N° 590

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 28 juin 2017

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur l' assistance macrofinancière de l' Union européenne aux pays tiers ,

Par M. François MARC,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, Claude Nougein, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les principales observations

1. L'assistance macrofinancière vise à répondre, en complément de l'intervention du Fonds monétaire international (FMI), à des besoins exceptionnels de financement extérieur de pays qui sont « politiquement, économiquement et géographiquement proches de l'Union européenne ». Elle prend la forme de dons ou de prêts effectués à partir de fonds levés par la Commission européenne sur les marchés financiers et garantis par le budget communautaire.

2. Cette assistance s'est développée à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique. Entre 1990 et 2016, 63 opérations d'assistance au profit de 27 pays - dont huit sont aujourd'hui membres de l'Union européenne - ont été approuvées, représentant un montant total de prêts et de dons autorisés de 11,45 milliards d'euros . Entre 2007 et 2013, 57 % de l'assistance décaissée correspondait à des prêts et 43 % à des dons ; entre 2014 et 2017, le montant de don décaissé a chuté à 1 % (58 millions d'euros).

3. Depuis 2014, plusieurs opérations d'assistance de grande ampleur, sous la forme de prêts , ont été décidées au profit de l' Ukraine (3,4 milliards d'euros au total), de la Tunisie (500 millions d'euros en 2016) et de la Jordanie (200 millions d'euros), portant ainsi l'encours total de prêts à 4,6 milliards d'euros fin 2017 contre 565 millions d'euros fin 2013.

4. À l'avenir, l'assistance macrofinancière aux pays tiers devrait continuer de croître compte tenu de la décision des institutions européennes de porter la capacité de prêt de ce programme à 2 milliards d'euros par an en 2019 et en 2020 , dans le cadre de la révision du cadre financier pluriannuel 2014-2020.

5. À la suite de l'échec de la proposition de règlement-cadre présentée en 2011, l'assistance macrofinancière se distingue par son très faible degré d'encadrement juridique , chaque opération faisant l'objet d'une analyse au cas par cas.

6. Les opérations d'assistance ont effectivement contribué à la stabilisation macroéconomique à court terme dans la plupart des pays bénéficiaires , même si cet impact est généralement limité voire indirect.

7. En dépit de certaines insuffisances, les conditionnalités en matière de réformes structurelles prévues dans le cadre des programmes d'assistance ont permis à certains pays d'accomplir des progrès en matière de gestion des finances publiques et dans les secteurs bancaire et financier.

8. Malgré la forte hausse de l'encours de prêts, l'assistance macrofinancière présente un faible risque financier pour l'Union européenne : aucun pays bénéficiaire n'a fait défaut à ce jour et chaque prêt fait l'objet d'un provisionnement au sein du Fonds de garantie pour les relations extérieures . En 2017, 241 millions d'euros ont ainsi été transféré du budget général de l'Union vers le fonds de garantie pour couvrir les prêts accordés.

9. Les considérations d'ordre politique semblent jouer un rôle croissant dans les décisions d'octroi d'assistance macrofinancière, sans que ceci soit toujours clairement assumé par les institutions européennes.

10. Le cas de la Moldavie , qui s'est vue accorder en juin 2017 une nouvelle assistance de 100 millions d'euros , illustre la montée en puissance des préoccupations politiques en matière d'assistance macrofinancière ainsi que les dilemmes auxquels l'Union européenne peut être confrontée dans sa volonté de soutenir un processus de réforme économique et politique.

Les recommandations

Recommandation n° 1 : mieux encadrer juridiquement le recours à l'assistance macrofinancière grâce à l'adoption au niveau européen d'un règlement spécifique à cet instrument financier afin de renforcer la sécurité juridique et la cohérence de l'action extérieure de l'Union.

Recommandation n° 2 : réserver effectivement l'assistance macrofinancière aux pays en grave difficulté financière nécessitant une intervention urgente et privilégier, dans les autres cas, le financement de projets ou de programmes d'action ciblés.

Recommandation n° 3 : clarifier les modalités de partage entre les prêts et les dons accordés au titre de l'assistance macrofinancière.

Recommandation n° 4 : mieux préciser la conditionnalité de nature politique visant à prendre en considération la situation du pays au regard du respect des principes démocratiques, de l'État de droit ou des droits de l'homme, en vue de compléter les conditionnalités économiques et financières définies dans le protocole d'accord entre la Commission européenne et le pays bénéficiaire.

Recommandation n° 5 : prévoir une nouvelle clause de suspension, voire d'annulation, du versement de l'assistance en cas de menace pour l'indépendance du système judiciaire ou de révélation d'un fait majeur de corruption dans le pays bénéficiaire.

Recommandation n° 6 : renforcer les pouvoirs de contrôle des États membres durant la phase de mise en oeuvre des assistances, en leur conférant un pouvoir de décision sur chaque décaissement dans le cadre du comité existant chargé d'assister la Commission européenne dans ses compétences d'exécution (« comitologie »).

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