DEUXIÈME PARTIE

DE NOMBREUSES REMISES EN CAUSES DES OBJECTIFS CAPACITAIRES DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE, QUI N'A FAIT L'OBJET D'AUCUNE ACTUALISATION LÉGISLATIVE

I. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE ET LA TRAJECTOIRE QU'ELLE PRÉVOIT RENDAIENT INDISPENSABLE UNE ACTUALISATION PAR LA VOIE LÉGISLATIVE

A. UN RECOURS À LA DÉCLARATION PRÉALABLE PLUTÔT QU'À LA LOI CONTRAIRE AUX DISPOSITIONS DE LA LPM

Pour la mission « Défense », le présent projet de loi de finances doit être replacé dans le contexte de la LPM, qui devait faire l'objet d'une actualisation en 2021.

Son article 7 prévoyait ainsi que « la présente programmation fera l'objet d'actualisations , dont l'une sera mise en oeuvre avant la fin de l'année 2021. Cette dernière aura notamment pour objet de consolider la trajectoire financière et l'évolution des effectifs jusqu'en 2025 ».

Au début de l'année 2021, la ministre a indiqué à plusieurs reprises souhaiter associer le Parlement à cette révision, sans en préciser les modalités. Début 2021, un travail de mise à jour de l'analyse de l'environnement stratégique et international a ainsi été conduit 4 ( * ) .

Les conclusions de l'actualisation stratégique préalable à l'actualisation
de la LPM par le Gouvernement

Les conclusions synthétisées dans l'« actualisation stratégique » ont ainsi relevé la pertinence du modèle d'armée retenu, confirment l'ambition 2030 tout en constatant une accélération des différentes menaces déjà identifiées en 2017.

En réponse, trois axes d'ajustement ont été retenus : nous devons mieux détecter et contrer les menaces notamment dans les domaines cyber, du renseignement et spatial ; renforcer notre effort sur la résilience et la protection face au risque nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC), sur la santé et sur la lutte anti-drone ; nous préparer pour pouvoir riposter dans tous les champs de conflictualité.

Source : ministère des armées

Le Premier ministre a finalement décidé de prononcer une déclaration devant chacune des chambres du Parlement les 22 et 23 juin 2021 au titre de l'article 50-1 de la Constitution, invoqué pour la première fois dans le domaine de la défense nationale, pour l'informer des actualisations prévues.

Le rapporteur spécial estime que cette procédure ne saurait masquer la volonté de contournement dont a fait l'objet le Parlement, alors que la Constitution ne confie qu'à lui seul le pouvoir de modifier une loi, conformément à l'article 24 de la Constitution. Le recours au dispositif prévu par l'article 50-1 de la Constitution ne constitue aucunement un moyen de modification de la loi et ne constitue pas une modalité d' « association » suffisante du Parlement. La précédente programmation militaire (2015-2019) avait d'ailleurs logiquement fait l'objet d'une actualisation par voie législative (loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense) 5 ( * ) .

Afin de justifier cette absence de saisine adaptée du Parlement, le Gouvernement indique dans ses réponses au questionnaire budgétaire que « du fait de la crise sanitaire de 2020, le PIB s'est affaissé portant artificiellement l'effort national de défense à 2% du PIB sans pour autant que les objectifs de modernisation et de préparation de l'avenir donnés aux armées aient été atteints. Alors que l'année d'actualisation prévue par la LPM devait permettre de fixer plus sûrement la trajectoire financière jusqu'en 2025, l'année 2021 portait conjoncturellement davantage d'incertitudes ne permettant pas de remplir sereinement l'objectif recherchée à travers une actualisation. » Le rapporteur spécial pense tout au contraire que c'est précisément le caractère très incertain du contexte sanitaire, économique et géostratégique (voir infra ) qui rend plus que jamais inexcusable le non recours à l'actualisation par la voie législative .


* 4 Ministère des armées, Actualisation stratégique 2021.

* 5 Dans le contexte des attentats de Paris.

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