B. UNE AUGMENTATION NOTABLE DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2022

1. Une mission largement mobilisée face aux crises

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » se caractérisent par un taux de croissance annuel moyen de plus de 8 %.

Si une tendance à la hausse des crédits est indéniable, il convient cependant de relever que celle-ci est largement liée à la mobilisation de la mission pour financer la réponse à des situations d'urgence économique et sociale .

L'augmentation à 90 euros du bonus individuel de la prime d'activité avait ainsi constitué en 2019 l'un des principaux vecteurs utilisés par le Gouvernement pour répondre à l'urgence sociale exprimée par le mouvement des « gilets jaunes ». Cette mesure représente un coût annuel pérenne d'environ 4,4 milliards d'euros.

L'exercice 2020 avait ensuite été marquée par le financement d'une série de mesures d'urgence en réponse à la crise sanitaire, avec l'ouverture de 2,7 milliards d'euros en lois de finances rectificatives , au premier rang desquelles les aides exceptionnelles de solidarité (AES) en faveur des ménages modestes (1,9 milliard d'euros) , ainsi qu'un plan d'urgence en faveur de l'aide alimentaire (94 millions d'euros), de l'aide sociale à l'enfance (50 millions d'euros) et de lutte contre les violences conjugales dans le contexte des confinements (4 millions d'euros).

Évolution des crédits de la mission à périmètre courant entre 2018 et 2022 (CP)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Une comparaison entre les exercices affectée par des mesures de périmètre et de transfert, au premier rang desquelles le financement de l'expérimentation de la recentralisation du RSA

La mission est affectée par des mouvements de périmètre et de transferts représentant un montant global de 568 millions d'euros en AE et en CP.

Le programme 304 porte l'essentiel de ces mesures, avec :

- le financement par l'État de l'expérimentation de recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) prévue par l'article 12 du présent PLF et qui ne devrait concerner en 2022 que le département de la Seine-Saint-Denis, pour un montant de 524,9 millions d'euros en AE et en CP (voir infra ) ;

- le transfert, dans le cadre d'une nouvelle action 21 « allocations et dépenses d'aide sociale », de la prise en charge d'une partie des prestations d'aide sociale à destination des personnes sans domicile fixe âgées ou en situation de handicap (34 millions d'euros en AE et en CP). Il s'agit d'une compétence résiduelle de l'État, par dérogation à la décentralisation aux départements de la compétence d'aide sociale, qui était auparavant financée sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Le programme 157 comporte également une mesure de périmètre sortante de - 1,8 million d'euros en AE et en CP, dans le cadre d'un ajustement de la répartition des compétences entre l'État et la sécurité sociale (notamment la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie).

Enfin, le programme 124 est affecté par divers transferts sortants liés à la réorganisation de l'administration territoriale de l'État (voir infra ) et à la création du service public de la rue et du logement (SPRULO) relevant de la mission « Cohésion des territoires », représentant un montant total de - 7,3 millions d'euros en AE et en CP.

La recentralisation du RSA en Seine-Saint-Denis

L'article 12 du PLF 2022 prévoit que les départements qui le souhaitent soient autorisés à expérimenter, pendant cinq ans, une recentralisation du RSA. L'État assurera alors le financement du RSA ainsi que l'instruction, l'attribution et le service de cette prestation qui seront exercés par délégation par les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (MSA). Les départements conserveront donc la compétence liée à l'orientation ainsi que celle liée à l'insertion.

Cette recentralisation se traduira par une mesure de périmètre sur le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » en 2022.

Le département de la Seine-Saint-Denis est actuellement le seul à avoir officiellement manifesté sa volonté de participer à cette expérimentation. Le montant de l'enveloppe budgétaire en PLF 2022 est de 564,9 millions d'euros. Cette enveloppe comprend des frais de gestion pour un 1 million d'euros en faveur des CAF.

Ce montant se décompose entre une mesure de périmètre de 524,9 millions d'euros (égale aux recettes reprises par l'État à compter de 2022) et 40 millions d'euros de crédits intégrés à la budgétisation à périmètre constant (égaux à l'écart entre la mesure de périmètre et la prévision de dépense totale).

Les modalités de financement de ce transfert sont prévues par le même article. Le montant du droit à compensation pour l'État est égal à la moyenne triennale des dépenses des années 2018 à 2020. Pour atteindre ce montant, il est prévu une reprise :

- des compensations historiques résultant du transfert du revenu minimum d'insertion (RMI) et de la généralisation du RSA attribuées sous forme de fiscalité transférée (fractions de TICPE) ;

- des ressources d'accompagnement à l'exercice de la compétence relative au RSA, que sont le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI), prélèvement sur recettes visant à améliorer le taux de couverture des dépenses du RMI-RSA et le dispositif de compensation péréquée (DCP) qui correspond au reversement des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) afin de financer les revalorisations exceptionnelles du RSA socle adoptées depuis 2013 ;

- du solde éventuellement non couvert par la reprise des financements historiques et des ressources d'accompagnement, via la reprise complémentaire d'une fraction maximum de 20% du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ainsi que, le cas échéant, par des parts fixes de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Source : réponses au questionnaire budgétaire

3. À périmètre constant, les crédits de la mission connaîtraient une hausse de 3 % en 2022

À périmètre constant, les crédits de la mission connaissent entre 2021 et 2022 une légère progression de 1,1 milliard d'euros en AE (+ 4 %) et de 802,6 millions d'euros en CP (+ 3 %).

Évolution des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Execution 2020

LFI 2021

PLF 2022 courant

PLF 2022 constant

Evolution PLF 2022 / LFI 2021 (volume)

Evolution PLF 2022 / LFI 2021 (%)

FDC et ADP attendus en 2022

137 - Égalité entre les femmes et les hommes

AE

35,8

48,7

47,4

47,4

- 1,3

- 2,7 %

0,0

CP

36,5

41,5

50,6

50,6

+ 9,1

+ 22,0 %

0,0

157 - Handicap et dépendance

AE

13 068,5

12 668,5

13 237,2

13 2 39,0

+ 570,5

+ 4,5 %

0,0

CP

13 067,2

12 663,6

13 238,5

13 240,3

+ 576,7

+ 4,6 %

0,0

124 - Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

AE

1 383,1

1 150,3

1 439,2

1 446,4

+ 296,1

+ 25,7 %

12,5

CP

1 324,7

1 159,2

1 174,5

1 181,8

+ 22,6

+ 1,9 %

12,5

304 - Inclusion sociale et protection des personnes

AE

14 595,6

12 388,8

13 141,9

12 583,0

+ 194,2

+ 1,6 %

0,0

CP

14 590,8

12 388,8

13 141,9

12 583,0

+ 194,2

+ 1,6 %

0,0

Total mission

AE

29 083,0

26 256,3

27 865,6

27 315,8

+ 1 059,5

+ 4,0 %

12,5

CP

29 019,2

26 253,1

27 605,5

27 055,7

+ 802,6

+ 3,1 %

12,5

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La différence entre les montants courants et constants correspond aux évolutions de périmètre présentées dans le PAP et détaillées ci-dessous. Les différences et pourcentages correspondent à l'évolution en termes constants.

Les principaux facteurs de la hausse constatée en 2022 en CP sont :

- la dynamique de l'AAH, renforcée par une mesure nouvelle « positive » d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint prévue à l'article 51 du présent PLF (voir infra ) : + 562,6 millions d'euros (dont 185 millions d'euros imputables à la mesure d'abattement forfaitaire) ;

- la dynamique de la prime d'activité : + 60,8 millions d'euros ;

- le renforcement des crédits de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté : + 72,5 millions d'euros

- le renforcement des crédits de la stratégie de la protection de l'enfance : + 25 millions d'euros ;

- le renforcement des crédits du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » : + 10,7 millions d'euros.

Décomposition de la hausse des crédits de la mission en PLF 2022
à périmètre constant (CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Hors contribution au CAS Pensions (137,4 millions d'euros en PLF 2022), et au format PLF 2020 1 ( * ) , le budget demandé pour la mission représente un total de 27,3 milliards d'euros, soit un dépassement de 1,3 milliard d'euros par rapport au plafond fixé par le budget triennal 2020-2022 (26,1 milliards d'euros) présenté dans le projet annuel de performance annexé au PLF 2020.


* 1 Avec déduction des mesures de périmètre et de transferts constatés en PLF 2022 et en PLF 2021
(- 413,4 millions d'euros).

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