B. UNE NOUVELLE PROLONGATION DES SYSTÈMES D'INFORMATION, LA POSSIBILITÉ DE CONSERVER CERTAINES DONNÉES POUR LA RECHERCHE ET L'INTÉGRATION DE SUGGESTIONS DU SÉNAT

L'article 3 vise à prolonger jusqu'au 1 er avril 2021 l'autorisation de mettre en oeuvre les systèmes d'information dédiés à la lutte contre l'épidémie de Covid (traitements de données « SI-DEP » - pour le dépistage - et « Contact Covid » - pour le traçage des cas contact).

Par exception à la règle de destruction des données trois mois après leur collecte, la possibilité de conserver certaines données sous forme pseudonymisée et aux seules fins de surveillance épidémiologique et de recherche sur le virus serait également prolongée , jusqu'à cette même date.

En outre, le périmètre des systèmes d'information serait légèrement élargi concernant les données qui peuvent y être intégrées (pour viser de façon générale tous les tests ou examens de biologie de dépistage virologique ou sérologique relatifs à la Covid) ainsi que les personnes pouvant renseigner des informations (le renvoi à une liste de « professionnels de santé » fixée par décret devant permettre l'intégration au dispositif, notamment, des pharmaciens et infirmiers).

Enfin, le texte initial de cet article reprend - sans jamais en sourcer d'ailleurs la paternité - deux dispositions introduites par la commission des lois du Sénat , à l'initiative du rapporteur, lors de la discussion du précédent projet de loi :

- afin d' améliorer la pseudonymisation des données utilisées en matière de recherche (suppression des coordonnées de contact téléphonique et électronique, en application de la réserve précitée du Conseil constitutionnel) ;

- et pour sécuriser juridiquement les actions d'accompagnement social des malades et des cas-contact 19 ( * ) .

Comme lors de la discussion du précédent projet de loi retiré, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur pour préciser le contenu du rapport d'information trimestriel remis au Parlement par le Gouvernement après avis de la CNIL, afin qu'il comprenne expressément des indicateurs d'activité, de performance et de résultats .

C. LA POSITION DE LA COMMISSION : LIMITER LA DURÉE DE LA PROLONGATION DES FICHIERS, RAPPELER LA NÉCESSITÉ DES CONTRÔLES ET DE L'ÉVALUATION

Comme elle l'avait fait lors de la discussion du précédent projet de loi retiré par le Gouvernement, et au vu de la situation sanitaire, la commission des lois a accepté le principe d'une prolongation de l'autorisation de recourir aux systèmes d'information créés spécifiquement en appui aux opérations de dépistage de la maladie et de traçage des cas contact.

Néanmoins, par cohérence avec la durée de la prolongation de l'état d'urgence sanitaire qu'elle a fixée à l'article 1 er du présent projet de loi, la commission a également ramené au 31 janvier 2021 le terme de l'autorisation consentie par le législateur pour la mise en oeuvre de ces fichiers ( amendements COM-46 du rapporteur et COM-37 de Marie-Pierre de la Gontrie) .

Surtout, le rapporteur rappelle à nouveau que si ces outils numériques destinés à briser les chaines de contamination permettent un suivi et des réponses plus rapides et plus massifs face à l'ampleur des contaminations, leur puissance et leur caractère particulièrement intrusif posent aussi de graves questions au regard des libertés fondamentales : la nature exceptionnelle et dérogatoire de ces fichiers, qui impliquent l'échange massif de données personnelles relatives à la santé, au besoin sans recueillir le consentement des intéressés et en s'affranchissant du secret médical, nécessite des garanties particulières, un contrôle renforcé et une évaluation précise de leur efficacité.

À cet égard, si de nombreuses garanties juridiques ont été apportées - et renforcées à l'initiative du Sénat - dans la loi qui a autorisé la mise en oeuvre ces systèmes d'information, et si la CNIL a entamé de solides campagnes de contrôle de leur fonctionnement, l'évaluation de l'efficacité sanitaire réelle des outils numériques de lutte contre la Covid semble aujourd'hui être le parent pauvre de l'action gouvernementale en la matière. Près de quatre mois après le lancement de ces systèmes d'information, la CNIL, dans son avis au Parlement, demande encore à « disposer d'indicateurs de performance des systèmes d'information déployés, afin de pouvoir mesurer leur efficacité au regard des objectifs poursuivis » et « estime qu'une grille d'analyse devrait être établie au regard d'indicateurs d'efficacité sanitaire ». Dès lors, tout en approuvant l'amendement voté à l'Assemblée nationale afin de renforcer le contenu du rapport trimestriel demandé au Gouvernement et de préciser qu'il doit comprendre des indicateurs d'activité, de performance et de résultats, le rapporteur doute que cette modification soit suffisante sans une réelle mobilisation du Gouvernement en ce sens.

Enfin, souhaitant préciser certaines garanties encadrant la mise en oeuvre de ces systèmes d'informations , la commission des lois, à l'initiative de son rapporteur, a de nouveau prévu la fixation d'une liste limitative de données pouvant être collectées pour la finalité de recherche épidémiologique , comme le préconisait la CNIL sans avoir été suivie par le Gouvernement ( amendement COM-47) .


* 19 Pour mémoire, le Sénat avait introduit cette disposition afin de reconnaître juridiquement l'action des organismes qui assurent une importante mission d'accompagnement social des personnes touchées par l'épidémie, comme les centres communaux d'action sociale (CCAS), tout en prévoyant dans ce cas de conditionner le traitement de ces données au recueil préalable du consentement des intéressés, garantie reprise par le texte du présent projet de loi.

Page mise à jour le

Partager cette page