PREMIÈRE PARTIE :
LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » ET LA PERSPECTIVE D'UNE RÉFORME DES RETRAITES

Trois programmes structurent la mission « Régimes sociaux de retraite » du budget général. Ils recensent chacun les subventions versées par l'État à certains régimes spéciaux. La mission ne couvre pas les régimes de la fonction publique d'État, intégrés au compte d'affectation spéciale « Pensions » (cf infra ).

Le programme 195 « Régimes de retraites des mines, de la SEITA et divers » regroupe les dotations attribuées :

- au fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines ;

- au régime de retraite de la SEITA ;

- à la Caisse des retraites des régimes ferroviaires d'outre-mer ;

- au régime des personnels de l'ORTF.

Le programme 197 « Régimes de retraites et de sécurité sociale des marins » est spécifiquement dédié aux métiers de cette filière. Il contribue au financement pour moitié de l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), établissement public administratif placé sous la tutelle des ministères chargés de la mer, du budget et de la sécurité sociale en charge de la couverture des risques maladie et vieillesse. La subvention versée au titre du programme 197 concourt au financement du risque vieillesse et des dispositifs d'action sociale en lien avec le risque vieillesse. 1 % de cette somme est destiné au financement de la subvention pour charge de service public de l'ENIM.

Le programme 198 « Régimes sociaux et de retraites des transports terrestres » concerne principalement les régimes de la SNCF et de la RATP. Il vise également le complément de pension des conducteurs routiers, les pensions des anciens agents des chemins de fer d'Afrique du Nord et d'outre-mer et les pensions de certains agents des chemins de fer secondaires (Caisse autonome mutuelle de retraite - CAMR).

Seuls deux régimes couverts par la mission sont encore ouverts : ceux des marins et de la RATP.

Le programme 198 concentre près de 70 % des crédits de la mission.

Répartition des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Le présent projet de loi de finances prévoit, pour la mission, une dotation s'élevant à 6,14 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP). Ce montant est en légère augmentation - + 0,6 % - par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 à périmètre courant. En prenant en compte la mesure de périmètre visant le programme 198, dont une partie des crédits sont transférés vers le programme 203 « Infrastructures et service de transports », rattaché à la mission « Transports », l'augmentation est plus conséquente : + 2,9 %. Cette progression rompt avec la tendance baissière observée jusqu'alors. L'augmentation attendue des dépenses de certains régimes (RATP, SNCF) devrait, à moyen terme, conforter cette trajectoire haussière.

Évolution des crédits de paiement de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme à périmètre courant

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 table, ainsi, sur une progression des crédits de 200 millions d'euros sur la période d'ici à 2025.

Plafonds de crédits alloués à la mission « Régimes sociaux et de retraite »
entre 2023 et 2025

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027

L'augmentation des crédits attendue en 2023 est uniquement portée par le programme 198 « Régimes sociaux de retraite des transports terrestres ». Les crédits dédiés au régime de la SNCF et à celui de la RATP traduisent ainsi une montée en charge des prestations. La baisse des crédits dédiés à l'action 05 du même programme tient pour l'essentiel à une mesure de périmètre (cf infra ).

Évolution des crédits de paiement de la mission « Régimes sociaux et de retraite »

(en euros)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution

Programme 195 : Régimes de retraites des mines, de la SEITA et divers

1 095 812 475

1 056 304 524

- 3,61 %

Action 01 : Versement au fonds spécial de retraite de la caisse autonome de sécurité sociale dans les mines

964 682 750

925 032 362

- 4,11 %

Action 02 : Régime de retraite de la SEITA

130 110 219

130 421 498

+ 0,24 %

Action 04 : Caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer

929 506

769 784

- 17,18 %

Action 07 : Versements liés à la liquidation de l'ORTF

90 000

80 880

- 10,13 %

Programme 197 : Régime de retraite et de sécurité sociale des marins

802 009 370

802 009 370

-

Action 01 : Régime de retraite et de sécurité sociale des marins

802 009 370

802 009 370

-

Programme 198 : Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 204 530 026

4 278 605 877

+ 1,76 %

Action 03 : Régime de retraite du personnel de la SNCF

3 286 360 169

3 450 066 342

+ 4,98 %

Action 04 - Régime de retraite du personnel de la RATP

753 800 000

810 663 500

+ 7,54 %

Acton 05 - Autres régimes

164 369 587

17 876 035

- 89,12 %

Total

6 102 351 871

6 136 919 771

+ 0,57 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La rapporteure spéciale s'interroge sur la pertinence de la mise en place d'une réserve de précaution (4 % des crédits votés) s'agissant de dépenses de « quasi-guichet », qui offrent peu de possibilité de redéploiements. Prévue par l'article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la réserve de précaution rend indisponible, dès le début de la gestion, une fraction des crédits ouverts en lois de finances, elle constitue pour le Gouvernement une enveloppe de crédits plus facilement mobilisables pour faire face aux aléas survenant en cours de gestion. Ces évènements semblent plus circonscrits s'agissant de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

I. UNE MAQUETTE BUDGÉTAIRE QUI NE COUVRE PAS LA TOTALITÉ DE L'EFFORT DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES RÉGIMES SPÉCIAUX

A. PLUSIEURS RÉGIMES SPÉCIAUX NE SONT PAS RETRACÉS DANS LA MISSION

La mission « Régimes sociaux et de retraite » ne couvre pas l'ensemble des régimes spéciaux de retraite pour lesquels l'État verse une subvention d'équilibre. Les dotations accordées aux caisses de retraites de l'Opéra de Paris ou de la Comédie française sont ainsi retracées au sein du programme 131 « Création », rattaché à la mission « Culture ».

Le régime de retraite de la branche des industries électriques et gazières (IEG), le régime des non-salariés agricoles, le régime de retraite des avocats (CNBF) et celui des clercs et des employés de notaire sont, quant à eux, financés au moyen de taxes affectées . Ces dépenses fiscales ne sont pas non plus recensées au sein de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

Financements de l'État en 2021 en direction des régimes spéciaux non visés
par la mission « Régimes sociaux et de retraite »

Régime

Subvention d'équilibre (en millions d'euros)

Taxe affectée

(en millions d'euros)

Dépenses

(en millions d'euros)

Cotisants

(en milliers)

Bénéficiaires

(en milliers)

Régime de base des non-salariés agricoles

2 909

(39,9 % du droit de consommation sur les alcools, droit sur la circulation des vins, cotisation sur les alcools de plus de 18°, droit de circulation sur les bières, droit de consommation sur les produits intermédiaires)

7 044

445,5

1 254,5

Salariés de la branche des industries électriques et gazières (IEG)

-

1 721

(contribution tarifaire d'acheminement - CTA)

8 059

135,4

179,9

Régime des clercs et employés de notaires

-

414

(taxe sur les émoluments)

886

62,8

79,2

Régime complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles

316

(13,81 % du droit de consommation sur les alcools)

917

445,3

659,4

Régime des avocats

-

5 (droits de plaidoiries)

364

73,1

19,7

Régime des agents de l'Opéra national de Paris

18

-

31

2

1,8

Régime des agents de la Comédie française

4

-

6

0,35

0,45

Total

22

5 365

17 307

1 164,5

2 194,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La maquette budgétaire ne permet pas, dans ces conditions, de disposer d'une approche complète des régimes spéciaux financés par l'État.

La rapporteure spéciale rappelle le souhait qu'elle a exprimé, en juillet dernier à l'occasion de la publication des conclusions de sa mission de contrôle sur les régimes de la RATP et des marins, que soit renforcée la lisibilité de l'action de l'État à l'égard des régimes spéciaux de retraite encore ouverts 12 ( * ) . À cette fin, il serait opportun de regrouper au sein de la mission « Régimes sociaux et de retraite » l'ensemble desdits régimes financés par une subvention d'équilibre de l'État (RATP, Marins, Opéra de Paris, Comédie française) et d'y recenser la dépense fiscale affectée à d'autres régimes (régime de retraite de la branche des industries électriques et gazières (IEG), régime des non-salariés agricoles, régime de retraite des avocats (CNBF) et régime des clercs et des employés de notaire).


* 12 Faut-il fermer les régimes spéciaux de retraites de la RATP et des Marins ? Rapport d'information n° 804 (2021-2022) de Mme Sylvie VERMEILLET, au nom de la commission des finances, 20 juillet 2022.

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