qui établit des obligations s'appliquant aux metteurs sur le marché du bois.

Il a ensuite été étendu par le règlement 2017/821 sur les minerais de conflit154(*), dit « règlement 3TG », qui a instauré un devoir de diligence pour un nombre limité de minerais (or, étain, tantale, tungstène) provenant de zones en conflit, principalement en Afrique.

Les différentes étapes du processus de diligence

Source : OCDE, 2018

Le bilan de ce devoir de diligence reste cependant mitigé pour les minerais de conflit : la majorité des entreprises assujetties ne respecte pas à ce jour les obligations du règlement, selon la direction générale de l'aménagement du logement et de la nature (DGALN), en raison notamment d'un manque d'information.

Face à ce constat, l'administration étudie depuis janvier 2023 l'opportunité de créer un service à compétence nationale (SCN) relatif au commerce et à l'exploitation de certaines ressources naturelles (CERN), rattaché à la direction de l'eau et de la biodiversité (DEB) et chargé spécifiquement du contrôle de la mise en oeuvre du devoir de diligence.

B. Le règlement 2023/1542 relatif aux batteries étend le devoir de diligence aux batteries tout en corrigeant les lacunes du mécanisme

Dans le contexte de transition écologique, qui nécessite notamment l'électrification des véhicules, le développement et la production de batteries constituent un impératif stratégique.

Cet impératif a conduit l'Union européenne à réformer le cadre de régulation des batteries, en adoptant le 12 juillet 2023 le règlement 2023/1542 relatif aux batteries155(*), qui s'inscrit dans le cadre du Pacte vert. Ce nouveau cadre réglementaire est applicable à l'ensemble des batteries, y compris les déchets de batteries portables, les batteries de véhicules, les batteries industrielles et les batteries destinées aux moyens de transport légers.

La question de la transparence de la chaîne d'approvisionnement dans le secteur des batteries apparaît cruciale : la filière européenne est fortement dépendante de pays tiers pour l'extraction et le raffinage de métaux critiques.

Les métaux critiques dans la fabrication des batteries

La production de batteries nécessite l'importation de métaux dits « rares », car extraits dans un nombre limité de pays. C'est notamment le cas du cobalt, dont 86 % de la production européenne est importée, principalement de la République démocratique du Congo, du lithium, dont 100 % de la production est importée, majoritairement du Chili et du graphite, importé à 98 %, en provenance majoritaire de Chine.

Afin de limiter les risques environnementaux et sociaux liés à l'importation de ces produits le règlement étend le devoir de diligence aux metteurs sur le marché de batteries dont le chiffre d'affaires net annuel excède 40 millions d'euros, ce qui inclut à la fois :

- les importateurs de batteries ;

- les fabricants de batteries, dont les futures gigafactories françaises.

Le champ est plus limité que pour le devoir de diligence des minerais de conflit, qui concerne à titre principal des petites et moyennes entreprises (PME, environ 80 % des entreprises assujetties). Le règlement tire ainsi les leçons des difficultés du régime des minerais de conflit, en limitant l'obligation de devoir de diligence aux entreprises ayant les moyens d'y répondre.

Le risque existe cependant d'un contournement de la réglementation par la sous-traitance de la mise sur le marché ou de l'importation à des PME.

Les entreprises assujetties ont pour obligation de prendre en compte un certain nombre de risques pour :

- l'environnement, le climat et la santé publique : risques relatifs à l'air, à l'eau, au sol, à la biodiversité, aux substances dangereuses, aux bruits et vibrations, à la sécurité des installations, à la consommation d'énergie, aux déchets et aux résidus ;

- les droits de l'homme, les droits des travailleurs et les relations sociales : risques relatifs à la sécurité et à l'hygiène au travail, au travail des enfants, au travail forcé, aux discriminations et aux libertés syndicales.

La définition des risques concernés est donc plus large que pour les minerais de conflit ou le bois, pour lesquels le devoir de diligence ne concerne que les enjeux relatifs aux droits de l'homme, aux droits des travailleurs et aux relations sociales.

Concrètement, ce devoir de diligence se traduit par quatre types d'obligations, à différents stades de la survenance du risque :

- création d'un système de gestion au sein de l'entreprise en amont du risque ;

- gestion du risque en aval ;

- audit réalisé périodiquement par un tiers indépendant ;

- communication d'informations au public.

Le règlement laisse le soin aux États membres de définir le régime de contrôle et de sanction de ces obligations, en fixant cependant certaines conditions : en cas de constatation de non-conformité, l'État doit exiger de l'opérateur économique qu'il « mette fin au cas de non-conformité ».

Dès lors que cette non-conformité persiste, il est nécessaire de « prendre toutes les mesures appropriées pour restreindre ou interdire la mise à disposition des batteries sur le marché par l'opérateur économique ».

Ces dispositions constituent une nouveauté par rapport au devoir de diligence des minerais de conflit, qui ne prévoyait l'éventualité d'imposer des sanctions qu'après une clause de revoyure.

II. Le présent article assure la pleine applicabilité du devoir de diligence en détaillant les sanctions applicables ainsi que les modalités de contrôle

Les dispositions du règlement « batteries » relatives au devoir de diligence sont directement applicables dans le droit national, à l'exception du contrôle et des sanctions qui restent du ressort des États membres.

Le présent article vise ainsi à rendre le devoir de diligence pleinement applicable en établissant, d'une part, un régime de sanction applicable et en donnant, d'autre part, la possibilité à l'administration de contrôler le respect de ces obligations.

Le I rappelle le champ d'application du devoir de diligence prévu par le règlement 2023/1542.

Le II permet aux agents chargés de contrôler le respect du devoir de diligence :

- de prendre connaissance de tout document relatif à ces obligations, sans que leur soit opposé le secret des affaires ;

- d'effectuer des contrôles sur place.

Il renvoie également à un décret simple le soin de déterminer les catégories d'agents compétents et astreint ces agents au secret professionnel.

Le III détaille la procédure contradictoire prévue en cas de constat d'un manquement aux obligations de devoir de diligence.

Le IV liste les sanctions possibles en cas de violation des obligations. L'autorité compétente peut :

- prononcer une astreinte administrative de 1 500 € par jour ;

- suspendre l'exercice des activités occasionnant le manquement ;

- faire procéder d'office à l'exécution des mesures prescrites ;

- suspendre les activités occasionnant le manquement ;

- et retirer du marché ou rappeler des marchandises mises sur le marché.

Le V module l'application du IV à Saint-Martin.

Le VI facilite la transmission d'informations entre les agents des douanes et les agents chargés des contrôles.

Enfin, le VII prévoit l'entrée en vigueur de l'article au 18 août 2025.

III. La commission partage l'ambition du Gouvernement, tout en alertant sur les risques de contournement et sur la nécessité de renforcer les contrôles

La commission partage l'ambition de cet article : elle constate que le dispositif tire les leçons du devoir de diligence existant dans le domaine des minerais de conflit, en excluant les PME, en élargissant le dispositif aux risques environnementaux et en renforçant les sanctions applicables.

Elle appelle le Gouvernement à achever la création d'un service à compétence nationale dédié spécifiquement au contrôle du devoir de diligence, pour assurer une plus grande efficacité du dispositif, et à évaluer les risques d'un contournement de la législation par un recours accru à la sous-traitance à des PME.

La commission a adopté deux amendements, visant à aligner le champ des entreprises assujetties à l'article avec celui du règlement ( COM-26) et à corriger une erreur rédactionnelle en remplaçant le terme trop précis de « metteur sur le marché » par le terme « opérateur économique », utilisé dans le règlement ( COM-27).

La commission a adopté l'article 10 ainsi modifié.

Article 11
Dispositions en matière de conception des batteries,
ainsi que de prévention et de gestion des déchets associés

Cet article apporte des modifications rendues nécessaires par le règlement « batteries » en matière de conception des batteries, ainsi que de prévention de gestion des déchets associés.

La commission a adopté l'article 11 sans modification.

I. Le règlement « batteries » de 2023 : de nouvelles exigences en matière de conception, ainsi que de prévention et de gestion des déchets

Le règlement 2023/1542156(*) vise à promouvoir l'économie circulaire dans la conception des batteries, ainsi que dans la prévention et la gestion des déchets associés. Pour ce faire, le texte pose de nouvelles exigences en matière de construction mais aussi de fin de vie, en prévoyant notamment des objectifs et des obligations en matière de collecte, des objectifs de valorisation des matériaux et la mise en place d'une filière à responsabilité élargie des producteurs (REP).

Ce texte, d'application directe, remplace et abroge la directive « piles et accumulateurs » de 2006157(*). En visant les « batteries »158(*), au lieu des « piles et accumulateurs »159(*), la réforme conduit à un changement de périmètre substantiel : en plus des batteries portables (aujourd'hui couvertes par le vocable de « piles et accumulateurs »), le règlement s'appliquera à quatre nouvelles catégories :

- les batteries de véhicules électriques ;

- les batteries industrielles ;

- les batteries SLI (principalement utilisées pour les véhicules et les machines) ;

- et les batteries destinées aux moyens de transport légers (par exemple, les vélos électriques, les cyclomoteurs électriques et les trottinettes électriques).

A. Une restriction des substances contenues dans les batteries

Concernant la conception, le règlement européen introduit une nouvelle restriction applicable aux substances contenues dans les batteries. L'annexe I du règlement prévoit ainsi, qu'à compter du 18 août 2024, les batteries portables, incorporées ou non dans des appareils, ne contiennent pas plus de 0,01 % de plomb. Cette restriction ne s'appliquera pas aux piles bouton zinc-air portables avant le 18 août 2028. Cette restriction est venue s'ajouter à deux restrictions préexistantes, applicables au mercure et au cadmium, qui figuraient dans la « directive batteries » (directive 2006/66/CE). De nouvelles restrictions pourront être prises dans le futur, comme le prévoit le mécanisme, détaillé aux articles 6, 86, 87 et 88.

Enfin, l'article 93 prévoit que les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations du règlement et veillent à ce que ce régime de sanctions soit mis en oeuvre.

B. Des exigences en matière de prévention et de gestion des déchets

Par ailleurs, le règlement fixe de nouvelles exigences en matière de prévention et de gestion des déchets, en fixant notamment des objectifs et obligations de collecte ou de valorisation des matériaux.

Certaines de ses dispositions appellent à des ajustements législatifs, en raison de l'incomplétude du droit national ou de son incompatibilité avec le règlement européen, ou afin de se saisir d'une opportunité offerte par ce dernier.

1) L'élargissement de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP)

L'article 56 du règlement prévoit la mise en place d'une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) sur les batteries.

La responsabilité élargie des producteurs (REP)

Le dispositif de la responsabilité élargie des producteurs (REP) est une application du principe « pollueur-payeur », visant à transférer la responsabilité de la prévention et de la gestion des déchets aux producteurs. La majorité des producteurs s'acquittent de cette obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation et versent en contrepartie une contribution financière appelée éco-contribution. Les contributions versées aux éco-organismes doivent être modulées sous la forme de primes ou de pénalités, en fonction de critères de performance environnementale des produits.

La directive de 2006 prévoyait déjà une filière REP sur les « piles et accumulateurs », transposée au droit national au 6° de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, qui liste les filières mises en place en France.

Le règlement conduit donc à étendre le périmètre de la REP existante.

2) Une définition du producteur intégrant les opérateurs économiques mettant pour la première fois sur le marché des batteries issues de l'économie circulaire

Le même article 56 précise par ailleurs que la notion de « producteur », au sens du règlement « batteries », intègre les opérateurs économiques mettant pour la première fois sur le marché des batteries issues de l'économie circulaire. Il y est ainsi prévu qu'« un opérateur économique qui met à disposition sur le marché, pour la première fois sur le territoire d'un État membre, une batterie résultant d'une préparation en vue du réemploi, d'une préparation en vue d'une réaffectation160(*), d'opérations de réaffectation161(*) ou de remanufacturage162(*), est considéré comme étant le producteur de cette batterie aux fins du présent règlement et est soumis à la responsabilité élargie des producteurs ».

Cette disposition est contraire au dernier alinéa de l'article L. 541-10 du code de l'environnement - commun à l'ensemble des filières REP - qui prévoit que « n'est pas considérée comme producteur la personne qui procède à titre professionnel à des opérations de préparation en vue du réemploi ou de la réutilisation de produits usagés, sous réserve que ces opérations ne modifient pas les caractéristiques essentielles du produit ou que la valeur des éléments utilisés pour ces opérations reste inférieure à celle du bien usagé augmentée du coût de l'opération ». Cet alinéa avait été introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, en première lecture de la loi « Agec »163(*).

3) Une possibilité d'adopter des mesures pour exiger que les points de collecte des déchets de batteries ne puissent les collecter que s'ils ont conclu un contrat avec les producteurs ou les éco-organismes agréés de cette filière

Les articles 59 et 60 du règlement laissent aux États membres la possibilité d'adopter des mesures pour exiger que les points de collecte ne puissent collecter les déchets de batterie que s'ils ont conclu un contrat avec les producteurs ou les éco-organismes agréés de cette filière.

Les points de collecte concernés sont :

- les distributeurs des produits ;

- les autorités publiques compétentes en matière de gestion des déchets ;

- les installations de traitement de véhicules hors d'usage (VHU) et de déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) (pour les batteries provenant de leurs activités de traitement) ;

- les opérateurs procédant au remanufacturage ou à la réaffectation de batteries ;

- les points de collecte volontaire164(*).

4) Une obligation de reprise des déchets par les distributeurs

L'article 62 du règlement prévoit enfin que « les distributeurs reprennent à l'utilisateur final les déchets de batteries, quelle que soit leur composition chimique, leur marque ou leur origine, à titre gratuit et sans imposer à l'utilisateur final l'obligation d'acheter ou d'avoir acheté une nouvelle batterie ».

II. Des modifications législatives rendues nécessaires par le règlement « batteries », pour corriger ou compléter le droit national

Le règlement « batteries », d'application directe, appelle à peu de mesures de mise en oeuvre au niveau législatif.

Le projet de loi apporte ainsi des modifications législatives :

- concernant la conception des batteries, pour préciser les modalités de contrôle et, le cas échéant, de sanctions ;

- concernant la prévention et la gestion des déchets de batteries, pour modifier les dispositions contraires ou incomplètes au regard du droit européen, et pour se saisir d'une opportunité offerte par le règlement.

A. Conception des batteries : des précisions apportées concernant les modalités de contrôle et, le cas échéant, de sanctions

L'article 11 intègre la référence au règlement « batteries » dans plusieurs articles du chapitre Ier du titre II du livre V du code de l'environnement consacré au « contrôle des produits chimiques » :

- article L. 521-1 (définissant le champ d'application du chapitre) ;

- article L. 521-6 (relatif aux compétences des ministres chargés de l'environnement, de la santé et du travail pour encadrer les substances, produits ou équipements présentant des dangers graves ou des risques non valablement maîtrisés pour les travailleurs) ;

- article L. 521-12 (définissant les personnes habilitées à rechercher et constater les infractions du chapitre Ier) ;

- articles L. 521-17 et L. 521-18 (relatif aux sanctions administratives), L. 521-21 et L. 521-24 (relatif aux sanctions pénales).

Une référence au règlement « batteries » est également introduite à l'article L. 541-46 au sein du titre IV du livre V du code de l'environnement consacré aux déchets, portant sur les sanctions pénales, afin que des contrôles puissent être également menés sur des produits arrivés en fin de vie.

B. Les modifications apportées par le projet de loi en matière de prévention et de gestion des déchets

1) Une modification de l'intitulé de la filière REP

L'article 11 modifie tout d'abord le 6° de l'article L. 541-10-1 pour changer l'intitulé de la filière REP.

En passant de « piles et accumulateurs » à « batteries », le champ de la filière est donc élargi à l'ensemble des batteries (dont font partie les dispositifs précédemment couverts par les termes de « piles et accumulateurs »).

2) Une correction de la notion de producteur, devenue incompatible avec le droit européen

L'article prévoit par ailleurs de modifier le dernier alinéa de l'article L. 541-10, devenu incompatible avec le règlement européen.

Le projet de loi propose ainsi une nouvelle définition du producteur, au titre de la REP : « peut être considéré comme producteur, toute personne qui, à titre professionnel, met à disposition sur le marché pour la première fois sur le territoire national un produit relevant du principe de responsabilité élargie du producteur et résultant d'une opération de réemploi, de préparation en vue de la réutilisation ou de réutilisation165(*). Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application de cette disposition, notamment les filières de responsabilité élargie du producteur concernées ».

Une alternative, tendant à inscrire cette disposition dans un article du code de l'environnement propre aux batteries, aurait pu être retenue mais a été écartée par le Gouvernement, pour deux raisons principales :

- les textes européens en cours de révision - notamment concernant les véhicules hors d'usage (VHU) ou les déchets d'équipements électriques ou électroniques (DEEE) - pourraient conduire à devoir soumettre d'autres filières à cette disposition spécifique. Il a donc semblé plus approprié de renvoyer à un décret la détermination des filières concernées ;

- les définitions de producteurs au sens de chaque REP, au-delà des grands principes édictés à l'article L. 541-10, relèvent du niveau réglementaire166(*). Or, ces définitions prévoient d'ores et déjà que les produits soumis à éco-contribution sont les produits fabriqués en France, importés ou introduits pour la première fois sur le marché national. De fait, en application de ces dispositions, les produits réemployés ayant déjà fait l'objet d'un paiement d'une éco-contribution lors de leur première mise sur le marché français n'avaient pas à adhérer à un éco-organisme et payer l'éco-contribution, et les produits importés de l'étranger - à l'instar des smartphones issus du marché américain reconditionnés - étaient soumis à la REP, et donc soumis au paiement de l'éco-contribution.

Selon le Gouvernement, en application de l'article 57 du règlement, il pourra être envisagé que les modulations des contributions pour les produits réemployés, remanufacturés ou réaffectés puissent couvrir tout ou partie des éco-contributions dues, comme le permet l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement.

3) Une obligation pour les points de collecte des déchets de conclure un contrat avec les producteurs ou les éco-organismes agréés de la filière REP

Le Gouvernement fait le choix de se saisir de la possibilité offerte par les articles 59 et 60 du règlement pour obliger les points de collecte des déchets de conclure un contrat avec les producteurs ou les éco-organismes agréés de la filière REP. Cette disposition est inscrite dans un nouvel article L. 541-10-19 - au sein de la sous-section 3 de la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l'environnement, consacrée aux dispositions propres à certaines filières soumises à la responsabilité élargie du producteur (articles L. 541-10-18 à L. 541-10-28) - avec une entrée en vigueur prévue le 1er janvier 2026.

Selon le Gouvernement, une telle disposition permet d'assurer une traçabilité des déchets et une remontée des statistiques adressées à la Commission européenne pour répondre aux objectifs de collecte et de traitement imposés par le droit européen. Elle constitue également un levier de lutte contre le trafic illégal en facilitant les contrôles des services d'inspection. En effet, les producteurs et les éco-organismes agréés pourront fournir aux inspecteurs de l'environnement la liste des opérateurs sous contrats, et ainsi leur permettre de cibler leurs contrôles d'identification de sites illégaux sur ceux n'en bénéficiant pas. Enfin, une disposition similaire existe en France depuis 2015 dans la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques, avant d'être récemment étendue aux véhicules hors d'usage pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2024.

4) Une transposition de l'obligation de reprise des déchets par les distributeurs

Le projet de loi transpose enfin l'obligation de reprise des déchets par les distributeurs prévue par l'article 62 du règlement.

Pour ce faire, l'article 11 introduit la référence à la filière REP des batteries (6° de l'article L. 541-10-1) au V de l'article L. 541-10-8 du code de l'environnement, qui liste les filières REP soumises au principe de reprise des déchets par les distributeurs, qui concerne actuellement les équipements électriques et électroniques, les produits chimiques, les meubles, les jouets et les articles de bricolage, de jardinage, de sport et de loisirs. L'article procède, de manière incidente, à un ajustement rédactionnel de ce paragraphe.

Cette disposition doit entrer en vigueur le 18 août 2025, comme le prévoit le règlement européen.

III. Un article adopté sans modification

Les choix effectués par le Gouvernement sont cohérents avec le règlement « batteries », ainsi qu'avec les dispositions existantes issues de la loi « Agec », notamment dans les filières DEEE ou VHU. Les dispositions proposées à la commission n'ont donc pas nécessité d'ajustements.

La commission a adopté l'article 11 sans modification.

Article 12
Suppression de l'interdiction d'importation des boues d'épuration
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à supprimer l'interdiction systématique d'importation des boues d'épuration, jugée contraire au droit européen par une décision de justice.

La commission a adopté l'article 12 sans modification.

I. L'interdiction systématique d'importation des boues d'épuration, introduite en 2020, est contraire au droit européen

A. Le droit interne interdit systématiquement l'importation de boues d'épuration

Les boues d'épuration, considérées comme des déchets, constituent le résidu du traitement des eaux usées par une station d'épuration. Elles sont fortement valorisables, notamment à des fins d'épandage agricole et de production de biogaz par méthanisation.

Avant 2020, l'importation de boues d'épuration pour valorisation était soumise à autorisation. Une vingtaine d'autorisations instruites par la direction générale de la prévention des risques (DGPR) étaient délivrées par an.

L'article 86 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi « Agec » a institué à l'article L. 541-38 du code de l'environnement une interdiction systématique d'importation de boues d'épuration. Cet article n'opère aucune distinction en fonction de la destination des boues importées, qu'il prohibe absolument, à l'exception des « boues provenant d'installations dont le fonctionnement est mutualisé avec un État voisin ou de la Principauté de Monaco ».

Cette interdiction apparaît motivée par la volonté du législateur de valoriser les boues d'épuration des stations d'épuration françaises en priorité, avant de valoriser les boues d'épuration étrangères167(*).

B. La cour administrative d'appel a jugé cette interdiction contraire au droit de l'Union européenne

Les transferts transfrontaliers de déchets sont régis par le règlement 1013/2006 relatif aux transferts de déchets168(*), fondé sur les principes de la Convention de Bâle de 1989169(*).

L'article 11 de ce règlement instaure la possibilité de mesures d'interdiction générale des transferts ou d'objection systématique à l'encontre de transferts, uniquement pour les transferts de déchets destinés à être éliminés, qui doivent être notifiés à la Commission européenne.

L'article 12 du même règlement prévoit que, sous réserve des procédures d'obtention des autorisations de transferts transfrontaliers de déchets, les flux destinés à la valorisation des déchets doivent pouvoir circuler librement au sein du territoire de l'Union européenne.

L'instauration d'une interdiction d'importation de boues d'épuration destinées à être valorisées apparaît contraire à ce règlement.

Par une décision du 29 juin 2023170(*), la cour administrative d'appel de Paris a ainsi annulé cinq décisions du ministre chargé de la transition écologique du 10 mars 2020 prises en application de l'article L. 541-38 du code de l'environnement. La cour administrative d'appel de Paris a considéré que les objections opposées par le ministre à l'importation de boues d'épuration en provenance de Belgique et du Luxembourg étaient fondées sur un article contraire au droit de l'Union européenne, en ce que cette disposition conduisait l'administration à opposer un refus systématique à l'importation de boues d'épuration. La cour enjoint au ministre chargé de la transition écologique de réexaminer les demandes de transferts transfrontaliers de déchets.

II. la suppression de l'interdiction systématique d'importation des boues d'épuration permet à la France se conformer au droit européen

Le présent article supprime donc le dernier alinéa de l'article L. 541-38 du code de l'environnement afin de mettre fin à l'interdiction systématique d'importation des boues d'épuration.

Les demandes d'importation de boues d'épuration devraient alors, comme avant l'adoption de la loi « Agec » de 2020, faire l'objet d'un examen au cas par cas par le ministère chargé de la transition écologique.

III. Une suppression nécessaire afin d'éviter le maintien d'une disposition juridiquement inapplicable

La suppression de l'interdiction d'importation apparaît nécessaire : si la disposition était conservée en l'état, elle serait laissée inappliquée par l'administration, en raison du risque élevé d'annulation contentieuse de toute décision d'interdiction d'importation prise sur son fondement.

La commission a adopté l'article 12 sans modification.

CHAPITRE II
Dispositions relatives au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières
Article 13
Création d'un régime de sanction applicable aux importateurs
en cas de non-respect des obligations de déclaration
pendant la période transitoire du mécanisme
d'ajustement carbone aux frontières

Cet article vise à créer un régime de sanction applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration pendant la période transitoire du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières.

La commission a adopté trois amendements, afin notamment de clarifier la rédaction de l'article et de tenir compte de modifications faites à l'article 17.

Elle a adopté l'article 13 ainsi modifié.

I. Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières : un outil de protection des industries européennes pour limiter les « fuites de carbone »

A. Le MACF : dès 2026, une alternative à l'allocation de quotas gratuits au titre du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne

Créé par un règlement européen171(*) de mai 2023, le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) est un des axes du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » qui vise à faciliter l'atteinte de l'objectif européen de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990.

Le MACF constitue un mécanisme de protection des industries européennes assujetties au système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SEQE-UE). Ces industries sont en effet exposées à un risque de « fuites de carbone », phénomène par lequel une activité est déplacée en dehors de l'Union européenne pour échapper à une norme environnementale, soit du fait d'une délocalisation, soit du fait d'une perte de compétitivité vis-à-vis de concurrents étrangers.

Historiquement, l'allocation de quotas gratuits dans le cadre du système d'échange a été la solution pour limiter ces risques. Mais le maintien de quotas gratuits associés au SEQE-UE constitue un obstacle évident au relèvement de l'ambition climatique du continent ; en effet, 94 % des émissions industrielles continuent, en l'état, de recevoir l'intégralité ou la plupart de leurs quotas à titre gratuit.

En soumettant les importations à un prix du CO2 aligné sur les prix de marché du SEQE-UE, le MACF constitue une alternative à l'allocation de quotas gratuits en tant qu'outil de lutte contre les risques de « fuites de carbone ».

Le mécanisme commencera réellement à s'appliquer en 2026, sans pour autant que les quotas gratuits au titre du SEQE-UE ne disparaissent à cette date. En effet, à compter de 2026, une période de dix ans permettra de réduire progressivement l'allocation de quotas gratuits dans les secteurs couverts, selon un facteur MACF172(*). Pour les productions concernées - acier, ciment, aluminium, engrais azotés, production d'électricité et hydrogène - le MACF viendra donc se substituer pleinement à l'allocation gratuite au titre du SEQE-UE dès 2036.

Des évolutions apportées par le Parlement européen et le Conseil
conformes aux recommandations
de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Encouragée par la France depuis de nombreuses années, la mise en place d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières a également été largement soutenue par le Sénat, notamment via une résolution sénatoriale173(*) et un rapport d'information de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable174(*).

Si certaines recommandations de ce rapport n'ont pas été retenues dans la version finale du règlement - comme l'avancement à 2030 au lieu de 2036 de l'extinction totale des quotas gratuits du SEQE-UE - certaines évolutions apportées par le Parlement européen et le Conseil à la version initiale du texte sont venues répondre aux observations formulées. Comme l'avait proposé la commission, l'hydrogène a ainsi été intégré dans le périmètre du MACF ; les produits chimiques organiques et les polymères pourraient aussi l'être, avant la fin de l'année 2025, à la faveur d'un réexamen par la Commission européenne.

Par ailleurs, la proposition initiale de la Commission européenne ne tenait pas compte des émissions indirectes des produits couverts, c'est-à-dire celles issues de la production d'électricité nécessaire à leur fabrication : l'examen au Parlement et au Conseil a permis de corriger ce point, comme l'avait encouragé le rapport d'information.

Enfin, le rapport de la commission proposait d'étudier l'opportunité d'une extension du MACF, d'ici 2026, à certains produits finis particulièrement exposés à un risque de « fuites de carbone » : c'est chose faite pour certains « produits en aval » de la chaîne de valeur des marchandises couvertes par le MACF - comme les vis et les boulons. De plus, au moins un an avant la fin de la période transitoire (fin 2025), la Commission devra présenter un rapport recensant les « produits en aval » dont elle recommande d'envisager l'inclusion dans le champ d'application du mécanisme.

B. Avant la mise en place effective du MACF en 2026 : une obligation de déclaration de l'empreinte carbone des produits importés

1) Période transitoire : une application du règlement MACF se limitant à une obligation de déclaration

Avant la mise en place effective du MACF en 2026, une phase transitoire - entre le 1er octobre 2023 et le 31 décembre 2025 - est instaurée par les articles 32 à 35 du règlement MACF et par un règlement d'exécution175(*). Cette période transitoire poursuit deux objectifs :

- assurer une juste tarification des importations, par une collecte anticipée des données ;

- faciliter l'appropriation progressive du dispositif par les acteurs.

Durant cette période transitoire, aucun paiement au titre du mécanisme ne sera exigé ; les assujettis176(*) seront simplement soumis à une obligation de déclaration trimestrielle de l'empreinte carbone des produits importés. Le premier rapport MACF devra être transmis en janvier 2024.

Ce rapport devra contenir les données suivantes (paragraphe 2 de l'article 35) :

- quantité totale de chaque type de marchandise ;

- émissions directes totales ;

- émissions indirectes totales ;

- prix du carbone payé dans un pays d'origine.

2) En cas de non-respect des obligations de déclaration, des sanctions prévues par le règlement MACF et le règlement d'exécution

L'article 35 du règlement MACF fixe le cadre applicable en cas de non-respect des obligations de déclaration.

Son paragraphe 3 précise que la Commission européenne communique périodiquement aux autorités compétentes des États membres une liste des assujettis - importateurs ou représentants en douane indirects - pour lesquels elle a des raisons de croire qu'ils n'ont pas respecté l'obligation de présenter un rapport MACF.

Le paragraphe 4 prévoit que l'autorité compétente, éventuellement alertée par la Commission européenne, engage une procédure de rectification lorsqu'un rapport MACF est incomplet ou incorrect ; l'autorité communique alors à l'assujetti les informations nécessaires pour compléter ou corriger son rapport, le cas échéant sur le fondement des éléments fournis par la Commission européenne. Par suite, l'assujetti présente, si nécessaire, un rapport corrigé à l'autorité compétente concernée et à la Commission.

Lorsque l'autorité compétente de l'État membre a engagé cette procédure de correction et constate que l'assujetti n'a pas pris les mesures nécessaires pour corriger son rapport, ou lorsque l'autorité compétente détermine que l'assujetti n'a pas respecté son obligation de présenter un rapport, l'autorité compétente inflige une amende effective, proportionnée et dissuasive à l'assujetti (paragraphe 5 de l'article 35).

L'article 16 du règlement d'exécution précise que le montant de cette amende est compris entre dix et cinquante euros par tonne d'émissions non déclarées, ce montant devant augmenter conformément à l'indice européen des prix à la consommation (paragraphe 2 de l'article 16). Lorsqu'elles déterminent le niveau de l'amende, les autorités compétentes des États membres tiennent compte des facteurs suivants (paragraphe 3) :

- l'ampleur des informations non déclarées ;

- les quantités non déclarées de marchandises importées et les émissions non déclarées liées à ces marchandises ;

- la volonté du déclarant de répondre aux demandes d'informations ou de corriger le rapport MACF ;

- le comportement intentionnel ou négligent du déclarant ;

- le comportement antérieur du déclarant en ce qui concerne le respect des obligations de déclaration ;

- le niveau de coopération du déclarant en vue de mettre fin à l'infraction ;

- le fait que le déclarant a, de son plein gré, pris ou non des mesures pour veiller à ce que des infractions semblables ne puissent pas être commises à l'avenir.

Le paragraphe 4 de l'article 16 prévoit enfin que des amendes plus lourdes sont appliquées lorsque plus de deux déclarations incomplètes ou inexactes ont été présentées consécutivement ou que la durée du manquement à l'obligation de déclaration est supérieure à six mois.

II. La création d'un régime de sanction applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration pendant la période transitoire

En application du règlement MACF et du règlement d'exécution en ce qui concerne les obligations de déclaration aux fins du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire, l'article 13 prévoit de créer un régime de sanction applicable aux importateurs en cas de non-respect de leurs obligations de déclaration.

Pour ce faire, il complète le chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement - consacré à « l'effet de serre » - par une section 11 « dispositions relatives au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire ».

Une sous-section 1, comportant un article unique L. 229-72, définit tout d'abord diverses notions pour l'application de la section 11 : règlement MACF, règlement d'exécution relatif à la période de transition, assujetti, rapport MACF, période de transition et émissions.

Une sous-section 2 porte sur les « sanctions applicables pendant la période de transition ».

L'article L. 229-73 dispose que lorsque l'autorité administrative compétente, compte tenu notamment des informations transmises par la Commission européenne en application du paragraphe 3 de l'article 35 du règlement MACF, détermine qu'un assujetti n'a pas respecté l'obligation de présenter un rapport MACF, elle le met en demeure d'y satisfaire dans un délai de deux mois.

En application du paragraphe 4, l'article L. 229-74 prévoit que lorsque l'autorité administrative estime que le rapport MACF d'un assujetti est incomplet ou incorrect, compte tenu notamment des informations transmises par la Commission européenne, elle engage une procédure de rectification de ce rapport. Elle informe l'assujetti des informations complémentaires requises pour la rectification de ce rapport. L'assujetti soumet un rapport complété ou corrigé dans un délai de deux mois. Si, à l'expiration de ce délai, l'autorité administrative constate que l'assujetti n'a pas pris les mesures nécessaires pour compléter ou corriger ce rapport, elle le met en demeure d'y procéder dans un délai d'un mois.

En application du paragraphe 5, l'article L. 229-75 précise que, lorsqu'il n'a pas été déféré, dans le délai imparti, à la mise en demeure prévue à l'article L. 229-73 ou à l'article L. 229-74, en tenant compte des circonstances définies au paragraphe 3 de l'article 16 du règlement d'exécution, l'autorité administrative prononce une amende dont le montant minimal est fixé à 10 euros par tonne d'émissions non déclarées, à laquelle elle peut ajouter des majorations d'un montant maximal de 20 euros chacune par tonne d'émissions non déclarées. Le montant total de l'amende ne peut excéder 50 euros par tonne d'émissions non déclarées que dans l'hypothèse définie au paragraphe 4 de l'article 16 du règlement d'exécution. Dans ce cas, le montant minimal de la peine ainsi que le montant maximal de chacune des majorations précédentes sont doublés, sans pouvoir excéder un montant total de 100 euros par tonne d'émissions non déclarées.

La décision prononçant l'amende précise la date à partir de laquelle elle est exigible. Le recouvrement des amendes prévues à la sous-section 2 est effectué au profit du Trésor public comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine (article L. 229-76).

L'article L. 229-77 crée un recours administratif préalable obligatoire : ainsi, préalablement à tout recours contentieux à l'encontre d'une décision infligeant une amende en application de la sous-section 2, l'intéressé doit saisir le ministre chargé de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'un recours gracieux.

Un décret en Conseil d'État doit enfin préciser les conditions d'application de la sous-section 2 (article L. 229-78).

III. Des ajustements effectués en commission afin de clarifier la rédaction et de tenir compte de modifications faites à l'article 17

La commission se réjouit, tout d'abord, de voir le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, longtemps défendu par le Sénat et la France, se matérialiser en droit national.

Les dispositions proposées par le Gouvernement n'appellent pas à d'importants commentaires, compte tenu des faibles marges de manoeuvre laissées aux Parlements nationaux pour appliquer le droit européen.

Sans remettre en cause l'équilibre du dispositif, la commission a donc adopté, sur proposition de son rapporteur, trois amendements de clarification visant :

- à simplifier le régime de sanctions applicables pendant la période transitoire, en supprimant la référence aux majorations d'un montant maximal de vingt euros, source de confusion et absente de l'article 16 du règlement d'exécution relatif à la période transitoire ( COM-3). L'amendement propose, plus simplement, de rappeler que l'autorité administrative prononce une amende proportionnée à la gravité des manquements constatés, en tenant compte des circonstances définies au paragraphe 3 de cet article ; l'amende finale peut alors aller de dix à cinquante euros, et peut être doublée dans les cas prévus au paragraphe 4 (lorsque plus de deux déclarations incomplètes ou inexactes ont été présentées consécutivement ou que la durée du manquement à l'obligation de déclaration est supérieure à six mois), sans toutefois pouvoir excéder un montant de cent euros par tonne d'émissions non déclarées ;

- à inscrire les dispositions proposées dans une section 10 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement, au lieu d'une section 11, pour tenir compte d'un amendement adopté par la commission à l'article 17 (voir infra) ( COM-1) ;

- à uniformiser la terminologie utilisée par le code de l'environnement, en se référant à la « période transitoire », plutôt qu'à la « période de transition » ( COM-2).

La commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

CHAPITRE III
Dispositions relatives au système d'échange de quotas
d'émission de gaz à effet de serre
Article 14
Transposition de la réforme du système d'échange de quotas d'émission
de gaz à effet de serre (SEQE-UE) - Dispositions communes
et dispositions particulières applicables aux installations

Cet article vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions communes et les dispositions particulières applicables aux installations.

La commission a adopté six amendements visant à apporter quelques ajustements juridiques et rédactionnels au texte proposé.

Elle a adopté l'article 14 ainsi modifié.

I. La réforme du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SEQE-UE), axe essentiel du « paquet climat » européen

A. Le SEQE-UE antérieur à la réforme de 2023

1) Le SEQE-UE : un système de « plafonnement et d'échange », pilier de la politique climatique de l'Union européenne

Le système d'échange de quotas d'émission (SEQE-UE ou European Union Emissions Trading Scheme, EU-ETS) est un système de « plafonnement et d'échange » des émissions de gaz à effet de serre, créé par la directive 2003/87/CE177(*) et mis en place en 2005 pour faciliter l'atteinte des objectifs de l'Union européenne au titre du Protocole de Kyoto de 1997 - premier accord climatique international imposant aux Parties signataires développées une réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Il a depuis lors été conforté comme un des piliers de la politique climatique de l'Union européenne.

Ce système repose, d'une part, sur la fixation d'un « plafond » d'émissions de gaz à effet de serre, abaissé au fil du temps (selon un « facteur de réduction linéaire ») de manière à faire diminuer la quantité totale d'émissions et, d'autre part, sur l'allocation de quotas correspondant à ce plafond aux entreprises de certains secteurs. Un quota représente une tonne de dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, ou d'équivalent CO2 pour les autres gaz couverts par le SEQE-UE.

Les quotas d'émission sont alloués par la puissance publique par le biais d'enchères ou par une distribution gratuite. Depuis 2013, la mise aux enchères est la méthode par défaut d'allocation des quotas (57 % des quotas ont vocation à être distribués de cette manière) : l'allocation gratuite constitue une exception, bénéficiant aux installations relevant de certains secteurs spécifiques, exposés à un risque de « fuites de carbone », phénomène par lequel une activité est déplacée en dehors de l'Union européenne pour échapper à une norme environnementale, soit du fait d'une délocalisation, soit du fait d'une perte de compétitivité vis-à-vis de concurrents étrangers.

Les entreprises assujetties à ce régime ont par ailleurs la possibilité d'échanger ces quotas sur le marché européen des quotas d'émission : les installations émettant plus que leur allocation doivent se procurer les quotas manquants, là où les installations émettant moins que leur allocation peuvent revendre leurs quotas non utilisés. Un prix du CO2 découle ainsi de la confrontation entre l'offre et la demande de quotas.

Depuis 2005, le SEQE-UE s'est progressivement étendu pour couvrir aujourd'hui près de 45 % des émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne.

Cette extension fut tout d'abord géographique : restreint lors de la Phase 1 (2005-2007) aux États membres de l'Union européenne, le SEQE-UE a été élargi lors de la Phase 2 (2008-2012) à trois pays extérieurs : la Norvège, le Liechtenstein et l'Islande.

Par ailleurs, seul le dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, était initialement intégré au mécanisme. Le périmètre s'est progressivement étendu au protoxyde d'azote (N2O) dès la Phase 2, puis au perfluorocarbure (PFC) dès la Phase 3 (2013-2020).

On observe enfin, depuis 2005, un agrandissement progressif du périmètre sectoriel du dispositif : la production d'électricité et de chaleur, ainsi que les principaux secteurs industriels, intégrés dès la mise en place du SEQE-UE en 2005, ont été rejoints en 2012 par les vols intra-européens et de nouvelles installations industrielles dès la Phase 3 en 2013.

Depuis la phase 3 (2013-2020), des ajustements ont également été opérés afin de mieux concilier protection contre les fuites de carbone et incitation à la décarbonation. En phase 3, il a ainsi été mis fin aux quotas gratuits pour la production d'électricité et de chaleur. Les autres installations ont continué à bénéficier de quotas gratuits, mais des référentiels fondés sur les installations les plus performantes ont été mis en place, afin d'encourager les exploitants moins efficaces à accroître leurs efforts.

Le meilleur ciblage des quotas gratuits s'est poursuivi en phase 4 (2021-2030). La part des secteurs industriels considérés comme exposés à un risque de fuite de carbone a ainsi été considérablement réduite pour la phase 4, en passant de 62 % à 20 %. 94 % des émissions industrielles continuent toutefois, en l'état, de recevoir l'intégralité ou la plupart de leurs quotas à titre gratuit. Par ailleurs, il a été prévu que les secteurs considérés comme non exposés à un risque de « fuites de carbone » continuaient de recevoir des quotas gratuits à hauteur de 30 % des référentiels jusqu'en 2026, ce taux baissant dès cette date jusqu'à l'extinction des quotas gratuits en fin de période (2030), sauf pour le chauffage urbain. Concernant les secteurs exposés à un risque de « fuites de carbone », continuant de recevoir des quotas gratuits à hauteur de 100 % des référentiels, le mode de calcul des référentiels a par ailleurs été modifié, afin de rendre l'allocation de quotas gratuits plus dynamique178(*).

2) Un mécanisme transposé en droit national

Le SEQE-UE est transposé en droit national dans une section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement (articles L. 229-5 à L. 229-19), composé de quatre sous-sections : une sous-section 1 « dispositions communes » (L. 229-5 à L. 229-12), une sous-section 2 « dispositions particulières applicables aux installations » (L. 229-13 à L. 229-17), une sous-section 3 « dispositions particulières applicables aux aéronefs » (L. 229-18) et une sous-section 4 « dispositions diverses » (L. 229-19).

a) Les dispositions communes (sous-section 1)

L'article L. 229-5 définit tout d'abord le champ d'application du SEQE-UE. Les acteurs assujettis sont : les installations classées et les équipements et installations nécessaires à l'exploitation d'une installation nucléaire de base, d'une part, et les exploitants d'aéronefs, d'autre part. Par ailleurs, la liste des gaz à effet de serre entrant dans le champ d'application du SEQE-UE est fixée par décret en Conseil d'État. L'article définit enfin les notions essentielles à l'application du mécanisme.

L'article L. 229-6 soumet à autorisation les installations assujetties pour les émissions de gaz à effet de serre résultant des activités intégrées dans le périmètre du SEQE-UE. Il renvoie par ailleurs au pouvoir réglementaire le soin de fixer les modalités de mise en oeuvre des obligations particulières de surveillance, de déclaration et de contrôle auxquelles sont soumis les installations et les exploitants d'aéronefs, ainsi que les modalités de vérification des déclarations d'émissions et de niveaux d'activité.

L'article L. 229-7 précise que la quantité de gaz à effet de serre émise au cours d'une année civile est calculée ou mesurée et exprimée en tonnes d'équivalent dioxyde de carbone (I). L'article encadre par ailleurs la restitution des quotas d'émissions à l'autorité administrative (II), en prévoyant notamment que cette restitution se fait sur la base d'une déclaration faite par les exploitants d'installation ou d'aéronef, vérifiée à leurs frais (III). Les unités que l'exploitant peut utiliser pour s'acquitter de l'obligation de restitution sont les quotas au titre du SEQE-UE, ainsi que certaines unités inscrites à son compte dans le registre européen limitativement énumérées par le IV de l'article L. 229-7.

L'article 229-8 permet à l'autorité administrative de prendre les mesures nécessaires, voire d'imposer des sanctions, en cas de délivrance d'un nombre trop important de quotas gratuits.

L'article L. 229-9 permet à l'autorité administrative de différer l'allocation de quotas gratuits quand elle a connaissance d'éléments susceptibles de donner lieu à une révision à la baisse de la quantité de quotas à délivrer gratuitement à un exploitant pour une année donnée.

L'article L. 229-10 interdit la restitution des quotas en cas de méconnaissance par les assujettis de leurs obligations de déclaration des émissions (I). Il établit par ailleurs un régime de sanctions administratives en cas d'absence de restitution d'un nombre suffisant de quotas pour couvrir les émissions de l'année précédente (II) : après mise en demeure de satisfaire à l'obligation de restitution dans un délai d'un mois, l'autorité administrative prononce une amende de 100 euros par quota non restitué. Il est également prévu qu'au cas où un exploitant d'aéronef ne se conforme pas aux exigences de restitution, il peut faire l'objet d'une interdiction d'exploitation.

L'article L. 229-11 précise le statut juridique des quotas d'émissions : ce sont des biens meubles, pouvant être acquis, détenus et cédés.

L'article L. 229-11-1 précise que les quotas attribués à la France sont, par défaut, mis aux enchères, tout en listant les exceptions à ce principe (quotas attribués gratuitement aux installations (L. 229-15) ou aux exploitants d'aéronefs (L. 229-18) ; quotas placés dans la réserve de stabilité du marché ; quotas annulés en application du III de l'article L. 229-11-13179(*), ou du paragraphe 2 de l'article 28 bis de la directive SEQE-UE, c'est-à-dire les quotas non attribués de la réserve spéciale).

L'article L. 229-11-2 prévoit que les quotas délivrés à compter du 1er janvier 2013 sont valables pour une durée illimitée et que les quotas délivrés à compter du 1er janvier 2021 ne peuvent pas être utilisés pour remplir l'obligation de restitution pour les quantités de gaz à effet de serre émises avant le 31 décembre 2020.

L'article L. 229-11-13 prévoit les cas dans lesquels les quotas sont annulés par l'autorité administrative.

Enfin, le registre européen des quotas d'émission de gaz à effet de serre, qui comptabilise les unités délivrées, détenues, transférées et annulées, est inscrit à l'article L. 229-12.

b) Les dispositions particulières applicables aux installations

L'article L. 229-13 exclut de l'application du SEQE-UE les établissements de santé publics, privés ou privés d'intérêt collectif qui mettent en place des mesures permettant d'atteindre des réductions d'émissions équivalentes à celles qui seraient obtenues en les soumettant au SEQE-UE et des mesures de surveillance de leurs émissions.

Faisant application d'une faculté offerte par l'article 27 bis de la directive, l'article L. 229-14 exclut de l'application du SEQE-UE les installations qui ont émis moins de 2 500 tonnes d'équivalent dioxyde de carbone pour chacune des trois années civiles commençant respectivement cinq ans, quatre ans et trois ans avant le début d'une des périodes d'application du système (I). Le même article précise que les exploitants de ces installations peuvent renoncer au bénéfice de l'exclusion en présentant une demande à l'autorité administrative avant le début de la période concernée (II). Les installations de production d'électricité qui utilisent des carburants ou combustibles ne bénéficient pas de l'exclusion lorsque les produits qu'elles utilisent sont exonérés d'accise sur les énergies en application de l'article L. 312-32 du code des impositions sur les biens et les services (III).

L'article L. 229-15 définit les conditions d'attribution des quotas gratuits aux installations couvertes par le SEQE-UE. Il définit également les installations non éligibles à cette allocation gratuite180(*) (II). Il prévoit, en outre, que les secteurs considérés comme non exposés à un risque de « fuites de carbone » reçoivent des quotas gratuits à hauteur de 30 % des référentiels jusqu'en 2026, ce taux baissant dès cette date jusqu'à l'extinction des quotas gratuits en fin de période (2030), sauf pour le chauffage urbain, pour qui le taux est maintenu à 30 % pour toutes les années civiles postérieures à 2026 (III). Le même III précise que les secteurs exposés à un risque de « fuites de carbone » continuent de recevoir des quotas gratuits à hauteur de 100 % des référentiels. Le IV précise que lorsqu'au cours d'une année civile, le nombre total de quotas délivrés gratuitement dans l'ensemble de l'Union européenne atteint la quantité maximale permettant de respecter la part de quotas à mettre aux enchères, la quantité de quotas délivrés gratuitement pour chaque installation est adaptée en appliquant un facteur uniforme à la quantité initiale de quotas ; lors des années où cette adaptation n'a pas lieu, la quantité de quotas délivrés gratuitement au chauffage urbain et à la cogénération à haut rendement est adaptée en utilisant un facteur linéaire. Le V permet d'adapter la quantité de quotas délivrés gratuitement en cas d'importante fluctuation du niveau d'activité d'une installation. Le VI permet d'adapter les modalités de délivrance des quotas à titre gratuit et de fixation des quantités de quotas délivrés gratuitement pour les installations nouvellement entrées dans le champ d'application du SEQE-UE.

L'article L. 229-16 prévoit que l'exploitant d'une installation éligible à la délivrance de quotas à titre gratuit déclare les niveaux d'activité de son installation à l'autorité administrative. La délivrance de quotas à titre gratuit est subordonnée à cette déclaration.

Enfin l'article L. 229-17 dispose que l'autorité administrative notifie aux exploitants des installations autorisées à émettre des gaz à effet de serre le montant total des quotas d'émission affectés au titre de chaque période et la quantité délivrée chaque année.

B. Réforme du SEQE-UE de 2023 : une adaptation du marché carbone européen à l'objectif de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030

Adoptée en mai 2023, la révision de la directive relative au système d'échange de quotas d'émission181(*) constitue un des axes du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » qui vise à faciliter l'atteinte de l'objectif européen de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990.

Cette réforme prévoit une réduction des émissions des secteurs du SEQE-UE de 62 % à l'horizon 2030 par rapport aux niveaux de 2005, soit une augmentation de 19 points par rapport à l'objectif précédent assigné à ces secteurs. La révision de la directive vise principalement à ajuster les paramètres du SEQE-UE à ce nouvel objectif.

À cette fin, il prévoit tout d'abord une réduction accélérée du nombre de quotas mis en circulation. Les quotas distribués à titre gratuit devront également être mieux ciblés. La révision de la directive programme ainsi l'extinction progressive des quotas gratuits pour les secteurs industriels couverts par le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF). À compter de 2026, une période de dix ans permettra de réduire progressivement l'allocation de quotas gratuits dans les secteurs couverts, selon un facteur MACF182(*). Pour les productions concernées - acier, ciment, aluminium, engrais azotés, production d'électricité et hydrogène - le MACF viendra donc se substituer pleinement à l'allocation gratuite au titre du SEQE-UE dès 2036 (article 10 bis de la directive 2003/87/CE modifiée).

Dans les secteurs encore bénéficiaires des quotas gratuits, de nouvelles conditionnalités environnementales sont instaurées par la directive révisée (article 10 bis).

Pour accélérer la décarbonation des autres secteurs, il est par ailleurs prévu une extension du SEQE-UE au transport maritime selon les modalités suivantes :

- l'intégralité des émissions des trajets intra-européens, et 50 % des émissions entre l'UE et le reste du monde sont incluses dans le périmètre du SEQE-UE (article 3 octies bis) ;

- une montée en charge progressive des obligations imposées aux compagnies maritimes de restitution des quotas d'émissions : 40 % pour les émissions de 2024, puis 70 % en 2025 et 100 % en 2026 (article 3 octies ter) ;

- l'intégration, à partir du 1er janvier 2026, des émissions de méthane et de protoxyde d'azote (annexe I de la directive).

Les règles sont également modifiées pour le transport aérien, déjà soumis au SEQE-UE, avec :

- une extinction progressive entre 2024 et 2026 des quotas gratuits (article 3 quinquies) ;

- l'introduction de quotas gratuits visant à soutenir l'utilisation de carburants d'aviation durables (article 3 quater) ;

- l'articulation du SEQE-UE avec le mécanisme de compensation des émissions Corsia de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) en appliquant Corsia aux vols extra-européens et le SEQE-UE aux vols intra-européens (article 28 bis).

La réforme prévoit enfin la création d'un second marché carbone (SEQE-2) qui concernera le chauffage des bâtiments et le transport routier, mais aussi les émissions des installations énergétiques et de l'industrie diffuse non-couverte par le SEQE-UE I, à partir de 2027 (chapitre IV bis de la directive).

Ces orientations avaient, pour l'essentiel, été saluées par le rapport d'information de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable consacré à la réforme du SEQE-UE, même si la commission avait préconisé l'extinction des quotas gratuits dès 2030, au lieu de 2036.

II. Un article 14 transposant les dispositions communes et les dispositions particulières applicables aux installations

Cet article vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions communes (sous-section 1 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement) et les dispositions particulières applicables aux installations (sous-section 2).

A. Des ajustements concernant le périmètre et les paramètres du SEQE-UE

L'article 14 opère tout d'abord de nombreux ajustements modifiant le périmètre et les paramètres du SEQE-UE, afin de tenir compte de la révision de la directive.

Fait notable, le Gouvernement a fait le choix de ne pas transposer dans le présent projet de loi la création du second marché carbone (SEQE-2), prévu par le chapitre IV bis de la directive. Seule exception à cette absence de transposition : l'article L. 229-7 est modifié afin de préciser que les personnes assujetties au SEQE-UE ne peuvent pas restituer des quotas relevant du SEQE-2 pour s'acquitter de leurs obligations. Par ailleurs, il est prévu que les quotas mentionnés au paragraphe 3 bis de l'article 12 de la directive ne pourront pas, non plus, être utilisés : il s'agit de quotas délivrés avant la décision « stop the clock » de 2013 sur le périmètre international de l'aviation et qui ont été annulés.

1) Une extension du SEQE-UE au transport maritime

L'article 14 apporte de nombreuses modifications à la sous-section 1 pour tenir compte de l'extension du SEQE-UE au transport maritime.

L'article L. 229-5 est ainsi complété pour adapter le périmètre d'application du SEQE-UE. En application de l'article 3 de la directive, de nouvelles définitions spécifiques au secteur maritime sont apportées - compagnie maritime ; compagnie maritime dont la France est l'autorité responsable ; port d'escale ; voyage ; navire de croisière - ainsi que deux autres définitions contribuant à la bonne application des nouvelles dispositions - régions ultrapériphériques et pays et territoires d'outre-mer.

En application de l'article 3 octies quinquies et de l'article 3 octies sexies de la directive, l'article L. 229-6 est modifié pour préciser les modalités de mise en oeuvre des obligations particulières de surveillance, de déclaration et de contrôle auxquelles sont soumises les compagnies maritimes dont la France est l'autorité responsable : ces obligations sont fixées par le règlement « MRV »183(*), ainsi que par les actes délégués pris pour son application. Le cas échéant, elles sont précisées par arrêté du ministre chargé de la mer. L'article L. 229-7 est également ajusté afin que la restitution des quotas se fasse sur la base d'une déclaration, par chaque compagnie maritime, des émissions de gaz à effet de serre agrégées au niveau de la compagnie comme prévu par l'article 11 bis du règlement « MRV », et vérifiées dans les conditions prévues par ce règlement et les actes délégués pris pour son application, puis validées ou, le cas échéant, corrigées ou estimées par le ministre chargé de la mer.

L'article L. 229-10 est modifié afin d'interdire la restitution des quotas en cas de méconnaissance par les compagnies maritimes de leurs obligations de déclaration des émissions. La décision, qui doit être motivée, intervient alors au plus tard à l'expiration d'un délai fixé par arrêté.

Enfin, à l'article L. 229-11-1, sont ajoutées deux exceptions au principe de mise aux enchères des quotas : les quotas annulés conformément au dernier alinéa de l'article 3 octies ter de la directive SEQE-UE184(*), d'une part, et les quotas annulés conformément au second alinéa du paragraphe 3 -sexies de l'article 12 de la directive185(*).

2) Des ajustements paramétriques concernant le transport aérien

L'article L. 229-5 est complété pour y ajouter une définition des « effets de l'aviation hors CO2 » qui devront faire l'objet d'un rapportage spécifique des compagnies aériennes dès le 1er janvier 2025 (cf. article 15 du projet de loi).

Par ailleurs, à l'article L. 229-6, la référence au rapportage des activités aériennes « en termes de tonnes-kilomètres » est supprimée, suivant la modification opérée aux articles 3 sexies et 3 septies de la directive.

3) Des ajustements divers

En conformité avec la modification de l'article 3 de la directive, concernant la définition donnée aux « émissions », la référence aux émissions de gaz à effet de serre dans « l'atmosphère » est supprimée à l'article L. 229-5. Cette modification permet d'inclure dans le périmètre du SEQE-UE les émissions de gaz à effet de serre captées sur site industriel, mais qui seront réémises rapidement par la suite - par exemple dans le cas où le CO2 est capturé pour être incorporé dans du carburant durable et où le CO2 est ensuite réémis dans l'atmosphère, mais pas au niveau du site industriel.

En application des paragraphes 3 bis et 3 ter de l'article 12 de la directive, le II de l'article L. 229-7 est également modifié afin de préciser qu'un exploitant d'installation ou d'aéronef ou une compagnie maritime n'est pas tenu de restituer d'unités pour les émissions de dioxyde de carbone dont il a été vérifié qu'elles font l'objet d'un captage et d'un transport en vue d'un stockage permanent vers un site de stockage géologique de dioxyde de carbone disposant d'un permis en vigueur. Il n'est pas non plus tenu de restituer d'unités à raison des émissions de gaz à effet de serre qui sont réputées avoir été captées et utilisées de telle manière qu'elles sont devenues chimiquement liées, de manière permanente, à un produit, de sorte qu'elles ne peuvent pénétrer dans l'atmosphère dans des conditions normales d'utilisation, y compris lors de toute activité normale ayant lieu après la fin de vie du produit.

Par ailleurs, le deuxième alinéa du IV du même article L. 229-7 est supprimé. Les dispositions de la directive auxquels fait référence le deuxième alinéa du IV ne sont en effet plus activées par l'Union européenne. Aucun crédit provenant de projets des pays tiers ayant ratifié un accord international sur le changement climatique ne peut aujourd'hui être utilisé par les entreprises pour leurs obligations de restitution de quotas depuis le 1er janvier 2021. Par le passé, les entreprises ont pu utiliser des crédits externes dans le cadre du SEQE-UE. La phase IV (2021-2030) a interdit cette pratique. La suppression proposée permet donc de clarifier les façons de s'acquitter des obligations de restitution.

Enfin, à l'article L. 229-11-1, la référence au paragraphe 2 de l'article 28 bis de la directive SEQE-UE est supprimée. Cette disposition relative à l'annulation des quotas non attribués de la réserve spéciale a en effet été supprimée à l'occasion de la révision de la directive.

B. Des ajustements spécifiques aux installations

1) Une extinction progressive des quotas gratuits dans les secteurs couverts par le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières

En application du paragraphe 1 bis de l'article 10 bis de la directive, le III de l'article L. 229-15 est modifié pour transposer l'extinction progressive des quotas gratuits dans les secteurs couverts par le MACF.

Est ainsi posé le principe d'une absence d'allocation gratuite dans ces secteurs. Par dérogation à ce principe, jusqu'au 31 décembre 2033, la fabrication de ces marchandises bénéficie d'une allocation de quotas à titre gratuit en quantités réduites. Ces quantités sont calculées par application d'un facteur de réduction à l'allocation de quotas à titre gratuit pour la fabrication de ces marchandises (le facteur MACF). Le facteur MACF est égal à 100 % pour la période comprise entre l'entrée en vigueur du règlement MACF et la fin de 2025 et est égal à 97,5 % en 2026, 95 % en 2027, 90 % en 2028, 77,5 % en 2029, 51,5 % en 2030, 39 % en 2031, 26,5 % en 2032 et 14 % en 2033.

2) Dans les secteurs encore bénéficiaires des quotas gratuits, l'introduction de nouvelles conditionnalités environnementales

Les nouvelles conditionnalités environnementales, prévues par le paragraphe 1 de l'article 10 bis de la directive, dans les secteurs encore bénéficiaires des quotas gratuits, sont transposées dans de nouveaux paragraphes IV bis et IV ter à l'article L. 229-15.

Le paragraphe IV bis prévoit ainsi que les installations soumises à une obligation de réaliser un audit énergétique au titre de la directive sur l'efficacité énergétique186(*) doivent mettre en oeuvre les mesures recommandées dans ces audits, à moins que le temps de retour sur investissement des investissements correspondants ne dépasse trois ans ou que le coût de ces investissements ne soit disproportionné, ou justifier de la mise en oeuvre de mesures à effets équivalents. Les quotas gratuits seront réduits de 20 % si les installations ne respectent pas cette obligation. Les modalités d'application de ce paragraphe sont fixées par décret en Conseil d'État.

Le paragraphe IV ter dispose que cette réduction de 20 % est également appliquée dans le cas où, au 1er mai 2024, un exploitant d'installations dont les niveaux d'émission de gaz à effet de serre sont supérieurs au 80e centile des niveaux d'émission pour les référentiels de produits pertinents n'a pas établi, pour chacune de ces installations, un plan de neutralité climatique pour ses activités. Aucun quota gratuit au-delà de 80 % n'est alloué si la réalisation des valeurs cibles et jalons intermédiaires de ce plan n'a pas été vérifiée pour la période allant jusqu'à la fin de 2025 ou pour la période allant de 2026 à 2030.

3) Une exclusion des producteurs d'électricité peu émetteurs du SEQE-UE

Le projet de loi propose par ailleurs d'abroger le III de l'article L. 229-14. Ce faisant, il exclut les producteurs d'électricité peu émetteurs (moins de 2 500 tonnes de CO2 par an) de l'application du SEQE-UE. Selon les services ministériels entendus par le rapporteur, sont essentiellement concernés les centrales nucléaires et des centres de données en raison de leurs générateurs de secours qui ne fonctionnent en principe que quelques heures par an lors de tests de fonctionnement. Les 18 centrales nucléaires françaises en activité, toutes couvertes par le SEQE-UE en raison de leurs générateurs de secours, ont émis en moyenne 500 tonnes de CO2 par an en 2022. Les plusieurs dizaines de centres de données concernées ont également des niveaux d'émissions très faibles. À titre illustratif, les trois centres de données opérés par Orange (Chartres, Aubervilliers, Normandie) ont émis en moyenne 37 tonnes CO2/an en 2022 et les 9 centres de données opérés par Interxion - l'une des principales entreprises sur le marché des data centers - ont émis en moyenne 130 tonnes CO2/an en 2022.

En pratique, si les installations en font la demande, l'exclusion ne sera effective qu'à partir de 2026, pour la prochaine période de cinq ans qui s'ouvrira à cette date.

Le Gouvernement entend ainsi profiter des marges de manoeuvre laissées par l'article 27 bis de la directive, qui permet aux États membres d'exclure de l'application du SEQE-UE les installations émettant moins de 2 500 tonnes de CO2 par an. Suite à la révision adoptée en mai 2023, ces émissions seront couvertes par un prix du carbone dans le cadre de la mise en oeuvre du SEQE-2 à partir de 2027 ; le SEQE-2 sera appliqué en amont de la chaîne économique, au niveau du fournisseur de gaz et du metteur à la consommation de produits pétroliers. Une révision des modalités d'application de l'article 27 bis en France permettrait ainsi de réduire la charge administrative des Dreal en charge de suivre ces quelques dizaines d'installations peu émettrices.

4) La création d'un régime de sanctions administratives spécifique aux installations, en cas de méconnaissance des obligations de déclaration

L'article 14 crée, dans un nouvel article L. 229-17-1, un régime de sanctions administratives spécifiques aux installations, en cas de méconnaissance de leurs obligations de déclaration.

Cet article dispose que, lorsqu'à la date mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 229-10 - fixée par décret - un exploitant d'installation n'a pas déclaré les émissions de l'installation, ou lorsque l'autorité compétente constate que la déclaration relative aux émissions de l'installation au cours de l'année civile précédente ne répond pas aux conditions fixées par l'arrêté relatif aux installations classées prévu à l'article L. 229-6, cette autorité met en demeure l'exploitant d'installation de satisfaire à cette obligation dans un délai d'un mois. Si à l'expiration de ce délai il n'a pas été déféré à la mise en demeure, l'autorité compétente peut ordonner le paiement d'une amende administrative d'un montant proportionné à la gravité des manquements constatés et au plus égal à 15 000 euros. Le recouvrement de cette amende est effectué au profit du Trésor public comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine.

5) Une adaptation des règles applicables au chauffage urbain

Suivant la suppression des troisième et quatrième paragraphes de l'article 10 bis de la directive, l'article 14 supprime par ailleurs les troisième et quatrième alinéas du II au 1er janvier 2026, ainsi que le troisième alinéa du IV, de l'article L. 229-15.

Le quatrième alinéa disposait que des quotas gratuits étaient alloués au chauffage urbain ainsi qu'à la cogénération à haut rendement en vue de répondre à une demande économiquement justifiable par rapport à la production de chaleur et de froid. Pour chaque année postérieure à 2013, le total des quotas délivrés à ces installations pour la production de ce type de chaleur était adapté en utilisant un facteur linéaire, à l'exception des années pour lesquelles ces quotas étaient adaptés de manière uniforme. Suite à la révision de la directive, le chauffage urbain cessera de bénéficier de quotas gratuits dès 2026.

6) Des ajustements divers

À l'article L. 229-5, il est précisé que, pour l'établissement de la liste des installations assujetties au SEQE-UE, il est tenu compte « du type d'énergie utilisé », en plus « de la capacité de production, du rendement de l'installation ou de l'équipement ». Cet ajustement permet de transposer les cas d'exclusion du périmètre du SEQE-UE si le type d'énergie est de la biomasse à plus de 95 %, en conformité avec la modification de l'annexe I de la directive.

Au II de l'article L. 229-15, l'alinéa interdisant l'allocation gratuite de quotas pour les installations ayant cessé leur activité est modifié : la réserve jusqu'ici inscrite à cet alinéa - allocation gratuite toujours possible « si l'exploitant de l'installation apporte à l'autorité administrative des éléments suffisamment probants de nature à établir que la production reprendra dans un délai précis et raisonnable » - est supprimée, conformément à l'ajustement apporté au paragraphe 19 de l'article 10 bis de la directive.

En application de la modification au paragraphe 5 de l'article 10 bis de la directive, le IV de l'article L. 229-15 est également modifié pour exclure de l'application du facteur uniforme les installations dont les niveaux d'émission de gaz à effet de serre sont inférieurs à la moyenne des 10 % d'installations les plus efficaces d'un secteur ou sous-secteur de l'Union.

C. Des modifications apportées concernant les modalités d'intervention de l'autorité administrative

1) La suppression d'un dispositif de « silence vaut acceptation » concernant les déclarations d'émissions de gaz à effet de serre

L'article 14 modifie par ailleurs le III de l'article L. 229-7 afin de supprimer un dispositif de « silence vaut acceptation » qui s'applique aujourd'hui aux déclarations d'émissions de gaz à effet de serre des personnes assujetties au SEQE-UE. En effet, en l'état du droit, ces déclarations sont réputées validées si l'autorité administrative, l'Autorité de sûreté nucléaire (pour les équipements ou installations nucléaires) ou le ministre chargé des transports (pour le secteur aérien) n'a pas formulé d'observations dans un délai fixé par les arrêtés prévus à l'article L. 229-6, qui renvoie au pouvoir réglementaire le soin de fixer les modalités de mise en oeuvre des obligations particulières de surveillance, de déclaration et de contrôle auxquelles sont soumis les installations et les exploitants d'aéronefs.

L'étude d'impact annexée au présent projet de loi justifie ce choix du Gouvernement par le fait que les délais de validation des déclarations d'émissions ne sont pas obligatoires dans le droit européen et ne sont pas utilisés par l'administration.

Des explications complémentaires ont été apportées au rapporteur dans le cadre de ses travaux préparatoires. Selon les services ministériels, la suppression de ces délais est proposée car ils ne correspondent pas au processus de validation des émissions mis en pratique par l'administration et conformément aux dispositions prévues par le règlement d'exécution 2018/2066187(*). Les exploitants doivent en effet soumettre leurs déclarations vérifiées au 28 février de chaque année (article 68 du règlement d'exécution). L'autorité administrative compétente dispose ensuite d'un mois pour les valider.

Si au 1er avril, elle n'a pas validé la déclaration, le compte de l'exploitant au registre européen est alors automatiquement « gelé » ; il se débloque dès que l'autorité administrative transmet au registre européen un montant d'émissions validé. Si après le 1er avril, l'exploitant ne transmet pas de déclaration, ou si sa déclaration est incorrecte et ne peut être validée, c'est l'autorité compétente qui se substitue à lui, en faisant une déclaration d'office (en application de l'article 70 du règlement d'exécution).

Le droit européen détaille donc les réponses à apporter par l'administration dans les situations où l'exploitant transmet une déclaration incorrecte ou ne transmet pas une déclaration.

2) Le changement de la dénomination du ministre en charge du SEQE-UE concernant les installations

L'article 14 ajuste en outre les articles L. 229-13 et L. 229-14 pour changer la dénomination du ministre responsable du SEQE-UE concernant les installations : le « ministre chargé de l'environnement » est remplacé par le « ministre chargé de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre ».

L'étude d'impact annexée au projet de loi justifie ce choix par le fait que la dénomination actuelle ne correspond pas à l'intitulé des missions de la ministre de la transition énergétique, aujourd'hui en charge du SEQE-UE.

3) Un ajustement du régime de sanctions administratives

Enfin, l'article 14 ajuste légèrement le régime de sanctions administratives inscrit à l'article L. 229-10 du code de l'environnement.

Il est aujourd'hui prévu que dans le cas d'une restitution incomplète du nombre de quotas, l'autorité administrative prend, chacune des années suivantes, les mesures prévues aux premier et deuxième alinéas du II de l'article L. 229-10 (mise en demeure et amende), et les unités inscrites au compte de l'exploitant demeurent incessibles jusqu'à satisfaction complète.

Le projet de loi prévoit, désormais, plus simplement que dans le cas d'une restitution incomplète du nombre de quotas, les unités inscrites au compte de l'exploitant d'installation ou d'aéronef ou de la compagnie maritime demeurent incessibles jusqu'à ce que l'amende ait été acquittée et les quotas intégralement restitués.

III. Des ajustements juridiques et rédactionnels adoptés en commission

La majorité des dispositions proposées par le Gouvernement n'appelle pas à d'importants commentaires, compte tenu des faibles marges de manoeuvre laissées aux Parlements nationaux pour appliquer le droit européen.

Sur proposition du rapporteur, la commission a toutefois souhaité apporter quelques ajustements juridiques au texte.

Elle a tout d'abord adopté un amendement COM-4 afin d'étendre aux exploitants d'aéronef le régime de sanctions administratives pour méconnaissance des obligations de déclaration, prévu pour les installations à l'article L. 229-17-1 (nouveau). En effet, si les déclarations sont plus simples à produire pour le secteur aérien que pour les installations ou le secteur maritime - ce qui rend l'établissement d'un régime de sanctions moins nécessaire - des sanctions pour méconnaissance des obligations de déclaration sont déjà prévues pour le secteur aérien à l'article R. 229-37-9 du code de l'environnement. Par souci de cohérence avec la création par le projet de loi de sanctions pour les installations, ce régime de sanctions administratives propre à l'aérien devrait être inscrit au niveau législatif. Par souci de clarté, l'amendement adopté déplace donc ces dispositions à l'article L. 229-10 et supprime, par conséquent, l'article L. 229-17-1 prévu par le projet de loi. Il n'est pas proposé d'étendre ce dispositif au transport maritime : les particularités de ce secteur justifient en effet le recours à un régime de sanctions pénales plus dissuasif (article L. 218-25 du code de l'environnement au titre du règlement « MRV », dont le contenu pourrait être déplacé à l'article L. 226-10 en application de l'article 16 du projet de loi).

Un deuxième amendement COM-7 adopté par la commission vise à ajuster les dates d'entrée en vigueur du projet de loi.

D'une part, cet amendement fait entrer en vigueur au 1er janvier 2026 l'abrogation du III de l'article L. 229-14 du code de l'environnement - qui exclut les producteurs d'électricité peu émetteurs (moins de 2 500 tonnes de CO2 par an) de l'application du SEQE-UE. En pratique, si les installations concernées en font la demande, l'exclusion ne sera effective qu'à partir de 2026, pour la prochaine période de mise en oeuvre du SEQE-UE de cinq ans qui s'ouvrira à cette date. L'amendement adopté aligne donc la rédaction de l'article 14 sur ce calendrier. Il évite par là même que l'inclusion de ces petits émetteurs au SEQE-UE, pour les années 2021-2026, ne soit contestée de manière rétroactive. D'autre part, l'amendement précise que la suppression du troisième alinéa du IV de l'article L. 229-15 du code de l'environnement entrera en vigueur le 1er janvier 2026 : cet ajustement est cohérent avec la suppression des troisième et quatrième alinéas du II du même article, permettant de transposer la fin de l'allocation gratuite de quotas pour le chauffage urbain à partir de 2026.

La commission a enfin adopté plusieurs amendements corrigeant des erreurs de référence ( COM-20 et COM-6), supprimant une référence devenue sans objet à l'article L. 229-13 du code de l'environnement ( COM-5) ou clarifiant la rédaction du texte ( COM-8).

La commission a adopté l'article 14 ainsi modifié.

Article 15
Transposition de la réforme du système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre (SEQE-UE) - Dispositions particulières applicables au secteur aérien

Cet article vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions particulières applicables au secteur aérien.

La commission a adopté cinq amendements d'ajustement, visant notamment à mieux tenir compte des incitations liées au prix du carbone lors de l'allocation de quotas gratuits au titre de l'utilisation de biocarburants.

Elle a adopté l'article 15 ainsi modifié.

I. Une réforme du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SEQE-UE) visant à mieux encadrer les émissions du secteur aérien

A. SEQE-UE aérien : le droit existant

1) Un secteur aérien assujetti au SEQE-UE depuis 2013, bénéficiaire d'un régime doublement préférentiel

Le système d'échange de quotas d'émission (SEQE-UE ou European Union Emissions Trading Scheme, EU-ETS) est un système de « plafonnement et d'échange » des émissions de gaz à effet de serre, créé par la directive 2003/87/CE188(*) et mis en place en 2005 pour faciliter l'atteinte des objectifs de l'Union européenne au titre du Protocole de Kyoto de 1997. Il a depuis lors été conforté comme un des piliers de la politique climatique de l'Union européenne189(*). D'abord limité à la production d'électricité et de chaleur, ainsi qu'aux installations industrielles, le système a été étendu dès la phase 3, en 2013, au secteur aérien.

Sont concernés l'ensemble des vols à destination ou au départ de l'Espace économique européen (EEE), c'est-à-dire de l'Union européenne, du Liechtenstein, de la Norvège et de l'Islande. Certaines activités sont exclues du champ de la directive : tel est le cas des vols humanitaires, des vols d'entraînement, ou encore des vols liés à une obligation de service public lorsque la capacité offerte ne dépasse pas un certain seuil (30 000 places par an, avant la révision de la directive en 2023). Les vols de l'EEE vers les régions ultrapériphériques (RUP)190(*) ainsi que les vols d'une RUP vers une autre RUP sont exonérés.

Dès son intégration au SEQE-UE, le transport aérien a profité d'un régime doublement préférentiel.

D'une part, une grande part des quotas - attribués à hauteur de 95 % des émissions historiques du secteur de l'aviation191(*) - a fait l'objet d'une allocation gratuite (82 %) ; seulement 15 % des quotas ont été mis aux enchères192(*).

D'autre part, une partie importante des émissions du secteur a été exclue du périmètre du système, avec la décision « stop the clock » de 2013. En effet, sous la pression diplomatique d'États tiers - notamment des États-Unis et de la Chine - qui menaçaient de bloquer l'élaboration d'une politique environnementale ambitieuse pour l'aérien et de mettre en oeuvre des représailles commerciales, notamment vis-à-vis d'Airbus, l'Union européenne a suspendu en avril 2013 la mise en oeuvre du SEQE-UE pour les vols internationaux, tout en continuant à l'appliquer aux vols intérieurs à l'Espace économique européen (soit les 27 États membres de l'UE, ainsi que l'Islande, la Norvège et le Liechtenstein), ainsi que les vols au départ de la Suisse, depuis 2020193(*), et du Royaume-Uni, depuis 2021194(*). Les vols entre l'EEE et les pays et territoires d'outre-mer (PTOM)195(*) sont considérés comme des vols internationaux vers des pays tiers ; ils bénéficient à ce titre de la décision « stop the clock ».

2) Des dispositions transposées en droit national dans une sous-section distincte au code de l'environnement

Les dispositions propres au secteur aérien sont transposées en droit national dans une sous-section 3 spécifique, au sein de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement. Cette sous-section comporte un article unique (L. 229-18).

L'article L. 229-18 dispose que ses dispositions s'appliquent aux exploitants d'aéronef mentionnés à l'article L. 229-5, soit les exploitants d'aéronef dont la France est l'État membre responsable au titre des émissions de gaz à effet de serre dans l'atmosphère au cours de tout vol à l'arrivée ou au départ d'un aérodrome situé sur le territoire d'un État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, à l'exception des vols dont la liste est fixée par décret. 139 compagnies aériennes sont ainsi gérées par les autorités françaises.

Le I de l'article dispose que des quotas d'émission de gaz à effet de serre sont délivrés gratuitement, sur demande, par l'autorité administrative aux exploitants d'aéronef. Ces quotas sont affectés au titre d'une période déterminée et délivrés annuellement.

Le II prévoit que pour chaque période, chaque exploitant d'aéronef peut solliciter l'affectation de quotas délivrés à titre gratuit en soumettant à l'autorité compétente une demande rendant compte de son activité aérienne en termes de tonnes-kilomètres. Le nombre de quotas affectés à titre gratuit à chaque exploitant d'aéronef est calculé par l'autorité administrative.

Le III détermine les conditions dans lesquelles les exploitants d'aéronef peuvent solliciter, pour chaque période à partir de 2013, avant le 30 juin de la troisième année de la période, l'affectation de quotas à titre gratuit en provenance de la réserve spéciale, mentionnée à l'article 3 septies de la directive SEQE-UE, bénéficiant aux exploitants d'aéronefs en croissance rapide et aux nouveaux entrants sur le marché.

B. Une évolution des modalités d'assujettissement du transport aérien au SEQE-UE, prévoyant en particulier une extinction progressive des quotas gratuits

Adoptée en mai 2023, la révision de la directive relative au système d'échange de quotas d'émission196(*) constitue un des axes du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » qui vise à faciliter l'atteinte de l'objectif européen de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990.

Cette réforme prévoit notamment une évolution des modalités d'assujettissement du transport aérien au SEQE-UE.

Ø La modification principale porte sur l'extinction progressive des quotas gratuits dont bénéficie actuellement le transport aérien.

Les quotas alloués gratuitement seront progressivement réduits (75 % en 2024 et 50 % en 2025, des 85 % des quotas qui auraient été alloués à titre gratuit), avant d'être totalement supprimés en 2026 (article 3 quinquies de la directive). La Commission détermine la quantité totale de quotas à allouer aux exploitants d'aéronefs pour l'année 2024 sur la base du total des quotas alloués aux exploitants d'aéronefs qui effectuaient des activités aériennes au cours de l'année 2023, diminué du facteur de réduction linéaire de 4,3 % (article 9 de la directive). Il est également tenu compte, dans le calcul de ces quotas, des émissions vérifiées, au titre de la même année, résultant des activités aériennes déclarées pour les vols qui ne relèvent du SEQE-UE qu'à partir du 1er janvier 2024 (article 3 quinquies, paragraphe 1 bis).

Cette suppression répond aux préconisations d'un rapport de la Cour des comptes européenne de 2020197(*), selon lequel l'allocation gratuite de quotas a constitué un frein à la décarbonation du secteur des transports en favorisant les déplacements en avion au détriment du ferroviaire. Le coût supplémentaire par passager induit par le SEQE a été ainsi très limité pour le secteur aérien, largement bénéficiaire de quotas gratuits, avec un impact allant de 0,3 à 2 euros pour les principaux vols étudiés, là où le transport ferroviaire, majoritairement électrifié en Europe, a dû supporter les coûts du SEQE-UE répercutés par le secteur de la production d'électricité. Couplée avec les dispositions du règlement sur l'incorporation de biocarburants dans le transport aérien (« RefuelEU Aviation »)198(*), la suppression progressive des quotas d'ici 2026 répond également à la volonté législative exprimée à l'article 142 de la loi « Climat et résilience »199(*), prévoyant l'instauration d'une tarification carbone appropriée du secteur en privilégiant sa mise en place au niveau européen. Cette suppression avait à ce titre été saluée par le rapport d'information de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable consacré à la réforme du SEQE-UE200(*).

Ø La directive révisée prévoit une exception à la suppression de l'allocation gratuite pour l'utilisation de biocarburants (paragraphe 6 de l'article 3 quater).

Pour la période du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2030, un maximum de 20 millions sur la quantité totale de quotas est réservé pour l'utilisation de carburants d'aviation durables et d'autres carburants d'aviation qui ne sont pas dérivés de combustibles fossiles, mentionnés dans le règlement « ReFuelEU Aviation » et éligibles pour atteindre les objectifs d'incorporation en volume de ces carburants fixés à l'annexe I de ce règlement.

Les quotas alloués couvrent tout ou partie de l'écart de prix restant entre le prix du kérosène fossile et celui du biocarburant (50 à 100 %, selon le type de biocarburants visé), après prise en compte des incitations liées au prix du carbone et aux niveaux minimaux harmonisés de taxation des combustibles fossiles.

- La directive révisée clarifie également l'articulation du SEQE-UE avec le mécanisme de compensation des émissions Corsia de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) en appliquant Corsia aux vols extra-européens et le SEQE-UE aux vols intra-européens (article 28 bis).

- Enfin, en application du paragraphe 5 de l'article 14 de la directive, les exploitants d'aéronefs seront tenus de rendre compte une fois par an des effets hors CO2 de l'aviation survenant à partir du 1er janvier 2025.

Ces effets hors CO2 sont définis à l'article 3 de la directive comme « les effets sur le climat du rejet, lors de la combustion de carburant, d'oxydes d'azote (NOx), de particules de suie et d'espèces de soufre oxydées, ainsi que les effets de la vapeur d'eau, notamment des traînées de condensation, provenant d'un aéronef effectuant une activité aérienne ».

Au plus tard le 31 décembre 2027, sur la base des résultats de l'application du cadre de surveillance, de déclaration et de vérification, la Commission européenne devra présenter un rapport et, s'il y a lieu et après avoir réalisé au préalable une analyse d'impact, une proposition législative visant à atténuer les effets hors CO2 de l'aviation, en élargissant le champ d'application du SEQE-UE.

II. Un article transposant la réforme SEQE-UE concernant les dispositions particulières applicables au secteur aérien

Cet article vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions particulières applicables au secteur aérien.

Ø Pour ce faire, il propose une réécriture intégrale de l'article L. 229-18.

Le I établit le nombre de quotas gratuits auquel les exploitants d'aéronefs peuvent bénéficier, en rappelant les taux et modalités de calcul prévus par l'article 3 quinquies de la directive (voir supra). Il est par ailleurs précisé que pour chacune des années 2024 et 2025, un arrêté du ministre chargé des transports fixe le nombre de quotas d'émissions de gaz à effet de serre alloués à titre gratuit à chaque exploitant d'aéronef.

Le II transpose le paragraphe 6 de l'article 3 quater de la directive relatif à l'allocation gratuite de quotas pour l'utilisation de biocarburants. Reprenant les critères prévus par la directive, il est ainsi prévu que les quotas alloués couvrent respectivement, après prise en compte des incitations liées au prix du carbone et aux niveaux minimaux harmonisés de taxation des combustibles fossiles :

- 70 % de l'écart restant entre le prix du kérosène fossile et celui de l'hydrogène produit à partir de sources d'énergies renouvelables ou de biocarburants avancés201(*) et qui ont un facteur d'émission nul202(*) ;

- 95 % de l'écart de prix restant entre le prix du kérosène fossile et celui de carburants renouvelables d'origine non biologique203(*) et qui ont un facteur d'émission nul204(*) ;

- 100 % de l'écart de prix restant entre le prix du kérosène fossile et celui d'un carburant d'aviation qui n'est pas dérivé de combustibles fossiles et qui est éligible au titre du règlement « RefuelUE Aviation » embarqué dans des aéroports qui sont situés dans une région ultrapériphérique, ou dans des aéroports situés sur des îles de moins de 10 000 km² qui ne sont pas reliées au continent, ou dans des aéroports qui ne sont pas définis, du fait de leur trafic, comme des aéroports de l'Union européenne en application de l'article 3 du même règlement « RefuelUE Aviation » ;

- dans les autres cas, 50 % de l'écart restant entre le prix du kérosène fossile et celui du carburant d'aviation durable éligible et qui n'est pas dérivé de combustibles fossiles.

Lorsque le carburant d'aviation éligible ne peut être physiquement attribué dans un aéroport à un vol spécifique, les quotas sont attribués aux exploitants d'aéronefs proportionnellement aux carburants d'aviation admissibles embarqués par l'exploitant d'aéronef dans cet aéroport pour ses activités aériennes subsoniques.

Si, pour une année donnée, la demande de quotas pour l'utilisation de ces carburants est supérieure au nombre de quotas disponibles, le nombre de quotas attribués est réduit et dans la même proportion pour tous les exploitants d'aéronefs concernés.

Le nombre de quotas attribués chaque année à titre gratuit aux exploitants d'aéronefs est fixé par arrêté du ministre chargé des transports, dans les conditions précisées par décret en Conseil d'État.

Ø L'article 15 crée, par ailleurs, un nouvel article L. 229-18-1, afin de transposer l'exonération dont bénéficient les vols internationaux en application de l'article 28 bis de la directive.

Son I prévoit ainsi, par dérogation au II de l'article L. 229-7, que les exploitants d'aéronefs ne sont pas tenus de restituer des quotas en ce qui concerne les émissions rejetées jusqu'au 31 décembre 2026 et résultant de vols :

- reliant l'EEE et les États énumérés dans l'acte d'exécution adopté en vertu du paragraphe 3 de l'article 25 bis de la directive 2003/87 du 13 octobre 2003, permettant à la Commission d'établir la liste des États autres que les pays de l'EEE, la Suisse et le Royaume-Uni qui sont considérés comme appliquant le Corsia ;

- reliant l'EEE et les États qui ne sont pas énumérés dans cet acte d'exécution et autres que les vols à destination de la Suisse et du Royaume-Uni.

Le II dispose par ailleurs que par dérogation au II de l'article L. 229-7, les exploitants d'aéronefs ne sont pas tenus de restituer des quotas en ce qui concerne les émissions résultant de vols reliant l'EEE et les pays les moins avancés ou les petits États insulaires en développement tels qu'ils sont définis par les Nations unies, autres que ceux qui sont énumérés dans l'acte d'exécution précédemment évoqué et que ceux dont le produit intérieur brut par habitant est égal ou supérieur à la moyenne du produit intérieur brut par habitant de l'Union européenne.

Ø Enfin, un nouvel article L. 229-18-2 transpose, en application du paragraphe 5 de l'article 14 de la directive, l'obligation de rapportage des efforts hors CO2 de l'aérien à compter de 2025.

III. Des ajustements adoptés en commission, visant notamment à mieux tenir compte des incitations liées au prix du carbone lors de l'allocation de quotas gratuits au titre de l'utilisation de biocarburants

La majorité des dispositions proposées par le Gouvernement n'appelle pas à d'importants commentaires, compte tenu des faibles marges de manoeuvre laissées aux Parlements nationaux pour appliquer le droit européen.

Sur proposition du rapporteur, outre deux amendements rédactionnels COM-9 et COM-13, la commission a toutefois souhaité apporter quelques ajustements à l'article 15.

Elle a tout d'abord adopté un amendement COM-11 visant à mieux tenir compte des incitations liées au prix du carbone lors de l'allocation de quotas gratuits au titre de l'utilisation de biocarburants. Ainsi, les quotas alloués gratuitement pour l'utilisation de biocarburants ont vocation à couvrir tout ou partie de l'écart de prix restant entre le prix du kérosène fossile et celui du biocarburant, après prise en compte des incitations liées au prix du carbone et aux niveaux minimaux harmonisés de taxation des combustibles fossiles (paragraphe 6 de l'article 3 quater de la directive). Mais la directive prévoit, par ailleurs, que l'allocation de quotas peut tenir compte d'un éventuel soutien par d'autres dispositifs au niveau national. Dans un souci d'égalité entre secteurs assujettis au SEQE-UE, et afin d'éviter un double dividende indu, l'amendement adopté vise à activer cette possibilité, en prévoyant que la couverture de tout ou partie de l'écart de prix entre le kérosène fossile et les carburants d'aviation admissibles tient compte des éventuelles incitations liées au prix du carbone définies au niveau national, dans des conditions précisées par décret.

Par ailleurs, par souci de cohérence avec la rédaction proposée à l'article 16 concernant le secteur maritime, un amendement COM-12 adopté par la commission vise à inscrire au niveau législatif l'exonération dont bénéficient, jusqu'au 31 décembre 2030, les vols en direction ou en provenance des régions ultrapériphériques (RUP) au titre du SEQE-UE, en application du paragraphe 8 de l'article 3 quater de la directive.

Pour assurer la clarté du code de l'environnement, et en cohérence avec l'extinction des quotas gratuits prévue par la directive - hors allocation au titre des biocarburants, un amendement COM-10, adopté par la commission, abroge le I de l'article L. 229-18 au 1er janvier 2026.

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Article 16
Transposition de la réforme du système d'échange de quotas d'émission
de gaz à effet de serre (SEQE-UE) - Dispositions particulières applicables
au secteur maritime

Cet article vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions particulières applicables au secteur maritime.

La commission a adopté un amendement de coordination.

Elle a adopté l'article 16 ainsi modifié.

I. D'une obligation de surveillance de déclaration et de vérification des émissions du secteur maritime à une obligation de restitution de quotas carbone au titre du SEQE-UE

A. Avant la révision de la directive SEQE-UE en 2023, des émissions du transport maritime uniquement couvertes par un système de surveillance, de déclaration et de vérification (règlement « MRV »)

Le système d'échange de quotas d'émission (SEQE-UE ou European Union Emissions Trading Scheme, EU-ETS) est un système de « plafonnement et d'échange » des émissions de gaz à effet de serre, créé par la directive 2003/87/CE205(*) et mis en place en 2005 pour faciliter l'atteinte des objectifs de l'Union européenne au titre du Protocole de Kyoto de 1997. Il a depuis lors été conforté comme un des piliers de la politique climatique de l'Union européenne206(*). D'abord limité à la production d'électricité et de chaleur, ainsi qu'aux installations industrielles, le système a été étendu dès la phase 3, en 2013, au secteur aérien.

Depuis 2015, les émissions du transport maritime, non intégrées dans le périmètre du SEQE-UE jusqu'à la révision de la directive en 2023, ont fait l'objet d'une régulation ad hoc. L'Union européenne s'est ainsi dotée d'un système de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions du transport maritime dans le cadre du règlement « MRV » de 2015207(*).

En France, la méconnaissance de ces obligations peut faire l'objet de sanctions pénales définies à l'article L. 218-25 du code de l'environnement. Une sanction administrative d'expulsion du port peut également être prononcée par l'autorité administrative lorsque l'exploitant, le propriétaire ou le représentant à bord d'un navire battant pavillon d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un État tiers n'a pas, pour ce navire, pendant au moins deux périodes de déclaration consécutives, respecté ses obligations de surveillance, de déclaration et de vérification de ses émissions (3° de l'article L. 5241-4-6 du code des transports, en application de l'article 20 du règlement « MRV »).

Ce régime de surveillance, de déclaration et de vérification n'a pas été adossé à un système de tarification du carbone, notamment par le biais d'une obligation de restitution de quotas au sein du SEQE-UE. Cette absence de tarification est apparue incompatible avec le nouvel objectif climatique de l'Union européenne (baisse des émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 par rapport à 1990). Depuis 1990, les émissions du transport maritime (3 à 4 % des émissions totales de l'Union européenne) ont en effet augmenté, poussées par les émissions du transport international (+ 36 % par rapport à 1990), dont la hausse n'a été compensée que pour partie par la baisse des émissions domestiques (- 26 %, sur la même période). Les travaux préparatoires à la révision de la directive SEQE-UE ont estimé que les émissions internationales - 90 % des émissions du secteur - pourraient croître, à politiques publiques constantes, de 14 % entre 2015 et 2030.

B. Une intégration du secteur maritime au SEQE-UE, à l'occasion de la révision du système d'échange de quotas d'émission en 2023

Adoptée en mai 2023, la révision de la directive relative au système d'échange de quotas d'émission208(*) constitue un des axes du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » qui vise à faciliter l'atteinte de l'objectif européen de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990.

Cette réforme prévoit notamment une extension du SEQE-UE au transport maritime.

1) Une intégration au SEQE-UE s'appuyant sur le règlement « MRV »

En application de l'annexe I de la directive, l'extension du SEQE-UE concerne les activités maritimes couvertes par le paragraphe 1 de l'article 2 du règlement « MRV » - soit les navires de commerce dont le tonnage brut est supérieur ou égal à 5 000 - ainsi que les activités couvertes par le paragraphe 1 ter du même article à compter du 1er janvier 2027 - soit les navires offshore dont le tonnage brut est supérieur à 5000. L'article 3 octies quater de la directive prévoit que les États membres prennent les mesures nécessaires pour s'assurer que lorsque la responsabilité ultime de l'achat du carburant, de l'exploitation du navire ou des deux, est assumée, en vertu d'un accord contractuel, par une entité autre que la compagnie maritime, la compagnie maritime puisse prétendre au remboursement par cette entité des coûts découlant de la restitution de quotas.

La surveillance et la déclaration des émissions du transport maritime restent encadrées par le règlement « MRV », qui prescrit une agrégation des émissions au niveau de la compagnie (article 11 bis du règlement) et impose une vérification de ces émissions par des vérificateurs accrédités (chapitre III du règlement).

2) Le champ d'application géographique du SEQE-UE maritime

L'intégralité des émissions des trajets intra-UE, ainsi que des émissions des navires à quai dans un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre, et 50 % des émissions entre l'UE et le reste du monde sont incluses dans le périmètre du SEQE-UE (article 3 octies bis de la directive révisée). Cette inclusion partielle des émissions internationales du secteur maritime a été motivée par l'absence de mécanisme similaire à Corsia, applicable aux émissions internationales du transport aérien.

Les voyages entre l'Union européenne et les pays et territoires d'outre-mer (PTOM)209(*) sont considérés comme des trajets internationaux vers des pays tiers ; ils bénéficient à ce titre de la couverture partielle des émissions de 50 %.

En revanche, les émissions rejetées lors des voyages entre un port situé dans une région ultrapériphérique (RUP) d'un État membre et un port situé dans le même État membre, y compris les voyages entre les ports d'une RUP et les voyages entre les ports des RUP du même État membre, sont intégrées au périmètre du SEQE-UE mais exonérées d'obligation de restitution de quotas jusqu'au 31 décembre 2030. Il en va de même pour les émissions des activités à quai des navires en rapport avec ces voyages (paragraphe 3-ter de l'article 12).

3) Une entrée en vigueur progressive, des exonérations et un régime préférentiel applicable aux navires classe glace

Les obligations imposées aux compagnies maritimes en matière de restitution des quotas d'émissions seront progressivement mises en place : 40 % pour les émissions de 2024, puis 70 % en 2025 et 100 % en 2026 (article 3 octies ter). De plus, les émissions de méthane et de protoxyde d'azote du secteur maritime ne seront intégrées dans le périmètre du SEQE-UE qu'en 2026 (annexe I de la directive).

La directive révisée crée par ailleurs deux exonérations, « prévues » par la Commission par un acte d'exécution :

- à la demande d'un État membre, une exonération, jusqu'au 31 décembre 2030, des obligations de restitutions de quotas pour les voyages effectués par des navires à passagers autres que des navires de croisière, et par des navires rouliers à passagers, entre un port d'une île relevant de la juridiction d'un État membre demandeur, ne disposant d'aucune liaison routière ou ferroviaire avec le continent et d'une population de moins de 200 000 résidents permanents, et un port relevant de la juridiction du même État membre, ainsi que lors des activités à quai de ces navires en rapport avec de tels voyages (paragraphe 3-quinquies de l'article 12) ;

- à la demande conjointe de deux États membres, dont l'un n'a pas de frontière terrestre avec un autre État membre et l'autre État membre étant l'État membre géographiquement le plus proche de l'État membre sans une telle frontière terrestre, une exonération, jusqu'au 31 décembre 2030, des obligations de restitutions de quotas concernant les voyages effectués entre les deux États membres par des navires à passagers ou des navires rouliers à passagers dans le cadre d'un contrat de service public transnational ou d'une obligation de service public au niveau transnational, ainsi que lors des activités à quai de ces navires en rapport avec de tels voyages (paragraphe 3-quater de l'article 12).

Par ailleurs, un régime préférentiel pour les navires de classe glace est prévu, à condition que ces navires relèvent de la classe glace IA ou IA Super ou d'une classe glace équivalente, établie sur la base de la recommandation HELCOM 25/7 : jusqu'au 31 décembre 2030, les compagnies maritimes peuvent restituer 5 % de quotas en moins que les émissions vérifiées rejetées par ces navires (paragraphe 3-sexies de l'article 12).

4) Des sanctions spécifiques au transport maritime, prévoyant l'expulsion, l'interdiction de l'accès aux ports ou l'immobilisation des navires

En plus du régime de droit commun applicable à l'ensemble des secteurs couverts par le SEQE-UE, la directive prévoit des sanctions spécifiques au transport maritime en cas de méconnaissance des obligations de restitution de quotas.

Le paragraphe 11 bis de son article 16 dispose ainsi que lorsqu'une compagnie maritime omet de se conformer à ses obligations en matière de restitution pendant au moins deux périodes de déclaration consécutives, et que d'autres mesures visant à en assurer le respect échouent, l'autorité compétente de l'État membre du port d'entrée peut, après avoir donné à la compagnie maritime concernée la possibilité de présenter ses observations, prononcer une décision d'expulsion. À la suite d'une telle décision d'expulsion, tous les États membres, à l'exception de l'État membre du pavillon, refusent l'accès de leurs ports aux navires placés sous la responsabilité de la compagnie maritime concernée, jusqu'à ce que celle-ci se conforme à ses obligations de restitution. Lorsque le navire bat le pavillon d'un État membre et pénètre dans l'un de ses ports ou que la présence de ce navire est constatée dans l'un de ses ports, l'État membre concerné, après avoir donné à la compagnie maritime concernée la possibilité de présenter ses observations, immobilise le navire jusqu'à ce que la compagnie maritime remplisse ses obligations de restitution.

En outre, lorsqu'il est constaté qu'un navire d'une compagnie maritime omettant de se conformer à ses obligations en matière de restitution pendant au moins deux périodes de déclaration consécutives se trouve dans l'un des ports de l'État membre dont le navire bat le pavillon, l'État membre concerné peut, après avoir donné à la compagnie maritime concernée la possibilité de présenter ses observations, émettre un ordre d'immobilisation du navire jusqu'à ce que la compagnie maritime remplisse ses obligations de restitution. À la suite de la délivrance d'un tel ordre d'immobilisation du navire, chaque État membre prend les mêmes mesures que celles requises à la suite d'une décision d'expulsion (à savoir un refus de l'accès au port des navires concernés).

Ces dispositions sont sans préjudice des règles maritimes internationales applicables au cas des navires en détresse.

Parallèlement, le paragraphe 3 de l'article 20 du règlement « MRV » a été modifié pour prévoir un régime de sanction similaire en cas de méconnaissance des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions. Il est ainsi prévu un refus d'accès au port et une immobilisation des navires, dans les mêmes conditions que celles prévues en cas de non-restitution de quotas ; ces nouvelles sanctions s'ajoutent à la possibilité d'expulsion en cas de méconnaissance des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions, qui était déjà inscrite à l'article 20 du règlement « MRV » et transposée en droit national au 3° de l'article L. 5241-4- du code des transports (voir supra).

II. Un article transposant la réforme SEQE-UE concernant les dispositions particulières applicables au secteur maritime

L'article 16 du projet de loi vise à transposer la réforme du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), concernant les dispositions particulières applicables au secteur maritime.

Ø Ces nouvelles dispositions sont inscrites dans une nouvelle sous-section 4 de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement.

Le I de l'article L. 229-19-1 (nouveau) définit les activités maritimes couvertes par le SEQE-UE en référence au règlement « MRV » (voir supra) et les émissions de gaz à effet de serre considérées (CO2, puis méthane et protoxyde d'azote dès 2026). Le II du même article pose par ailleurs le principe d'un assujettissement de l'ensemble des émissions intra-UE et de 50 % des émissions internationales.

L'article L. 219-9-2 (nouveau) détaille les modalités d'entrée en vigueur progressive du dispositif - 40 % des émissions de 2024, puis 70 % en 2025 et 100 % dès 2026 (I), consacre l'exonération dont bénéficient les RUP (II), le régime préférentiel applicable aux navires classe glace (III), ainsi que l'exonération dont bénéficient les liaisons vers les petites îles (IV) et les voyages dans le cadre d'un contrat de service public transnational ou d'une obligation de service public au niveau transnational (V).

L'article L. 219-9-3 (nouveau) transpose l'article 3 octies quater de la directive, relatif au transfert des coûts du SEQE-UE de la compagnie maritime à une autre entité.

L'article L. 229-19-4 (nouveau) transpose les règles d'expulsion, d'interdiction de l'accès aux ports et d'immobilisation des navires en cas de méconnaissance des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions, au titre du règlement « MRV ». La possibilité d'expulsion était déjà inscrite au 3° de l'article L. 5241-4-6 du code des transports, dont l'abrogation est donc proposée par le projet de loi. Par souci de lisibilité, le Gouvernement a en effet jugé plus cohérent d'intégrer cette disposition dans la sous-section liée au SEQE-UE. L'article L. 229-19-4 prévoit ainsi que dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 20 du règlement « MRV », l'immobilisation ou l'expulsion et l'interdiction d'accès aux ports d'un navire peuvent être décidées dans le cas où une compagnie maritime n'a pas, pendant au moins deux périodes de déclaration consécutives, effectué pour ce navire de déclaration d'émissions ou obtenu le document de conformité de sa déclaration annuelle d'émissions de gaz à effet de serre, et a fait l'objet de la sanction prévue à l'article L. 226-10 (voir infra) ou d'une sanction prévue pour les mêmes infractions par un autre État membre de l'Union européenne, sans avoir encore satisfait à ses obligations.

Les sanctions d'expulsion, d'interdiction de l'accès aux ports et d'immobilisation en cas de méconnaissance des obligations de restitution de quotas, au titre du SEQE-UE, sont inscrites aux articles L. 229-19-5 et L. 229-19-6 (nouveaux).

L'article L. 229-19-5 porte sur les sanctions d'expulsion ou d'immobilisation que l'on pourrait qualifier de facultatives, au sens du paragraphe 11 bis de l'article 16 de la directive. Il prévoit ainsi que si, pendant au moins deux années consécutives, une compagnie maritime n'a pas restitué un nombre de quotas suffisant pour couvrir ses émissions de l'année précédente, et a fait l'objet de la sanction administrative pour non-restitution de quotas (prévue au II de l'article L. 229-10) ou de sanctions prévues pour les mêmes manquements par un autre État membre de l'Union européenne, sans procéder à cette restitution dans les délais qui lui étaient impartis, l'autorité compétente peut, après l'avoir mise en mesure de présenter ses observations :

- prononcer l'immobilisation de tout navire battant pavillon français dont cette compagnie est responsable, présent ou entrant dans un port français. La décision est levée lorsque la compagnie maritime justifie qu'elle satisfait pleinement à ses obligations de restitution ;

- prononcer une décision d'expulsion si un navire battant pavillon d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un État tiers dont cette compagnie est responsable est présent ou entrant dans un port français. La décision est levée lorsque la compagnie maritime justifie qu'elle satisfait pleinement à ses obligations de restitution.

L'article L. 229-19-6 porte sur les sanctions de refus d'accès aux ports ou d'immobilisation que l'on pourrait qualifier d'obligatoires, au sens du paragraphe 11 bis de l'article 16 de la directive. Il prévoit ainsi que, sans préjudice des règles maritimes internationales applicables au cas des navires en détresse, lorsqu'une compagnie maritime a fait l'objet d'une décision d'expulsion ou que l'un des navires dont elle a la responsabilité a fait l'objet d'une décision d'immobilisation, par les autorités françaises en application de l'article L. 229-19-5, ou par un autre État membre de l'Union européenne en application de dispositions de transposition du paragraphe 11 bis de l'article 16 de la directive SEQE-UE, l'autorité compétente, après avoir mis la compagnie maritime en mesure de présenter ses observations :

- prononce l'immobilisation de tout navire exploité par cette compagnie battant pavillon français présent ou entrant dans un port français. La décision est levée lorsque la compagnie maritime justifie qu'elle satisfait pleinement à ses obligations de restitution ;

- refuse l'accès aux ports et aux mouillages sur l'ensemble de son territoire national à tout navire exploité par cette compagnie battant pavillon d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un État tiers. La décision est levée lorsque la compagnie maritime justifie qu'elle satisfait pleinement à ses obligations de restitution.

Ø Le projet de loi crée par ailleurs un régime de sanctions pénales propre au secteur maritime.

Les particularités du secteur maritime justifient, selon le Gouvernement, une approche pénale, plus dissuasive, qui ne semble pas nécessaire dans les autres secteurs assujettis au SEQE-UE. En effet, le secteur du transport maritime international est un secteur mondialisé, difficilement captif de par sa nature même. Celui-ci peut se reconfigurer en changeant de routes commerciales ou de ports. De plus, dans un secteur très compétitif, les acteurs du transport maritime sont en recherche constante d'optimisation des règles internationales. Enfin, le contrôle des émissions de GES est plus difficile dans le secteur maritime : chaque navire possède un mode de propulsion différent, qui peut changer à chaque voyage et lors d'un même voyage, avec des carburants ou des mélanges de carburants parfois uniques pour chacun d'entre eux. Ainsi, il n'existe pas d'outils robustes permettant d'évaluer ces émissions, comme c'est le cas dans d'autres secteurs.

L'article L. 226-10 du code de l'environnement (nouveau) prévoit ainsi des sanctions pénales en cas de méconnaissance des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions de gaz à effet de serre du transport maritime (issues du règlement « MRV »). Ces dispositions sont aujourd'hui inscrites à l'article L. 218-25 au sein de la section 1 « Pollution par les rejets des navires » du chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l'environnement, qui concerne davantage la pollution « directe » du milieu marin par les navires (notamment pour les hydrocarbures) que la pollution du milieu atmosphérique.

Reprenant les termes de l'article L. 218-25, l'article L. 226-10 prévoit une amende de 15 000 euros en cas de méconnaissance des obligations de surveillance et de déclaration des émissions (I). Sont ajoutées un doublement de l'amende en cas de violation délibérée des obligations (II) et l'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique (III).

En conséquence, le projet de loi propose l'abrogation de l'article L. 218-25.

L'article L. 226-11 du code de l'environnement (nouveau) prévoit des sanctions pénales en cas de méconnaissance des obligations de restitution des quotas.

Son I dispose que le fait, pour une compagnie maritime qui a fait l'objet de la sanction administrative pour non-restitution de quotas (prévue par le II de l'article L. 229-10), de ne pas acquitter l'amende qui lui a été infligée dans les délais impartis ou de ne pas restituer le nombre de quotas dont elle est redevable à la date prévue pour la restitution de l'année suivante, en méconnaissance des dispositions de cet article, est puni d'un an d'emprisonnement et de 500 000 euros d'amende. En cas d'absence totale de restitution de quotas en contrepartie des émissions de l'année en cause, l'amende est portée à un million d'euros.

Le II de l'article prévoit que les peines prévues au I sont applicables au représentant légal, au dirigeant de fait ou à toute autre personne exerçant, en droit ou en fait, un pouvoir de décision dans la gestion de la compagnie maritime, lorsque ces personnes ont été à l'origine de la non-restitution partielle ou totale du nombre de quotas ou du non-paiement de l'amende.

Son III dispose que les personnes morales déclarées responsables pénalement du délit mentionné au I encourent également une peine d'affichage de la décision prononcée ou de diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.

Le IV de l'article précise enfin que les peines prononcées tiennent compte des gains économiques obtenus en conséquence du non-respect des obligations du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre et du montant du préjudice causé.

Enfin, le projet de loi crée un nouvel article L. 226-3 habilitant, outre les officiers et agents de police judiciaire, les personnes mentionnées aux 1° à 8° de l'article L. 218-26 du code de l'environnement210(*) à rechercher et à constater les infractions aux dispositions du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement (consacré à « l'effet de serre ») et à celles du règlement « MRV ».

III. Des ajustements rédactionnels adoptés en commission

Les dispositions proposées par le Gouvernement n'appellent pas à d'importants commentaires, compte tenu des faibles marges de manoeuvre laissées aux Parlements nationaux pour appliquer le droit européen.

La commission a adopté un amendement de coordination COM-15, sur proposition du rapporteur.

La commission a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Article 17
Obligations applicables au titre du régime de compensation
et de réduction de carbone pour l'aviation internationale (Corsia)

Cet article vise à transposer en droit national les obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l'aviation internationale (Corsia), en articulant ce mécanisme avec le système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne (SEQE-UE).

La commission a adopté quatre amendements visant à mieux intégrer les dispositions proposées dans le code de l'environnement, à aligner le régime de sanctions administratives par rapport sur celui applicable au SEQE-UE et à corriger une erreur concernant l'application du projet de loi dans les territoires ultra-marins.

Elle a adopté l'article 17 ainsi modifié.

I. Une clarification de l'articulation entre le mécanisme Corsia et le système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne (SEQE-UE) à l'occasion de la révision de la directive SEQE-UE

Depuis son intégration au système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne (SEQE-UE) en 2013, le secteur aérien bénéficie d'un régime préférentiel en raison de la non-application du dispositif aux vols internationaux.

En effet, une partie importante des émissions du secteur a été exclue du périmètre du SEQE-UE, avec la décision « stop the clock » de 2013. Sous la pression diplomatique d'États tiers - notamment des États-Unis et de la Chine - qui menaçaient de bloquer l'élaboration d'une politique environnementale ambitieuse pour l'aérien et de mettre en oeuvre des représailles commerciales, notamment vis-à-vis d'Airbus, l'Union européenne a suspendu en avril 2013 la mise en oeuvre du SEQE-UE pour les vols internationaux, tout en continuant à l'appliquer aux vols intérieurs à l'Espace économique européen (EEE) (soit les 27 États membres de l'UE, ainsi que l'Islande, la Norvège et le Liechtenstein), ainsi que les vols au départ de la Suisse, depuis 2020211(*), et du Royaume-Uni, depuis 2021212(*). Les vols entre l'EEE et les pays et territoires d'outre-mer (PTOM)213(*) sont considérés comme des vols internationaux vers des pays tiers ; ils bénéficient à ce titre de la décision « stop the clock » et sont donc exclus du SEQE-UE.

En parallèle, les négociations menées sous l'égide de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) ont abouti à la mise en place du mécanisme Corsia (Carbon offsetting and reduction scheme), système d'obligation d'achat de crédits de compensation des émissions de CO2.

Le mécanisme prévoit deux phases de mise en oeuvre : une première entre 2021 et 2026, reposant sur le volontariat, une seconde à partir de 2027 où le dispositif s'appliquera de façon universelle, les pays les moins développés, les plus enclavés et ceux dont le transport aérien est le moins mature étant toutefois exemptés.

Les compagnies aériennes des États participants sont ainsi contraintes d'acheter des crédits de compensation carbone pour les émissions supérieures au niveau enregistré en 2019 ; initialement, il était prévu de retenir la moyenne des émissions de 2019 et 2020. Cette cible a été modifiée par l'OACI pour tenir compte des conséquences de la Covid-19 sur le trafic aérien mondial.

À l'occasion de la révision de la directive SEQE-UE de 2023214(*), l'articulation du système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne avec le mécanisme de compensation des émissions Corsia a été clarifiée : le mécanisme Corsia s'applique aux vols extra-européens et le SEQE-UE aux vols intra-européens (UE, Islande, Norvège, Liechtenstein, Suisse et Royaume-Uni) (article 28 bis).

Toutefois, la directive révisée prévoit une clause de revoyure en 2026 : la Commission européenne devra évaluer l'intégrité environnementale de Corsia et sa compatibilité avec les objectifs environnementaux de l'Union européenne. Ce rapport de la Commission sera accompagné, s'il y a lieu, d'une proposition législative visant à modifier la directive SEQE-UE pour qu'elle s'applique, à partir de janvier 2027, aux vols au départ d'aérodromes situés dans les États de l'EEE à destination d'aérodromes situés en dehors de l'EEE (voir encadré).

Articulation Corsia et SEQE-UE : une clause de revoyure prévue en 2026 (paragraphes 2 et 3 de l'article 28 ter de la directive SEQE-UE)

« 2. Au plus tard le 1er juillet 2026, la Commission présente un rapport au Parlement européen et au Conseil dans lequel elle évalue l'intégrité environnementale du mécanisme de marché mondial de l'OACI, y compris son ambition générale par rapport aux objectifs de l'accord de Paris, le degré de participation à la compensation au titre du Corsia, son applicabilité, la transparence, les sanctions en cas de non-respect, les procédures de consultation du public, la qualité des crédits de compensation, la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions, les registres, la responsabilité et les règles d'utilisation des biocarburants. La Commission publie ledit rapport au plus tard le 1er juillet 2026 également.

« 3. Le rapport de la Commission visé au paragraphe 2 est accompagné, s'il y a lieu, d'une proposition législative visant à modifier la présente directive d'une manière cohérente avec les objectifs de température de l'accord de Paris, l'engagement de l'Union à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs de l'économie d'ici à 2030, et l'objectif visant à atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050 au plus tard, ainsi qu'avec l'objectif visant à préserver l'intégrité environnementale et l'efficacité de l'action de l'Union en matière de climat. La proposition qui accompagne éventuellement le rapport prévoit, le cas échéant, que le SEQE de l'UE s'applique, à partir de janvier 2027, aux vols au départ d'aérodromes situés dans les États de l'EEE à destination d'aérodromes situés en dehors de l'EEE, et exclut les vols à l'arrivée en provenance d'aérodromes situés en dehors de l'EEE lorsque le rapport visé au paragraphe 2 montre que :

« a) au plus tard le 31 décembre 2025, l'assemblée de l'OACI n'a pas renforcé le Corsia dans le cadre de la réalisation de son objectif indicatif mondial à long terme, visant à atteindre les objectifs de l'accord de Paris ; ou

« b) les États qui sont énumérés dans l'acte d'exécution adopté en vertu de l'article 25 bis, paragraphe 3215(*), représentent moins de 70 % des émissions de l'aviation internationale, selon les données disponibles les plus récentes.

« La proposition qui accompagne éventuellement le rapport prévoit également, le cas échéant, la possibilité pour les exploitants d'aéronefs de déduire tous les coûts liés à la compensation au titre du Corsia sur ces liaisons, afin d'éviter un double prélèvement. Si les conditions visées au premier alinéa, points a) et b), du présent paragraphe ne sont pas remplies, la proposition modifie la présente directive, s'il y a lieu, de sorte que le SEQE de l'UE continue de s'appliquer uniquement aux vols à l'intérieur de l'EEE, aux vols à destination de la Suisse et du Royaume-Uni et aux vols à destination d'États qui ne sont pas énumérés dans l'acte d'exécution adopté en vertu de l'article 25 bis, paragraphe 3. »

II. Un article transposant en droit national les obligations applicables au titre du mécanisme Corsia

L'article 17 du projet de loi transpose en droit national les obligations applicables au titre du mécanisme Corsia, en articulation avec le SEQE-UE, tel que prévu dans la directive SEQE-UE révisée.

Pour ce faire, le projet de loi complète le chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement - consacré à « l'effet de serre » - par une section 10 « obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l'aviation internationale ("Corsia") ».

Au sein de cette section 10, un article L. 229-70 détermine le champ d'application du mécanisme.

Son I précise ainsi que les dispositions de la section 10 s'appliquent aux exploitants d'aéronefs titulaires d'un certificat de transporteur aérien délivré par la France ou immatriculés en France pour les vols effectués entre un aérodrome situé dans un pays appliquant Corsia, mentionné dans l'acte d'exécution adopté en application de l'article 25 bis de la directive SEQE-UE216(*), et un aérodrome situé sur le territoire d'un État appartenant à l'EEE, de la Suisse, du Royaume-Uni ou d'un autre pays appliquant Corsia et mentionné dans l'acte d'exécution précité.

Le II de l'article L. 229-70 prévoit que les dispositions de la section 10 s'appliquent également aux exploitants d'aéronefs pour les vols reliant un aérodrome situé dans une collectivité territoriale régie par l'article 74 de la Constitution ou un autre territoire mentionné dans l'annexe II du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (soit, un PTOM) et un aérodrome situé sur le territoire :

- d'un autre État appartenant à l'EEE, y compris s'il est situé dans une région ultrapériphérique, ou sur un territoire de cet État mentionné à l'annexe II du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- de la Suisse ;

- du Royaume-Uni ;

- d'un autre pays appliquant Corsia et mentionné dans l'acte d'exécution adopté en application de l'article 25 bis de la directive SEQE-UE.

Le I de l'article L. 229-71 (nouveau) transpose les dispositions relatives au calcul par l'autorité administrative des obligations de compensation au titre du Corsia, inscrites au sixième paragraphe de l'article 12 de la directive SEQE-UE.

Le premier alinéa du I porte sur les modalités du calcul annuel de la compensation. Il dispose ainsi qu'au plus tard le 30 novembre de chaque année, l'autorité administrative compétente évalue, pour chaque exploitant d'aéronef, le nombre d'unités de compensation, telles que définies dans l'acte d'exécution prévu au paragraphe 8 de l'article 11 bis de la directive SEQE-UE, dont il est redevable au titre de l'année civile précédente, conformément à la méthode établie dans l'acte d'exécution mentionné au paragraphe 8 de l'article 12 de cette directive. Elle en informe les exploitants d'aéronefs.

Le deuxième alinéa du I porte sur le calcul des exigences « finales » de compensation à l'issue d'une période de conformité. Il dispose ainsi qu'au plus tard le 30 novembre de chaque année suivant une période de conformité, l'autorité administrative compétente détermine, pour chaque exploitant d'aéronef, le nombre total d'unités de compensation, dont il est redevable pour cette période. Elle en informe les exploitants d'aéronefs.

Un troisième alinéa du I précise qu'une période de conformité est une période de trois ans au terme de laquelle un exploitant d'aéronef soumis au régime Corsia doit compenser ses émissions de gaz à effet de serre. La première période de conformité comprend les années 2021 à 2023. La deuxième période comprend les années 2024 à 2026. Les périodes triennales suivantes se succèdent jusqu'en 2035.

Le II de l'article L. 229-71 transpose l'exigence d'annulation des unités de compensation par les exploitants, inscrite au paragraphe 9 de l'article 12 de la directive SEQE-UE. Il dispose ainsi qu'au plus tard le 31 janvier de la deuxième année suivant une période de conformité, chaque exploitant d'aéronef procède à l'annulation des unités de compensation dont le nombre a été communiqué par l'autorité administrative compétente.

L'article L. 229-72 (nouveau) crée un régime de sanctions administratives en cas de méconnaissance par les exploitants de leurs obligations de compensation. Il est ainsi prévu que lorsque l'exploitant d'aéronef n'a pas justifié du respect de ses obligations de compensation, l'autorité administrative compétente le met en demeure d'y satisfaire dans un délai d'un mois. La mise en demeure mentionne la sanction encourue et invite l'exploitant à présenter ses observations écrites. L'autorité administrative compétente peut prolonger d'un mois le délai de la mise en demeure. À l'issue du délai d'un mois, le cas échéant prolongé d'un mois, l'autorité administrative compétente peut soit notifier à l'exploitant d'aéronef qu'il a rempli son obligation de compensation, soit constater qu'il ne s'est pas conformé à cette obligation. Dans ce dernier cas, elle prononce une amende relative aux émissions non compensées. Elle peut décider de rendre publique la sanction, si celle-ci est définitive. Le montant de l'amende administrative est de 100 euros par tonne de gaz à effet de serre émise pour laquelle l'exploitant d'aéronef n'a pas satisfait à son obligation de compensation. Le paiement de l'amende ne dispense pas l'exploitant de l'obligation de compenser ses émissions. Il doit s'acquitter de cette obligation au plus tard l'année suivante. Le recouvrement de l'amende est effectué au profit du Trésor public comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine.

Enfin, l'article L. 229-73 dispose que les conditions d'application de la section 10, notamment celles relatives aux catégories d'exploitants d'aéronefs et de vols concernés et aux modalités d'annulation des unités de compensation sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'État.

III. Des amendements visant à mieux intégrer les dispositions proposées dans le code de l'environnement, à aligner le régime de sanctions administratives sur celui applicable au SEQE-UE et à corriger une erreur concernant l'application du projet de loi dans les territoires ultra-marins

La majorité des dispositions proposées par le Gouvernement n'appelle pas à d'importants commentaires, compte tenu des faibles marges de manoeuvre laissées aux Parlements nationaux pour appliquer le droit européen.

Sur proposition du rapporteur, la commission a toutefois souhaité apporter quelques ajustements au texte.

L'amendement COM-16 adopté par la commission vise tout d'abord à insérer les nouvelles dispositions relatives aux obligations de compensation au titre du mécanisme Corsia au sein de la section 7 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement, créée par la loi « Climat et résilience »217(*), consacrée aux réductions d'émissions issues de projets de compensation des émissions de gaz à effet de serre. Cette section 7 contient déjà une sous-section relative aux obligations de compensation des émissions de gaz à effet de serre des vols effectués à l'intérieur du territoire national, également issue de la loi « Climat et résilience ».

Un deuxième amendement COM-19 adopté par la commission aligne le régime de sanctions en cas de méconnaissance des obligations de compensation associées au mécanisme Corsia à celui mis en place concernant la restitution de quotas au titre du SEQE-UE (L. 229-10 du code de l'environnement).

À cette fin, cet amendement :

- supprime la faculté pour l'autorité administrative de prolonger d'un mois le délai de la mise en demeure ;

- prévoit la publication du nom du contrevenant ;

- ouvre la possibilité de prononcer une interdiction d'exploitation à l'encontre d'un exploitant d'aéronef qui ne se conforme pas aux exigences de compensation au titre du mécanisme Corsia.

Un amendement COM-17 adopté par la commission corrige une erreur de l'article 17 concernant l'application du projet de loi dans les territoires ultra-marins. Le mécanisme Corsia s'applique aux vols à destination et en provenance des pays et territoire d'outre-mer (PTOM), lesquels ne sont pas, par ailleurs, assujettis au SEQE-UE. À l'inverse, les régions ultrapériphériques (RUP) sont concernées par le SEQE-UE aérien - bien qu'exonérées jusqu'au 31 décembre 2030 - mais pas par Corsia. Or, le projet de loi fait, en l'état, référence à l'article 74 de la Constitution pour préciser le champ d'application géographique de Corsia : dans cette rédaction, le mécanisme s'appliquerait donc à Saint-Martin, qui est pourtant une RUP, mais pas à la Nouvelle-Calédonie, qui est pourtant un PTOM au regard du droit européen. Afin de corriger ces erreurs, l'amendement adopté remplace donc la référence à l'article 74 de la Constitution par celle de PTOM.

Un amendement COM-18 rédactionnel a enfin été adopté.

La commission a adopté l'article 17 ainsi modifié.

CHAPITRE IV
Dispositions en matière de droit de l'énergie
Article 18
Abrogation du dispositif d'interruptibilité
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à abroger le mécanisme d'interruptibilité, prévu à l'article L. 321-19 du code de l'énergie.

Sur la proposition sur rapporteur, la commission a adopté l'article 18 sans modification.

I. La situation actuelle - Une insuffisante prise en compte par le dispositif d'interruptibilité des nouvelles obligations européennes en matière de plan de défense

A. Le dispositif d'interruptibilité constitue l'un des outils à la disposition du gestionnaire du réseau de transport d'électricité pour assurer la sécurité d'approvisionnement électrique

Institué par l'ordonnance dite « Codification », du 9 mai 2011218(*), prise en application de la loi dite de « Simplification », du 12 mai 2009219(*), le mécanisme d'interruptibilité permet de réduire la consommation d'électricité d'un site, en contrepartie d'une compensation financière.

Depuis lors, l'article L. 321-19 du code de l'énergie dispose que le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité - en l'espèce Réseau de transport d'électricité (RTE) -, procède, à son initiative, à l'interruption instantanée de la consommation des consommateurs finals raccordés à ce réseau et à profil d'interruption instantanée.

Les sujétions de service public ainsi imposées font l'objet d'une compensation par RTE au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d'un plafond annuel de 120 € par kilowatt (kW).

Les tarifs d'utilisation du réseau prennent en compte les effets d'une modification des conditions dans lesquelles RTE compense les sujétions imposées aux consommateurs finals.

Le volume de capacités interruptibles à contractualiser par RTE est fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie.

Les conditions d'agrément des consommateurs finals, les modalités techniques générales de l'interruption instantanée et les conditions dans lesquelles RTE compense les consommateurs finals sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

B. Le règlement « ER » a prévu un plan de défense du réseau dans lequel le dispositif d'interruptibilité a vocation à s'inscrire

Le règlement établissant un code de réseau sur l'état d'urgence et la reconstitution du réseau électrique, dit « ER », du 24 novembre 2017220(*), a prévu que le gestionnaire du réseau de transport d'électricité - en France, RTE - élabore et met en oeuvre un plan de défense du réseau (articles 11 et 12) de même qu'un plan de reconstitution (articles 23 et 24).

Ce règlement définit le fournisseur de services de défense comme « une personne morale ayant une obligation juridique ou contractuelle de fournir un service qui contribue à une ou plusieurs mesures du plan de défense du réseau » et le fournisseur de services de constitution comme « une personne morale ayant une obligation juridique ou contractuelle de fournir un service qui contribue à une ou plusieurs mesures du plan de reconstitution » (article 3).

Ainsi que l'a indiqué le Gouvernement dans l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, l'actuel dispositif d'interruptibilité pose un problème de conformité avec le droit de l'Union européenne : « La Commission européenne avait ouvert en 2017 une procédure d'office concernant la compatibilité du dispositif d'interruptibilité avec les règles en matière d'aides d'État. Les négociations et échanges de plusieurs années avec les services de la Commission impliqués (DGCOMP et DGENER) ont abouti à la clôture administrative de cette procédure à la condition que le dispositif ne soit plus prescrit par les ministres mais uniquement par RTE après accord de la CRE et que le cadre législatif (article L. 321-19 du code de l'énergie) et réglementaire soit modifié en conséquence ».

Dans ce contexte, le Gouvernement a précisé dans cette étude d'impact que le dispositif d'interruptibilité a été intégré au plan de défense de RTE : « En avril 2021, les autorités françaises avaient proposé une solution satisfaisante à la Commission : intégrer le dispositif d'interruptibilité en tant que service auxiliaire de défense dans le plan de défense au titre du règlement ER. Ce faisant, l'interruptibilité n'est plus prescrite par l'État français et la compétence sur le dispositif incombe directement à RTE sous la supervision de la CRE. Ainsi, la mesure perd la caractéristique qui aurait pu lui conférer un caractère d'aide d'État. RTE a proposé à la CRE d'inclure le service de défense de participation active de la demande (correspondant au service d'interruptibilité) dans le plan de défense dans le cadre de la mise en oeuvre du règlement ER. La CRE a approuvé cette proposition dans sa délibération du 28 octobre 2021. Depuis 2021, l'appel d'offres interruptibilité est lancé et contractualisé par [...] RTE sur la base de ce nouveau cadre réglementaire ».

II. Le dispositif envisagé - Une abrogation du dispositif d'interruptibilité

L'article 18 a pour objet d'abroger le mécanisme d'interruptibilité, prévu à l'article L. 321-19 du code de l'énergie.

III. La position de la commission - Une abrogation nécessaire au regard du régime des aides d'État ne soulevant pas de difficultés de la part des acteurs économiques et institutionnels

A. L'abrogation proposée résulte de négociations entre le Gouvernement et la Commission européenne visant à clôturer une procédure informelle contre la France

À l'occasion de son audition, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a indiqué au rapporteur que l'abrogation proposée résulte d'un engagement pris par le Gouvernement auprès de la Commission européenne. En effet, le dispositif d'interruptibilité a été suspecté par cette dernière de constituer une aide d'État non notifiée. En définitive, la procédure informelle engagée a été clôturée, à la condition que le dispositif ne relève plus du ministre chargé de l'énergie, mais de RTE et de la CRE, et que les dispositions législatives ou réglementaires soient abrogées.

C'est pourquoi la DGEC a rappelé, dans la contribution transmise par elle, les éléments de contexte suivants : « Suspecté par les services de la Commission européenne de pouvoir être considéré comme une aide d'État non notifiée, ce dispositif a fait l'objet de plusieurs années de négociations qui ont abouti à la clôture administrative d'une procédure informelle ex officio à la condition que le dispositif ne soit plus prescrit par les ministres mais uniquement par RTE après accord de la Commission de régulation de l'énergie et que le cadre législatif (article L. 321-19 du code de l'énergie) et réglementaire soit modifié en conséquence. »

Interrogée plus en détail sur la teneur de l'engagement pris par le Gouvernement auprès de la Commission européenne, la DGEC a précisé qu'il concerne une abrogation, et non une modification, du dispositif : « L'engagement pris auprès de la Commission européenne portait sur une abrogation pure et simple, toute forme de réminiscence serait susceptible d'introduire un doute dans la perception des intentions des autorités françaises ».

Le rapporteur est réservé sur le principe d'une abrogation, qui est toujours moins sécurisée juridiquement qu'une modification.

Au demeurant, il estime que le Gouvernement aurait pu procéder différemment, car le paragraphe 4 de l'article 4 du règlement (UE) 2017/2196 du 24 novembre 2017 prévoit que les modalités et conditions générales régissant le rôle de fournisseur de service de défense puissent être fixées « soit dans le cadre juridique national, soit sur une base contractuelle ».

Pour autant, le rapporteur n'anticipe pas de vide juridique. Tout d'abord, il constate que l'article L. 321-10 du code de l'énergie dispose que RTE assure la gestion des flux d'électricité sur le réseau et la sécurité de ce réseau, tandis que l'article L. 341-3 du même code dispose que la CRE définit les méthodes pour établir les tarifs d'utilisation des réseaux de transport et de distribution d'électricité (Turpe). Dans le même esprit, le paragraphe 2 de l'article 4 du règlement (UE) 2017/2196 du 24 novembre 2017, qui est d'application directe, fixe la compétence de RTE s'agissant de la proposition des modalités et des conditions générales régissant le rôle de fournisseur contractuel de service de défense, de même que celle de la CRE pour son approbation. La mission de RTE en matière de sécurité d'approvisionnement et de proposition du plan de défense, de même que celle de la CRE s'agissant de l'approbation de ce plan ou de la prise en charge de ses conséquences dans le Turpe, disposent donc toujours d'une base légale, nationale comme européenne.

B. L'abrogation envisagée parachève une évolution réglementaire et contractuelle du dispositif d'interruptibilité engagée en 2021

Dans sa délibération n° 2021-335 du 28 octobre 2021221(*), la CRE a approuvé la proposition de plan de défense, faite par RTE, intégrant l'ancien dispositif d'interruptibilité, renommé « service de participation active de la demande ».

Ce dispositif fait désormais l'objet d'un appel d'offres annuel, dont le dernier exercice a été fixé par la délibération n° 2023-328 du 26 octobre 2023 de cette autorité de régulation222(*).

Cette évolution figure dans le contrat de service public du 29 mars 2022 liant RTE à l'État223(*), dont l'objectif n° 27 est d'« étudier et mettre en oeuvre les évolutions nécessaires pour achever la mise en conformité du service de participation active de la demande avec le droit européen ».

Depuis la délibération précitée de la CRE, le service de participation active de la demande s'exerce avec :

- un volume maximal de capacités interruptibles de 1 200 mégawatts (MW), dont 100 MW ouverts aux sites raccordés au réseau de distribution ;

- un nombre maximal d'activations de 10 par an ;

- un seuil minimal de puissance de 10 MW ;

- une disponibilité des participants toute l'année ;

- un plafond de rémunération de 85 000 €/MW.

Ainsi que la CRE l'a précisé au rapporteur, dans la contribution transmise, ces évolutions ont été introduites dans un souci d'applicabilité pratique : « Ces évolutions du dispositif ne sont pas spécifiquement liées au changement de base légale mais répondent d'une part au retour d'expérience lié à la mise en place progressive du dispositif, et d'autre part aux demandes de la Commission européenne permettant que le dispositif subsiste. »

Dans ce contexte, l'arrêté du 22 décembre 2015 pris en application de l'article L. 321-19 du code de l'énergie a été abrogé par un autre arrêté, du 30 mars 2022.

Au total, la DGEC a indiqué au rapporteur, dans la contribution transmise, que l'abrogation aujourd'hui proposée de l'article L. 321-19 du code de l'énergie dénuée d'effet pratique doit intervenir au plus tôt : « L'abrogation de l'article législatif L321-19 du code de l'énergie est sans effet sur la mise en oeuvre pratique de l'interruptibilité, puisque le dispositif a été intégré en tant que service de défense de participation active de la demande au plan de défense depuis 2021. Il est depuis lancé et contractualisé par le gestionnaire de réseau de transport (RTE) sur la base de ce nouveau cadre réglementaire. À noter également que l'arrêté d'application de l'article L. 321-19 du code de l'énergie (arrêté du 22 décembre 2015) avait déjà été abrogé le 1er avril 2022. En conséquence, l'abrogation de l'article L. 321-19 du code de l'énergie n'a qu'une portée formelle et doit intervenir au plus tôt, donc sans délai supplémentaire, pour se conformer aux engagements pris pour mettre le droit national en conformité avec le droit communautaire. »

Le rapporteur prend acte de l'évolution réglementaire et contractuel du dispositif d'interruptibilité engagée en 2021.

Toutefois, il s'étonne que le Gouvernement n'ait pas légiféré plus tôt, ce qui aurait permis de réviser le cadre législatif avant celui réglementaire et contractuel.

Au reste, il relève que de nombreux véhicules juridiques auraient pu être utilisés, tels que la loi « Pouvoir d'achat », du 16 août 2022224(*), qui comportait un volet substantiel sur la souveraineté énergétique.

C. L'abrogation proposée n'emporte pas de conséquences économiques ou financières immédiates

Dans la mesure où le cadre réglementaire et contractuel a déjà évolué, l'abrogation proposée, en tant que telle, n'a pas d'effet pratique, ni sur la sécurité d'approvisionnement, ni sur le Turpe.

C'est pourquoi la DGEC a indiqué au rapporteur, dans la contribution transmise, que « l'approbation par la CRE du mécanisme en tant que service de défense de participation active de la demande a permis d'assurer la continuité de son existence et de ses effets, tant vis-à-vis des acteurs économiques qui le mettent en oeuvre qu'au profit de la sécurité du système électrique », précisant en particulier que « l'abrogation étant purement formelle, elle est sans conséquence financière. »

Dans le même esprit, dans leurs contributions respectives, RTE a indiqué que « le dispositif reste inchangé ; il n'y a donc pas de conséquences financières ou sur la sécurité d'approvisionnement » et la CRE que « l'abrogation de l'article L. 321-19 du code de l'énergie n'a ainsi aucun impact sur le dispositif et n'a aucune conséquence sur la sécurité d'approvisionnement. »

S'il est vrai que l'abrogation en tant que telle de l'article L. 321-9 du code de l'énergie est sans effet, puisque l'arrêté pris en application de cet article a déjà été abrogé le 30 mars 2022, le rapporteur relève que le choix opéré par le Gouvernement de préférer une base réglementaire et contractuelle à une base légale pour le service de participation active est moins protecteur, tant du point de vue de la sécurité d'approvisionnement et du Turpe, que des droits du Parlement.

Aussi le Sénat sera-t-il particulièrement attentif à l'évolution du nouveau dispositif, dans ses travaux de contrôle de l'application des lois.

D. L'abrogation envisagée ne soulève pas de difficulté particulière parmi les acteurs institutionnels et économiques interrogés

Pour la préparation de ses travaux, le rapporteur a interrogé les principaux acteurs institutionnels et économiques concernés.

RTE a indiqué au rapporteur que l'abrogation du dispositif d'interruptibilité est une conséquence du transfert du dispositif de l'État vers le régulateur, qui permet d'éviter que ce dispositif soit considéré comme une aide d'État.

La CRE a estimé que l'abrogation du dispositif d'interruptibilité résulte d'un engagement des autorités françaises, ce qui permet de rattacher ce dispositif à la sécurité du réseau et à la compétence de la CRE et donc de légitimer son utilisation en application du droit européen et non national.

Enfin, France Industrie et l'Union nationale des industries utilisatrices d'énergie (Uniden) ont indiqué que l'abrogation ne soulèvait pas d'observation particulière de leur part ; elles ont précisé que l'intégration du dispositif d'interruptibilité dans le plan de défense ne se traduisait pas par une altération de la fonctionnalité de ce dispositif mais garantissait au contraire sa robustesse juridique, en l'inscrivant dans le cadre européen.

La commission a adopté l'article 18 sans modification.

Article 19
Modification des modalités de calcul des émissions de dioxyde de carbone permettant de qualifier l'hydrogène de renouvelable ou bas-carbone

Cet article vise à modifier les modalités de calcul des émissions de dioxyde de carbone permettant de qualifier l'hydrogène de renouvelable ou bas-carbone.

Afin de consolider le dispositif, le rapporteur a proposé un amendement ( COM-25) pour :

- faire référence aux différentes catégories d'émissions prévues par le droit européen, dans un souci de complétude (fourniture des intrants, transformation, transport, distribution, combustion lors de l'utilisation finale, captage et stockage géologique du carbone) ;

- appliquer la même méthodologie que celle prévue pour l'hydrogène aux carburants liquides et gazeux renouvelables d'origine non biologique destinés au secteur des transports et aux carburants à base de carbone recyclé.

La commission a adopté l'article 19 ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une insuffisante prise en compte par les modalités de calcul des émissions de dioxyde de carbone de l'hydrogène des nouvelles règles européennes en matière de durabilité

A. L'hydrogène peut être qualifié de renouvelable, bas-carbone ou carboné selon son procédé de production, sa source d'énergie et son niveau d'émission

Institué par l'ordonnance dite « Hydrogène », du 17 février 2021225(*), prise en application de la loi dite « Énergie-Climat », du 8 novembre 2019226(*), l'article L. 811-1 du code de l'énergie définit l'hydrogène comme « le gaz composé, de molécules de dihydrogène [...] obtenu après mise en oeuvre d'un procédé industriel ».

De plus, cet article distingue :

l'hydrogène renouvelable, c'est-à-dire celui produit par électrolyse, ou toute autre technologie n'entrant pas en conflit avec d'autres usages permettant leur valorisation directe, à partir de sources d'énergies renouvelables, telles que définies à l'article L 211-2 du code de l'énergie227(*), et dont le procédé de production émet, par kilogramme d'hydrogène produit, une quantité d'équivalents dioxyde de carbone inférieure ou égale à un seuil ;

l'hydrogène bas-carbone, c'est-à-dire celui dont le procédé de production engendre les mêmes émissions sans pouvoir être qualifié de renouvelable, faute d'en remplir les autres critères ;

l'hydrogène carboné, c'est-à-dire qui n'est ni renouvelable, ni bas-carbone.

L'article précise que l'électricité utilisée pour la production d'hydrogène renouvelable ou bas-carbone peut être fournie dans le cadre d'une opération d'autoconsommation individuelle ou collective. Il précise également que l'hydrogène coproduit lors d'un procédé industriel dont la fonction n'est pas d'obtenir cet hydrogène, et autoconsommé au sein du même processus, n'est pas considérée comme bas-carbone.

Un arrêté du ministre chargé de l'énergie doit préciser l'ensemble des conditions, en particulier les seuils et procédés, nécessaires à l'application de l'article.

B. Un bilan carbone conditionne l'accès de l'hydrogène renouvelable ou bas-carbone au dispositif de soutien public prévu pour la production de tel hydrogène par électrolyse de l'eau

À l'initiative de la commission des affaires économiques du Sénat, depuis la loi « Accélération des énergies renouvelables », du 10 mars 2023228(*), l'article L. 812-3 du code de l'énergie applique un bilan carbone complet à la sélection des installations ou des projets admis à bénéficier du dispositif de soutien public prévu pour la production d'hydrogène renouvelable ou bas-carbone par électrolyse de l'eau.

Ce bilan carbone doit inclure au moins l'analyse de l'étape du cycle de vie jugée la plus pertinente au regard de l'objectif de discrimination effective entre les projets parmi les étapes de l'extraction, de la fabrication, du transport, de l'utilisation et de la fin de vie des installations.

Les modalités d'évaluation et de prise en compte de ce bilan carbone, qui varient selon les filières et selon les technologies, peuvent prendre en compte :

pour l'étape de l'extraction, la consommation de minerais et de métaux stratégiques nécessaires aux installations ;

pour l'étape de la fabrication, la consommation de biens et de services en approvisionnements directs ;

pour l'étape du transport, l'impact des installations sur l'adaptation des réseaux de distribution ou de transport d'électricité ou de gaz ou le développement de réseaux propres ;

pour l'étape de l'utilisation, la consommation d'énergie des installations et leur impact sur l'utilisation des sols ;

pour l'étape de la fin de vie, les garanties de démantèlement et de recyclage des installations ainsi que de remise en état des sols.

Ce bilan carbone va trouver rapidement son application, puisque le ministère chargé de la transition énergétique a annoncé, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances initiale (PLFI) pour 2024, « soutenir le développement de la production d'hydrogène décarboné à partir de 2024 »229(*).

C. Les règlements délégués de la directive « EnR II » prévoient de nouveaux critères de durabilité pour l'hydrogène renouvelable et, plus largement, les carburants durables d'origine non biologique

En cours de révision, la directive « EnR II », du 11 décembre 2018230(*), a fixé des objectifs global et sectoriels d'intégration des énergies renouvelables, ainsi que leurs modalités de comptabilisation et d'application.

Elle a prévu que des règlements délégués :

établissent les seuils minimaux appropriés de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) pour les carburants à base de carbone recyclé, sur la base d'une analyse du cycle de vie prenant en considération les particularités de chaque carburant (article 25, paragraphe 2) ;

précisent la méthode visant à déterminer la part de biocarburant et de biogaz pour le transport résultant de la transformation de biomasse et de carburants fossiles au cours d'un seul et même processus, ainsi que la méthode d'évaluation des réductions des émissions de GES réalisées grâce aux carburants liquides et gazeux renouvelables destinés aux transports, d'origine non biologique, et aux carburants à base de carbone recyclé, de sorte que les émissions évitées ne puissent être prises en compte lorsque le piégeage du dioxyde de carbone l'a déjà été en vertu d'autres dispositions légales (article 28, paragraphe 5) ;

établissent une méthodologie de l'Union définissant des modalités pour que les opérateurs économiques se conforment aux exigences de comptabilisation lorsque l'électricité provient d'une connexion directe à une installation produisant de l'électricité et est utilisée pour la production de carburants liquides ou gazeux renouvelables destinés au secteur des transports, d'origine non biologique (article 27, paragraphe 3).

Sur ce fondement, deux règlements délégués, du 10 février 2023231(*), ont été pris : le premier a prévu que « la réduction des émissions de gaz à effet de serre résultant de l'utilisation de carburants à base de carbone recyclé est au minimum de 70 % » (article 2) ; il a précisé le calcul des « réductions des émissions de gaz à effet de serre réalisées grâce aux carburants liquides et gazeux renouvelables destinés au secteur des transports, d'origine non biologique, et aux carburants à base de carbone recyclé » (article 3), les émissions totales dues à leur utilisation couvrant la fourniture des intrants, la transformation, le transport, la distribution, la combustion lors de l'utilisation finale ainsi que le captage et le stockage géologique du carbone (annexe).

D. Le Sénat s'est déjà prononcé sur les enjeux posés par les critères de durabilité de l'hydrogène renouvelable et bas-carbone

À titre d'exemple, dans son rapport sur le volet « Énergie » du paquet Ajustement 55 »232(*), la commission des affaires économiques a préconisé, s'agissant des directives et règlements concernant l'hydrogène, d'appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone, tout à la fois dans l'incorporation des énergies renouvelables et l'appréciation des carburants durables.

Ces travaux ont donné lieu à l'adoption d'une proposition de résolution européenne (PPRE) sur le sujet233(*), commune aux commissions sénatoriales en charge des affaires économiques, de l'aménagement du territoire et du développement durable et des affaires européennes.

II. Le dispositif envisagé - Une extension de l'appréciation des critères d'émission de l'hydrogène à son utilisation, aux côtés de sa production

L'article 19 vise à compléter l'article L. 811-1 du code de l'énergie, pour préciser que le seuil d'émissions en-dessous duquel l'hydrogène peut être qualifié de renouvelable ou de bas-carbone prend en compte les étapes entre la production et l'utilisation de l'hydrogène, en sus de la production en tant que telle.

III. La position de la commission - Un dispositif nécessaire au lancement du dispositif de soutien public à l'hydrogène devant cependant être précisé dans le sens d'une plus grande conformité avec le droit de l'Union européenne

A. Le dispositif proposé intervient en amont de la mise en oeuvre du dispositif de soutien public à l'hydrogène

Le rapporteur relève que l'évolution proposée intervient de manière anticipée. En effet, si les règles de calcul des émissions pour l'hydrogène renouvelable, fixées par le règlement délégué (UE) 2023/1185 du 10 février 2023, sont connues, celles de l'hydrogène bas-carbone, prévues par le paquet gaz en cours de négociation, sont encore attendues. C'est la raison pour laquelle le rapporteur considère que le dispositif proposé devra peut-être être ajusté ultérieurement.

Interrogée sur ce point, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), dans la contribution transmise au rapporteur, a apporté les éléments suivants : « Les règles précises pour comptabiliser les émissions associées à la production, au transport et à la distribution de l'hydrogène bas-carbone seront précisées dans un acte délégué qui paraîtra une fois les négociations de la directive gaz terminées. L'orientation qui se dégage du trilogue dont la fin est prévue fin novembre 2023 ne laisse néanmoins aucun doute sur l'alignement de la définition des seuils entre l'hydrogène renouvelable et bas-carbone. Autrement dit, il est impossible d'affirmer à date que la méthode de calcul des émissions de GES sera la même entre hydrogène renouvelable et bas-carbone, cependant le seuil de réduction de GES et le fait que celui-ci devra être respecté à l'utilisation, comme pour l'hydrogène renouvelable, n'est plus sujet à discussion. Cette définition s'appliquera à tout l'hydrogène qualifié de bas-carbone quel que soit son mode de production. »

Pour autant, le rapporteur constate que l'évolution proposée doit nécessairement être réalisée avant l'application du dispositif de soutien public à la production industrielle d'hydrogène décarboné par électrolyse, attendu dès 2024.

C'est la raison pour laquelle la DGEC a indiqué, dans la même contribution, que « cette modification est particulièrement urgente et attendue pour donner de la visibilité à la filière en amont du lancement du mécanisme de soutien à la production d'hydrogène décarboné, dont les premières phases devraient avoir lieu fin 2023. »

B. Le dispositif envisagé est peu susceptible de bouleverser les installations actuelles ou les projets de production d'hydrogène

Le rapporteur rappelle que l'hydrogène constitue une filière en cours d'amorçage. Aussi l'évolution proposée n'est-elle pas susceptible de bouleverser des activités économiques instituées. La disposition est également neutre technologiquement s'agissant des sources de l'hydrogène décarboné, qu'il s'agisse de l'énergie nucléaire ou de celle renouvelable. Aucune prescription spécifique n'est prévue en matière de production, de transport ou d'utilisation.

Sollicitée sur ce point, la DGEC lui a indiqué, dans la contribution transmise, les précisions ci-après : « La disposition prévue est sans impact économique sur les différents modes de production et d'utilisation d'hydrogène. En effet, la disposition indique que l'hydrogène produit, pour conserver la qualification de renouvelable ou bas-carbone doit également respecter le seuil d'émissions jusqu'à son utilisation ce qui est déjà prévu en droit européen et pris en compte par l'ensemble des projets de production et consommation d'hydrogène décarboné. La disposition est neutre technologiquement et n'induit pas de différence entre les modes de production ou de transport, pour le respect du seuil, seules les émissions de gaz à effet de serre sont prises en compte. »

C. Le dispositif proposé appelle à être complété dans sa rédaction

Le rapporteur relève que le dispositif proposé se contente d'évoquer, s'agissant de la prise en compte de l'utilisation, les « émissions associées aux étapes entre sa production et son utilisation. »

Or, le règlement délégué (UE) 2023/1185 du 10 février 2023 (annexe) renvoie plus précisément aux étapes liées à la fourniture des intrants, à la transformation, au transport, à la distribution, à la combustion lors de l'utilisation finale ainsi qu'au captage et au stockage géologique du carbone.

Dans ce contexte, le rapporteur estime nécessaire de compléter la disposition proposée pour coller au règlement précité.

Au reste, cela correspond à l'intention du Gouvernement, puisque la DGEC a indiqué, dans la contribution transmise, que « ces étapes recouvrent toutes celles prévues dans le règlement 2023/1185, notamment transport, distribution, conditionnement et éventuels captages et stockages de gaz à effet de serre en aval de la production et qui pourraient être décomptés. »

D. Le dispositif suggéré n'épuise pas la nécessaire évolution des autres dispositions législatives

Le rapporteur observe que le dispositif proposé se limite à appliquer à l'hydrogène renouvelable et bas-carbone les nouvelles modalités de calcul des émissions.

Or, le règlement délégué (UE) 2023/1185 du 10 février 2023 (article premier) s'applique plus largement « aux carburants liquides et gazeux renouvelables destinés au secteur des transports, d'origine non biologique, et aux carburants à base de carbone recyclé ».

Les articles L. 282-1 à L. 282-3 du code de l'énergie, qui fixent les critères de durabilité de ces carburants, sont muets sur les modalités de calcul de leurs émissions. Aussi est-il nécessaire de leur apporter un complément, car la production d'hydrogène renouvelable et bas-carbone comme ses dérivés doit être soumise aux mêmes règles.

Pour ce faire, il est nécessaire de préciser, à l'article L. 282-2 du code de l'énergie, que les réductions d'émissions de GES réalisées grâce aux carburants liquides et gazeux renouvelables destinés au secteur des transports, d'origine non biologique, et aux carburants à base de carbone recyclé tiennent elles aussi compte des étapes précitées (fourniture des intrants, transformation, transport, distribution, combustion lors de l'utilisation finale, captage et au stockage géologique du carbone).

Le rapporteur s'est penché sur les autres évolutions législatives rendues éventuellement nécessaires par le droit de l'Union européenne.

D'une part, les critères de durabilité, prévus aux articles L. 281-2, L. 281-5 et L. 281-6 pour les biocarburants, bioliquides et combustibles ou carburants issus de la biomasse, nécessiteront d'évoluer en fonction du contenu de la directive « EnR III ». Ces règles n'étant pas encore stabilisées, le rapporteur n'a pas jugé pertinent de les modifier, au stade de l'examen du présent texte.

Interrogée sur ce point, la DGEC lui a indiqué, dans la contribution transmise, que « l'ensemble de la transposition de la directive RED III sera faite ultérieurement ».

D'autre part, le bilan carbone, appliqué aux appels d'offres en matière d'hydrogène renouvelable et bas-carbone et d'électricité et de gaz renouvelables, par les articles L. 812-3, L. 314-1A et L. 446-1 du code l'énergie, ne nécessite pas d'évoluer, puisqu'il ne s'agit pas d'un critère de durabilité européen obligatoire, mais d'une modalité de sélection des appels d'offres nationale, aux conditions de mise en oeuvre par ailleurs optionnelles.

Ce point a été confirmé par la DGEC, qui a précisé, dans la contribution transmise par elle, qu'une évolution « est inutile puisqu'il ne s'agit pas d'un critère de durabilité mais bien d'une manière de départager des offres dans le cadre d'un appel d'offres national pour soutenir la production d'hydrogène renouvelable et bas-carbone ».

E. Le dispositif proposé ne soulève pas de difficulté particulière parmi les acteurs économiques et institutionnels interrogés

Pour la conduite de ses travaux, le rapporteur a interrogé les principaux acteurs économiques concernés.

France Hydrogène (FH) lui a ainsi indiqué qu'il est, non seulement nécessaire, mais aussi logique, de tenir compte de l'empreinte carbone de l'hydrogène en aval de sa production. Cette évolution n'induit aucune différence entre l'hydrogène produit par électrolyse à partir d'énergie nucléaire ou renouvelable. En revanche, elle favorise, à court terme, une production d'hydrogène par des électrolyseurs connectés au réseau électrique sur ou proches des sites industriels de consommation et, à long terme, une production d'hydrogène connectée aux infrastructures de distribution ou de transport d'hydrogène, permettant un transport longue distance avec une empreinte carbone minime.

De son côté, l'Union française de l'électricité (UFE) a affirmé être favorable à l'évolution proposée, précisant que son effet est marginal sur les installations en service et les projets en cours. Le groupe EDF a indiqué ne pas avoir d'observation particulière sur cet article, tout en précisant qu'il conviendra de surveiller ses effets.

Ainsi, l'UFE et EDF ont toutes deux rappelé que l'empreinte carbone de l'hydrogène renouvelable et bas-carbone doit être inférieure à 3,38 kgCO2eq/kgH2234(*).

Or, l'empreinte carbone de la production d'hydrogène bas-carbone à partir du réseau électrique est de 2,77 kgCO2eq/kgH2, ce qui permet de qualifier de bas-carbone l'hydrogène produit par électrolyse à partir de l'énergie nucléaire.

S'agissant des étapes qui pourraient être ajoutées, elles représentent :

- 0,1 kgCO2eq/kgH2 pour la compression de l'hydrogène en sortie de production à 200 bars ;

- 1,12 kgCO2eq/kgH2/100 km pour le transport de l'hydrogène par camions à 200 bars ;

- 0,1 kgCO2eq/kgH2 pour la distribution de l'hydrogène en station.

Le rapporteur constate que la prise en compte des émissions liées à ces nouvelles étapes n'apparaît pas de nature à remettre en cause la qualification de bas-carbone de l'hydrogène produit par électrolyse à partir de l'énergie nucléaire.

Pour autant, l'UFE et EDF ont fait valoir, dans leurs contributions respectives, que la prise en compte des émissions liées au transport de l'hydrogène pourrait être impactante pour certaines stations d'hydrogène : « Dans ces conditions, ceci signifie que l'acheminement d'hydrogène par camions devra se limiter à un rayon logistique assez restreint pour que l'hydrogène conserve l'appellation de renouvelable ou bas-carbone (probablement autour de ~ 40-50 km à 200 bars). Ceci peut avoir un impact pour des stations d'hydrogène qui dépendent d'approvisionnements extérieurs. »

Quant à France gaz, il a estimé que l'article n'appelait pas d'observations particulières.

En définitive, dans le souci d'une meilleure cohérence avec le cadre européen, le rapporteur a proposé un amendement (COM-25) visant à :

- faire référence aux différentes catégories d'émissions prévues par le droit européen, dans un souci de complétude (fourniture des intrants, transformation, transport, distribution, combustion lors de l'utilisation finale, captage et stockage géologique du carbone) ;

- appliquer la même méthodologie que celle prévue pour l'hydrogène aux carburants liquides et gazeux renouvelables d'origine non biologique destinés au secteur des transports et aux carburants à base de carbone recyclé.

La commission a adopté l'article 19 ainsi modifié.

CHAPITRE V
Dispositions relatives aux contrats de concessions aéroportuaires
Article 20
Suppression du principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d'un nouveau contrat de concession

Cet article vise à supprimer le principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d'un nouveau contrat de concession.

La commission partage l'objectif du Gouvernement, qui est d'assurer que l'appel d'offres relatif à la concession des aéroports de Nantes Atlantique et de Saint-Nazaire - Montoir ne soit pas de nouveau infructueux.

La commission a adopté un amendement, visant à étendre la suppression du principe de modération tarifaire à l'ensemble des aéroports entrant dans le champ de l'homologation tarifaire, dans le cas où l'équilibre économique de l'exploitation est substantiellement modifié.

La commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

I. Le principe de modération tarifaire des redevances aéroportuaires est inadapté au renouvellement des contrats de concessions

A. Le droit européen prévoit une procédure d'homologation des tarifs par une autorité de supervision indépendante

Les exploitants d'aéroports perçoivent des redevances aéroportuaires pour services rendus : elles sont la contrepartie des services publics aéroportuaires offerts aux usagers, principalement les compagnies aériennes (usage de terrains, d'infrastructures, d'installations et d'équipements aéroportuaires directement nécessaires à l'exploitation des aéronefs).

Les principales redevances sont les redevances d'atterrissage, de stationnement et par passager. Elles sont régies par la directive 2009/12/CE relative aux redevances aéroportuaires235(*) qui fixe des règles générales : les redevances sont non discriminatoires, les usagers sont consultés avant la mise en oeuvre des tarifs et une autorité de supervision indépendante veille à la bonne application de ces principes.

La France a désigné, par l'ordonnance n° 2019-761 du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires, l'Autorité de régulation des transports (ART) comme autorité de supervision indépendante.

Cette autorité homologue les tarifs de redevance proposés par le concessionnaire pour les aéroports dont le trafic annuel a dépassé cinq millions de passagers lors de l'une des cinq années civiles précédentes236(*).

B. La France a décidé d'appliquer, dans le cadre de cette homologation le principe de modération tarifaire dont l'application est inadaptée au renouvellement des contrats de concessions

La même ordonnance n° 2019-761 du 24 juillet 2019 a introduit le principe de modération tarifaire à l'article L. 6327-2 du code des transports : l'ART s'assure que l'évolution proposée des tarifs des redevances est modérée par rapport à l'évolution des tarifs en vigueur.

La modération tarifaire n'étant pas définie par les textes, elle s'apprécie au cas par cas en tenant compte des circonstances particulières de chaque aéroport. L'ART prend ainsi en compte les projets prévus sur la plateforme, l'évolution du niveau de service rendu aux usagers, le système de caisse défini par arrêté et l'avis des usagers.

Ce principe a pour « seul objet de protéger les usagers d'une hausse excessive [des] tarifs »237(*), son application est donc asymétrique : une baisse des tarifs des redevances, même brutale, ne peut en effet pas être contraire au principe de modération tarifaire.

La décision de l'ART d'homologuer ou non un tarif de redevance peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'État. Les décisions du Conseil d'État rendues en matière de redevances aéroportuaires autorisent des niveaux de hausse compris entre 0 et 5 %, sans que ces décisions permettent de déterminer avec certitude quel niveau de hausse pourrait être considéré comme modéré.

Prenant acte de cette jurisprudence, l'ART a refusé d'homologuer toute hausse supérieure à 5 %, même en cas de circonstances exceptionnelles, comme la crise économique consécutive à l'épidémie de covid-19238(*) ou le contexte de forte inflation depuis 2022239(*).

Analyse des décisions de l'ART
relatives à l'homologation des tarifs de redevance

Sens de la décision

Nombre de décisions

Évolution proposée des redevances par rapport à l'année précédente

Décisions d'homologation

20

- 6,4 % à + 4 %

Décisions de refus

8

+ 4,9 % à + 49 %

Source : Direction générale de l'aviation civile (DGAC)

Comme le souligne le Conseil d'État240(*), l'application du principe de modération tarifaire pose également des difficultés dans le cas du renouvellement d'un contrat de concession : le nouveau concessionnaire choisi au terme de l'appel d'offres aura négocié un nouveau contrat, avec un équilibre économique et financier différent, comportant notamment des engagements en matière d'investissement.

Il est donc incohérent de lier le tarif de redevance de ce nouveau contrat avec celui de l'ancien contrat. Cette règle de modération peut décourager d'éventuels candidats à l'attribution de contrats de concession, qui craindraient de ne pas pouvoir assurer l'équilibre de la concession.

Le cas de la concession des aéroports de Nantes-Atlantique
et de Saint-Nazaire -- Montoir

À la suite de l'abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes en 2018, un projet de modernisation de l'aéroport de Nantes-Atlantique a été lancé. Un appel d'offres a donc été lancé en octobre 2019 afin de renouveler la concession de cet aéroport.

Cependant, un seul candidat s'est manifesté. L'appel d'offres a alors tardé à être conclu. Le 29 septembre 2023, l'État a annulé la procédure d'appel d'offres du fait d'une concurrence insuffisante. La conséquence immédiate est un retard de la modernisation de l'aéroport d'au moins deux ans.

Le principe de modération tarifaire a contribué à rendre cet appel d'offres infructueux : le nouveau contrat de concession prévoit des travaux conséquents, qui nécessiteraient une hausse des tarifs de redevance supérieure à ce que permet le principe de modération.

II. L'assouplissement du principe de modération vise à faciliter les renouvellements de concession

L'article 20 prévoit que lorsqu'un aéroport est exploité dans le cadre d'un contrat de concession, la condition relative à la modération tarifaire n'est pas applicable aux premiers tarifs des redevances homologués par l'ART après l'entrée en vigueur du contrat.

Avant 2030, seule la concession des aéroports de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire - Montoir serait concernée par la disposition, alors que le lancement d'un nouvel appel d'offres est prévu d'ici la fin de l'année 2023.

III. La commission partage l'objectif du Gouvernement, tout en déplorant le lien ténu entre l'article 20 et le droit de l'Union européenne

La commission déplore le lien ténu entre cet article et l'objet général du texte. En effet, l'article 20 n'applique pas le droit de l'UE, il modifie une disposition de droit interne dont le lien avec le droit européen est indirect. Pour assurer la clarté des débats parlementaires, il aurait été préférable d'inscrire cet article dans un projet de loi dédié spécifiquement aux transports.

La commission partage cependant l'objectif du Gouvernement, qui est d'assurer que l'appel d'offres relatif à la concession des aéroports de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire - Montoir ne soit pas de nouveau infructueux.

La commission a étendu la suppression du principe de modération tarifaire à l'ensemble des aéroports entrant dans le champ de l'homologation tarifaire, dans le cas où l'équilibre économique de l'exploitation est substantiellement modifié, en adoptant l'amendement  COM-64 du sénateur Vincent Capo-Canellas.

La commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

TITRE III
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE RÉPRESSIVE
CHAPITRE Ier
Diverses dispositions relatives à l'échange d'informations
en matière répressive
CHAPITRE II
Dispositions applicables aux demandes d'informations émises
par les services français
CHAPITRE III
Dispositions applicables aux demandes d'informations
reçues par les services français
Articles 21 à 26
Transposition de la directive 2023/977 du Parlement européen
et du Conseil du 10 mai 2023 relative à l'échange d'informations
entre les services répressifs des États membres
Articles examinés dans le cadre de la législation en commission

Les articles 21 à 26 visent à transposer une directive qui, elle-même, tend à fluidifier les échanges d'informations entre les services répressifs des États membres et à garantir la bonne transmission à Europol des informations ainsi échangées qui entreraient dans son domaine de compétences.

La commission a adopté neuf amendements de son rapporteur pour préciser certaines notions dont la portée opérationnelle n'apparaissait pas avec clarté et pour intégrer au texte des éléments de la directive 2023/977 que le Gouvernement avait omis d'intégrer au droit interne.

I. Les apports de la directive 2023/977 du 10 mai 2023 relative à l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres

Depuis le tout début des années 1990241(*), l'approfondissement du pilier « Justice et affaires intérieures » (ou « JAI ») de l'Union européenne s'appuie par priorité sur des échanges d'informations entre États membres et, en certaines matières limitativement définies, sur la coordination opérée par Europol. Ces échanges d'informations sont en effet le levier privilégié pour atteindre un équilibre entre, d'une part, la particularité du pilier « JAI » (qui porte sur des compétences largement restées aux mains des États, ces derniers conservant des prérogatives fortes en matière de droit pénal et de sécurité publique) et, de l'autre, la nécessité de lutter contre des phénomènes criminels transfrontaliers de plus en plus fréquents et préoccupants242(*) - et donc d'assurer un certain niveau de coopération entre les services répressifs nationaux.

Renforcée dans les années 2000 avec l'entrée en vigueur d'une décision-cadre dite « suédoise »243(*) de 2006 qui est notamment venue poser le principe de disponibilité des informations (et qui est codifiée, pour la France, aux articles 695-9-31 à 695-9-49 et aux articles R.49-35 à R.49-39 du code de procédure pénale), la réglementation européenne actuelle n'a toutefois pas pleinement atteint ses objectifs. Les évaluations conduites par les organes de l'Union ont ainsi montré que la décision-cadre précitée « n'[était] pas suffisamment claire et ne garanti[ssai]t pas l'échange adéquat et rapide d'informations pertinentes entre les États membres », qu'elle était « en fait peu utilisée, en partie en raison du manque de clarté constaté en pratique entre le champ d'application de la convention d'application de l'accord de Schengen et celui de la décision-cadre [elle-même] »244(*). Faute d'harmonisation des normes entre les États, et malgré l'émission par le Conseil d'orientations non contraignantes visant à préciser (sans succès) les conditions de mise en oeuvre de la décision-cadre de 2006, le cadre issu de cette réglementation était ainsi unanimement considéré comme insuffisant.

C'est pour résoudre ces lacunes que le législateur européen a finalement, avec la contribution de la présidence française de l'Union en 2022245(*), fait le choix de rénover le cadre juridique applicable aux échanges d'informations en matière répressive en adoptant la directive 2023/977 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relative à l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres. Elle pose à cette fin cinq principes : la disponibilité des informations ; l'accès équivalent, permettant aux autres États membres d'accéder aux informations pertinentes dans les mêmes conditions que celles qui s'appliquent aux services répressifs de l'État détenteur ; la confidentialité, les informations transmises devant bénéficier, de la part de l'État récepteur, d'un niveau de protection similaire à celui qui est garanti par le droit interne de l'État membre émetteur ; la propriété des données, qui interdit à un État s'étant vu transmettre des informations de les communiquer à un tiers sans accord de l'État ayant initialement transmis les données en cause ; enfin, la fiabilité, qui impose de rectifier ou d'effacer les données qui ne seraient plus à jour et d'informer l'État récepteur de cette rectification ou de cet effacement.

La transmission des données entre services répressifs s'effectuera sur demande d'un État membre ou d'initiative. Les demandes devront obligatoirement comporter certaines indications, énumérées par la directive et qui portent notamment sur la finalité pour laquelle les informations sont demandées, les raisons objectives qui donnent à penser que l'État membre sollicité détient lesdites informations et une explication du lien entre la finalité et la personne à laquelle les informations se rapportent.

Les entités en charge de la transmission (voir ci-après) devront, au cas par cas, transmettre à Europol les demandes qui toucheraient à son périmètre de compétences.

Les compétences d'Europol (règlement (UE) 2016/794 du Parlement européen
et du Conseil du 11 mai 2016 relatif à l'Agence de l'Union européenne
pour la coopération des services répressifs)

Conformément à l'article 3 du règlement 2016/794, Europol est chargé d'« appu[yer] et renforce[r] l'action des autorités compétentes des États membres et leur collaboration mutuelle dans la prévention de la criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres, du terrorisme et des formes de criminalité qui portent atteinte à un intérêt commun qui fait l'objet d'une politique de l'Union », et qui sont les suivantes :

-- terrorisme ;

-- criminalité organisée ;

-- trafic de stupéfiants ;

-- activités de blanchiment d'argent ;

-- criminalité liée aux matières nucléaires et radioactives ;

-- filière d'immigration ;

-- traite des êtres humains ;

-- criminalité liée au trafic de véhicules volés ;

-- meurtre et coups et blessures graves ;

-- trafic d'organes et de tissus humains ;

-- enlèvement, séquestration et prise d'otage ;

-- racisme et xénophobie ;

-- vol qualifié et vol aggravé ;

-- trafic de biens culturels, y compris les antiquités et les oeuvres d'art ;

-- escroquerie et fraude ;

-- infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union ;

-- délits d'initiés et manipulation des marchés financiers ;

-- racket et extorsion de fonds ;

-- contrefaçon et piratage de produits ;

-- falsification de documents administratifs et trafic de faux ;

-- faux-monnayage et falsification de moyens de paiement ;

-- criminalité informatique ;

-- corruption ;

-- trafic d'armes, de munitions et d'explosifs ;

-- trafic d'espèces animales menacées ;

-- trafic d'espèces et d'essences végétales menacées ;

-- criminalité au détriment de l'environnement, y compris la pollution causée par les navires ;

-- trafic de substances hormonales et d'autres facteurs de croissance ;

-- abus sexuels et exploitation sexuelle, y compris matériel pédopornographique et sollicitation d'enfants à des fins sexuelles ;

-- génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

La directive repose en pratique sur la mise en oeuvre de procédures plus claires et, surtout, sur l'installation dans chaque État d'un nouveau « point de contact unique » qui en sera le garant. Il sera chargé de recevoir et de transmettre toutes les demandes d'informations envoyées par ou aux services répressifs des autres États membres. Il apparaît que cette règle ne constitue pas une innovation pour la France, mais une officialisation de la pratique : en effet, d'après les éléments recueillis par le rapporteur au cours des auditions (et notamment auprès des directions générales de la police et de la gendarmerie nationales), le rôle de « point de contact unique » est actuellement exercé par la section centrale de coopération opérationnelle de police de la division des relations internationales de la DGPN.

Aux termes de la directive, et en tant que de besoin, des « services spécialement désignés » pourront également être autorisés à traiter eux-mêmes les demandes d'informations : dans cette hypothèse, ils devront toutefois informer le point de contact unique de leur État des demandes reçues et envoyées, sauf lorsque cette information serait de nature à compromettre « une enquête en cours hautement sensible pour laquelle le traitement de l'information requiert un niveau de confidentialité approprié ; [...] les affaires de terrorisme n'impliquant pas la gestion de situations d'urgence ou de crise ; [...] la sécurité d'une personne »246(*).

Toujours d'après les éléments recueillis au cours des auditions du rapporteur, il n'apparaît pas que la France envisage à date d'identifier de tels services spécialement désignés qui pourraient directement transmettre ou recevoir des demandes d'informations.

Sur le fond, et s'agissant des suites données aux demandes d'informations faites par des États tiers, la directive clarifie les conditions dans lesquelles un État pourra refuser de transmettre des informations (étant rappelé que, en amont de toute transmission, l'État demandeur devra veiller à ce que les informations demandées soient « nécessaires et proportionnées » à l'objectif de prévention ou de détection d'une infraction pénale transfrontalière). L'article 6 de la directive prévoit à cette fin qu'un refus pourra être opposé (outre les cas d'impossibilité juridique ou matérielle où l'État sollicité ne dispose pas des informations demandées ou dispose d'informations qu'il sait être inexactes, où la demande est incomplète ou porte sur des données qui ne sont pas susceptibles d'être communiquées, etc.) dès lors que :

- la communication des informations demandées porterait atteinte aux intérêts essentiels de la sécurité nationale de l'État membre qui a reçu la demande, compromettrait le bon déroulement d'une enquête en cours en matière pénale ou la sécurité d'une personne physique, ou porterait indûment atteinte aux intérêts importants protégés d'une personne morale ;

- la demande concerne une infraction punissable d'une peine d'emprisonnement inférieure à un an en droit national, voire un fait qui ne constitue pas une infraction pénale ;

- l'État ayant reçu la demande estime que celle-ci peut constituer une violation manifeste des droits fondamentaux.

Enfin, la directive (article 5) prévoit que, lorsqu'il peut être donné suite aux demandes d'information, celles-ci doivent être traitées, à compter de la réception de la demande, dans un délai de huit heures (pour des informations directement accessibles) à trois jours civils (dans le cas contraire) pour les demandes urgentes247(*), et de sept jours civils pour les autres demandes.

Il sera possible de déroger à ces délais lorsque, en droit national, la transmission suppose une autorisation judiciaire préalable.

II. Le dispositif de transposition envisagé

La transposition de la directive 2023/977, telle qu'elle est proposée par le projet de loi, viendrait modifier le code de procédure pénale pour fixer les modalités de désignation et les principales missions du point de contact unique chargé de l'application de la directive pour la France. Désigné par arrêté conjoint des ministres de la justice, de l'intérieur et du budget, il traitera les demandes de transmission d'informations émises par des États tiers (article 22). Le projet de loi fixe, de même, les modalités de désignation de services spécialement habilités ayant la capacité de transmettre directement des demandes d'information au point de contact unique d'un État tiers : ils seront eux aussi désignés par arrêté conjoint des ministres de la justice, de l'intérieur et du budget (article 22).

Outre un changement de références tenant compte de l'entrée en vigueur de la nouvelle directive (article 21), le projet de loi vient par ailleurs :

- prévoir les conditions dans lesquelles les autorités répressives nationales peuvent solliciter des informations auprès de services d'autres États membres et définit les procédures associées (article 23) ;

- définir les cas dans lesquels les services spécialement désignés pourront s'abstenir d'informer le point de contact unique d'une demande formée auprès d'un État tiers, en reprenant mot pour mot les dispositions de la directive (ce qui pose question vu le caractère relativement imprécis de certaines notions, qui n'ont pas d'équivalent en droit national) ;

- prévoir la transmission de la demande à Europol dès lors que l'infraction en lien avec laquelle les informations sont demandées concerne son périmètre de compétences (article 23) ;

- définir les modalités de transmission d'informations par la France, sur demande ou d'initiative, selon une procédure « miroir » à celle qui s'appliquera pour la transmission de demandes (articles 24 et 25) ;

- fixer les conditions dans lesquelles le point de contact unique peut refuser de communiquer les informations demandées par un État membre (article 26) : là encore, le projet de loi reprend mot pour mot les termes de la directive quant aux cas dans lesquels un tel refus sera possible. Toutefois, de manière surprenante, il ajoute une hypothèse de refus et prévoit que la demande de transmission d'informations pourra être écartée si aucun magistrat n'a donné son accord alors même que cet accord serait requis en droit interne ; or, comme on l'a relevé, ce cas d'espèce permet une prorogation des délais maximum de transmission mais n'est pas une cause de refus aux termes de la directive.

III. La position de la commission spéciale

La commission a constaté que, paradoxalement, la transposition proposée était à la fois littérale, incomplète et erronée.

Littérale, car elle importe dans le droit interne des notions qui, comme on l'a vu, figurent mot pour mot dans la directive 2023/977 mais qui ne réfèrent pas à des concepts existants du droit français, créant le risque d'une réelle incertitude juridique. Sur ce sujet, il ressort des auditions menées par le rapporteur que le Gouvernement a prévu de recourir à un décret pour préciser la portée de ces concepts nouveaux, par référence à des dispositions législatives en vigueur au sein du code de procédure pénale : ce procédé ubuesque ne saurait prospérer.

Incomplète, car elle omet de transposer certains éléments qui sont, pourtant, de niveau législatif : tel est notamment le cas de la définition du régime de l'urgence et de la fixation des délais maximum de réponse aux demandes d'informations reçues d'États membres tiers.

Erronée enfin, dans la mesure où elle ajoute une possibilité de refus qui ne découle pas du droit européen (à savoir l'absence d'autorisation du magistrat compétent, qui peut fonder une prorogation des délais mais non un refus) et qui n'apparaît fondée sur aucune justification objective.

Pour répondre à ces difficultés, la commission a adopté neuf amendements de son rapporteur permettant de donner un sens clair au dispositif proposé et de respecter pleinement le texte de la directive, à la fois en comblant les lacunes du projet de loi et en rectifiant les transpositions incorrectes.

La commission a adopté les articles 21 à 26 ainsi modifiés.

CHAPITRE IV
Échange d'informations numériques dans les affaires de terrorisme
Article 27
Adaptation du code de procédure pénale au règlement (UE) 2023/2131
du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023
relatif aux échanges d'informations numériques
dans les affaires de terrorisme
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

L'article 27 apporte au code de procédure pénale des adaptations limitées afin de tenir compte de l'entrée en vigueur d'un nouveau règlement visant à fluidifier les échanges d'informations en matière de terrorisme.

La commission a adopté un amendement de son rapporteur faisant du parquet national antiterroriste l'autorité compétente auprès d'Eurojust.

La commission a adopté l'article 27 ainsi modifié.

I. Le contenu du règlement 2023/2131

Institué par une décision 2005/671/JAI du Conseil du 20 septembre 2005, l'échange d'informations en matière terroriste entre États membres et entre ces derniers et Eurojust repose à ce jour sur des dispositifs européens qui, faiblement incitatifs, se sont avérés insatisfaisants dans la mesure où ils ne permettaient pas la transmission d'informations à jour.

Dans le même esprit que pour la directive 2023/977 en matière pénale (voir précédemment le commentaire des articles 21 à 26), le législateur européen a souhaité refondre le cadre applicable pour vivifier les échanges d'informations en matière de terrorisme ; il a adopté, à cette fin, le règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 modifiant le règlement (UE) 2018/1727 du Parlement européen et du Conseil et la décision 2005/671/JAI du Conseil pour :

poser plus clairement le caractère obligatoire de transmission des informations d'intérêt communautaire en matière de terrorisme, en imposant à chaque autorité nationale compétente en la matière (et notamment, pour la France, le parquet national antiterroriste - PNAT) de transmettre sans délai à Eurojust des éléments sur toute enquête pénale en cours, ou close, sur une infraction terroriste, y compris si l'affaire en cause ne présente pas de lien avec un autre État membre. Seules deux exceptions sont prévues : les informations pourront ainsi ne pas être transmises dès lors que l'affaire pénale ne concerne manifestement qu'un seul État membre, ou lorsque le partage de celles-ci risquerait de compromettre une enquête en cours ou la sécurité d'une personne ou serait contraire aux intérêts essentiels de l'État en matière de sécurité ;

préciser la liste des données à transmettre (qui constitueront une nouvelle catégorie spécifique au terrorisme) : état civil et données complémentaires d'identification du suspect, informations relatives à l'infraction et à sa qualification juridique, aux procédures nationales (avancement, parquet compétent, numéro de l'affaire, liens avec d'autres dossiers...) ;

améliorer l'organisation des échanges grâce à la désignation d'un ou plusieurs correspondants nationaux et à la mise en place d'un canal de communication sécurisé et décentralisé ;

élargir les possibilités de traitement des données par Eurojust via un recoupement d'informations visant à révéler l'éventuel caractère international d'une infraction terroriste signalée par un État et via une extension de son champ d'action à toutes les personnes à l'égard desquelles il existe un motif sérieux de croire qu'elles ont commis ou sont sur le point de commettre une infraction pénale ressortant de la compétence d'Eurojust, y compris après la clôture de la procédure nationale « source »248(*).

II. Le caractère limité des adaptations requises

Directement applicable, le règlement 2023/2131 ne nécessite que des adaptations du droit en vigueur ; en l'espèce, l'article 27 du projet de loi se borne à prévoir les modifications requises à l'article 695-8-2 du code de procédure pénale afin de tenir compte des innovations introduites par le règlement dans les conditions de transmission d'informations à Eurojust.

III. La position de la commission spéciale

La commission a constaté que l'article 27 procédait bel et bien à l'adaptation du droit français au règlement 2023/2131.

Cela étant, elle a également observé que cette adaptation créait des risques importants pour la préservation de la confidentialité des enquêtes les plus sensibles. En effet, il apparaît que la nouvelle procédure instituée par le règlement précité n'a pas été soumise, en cours de négociation, au PNAT : cette situation est difficilement compréhensible dans la mesure où les modifications apportées par ce texte sont substantielles et où le PNAT est la principale, voire la seule entité impactée par celui-ci.

Sur le fond, en outre, le PNAT émet de vives inquiétudes qui concernent :

l'identité de l'autorité nationale compétente en tant que correspondant national pour Eurojust en matière de terrorisme, puisqu'il n'a pas été informé de l'entité pressentie pour exercer cette mission, rendant possible - si elle était confiée à un tiers - que le PNAT n'ait plus la maîtrise du partage des données qu'il a produites en tant que directeur d'enquête ;

les conséquences opérationnelles de la réforme au vu du très grand nombre de procédures pour terrorisme gérées en France (environ 700), créant le risque d'une dispersion d'un grand volume de données sensibles ;

l'inexistence d'un applicatif permettant au PNAT de répondre aux impératifs de « formatage » des données qui résultent du règlement, étant relevé que celui-ci impose de renseigner 25 rubriques différentes, et d'assurer un degré adapté de sécurisation informatique pour les informations les plus sensibles.

Le rapporteur appelle solennellement le Gouvernement à prendre la pleine mesure de ces craintes légitimes et à y apporter une réponse rapide.

Par ailleurs, à l'initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement précisant que le PNAT serait l'autorité nationale compétente pour exercer les fonctions de correspondant auprès d'Eurojust en matière de terrorisme, permettant à celui-ci de maîtriser l'usage des dérogations ouvertes par le règlement - et donc de décider des cas dans lesquels il ne sera pas procédé à la transmission des informations parce qu'une telle communication serait de nature soit à porter atteinte à la sécurité de la Nation, soit à compromettre la sécurité d'une personne ou une enquête en cours.

La commission a adopté l'article 27 ainsi modifié.

TITRE IV
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE DROIT PÉNAL
Article 28
Réforme de la garde à vue

L'article 28 prévoit, en réaction à un avis motivé émis par la Commission européenne en septembre 2023 à la suite d'une mise en demeure qui est parvenue au Gouvernement (qui n'en a informé ni le Parlement, ni les professionnels compétents) en 2021, une réforme substantielle de la garde à vue.

Constatant que cette réforme comportait des imperfections de fond et qu'elle supprimait toute possibilité d'audition immédiate des gardés à vue sans que cette suppression soit exigée par le droit européen, la commission a adopté de nombreux amendements visant à mieux tenir compte des légitimes préoccupations des parquets et des officiers de police judiciaire.

La commission a adopté l'article 28 ainsi modifié.

I. Le régime français de garde à vue

Le régime français de garde à vue a été profondément remanié à l'issue d'une vaste réflexion lancée il y a quinze ans.

C'est en effet en 2008-2009 que sont initiées des réflexions qui, portant plus largement sur l'enquête et l'instruction, vont toucher la garde à vue. Ce travail était alors porté à la fois par le Gouvernement de l'époque (avec l'installation, en octobre 2008, de la commission dite « Léger » chargée de proposer une réforme de la procédure pénale et qui rendra ses conclusions définitives en septembre 2009) et par le Sénat, avec un groupe de travail pluraliste co-animé par Jean-René Lecerf et Jean-Pierre Michel (respectivement membres de la majorité sénatoriale et de l'opposition) qui a conduit à la publication du rapport Procédure pénale : les clefs d'une réforme équilibrée249(*) en décembre 2010. En parallèle, un vaste projet de réforme de la procédure pénale avait été mis en concertation par Michèle Alliot-Marie, alors Garde des Sceaux, en mars 2010.

Plus de deux années avaient ainsi été consacrées par le pouvoir exécutif et par le législateur à l'étude d'une question qui, loin de constituer un enjeu technique de la procédure pénale, concerne à la fois la garantie des droits et libertés des justiciables et la préservation de la sécurité et de l'ordre publics, préservation qui repose en particulier sur l'efficacité des enquêtes pénales.

C'est dans ce contexte de profonde remise en question du cadre existant que le Conseil constitutionnel a jugé le 30 juillet 2010, par une décision rendue après une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), que le régime de garde à vue était contraire à la Constitution ; afin de permettre au législateur une réécriture sereine du code de procédure pénale, il a toutefois reporté dans le temps les effets de cette censure et a précisé qu'elle ne prendrait effet qu'au 1er juillet 2011.

La décision du Conseil constitutionnel n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010

Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a estimé qu'il devait procéder à un réexamen d'ensemble des dispositions encadrant le recours de la garde à vue sur la base d'un changement de circonstances.

Les articles 62, 63, 63-1, 63-4, alinéas 1er à 6, et 77 du code de procédure pénale, dont l'inconstitutionnalité était soulevée par les requérants, résultent pour l'essentiel de la loi du 4 janvier 1993 qui n'avait pas été soumise au Conseil constitutionnel. Cependant, le Conseil constitutionnel a rappelé que, dans sa décision du 11 août 1993, il avait déclaré conformes à la Constitution les modifications apportées aux conditions de placement d'une personne en garde à vue et à la prolongation de cette mesure, au contrôle de celle-ci par le procureur de la République et au droit de la personne gardée à vue d'avoir un entretien de 30 minutes avec un avocat. En outre, il a relevé que les modifications apportées postérieurement au régime de garde à vue avaient garanti une meilleure protection des droits de la personne gardée à vue.

Pour le Conseil constitutionnel, le changement de circonstances tient principalement à deux évolutions.

La première concerne le poids croissant de la phase policière dans la procédure pénale. Comme le rappelaient aussi nos collègues MM. Jean-René Lecerf et Jean-Pierre Michel dans leur rapport précité sur l'évolution du régime de l'enquête et de l'instruction, les ouvertures d'information représentent moins de 4 % des affaires poursuivies. Les commentaires au Cahier du Conseil constitutionnel soulignent que dans tous les autres cas, la décision de mise en oeuvre de l'action publique par le parquet fait passer directement de la phase de l'enquête policière à la phase de jugement. La mise en oeuvre du traitement dit « en temps réel » des infractions - pratique généralisée à l'ensemble du parquet à partir de 1995 - a renforcé cette évolution : « cette pratique conduit à ce que la décision du ministère public sur l'action publique est prise sur le rapport de l'officier de police judiciaire, avant qu'il soit mis fin à la garde à vue » ; ainsi il peut en résulter que, « dans des procédures portant sur des faits complexes ou particulièrement graves, une personne est désormais le plus souvent jugée sur la base des seuls éléments de preuve rassemblés avant l'expiration de sa garde à vue, en particulier sur les aveux qu'elle a pu faire pendant celle-ci ».

En second lieu, le Conseil constitutionnel a mis en avant la réduction progressive des exigences fixées par le législateur pour reconnaître la qualité d'officier de police judiciaire - qui seule habilite à placer en garde à vue. Ainsi entre 1993 et 2009, le nombre des fonctionnaires civils et militaires ayant la qualité d'officier de police judiciaire est passé de 25 000 à 53 000.

Ces deux facteurs conjugués ont conduit, selon le Conseil constitutionnel, à une banalisation de la garde à vue, « y compris pour les infractions mineures », et, en conséquence, à une forte augmentation du nombre de placements en garde à vue.

Au regard de ce changement de circonstances, le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions du code de procédure pénale dont il était saisi portaient une atteinte excessive aux droits de la défense. Si ces droits ont d'abord été rattachés par le Conseil constitutionnel aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, ils trouvent désormais leur fondement dans l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

La disproportion entre, d'une part, l'objectif de sauvegarde de l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, la protection des droits de la défense apparaît d'abord dans le champ d'application de la garde à vue qui, sauf en matière de flagrance, peut concerner les contraventions ou les délits non punis d'une peine d'emprisonnement (défaut d'assurance, délits de presse ou certains délits au code de la consommation). De même, « toute garde à vue peut faire l'objet d'une prolongation de 24 heures sans que cette faculté soit réservée à des infractions présentant une certaine gravité » (considérant 27). Ainsi, comme le relève le commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel « le simple fait que la même mesure de contrainte (mêmes conditions de placement en garde à vue, même durée, mêmes droits et même contrôle de l'autorité judiciaire) s'applique à l'assassin comme au débiteur de pension alimentaire à jour de ses obligations mais qui n'a pas déclaré son adresse à son ex-conjoint souligne un problème aigu de proportionnalité »...

Ensuite, la disproportion tient à l'insuffisance des droits de la défense. Le Conseil constitutionnel constate que la personne interrogée, retenue contre sa volonté, n'a pas la possibilité de « bénéficier de l'assistance effective d'un avocat ». Il estime excessive cette restriction dès lors qu'« elle est imposée de façon générale, sans considération des circonstances particulières susceptibles de la justifier, pour rassembler ou conserver les preuves ou assurer la protection des personnes ». S'il admet des exceptions au principe de l'assistance d'un avocat, le Conseil constitutionnel juge que le caractère général des dispositions du code de procédure pénale privant la personne gardée à vue de ce droit porte une atteinte disproportionnée aux droits de la défense et n'est pas conforme à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel s'abstient néanmoins d'« indiquer les modifications des règles de procédure pénale qui doivent être choisies pour qu'il soit remédié à l'inconstitutionnalité constatée » mais il fixe au 1er juillet 2011 le délai limite dans lequel le législateur doit procéder à cette mise en conformité.

À cet égard, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme fixe des orientations plus précises concernant en particulier le moment d'intervention de l'avocat et la portée de son assistance.

Source : commission des lois du Sénat250(*)

Sous l'effet de cette décision constitutionnelle, mais avec le bénéfice des réflexions engagées depuis 2008, le Parlement a été saisi d'un projet de loi de réforme de la garde à vue en octobre 2010 ; définitivement adopté en mars 2011 et devenu la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 sur la garde à vue, le texte n'avait pas été examiné en procédure accélérée, ce qui est assez remarquable pour être rappelé et témoigne de l'importance accordée au sujet.

Le régime issu de cette loi est codifié aux articles 62 à 66 du code de procédure pénale (qui, relatifs à la flagrance, sont applicables par renvoi aux autres cadres d'enquête).

L'équilibre issu de la loi précitée du 14 avril 2011 n'a pas été substantiellement remis en cause par la directive 2013/48/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives au mandat d'arrêt européen, au droit d'informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de liberté de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires (dite « directive C ») qui devait être intégrée aux droits internes des États membres au plus tard le 27 novembre 2016. Tout au plus a-t-il été nécessaire de prévoir, quelques mois avant cette date, des aménagements limités qui portaient, d'une part, sur des précisions devant être apportées quant aux conditions dans lesquelles le contact entre le gardé à vue et un proche peut être différé et, d'autre part, en ce qui concerne l'assistance d'un avocat à des moments de l'enquête autres que la garde à vue (exécution d'un mandat d'arrêt ou d'un mandat d'amener, reconstitutions, séances d'identification de suspects...)251(*).

La « directive C » avait, par ailleurs, évolué au cours des négociations pour tenir compte des attentes des États membres : le Sénat s'était ainsi exprimé dès janvier 2012 pour demander, dans un esprit de pragmatisme, d'efficacité des enquêtes et dans le respect du principe de subsidiarité, l'intégration à la directive de « dérogations strictement encadrées lorsque ces dérogations paraissent justifiées par des motifs impérieux tenant aux circonstances particulières de l'enquête, pour les catégories d'infractions les plus graves » et pour obtenir que le texte final « [encadre mieux] les droits reconnus à l'avocat au cours d'un interrogatoire ou d'une audition tout en laissant une marge d'appréciation suffisante aux États membres »252(*).

II. Une conformité au droit européen remise en cause par un avis motivé de la Commission européenne

Alors que la directive de 2013 devait être transposée au plus tard en novembre 2016 et que la France considérait l'avoir pleinement intégrée à son droit interne, le Gouvernement a négligé d'informer la Commission européenne des mesures prises pour intégrer la réglementation précitée en droit interne. Mis en demeure de le faire, il a présenté des observations le 3 février 2017.

Par une nouvelle mise en demeure en date du 23 septembre 2021, la Commission a fait connaître au Gouvernement qu'elle estimait que certaines des dispositions du code de procédure pénale étaient contraires à la « directive C ». Après que le Gouvernement lui a, sans juger bon d'en aviser le Parlement, adressé de nouvelles observations le 23 novembre 2021, et après des échanges informels dont le pouvoir législatif n'a pas non plus été informé et auxquels il n'a pas davantage été associé, la Commission a rendu un avis motivé le 28 septembre dernier pour pointer une transposition « incorrecte » sur deux points qui concernent, d'une part, l'étendue du droit de la personne gardée à vue de communiquer avec un proche et, d'autre part, les conditions dans lesquelles il est possible pour les officiers de police judiciaire de procéder à l'audition d'une personne gardée à vue sans l'assistance de son avocat.

· Le droit de communiquer avec un proche

S'agissant, en premier lieu, de la possibilité de communiquer avec un proche, le code de procédure pénale dispose en l'état que « Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe ou l'un de ses frères et soeurs de la mesure dont elle est l'objet. Elle peut en outre faire prévenir son employeur. Lorsque la personne gardée à vue est de nationalité étrangère, elle peut faire contacter les autorités consulaires de son pays » (article 63-2). La Commission estime que la formule retenue par la France pour désigner les proches comporte une restriction indue qui est contraire à la directive de 2013 (celle-ci prévoit, en son article 5, que « les suspects ou les personnes poursuivies qui sont privés de liberté [ont] le droit, s'ils le souhaitent, d'en informer sans retard indu au moins une personne qu'ils désignent, telle qu'un membre de leur famille ou un employeur », la locution « tel que » montrant le caractère illustratif et non limitatif de la liste ainsi établie) en ce sens qu'elle apporte une limitation générale au cercle des personnes pouvant être prévenues de la garde à vue.

Le projet de loi prévoit, pour répondre à cette difficulté (I et II de l'article 28), de modifier les articles 63-1 et 63-2 du code de procédure pénale pour permettre à la personne gardée à vue de prévenir non seulement les membres de sa famille, mais aussi « toute autre personne qu'elle désigne ».

Il convient de relever que, si elle en complexifiera l'exercice, cette extension n'aura pas d'impact sur la faculté donnée au procureur, sur proposition de l'officier de police judiciaire, de refuser ou de retarder la communication entre le gardé à vue et l'un de ses proches s'il l'estime de nature à porter préjudice à l'un des objectifs poursuivis par le placement en garde à vue et prévus par l'article 62-2 du code de procédure pénale (et notamment pour empêcher que la personne, fût-ce par l'intermédiaire d'un proche, ne modifie les preuves ou indices matériels ou ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches, ou encore pour empêcher qu'elle ne se concerte avec d'autres personnes susceptibles d'être ses coauteurs ou complices).

· Les dérogations à l'assistance d'un avocat

Le principal point de non-conformité entre le droit français et la directive 2013/48 concerne les conditions d'accès à un avocat, qui seraient contraires au droit européen en tant qu'elles vont au-delà des seules quatre hypothèses dans lesquelles le texte précité permet de « déroger temporairement » au droit à l'assistance d'un avocat :

- si la personne a renoncé expressément à bénéficier de l'assistance de celui-ci ;

- en cas de nécessité urgente de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne ;

- lorsque les autorités qui procèdent à l'enquête doivent agir immédiatement pour éviter de compromettre sérieusement une procédure pénale ;

- lorsqu'il est impossible, en raison de l'éloignement géographique d'un suspect ou d'une personne poursuivie, d'assurer le droit d'accès à un avocat sans retard indu après la privation de liberté.

Plus en détail, la Commission remet en cause deux dispositifs du droit français.

Le premier, prévu par l'article 63-4-2 du code de procédure pénale, permet de reporter l'assistance de l'avocat, sur demande de l'officier de police judiciaire et sur autorisation écrite et motivée d'un magistrat (le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention, selon les cas), « lorsque les nécessités de l'enquête exigent une audition immédiate de la personne » et, « à titre exceptionnel » (c'est-à-dire, dans les faits, essentiellement pour des infractions relatives à la criminalité organisée), dans deux cas où un report de 12 voire de 24 heures « apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête » : « soit pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte grave et imminente à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne ».

Si ces deux dernières hypothèses correspondent mutatis mutandis aux dérogations ouvertes à la directive et sont donc conformes à cette dernière, la Commission considère que l'audition immédiate « lorsque les nécessités de l'enquête [l']exigent » est contraire au droit européen.

Le projet de loi prévoit, par conséquent, de supprimer cette faculté. Il ressort des auditions menées par le rapporteur que cette suppression n'aura qu'un impact limité sur la conduite des enquêtes en raison, notamment, du maintien des leviers existants qui autorisent le report de l'assistance d'un avocat.

Le second dispositif concerne la possibilité donnée à l'officier de police judiciaire, deux heures après avoir contacté l'avocat du gardé à vue si celui-ci demande à bénéficier de son assistance, de débuter les auditions et confrontations y compris si l'avocat ne s'est pas encore présenté253(*). Il résulte de l'article 63-4-2 déjà cité, aux termes duquel « La personne gardée à vue peut demander que l'avocat assiste à ses auditions et confrontations. Dans ce cas, la première audition, sauf si elle porte uniquement sur les éléments d'identité, ne peut débuter sans la présence de l'avocat choisi ou commis d'office avant l'expiration d'un délai de deux heures suivant l'avis adressé [...] de la demande formulée par la personne gardée à vue d'être assistée par un avocat ».

Le ministère de la Justice ne dispose pas de statistiques sur le recours à cette « carence » ; auditionnées par le rapporteur, la Conférence nationale des procureurs ainsi que les directions générales de la police et de la gendarmerie nationales ont toutefois exprimé une vive préoccupation quant à sa disparition, attestant d'un usage qui n'est ni marginal, ni anecdotique.

Pour répondre aux observations de la Commission européenne, le projet de loi prévoit :

- de supprimer la « carence » de deux heures en la remplaçant par le principe selon lequel une personne gardée à vue ne peut pas être entendue sur les faits sans assistance de son avocat, sauf si elle a expressément renoncé à cette assistance ;

d'aménager en contrepartie les modalités d'intervention des avocats avec un élargissement du recours aux avocats commis d'office, créant une forme de « suppléance » : ainsi, dans l'hypothèse où la personne gardée à vue souhaiterait choisir son avocat, elle ne pourrait bénéficier de l'assistance de celui-ci que s'il peut être contacté et s'il peut se présenter dans un délai de deux heures suivant l'avis qui lui a été adressé ; dans le cas contraire, l'officier de police judiciaire pourrait saisir le bâtonnier afin d'obtenir la désignation d'un avocat commis d'office. En toute logique, le nouveau système se traduira ainsi par une extension du recours aux avocats commis d'office.

Ce dispositif, sans effacer les effets de la réforme (effets que l'étude d'impact annexée au présent projet de loi ne nie au demeurant pas, puisqu'elle admet que « la suppression du délai de carence est susceptible d'avoir un impact sur le déroulement des enquêtes, dont les auditions réalisées en garde à vue constituent des actes essentiels » et que les nouvelles modalités de désignation des avocats commis d'office seront « susceptible[s] d'augmenter la charge administrative et procédurale reposant sur les services enquêteurs »), est inspiré par la volonté de les limiter autant qu'il est possible. Selon la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice (DACG), la suppression de la carence pourra par ailleurs être compensée par un recours plus fréquent au report de l'assistance de l'avocat pendant 12 à 24 heures - c'est-à-dire par l'aspiration dans le droit commun d'une procédure qui est, comme on l'a vu, aujourd'hui exceptionnelle et en pratique réservée à la criminalité organisée.

III. La position de la commission

Avant d'aborder le fond des dispositions de l'article 28, le rapporteur appelle l'attention du Sénat sur le caractère difficilement acceptable des conditions d'examen d'une réforme d'une telle ampleur et qui touche un sujet aussi essentiel que celui de la garde à vue.

On l'a rappelé ci-dessus : la loi du 14 avril 2011 avait été précédée de longs et fructueux débats, ainsi que de réflexions partagées entre les pouvoirs publics et largement commentées par la presse. L'adaptation du droit français à la « directive C » avait de même, parce qu'elle résultait d'un processus de négociations auquel le Parlement est (certes insuffisamment) associé, été préparée par le Sénat dès 2011, soit cinq ans avant l'entrée du texte en novembre 2016.

Le contraste avec le présent projet de loi est, à tout le moins, saisissant. Inséré dans le cadre d'une deuxième saisine rectificative à un projet de loi déposé le 15 novembre dernier et examiné en commission moins d'un mois plus tard, l'article 28 pose un véritable problème de principe. Ce calendrier contraint serait compréhensible s'il était partagé ; au contraire, le Gouvernement est informé depuis plus de deux ans du risque d'une non-conformité au droit européen de la garde à vue française et il n'a, à aucun moment, pris la peine d'informer les assemblées parlementaires de la situation - ne permettant ni au Sénat, ni à l'Assemblée nationale de préparer la réforme, ne permettant pas non plus à la police et à la gendarmerie (qui ont été saisies du sujet il y a seulement quelques semaines, d'après les déclarations recueillies par le rapporteur en audition) de se saisir du sujet. Pire encore : pendant ce laps de temps, le Gouvernement n'a de lui-même engagé aucune réflexion en « interne » et il apparaît même qu'il a été profondément démuni lorsque la décision de la Commission lui a été communiquée254(*).

Ainsi, alors qu'elles auraient dû être mises à profit pour ébaucher l'avenir de la garde à vue, ces deux années ont été gâchées.

Ce manque de transparence est quasiment inédit ; il est, surtout, extrêmement inquiétant en ce qu'il témoigne d'un manque de considération préoccupant et d'une effrayante méconnaissance des usages institutionnels et démocratiques normaux.

En somme, ce procédé constitue une faute grave de la part du Gouvernement : celui-ci s'est délibérément abstenu d'informer le Parlement, les magistrats du parquet et les policiers et gendarmes pendant deux ans sur un enjeu majeur, sans tenir compte ni de la nature indéniablement législative du sujet, ni de sa forte sensibilité pour les services enquêteurs comme pour les citoyens.

Intolérable en principe, cette situation n'exclut malheureusement pas l'existence de problèmes de fond quant au dispositif proposé.

Outre des imperfections de rédaction, l'article 28 du projet de loi est porteur en l'état de quatre effets pervers majeurs.

Tout d'abord, la proposition faite par la Chancellerie d'une utilisation étendue du report de l'assistance d'un avocat comme palliatif à la suppression de la carence est profondément insatisfaisante, puisqu'elle revient en pratique à dégrader les droits des gardés à vue en privant d'avocat, pendant 12 à 24 heures, des personnes qui aujourd'hui ne se seraient pas vues refuser la présence de celui-ci pendant leur audition.

Deuxièmement, l'article 28 est insuffisamment précis sur plusieurs points essentiels de procédure (par exemple, en ce qui concerne la marche à suivre en cas de révocation par le gardé à vue de sa renonciation à l'assistance d'un avocat, ou encore sur les modalités d'appréciation de la faculté de l'avocat choisi de se présenter dans un délai de deux heures) : dès lors, il ne manquera pas de créer des incertitudes qui ne feront qu'ajouter aux difficultés que rencontreront les officiers de police judiciaire et les parquets, déjà déstabilisés par la survenue d'une réforme imprévue et préparée dans la précipitation.

Troisièmement, bien que les représentants de la profession d'avocat se soient déclarés, lors de leur audition par le rapporteur, préparés à l'augmentation du recours aux avocats commis d'office qu'impliquera mécaniquement le projet de loi, l'impact de cette innovation sur les finances publiques (via l'aide juridictionnelle) ou sur la conduite des enquêtes n'a pas été évalué par le Gouvernement. Certaines des personnes entendues par le rapporteur ont été jusqu'à émettre la crainte que le nouvel état du droit ne donne naissance à des manoeuvres dilatoires, dans lesquelles les avocats arriveraient de manière délibérément tardive pour empêcher la tenue des auditions et confrontations. Le rapporteur ne partage pas cette crainte (le devoir de diligence fait partie intégrante des obligations déontologiques des avocats et ceux-ci ne sauraient, sous peine de commettre une faute susceptible d'être sanctionnée au plan disciplinaire, adopter un tel comportement) ; pour autant, il relève que des difficultés seront inévitables. En effet, et en dépit des efforts de chacun, il sera de toute évidence malaisé, dans les « petits » barreaux, de disposer d'un nombre suffisant d'avocats pénalistes de permanence capables d'assurer la défense des gardés à vue, a fortiori la nuit et le week-end, ou encore d'être effectivement présents rapidement dans des commissariats qui se trouvent parfois, en zone rurale, très éloignés de leurs locaux professionnels.

Plus substantiellement, et comme l'a relevé la Conférence nationale des procureurs de la République lors de son audition par le rapporteur, ce nouveau système ne manquera pas de créer des effets de bord qui auront un impact sur l'ensemble de la procédure pénale, non seulement parce qu'en rendant l'audition du gardé à vue plus difficile, il risque de rendre plus complexe le recours à des procédures rapides, fondées sur la reconnaissance de culpabilité (c'est-à-dire à la fois à la comparution sur reconnaissance de culpabilité (CRPC) ou « plaider coupable », qui représente 8 à 10 % des réponses pénales, mais aussi les alternatives aux poursuites qui en représentent une part plus importante encore), mais aussi parce qu'il est de nature à constituer un facteur de rallongement de la durée des audiences qui pourraient, si l'audition du gardé à vue est moins efficace, devenir le lieu principal - voire unique - du contradictoire.

Plus largement, les conséquences de la réforme sur le stock de procédures à traiter semblent mal appréhendées par le ministère de la justice : on se demande, en effet, comment il sera possible aux officiers de police judiciaire et aux parquets de traiter les presque 3 millions de dossiers en attente en faisant appel pour chacun à l'avocat du mis en cause et en absorbant dans le même temps les effets de la suppression de la « carence » sur les procédures nouvelles. De la même manière, les effets de cette nouvelle norme sur l'attractivité du métier d'enquêteur, attractivité déjà dégradée par le poids et la complexité de la procédure pénale, n'ont pas été mesurés.

Enfin, l'article 28 supprime toute possibilité d'audition immédiate des gardés à vue, alors même que la « directive C » n'exclut pas cette hypothèse : à l'inverse, elle l'admet sans difficulté dès lors qu'elle est adossée aux dérogations qu'elle prévoit.

En somme, ce procédé constitue une faute grave de la part du Gouvernement : celui-ci s'est délibérément abstenu d'informer le Parlement, les magistrats du parquet et les policiers et gendarmes pendant deux ans sur un enjeu majeur, sans tenir compte ni de la nature indéniablement législative du sujet, ni de sa forte sensibilité pour les services enquêteurs comme pour les citoyens.

Intolérable en principe, cette situation n'exclut malheureusement pas l'existence de problèmes de fond quant au dispositif proposé.

Outre des imperfections de rédaction, l'article 28 du projet de loi est porteur en l'état de quatre effets pervers majeurs.

Tout d'abord, la proposition faite par la Chancellerie d'une utilisation étendue du report de l'assistance d'un avocat comme palliatif à la suppression de la carence est profondément insatisfaisante, puisqu'elle revient en pratique à dégrader les droits des gardés à vue en privant d'avocat, pendant 12 à 24 heures, des personnes qui aujourd'hui ne se seraient pas vues refuser la présence de celui-ci pendant leur audition.

Deuxièmement, l'article 28 est insuffisamment précis sur plusieurs points essentiels de procédure (par exemple, en ce qui concerne la marche à suivre en cas de révocation par le gardé à vue de sa renonciation à l'assistance d'un avocat, ou encore sur les modalités d'appréciation de la faculté de l'avocat choisi de se présenter dans un délai de deux heures) : dès lors, il ne manquera pas de créer des incertitudes qui ne feront qu'ajouter aux difficultés que rencontreront les officiers de police judiciaire et les parquets, déjà déstabilisés par la survenue d'une réforme imprévue et préparée dans la précipitation.

Troisièmement, bien que les représentants de la profession d'avocat se soient déclarés, lors de leur audition par le rapporteur, préparés à l'augmentation du recours aux avocats commis d'office qu'impliquera mécaniquement le projet de loi, l'impact de cette innovation sur les finances publiques (via l'aide juridictionnelle) ou sur la conduite des enquêtes n'a pas été évalué par le Gouvernement. Certaines des personnes entendues par le rapporteur ont été jusqu'à émettre la crainte que le nouvel état du droit ne donne naissance à des manoeuvres dilatoires, dans lesquelles les avocats arriveraient de manière délibérément tardive pour empêcher la tenue des auditions et confrontations. Le rapporteur ne partage pas cette crainte (le devoir de diligence fait partie intégrante des obligations déontologiques des avocats et ceux-ci ne sauraient, sous peine de commettre une faute susceptible d'être sanctionnée au plan disciplinaire, adopter un tel comportement) ; pour autant, il relève que des difficultés seront inévitables. En effet, et en dépit des efforts de chacun, il sera de toute évidence malaisé, dans les « petits » barreaux, de disposer d'un nombre suffisant d'avocats pénalistes de permanence capables d'assurer la défense des gardés à vue, a fortiori la nuit et le week-end, ou encore d'être effectivement présents rapidement dans des commissariats qui se trouvent parfois, en zone rurale, très éloignés de leurs locaux professionnels.

Plus substantiellement, et comme l'a relevé la Conférence nationale des procureurs de la République lors de son audition par le rapporteur, ce nouveau système ne manquera pas de créer des effets de bord qui auront un impact sur l'ensemble de la procédure pénale, non seulement parce qu'en rendant l'audition du gardé à vue plus difficile, il risque de rendre plus complexe le recours à des procédures rapides, fondées sur la reconnaissance de culpabilité (c'est-à-dire à la fois à la comparution sur reconnaissance de culpabilité (CRPC) ou « plaider coupable », qui représente 8 à 10 % des réponses pénales, mais aussi les alternatives aux poursuites qui en représentent une part plus importante encore), mais aussi parce qu'il est de nature à constituer un facteur de rallongement de la durée des audiences qui pourraient, si l'audition du gardé à vue est moins efficace, devenir le lieu principal - voire unique - du contradictoire.

Plus largement, les conséquences de la réforme sur le stock de procédures à traiter semblent mal appréhendées par le ministère de la justice : on se demande, en effet, comment il sera possible aux officiers de police judiciaire et aux parquets de traiter les presque 3 millions de dossiers en attente en faisant appel pour chacun à l'avocat du mis en cause et en absorbant dans le même temps les effets de la suppression de la « carence » sur les procédures nouvelles. De la même manière, les effets de cette nouvelle norme sur l'attractivité du métier d'enquêteur, attractivité déjà dégradée par le poids et la complexité de la procédure pénale, n'ont pas été mesurés.

Enfin, l'article 28 supprime toute possibilité d'audition immédiate des gardés à vue, alors même que la « directive C » n'exclut pas cette hypothèse : à l'inverse, elle l'admet sans difficulté dès lors qu'elle est adossée aux dérogations qu'elle prévoit.

En somme, la réforme proposée de la garde à vue présente des risques importants de déstabilisation des enquêtes et de dégradation du taux d'élucidation des infractions : mal préparée, dissimulée au Parlement comme aux professionnels compétents, elle n'a pas été intégrée dans une réflexion d'ensemble sur la procédure pénale.

Il appartient au Sénat de prendre ses responsabilités, malgré les conditions d'examen d'un dispositif qui lui aura été soumis un mois à peine avant d'être examiné en séance publique, en tentant d'apporter des réponses aux craintes légitimes des parquets et des enquêteurs.

Ainsi, pour parer aux lourdes défaillances qui affectent l'article 28, la commission a adopté cinq amendements (dont deux identiques, deux à deux, du rapporteur et de François-Noël Buffet, président de la commission des lois) tendant à :

clarifier la procédure prévue pour l'appréciation du délai de deux heures imparti à l'avocat choisi pour se présenter, ainsi que pour la mise en oeuvre éventuelle, par un gardé à vue, de son droit de révoquer sa renonciation à l'assistance d'un avocat ;

- définir la marche à suivre dans le cas où, censé être présent dans le délai précité, l'avocat choisi ne se serait pas effectivement présenté ;

apporter des coordinations aux autres articles du code de procédure pénale relatifs à la garde à vue qui, impactés de facto par la présente réforme, avaient été laissés inchangés par le Gouvernement - ce qui créait le risque d'incohérences « mécaniques » qui auraient pu remettre en cause la régularité de l'ensemble des procédures ;

rappeler les obligations applicables aux avocats désignés par le gardé à vue ou commis d'office afin de garantir qu'ils accomplissent toutes les diligences requises pour se présenter sans délai auprès de leur client ;

- aligner, en ce qui concerne le report de l'intervention de l'avocat, la rédaction du code de procédure pénale sur celle de la « directive C », cette dernière apparaissant plus large et donc plus favorable à la bonne conduite des enquêtes complexes qui justifient un tel report ;

- à titre principal, rétablir une possibilité d'audition immédiate du gardé à vue dans les hypothèses prévues par la « directive C » (outre le cas où le gardé à vue renoncerait à l'assistance d'un avocat), à savoir non seulement « lorsqu'il existe une nécessité urgente de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne » et « lorsqu'il est impératif que les autorités qui procèdent à l'enquête agissent immédiatement pour éviter de compromettre sérieusement une procédure pénale » (article 3, point 6 de la directive), mais aussi « lorsqu'il est impossible, en raison de l'éloignement géographique [du gardé à vue], d'assurer le droit d'accès à un avocat sans retard indu après la privation de liberté » (article 3, point 5).

La commission a adopté l'article 28 ainsi modifié.

Article 29
Mise en conformité du droit français
avec la décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002
relative au mandat d'arrêt européen
et aux procédures de remise entre États membres

L'article 29 vise à mettre en conformité les modalités de mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen avec une décision-cadre de 2002 (modifiée) à la suite d'un avis motivé de la Commission européenne constatant la contrariété entre certaines dispositions du code de procédure pénale et le droit européen.

La commission a adopté l'article 29 sans modification.

I. La nécessité d'une mise en conformité du droit français à la suite d'un avis motivé de la Commission européenne

Comme l'article 28, l'article 29 découle du constat fait par la Commission européenne de la non-conformité du droit français à un texte européen - en l'espèce, la décision-cadre 2002/584/JAI relative au mandat d'arrêt européen.

Après une mise en demeure adressée au Gouvernement - qui, là encore, n'en a pas informé le Parlement - le 2 décembre 2021, la Commission européenne a - à une date et selon des formes que l'étude d'impact annexée au présent projet de loi ne prend pas la peine de préciser, révélant une nouvelle fois la piètre considération accordée aux assemblées par le pouvoir exécutif - estimé que le code de procédure pénale devait être modifié sur deux points :

- premièrement, l'article 695-43 du code fixe, conformément au texte de la décision-cadre précitée, à soixante jours à compter de l'arrestation le délai maximal dans lequel doit intervenir la décision définitive autorisant ou refusant la remise d'une personne recherchée à l'autorité judiciaire étrangère compétente. Selon la Commission cependant, ce même article va au-delà des marges ouvertes par le droit européen en prévoyant une prorogation de trente jours du délai « dans des cas spécifiques » et « en particulier [...] consécutivement à un pourvoi en cassation » ;

- deuxièmement, l'article 695-45 du code permet à la chambre de l'instruction d'accepter le transfèrement temporaire d'une personne recherchée dans des conditions qui subordonnent, entre autres, cette faculté au recueil du consentement de la personne concernée. Cette condition n'étant pas prévue par la décision-cadre, la Commission interprète cette disposition - pourtant favorable aux droits individuels fondamentaux - comme une source de contrariété entre le droit français et le droit européen.

II. La position de la commission spéciale

Déplorant vivement que les mêmes causes qu'à l'article 28 conduisent aux mêmes conséquences, donc à l'examen précipité par le Parlement d'une réforme qui aurait pu (et dû) être débattue dans la sérénité, la commission n'a pu que constater que la position prise par la Commission européenne imposait bel et bien une modification du droit interne.

Bien qu'il soit paradoxal que le droit européen impose une réduction des garanties apportées aux droits des personnes mises en cause au plan pénal, et tout en s'interrogeant sur la pertinence de fond d'une telle modification du code de procédure pénale, dans un esprit de responsabilité, la commission n'a pas estimé pouvoir opter pour une solution autre que celle d'une adoption de l'article 29 sans modification.

La commission a adopté l'article 29 sans modification.

Article 30
Application outre-mer
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

L'article 30 précise les modalités d'application outre-mer des articles 28 et 29.

La commission a adopté un amendement du Gouvernement reportant de trois mois l'entrée en vigueur de la réforme de la garde à vue, puis l'article 30 ainsi modifié.

L'article 30 modifie le premier alinéa de l'article 804 du code de procédure pénale pour garantir l'application des nouvelles rédactions du même code issues des articles 28 et 29 en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Saisie d'un amendement du Gouvernement proposant de reporter de trois mois l'entrée en vigueur de la réforme de la garde à vue, la commission a constaté que, par l'objet même dudit amendement, le pouvoir exécutif reconnaissait que les effets de l'article 28 sur les parquets, les officiers de police judiciaire et les barreaux avaient été insuffisamment « anticip[és] ». Pour autant, en responsabilité, elle a adopté cet amendement : bien qu'il soit révélateur de l'impéritie du Gouvernement, il prévoit en effet un report qui profitera aux policiers, aux gendarmes, aux magistrats et aux avocats, et qui leur permettra de préparer plus sereinement la mise en oeuvre de la réforme.

La commission a adopté l'article 30 ainsi modifié.

TITRE V
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE SOCIALE ET DE DROIT DE LA SANTÉ
Article 31
Mise en conformité du code de l'environnement
avec le règlement 2023/2055 en ce qui concerne les microplastiques

Cet article vise à mettre en conformité le calendrier national d'interdiction des microplastiques, adopté en 2020, avec le calendrier européen, adopté en 2023.

La commission a adopté un amendement visant à réparer une erreur de référence.

La commission a adopté l'article 31 ainsi modifié.

I. Une mise en conformité du calendrier national d'interdiction des microplastiques avec le nouveau calendrier européen est nécessaire

A. Le législateur a défini en 2020 un calendrier national d'interdiction des microplastiques

Les microplastiques désignent les microparticules de polymère synthétique dont la taille est comprise entre 0,1 um et 5 mm. Ces microplastiques sont présents dans de nombreux produits, à usage notamment cosmétique, détergents, agricoles ou médicaux.

À l'échelle de l'Union européenne, 42 400 tonnes de microplastiques sont rejetées dans l'environnement chaque année255(*).

Ces microplastiques se dispersent dans l'environnement puis s'accumulent dans les cours d'eau, dans l'environnement marin et dans les sols. Insolubles dans l'eau et facilement ingérés par des organismes vivants, ils suscitent des inquiétudes quant à leur incidence générale sur l'environnement et, potentiellement, sur la santé humaine.

La pollution aux microplastiques n'est pas localisée : les microplastiques peuvent être transportés sur de très longues distances et se retrouver dans des endroits reculés, comme en Arctique. La lutte contre la pollution au microplastique doit donc être menée à l'échelle la plus large possible pour être efficace.

La pollution par les microplastiques est extrêmement persistante et pratiquement impossible à éliminer de l'environnement une fois émise, des restrictions à la source sont donc nécessaires.

Avant juillet 2023, en l'absence d'harmonisation européenne des réglementations techniques, le principe de reconnaissance mutuelle s'appliquait aux microplastiques : chaque État membre était libre d'établir ses propres règles techniques tout en acceptant la commercialisation des produits respectant les règles techniques nationales en vigueur dans les autres États membres256(*).

L'article 82 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire dite loi « Agec » prévoit, à l'initiative du Sénat, un calendrier d'interdiction de mise sur le marché en France de produits contenant des microplastiques, codifié à l'article L. 541-15-12 du code de l'environnement.

Ce calendrier ne concerne que les microplastiques dits intentionnels, c'est-à-dire présents en tant que tels dans les produits. Il n'inclut donc pas les microplastiques causés par la dégradation de déchets plastiques, qui représentent une grande partie de la pollution.

B. L'Union européenne a adopté en 2023 un calendrier européen d'interdiction qui présente plusieurs divergences avec le calendrier national

La « mosaïque de restrictions nationales » s'appliquant aux microplastiques, selon l'expression utilisée par la Commission européenne257(*), étant susceptible d'entraver le fonctionnement du marché intérieur, une harmonisation européenne est apparue nécessaire.

Le règlement 2023/2055 de la Commission du 25 septembre 2023 modifiant l'annexe XVII du règlement Reach258(*), adopté par la Commission européenne dans le cadre du Pacte vert, a introduit un calendrier européen d'interdiction des microplastiques dits intentionnels.

Le calendrier d'interdiction prévu par le règlement apparaît dans l'ensemble moins ambitieux que le calendrier national.

D'une part, l'exemption des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DIMDIV) est prévue par le droit européen mais pas par le droit national.

Ces dispositifs représentent, selon l'Agence européenne des produits chimiques, 0,0006 % des émissions de microplastiques intentionnels, soit 0,27 tonne sur 42 400 tonnes de microplastiques rejetés. Seuls 10 à 20 % des microplastiques présents dans ces dispositifs sont rejetés dans le dispositif d'assainissement ou de traitement classique des déchets, contre 100 % pour les produits cosmétiques par exemple, en raison de procédures réglementées de gestion des déchets dans les milieux médicaux259(*).

Il n'existe pas à ce jour de particules substituables aux microplastiques, utilisés comme réactifs dans les DIMDIV. Le Syndicat de l'industrie de diagnostic in vitro (SIDIV) a alerté sur le risque d'arrêt de commercialisation de certains tests essentiels, notamment pour la transfusion sanguine, en cas d'interdiction des microplastiques, alors que 80 % de ces DIMDIV sont utilisés dans de situations d'urgence cardiovasculaire.

Le règlement prévoit cependant que malgré leur exemption, les DIMDIV devront, dans un délai de deux ans, être accompagnés d'instruction d'utilisation et d'élimination afin de limiter les rejets de microplastiques dans l'environnement.

D'autre part, l'interdiction des différents produits est reportée de 1 an (pour les produits cosmétiques « à rincer »260(*)), de 3 ans (pour les microparticules destinées à l'encapsulation des parfums261(*)) ou de 5 ans (pour les dispositifs médicaux) selon les produits.

Ces délais supplémentaires visent à permettre aux fabricants de trouver des alternatives, de les substituer ou de développer de nouveaux produits sans ces substances et de demander les autorisations réglementaires nécessaires à leur mise sur le marché européen.

La rédaction finale résulte d'un compromis entre les États membres : la France a défendu, lors de réunions entre les États membres et la Commission européenne, un alignement des échéances européennes avec les échéances françaises.

Toutefois, durant la dernière réunion d'avril 2023, la France a accepté de soutenir le projet moins ambitieux de la Commission européenne, dans un esprit de compromis, pour ne pas contribuer à une minorité de blocage, dont la Pologne et l'Italie faisaient partie, susceptible de faire échouer l'adoption du principe même d'interdiction.

Les règlements européens sont directement applicables dans tout État membre262(*). Le calendrier national prévu au code de l'environnement est donc de fait aujourd'hui inapplicable : si l'administration entreprend d'interdire la mise sur le marché de produits en se fondant sur ce calendrier, le juge national devra annuler cette décision en écartant l'application d'une loi contraire au droit de l'Union européenne263(*). Le metteur sur le marché mis en cause pourrait engager la responsabilité de l'État, en raison d'une décision réglementaire incompatible avec le droit de l'Union européenne264(*).

L'harmonisation du calendrier national n'est donc pas nécessaire pour que le calendrier européen soit applicable. Elle est toutefois souhaitable pour assurer la clarté et l'intelligibilité de la loi, en supprimant des dispositions devenues inapplicables.

Divergences entre le calendrier national et le calendrier européen d'interdiction des microplastiques

Produits

Dispositions de l'article L. 541-15-12 du code de l'environnement

Dispositions du règlement Reach

Part dans les émissions totales
de microplastiques intentionnels265(*)

Dispositifs de diagnostic in vitro

Interdiction au 1er janvier 2024

Pas d'interdiction

0,0006 %

Dispositifs médicaux

Interdiction au 1er janvier 2024

Interdiction au 17 octobre 2029

Inconnue

Microparticules destinées à l'encapsulation des parfums contenus dans des produits cosmétiques
« à rincer »

Interdiction au 1er janvier 2026

Interdiction au 17 octobre 2029

0,11 %

Produits cosmétiques
« à rincer »266(*)

Interdiction au 1er janvier 2026

Interdiction au 17 octobre 2027

7,31 %

II. Le présent article met en conformité le calendrier national avec le calendrier européen

L'article 31 du projet de loi Ddadue modifie le calendrier national d'interdiction des microplastiques, afin de l'aligner sur le calendrier européen.

Le exempte les dispositifs de diagnostic in vitro de l'interdiction et reporte au 17 octobre 2029 l'interdiction pour les dispositifs médicaux, prévue au 1er janvier 2024.

Le reporte l'interdiction pour les produits cosmétiques « à rincer », prévue au 1er janvier 2026, au 17 octobre 2027 ou au 17 octobre 2029 si ces microplastiques sont destinés à l'encapsulation des parfums.

Le remplace la disposition qui prévoyait des décrets pour interdire d'autres types de produits contenant des microplastiques par un renvoi à l'annexe XVII du règlement Reach.

III. La commission approuve cette coordination juridique, qui renforce la lisibilité de la loi

La commission se félicite de l'adoption d'un calendrier européen d'interdiction des microplastiques, considérant que l'échelon européen est pertinent pour lutter efficacement contre la pollution plastique qui ne connaît pas de frontière.

La commission a adopté deux amendements, visant à corriger une erreur de référence ( COM 44) et à aligner la terminologie avec celle employée en droit européen ( COM-43).

La commission a adopté l'article 31 ainsi modifié.

Article 32
Maintien pour les fonctionnaires des droits acquis
avant le début de certains congés

L'article 32 du projet de loi vise à introduire dans le code général de la fonction publique les dispositions de transposition de la directive (UE) 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil.

Il tend ainsi à prévoir le principe du maintien jusqu'à la fin des congés des droits acquis antérieurement aux cinq congés suivants : congé parental ; congé de paternité et d'accueil de l'enfant ; congé de présence parentale ; congé de solidarité familiale et congé de proche aidant.

Jugeant cette transposition urgente au regard du retard pris par la France, la commission a estimé utile, sur proposition du rapporteur, d'ajouter à la liste des congés pour lesquels le principe du maintien des droits acquis serait posé, les congés de maternité, de naissance, d'adoption et liés à l'arrivée d'un enfant en vue de son adoption ( COM-41).

La commission a adopté l'article 32 ainsi modifié.

I. La France est en retard de près d'un an et demi dans la transposition, dans le droit de la fonction publique, de la directive européenne du 20 juin 2019 relative à l'équilibre

La directive (UE) 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil comporte 22 articles, dont 14 articles doivent être transposés en droit national. Notre droit est d'ores et déjà conforme à 12 d'entre eux ; deux restent donc à transposer, les articles 9 et 10.

La transposition de l'article 9 relève d'un décret en Conseil d'État ; la transposition de l'article 10 (et plus précisément de son premier alinéa) nécessite quant à elle une disposition législative267(*).

Article 10 de la directive - Droits en matière d'emploi

1. Les droits acquis ou en cours d'acquisition par le travailleur à la date de début du congé prévu aux articles 4, 5 et 6268(*) ou de l'absence du travail prévu à l'article 7 sont maintenus jusqu'à la fin dudit congé ou de ladite absence du travail. À l'issue de ce congé ou de cette absence du travail, ces droits, y compris les changements découlant de la législation, des conventions collectives ou de la pratique nationales, s'appliquent.

L'article 10.1 fixe la règle selon laquelle les droits acquis par le travailleur à la date de début de certains congés lui demeurent acquis jusqu'à la fin de ce congé. Sont concernés cinq congés différents : le congé de paternité et d'accueil de l'enfant ; le congé parental ; le congé de présence parentale ; le congé de solidarité familiale ; le congé de proche aidant.

La dernière loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne, promulguée le 9 mars 2023269(*), a permis d'assurer la mise en conformité du code du travail avec cette directive.

En revanche, le droit au maintien des droits acquis antérieurement à certains congés n'est aujourd'hui pas inscrit dans le code général de la fonction publique (CGFP). Les dispositions législatives du code général de la fonction publique posent en effet uniquement le principe du droit aux congés familiaux suivants :

congé parental (articles L. 515-1 à L. 515-9) ;

congé de maternité (articles L. 631-3 à L. 631-5) ;

congé de naissance (article L. 631-6) ;

congé pour l'arrivée d'un enfant en vue de son adoption (article L. 631-7) ;

congé d'adoption (article L. 631-8) ;

congé de paternité et d'accueil de l'enfant (article L. 631-9) ;

congé de présence parentale (articles L. 632-1 à L. 632-4) ;

congé de solidarité familiale (articles L. 633-1 à L. 633-4) ;

congé de proche aidant (articles L. 634-1 à L. 634-4).

L'absence de transposition de cette directive peut aujourd'hui conduire à la perte de certains droits acquis et non utilisés par l'agent avant son départ en congé familial ou parental. Sont concernés les droits dont le bénéfice est conditionné à une périodicité particulière, le plus souvent annuelle, comme le droit à congés annuels, le droit à la formation ou le droit à l'entretien d'évaluation.

S'agissant notamment des congés annuels, le droit de la fonction publique actuel ne prévoit pas de droit automatique au report de congés annuels non pris du fait de congés parentaux ou familiaux, sauf autorisation exceptionnelle du chef de service270(*).

La France a aujourd'hui près d'un an et demi de retard dans la transposition de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019, qui avait fixé un délai de transposition expirant le 2 août 2022.

Le 20 septembre 2022, la France a été ainsi été mise en demeure par le Commission européenne avec un délai de 2 mois de prendre les mesures nécessaires. Le 19 avril 2023, la Commission a, de nouveau, invité la France à transposer la directive dans un délai de deux mois ; dans leur note en réponse à cet avis datée du 23 juin 2023, les autorités françaises ont informé la Commission européenne que la transposition de la directive en question serait effective d'ici le début de l'année 2024271(*).

II. L'article 32 du projet de loi tend à consacrer dans le code général de la fonction publique le principe du maintien aux droits acquis antérieurement à certains congés

Afin d'assurer la conformité du code général de la fonction publique avec l'article 10.1 de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019, l'article 32 du projet de loi vise à compléter cinq articles du CGFP - relatifs respectivement au congé parental, au congé de paternité et d'accueil de l'enfant, au congé de présence parentale, au congé de solidarité familiale et au congé de proche aidant - d'une phrase précisant que le fonctionnaire qui se trouve dans l'un de ces 5 congés « conserve le bénéfice des droits acquis avant le début du congé qu'il n'a pas été en mesure d'exercer en raison de ce congé ».

Consulté sur le fondement de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le Conseil national d'évaluation des normes a rendu un avis favorable tacite le 1er novembre 2023272(*).

Le Conseil commun de la fonction publique (CCFP) aurait dû rendre un avis sur cet article lors de sa réunion du 14 novembre 2023 ; le quorum ayant été atteint en début de séance, l'avis du CCFP est considéré comme rendu sur ce texte, bien que l'ensemble des organisations syndicales aient quitté cette réunion peu après son ouverture273(*).

Du reste, les organisations syndicales n'ont, au cours de la période de dépôt d'amendements précédant la séance du CCFP, porté à la connaissance du Gouvernement aucune réaction ni demande s'agissant de la transposition de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019274(*).

En tout état de cause, les organisations syndicales seront amenées à se prononcer sur les nécessaires mesures réglementaires de transposition de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019. Comme le rappelle le Conseil d'État dans son avis, il conviendra en effet de modifier « les dispositions des décrets relatifs aux congés annuels des fonctionnaires de l'État, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers », ainsi que « les dispositions réglementaires relatives au congé pour solidarité applicables aux fonctionnaires pour prévoir que le fonctionnaire bénéficiant d'un tel congé reste affecté dans son emploi »275(*).

Par ailleurs, il reviendra au règlement de préciser la limite dans laquelle le report des droits acquis sera possible, étant entendu que, comme souligné par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, rien n'impose aux réglementations nationales de prévoir un report des droits acquis qui soit illimité. En la matière, le juge européen impose seulement la mise en oeuvre d'une condition minimale selon laquelle la période de report doit être sensiblement supérieure à la période de référence276(*).

III. La commission a jugé utile de compléter les dispositions de l'article 2 pour les rendre applicables au congé de maternité et d'adoption

La commission juge les dispositions de l'article 32 nécessaires en ce qu'elles permettront de garantir le maintien des droits acquis et qui n'auraient pas été utilisés avant le bénéfice de l'un des congés parentaux ou familiaux cités par la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019, que la France aurait déjà dû transposer depuis près d'un an et demi.

Elle estime utile de compléter les dispositions de l'article 32 pour étendre, comme y invite le Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi277(*), la garantie offerte aux fonctionnaires bénéficiant de l'un des congés visés par la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019 aux fonctionnaires placés dans l'un des quatre congés suivants : le congé de maternité ; le congé de naissance ; le congé pour l'arrivée d'un enfant en vue de son adoption ; et le congé d'adoption. Ainsi, tout fonctionnaire placé en congé familial, quel qu'il soit, bénéficierait du maintien des droits acquis avant le début du congé en question.

À cette fin, la commission a adopté l'amendement COM-41 du rapporteur.

En outre, la commission invite le Gouvernement à prendre dans les meilleurs délais les dispositions réglementaires nécessaires afin d'achever la transposition de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019.

La commission a adopté l'article 32 ainsi modifié.

TITRE VI
DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE POLITIQUE AGRICOLE
Article 33
Délégation de signature de l'État aux régions pour les décisions relatives aux financements de l'État dans le cadre des opérations
du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader)
relevant de la programmation 2014-2022
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à permettre au représentant de l'État dans le département ou la région de déléguer sa signature à l'autorité régionale dans le cadre des décisions relatives aux opérations du Fonds européen agricole pour le développement, et cofinancées par l'État, pour la programmation 2014-2022.

Cette disposition, concertée avec les régions et conforme à la volonté du législateur exprimée à l'occasion du vote de la loi Maptam du 27 janvier 2014, ne peut que faciliter et accélérer le traitement des nombreux dossiers relatifs à la précédente programmation PAC.

La commission a adopté l'article 33 sans modification.

I. La situation actuelle - Les régions gèrent en toute autonomie une partie des aides relevant du Feader

La politique agricole commune (PAC) est une politique historique de l'Union européenne (UE), instituée par le traité de Rome de 1957 et entrée en vigueur en 1962. Définie aux articles 38 à 44 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), elle vise à soutenir les agriculteurs, les filières agricoles et le développement des territoires ruraux.

Les aides mises en place au titre de la PAC se divisent en deux piliers, financés par deux fonds. Le premier pilier est financé par le Fonds européen agricole de garantie (Feaga). Ce pilier, qui mobilise près de 75 % de l'enveloppe PAC pour la programmation 2023-2027, finance principalement des paiements directs et des aides sectorielles. Le second pilier est cofinancé par le Fonds européen pour le développement agricole (Feader). Il vise à cofinancer avec l'État et les régions de nombreuses interventions dont les principales figurent dans l'infographie ci-après.

Source : Chambres d'agriculture

Dans le cadre de la programmation 2014-2022278(*), et sur le fondement de l'article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam)279(*), les régions se sont vu confier, en tant qu'autorités de gestion et à leur demande, les Programmes de développement rural régionaux (PDRR) du Feader280(*). À ce titre, il appartenait aux régions de prendre les décisions d'attribution, de modification et de retrait de ces aides. Le VI de l'article 78 de la loi Maptam, alors en vigueur, permettait au président de région de déléguer sa signature aux agents des services déconcentrés de l'État. Dans la pratique, les aides relevant des régions ont donc été instruites par les services déconcentrés de l'État en leur nom, les régions ne disposant alors pas des moyens humains pour assurer cette mission.

Dans le cadre de la programmation ayant débutée en 2023, les régions281(*) demeurent autorités de gestion des aides « non surfaciques » relevant du Feader282(*). Ces aides sont listées à l'article 78 de la loi Maptam tel que modifié par l'article 1er de l'ordonnance n° 2022-68 du 26 janvier 2022 relative à la gestion du Fonds européen agricole pour le développement rural au titre de la programmation débutant en 2023, et figurent, pour les principales, dans l'infographie ci-dessus283(*). À ce titre, elles ont bénéficié d'un transfert d'effectifs des services déconcentrés de l'État pour assurer l'instruction des demandes d'aides, réduisant ainsi l'enchevêtrement des responsabilités. Les fonds correspondants au cofinancement estimé de ces aides, 100 millions d'euros, ont également été transférés aux régions de sorte qu'elles aient, pour la programmation actuelle, la pleine autonomie dans la gestion des aides relevant de leur compétence.

De nombreuses décisions nouvelles ou modificatrices relatives à des aides relevant de la précédente programmation demeurent à prendre pour les dossiers dont la réalisation couvre plusieurs années. La direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (Masa) indique que pour le seul plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE), quelque 10 000 à 15 000 dossiers pourraient faire l'objet d'avenant entre 2023 et le 31 décembre 2025, date limite pour l'utilisation des fonds européens au titre de la précédente programmation.

Or, ces aides ont fait l'objet d'un engagement juridique intégrant une contribution financière de l'État. Les nouvelles décisions appelleront donc, en l'état actuel du droit, une signature du représentant de l'État, alors même que l'ensemble des moyens humains permettant l'instruction des dossiers est désormais transféré aux régions. Sans possibilité pour l'État de déléguer sa signature aux régions, un allongement des délais de traitement des dossiers paraît inévitable puisque chaque dossier instruit par les services des régions devra être transmis aux services de l'État déconcentré pour que le préfet puisse y apposer sa signature.

Dès lors, prévoir la possibilité pour le représentant de l'État de déléguer sa signature permettrait aux régions d'instruire puis de prendre directement les décisions relatives à ces dossiers, ce qui représente un gain de temps pour les services mais surtout pour les bénéficiaires.

II. Le dispositif envisagé - Déléguer la signature du préfet au président de région pour les décisions relatives à la précédente programmation PAC et faisant l'objet d'un cofinancement de l'État

L'article 33 vise à permettre au représentant de l'État dans le département ou la région de déléguer sa signature au président du conseil régional et aux agents placés sous son autorité pour les décisions relatives aux financements apportés par l'État dans le cadre des décisions relevant du de la programmation 2014-2022 du Feader.

Pour ce faire, il est proposé de compléter le chapitre VII du titre II de la loi Maptam par un article 78-1 permettant cette délégation. Les préfets pourraient ainsi, par arrêté préfectoral, déléguer leur signature au président du conseil régional.

L'étude d'impact fournie par le Gouvernement indique que des groupes de travail ont été réunis avec Régions de France et des représentants des autorités de gestion régionales, et que les conseils régionaux ont sollicité cette possibilité de délégation. Elle indique également que le Conseil national d'évaluation des normes a rendu un avis favorable tacite.

Dans sa contribution écrite, l'association Régions de France indique : « il n'y a aucune raison pour que ces dossiers [issus de la précédente programmation], où les cofinancements de l'État n'interviennent plus et pour lesquels ses services n'ont plus d'agents pour les traiter, transitent encore au sein de l'État. Cette délégation de signature est donc essentielle pour faire respecter les dispositions issues de l'ordonnance [n° 2022-68 du 26 janvier 2022], et permettre ainsi d'éviter un engorgement inutile des services administratifs. »

III. La position de la commission - Une disposition utile pour faciliter la célérité du traitement des dossiers relevant de la précédente programmation du Feader

La commission et son rapporteur ne peuvent qu'approuver une disposition visant à faciliter le traitement des dossiers relevant du Feader. Les interlocuteurs sollicités par le rapporteur accueillent également favorablement cette disposition. Les délais de réponse auxquels peuvent faire face les agriculteurs en raison du nombre de dossiers à traiter dans le cadre des multiples dispositifs relevant de la PAC constituent un poids pour la profession, et toutes les améliorations visant à accélérer et à simplifier les démarches, dans le respect des compétences des collectivités, ne peuvent être que soutenues par le Sénat.

La commission a adopté l'article 33 sans modification.

Article 34
Possibilité pour les établissements de l'élevage de recevoir
des missions relatives à la délivrance et la gestion des matériels,
procédés et documents d'identification et de circulation des animaux
ainsi qu'à la collecte des données relatives à l'identification
et à la traçabilité des animaux
Article examiné dans le cadre de la législation en commission

Cet article vise à donner une base juridique solide aux missions exercées par l'établissement de l'élevage (EdE) relatives à la délivrance et la gestion de matériels, procédés et documents d'identification et de circulation des animaux ainsi qu'à la collecte des données relatives à l'identification et à la traçabilité des animaux.

Or, la rédaction du projet de loi initial ne permet pas de sécuriser suffisamment les missions de l'ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la traçabilité animale. Il ne prend notamment pas en compte l'évolution, déjà actée par ordonnance, du statut juridique de l'EdE.

À l'initiative du rapporteur, la commission a adopté quatre amendements de réécriture de l'article de manière à, d'une part, sécuriser l'intervention des divers acteurs en matière de traçabilité animale en explicitant les missions des chambres d'agriculture dans le domaine de la traçabilité des ruminants et, d'autre part, à mettre en cohérence la partie législative du code rural et de la pêche maritime relative aux missions du réseau des chambres d'agriculture en matière de collecte et traitement des informations relatives aux opérateurs ainsi qu'à la traçabilité des ruminants avec les dispositions déjà existantes.

Le code rural prévoit déjà l'évolution du statut de l'EdE, mais de manière différée, à compter du 21 avril 2024, et n'en tire donc pas pleinement les conséquences pour les missions des chambres d'agriculture, dont l'EdE est devenu un service. Les amendements procèdent donc aux clarifications nécessaires quant aux missions du réseau des chambres et de Chambres d'agriculture France (CDAF), qui est placé à sa tête. Ils prévoient une mesure transitoire jusqu'au 1er janvier 2026 pour permettre, d'une part, aux chambres n'ayant pas encore intégré l'EdE parmi leurs services de se mettre en conformité avec les dispositions législatives nouvelles et, d'autre part à CADF de mettre en place les outils techniques de collecte des informations relatives aux opérateurs, conformément au droit européen.

La commission a adopté l'article 34 ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une refonte difficile du suivi des établissements et des animaux d'élevage

A. Les évolutions de la législation européenne ont conduit à une adaptation du droit interne en matière d'identification et de traçabilité des animaux ainsi que d'identification des opérateurs

Adopté sur le fondement de l'article 114, relatif au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres, et de l'article 168, relatif à l'objectif d'atteinte d'un niveau élevé de protection de la santé humaine du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), le règlement (UE) 2016/429 relatif aux maladies animales transmissibles284(*), dit « législation sur la santé animale » (LSA) fixe les grands principes en matière de prévention et d'éradication des maladies animales transmissibles. Il crée notamment des obligations liées à l'identification et à la traçabilité des animaux, impose la notification de leurs mouvements nationaux et internationaux, ainsi que la tenue de bases de données comportant également l'identification des opérateurs, sous la responsabilité des États membres. Ce règlement, applicable depuis le 21 avril 2021, a conduit à des évolutions importantes des dispositions législatives et réglementaires internes pour mettre en conformité le droit français au droit européen.

L'ampleur de la refonte avait conduit le Sénat, et la commission des affaires économiques examinant au fond la disposition sur délégation de la commission des finances, à accepter l'habilitation demandée par le Gouvernement dans le cadre de l'article 23285(*) de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière. L'article 24 de cette même loi a complété, à l'initiative du Gouvernement en première lecture à l'Assemblée nationale, l'article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) relatif aux missions de Chambres d'agriculture France en confiant deux nouvelles missions à l'établissement public, découlant des obligations du règlement LSA286(*).

L'ordonnance n° 2021-1370 du 20 octobre 2021 relative aux mesures de surveillance, de prévention et de lutte contre les maladies animales transmissibles a procédé ainsi à l'adaptation du CRPM, et ajusté de façon marginale le code de l'environnement et le code de la santé publique.

Concernant plus spécifiquement les règles d'identification et de traçabilité des animaux, l'ordonnance a adapté, aux articles 3 et 5, les dispositions du chapitre II du titre Ier du livre II du CRPM, relatif à la traçabilité des animaux. L'article L. 212-2 est la clef de voûte juridique des règles entourant l'identification des opérateurs et la traçabilité des animaux. Son premier alinéa dispose que « Pour assurer la traçabilité et les suivis statistique et administratif des animaux dont l'identification est obligatoire en application du règlement (UE) 2016/429 du 9 mars 2016 et de la présente section et pour permettre d'identifier leurs propriétaires ou détenteurs, les données relatives à l'identification de ces animaux, le nom et l'adresse de leurs propriétaires ou détenteurs successifs et la mention de l'exécution des obligations administratives auxquelles ces derniers sont astreints peuvent être enregistrés dans un fichier national et faire l'objet d'un traitement automatisé dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »

Antérieurement à l'ordonnance de 2021, les missions relatives à l'identification des animaux d'espèces bovine, ovine, caprine et porcine étaient dévolues, par les articles L. 212-6 et L. 212-7 du CRPM, à l'établissement de l'élevage (EdE) défini à l'article L. 653-12 du même code287(*). L'EdE exerçait, jusqu'à la publication de l'ordonnance de 2021, des missions relatives à « la mise en oeuvre des règles d'identification des animaux des espèces mentionnées à l'article L. 212-6 » et vérifiait « le respect de ces règles par leurs détenteurs ». À la suite d'une erreur, ainsi que l'indique la direction générale de l'alimentation (DGAL), et sans que l'étude d'impact annexée au projet de loi ne le mentionne, la compétence de l'EdE a été supprimée, au profit d'une mention « aux personnes agréées », en application de l'article L. 212-7.

L'établissement de l'élevage, un acteur central

L'EdE a été institué par l'article 13 de la loi n° 66-1005 du 28 décembre 1966 sur l'élevage pour accompagner le développement de l'élevage, assurer l'identification des animaux et aider au progrès génétique.

On dénombrait au 1er janvier 2022 48 EdE.

Les missions de l'EdE sont définies à l'article L. 653-12 du CRPM. Elles sont au nombre de deux :

· « L'établissement de l'élevage contribue au développement de l'élevage des animaux des espèces bovine, ovine, caprine, porcine, cunicoles et avicoles dans sa circonscription en associant les différents acteurs des filières concernées » ;

· « Dans le domaine de l'identification, cet établissement assure l'enregistrement de la parenté des bovins, défini comme l'enregistrement des informations relatives aux parents des animaux, fournies par l'éleveur naisseur, ainsi que de la race qu'il a déclarée ».

L'EdE prenait également en charge l'identification des espèces bovine, ovine, caprine et porcine, conformément à l'article L. 212-7 du CRPM dans sa rédaction antérieure à 2021. Cette mission a continué matériellement d'être assurée par l'EdE en ce qui concerne les ruminants, en lien avec les gestionnaires des bases de données.

L'EdE est également, toujours sans fondement juridique, en charge, pour les ruminants, de la délivrance et de la gestion des matériels et procédés d'identification et des documents d'identification et de circulation des animaux.

Enfin, l'EdE assure, là encore sans fondement juridique, la collecte des informations relatives aux établissements.

L'objet de l'article 34 du présent projet de loi est de consacrer ces missions dans la loi. Plus précisément, l'article 34 vise à redonner une base juridique à la mission relative à l'identification. Concernant la délivrance et la gestion des matériels, aucune base juridique antérieure à l'ordonnance 2021-1370 n'a pu être identifiée, ce qui semble indiquer que cette mission est depuis un certain temps dénuée de fondement juridique de rang législatif. La mission de collecte des données relatives aux établissements figure à l'article L. 613-1 du CRPM, qui renvoie à l'article à l'article L. 212-7. Or, l'EdE n'est plus mentionné à cet article.

Le statut de l'EdE a évolué ces dernières années, l'article 9 de l'ordonnance n° 2006-1548 du 7 décembre 2006288(*) l'ayant intégré aux chambres d'agriculture, dont il constitue désormais un service. Toutefois, pour des raisons historiques, trois EdE sur le périmètre de cinq chambres d'agriculture continuent de disposer de la personnalité juridique. Quel que soit le statut de l'EdE, ce dernier doit recevoir, conformément à l'article L. 653-12 du CRPM, un agrément du ministère chargé de l'agriculture. Au 21 avril 2024, le statut de l'EdE sera unifié puisque, conformément à l'article 8 de l'ordonnance n° 2021-1370, il sera soit un service d'une chambre d'agriculture, soit un service commun à plusieurs chambres289(*), sans personnalité juridique290(*) ni agrément du ministère chargé de l'agriculture291(*). Cette nouvelle réforme des EdE constitue l'aboutissement de leur progressive intégration aux chambres d'agriculture, entamée en 2006.

Dès lors, si pour certaines missions historiques et bien précises, il peut être pertinent de renvoyer, au sein du CRPM, à l'EdE, il apparaît désormais plus opportun de renvoyer directement aux chambres d'agriculture, dont l'EdE est un service.

B. Des dispositions législatives qui ne prennent plus en compte les missions des EdE en matière d'identification des opérateurs292(*), de traçabilité animale et de délivrance des matériels

Le schéma actuel en matière d'identification des opérateurs et de suivi des animaux n'est pas uniforme et connaît encore actuellement de profondes évolutions à la suite des modifications du CRPM précédemment évoquées et compte tenu de la nécessité de refondre entièrement le système d'information de la direction générale de l'alimentation (Sial). Il importe de distinguer deux grandes missions : la mission de collecte des informations sur les opérateurs d'une part, et l'identification et le suivi des animaux d'autre part.

1) La collecte des informations sur les opérateurs : action locale des EdE et centralisation auprès de la BDNI à ce jour, appui local des EdE et centralisation auprès de la BNO demain

La mission relative à la collecte des informations relatives aux opérateurs est appelée à reposer sur CDAF. Il importe de distinguer la situation actuelle de la situation cible, et d'identifier le rôle de l'EdE au sein de ces deux schémas.

Le schéma actuel est fondé sur l'action locale des EdE, auprès desquels les établissements d'élevage doivent se déclarer293(*). Les bases locales de l'EdE transmettent ensuite les informations collectées au ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (Masa), qui les centralise au sein de la base nationale de l'identification (BDNI), élément central du Sial.

En raison de l'obsolescence technique de cette base instituée en 1999, et au regard des nouvelles informations dont la collecte est rendue obligatoire par le droit européen, une nouvelle architecture informatique est en cours de construction hébergée et gérée non plus par la DGAL, mais par CDAF. L'établissement public s'est en effet vu confier, conformément à l'article L. 513-1 du CRPM, « la collecte et le traitement de données relatives aux exploitations, collectées par les établissements mentionnés à l'article L. 212-7294(*) ». Pour ce faire, une base nationale des opérateurs (BNO) hébergée et gérée par CDAF est actuellement en cours de construction. La mission de « premier maillon » de la collecte dévolue à l'EdE demeure puisque son rôle sera d'accompagner les agriculteurs, sur le terrain, dans l'utilisation du logiciel leur permettant de renseigner directement la BNO, ou de collecter les déclarations papier pour ensuite renseigner la BNO. La BNO alimentera à son tour le Sial, rebaptisé système informatique d'enregistrement des mouvements des animaux (Sinema), en renseignant une vaste base de donnée relative aux opérateurs amont et aval intitulée Usagers.

La base nationale d'identification (BDNI) et la refonte du système d'information de la direction générale de l'alimentation (Sial)

Mise en place en 1999, cette base a pour finalité originelle, dans un contexte de crise de la vache folle, de centraliser les données d'identification des bovins directement au sein du ministère chargé de l'agriculture. Les finalités de la base se sont progressivement élargies, pour devenir la clef de voûte du Sial. À ce jour, les principales finalités de la BDNI sont relatives :

- à la centralisation des données relatives aux opérateurs pour les espèces bovine, ovine, caprine et porcine transmises soit par l'EdE soit par des bases déléguées ;

- à la centralisation des données relatives à l'identification et au suivi de ces mêmes espèces transmises selon les mêmes modalités ;

- au calcul et au versement des aides PAC.

En raison de l'ancienneté de la BDNI et des nouvelles obligations relatives au suivi des établissements et des animaux, la DGAL a décidé de refondre son Sial. C'est le projet Refonte du système d'information de l'alimentation (Resital), qui vise à mettre en oeuvre un système informatique d'enregistrement des mouvements des animaux (Sinema), dont le schéma simplifié est exposé ci-après, repose notamment sur :

- la mise en oeuvre d'une base nationale des opérateurs (BNO) confiée à CDAF et destinée à recueillir les informations relatives aux établissements amont mais aussi, conformément à la LSA, à de nombreux acteurs de l'aval agricole comme les transporteurs295(*) ;

un suivi de l'identification et de la traçabilité des animaux assuré par des bases déléguées gérées, par espèce, par des opérateurs agréés sélectionnés par appel d'offres.

Au niveau de la DGAL, les informations de la BNO ont vocation à être centralisées au sein d'une base intitulée Usagers296(*). Cette base vise également à centraliser les données relatives aux opérateurs dans le domaine des équidés et des carnivores domestiques. Les informations relatives à l'identification et la traçabilité des animaux, équidés compris, ont quant à elles vocation à être centralisées au sein d'une base intitulée Entrepôt Sinema.

Le nouveau Sial, dont la date de mise en marche a été initialement fixée au 21 avril 2024, s'inscrit dans la logique « dites-le nous une fois », puisque les informations qu'il centralisera seront accessibles à l'ensemble des destinataires prévus par les textes, dans la limite de leurs attributions et aux seules fins prévues à l'article L. 212-2 du CRPM297(*). L'idée étant que les opérateurs, au premier rang desquels les agriculteurs, ne soient pas contraints, comme actuellement, de transmettre plusieurs fois les mêmes informations à divers services administratifs.

Source : DGAL

Au niveau européen, la base de données trade control and expert system (Traces), gérée par la Commission européenne, sert à déclarer les mouvements des animaux sur le territoire de l'Union européenne. Il n'y a aucun lien entre les systèmes de la Commission européenne et le SIAL. La saisie dans les systèmes de la Commission est effectuée directement par les opérateurs pour les échanges intra-UE via Traces.

CDAF indique qu'une nouvelle base de données, bovine exchange (Bovex), est à l'état de projet. Reliée à Traces, elle vise à permettre l'échange automatique de données d'identifications bovines entre des bases de données nationales, permettant ainsi que faciliter le commerce entre les États membres.

Actuellement, la mission de collecte des informations sur les opérateurs n'a pas de fondement juridique dans le code, ce à quoi ne remédie pas l'article 34. En effet, en complétant l'article L. 212-7 dans sa rédaction issue de l'ordonnance de 2021 l'article 34 reste muet sur la mission relative à l'identification des opérateurs. Il permet certes de rétablir la cohérence juridique avec l'article L. 513-1, qui mentionne l'EdE par un renvoi à l'article L. 212-7. Mais la mission de CDAF de collecte des informations relatives aux opérateurs figurant à l'article L. 513-1 est une mission « à venir », non mise en oeuvre tant que la BNO ne sera pas fonctionnelle.

La BNO n'étant pas opérationnelle, le schéma demeure celui où l'EdE collecte l'information pour la verser à la BDNI.

Ce n'est qu'à partir du 21 avril 2024, en lien avec la nouvelle mission de CDAF et l'activation de la BNO que « L'établissement de l'élevage mentionné à l'article L. 653-12 est chargé de la collecte des données relatives aux opérateurs enregistrés conformément au règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016. Ces données sont centralisées par l'assemblée permanente des chambres d'agriculture au titre de sa mission de collecte et de traitement des données prévue à l'article L. 513-1, dans des conditions définies par décret. »298(*) Dans l'intervalle, l'EdE collecte toujours les informations, mais sans en avoir juridiquement l'habilitation299(*).

CDAF a indiqué au rapporteur que la date initialement envisagée du 21 avril 2024 pour l'entrée en fonction de la BNO ne pourrait pas être tenue compte tenu du retard pris dans sa construction. Un ajustement semble indispensable300(*).

La collecte des informations sur les opérateurs est en revanche plus clairement organisée s'agissant des carnivores domestiques. La société Ingenium Animalis301(*) a été agréée, sur le fondement de l'article L. 212-2 du CRPM, en qualité de gestionnaire de la base de données pour ces espèces. Il s'agit de la base « Identification des carnivores domestiques » (I-CAD).

De même, concernant les équidés, l'Institut français du cheval et de l'équitation, établissement public à caractère administratif est, conformément à l'article L. 212-9 du même code, chargé de la gestion du fichier des détenteurs d'équidés.

2) La traçabilité des animaux d'élevage s'appuie sur un grand nombre d'acteurs suivant une logique d'espèce

L'identification et le suivi des animaux répondent à des schémas différents selon les espèces, mais suivent une logique commune à savoir, pour les ruminants, l'action de « premier maillon » de l'EdE. De même que pour l'identification des opérateurs, le schéma relatif à la traçabilité des animaux évolue actuellement avec l'objectif affiché par l'État d'avoir à terme un gestionnaire de base déléguée par espèce ou par grande famille d'animaux, opérant la collecte des informations et les transférant au sein de la base centrale nommée Entrepôt Sinema.

S'agissant des carnivores domestiques, les vétérinaires renseignent les informations obligatoires directement au sein de la base déléguée I-CAD précédemment évoquée.

Concernant les équidés, l'institut français du cheval et de l'équitation est l'autorité chargée de l'édition et de la délivrance du document unique d'identification302(*).

En aviculture, le schéma n'est à ce jour pas totalement stabilisé. La LSA n'impose pas de règles de traçabilité pour les espèces avicoles, alors même que la problématique de l'influenza aviaire se pose avec acuité année après année. Aussi, les interprofessions se sont réunies pour mettre en place et gérer des bases de données. Le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog) et le Comité national pour la promotion de l'oeuf (CNPO) ont mis en place la BD avicole permettant de répondre aux obligations qui concernent l'ensemble des établissements détenant des animaux, relatives à l'identification des opérateurs, mais aussi pour mettre en place une traçabilité par lot. Le Syndicat national des producteurs de gibier de chasse (Interprochasse) a récemment intégré cette base. L'Association nationale interprofessionnelle de la volaille de chair (Anvol) a mis au point, pour ses adhérents, ATM avicole, dont les fonctions sont similaires à la BD avicole. La traçabilité des espèces avicoles a été rendue obligatoire par un accord interprofessionnel. Un décret de 2022303(*) rend applicables aux animaux des espèces avicoles les dispositions de l'article L. 212-2 du CRPM relatives à l'identification des opérateurs et à la traçabilité des animaux. À la suite d'un appel à candidatures visant à créer une base unique, l'association Basavi, composée des quatre interprofessions mentionnées et de CDAF, a été retenue pour construire une base unique avicole. Celle-ci a vocation, comme l'ensemble des bases déléguées, à faire remonter au niveau central les informations relatives aux espèces avicoles, ce qui n'est actuellement pas le cas avec les deux bases précédemment décrites. Cette base n'est pas encore opérationnelle.

S'agissant des animaux de rente hors bovin304(*) (ovin, caprin et porcin), la DGAL indique que les détenteurs d'animaux déclarent leur identification et leurs mouvements auprès de personnes agréées gérant des « bases mouvements déléguées », conformément à la possibilité ouverte par le second alinéa de l'article L. 212-2 du CRPM. Ces personnes sont Ovinfos, BDPORC et Normabev, qui gèrent les bases du même nom.

Concernant les porcs, la filière est très structurée autour de l'association BDPORC, regroupant 16 parties prenantes de la filière porcine. Les éleveurs renseignent aujourd'hui les informations obligatoires sur l'outil éponyme par saisie directe sur internet, par l'intermédiaire d'une délégation à l'opérateur de transport ou bien par saisie de l'EdE. La filière est très intégrée et pyramidale, avec relativement peu d'éleveurs, et la gestion de la traçabilité n'y pose aucun problème.

Concernant les ovins et les caprins, les déclarations s'effectuent sur la base Ovinfos, du nom de l'association constituée de l'association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev) et de CDAF. Là encore, les éleveurs notifient les mouvements de leurs animaux par l'intermédiaire de l'EdE, via l'utilisation d'un logiciel de gestion de troupeau ou bien par l'intermédiaire d'un délégataire (coopérative, négociant, marché, abattoir). Dans les faits, le rôle des chambres d'agriculture, comme pour la filière bovine, est indispensable puisqu'elles seules, par l'intermédiaire de leurs EdE, disposent d'un réseau d'appui efficace.

Concernant enfin les bovins, les opérateurs effectuent leurs déclarations auprès de l'EdE, qui renseigne ensuite la BDNI, directement gérée par l'État. En revanche, au stade de l'abattage, les notifications s'effectuent par l'intermédiaire de l'association Normabev, gérée par l'interprofession Interbev. Cette étape dans la traçabilité des bovins est primordiale et intimement liée au prix payé au producteur. Elle est gérée par la filière. Les notifications d'abattage sont ensuite transmises à la BDNI. Il est à noter que l'EdE a également pour mission d'assurer la gestion de la certification de la parenté des bovins. Cette mission historique de l'EdE est la seule qui subsiste explicitement au sein de l'article L. 653-12 du CRPM relatif à ses missions305(*).

En 2022, la DGAL a procédé à un appel d'offres pour la constitution d'une base déléguée bovine, conformément au schéma qu'il souhaite mettre en oeuvre. Selon les informations transmises au rapporteur, deux candidats s'étaient portés volontaires, une entreprise privée ainsi qu'une association formée de CDAF, Interbev et du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel). Cet appel d'offres s'est avéré infructueux dans la mesure où le prestataire privé ne disposait pas d'un réseau d'appui capable d'assurer la remontée efficace et exhaustive des informations relatives aux bovins d'une part, et, concernant l'association, en raison des financements prévus par l'appel d'offres, jugés très insuffisants pour construire une base déléguée. Aussi, la mission demeure prise en charge, comme elle l'a toujours été, à l'exception de l'abattage, par les chambres d'agriculture.

L'ensemble des bases évoquées, à l'exception des bases relatives à l'aviculture306(*), font remonter les informations à la BDNI et demain à l'entrepôt Sinema.

En conclusion, il convient de noter que l'EdE demeure un élément central dans le processus d'identification et de traçabilité des animaux d'élevage, particulièrement des bovins, ovins et caprins. Il en est l'unique vecteur concernant les bovins. Concernant les ovins et les caprins, la situation est en réalité similaire, puisque le réseau d'appui à la base déléguée, en partie d'ores et déjà gérée par CDAF, est en réalité l'EdE, donc le réseau des chambres d'agriculture, dont il constitue un service (ou un service commun à plusieurs chambres), dans la grande majorité des territoires.

Cette réalité de terrain est en décalage avec notre législation qui ne mentionne plus ce rôle, depuis la nouvelle rédaction de l'article L. 212-7 du CRPM issu de l'ordonnance de 2021.

S'agissant enfin des matériels, documents et procédés d'identification de circulation des animaux, l'article L. 212-7 du CRPM indique que le ministre en charge de l'agriculture peut confier la mission de leur délivrance aux personnes agréées gérant les bases précédemment évoquées. CDAF indique que l'EdE se charge toujours de remplir cette mission concernant les bovins, les caprins et les ovins. Concernant les porcins et les productions de l'aviculture, les opérateurs peuvent s'approvisionner librement, sans passer par l'EdE, l'identification n'étant pas individuelle mais par lot. Pourtant, cette mission de l'EdE n'est pas consacrée dans notre droit.

II. Le dispositif envisagé - Redonner un fondement juridique aux missions de l'EdE

L'article 34 vise à compléter l'article L. 212-7 du code rural et de la pêche maritime par un alinéa visant à ouvrir la possibilité pour l'EdE d'exercer des missions relatives à la délivrance et la gestion des matériels et procédés d'identification et des documents d'identification et de circulation des animaux, ainsi qu'à l'identification et la traçabilité des animaux.

Cependant, la rédaction de l'article 34 ne semble pas être de nature, d'une part, à sécuriser l'ensemble des missions de l'EdE, et, d'autre part, à reconnaître le rôle central des chambres d'agriculture dont l'EdE est un service.

Le rapporteur identifie un triple vide juridique relatif aux missions de l'EdE :

- vide juridique relatif à la mission d'identification et de collecte des données des opérateurs détenant des animaux ;

- vide juridique relatif à la mission d'identification et de traçabilité des ruminants ;

- vide juridique relatif à la mission de délivrance et de gestion des matériels et procédés d'identification et des documents d'identification et de circulation des animaux.

La rédaction proposée ne permet pas de combler le premier vide juridique identifié.

Plus encore, la rédaction proposée ne tient pas compte de l'évolution du statut de l'EdE. Dès lors, il ne paraît plus opportun, pour des missions aussi structurantes que celles relatives à l'identification des animaux, de renvoyer à un service des chambres d'agriculture, alors que la bonne logique voudrait que ces mêmes chambres soient directement mentionnées dans le code.

Par ailleurs, l'évolution des missions de CDAF, souhaitée par le ministère, tend à faire de cet établissement public la tête de pont du réseau des chambres d'agriculture, de manière à assurer une cohérence d'ensemble dans la mise en oeuvre des missions du réseau des chambres d'agriculture. Le premier alinéa de l'article L. 513-1 du CRPM est à ce titre dénué de toute ambiguïté, puisqu'il dispose que « Chambres d'agriculture France est l'établissement public, placé à la tête du réseau défini à l'article L. 510-1 ». Cela est particulièrement le cas dans la présente matière puisque CDAF a d'ores et déjà pour mission de construire et de gérer la BNO307(*), alimentée en amont par son réseau des chambres. Aussi, le CRPM ne saurait, en toute logique, rester muet quant au rôle de CADF dans le suivi et la traçabilité des ruminants.

Enfin, la rédaction de l'article 34, par sa formulation vague faisant référence aux « animaux », est de nature à fragiliser les missions d'autres acteurs bien établis, en laissant entendre que l'EdE pourrait, par décision unilatérale de l'autorité réglementaire, reprendre leurs missions. Tel est le cas de l'IFCE concernant la traçabilité des équidés, de la SAS Ingénium Animalis pour celle des carnivores domestiques, de l'association BDPORC pour les suidés ainsi que l'association, pour l'aviculture, BD avicole et ATM avicole.

III. La position de la commission - Clarifier le rôle pilote des chambres d'agriculture, sous l'autorité de Chambres d'agriculture France

A. Chambres d'agriculture France est d'ores et déjà le point focal de la traçabilité des bovins, ovins et caprins

L'article 24 de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière a complété les prérogatives de CDAF en matière de collecte et de traitement des données relatives aux opérateurs et de collecte et le traitement des données relatives à l'identification et la traçabilité des animaux. Aussi, il est manifeste que CDAF a vocation à devenir le point central de la collecte de l'ensemble de ces informations, non seulement relatives aux opérateurs (création de la BNO), mais aussi relatives, au regard des missions d'ores et déjà exercées par les EdE, d'identification et de la traçabilité des ruminants.

À ce titre, l'article L. 513-1 pose question dans la mesure où il instaure une simple faculté des chambres à assurer ces missions, alors qu'elles les assurent dans les faits.

Les filières porcine et avicole, très structurées et pyramidales, avec un nombre relativement restreint d'éleveurs, disposent d'une organisation efficace. L'association BDPORC gère depuis plusieurs années l'organisation de la traçabilité de sa filière sans difficulté. Concernant l'aviculture, les obligations de traçabilité ne découlent pas de la LSA et la filière a su s'organiser, sur la base d'accords interprofessionnels, pour répondre aux exigences figurant au CRPM308(*).

C'est donc bien sur la question du suivi des ruminants que le CRPM n'est à ce jour pas clarifié, et l'article 34, tel que proposé par le texte du projet de loi, n'est pas de nature à opérer cette clarification.

B. Un besoin de clarté au sein du code rural : qui fait quoi et sous l'autorité de qui ?

Le rapporteur a proposé à la commission de réécrire l'article 34 du projet de loi pour permettre à l'ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la traçabilité animale d'avoir une vision claire du champ de compétences des chambres d'agriculture et, par effet miroir, de leur propre champ de compétences.

Les amendements proposés par le rapporteur visent à clarifier deux situations bien distinctes : la situation actuelle, avant l'entrée en fonction de la BNO, et la situation future, après l'entrée en fonction de la BNO et l'entrée en vigueur de la rédaction de l'article L. 653-12 du CRPM relatif à l'EdE. La date du 21 avril 2024 n'étant pas réaliste, comme l'indique CDAF et le confirme la DGAL, la date du 1er janvier 2026 a été retenue.

Les amendements visent à sécuriser juridiquement les missions relatives à :

- la collecte des informations relatives aux opérateurs ;

- la collecte des informations relatives aux ruminants et à leur traçabilité ;

- la mission de délivrance des matériels, intimement liée à la mission précédente.

Aussi, la commission a adopté :

- un amendement COM-50 du rapporteur de réécriture de l'article 34. Cet amendement rétablit l'article L. 212-6 du CRPM dans une rédaction indiquant que les missions de collecte et de traitement des données relatives à la traçabilité des animaux des espèces bovine, ovine et caprine, ainsi que de délivrance et de gestion des matériels et procédés d'identification et des documents d'identification et de circulation de ces espèces, sont confiées aux chambres d'agriculture et soumises à un avis conforme de CDAF. Il complète et met en cohérence l'article L. 212-7 en retirant aux personnes agréées la possibilité de se voir attribuer, par l'autorité réglementaire, la mission relative aux matériels pour ces mêmes espèces. Il aménage enfin la transition entre la situation actuelle et la situation « cible » en indiquant que l'article L. 212-6 ainsi rétabli entre en vigueur le 1er janvier 2026 et que, dans l'intervalle, les missions mentionnées à cet article sont exercées par l'EdE ;

- un amendement COM-51 réécrivant, avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2026, le dernier alinéa de l'article L. 513-1 pour tirer les conséquences du rétablissement de l'article L. 212-6 relatif aux missions des chambres d'agriculture ;

- un amendement COM-52 tirant la conséquence juridique de la pleine intégration de l'EdE en tant que service des chambres, conformément à l'article L. 613-12 du CRPM, en modifiant l'article L. 513-1 en son alinéa relatif à la mission de CDAF de collecte des données relatives aux opérateurs, par la substitution de la référence à l'EdE par une référence aux chambres d'agriculture ;

- un amendement COM-53 de coordination en ce qu'il modifie le 6° de son article 3 l'ordonnance n° 2021-1370 qui confiait initialement, avec effet au 21 avril 2024, à l'EdE, dans un article L. 212-3, la mission de collecte des données relatives aux opérateurs. La référence aux chambres d'agriculture est substituée à celle de l'EdE. À l'article 11 de cette même ordonnance, relatif à la date d'entrée en vigueur de la disposition précitée ainsi que de la nouvelle rédaction de l'article L. 653-12 relatif à l'EdE, il substitue la date du 1er janvier 2026 à celle du 21 avril 2024.

La commission a adopté l'article 34 ainsi modifié.


* 3 Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation.

* 4 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (Article 161).

* 5 Règlement (CE) n° 924/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 modifié, concernant les paiements transfrontaliers dans la Communauté.

* 6 Règlement (UE) n° 260/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 14 mars 2012 modifié, établissant des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros et modifiant le règlement (CE) n° 924/2009.

* 7 Règlement (UE) n° 2015/751 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 relatif aux commissions d'interchange pour les opérations de paiement liées à une carte.

* 8 Loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (Article 4).

* 9 Pour Alternative Fuels Infrastructure Regulation (Afir).

* 10 Règlement (UE) 2023/1804 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/UE du Parlement européen et du Conseil.

* 11 Directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs.

* 12 Ainsi que des objectifs pour les infrastructures de recharge électriques réservées aux véhicules utilitaires lourds électriques.

* 13 Volet « Énergie » du Paquet « Ajustement à l'objectif 55 » : face à la dépendance énergétique, comment décarboner l'économie ?, Rapport d'information n° 584 (2021-2022), déposé le 24 mars 2022, p. 60.

* 14 Proposition de résolution en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », 5 avril 2022.

* 15 Pour les points de recharge ouverts au public dont la puissance de sortie est inférieure à 50 kW.

* 16 Soit avant le démarrage de la session de recharge.

* 17 Pour les points de recharge ouverts au public dont la puissance de sortie est supérieure à 50 kW.

* 18 Soit avant le démarrage de la session de recharge.

* 19 Pour les points de recharge ouverts au public dont la puissance de sortie est inférieure à 50 kW.

* 20 Soit avant le démarrage de la session de ravitaillement.

* 21 Décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 relatif aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques et portant diverses mesures de transposition de la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs.

* 22 Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna sont également des ZNI.

* 23 La sécurité des produits alimentaires est quant à elle encadrée par le règlement n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.

* 24 La liste de ces législations d'harmonisation sectorielles figure à l'annexe I du règlement 2019/1020 relatif à la surveillance de marché pour les produits manufacturés.

* 25 La directive n° 2001/95/CE a été transposée par les ordonnances n° 2004-670 du 9 juillet 2004 et n° 2008-810 du 22 août 2008, avant que l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 n'opère une refonte de la partie législative du code de la consommation.

* 26 Article L. 421-1 du code de la consommation.

* 27 Article L. 421-2 du code de la consommation.

* 28 Article L. 421-3 du code de la consommation.

* 29 Articles L. 421-5 à L. 421-7 du code de la consommation.

* 30 Articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de la consommation.

* 31 Article L. 423-4 du code de la consommation.

* 32 Mentionnées aux articles L. 121-2 à L. 121-4 du livre Ier du code de la consommation.

* 33 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur.

* 34 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

* 35 Règlement (UE) 2019/1020 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 sur la surveillance du marché et la conformité des produits, et modifiant la directive 2004/42/CE et les règlements (CE) no 765/2008 et (UE) no 305/2011.

* 36 Directive 87/357/CEE relative aux produits qui, n'ayant pas l'apparence de ce qu'ils sont, compromettent la santé ou la sécurité des consommateurs.

* 37 Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE.

* 38 Prévue actuellement à l'article L. 421-2 du code de la consommation.

* 39 En référence au règlement n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.

* 40  Loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.

* 41  Directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015.

* 42 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000.

* 43 Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005.

* 44 Directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015.

* 45 Directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018.

* 46 Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022.

* 47  Google Ireland Ltd, Meta Platforms Ireland Ltd and TikTok Technology Ltd c/ Komm Austria.

* 48 Ibid.

* 49 Cette directive introduit, aux côtés de la procédure de fusion transfrontalière existante, la possibilité pour une société de transférer son siège dans un autre État membre tout en conservant sa personnalité juridique, ainsi qu'une procédure de scission transfrontalière. Elle procède à cette occasion à une harmonisation des procédures applicables aux sociétés qui fusionnent avec une ou plusieurs sociétés constituées dans un autre État membre.

* 50 Article 119 du traité instituant la Communauté européenne.

* 51 Traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les communautés européennes et certains actes connexes.

* 52 Article 2 du traité sur l'Union européenne (TUE).

* 53 Article 3, paragraphe 3, du TUE.

* 54 Considérants 15 et 16 de la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-533 DC du 16 mars 2006, loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.

* 55 Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République : « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ».

* 56 Objectif de 20 % d'administrateurs de chaque sexe en 2014 et 40 % d'ici 2017.

* 57 La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les hommes et les femmes a abaissé le nombre seuil de salariés à 250 à compter du 1er janvier 2020, il était initialement de 500 salariés. Toutefois, le montant net du chiffre d'affaires et le total de bilan minimaux sont restés inchangés, à 50 millions d'euros.

* 58 Autorité des marchés financiers, rapport 2021 sur le gouvernement d'entreprises et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées, 2 décembre 2021, p. 47.

* 59 Articles L. 226-4 et L. 226-4-1 du code de commerce.

* 60 Article L. 322-26-2-5 du code des assurances.

* 61 Elles sont définies par l'article 3 du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique.

* 62  Insee, les entreprises en France, édition 2022.

* 63 Ibid.

* 64 Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d'État, discours du 10 juin 2016 sur les entreprises publiques en introduction de la conférence « Les entretiens du Conseil d'État en droit public économique ».

* 65 CE, Ass., 24 novembre 1978, Schwartz, Defferre et autres, n° 04546 et 4565 ; CE 22 décembre 1982, Comité central d'entreprise de la société française d'équipement pour la navigation aérienne, n° 34252 ; CE, Ass., 6 décembre 1996, Société Lambda, n° 167502 ; Avis d'Assemblée générale du Conseil d'État du 17 septembre 1998, n° 362610.

* 66 Insee, Tableaux de l'économie française, édition 2020.

* 67 Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

* 68 Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, La parité dans le secteur public : des avancées réelles mais lentes, un levier de transformation publique à saisir, rapport voté le 23 février 2021, p. 39.

* 69 Ibid.

* 70 Ibid.

* 71 Ibid, pp. 40 à 44.

* 72 Alinéa 2 des articles L. 225-18-1, L. 225-69-1 et L. 226-4-1 du code de commerce.

* 73 Alinéa 2 des articles L. 225-45, L. 225-83 et alinéa 4 de l'article L. 226-4 du code de commerce.

* 74 Il s'agissait de la seconde phrase de l'alinéa 2 des articles L. 225-18-1, L. 225-69-1 et L. 226-4-1 du code de commerce qui disposait que « Cette nullité n'entraîne pas celle des délibérations auxquelles a pris part le membre du conseil irrégulièrement nommé. »

* 75 Prise de parole de M. Denis Terrien lors d'une table ronde organisée le 21 janvier 2021 par la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat.

* 76  Rapport d'information n° 757 (2020-2021), publié le 8 juillet 2021, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le bilan de l'application, dix ans après son adoption, de la loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle, par Martine Filleul, Joëlle Garriaud-Maylam et Dominique Vérien, sénatrices, p. 44.

* 77 Article 6-1 alinéa 2 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à démocratisation du secteur public.

* 78  L'Essentiel sur le rapport d'information La parité en entreprise : pour de nouvelles avancées, dix ans après la loi Copé-Zimmermann, p. 1.

* 79 Le SBF (Société des bourses françaises) 120 est un indice boursier parisien, créé le 31 décembre 1990, qui regroupe 40 sociétés du CAC 40 et 80 sociétés parmi les 200 premières capitalisations boursières.

* 80 Les comités spécialisés sont des instances de gouvernance prévues, à l'exception du comité d'audit pour les sociétés cotées, par le droit souple et selon les modalités de gouvernance voulues par la société. Ces comités sont des émanations des conseils d'administration et de surveillance, ils sont donc composés par les administrateurs de ces organes. Les comités sont répartis principalement selon les thématiques suivantes : audit, risques, nomination, rémunération, stratégique, responsabilité sociale et environnementale.

* 81 SpencerStuart, France Board Index 2022, pp. 64 à 71.

* 82 Ibid.

* 83 Skema Business School, Observatoire Skema de la féminisation des entreprises, Diversité & Inclusion au sein du CAC 40, édition 2022, p. 2.

* 84 Ibid.

* 85  9e étude annuelle du réseau Grandes Écoles au Féminin en partenariat avec Roland Berger, 8 décembre 2022.

* 86  Rapport d'information n° 757 (2020-2021), publié le 8 juillet 2021, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le bilan de l'application, dix ans après son adoption, de la loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle, par Martine Filleul, Joëlle Garriaud-Maylam et Dominique Vérien, sénatrices, p. 19.

* 87  L'Essentiel sur le rapport d'information La parité en entreprise : pour de nouvelles avancées, dix ans après la loi Copé-Zimmermann, p. 2.

* 88 Articles L. 225-23 alinéa 1 et L. 22-10-5 du code de commerce.

* 89 Article L. 225-23 du code de commerce.

* 90 Article L. 225-18 du code de commerce.

* 91 Les statuts de la société anonyme peuvent effet prévoir de manière facultative la présence de salariés au sein des organes de gouvernance.

* 92 Article L. 225-28 du code de commerce.

* 93 Direction générale du Trésor, rapport remis par le Gouvernement au Parlement évaluation les effets économiques et managériaux de la présence d'administrateurs représentant les salariés au sein des conseils d'administration ou de surveillance des sociétés, 18 juillet 2022, p. 42.

* 94 Skema Business School, Observatoire Skema de la féminisation des entreprises, Diversité & Inclusion au sein du CAC 40, édition 2023, p. 4.

* 95 Notion nouvelle introduite à l'article L. 23-12-1 du code de commerce, par la loi Rixain du 24 janvier 2021, définie de la manière suivante : « toute instance mise en place au sein de la société, par tout acte ou toute pratique sociétaire, aux fins d'assister régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l'exercice de leurs missions ».

* 96 Article 14 de loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle.

* 97 Article L. 1142-11 du code du travail.

* 98 Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises.

* 99  Projet de règlement délégué (et ses annexes) du 31 juillet 2023 complétant la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les normes d'information en matière de durabilité, annexe 1, p. 45.

* 100 Rapport d'information n° 461 (2022-2023) sur la proposition de loi visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, de Françoise Dumont, fait au nom de la commission des lois du Sénat, publié le 29 mars 2023, p. 5.

* 101 Il s'agit des nominations hors renouvellement sur un même emploi ou nomination dans un même type d'emplois au sein d'une même collectivité territoriale ou établissement public.

* 102 En effet, tout d'abord, la règle européenne concerne non seulement les conseils d'administration et de surveillance, mais également le directoire ; ensuite, même au sein des conseils d'administration et de surveillance, les obligations imposées par la directive concernent également les représentants des salariés ; enfin, les seuils sont légèrement plus élevés en France et ne concernent donc pas certaines sociétés cotées entrant dans le champ européen.

* 103  Règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres, et modifiant les directives 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le règlement (UE) n° 236/2012.

* 104  Rapport de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil, 7 janvier 2021.

* 105 Selon les informations transmises en audition par la direction générale du Trésor.

* 106  Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE.

* 107  Directive (UE) 2021/338 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 modifiant la directive 2014/65/UE en ce qui concerne les obligations d'information, la gouvernance des produits et les limites de position, et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/878 en ce qui concerne leur application aux entreprises d'investissement, afin de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la Covid-19.

* 108  Ordonnance n° 2021-1652 du 15 décembre 2021 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des obligations d'information, de la gouvernance des produits financiers et des limites de position des investisseurs destinées à faciliter le financement des entreprises.

* 109 Article 43 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances.

* 110  Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 111 Ces informations sont publiées sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers.

* 112  Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture.

* 113  Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission.

* 114 Définis comme les prestataires fournissant des services de conservation de clés cryptographiques privées pour le compte de leurs clients à des fins de détention, de stockage et de transfert de monnaies virtuelles.

* 115  Ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

* 116  Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937.

* 117 Article 9 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture.

* 118 Tracfin est un service de renseignement dit du « premier cercle » et placé sous l'autorité du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Il entend lutter contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

* 119 Rapport du Conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (COLB), Analyse nationale des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme en France, janvier 2023.

* 120 Groupe d'action financière, «  Lignes directrices de l'approche fondée sur les risques appliquée aux actifs virtuels et aux prestataires de services liés aux actifs virtuels », 2019, et «  Normes internationales sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération. Les recommandations du Gafi », mise à jour du mois de mars 2022.

* 121  Règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2015/849.

* 122  Directive (UE) 2023/2226 du Conseil du 17 octobre 2023 modifiant la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal.

* 123 Selon les données transmises dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, le règlement européen est en cours de traduction par les jurislinguistes avant son adoption définitive et sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

* 124  Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012.

* 125  Ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015.

* 126  Loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

* 127  Règlement (UE) n° 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d'investissement dans le cadre d'un mécanisme de résolution unique et d'un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010.

* 128 Article 290 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 129 Article 291 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 130  Directive (UE) 2019/879 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant la directive 2014/59/UE en ce qui concerne la capacité d'absorption des pertes et de recapitalisation des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et la directive 98/26/CE.

* 131 II de l'article 1649 AC du code général des impôts et article L. 564-1 du code monétaire et financier, qui prévoit qu'en l'absence de ces informations, l'institution financière n'établit pas de relation contractuelle.

* 132 I de l'article 1649 AC du code général des impôts.

* 133 Article L.102 AG du livre des procédures fiscales.

* 134 2° du I de l'article L. 561-36 du code monétaire et financier.

* 135 1° de l'article 22 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française qui exclut les matières fiscales des compétences de l'État, a) de l'article 46 du décret n° 57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l'assemblée territoriale, du conseil territorial et de l'administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna.

* 136  Directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE.

* 137 Cet alinéa prévoit que « Les titres visés au dernier alinéa de l'article 19 tervicies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, détenus directement ou indirectement par un organe central au sens de l'article L. 511-30, ne sont pas pris en compte pour le calcul de la limitation à 50 % du capital des établissements de crédit qui leur sont affiliés, visée à l'article 19 tervicies précité, qui prévoit que les certificats coopératifs d'investissement, les certificats coopératifs d'associés et les parts à intérêt prioritaire ne peuvent représenter ensemble plus de 50 % du capital. »

* 138  Directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts.

* 139 Article L. 312-4-1 du code monétaire et financier.

* 140 Plus exactement, les « fonds laissés en compte auprès d'un établissement de crédit », conformément à la formulation retenue à l'article L. 312-4-1 du code monétaire et financier.

* 141 Réponses de la direction générale du Trésor au questionnaire du rapporteur.

* 142  Règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l'Union.

* 143 Articles 45, paragraphe 1, 52, point 3), et 59, paragraphe 2, de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE.

* 144 Article 59, paragraphe 2 de la directive (UE) 2015/2366.

* 145 Article L. 450-3 du code de commerce.

* 146 Article L. 450-4 du code de commerce.

* 147 Une convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale du 25 janvier 1988 a été conclue dans le cadre de l'OCDE et du Conseil de l'Europe, prévoit différents types d'assistance entre les pays signataires (échange de renseignements, notification, recouvrement forcé). Les conventions fiscales bilatérales comportent la plupart du temps un ou plusieurs articles dédiés au recouvrement international. L'article 27 du modèle de convention fiscale de l'OCDE concernant l'assistance au recouvrement des impôts, introduit lors de sa mise à jour en 2003, est repris dans de nombreuses conventions fiscales.

* 148  Directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures.

* 149  Règlement d'exécution (UE) n° 1189/2011 de la Commission du 18 novembre 2011 fixant les modalités d'application relatives à certaines dispositions de la directive 2010/24/UE du Conseil concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures.

* 150 Réponses de la Direction générale des finances publiques au questionnaire du rapporteur.

* 151 Conformément à l'article 9 du règlement (UE) 2021/2116 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune, les organismes payeurs sont des services ou des organismes des États membres et, le cas échéant, de leurs régions, chargés de gérer et de contrôler, dans le cadre de la PAC, les dépenses en gestion partagée du Fonds européen agricole de garantie (Feaga) ainsi que les dépenses du fonds européen agricole pour le développement rural (Feader).

* 152 Voir note précédente.

* 153 Règlement 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché.

* 154 Règlement 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 fixant des obligations liées au devoir de diligence à l'égard de la chaîne d'approvisionnement pour les importateurs de l'Union qui importent de l'étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l'or provenant de zones de conflit ou à haut risque.

* 155 Règlement (UE) 2023/1542 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2023 relatif aux batteries et aux déchets de batteries, modifiant la directive 2008/98/CE et le règlement (UE) 2019/1020, et abrogeant la directive 2006/66/CE.

* 156 Règlement (UE) 2023/1542 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2023 relatif aux batteries et aux déchets de batteries, modifiant la directive 2008/98/CE et le règlement (UE) 2019/1020, et abrogeant la directive 2006/66/CE.

* 157 Directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs et abrogeant la directive 91/157/CEE.

* 158 « Batterie » : « tout dispositif fournissant de l'énergie électrique obtenue par transformation directe d'énergie chimique, à stockage interne ou externe, et constituée d'un ou plusieurs éléments de batterie rechargeable ou non rechargeable, de modules de batterie ou d'assemblages-batteries, et comprend une batterie qui a fait l'objet d'une préparation en vue d'un réemploi, d'une préparation en vue d'une réaffectation, d'une réaffectation ou d'un remanufacturage. » (article 3 du règlement).

* 159 « Pile » ou « accumulateur » : « toute source d'énergie électrique obtenue par transformation directe d'énergie chimique, constituée d'un ou de plusieurs éléments primaires (non rechargeables) ou d'un ou de plusieurs éléments secondaires (rechargeables) » (directive 2006/66/CE).

* 160 « Préparation en vue d'une réaffectation » : « toute opération par laquelle un déchet de batterie, ou des parties de celui- ci, sont préparés de manière à pouvoir être utilisés à des fins ou pour des applications autres que celles pour lesquelles ils ont été initialement conçus. » (article 3 du règlement).

* 161 « Réaffectation » : « toute opération qui a pour résultat qu'une batterie, qui n'est pas un déchet de batterie, ou des parties de celle-ci sont utilisées à des fins ou pour des applications autres que celle pour laquelle la batterie a été initialement conçue. » (article 3 du règlement).

* 162 « Remanufacturage » : « toute opération technique réalisée sur une batterie usagée qui comprend le démontage et l'évaluation de tous ses éléments et modules de batterie et l'utilisation d'un certain nombre d'éléments et de modules de batterie qui sont neufs, usagés ou issus de la valorisation de déchets, ou d'autres composants de batterie, en vue de rétablir la capacité de la batterie à au moins 90 % de la capacité nominale initiale, et lors de laquelle l'état de santé de tous les éléments de batterie individuels ne diffère pas de plus de 3 % entre les éléments, et qui a pour résultat une utilisation de la batterie pour la même finalité ou application que celle pour laquelle la batterie a été initialement conçue » (article 3 du règlement).

* 163 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 164 Points de collecte volontaires : « toute entreprise à but non lucratif, commerciale ou exerçant une autre activité économique ou tout organisme public qui participe de sa propre initiative à la collecte séparée des déchets de batteries portables et des déchets de batteries MTL produits par celle-ci ou celui-ci ou par d'autres utilisateurs finaux, avant de remettre ces déchets de batteries aux producteurs, aux organisations compétentes en matière de responsabilité des producteurs ou aux opérateurs de gestion des déchets pour un traitement ultérieur ».

* 165 Les notions de « préparation en vue d'une réaffectation », de « réaffectation » et de « remanufacturage » - issues du règlement européen - sont donc couvertes par les notions plus larges de « préparation à la réutilisation » et de « réutilisation » fixée à l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement.

* 166 Article R. 543-3 pour les huiles, article R. 543-43 pour les emballages, article R. 543-125 pour les piles et accumulateurs, article R. 543-137 pour les pneumatiques...

* 167  Compte rendu de la réunion de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale du 29 novembre 2019 à 9 h 30.

* 168 Règlement (CE) 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets.

* 169 Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination du 22 mars 1989.

* 170 Décision n° 22PA02 680 du 29 juin 2023 de la Cour administrative d'appel de Paris.

* 171 Règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières.

* 172 Ce facteur est égal à 97,5 % en 2026, 95 % en 2027, 90 % en 2028, 77,5 % en 2029, 51,5 % en 2030, 39 % en 2031, 26,5 % en 2032 et 14 % en 2033. À partir de 2034, aucun facteur MACF ne s'applique.

* 173  Résolution n° 124 (2021-2022) sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », devenue résolution du Sénat le 5 avril 2022.

* 174 Rapport d'information n° 576 (2021-2022) de M. Guillaume Chevrollier et Mme Denise Saint-Pé, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Réformer le marché carbone pour bâtir une économie européenne souveraine, durable et juste, 15 mars 2022.

* 175 Règlement d'exécution (UE) 2023/1773 de la Commission du 17 août 2023 portant modalités d'application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les obligations de déclaration aux fins du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire.

* 176 L'assujetti est soit l'importateur, soit le représentant en douane indirect : « Lorsque l'importateur est établi dans un État membre et désigne un représentant en douane indirect (...), et lorsque le représentant en douane indirect y consent, les obligations de déclaration incombent à ce représentant en douane indirect. Lorsque l'importateur n'est pas établi dans un État membre, les obligations de déclaration incombent au représentant en douane indirect. » (article 32 du règlement MACF).

* 177 Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

* 178 Pour l'historique du SEQE-UE et la description détaillée du système existant préalable à la réforme engagée en 2023, se référer au rapport d'information n° 576 (2021-2022) de M. Guillaume Chevrollier et Mme Denise Saint-Pé, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Réformer le marché carbone pour bâtir une économie européenne souveraine, durable et juste, 15 mars 2022.

* 179 « Lorsqu'une mesure réglementaire ou législative, autre que les dispositions de la présente section et des textes pris pour son application, entraîne la fermeture d'une unité technique de production d'électricité faisant partie d'une installation entrant dans le champ d'application de la présente section, l'autorité administrative peut annuler des quotas initialement destinés à être mis aux enchères, dans la limite de l'équivalent des émissions de l'installation concernée (...) durant les cinq années précédant la fermeture de l'unité ».

* 180 Installation ayant cessé son activité, sauf si l'exploitant de l'installation apporte à l'autorité administrative des éléments suffisamment probants de nature à établir que la production reprendra dans un délai précis et raisonnable ; installation de production d'électricité, à l'exception de l'électricité produite à partir de gaz résiduaire ; installation de captage de dioxyde de carbone, réseau de transport de dioxyde de carbone ou site de stockage de dioxyde de carbone, sous réserve des dispositions de la directive SEQE-UE relative au « Fonds d'innovation ». Des quotas peuvent toutefois être délivrés gratuitement pour le chauffage urbain ainsi que pour la cogénération à haut rendement.

* 181 Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d'une réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union.

* 182 Ce facteur est égal à 97,5 % en 2026, 95 % en 2027, 90 % en 2028, 77,5 % en 2029, 51,5 % en 2030, 39 % en 2031, 26,5 % en 2032 et 14 % en 2033. À partir de 2034, aucun facteur MACF ne s'applique.

* 183 Règlement (UE) 2015/757 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions de gaz à effet de serre du secteur du transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE.

* 184 Les compagnies maritimes sont tenues de restituer des quotas selon le calendrier suivant : a) 40 % des émissions vérifiées déclarées pour 2024 ; b) 70 % des émissions vérifiées déclarées pour 2025 ; c) 100 % des émissions vérifiées déclarées pour 2026. Lorsque le nombre de quotas restitués est inférieur aux émissions vérifiées du transport maritime pour les années 2024 et 2025, une fois la différence entre les émissions vérifiées et les quotas restitués établie pour chaque année, une quantité de quotas correspondant à la différence est annulée plutôt que d'être mise aux enchères.

* 185 Les compagnies maritimes peuvent restituer 5 % de quotas en moins que leurs émissions vérifiées rejetées jusqu'au 31 décembre 2030 pour les navires de classe glace à condition que ces navires relèvent de la classe glace IA ou IA Super ou d'une classe glace équivalente, établie sur la base de la recommandation HELCOM 25/7. Lorsque le nombre de quotas restitués est inférieur aux émissions vérifiées, une fois la différence entre les émissions vérifiées et les quotas restitués établie pour chaque année, une quantité de quotas correspondant à cette différence est annulée plutôt que mise aux enchères.

* 186 Directive 2012/27/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relative à l'efficacité énergétique.

* 187 Règlement d'exécution (UE) n° 2018/2066 du 19/12/18 relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions de gaz à effet de serre au titre de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil et modifiant le règlement (UE) n° 601/2012 de la Commission.

* 188 Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

* 189 Pour plus de détails sur le principe et le fonctionnement du SEQE-UE, se référer au commentaire de l'article 14 du présent projet de loi.

* 190 Les régions ultrapériphériques (RUP) sont les territoires mentionnés à l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La France compte six RUP : la Martinique, Mayotte, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion et Saint-Martin.

* 191 Soit la moyenne arithmétique des émissions annuelles produites pendant les années civiles 2004, 2005 et 2006 par les aéronefs.

* 192 Les 3 % restant sont placés dans une réserve spéciale pour les exploitants d'aéronefs en croissance rapide et pour les nouveaux entrants sur le marché.

* 193 Depuis 2020, en application de l'accord entre l'Union européenne et la Confédération helvétique relatif au couplage de leur système d'échange de quotas d'émission, les émissions des vols des exploitants d'aéronefs au départ de l'Union européenne et à destination de la Suisse sont soumises au SEQE-UE. En revanche, les vols au départ de la Suisse sont pris en compte dans le système national CH-ETS.

* 194 En application des dispositions entre le Royaume-Uni et l'Europe faisant suite au Brexit, le Royaume-Uni a mis en place son propre système d'échange de quotas d'émission (UK-ETS) qui s'applique depuis le 1er janvier 2021 aux exploitants aériens pour les vols décollant du Royaume-Uni à destination du Royaume-Uni ou de l'EEE. Les vols au départ de l'EEE à destination du Royaume-Uni sont en revanche inclus dans le SEQE-UE.

* 195 Un pays et territoire d'outre-mer (PTOM) est l'un des territoires mentionnés à l'article 198 et énumérés à l'annexe II du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La France compte six PTOM : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna, et Saint-Barthélemy.

Le dernier alinéa de l'article L. 229-5 précise que le SEQE-UE ne s'applique pas aux exploitants d'aéronefs pour les vols qu'ils effectuent à l'arrivée ou au départ d'un aérodrome situé dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette précision est nécessaire compte tenu de la particularité de Saint-Pierre-et-Miquelon parmi les 6 PTOM évoqués : il s'agit d'une collectivité d'outre-mer régie par l'identité législative ne disposant pas d'une compétence propre en matière d'environnement, pour laquelle, sans mention expresse d'exclusion, le droit national qui transpose la directive européenne sur le SEQE-UE s'appliquerait.

* 196 Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d'une réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union.

* 197 Cour des comptes européenne, Le système d'échange de quotas d'émission de l'UE : l'allocation de quotas à titre gratuit devrait être mieux ciblée, 2020.

* 198 Règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l'instauration d'une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable.

* 199 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

* 200 Rapport d'information n° 576 (2021-2022) de M. Guillaume Chevrollier et Mme Denise Saint-Pé, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Réformer le marché carbone pour bâtir une économie européenne souveraine, durable et juste, 15 mars 2022.

* 201 Tels que définis au point 34 du paragraphe 2 de l'article 2 de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir des énergies renouvelables.

* 202 En vertu du a du paragraphe 6 de l'article 3 quater de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003.

* 203 Tels que définis à l'article 25 de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018.

* 204 En vertu du a du paragraphe 6 de l'article 3 quater de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003.

* 205 Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

* 206 Pour plus de détails sur le principe et le fonctionnement du SEQE-UE, se référer au commentaire de l'article 14 du présent projet de loi.

* 207 Règlement (UE) 2015/757 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions de dioxyde de carbone du secteur du transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE.

* 208 Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d'une réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union.

* 209 Un pays et territoire d'outre-mer (PTOM) est l'un des territoires mentionnés à l'article 198 et énumérés à l'annexe II du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La France compte six PTOM : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna, et Saint-Barthélemy.

* 210 Les administrateurs des affaires maritimes ; les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes ; les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l'autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; les fonctionnaires et agents assermentés et commissionnés des services maritimes, des ports autonomes maritimes et des grands ports maritimes ; les ingénieurs des mines, les ingénieurs de l'industrie et des mines, les ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et les ingénieurs des travaux publics de l'État affectés dans les services déconcentrés du ministère chargé de l'environnement ou à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement ; les officiers de port, officiers de port adjoints et surveillants de port ayant la qualité de fonctionnaire ; les chercheurs, ingénieurs et techniciens assermentés de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer ; les agents des douanes ; les commandants, commandants en second ou commissaires des armées embarqués des bâtiments de la marine nationale ainsi que les chefs de bord des aéronefs de la marine nationale et des aéronefs de la défense chargés de la surveillance en mer.

* 211 Depuis 2020, en application de l'accord entre l'Union européenne et la Confédération helvétique relatif au couplage de leur système d'échange de quotas d'émission, les émissions des vols des exploitants d'aéronefs au départ de l'Union européenne et à destination de la Suisse sont soumises au SEQE-UE. En revanche, les vols au départ de la Suisse sont pris en compte dans le système national CH-ETS.

* 212 En application des dispositions entre le Royaume-Uni et l'Europe faisant suite au Brexit, le Royaume-Uni a mis en place son propre système d'échange de quotas d'émission (UK-ETS) qui s'applique depuis le 1er janvier 2021 aux exploitants aériens pour les vols décollant du Royaume-Uni à destination du Royaume-Uni ou de l'EEE. Les vols au départ de l'EEE à destination du Royaume-Uni sont en revanche inclus dans le SEQE-UE.

* 213 Un pays et territoire d'outre-mer (PTOM) est l'un des territoires mentionnés à l'article 198 et énumérés à l'annexe II du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La France compte six PTOM : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna, et Saint-Barthélemy.

* 214 Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d'une réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union.

* 215 C'est-à-dire les États appliquant Corsia.

* 216 Le paragraphe 3 de l'article 25 bis de la directive SEQE-UE dispose que « la Commission adopte un acte d'exécution établissant la liste des États autres que les pays de l'EEE, la Suisse et le Royaume-Uni qui sont considérés comme appliquant le Corsia aux fins de la présente directive (...) ».

* 217 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

* 218 Ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie.

* 219 Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures (article 92).

* 220 Règlement (UE) 2017/2196 de la Commission du 24 novembre 2017 établissant un code de réseau sur l'état d'urgence et la reconstitution du réseau électrique.

* 221 La délibération est consultable ci-après.

* 222 La délibération est consultable ci-après.

* 223 Le contrat est consultable ci-après.

* 224 Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

* 225 Ordonnance n° 2021-167 du 17 février 2021 relative à l'hydrogène.

* 226 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 52).

* 227 L'article L. 211-2 du code de l'énergie définit l'énergie renouvelable comme « une énergie produite à partir de sources non fossiles renouvelables, à savoir l'énergie éolienne, l'énergie solaire thermique ou photovoltaïque, l'énergie géothermique, l'énergie ambiante, l'énergie marémotrice, houlomotrice ou osmotique et les autres énergies marines, l'énergie hydroélectrique, la biomasse, les gaz de décharge, les gaz des stations d'épuration d'eaux usées et le biogaz ».

* 228 Loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (article 81).

* 229 Projet annuel de performances (PAP) - Annexe au projet de loi de finances (PLF) pour 2024, Écologie, développement et mobilité durables, p. 423.

* 230 Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables.

* 231 Règlement délégué (UE) 2023/1185 de la Commission du 10 février 2023 complétant la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil en établissant un seuil minimal de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les carburants à base de carbone recyclé et en précisant la méthode d'évaluation des réductions des émissions de gaz à effet de serre réalisées grâce aux carburants liquides et gazeux renouvelables destinés aux transports, d'origine non biologique, et aux carburants à base de carbone recyclé et Règlement délégué (UE) 2023/1184 de la Commission du 10 février 2023 complétant la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil en établissant une méthodologie de l'Union définissant des règles détaillées pour la production de carburants liquides et gazeux renouvelables destinés au secteur des transports, d'origine non biologique.

* 232 Volet « Énergie » du Paquet « Ajustement à l'objectif 55 » : face à la dépendance énergétique, comment décarboner l'économie ?, Rapport d'information n° 584 (2021-2022), déposé le 24 mars 2022, p. 60.

* 233 Proposition de résolution en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », 5 avril 2022.

* 234 Kilogrammes d'équivalents en dioxyde de carbone par kilogramme d'hydrogène.

* 235 Directive 2009/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires.

* 236 Cette procédure concerne huit aéroports : Bordeaux-Mérignac, Bâle-Mulhouse, Marseille-Provence, Lyon-Saint-Exupéry, Paris-Orly, Paris-Charles-de-Gaulle, Nice-Côte d'Azur, Nantes-Atlantique et Toulouse-Blagnac.

* 237 Conclusions du rapporteur public Guillaume Odinet, décision n° 424 088 du Conseil d'État du 28 décembre 2021.

* 238 Décision n° 2020-085 de l'ART du 22 décembre 2020 relative à l'aéroport de Lyon-Bron et de Lyon-Saint-Exupéry.

* 239 Décision n° 2023-005 de l'ART du 26 janvier 2023 relative à l'aéroport de Bordeaux Mérignac.

* 240  Avis du Conseil d'État ajouter lien hypertexte n° 407 629 sur un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, séances du jeudi 9 et du mardi 14 novembre 2023.

* 241 Convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, adoptée le 19 juin 1990.

* 242 Selon Europol, cité par l'étude d'impact du présent projet de loi, 65 % des réseaux criminels dans l'Union européenne sont constitués de plusieurs nationalités et 80 % des organisations criminelles sont impliquées dans des activités transfrontalières (trafics de drogue ou d'êtres humains).

* 243 Décision-cadre 2006/960/JAI ; aux fins de simplifier les échanges d'informations, celle-ci a prévu le recours à des formulaires standardisés, encadré les délais de réponse et limité les motifs de refus de transmission.

* 244 Exposé des motifs de la directive 2023/977, point 7.

* 245 C'est sous la présidence française que le Conseil a pu adopter une orientation générale, le 10 juin 2022, marquant l'aboutissement d'une étape du processus de négociations.

* 246 Articles 6, 7 et 8 de la directive précitée.

* 247 Les demandes urgentes étant celles qui, présentées comme telles par l'État demandeur avec des justifications spécifiques, sont « essentielles à la prévention d'une menace immédiate et grave pour la sécurité publique d'un État membre ; [...] nécessaires pour prévenir une menace imminente pour la vie ou l'intégrité physique d'une personne [ou à] l'adoption d'une décision susceptible d'impliquer le maintien de mesures restrictives qui s'apparentent à une privation de liberté [ou qui] présentent un risque imminent de perdre de leur intérêt si elles ne sont pas communiquées d'urgence et sont considérées comme importantes pour la prévention ou la détection d'infractions pénales, ou les enquêtes en la matière ».

* 248 En outre, la durée de conservation des données recueillies est portée, en matière terroriste, à cinq années après la décision judiciaire définitive intervenue en droit interne ou après la clôture d'une procédure, et à deux ans après une décision définitive de ne pas engager de poursuites.

* 249 Ce rapport est accessible sur le site du Sénat.

* 250 Rapport n° 315 (2010-2011) de M. François Zocchetto sur le projet de loi relatif à la garde à vue.

* 251 Loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale.

* 252 Résolution n° 60 (2011-2012).

* 253 On rappellera que, dans cette hypothèse comme à tout moment de la garde à vue, la personne concernée peut au demeurant exercer son droit à garder le silence, droit dont elle aura obligatoirement été informée au démarrage de la mesure.

* 254 Il est à cet égard révélateur que les difficultés juridiques relatives à la garde à vue n'aient été évoquées à aucun moment par le Gouvernement lors des États généraux de la justice ou lors des débats parlementaires, pourtant très récents, sur le projet de loi d'orientation et de programmation de la justice pour 2023-2027, et ce alors même que ce texte (adopté en octobre 2023, donc après l'envoi par la Commission européenne de son avis motivé) avait pour ambition de réaménager largement la procédure pénale.

* 255 Document d'information relatif à l'avis sur le rapport annexe XV proposant des restrictions concernant les microplastiques ajoutés intentionnellement, Agence européenne des produits chimiques, 2020.

* 256 Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 20 février 1979, Cassis de Dijon.

* 257 Considérant n° 6 du règlement (UE) n° 2023/2025.

* 258 Règlement (UE) 2023/2055 de la Commission du 25 septembre 2023 modifiant l'annexe XVII du règlement (CE) 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (Reach), en ce qui concerne les microparticules de polymère synthétique.

* 259 Document d'information relatif à l'avis sur le rapport annexe XV proposant des restrictions concernant les microplastiques ajoutés intentionnellement, Agence européenne des produits chimiques, 2020.

* 260 Produit cosmétique destiné à être enlevé après application sur la peau, le système pileux ou les muqueuses, selon la définition du règlement n° 1223/2009 du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques.

* 261 L'encapsulation des parfums, utilisée notamment dans les détergents, comme les lessives et les assouplissants, permet de « contenir » les parfums présents dans ces produits et d'en assurer une diffusion graduelle.

* 262 Article 288 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 263 Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 15 juillet 1964, Flaminio Costa contre E. N. E. L.

* 264 Décision du Conseil d'État du 28 février 1992, Société Arizona Tobacco.

* 265 Selon le document d'information relatif à l'avis sur le rapport annexe XV proposant des restrictions concernant les microplastiques ajoutés intentionnellement de l'Agence européenne des produits chimiques, 2020.

* 266 À l'exception des produits abrasifs, interdits depuis le 17 octobre 2023.

* 267 Étude d'impact du projet de loi, p. 294.

* 268 Les articles 4, 5 et 6 de la directive (UE) 2019/1158 portent respectivement sur le congé de paternité, le congé parental et le congé d'aidant.

* 269 Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture a permis d'assurer la mise en conformité du code du travail.

* 270 La direction générale de l'administration et de la fonction publique ne dispose pas d'éléments sur le nombre d'autorisations exceptionnelles délivrées par le chef de service permettant un tel report.

* 271 D'après les éléments transmis par la direction générale de l'administration et de la fonction publique au rapporteur.

* 272 Étude d'impact du projet de loi, p. 300.

* 273 En signe de protestation contre l'absence d'engagement du ministre de la transformation et de la fonction publiques en faveur de mesures salariales en 2024.

* 274 Comme indiqué au rapporteur par la direction générale de l'administration et de la fonction publique.

* 275 Avis du Conseil d'État sur le projet de loi, p. 6.

* 276 Voir CJUE, C214/10 du 22 novembre 2011, point 44 : « Par conséquent, il convient de répondre [...] que l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à des dispositions ou à des pratiques nationales, telles que des conventions collectives, limitant, par une période de report de quinze mois à l'expiration de laquelle le droit au congé annuel payé s'éteint, le cumul des droits à un tel congé d'un travailleur en incapacité de travail pendant plusieurs périodes de référence consécutives ».

* 277 Le Conseil d'État relevant, p. 6 de son avis, « qu'il est souhaitable d'étudier rapidement les modalités selon lesquelles la garantie ainsi offerte aux fonctionnaires bénéficiant de l'un des congés relevant de la directive 2019/1158 pourrait être étendue aux fonctionnaires placés en congé de maternité ou d'adoption ».

* 278 Le cadre juridique de la programmation 2014-2020, prolongée en 2021 et 2022 par le règlement (UE) 2020/2220, est formé des règlements (UE) n° 1307/2013 établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs, (UE) nº 1308/2013 établissant une organisation commune des marchés des produits agricoles, (UE) n° 1305/2013 relatif au soutien au développement rural et (UE) n° 1306/2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune.

* 279 Article issu d'un amendement portant article additionnel du Sénat présenté par M. René Vandierendonck.

* 280 Cette possibilité trouve son fondement juridique à l'article 65 du règlement (UE) 1305/2013. Le décret n° 2015-445 du 16 avril 2015 relatif à la mise en oeuvre des programmes de développement rural pour la période 2014-2020 fixe les orientations stratégiques et méthodologiques des PDRR gérés par les régions au titre de l'article 78 de la loi Maptam.

* 281 À l'exception de Mayotte et de Saint-Martin, qui ont choisi de ne pas être autorités de gestion.

* 282 Cette possibilité trouve son fondement juridique à l'article 123 du règlement (UE) 2021/2115.

* 283 Plus précisément, les aides pour lesquelles les régions sont désormais autorités de gestion sont les aides relatives aux engagements en matière d'environnement et de climat et autres engagements en matière de gestion mentionnées à l'article 70 du règlement (UE) 2021/2115 ne relevant pas du système intégré de gestion et de contrôle, à l'exception des aides relatives aux engagements de gestion dans le cadre du dispositif de protection contre la prédation, ainsi que les aides aux investissements mentionnées aux articles 73, 74, 75, 77 et 78 du même règlement, à l'exception des aides liées à la protection des exploitations contre la prédation.

* 284 Règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles et modifiant et abrogeant certains actes dans le domaine de la santé animale (« législation sur la santé animale »).

* 285 Article 19 du projet de loi.

* 286 Voir infra.

* 287 Article L. 653-12 al 1er : « Pour chaque département, groupe de départements, région ou groupe de régions l'autorité administrative agrée un établissement de l'élevage constitué soit sous la forme d'un service au sein d'une chambre d'agriculture, soit par création d'un organisme doté de la personnalité morale dans les conditions prévues au III de l'article L. 514-2. »

* 288 Ordonnance n° 2006-1548 du 7 décembre 2006 relative à l'identification, au contrôle sanitaire des activités de reproduction ainsi qu'à l'amélioration génétique des animaux d'élevage.

* 289 Conformément à l'article L. 514-2 du CRPM.

* 290 À l'exception des EdE constitués sur le fondement de l'article L. 514-2 du CRPM.

* 291 Conformément à l'article L. 653-12 du CRPM, dans sa version applicable à compter du 21 avril 2024.

* 292 Le terme « opérateur » est issu de la LSA. Ce terme est plus englobant que celui d'« exploitation », figurant encore dans le CRPM, au côté d'occurrences, plus récentes et plus conformes au droit européen, du terme « opérateurs ». L'article 4 du règlement LSA définit ce terme comme « toute personne physique ou morale ayant des animaux ou des produits sous sa responsabilité, y compris pour une durée limitée, mais à l'exclusion des détenteurs d'animaux de compagnie et des vétérinaires ».

* 293 D'autres opérateurs, comme les abattoirs ou les centres de rassemblement se déclarent auprès de la préfecture.

* 294 Cette référence juridique erronée fait en réalité référence à l'EdE, non plus mentionné à l'article L. 212-7 mais à l'article L.653-12 du CRPM. Par ailleurs, le terme « exploitations » n'est pas en phase avec le droit européen, qui lui préfère le terme, beaucoup plus englobant, d'« opérateurs ».

* 295 CDAF estime que là où la BDNI centralisait des informations relatives à environ 300 000 tiers, la BNO en regroupera au minimum 600 000, voire beaucoup plus, suivant la montée en charge progressive du système.

* 296 La base Usagers a vocation à recueillir en réalité une vaste quantité d'informations sur un vaste panel d'opérateurs en lien, à l'amont comme à l'aval, avec les animaux : restaurants, laboratoires pharmaceutiques, équarrissage, etc.

* 297 Article R.212-14-4 du CRPM.

* 298 Article L. 212-3 du CRPM dans sa rédaction de l'ordonnance de 2020, dont l'entrée en vigueur est fixée au 21 avril 2024.

* 299 La partie réglementaire du CRPM confie cependant cette mission à l'EdE, sans fondement législatif.

* 300 Les amendements proposés par le rapporteur (partie III) permettent de répondre à cette problématique.

* 301 Cette société est codirigée par la société centrale canine (SCC) et le syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL).

* 302 Articles L. 212-9 et R. 653-14 du CRPM.

* 303 Décret n° 2022-1670 du 26 décembre 2022 relatif à la traçabilité des animaux des espèces avicoles.

* 304 Sauf au stade de l'abattage.

* 305 Les missions relatives à la traçabilité et à la parenté des bovins font partie des missions historiques de l'EdE. La création de la BDNI avait initialement pour but de centraliser les informations relatives aux bovins, comme indiqué précédemment.

* 306 La constitution d'une base unique a vocation à régler ce problème.

* 307 Conformément au septième alinéa de l'article L. 513-1 du CRPM.

* 308 Article D. 212-77-1.

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