B. L'EXERCICE FACULTATIF DES COMPÉTENCES EAU ET ASSAINISSEMENT RÉPOND À DES INQUIÉTUDES FORTES DES ÉLUS LOCAUX

En premier lieu, et de manière constante, se pose la question du prix de l'eau et de l'assainissement des eaux usées. Depuis le vote de la loi NOTRe, la problématique tarifaire est demeurée au coeur des réflexions des élus locaux et des parlementaires qui sont en lien direct et régulier avec les bénéficiaires de ces services publics essentiels à la vie quotidienne des Français.

L a forte variabilité des prix de l'eau et de l'assainissement démontre que le risque d'une augmentation de la facture pour les usagers est bien réel compte tenu de l'harmonisation des tarifs qu'implique le transfert des compétences à l'intercommunalité 10 ( * ) . En effet, si au 1 er janvier 2021 pour une consommation annuelle de 120 m d'eau, le prix est en moyenne de 4,3 €/m (2,11 €/m pour l'eau potable et 2,19 €/m pour l'assainissement collectif), ce prix connaît des variations : il s'élève de 1,6 €/m à 2,72 €/m pour l'eau potable et entre 1,37 €/m et 3,05 €/m pour l'assainissement collectif 11 ( * ) .

L'exercice des compétences eau et assainissement par l'échelon intercommunal est également perçu comme une source de dépenses supplémentaires pour les communes particulièrement rurales dont le maire, ou d'autres élus municipaux, assurent parfois eux-mêmes bénévolement les missions du fontainier ou lorsqu'il ne s'agit pas d'une tâche confiée à un agent communal polyvalent ou à temps non-complet. Le transfert de compétences entraîne donc simultanément une perte de connaissance des réseaux et des dépenses nouvelles de fonctionnement .

En second lieu, le rapporteur partage également la critique récurrente tenant au fait que le périmètre administratif des communautés de communes ne correspond pas à la réalité géographique et hydrique des territoires concernés . Le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement à l'intercommunalité apparaît donc comme une réponse rigide alors que la gestion de l'eau et le traitement des eaux usées doit appeler des solutions adaptées, notamment, aux besoins et spécificités des territoires ruraux ou de montagne . Lors de l'audition des maires des communes rurales par le rapporteur, l'exemple des réseaux d'alimentation en eau a été évoqué pour illustrer cette difficulté puisqu'ils ne sont pas superposables avec le périmètre administratif de l'intercommunalité.

Malgré les intenses épisodes de sécheresse qu'a connu la France au cours de l'été 2022 12 ( * ) , le rapporteur reste convaincu que pour les territoires ruraux et de montagne en particulier, seule une gestion communale, raisonnable et de proximité permettra de faire face aux enjeux liés à la quantité et à la qualité de l'eau .

En outre, lors des auditions menées par le rapporteur, les élus membres de l'association des petites villes de France et de l'association des maires ruraux de France ont aussi mis en évidence que de nombreuses intercommunalités ne sont pas en demande d'exercer les compétences relatives à l'eau et l'assainissement des eaux usées . Le rapporteur relève effectivement que les territoires où la mutualisation de ces compétences est pertinente l'ont déjà fait depuis plusieurs années, et ce, sans attendre le vote de la loi NOTRe en 2015.

En troisième lieu, les inquiétudes des élus locaux se reflètent dans les statistiques relatives à l'exercice des compétences eau et assainissement par les communautés de communes. En effet, au 1 er octobre 2022, seules 329 (sur 992 13 ( * ) ) communautés de communes exercent la compétence liée à l'eau, 420 ont en charge l'assainissement collectif et 723 gèrent la compétence de l'assainissement non collectif.

Ces chiffres confirment l'absence de consensus majoritaire au sein de l'organe délibérant des communautés de communes pour exercer les compétences eau et assainissement . Cela démontre une forme d'attentisme prudent de la part des élus locaux qui souhaitent éviter un éventuel « effet cliquet » du transfert et, peut-être même, un espoir que le législateur redonne enfin la liberté aux communes de décider si elles jugent opportun de transférer ces compétences.


* 10 Dans sa contribution écrite adressée au rapporteur, l'Association des petites villes de France (APVF) note qu'une intercommunalité compétente en matière d'eau et d'assainissement recouvre en moyenne entre trois et quatre entités de gestion de l'eau, les tarifs peuvent donc varier de l'une à l'autre.

* 11 Rapport de l'observatoire des services publics d'eau et d'assainissement (office français de la biodiversité), panorama des services et de leur performance en 2020, juin 2022, p. 6, consultable à l'adresse suivante :
https://www.services.eaufrance.fr/docs/synthese/rapports/Rapport_Sispea_2020_VF.pdf

* 12 Rapport d'information n° 142 fait nom de la délégation sénatoriale à la prospective sur l'avenir de l'eau, par Mmes Catherine Belrhiti, Cécile Cukierman, MM. Alain Richard et Jean Sol, publié le 24 novembre 2022, p. 54, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/r22-142/r22-1421.pdf

* 13 Insee, « Des communautés de communes rurales aux métropoles urbaines : la grande diversité des EPCI à fiscalité propre en France », étude consultable à l'adresse suivante : https://www.insee.fr/fr/statistiques/6689129

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