B. LA RESTRUCTURATION DES MISSIONS CONFRONTÉE AUX FAITS, UN DÉCALAGE AU DÉTRIMENT DE LA QUALITÉ DE L'ADMINISTRATION DU LOCAL PAR L'ÉTAT

Les évolutions des moyens du réseau préfectoral et sa situation actuelle d'emploi conduisent à s'interroger sur leur lien avec les reformulations des missions des sous-préfectures rappelées dans la première partie du présent rapport.

En ce domaine, la rationalisation des missions les plus traditionnelles n'a pas eu tous ses prolongements, pour des raisons assez contrastées, tandis que le développement de certaines priorités nouvelles n'a pas été accompagné des moyens de leur expression.

En bref, la mue du réseau des sous-préfectures en direction du modèle d'administration de mission, tout comme pour les préfectures, n'a été qu'entamée, qui plus est dans son volet le moins ambitieux, celui de la réduction des effectifs.

Dans ce contexte, le niveau de qualité de l'administration du local par l'État inspire des inquiétudes justifiées .

Structure par mission des crédits d'Administration territoriale

(en %)

2007

2017

Écart 2017/2007

Coordination de la sécurité des personnes et des biens

12

9,8

- 2,2

Garantie de l'identité et de la nationalité, délivrance de titres

38,3

40,6

+ 2,4

Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales

11,5

8,9

- 2,6

Pilotage territorial des politiques gouvernementales

26

30,9

+ 4,9

Soutien et animation du réseau des préfectures (libellé modifié)

12,4

9,8

- 2,6

Total

100

100

0

Si le désengagement des activités de guichet, liées à la délivrance des titres, a été poursuivi avec continuité, mais sans prolongements tout à fait aboutis sur la structure des emplois des sous-préfectures, les hésitations sur la définition des missions des unités du réseau préfectoral ont particulièrement touché les conditions d'exercice du contrôle de légalité, et tout particulièrement le rôle exercé en ce domaine par les sous-préfectures.

S'agissant des missions à plus fort rendement socio-économique, le décalage entre les volontés affichées et les moyens ressort comme d'autant plus frappant que des fonctions plus régaliennes, celles liées à la sécurité, ont subi des pertes d'emplois.

1. La délivrance des titres, le désengagement par étapes d'une mission de guichet pour tous les français, des reports de charges, conséquence habituelle du retrait de l'État, des perspectives qui doivent être appréciées en fonction du renouvellement et de la complexification des flux de demandes

Depuis une dizaine d'années, des mesures importantes ont été mises en oeuvre afin de réorganiser complètement le circuit de délivrance des titres officiels.

L'État, poursuivant des objectifs d'optimisation des conditions de production et de délivrance des titres, a souhaité dégager ses unités territoriales d'une charge qui, inévitablement, a été reportée sur d'autres intervenants, les collectivités territoriales en particulier, et principalement les mairies mais aussi, parfois, les usagers.

Ce désengagement a été mené en plusieurs étapes et il constitue le coeur du PPNG.

Le désengagement des opérations de guichet, une chronique qui se prolonge

Le rôle de l'administration préfectorale en matière de délivrance des titres a été réduit lors de la mise en place du passeport biométrique en 2009 , avec un transfert de responsabilité des préfectures et des sous-préfectures vers les mairies, celles-ci assurant, pour l'essentiel, les missions de recueil des demandes et des pièces justificatives et de remise des passeports aux usagers.

Par ailleurs, le développement de téléprocédures a permis d'ajouter une mécanique alternative aux déplacements dans les unités du réseau préfectoral pour accomplir un certain nombre de formalités ou se procurer des renseignements. Ainsi, le changement d'adresse ne nécessite plus obligatoirement de démarche en préfecture pour apporter la modification nécessaire sur le certificat d'immatriculation , grâce à l'ouverture de la télédéclaration en ligne. De même, un service en ligne permettant aux usagers d'obtenir leur relevé de points de permis de conduire a été mis en place (service « télépoints »).

Ce désengagement est également manifeste s'agissant de la délivrance des certificats d'immatriculation des véhicules . En effet, depuis la mise en place du système d'immatriculation des véhicules (SIV) entré en application en 2009, les propriétaires peuvent faire immatriculer leurs véhicules soit directement chez les professionnels de l'automobile habilités par le ministère de l'intérieur, soit en préfecture. Depuis son entrée en vigueur, le SIV rénové a délivré 67,7 millions de certificats d'immatriculation dont 11,5 millions pour l'année 2015, la part des opérations passant par les professionnels, qui continue d'augmenter, étant de 93,60 % pour les véhicules neufs et 44 % pour ceux d'occasion. Au total, les professionnels utilisant le SIV, dont le nombre augmente (27 065 en 2015 contre 25 852 fin 2014) traitent 57,3 % des opérations (54,15 % l'année précédente). Le réseau préfectoral assure désormais une minorité des opérations (environ 43 %).

D'après le ministère de l'intérieur, la mise en place du SIV a permis de réduire de 317 ETPT le nombre d'effectifs dans l'administration préfectorale entre 2009 et 2012, évaluation qui peut être mise en regard avec les 1 095 suppressions d'ETPT liés à la mission générale de délivrance des titres et d'accueil du public entre 2007 et 2016.

Par ailleurs, afin de rationaliser le processus d'instruction des demandes de passeport et de naturalisation, le ministère de l'intérieur a créé des plateformes interdépartementales ou régionales, censées prendre le relais du réseau préfectoral . Il s'agit de :

47 « centres d'expertise et de ressources titres » (CERT) spécialisés (hors préfecture de police) en métropole et dans 8 CERT en outre-mer . Des cellules de lutte contre la fraude seraient intégrées à chaque CERT. La constitution de ces structures interdépartementales auprès de certaines préfectures prolonge l'expérience des plateformes chargées de l'instruction des demandes de passeports biométriques déployées à partir de septembre 2014 17 ( * ) à laquelle le ministère de l'intérieur a associé un gain de 80 ETPT (soit une économie estimée à 3,6 millions d'euros) ;

La mise en place des plateformes d'instruction des demandes de naturalisation, déjà mentionnée. D'après les informations transmises par le ministère de l'intérieur à votre rapporteur spécial, cette réforme a permis de réaliser un gain d'une soixantaine d'ETPT .

Ces restructurations se poursuivraient en 2017.

Il est prévu ainsi de mettre en place de nouveaux « centres d'expertise et de ressources titres - CERT » pour traiter des demandes de cartes nationales d'identité , de permis de conduire et de certificats d'immatriculation , selon le calendrier suivant :

« CNI-passeports »

Conditions du déploiement à l'automne 2016 : mise en place du système d'information unique dit « Titres Électroniques Sécurisés » (TES) dans les mairies accueillant les dispositifs de recueil (DR) des demandes, ouverture au public des pré-demandes en ligne et engagement des travaux immobiliers dans les CERT qui le justifient.

Novembre 2016 : expérimentation départementale dans les Yvelines. Seules les mairies de ce département équipées de dispositifs de recueil (DR) reçoivent les demandeurs de CNI, les autres mairies remettent les dernières CNI saisies dans la précédente application pendant trois mois, date limite pour les usagers pour récupérer leur titre.

Décembre 2016 : expérimentation régionale en Bretagne, sur le CERT de Quimper, site-pilote régional. Dans toute la région, seules les mairies équipées de DR reçoivent les demandeurs de CNI et les transmettent par TES au CERT de Quimper.

À partir de février 2017 : généralisation du déploiement de tous les CERT métropolitains, jusqu'à fin mars 2017.

« Permis de conduire »

Conditions du déploiement entre automne 2016 et début 2017 : mise à disposition progressive des télé-procédures de demandes de permis jusqu'au 30 novembre 2016 et engagement des travaux immobiliers jusqu'à l'été 2017.

Avril-mai 2017 : expérimentation au CERT de Mulhouse, sur un périmètre pluri-départemental.

Septembre 2017 : ouverture du CERT de Nantes, à compétence nationale pour les échanges de permis étrangers et les permis internationaux. Novembre 2017 : déploiement généralisé des CERT, avec fermeture concomitante des guichets d'accueil.

« Système d'immatriculation des véhicules (SIV) »

Conditions du déploiement, début 2017 : mise à disposition de quatre télé-procédures entre février et juillet 2017 et ouverture d'une procédure de demande dématérialisée pour les autres opérations. Arrêt de la prise en charge par les préfectures des procédures pouvant être effectuées par les professionnels habilités. Réalisation des travaux immobiliers sur les sites qui le nécessitent.

Octobre 2017 : ouverture d'un CERT pilote à Besançon, avec fermeture des guichets au public.

Novembre 2017 : déploiement généralisé des CERT « SIV », avec fermeture concomitante des guichets d'accueil.

Il faut naturellement mentionner encore la création de l'ANTS par décret du 22 février 2007 inscrite dans la volonté de réforme de l'État et de rationalisation de ses moyens .

Les réorganisations d'ampleur mises en oeuvre , qui ont eu pour effet de transférer la charge d'un certain nombre de process sur les communes, dans des conditions contestables de compensation des coûts, et qui se sont accompagnées pour certains usagers de dépenses supplémentaires (comme dans le cas des certificats d'immatriculation) ou de difficultés d'accès aux services de délivrance, ne semblent pas avoir exercé tous leurs effets sur le niveau des emplois mobilisés dans les préfectures et sous-préfectures par la délivrance des titres, malgré les mutualisations et le s téléprocédures mises en oeuvre.

Ainsi qu'on l'a mentionné ci-dessus, une proportion encore considérable des emplois du réseau sous-préfectoral est encore consacrée à cette mission.

La répartition géographique de ces emplois n'est pas connue si bien que le maintien de l'accessibilité aux guichets ne peut être apprécié à raison des besoins concrets des populations.

Le niveau du plan de charge des personnels recensés comme participant à cette mission ne peut davantage être apprécié dans la mesure où le volume des titres délivrés par agent ne fait l'objet d'aucune indication.

Dans ces conditions, la structure des emplois du réseau encore très marquée par le poids de la gestion des titres paraît difficile à justifier, de même que l'ampleur comparativement limitée des réductions d'emplois liées à une activité supposée en voie d'extinction.

Recommandation : compte tenu des réorganisations intervenues dans les prestations de délivrance des titres, dont les conditions d'accompagnement pour les communes et les usagers appelleraient des développements propres, achever de mettre en oeuvre les ajustements d'emplois correspondants dans les sous-préfectures.

Il reste à observer qu'une partie de l'inertie des emplois ainsi positionnés dans les sous-préfectures serait liée à l'essor des moyens nécessaires à la délivrance des titres étrangers qui mobiliseraient 749 emplois sur les 1 726,59 recensés au titre de cette mission.

Si cette variable paraît loin d'expliquer à elle seule l'emprise que la mission de délivrance des titres exerce encore sur les moyens des sous-préfectures, elle doit être pleinement prise en compte, la gestion des effectifs devant ne pas sacrifier la qualité des procédures mises en oeuvre.

On envisage pour l'avenir qu'un certain nombre de réformes permettent d'optimiser la gestion des demandes de titres étrangers par les différentes composantes du réseau préfectoral.

La réorganisation des conditions d'accueil des étrangers dans le cadre de la nouvelle architecture du traitement des demandes d'asile (mise en place de 34 guichets uniques d'accueil des demandeurs d'asile sur l'ensemble du territoire métropolitain auxquels concourent les agents des préfectures), de la réorganisation territoriale de l'instruction des demandes de naturalisation (déploiement de 43 plates-formes interdépartementales de naturalisation achevé fin 2015 se substituant aux 186 sites d'instruction en préfecture et sous-préfecture), généralisation par la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France du titre de séjour pluriannuel (TPA) devraient permettre de libérer quelques-uns de ces emplois.

Il reste que ces réorganisations doivent être considérées sous l'angle de la qualité des procédures s'agissant d'un flux de dossiers qui a connu une forte expansion et dont le traitement appelle à l'évidence un soin particulier.

On rappelle à ce propos qu'en 2015, les guichets uniques ont fait face à une augmentation de 37 % des demande d'asile par rapport à 2014, cette tendance s'étant poursuivie en 2016 (augmentation de 20 % au 30 avril 2016) quand l'augmentation du nombre de demande de naturalisation par décret a été elle-même très sensible (+ 13 %, soit 67 063 demandes).

La surcharge des services justifiée par ces nouvelles demandes et la nécessité d'améliorer une situation dont les travaux de l'inspection générale de l'administration ont clairement établi le caractère très insatisfaisant imposeront sans doute de trouver dans des ajustements d'emplois qui n'ont pas été suffisantes dans le passé les moyens que ne permettront pas de dégager les réorganisations de process entreprises.

Recommandation : veiller à ce que les moyens d'un traitement irréprochable des demandes de titres étrangers soient réunis.

2. Le contrôle de légalité et le conseil aux collectivités territoriales

S'agissant du contrôle de légalité , qui est une mission constitutionnelle des préfets , un grand nombre d'évolutions sont intervenues pour rationaliser une activité en crise.

Celle-ci a fait l'objet d'une série d'audits aboutissant à des recommandations récurrentes tendant à en améliorer l'efficacité afin de préserver l'intégrité des actes réglementaires et financiers des collectivités territoriales et, au-delà, un principe d'égalité devant la loi et les règlements affecté par l'inégale vigilance des services chargés de cette mission .

Dans ce contexte, le sort de l'activité de contrôle dans les sous-préfectures a fait l'objet d'orientations qui témoignent d'une forme d'hésitation , l'objectif d'un désengagement de cette activité formulé un temps se trouvant nuancé ultérieurement, alors même qu'une professionnalisation du contrôle de légalité impliquant une plus forte centralisation faisait l'objet d'une série d'initiatives.

L'une des premières orientations mises en oeuvre a toutefois consisté à restaurer les conditions de faisabilité même du contrôle , les services de l'État tendant à se trouver débordés par la multiplication des actes à contrôler.

Une réduction du périmètre du contrôle

Le périmètre des actes soumis au contrôle a été fortement réduit. Plusieurs lois ont été adoptées à cette fin.

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a soustrait à l'obligation de transmission un certain nombre de décisions en matière de circulation, d'avancement d'échelon et de sanction des fonctionnaires territoriaux ou encore d'urbanisme.

La loi du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit a poursuivi ce mouvement, suivie deux ans plus tard par l'ordonnance du 17 novembre 2009 portant simplification de l'exercice du contrôle de légalité.

À l'issue de ces dispositions, le nombre d'actes transmis dans le cadre du contrôle de légalité a connu une très forte contraction puisqu'il est passé de 8 300 000 réceptions d'actes en 2004 à 5 121 668 en 2013.

Ce repli de près de 40 % a, du moins en théorie, allégé d'autant la charge du contrôle pour les services préfectoraux.

En second lieu, par les circulaires du 17 janvier et du 25 janvier 2012, des priorités de contrôle ont été définies et le préfet de département a été chargé, dans ce cadre, d'arrêter chaque année une stratégie de contrôle.

Des priorités de contrôle

L'architecture des priorités de contrôle recouvre plusieurs strates avec, d'abord, des priorités nationales définies afin de constituer un socle harmonisé de contrôles prioritaires sur l'ensemble du territoire, trois champs étant concernés : la commande publique, l'urbanisme et la fonction publique territoriale. Dans chacun d'eux, des actes prioritaires, dont le taux de contrôle doit être de 100 %, sont définis par des circulaires thématiques.

Au-delà, dans les préfectures appartenant aux strates de population les plus élevées , les préfets ont la faculté d'adapter les différents seuils.

Des priorités locales sont par ailleurs définies pour chaque préfecture, afin de prendre en compte le contexte local soit en raison des caractéristiques et de la géographie du département soit en raison d'irrégularités précédemment relevées.

Enfin, pour les actes dont le contrôle n'est pas prioritaire un contrôle aléatoire doit s'exercer afin de ne pas exclure par principe du contrôle des actes dont la transmission au représentant de l'État demeure obligatoire.

En outre, la chaîne du contrôle a été simplifiée avec l'instruction donnée aux sous-préfectures de réduire leur implication dans les processus et la poursuite d'un objectif consistant à développer la transmission dématérialisée des actes des collectivités soumis au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire .

La transmission électronique des actes

La transmission électronique des actes passe par l'application « ACTES ».

Le taux de collectivités enregistrées dans l'application augmente chaque année de façon significative. En taux constant calculé à partir d'une cible initialement évaluée à 56 000 collectivités, le taux d'émetteurs enregistrés (50 %, soit 28 000 ) au 31 décembre 2015 est nettement supérieur au taux atteint au 31 décembre 2014 (42 %) mais il demeure que près de la moitié de la cible n'est pas atteinte.

En outre, si le taux d'actes transmis par l'intermédiaire d'ACTES rapportés au nombre total d'actes transmis au titre du contrôle de légalité est, avec 46 % (soit 2 439 000 actes) , supérieur au taux atteint en 2014 (40 %), une partie de cette progression pouvant être imputée à la baisse de 10 % du nombre d'actes reçus au titre du contrôle de légalité en 2015 par rapport à 2014, il reste inférieur à la moitié des actes potentiellement transmissibles au titres du contrôle de légalité.

Actuellement, les communes représentent la très grande majorité des émetteurs (66 %), suivies des établissements publics de coopération intercommunale (18 %) et des établissements publics locaux (13 %). Il faut craindre que le taux d'utilisation de la télétransmission connaisse un déploiement moins rapide à l'avenir, les utilisateurs les mieux à même d'y recourir étant déjà entrés dans le système.

La dématérialisation demeure encore très insuffisamment pratiquée, obligeant à des traitements physiques coûteux.

Un effort d'accompagnement devra être entrepris si l'on veut que le recours à la dématérialisation puisse effectivement progresser dans les années à venir comme la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi « NOTRe » 18 ( * ) , l'a prévu. On rappelle que la loi étend l'obligation de transmission dématérialisée des documents budgétaires soumis à contrôle à toutes les collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants dans un délai de cinq ans.

S'agissant précisément de l'engagement des sous-préfectures dans la chaîne du contrôle de légalité , il donne lieu à des débats depuis toujours. La prise en considération des réalités locales est parfois avancée comme un argument commandant la qualité du contrôle tandis que les liens, discutables (voir infra ), entre conseil aux collectivités et contrôle sont également mis en avant.

C'est sans doute pour ces raisons que l'évolution vers une centralisation du contrôle de légalité en préfecture , et le désengagement concomitant des sous-préfectures de cette mission, qui, au demeurant, rejoignent la lettre de la Constitution, qui confère cette compétence au préfet 19 ( * ) , n'a pas trouvé tous ses prolongements.

Ainsi l'a rappelé la Cour des comptes dans son insertion au rapport public de 2016 sur le contrôle de légalité.

La Cour des comptes commence par un rappel éclairant des évolutions du cadre général de la répartition de cette compétence entre les différents échelons d'administration territoriale qui en illustrent les ambiguïtés.

« Parallèlement à la définition de priorités stratégiques de contrôle, le rôle respectif des préfectures et des sous-préfectures a été redessiné par la circulaire du 23 juillet 2009 et rappelé par la directive nationale d'orientation des préfectures pour 2010-2015. Dans le cadre de la centralisation du contrôle de légalité, les sous-préfectures ont conservé une fonction de réception et de sélection des actes de leur arrondissement, sur la base de la stratégie de contrôle départementale, ainsi qu'une activité de conseil auprès des élus locaux. Les préfectures, désormais censées concentrer l'essentiel des capacités d'expertise, sont chargées du contrôle des actes de l'ensemble des collectivités du département et de l'appui juridique aux sous-préfectures ».

Au-delà, elle procède au constat d'une très grande diversité prise sur le territoire par un processus de centralisation inachevé .

« La Cour a déjà relevé le caractère inabouti de la centralisation du contrôle de légalité.

Par ailleurs, la centralisation du contrôle peut prendre quatre formes principales : une centralisation complète ; une centralisation laissant aux sous-préfectures les tâches de réception et de tri des actes ; une centralisation partielle maintenant des pôles spécialisés de contrôle dans les sous-préfectures ; une centralisation encore moins poussée laissant l'ensemble des sous-préfectures intervenir dans le contrôle de certains actes, sans spécialisation. Sept des dix-sept préfectures de l'échantillon étudié par la Cour n'avaient que partiellement centralisé le contrôle à la fin de l'année 2014.

En outre, même lorsqu'elle a théoriquement été mise en place, la centralisation du contrôle n'est pas toujours effective. Les sous-préfectures conservent non seulement des tâches à faible valeur ajoutée telles que la réception et le tri des actes, mais effectuent également, dans la majorité des cas, des pré-contrôles qui doublonnent le contrôle réalisé ensuite en préfecture. L'absence de mutation d'agents compétents des sous-préfectures vers les préfectures de département s'est en effet traduite par un maintien du contrôle en sous-préfecture. Les sous-préfectures de Lisieux, Vire, Condom, Mirande, Mortagne-au-Perche, Abbeville, Draguignan et Brignoles, situées dans des départements déclarant une centralisation complète, effectuent toujours le pré-contrôle de certains actes. Plus largement, la part des effectifs des sous-préfectures encore affectés au contrôle de légalité (193,5 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2011 et 154,4 en 2014) témoigne de l'inaboutissement de la réforme et de la dispersion des moyens entre deux échelons d'administrations déconcentrées, au détriment de l'efficacité de la mission. Ainsi, des cas d'absence de transmission des actes en préfecture ont été relevés dans les arrondissements de Lisieux et de Vire.

En prévoyant le maintien d'effectifs en sous-préfectures pour effectuer la réception, le tri et la mise en signature des actes, la réforme de 2009 a nui à la création de pôles d'expertise sur le territoire et a entretenu le doublonnement de tâches ».

Votre rapporteur spécial avait eu l'occasion d'apporter quelques précisions sur ce point dans son rapport sur la mission AGTE dans le projet de loi de finances pour 2017.

Il avait souligné que le personnel dédié au contrôle de légalité dans les sous-préfectures, s'il avait connu une très forte décrue tendancielle, loin d'avoir poursuivi sur cette tendance, était, ces dernières années, reparti à la hausse. Les crédits de personnel consommés à cet effet en 2015 s'étaient élevés à 8,9 millions d'euros, la consommation prévisionnelle des crédits pour 2016 au sein des sous-préfectures devant même augmenter avec une estimation à environ 9,5 millions d'euros.

Les emplois recensés à ce titre représentaient 178,44 ETPT en 2016 , les effectifs augmentant par rapport à 2015 de + 6,8 % si bien que 20 % des effectifs affectés au contrôle de légalité se situaient alors en sous-préfectures.

Contrôle de légalité

Type affectation

2015

Poids

2016 prévisionnel

Poids

Évolution 2015/2016

préfectures

692,10

80,2%

711,31

79,6%

2,8%

Services déconcentrés

3,98

0,5%

4,09

0,5%

2,8%

sous-préfectures

167,03

19,4%

178,44

20,0%

6,8%

Total général

863,10

100,0%

893,84

100,0%

3,6%

Il faut donc constater que le processus de centralisation en préfecture, loin d'avoir été intégral , laisse subsister dans chaque sous-préfecture, ou presque, un ou quelques agents qui semblent assurer des tâches sans grande justification.

Il peut s'agir :

• d'assurer le tri des actes (en fonction des priorités nationales et locales de contrôle) ;

• et de faire l'interface avec la préfecture, chargée du contrôle des actes au fond et de la rédaction des lettres d'observation.

Il est difficile de ne pas considérer que la contribution au contrôle de légalité des sous-préfectures reste très « préalable ».

Le niveau relatif des coûts exposés au titre du contrôle de légalité dans les sous-préfectures dans le total des dépenses de personnel dues au contrôle de légalité, nettement moindre que la part des agents localisés en sous-préfecture dans le total des effectifs qui se consacrent à cette mission, semble d'ailleurs témoigner de la nature globalement routinière des travaux réalisés et conduit à s'interroger sérieusement sur la justification du maintien de cette fonction dans les sous-préfectures .

Cette interrogation sort renforcée d'autres évolutions qu'il faut mettre en évidence dans la mesure où elles témoignent d'un besoin d'amélioration qualitative du contrôle, auquel on ne saisit pas très bien comment les moyens subsistant en sous-préfecture pourraient apporter une contribution ni comment ils pourraient s'en saisir utilement.

Il faut à cet égard mentionner le processus continu de renforcement des capacités d'expertise qui témoigne de l'existence d'un besoin non satisfaites par les structures du réseau préfectoral.

Celui-ci est attendu de la constitution de pôles , appelés à constituer des centres de ressources pour les services territorialisés, et, plus largement, de l'implication de services des directions spécialisées qui doivent permettre de tirer parti d'une spécialisation mais aussi d'une mutualisation de l'expertise.

Cette dernière fait l'objet d'une présentation qui en souligne l'efficacité.

L'appui des services techniques en matière de contrôle de légalité

L'appui des services techniques s'effectue à plusieurs niveaux : dans le cadre du contrôle de légalité proprement dit sur certains actes spécifiques, mais aussi dans la phase amont de celui-ci par l'identification des situations à risques et actes à enjeux.

Cette organisation inter-partenariale est particulièrement développée en matière d'urbanisme où la coopération des préfectures avec les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) se traduit par la mise à disposition au sein des préfectures, d'agents techniciens du droit des sols ou par délégation aux DDTM du contrôle des actes d'urbanisme.

En matière de contrôle des délibérations à caractère financier, les DDFiP, qui disposent du niveau de connaissance technique pour contrôler en amont les délibérations financières nécessaires à l'élaboration des rôles fiscaux, sont également un appui précieux pour le contrôle de légalité. À ce titre, dans le cadre de conventions locales avec le préfet, elles assurent la transmission d'information auprès des services du contrôle de légalité, en vue de faciliter l'analyse des actes et la détection des anomalies éventuelles.

Dans d'autres domaines spécifiques et en fonction de la technicité de la matière, plusieurs services sont également associés au contrôle de légalité. C'est le cas par exemple des services de l'inspection académique qui ont été largement mobilisés sur la mise en oeuvre des rythmes scolaires, ou des directions départementales de la protection des populations en matière de pratiques anticoncurrentielles dans les procédures de commande publique.

L'appui des services techniques s'effectue à plusieurs niveaux : dans le cadre du contrôle de légalité proprement dit sur certains actes spécifiques, mais aussi dans la phase amont de celui-ci par l'identification des situations à risques et actes à enjeux.

Cette organisation inter-partenariale est particulièrement développée en matière d'urbanisme où la coopération des préfectures avec les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) se traduit par la mise à disposition au sein des préfectures, d'agents techniciens du droit des sols ou par délégation aux DDTM du contrôle des actes d'urbanisme.

En matière de contrôle des délibérations à caractère financier, les DDFiP, qui disposent du niveau de connaissance technique pour contrôler en amont les délibérations financières nécessaires à l'élaboration des rôles fiscaux, sont également un appui précieux pour le contrôle de légalité. À ce titre, dans le cadre de conventions locales avec le préfet, elles assurent la transmission d'information auprès des services du contrôle de légalité, en vue de faciliter l'analyse des actes et la détection des anomalies éventuelles.

Toutefois, malgré la disponibilité alléguée des services, il a été indiqué à votre rapporteur spécial que « les préfectures doivent en effet faire face à un déficit global d'expertise à l'égard de dossiers dont la complexité juridique s'est considérablement accrue, qui présentent des enjeux financiers importants et qui requièrent de surcroît une technicité particulière nécessitant de maîtriser l'application de règlementations aux finalités parfois diversifiées (droit de l'urbanisme, domanialité, droit de l'environnement, commande publique, droit de la concurrence, aides économiques etc.) » .

C'est la raison pour laquelle, dans le cadre du PPNG , l'État a choisi de renforcer son rôle dans l'animation du réseau des préfectures afin de les accompagner dans cette mission.

Le « pôle interrégional d'appui au contrôle de légalité » (PIACL), qui exerce depuis 2002 une mission d'expertise juridique auprès des services déconcentrés de l'État placés sous l'autorité du Préfet, a vu son champ de compétence renforcé.

Un renforcement de la mission de soutien du PIACL via la création de deux nouveaux pôles d'expertise, d'appui, et de conseil a été décidé. Il s'agit de deux structures :

- le pôle « dossiers juridiques complexes » ;

- le pôle « assistance au contrôle budgétaire ».

L'objectif est d'élargir les missions du PIACL qui doit se faire prestataire de service pour les préfectures sur des champs de compétences techniques et dans des domaines à enjeux où des besoins d'appui sont fortement exprimés par les collectivités territoriales.

S'agissant du pôle « dossiers juridiques complexes », il a été mis en place le 1 er septembre 2016. Il va permettre d'étoffer l'offre de service pour les préfectures car il est chargé de prestations d'ingénierie pour celles-ci. Le pôle « assistance au contrôle budgétaire » sera mis en place dans une seconde phase en 2017.

Ces initiatives peuvent être saluées. Elles apportent le témoignage d'un besoin de professionnalisation du contrôle, qui n'est pas le seul besoin restant à satisfaire en ce domaine.

C'est ainsi que, plus empiriquement, il faut déplorer une régulation du contrôle de légalité par défaut.

Ainsi que la Cour des comptes a eu l'occasion de l'observer, il existe une série d'accommodements avec le contrôle.

« Si les domaines prioritaires sont le plus souvent repris dans les stratégies annuelles de contrôle arrêtées par les préfectures, l'ensemble des actes considérés comme prioritaires au plan national n'y figurent pas de manière systématique. Dès lors, nombre de ces actes ne sont pas contrôlés. La faculté d'ajuster le nombre d'actes prioritaires à contrôler aux moyens dont dispose la préfecture est largement utilisée, quelle que soit la strate démographique à laquelle elle appartient. Le contrôle de l'ensemble des actes relevant des priorités nationales était mis en oeuvre par moins de la moitié des préfectures de l'échantillon examiné par la Cour. Par voie de conséquence, l'affichage par les préfectures d'un taux de contrôle d'actes prioritaires proche de 100 % n'a guère de sens et ne témoigne pas du plein respect des priorités nationales ».

Par ailleurs, dans les faits, la Cour des comptes relève que le contrôle de légalité porte sur un volume restreint d'actes transmis (24 % entre 2011 et 2014) tandis que le taux de contrôle varie nettement entre département . Au sein de l'échantillon étudié par la Cour des comptes, « les taux de contrôle variaient en moyenne entre 2011 et 2014 de 8 % en Dordogne à 78 % dans le Territoire de Belfort » .

Les liens entre les lacunes du contrôle de légalité et l'implication résiduelle des sous-préfectures dans cette mission semblent assez étroits, sans qu'il faille voir dans ce constat une quelconque imputation personnelle. Les performances des sous-préfectures dans ce domaine, présentées ci-dessous, l'attestent. Cette situation n'est pas de nature à contribuer à la maîtrise des dépenses de contentieux de la mission AGTE qui chaque année connaissent des dépassements de crédits regrettables.

La réduction considérable des moyens mobilisables pour cette fonction (voir ci-dessus) peut expliquer cet état de fait, malgré la révision des procédures qui, elle-même, peut n'être pas neutre sur la qualité du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire.

Il ne serait pas illogique de tenir compte des besoins reconnus d'amélioration de la qualité du contrôle de légalité et du contrôle financier pour aller au terme d'un processus de recentralisation dans les préfectures de département, proche du préfet, seul compétent pour décider d'utiliser la procédure du déféré.

L'argument selon lequel contrôle de légalité et conseil aux collectivités entretiennent des liens étroits ne doit pas être négligé non plus que celui faisant valoir l'utilité d'une bonne connaissance des réalités locales.

Mais, outre que l'activité de conseil du sous-préfet et de ses services, qu'il faut faire mieux que préserver en la développant, dépasse de loin, et le doit, la seule intervention auprès du responsable local dans le processus du contrôle de ses actes, la centralisation du contrôle en préfectures n'exclut nullement, et ne le doit pas, que le sous-préfet bénéficie du surcroît d'expertise qu'elle devrait permettre dans une phase de dialogue préalable. Mieux, celle-ci devrait ressortir plus robuste et, par conséquent, plus sécurisante, pour les collectivités mais aussi pour le représentant de l'État dans l'arrondissement. À cet effet, il convient de garantir aux sous-préfets l'accès aux plates-formes en phase de constitution pour servir d'appui au réseau préfectoral.

Il ne faut en effet pas négliger l'hypothèse que la confusion de son rôle de contrôleur et de conseiller dans un contexte de risques juridiques ne soit un obstacle à l'exercice de l'une ou de l'autre fonction. Une plus nette séparation des responsabilités pourrait alors favoriser l'essor de la fonction de conseil, à la condition, qui est naturellement impliquée par les objectifs affichés de promouvoir une « sous-préfecture nouvelle génération » correspondant à la vocation du sous-préfet d'être « l'assemblier du développement local », de renforcer les sous-préfectures en expertise.

Recommandation : centraliser le contrôle de légalité et le contrôle budgétaire sans sacrifier la possibilité d'un dialogue entre l'administration et les collectivités auteurs des actes soumis à contrôle.

Recommandation : développer les fonctions de conseil et, en particulier, garantir l'accès des sous-préfets aux plates-formes d'appui en phase de constitution.

3. L'ingénierie territoriale

Un autre domaine fondamental de l'activité des unités du réseau préfectoral, celui de l'ingénierie territoriale, a été l'objet d'évolutions qu'on peut qualifier, pour certains des aspects de cette fonction, d'erratiques.

Le portail de l'État au service des collectivités territoriales donne de cette fonction un aperçu qui, pour être sans doute réducteur, n'en a pas moins l'utilité d'apporter à une notion quelque peu abstraite un peu de substance. Y sont distingués deux domaines, celui de l'urbanisme d'un côté, les autres domaines de l'autre.

En matière d'urbanisme , deux catégories de prestations sont distinguées :

- d'une part, l'élaboration, la révision et la modification des documents d'urbanisme (schémas de cohérence territoriale - SCOT -, plans locaux d'urbanisme - PLU - ou tout autre document d'urbanisme) pour lesquelles les services déconcentrés de l'État peuvent être mis gratuitement à la disposition de la commune ou des groupements de communes compétents. La prestation, facultative pour la commune aussi bien que pour l'État, n'est pas soumise à une condition de seuil démographique maximal pour la commune ou le groupement de communes concernés ;

- d'autre part, l'instruction des actes et autorisations d'urbanisme pour laquelle l'autorité locale peut disposer gratuitement des services déconcentrés de l'État pour l'étude technique des demandes, cette aide, dont les modalités sont fixées par convention, étant réservée aux communes de moins de 10 000 habitants et aux EPCI de moins de 20 000 habitants hors assistance juridique et technique ponctuelle.

Dans les autres domaines, le portail rappelle que le dispositif ménagé par la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (dite « MURCEF) qui prévoyait un dispositif d'assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (ATESAT), apportée aux collectivités dans les domaines de la voirie, de l'aménagement et de l'habitat a été abrogé par la loi de finances pour 2014.

Les communes et groupements bénéficiaires avaient été déterminés par le décret n° 2002-1209 du 27 septembre 2002 comme suit, c'est-à-dire selon des critères conférant à l'ATESAT une vocation à apporter un appui à une population de communes de faible dimension et dotées de moyens financiers limités :

- les communes dont la population est inférieure à 2 000 habitants et dont le potentiel fiscal est inférieur ou égal à 1 000 000 d'euros ;

- celles dont la population est comprise entre 2 000 et 4 999 habitants et dont le potentiel fiscal est inférieur ou égal à 1 500 000 euros ;

- celles dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants et dont le potentiel fiscal est inférieur à 2 500 000 euros ;

- les groupements de communes dont la population totale des communes regroupées est inférieure à 15 000 habitants et dont le potentiel fiscal est inférieur ou égal à 1 000 000 d'euros ;

- les syndicats de communes dont la population totale des communes qui les composent est inférieure à 15 000 habitants et si la somme des potentiels fiscaux desdites communes est inférieure ou égale à 1 000 000 d'euros.

L'abrogation du dispositif avait fait l'objet d'un examen de votre commission des finances qui, pour avoir recommandé l'adoption sans modification de la disposition qui la prévoyait, n'en avait pas moins exprimé des doutes sur son opportunité, en particulier au regard des alternatives proposées.

C'est l'occasion de rappeler que les missions de l'ATESAT comprenaient une mission de base complétée par des missions complémentaires en fonction des souhaits des communes ou groupements y ayant recours.

Les missions de l'ATESAT

Mission de base :

Dans le domaine de la voirie routière , assistance à :

- la gestion de la voirie et de la circulation ;

- la programmation des travaux pour l'entretien et les réparations ;

- la conduite des études, la passation des marchés de travaux et la direction des contrats de travaux ;

- la conduite des études relatives à l'entretien des ouvrages d'art intéressant la voirie ou liés à son exploitation ;

- la définition des compétences à transférer à un groupement de communes ;

Dans les domaines de l'aménagement et de l'habitat : conseil sur la faisabilité d'un projet ainsi que sur les procédures et démarches à suivre pour le réaliser.

S'y ajoutent pour les groupements de communes :

- le conseil pour l'établissement de diagnostics sur l'aménagement du territoire du groupement ;

- l'assistance pour l'élaboration de politiques d'intervention en matière d'habitat ;

- l'assistance à la mise en place d'un service technique.

Missions complémentaires susceptibles d'être prévues dans les conventions :

- l'assistance à l'établissement d'un diagnostic de sécurité routière ;

- l'assistance à l'élaboration de programmes d'investissement de la voirie ;

- la gestion du tableau de classement de la voirie ;

- l'étude et la direction des travaux de modernisation de la voirie dont le coût unitaire prévisionnel n'excède pas 30 000 euros (hors TVA) et dont le montant cumulé n'excède pas 90 000 euros (hors TVA) sur l'année.

Source : rapport spécial de la commission des finances du Sénat sur l'annexe 12 du projet de loi de finances pour 2014

La contribution annuelle du bénéficiaire de la mission de base de l'assistance technique était fixée à un montant forfaitaire par habitant, pour chacune des catégories de communes ou de groupements de communes et augmentée d'un pourcentage de ce montant pour chacune des missions complémentaires figurant, le cas échéant, dans la convention.

Cette activité de l'État représentait 5 millions d'euros facturés en moyenne par an pour un coût pour l'État qui n'avait pas été précisément présenté (selon le Gouvernement, l'ATESAT mobilisait 1 266 ETPT fin 2012) mais que le chiffrage des économies devant provenir de la solution alternative alors proposée, à savoir la création d'un établissement public administratif de l'État, dénommé « Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) », devant regrouper plusieurs services du ministère de l'égalité des territoires et du logement et du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, permettait d'approcher. Les économies nettes alors évoquées avaient été estimées à 24,89 millions d'euros .

Cette perspective d'économies pouvait d'emblée sembler nettement plus déterminante que la motivation de la suppression de l'ATESAT alors exposée. Celle-ci avait mis l'accent sur la réduction du taux de recours à cette aide. Selon les informations fournies par le Gouvernement, si, sur la période 2010-2012, 80 % des communes et 34 % des EPCI éligibles, correspondant à environ 27 000 collectivités, avaient bénéficié des prestations de l'ATESAT, une enquête menée auprès des services déconcentrés en mai 2013 avait mis en évidence une très forte baisse du conventionnement à l'ATESAT en 2013, avec environ 13 900 conventions prévues.

Le rapport de votre commission des finances avait très justement exprimé sa circonspection devant ces données, rappelant opportunément que, dans l'évaluation préalable de l'article, il avait été concédé que l'État avait demandé aux préfets de ne plus conventionner que pour une durée d'un an, avec les seules collectivités qui en faisaient la demande, indice d'une réticence de l'État à faire prospérer le dispositif. Au demeurant, même dans ce contexte, force était de constater que le nombre des entités souscrivant à l'ATESAT était très loin d'être mineur.

Par ailleurs, il était justifié de s'interroger sur l'effectivité du relais pris par les acteurs de cet appui technique aux communes et groupements les moins bien dotés devant se substituer aux services de l'État. S'agissant du CEREMA, son éloignement des réalités locales et sa mission de centre de ressources et d'expertises techniques et scientifiques au bénéfice partagé entre l'État et les collectivités locales pouvait faire redouter la perspective d'une accessibilité difficile pour les communes autrefois bénéficiaires de l'ATESAT. Quant à la contribution des intercommunalités et des départements qui avaient, pour beaucoup, développé des structures techniques efficaces qui permettent de répondre aux besoins éventuels des communes dans les domaines concernés, un certain nombre de questions pouvaient, malgré tout, se poser, sur le plan des principes et en considération des besoins d'assistance en matière d'ingénierie que pouvaient éprouver ces collectivités.

En toute hypothèse, le désengagement de l'État de la section de l'ingénierie territoriale couverte par l'ATESAT ne pouvait que faire l'objet d'un constat objectif , ainsi que sa motivation essentiellement financière , les ETPT prévus pour nourrir le reliquat de cette fonction au sein des services de l'État devant passer de 1 266 à 450 .

En cela, le sort de l'ATESAT reflétait une évolution déjà engagée de réductions des moyens dont les effets ont été clairement évoqués dans le rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) consacré à la transition numérique susmentionné, qu'il convient de citer.

« Outre sa dimension institutionnelle et organisationnelle précitée, la réorganisation des services de l'État s'est accompagnée d'une rationalisation des moyens depuis 2010.

La réduction des effectifs de l'État a impacté les capacités des directions départementales et leurs modalités de travail. Certaines compétences rares ne sont plus détenues que par un seul agent dans certaines régions et les pratiques de mutualisation entre départements (« interdépartementalité ») doivent se développer pour y faire face (le service d'une direction départementale instruit les dossiers pour le compte du préfet du département voisin : par exemple, pour l'instruction des demandes d'autorisations de transport exceptionnel ou l'intervention de certains conseillers experts de certaines productions agricoles). Comme l'illustre la synthèse ci-dessous des situations constatées en directions départementales interministérielles (DDI), la fragilisation des compétences métiers impose des capacités de communication renforcées entre les agents départementaux et régionaux relevant d'un même domaine d'exercice. Parallèlement à cette évolution, le dialogue interservices semble décliner, au risque d'un amoindrissement de la cohérence d'action de l'État. »

La fragilisation des compétences métiers dans les DDI et les difficultés des relations interservices

Les compétences métiers

« Les compétences métiers sont globalement maintenues, mais les signes de fragilité se multiplient. Si les compétences nécessaires à l'exercice des missions apparaissent encore globalement maintenues, les signes de fragilité, déjà observés lors des rapports de synthèse sur les DDI portant sur 2012 et 2013, se précisent : l'on attend toujours des DDI des prestations liées à des compétences techniques « historiques » que ne détiennent plus que quelques agents expérimentés mais à forte ancienneté, parfois même seuls pour une compétence donnée.

Dans le même temps, des compétences nouvelles doivent être développées (par exemple les missions liées à la transition énergétique et celles du nouveau conseil aux territoires), une telle évolution étant rendue particulièrement difficile dans un contexte d'attrition des effectifs.

Les fragilités en matière de compétences métiers sont différentes selon les DDI, car elles sont souvent liées à l'histoire de chaque structure, à son environnement (par exemple, pour les DDT(M), il peut s'agir des risques montagne, des risques forêt, des risques gravitaires, de la surveillance des ouvrages de protection en cas de crue, du suivi de cultures spécialisées, etc.) et aux aléas des mouvements de personnels (mutations ou départs en retraite non remplacés). Certaines DDT(M) sont ainsi en difficulté pour faire face aux missions résiduelles en matière de droit des sols (RNU, contrôle de légalité, etc.). Des DDCS(PP) le sont pour des compétences pointues (gens du voyage, évaluation des dégâts d'inondation). Des solutions sont trouvées dans l'interdépartementalité ou dans le recours à l'échelon régional. »

Source : Rapport de synthèse 2014 des missions d'examen de l'organisation et du fonctionnement des directions départementales interministérielles (comité de pilotage inter-inspections (IGA-IGAS-IGJS-IGSCCRF-CGEDD-CGAER)

Il faut ajouter que les dispositions de la loi NOTRe ont, d'une certaine manière, consacré le transfert de charges alors intervenu puisqu'aussi bien la conception des compétences des intercommunalités que la mission de solidarité territoriale attribuée aux départements peuvent conduire à y englober les missions d'assistance technique aux communes ne disposant pas de moyens adéquats.

Dans ce contexte, il semble, malgré tout, qu'une certaine prise de conscience des effets délétères de ce désengagement soit intervenue.

C'est ainsi qu'une nouvelle directive nationale d'orientation (DNO) relative à l'ingénierie d'État dans les territoires couvrant les années de 2016 à 2018 a été publiée le 10 mars 2016 dans le prolongement du comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015.

Témoignant d'une ouverture à l'ensemble des porteurs de projets locaux (administrations publiques mais aussi entreprises et associations), l'intention poursuivie par cette DNO est résumée par la formule suivante, qui la conclut : « Il s'agit donc d'ouvrir par la présente DNO un processus itératif résolument tourné vers un service de proximité modulable », et invite à une certaine perplexité sur les suites appelées à être réservées à cette nouvelle « directive ».

Elles dépendront assurément des capacités mises en oeuvre pour surmonter le constat du rapport de l'IGF selon lequel « la réforme de certaines politiques d'État comme celle de l'ingénierie territoriale, des instructions des autorisations de droit des sols ou la création des agences régionales de santé ont entraîné une réduction du nombre d'agents et la fermeture de subdivisions territoriales. La plupart des filières métiers de l'administration territoriale sont ainsi impactées par des réformes visant à la fois la rationalisation des moyens et l'amélioration de la qualité du service rendu au public, avec une réduction des fonctions de guichet, le développement du travail spécialisé organisé en plateformes et parallèlement la nécessité de nouvelles polyvalences entre des métiers auparavant distincts pour les services déconcentrés de proximité ».

Recommandation : réinstaurer des capacités d'ingénierie territoriale au plus près des collectivités dépourvues de moyens propres suffisants.

4. Un réseau au défi de la performance

Les documents budgétaires ne fournissent généralement aucune indication sur les performances des sous-préfectures (prolongeant ainsi le déficit de données sur les coûts du réseau).

Votre rapporteur spécial a obtenu certaines indications qui paraissent confirmer les préoccupations énoncées dans les développements qu'il vient d'exposer.

La performance du réseau des sous-préfectures via les indicateurs Indigo renseignés dans l'outil du contrôleur de gestion « PILOT » et récapitulées dans l'infocentre territorial « INFOPREF 2 ».

Le tableau ci-dessous présente le libellé des différents indicateurs et le taux de sous-préfectures dites « hors-cible », qui correspond à la proportion des unités qui ne parviennent pas à atteindre l'objectif fixé.

Indicateurs de performance des sous-préfectures et taux des « hors-cible »

IF 950 Taux de réponse au fond aux courriers dans les 15 jours ou par une réponse d'attente précisant le délai prévisionnel de traitement : 57 %

IM 207 Taux de respect du programme de visites périodiques des établissements recevant du public soumis à obligation de contrôle : 32 %

IM 322 Délai de traitement des demandes de titre ou d'immatriculation SIV au guichet : 8 %

IM 327 Stock de demandes de cartes nationales d'identité à instruire (CNI) à instruire : 29 %

IM 328 Stock de demandes de naturalisation à instruire : 19 %

IM 331 Stock de demandes de titre ou d'immatriculation SIV à instruire : 29 %

IM 332 Ratio d'efficience des services de délivrance de CNI : 81 %

IM 335 Ratio d'efficience des services SIV : 32 %

IM 337 Ratio d'efficience des services de naturalisation : 36 %

IM 341 Délai de traitement du titre « Carte Nationale d'Identité » : 13 %

IM 342 Délai de traitement des demandes de passeports biométriques en préfecture et sous-préfecture : 17 %

IM 344 Délai de traitement des opérations SIV en temps différé : 22 %

IM 347 Délai d'instruction des demandes de naturalisation par décret : 78 %

IM 349 Stock de demandes de permis de conduire (en équivalents jours) : 32 %

IM 361 Délai de traitement du titre "Permis de conduire" en temps différé : 20 %

IM 362 Ratio d'efficience des services de délivrance des permis de conduire : 38 %

IM 368 Taux de dossiers de fraude détectés : 88 %

IM 502 Taux de contrôle des actes budgétaires des collectivités locales et des établissements publics : 78 %

IM 503 Taux d'actes budgétaires retirés ou réformés après une intervention de la préfecture : 40 %

IM 507 Taux de contrôle des actes prioritaires au titre du contrôle de légalité : 67 %

IM 514 Taux d'actes télétransmis par l'application ACTES : 61 %

IM 519 Part des actes prioritaires dans le total des actes contrôlés : 31 %

Source : Réponse au questionnaire du rapporteur spécial

L'incomplétude des indicateurs servant à la gestion du réseau est manifeste, surtout pour les fonctions qualitatives que la modernisation des sous-préfectures entend promouvoir.

Si elle peut s'expliquer par la difficulté à identifier des indicateurs représentatifs, elle témoigne aussi d'un certain retard dans la formalisation d'une sous-préfecture nouvelle génération, qui est pourtant l'horizon des gestionnaires.

L'absence de témoins des relations entre collectivités territoriales et sous-préfectures, en dehors du contrôle de légalité est particulièrement remarquable de même que pour l'ingénierie territoriale ou le développement des territoires.

Par ailleurs, les indicateurs témoignent d'un très fort contingent de sous-préfectures éloignées de l'atteinte des cibles fixées, en particulier pour les missions qui demandent une expertise particulière.

Cette situation appelle un effort résolu d'amélioration des performances du réseau et paraît pouvoir justifier certains reclassements de missions.


* 17 En revanche, les passeports temporaires non biométriques restent de la compétence des préfets de département.

* 18 Article 128 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 19 De sorte que se pose la question du champ des délégations que celui-ci peut effectuer.

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