B. LES ENSEIGNEMENTS DE LA TERRIBLE CATASTROPHE DU 24 MARS 1999

L'incendie survenu dans le tunnel dans la matinée du 24 mars 1999 s'est révélé d' une ampleur et une gravité exceptionnelles .

L'accès aux entrées du tunnel, à environ 1 300 mètres d'altitude, s'effectue par de longues et fortes rampes : de ce fait, les risques de débuts d'incendie sur des véhicules, notamment les poids lourds, y sont plus élevés que pour des tunnels de plaine.

Ce jour-là 1 ( * ) , un camion frigorifique semi-remorque belge transportant de la farine et de la margarine a pris feu, 6 km après l'entrée française du tunnel, c'est-à-dire dans la zone la plus éloignée des deux têtes de l'ouvrage. L'incendie s'est très rapidement propagé. En outre, une utilisation défaillante du système de ventilation côté italien a aggravé le sinistre. L'action des secours provenant de France et d'Italie s'est avérée très difficile. Du fait des fumées, les secours n'ont pu atteindre le camion. L'incendie n'a été circonscrit que dans l'après-midi du 26 mars, après que 24 poids lourds, 9 véhicules légers, une moto et deux véhicules de secours eurent été détruits.

Le bilan définitif de l'incendie, particulièrement lourd, s'élève à 39 morts.

La catastrophe a donné lieu à des poursuites judiciaires et le 27 juillet 2005, le tribunal correctionnel de Bonneville (Haute-Savoie) prononçait treize condamnations frappant à des degrés divers des responsables ou dirigeants des deux sociétés concessionnaires, française et italienne, ainsi que ces sociétés elles-mêmes. Également condamné par le tribunal de Bonneville au motif d'une défaillance dans l'exercice de ses pouvoirs de police, le maire de Chamonix a été relaxé par la Cour d'appel de Chambéry le 14 juin 2007.

Deux missions administratives d'expertise , l'une française 2 ( * ) et l'autre italienne, ont été mises en place par chacun des deux gouvernements dans les jours qui ont suivi la catastrophe. Ayant échangé leurs constatations et analyses, les deux missions ont rendu le 6 juillet 1999 un rapport commun détaillant les circonstances de la catastrophe et énonçant 41 recommandations , au vu notamment des insuffisances ou déficiences constatées.

Une première série de recommandations portait sur l' organisation institutionnelle . Le rapport proposait diverses mesures destinées à améliorer le fonctionnement de la commission intergouvernementale de contrôle, ainsi que la création auprès d'elle d'un comité technique de sécurité assurant le suivi permanent des questions de sécurité dans le tunnel. Il rappelait que la convention franco-italienne du 14 mars 1953 avait prévu de confier la gestion du tunnel à une société unique , dont le capital aurait été réparti pour moitié entre les deux concessionnaires. Constatant que cette société commune n'avait jamais vu le jour et, qu'en outre, deux directions d'exploitation distinctes avaient perduré, le rapport demandait la constitution d'une structure de gestion unique .

En ce qui concerne les installations de sécurité et d'exploitation , le rapport préconisait certains travaux de génie civil (notamment le doublement du nombre des refuges), ainsi que la modernisation et le renforcement des équipements (mise en place d'une salle de commande unique, au lieu des deux salles existantes, remise à niveau des dispositifs de mesure de données relatives à la sécurité, amélioration du réseau électrique, amélioration de la signalisation, réfection profonde du système de ventilation pour accroître le débit d'extraction de l'air vicié).

Le rapport commun franco-italien recommandait également de revoir l' organisation des moyens de secours . Il préconisait la mise en place par l'exploitant d'un service de première intervention permanent, à chaque entrée du tunnel, et l'élaboration d'un plan de secours binational unique, se substituant aux plans de secours français et italien qui n'étaient pas identiques jusqu'en 1999.

Enfin, le rapport soulignait la nécessité d'améliorer l'information des usagers et de durcir la réglementation des véhicules autorisés à emprunter le tunnel.


* 1 Développements tirés du rapport de votre commission sur le projet de loi de ratification de la Convention de Lucques, 2008

* 2 Voir le rapport de la mission administrative d'enquête technique de MM. Duffé et Marec.

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