II. LES CAUSES DU NON-RECOURS SONT PARTAGÉES ENTRE PLUSIEURS FACTEURS, DONT DES RETARDS DANS LA PROCÉDURE D'INDEMNISATION

A. MÊME SI DES DONNÉES PRÉCISES NE SONT PAS DISPONIBLES, LE NON-RECOURS AU DISPOSITIF D'INDEMNISATION EST PROBABLEMENT IMPORTANT

La question du non-recours au dispositif d'indemnisation pour les victimes du valproate de sodium est fondamentale.

Il n'existe toutefois pas de données concernant le non-recours au dispositif d'indemnisation pour la Dépakine . Toutefois, l'écart entre les estimations épidémiologiques et le nombre de dossiers déposés est tel qu'un phénomène de non-recours important au dispositif est probable .

À cet égard, aucune des personnes interrogées par le rapporteur spécial n'a nié l'existence d'un non-recours significatif au dispositif d'indemnisation. Le rapport conjoint de l'IGF et de l'IGAS affirmait par ailleurs que le niveau de recours au dispositif est probablement « faible », même s'il n'est pas possible d'en donner une estimation 18 ( * ) .

La mission conjointe de l'IGF et de l'IGAS précise que « qu'aucun travail d'envergure (avec Santé publique France par exemple) n'a été initié pour estimer le niveau de recours au dispositif de l'ONIAM. » 19 ( * ) Le rapporteur spécial souligne qu'un tel travail serait pourtant indispensable pour évaluer correctement l'efficacité du dispositif d'indemnisation.

Recommandation n° 1 : initier une étude pour estimer le niveau de recours au dispositif d'indemnisation amiable pour les victimes du valproate de sodium.

Pour expliquer le non-recours au dispositif, les représentants de l'administration ont évoqué en audition la médiatisation relativement faible de l'affaire de la Dépakine, en comparaison en particulier de l'affaire du Médiator .

La différence de médiatisation entre les deux affaires est visible, et elle peut effectivement expliquer que certaines familles ne connaissent pas le dispositif d'indemnisation pour les victimes du valproate de sodium. Par ailleurs, les troubles du neurodéveloppement, qui sont l'un des préjudices majeurs de l'exposition in utero au valproate de sodium, sont des symptômes peu spécifiques, au sens où ils peuvent découler de nombreuses causes différentes. Par conséquent, des familles qui connaissent ces préjudices peuvent ne pas faire le lien avec la prise de Dépakine durant la grossesse .

Une campagne d'information a été mise en oeuvre à l'automne 2019. Elle reposait sur la diffusion d'une fiche d'information à destination des associations de patients, des professionnels des structures sanitaires et médico-sociales et des ordres professionnels. Elle vise en particulier les centres de compétence et de référence ANDDI-rares et DéfiScience, centres référents pour les troubles du langage et des apprentissages, centres ressources autisme, les plateformes orientation et diagnostic autisme.

Ces fiches d'information sont utiles, mais le ciblage sur les établissements spécialisés dans certains troubles du neurodéveloppement peut conduire à manquer des familles, étant donné que ces troubles sont souvent sous-diagnostiqués . L'information sur l'existence du dispositif d'indemnisation pour les victimes du valproate de sodium, et plus généralement sur l'affaire de la Dépakine, doit donc être élargie .

La décision du 5 janvier 2022 a provoqué un regain de médiation sur l'affaire de la Dépakine. Par ailleurs, le Tribunal prévoit dans sa décision la publication d'extraits du jugement dans la presse écrite.

Recommandation n° 2 : renforcer et élargir la campagne d'information au sujet du dispositif d'indemnisation pour les victimes de la Dépakine.

Enfin, l'impossibilité de formuler un recours devant le juge après acceptation d'une offre de l'ONIAM, qui est intrinsèque au fonctionnement d'une procédure amiable, peut également dissuader des familles de formuler un recours.

Ces facteurs ne suffisent toutefois pas à expliquer l'ampleur du
non-recours au dispositif d'indemnisation. Des décisions de justice importantes ont été rendues depuis la création du dispositif, sans qu'elles ne donnent lieu à un afflux notable de nouveaux dossiers.

Le dispositif d'indemnisation pour les victimes du valproate de sodium présente également des faiblesses intrinsèques, qui peuvent dissuader les familles de demander réparation par la voie amiable .

En particulier, le dispositif d'indemnisation a connu des retards très importants, au point que les délais étaient comparables à ceux des juridictions. Le dispositif est également complexe pour les familles, et les indemnités sont moins intéressantes par rapport à celles prononcées par les juridictions.


* 18 Consolider l'indemnisation publique dans le champ de la santé : enjeux et modalités du rapprochement entre le FIVA et l'ONIAM, IGF et IGAS, Février 2021, page 30.

* 19 Ibid.

Page mise à jour le

Partager cette page