C. LA COMPLEXITÉ DE LA PROCÉDURE AMIABLE PEUT DISSUADER LES VICTIMES D'Y RECOURIR

La procédure amiable est particulièrement complexe du point de vue de vue des victimes . L'APESAC avance ainsi qu'il faut : « rassembler le dossier médical de la mère pour prouver la consommation de Dépakine puis le dossier de l'enfant pour prouver les dommages. Certains dossiers font plus de 800 pages . » Des chiffres similaires sur le nombre de dossiers ont été évoqués par l'ONIAM. Plusieurs facteurs expliquent la lourdeur de ces dossiers.

Bien que l'établissement d'une présomption de causalité à la prise de valproate de sodium lors du constat de malformations ou de troubles du développement a permis de faciliter le traitement des dossiers, il n'en demeure pas moins qu'il est nécessaire de caractériser les préjudices .

Les préjudices découlant de l'exposition in utero au valproate de sodium sont de nature diverse : ils comprennent notamment des malformations, des troubles du développement et des troubles du spectre autistique ; l'ensemble de ces troubles étant cumulables. Il est ainsi estimé que chaque dossier Dépakine comprend en moyenne une dizaine de préjudices .

De plus, les troubles du neuro-développements sont particulièrement difficiles à évaluer sur le plan médical : il est nécessaire de faire des diagnostics et de passer des tests en centres spécialisés, ceux-ci pouvant prendre des mois voire davantage.

Outre la taille des dossiers, l'ancienneté de certaines pièces requises est l'une des difficultés majeures pour les victimes . Il est nécessaire pour les femmes de récupérer des pièces qui se trouvent dans des archives des médecins. Or, en raison de l'ancienneté de la prise de valproate de sodium, certains documents ne sont plus accessibles (détruits, perdus...), voire, dans certains cas, les médecins prescripteurs sont décédés.

Il resterait l'avantage du coût pour les familles : le dispositif amiable serait bien moins cher que la voie contentieuse . En effet, d'après des représentants d'une association de victimes, le coût d'une expertise judiciaire pour une victime est de 500 euros de frais d'huissier, 1 500 à 2 500 euros de frais d'avocats, 1 500 à 2 500 euros de frais de médecin conseil, et enfin de 3 500 à 6 000 euros pour les honoraires de l'experts. Les frais d'expertise sont particulièrement variables, en raison des différences de complexité entre les dossiers. À ces chiffres il faut ajouter les frais de déplacement et les frais afférents.

En comparaison, un avocat n'est en théorie pas nécessaire pour mener la procédure amiable, et les frais d'expertise sont pris en charge par l'ONIAM.

Toutefois, dans la pratique, les familles font souvent réaliser des expertises pour l'élaboration des dossiers, et la procédure amiable a été en partie « juridictionalisée » : un cabinet d'avocats, qui exerce un quasi-monopole sur le sujet, gère la majorité des dossiers Dépakine déposés à l'ONIAM. Le coût de la procédure amiable n'est donc en fin de compte pas beaucoup plus avantageux pour les familles que la voie contentieuse .

Il faut ajouter que les femmes qui prennent de la Dépakine sont des femmes qui souffrent d'épilepsie. L'épilepsie est une maladie chronique, qui est particulièrement handicapante pour les personnes qui y sont sujettes . Des déplacements par exemple peuvent être rendus bien plus compliqués par cette maladie. Enfin, les familles ont à la charge un ou des enfants malades, parfois lourdement handicapés, ce qui rajoute une difficulté supplémentaire aux démarches . L'accessibilité à un dispositif d'indemnisation comme celui-ci doit donc faire l'objet d'une attention particulière .

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