B. L'ADAPTATION DU RÉSEAU DE LA DGFIP ET DE LA DGDDI EST EN VOIE DE FINALISATION, MÊME SI DES INTERROGATIONS SUBSISTENT QUANT À SA CAPACITÉ À CONCILIER PROXIMITÉ, QUALITÉ ET EFFICACITÉ DES SERVICES PUBLICS

1. La mise en oeuvre du « nouveau réseau de proximité » de la DGFiP n'est pas achevée
a) Les trois volets du plan de réorganisation territoriale de la DGFiP

La transformation du réseau de la DGFiP fait partie des éléments jugés prioritaires dans le cadre du plan de transformation ministériel. Elle comprend la mise en place du « nouveau réseau de proximité » et la délocalisation de certains services des métropoles vers les villes moyennes . C'est également dans le cadre du NRP que s'inscrit le déploiement progressif, d'ici à 2022, du réseau des 1 200 conseillers aux décideurs locaux qui ont vocation à devenir les interlocuteurs privilégiés des ordonnateurs des collectivités territoriales. 450 sont entrés en fonction en 2021, soit 45 % de la cible pour 2023.

b) Le nouveau réseau de proximité : une finalisation reportée à l'horizon 2023

La rationalisation du réseau territorial de la DGFiP, par le biais de fusions ou de suppressions, est en oeuvre depuis plusieurs années : le réseau déconcentré de l'administration fiscale a connu une perte de ses emprises de près de 20 % entre 2015 et 2021 .

La méthode retenue a toutefois fait l'objet d'une inflexion en 2019, après plusieurs années de critiques de la part des élus locaux, des agents de l'administration, de la Cour des comptes et des parlementaires, notamment à la commission des finances. Ils estimaient que les suppressions et les fusions étaient faites « à vue », sans vision de long terme, au gré des résistances rencontrées sur place et sans projection sur les besoins et les effectifs.

Un processus de concertation a donc été lancé au début du mois de juin 2019 afin de définir, dans chaque département et par le biais d'une contractualisation, la nouvelle carte des implantations territoriales de la DGFiP. Réunissant les élus locaux, les directeurs départementaux des finances publiques et les préfets, il a mené à la mise en place du « nouveau réseau de proximité » (NRP), qui doit répondre à un double-objectif : poursuivre la rationalisation du réseau de la DGFiP, dont les métiers évoluent fortement, et renforcer la proximité de ces services publics. Le NRP ne se traduit pas pour autant par une interruption des fermetures de trésoreries ou de services d'impôt aux particuliers : le but n'est pas de préserver le réseau des sites permanents en l'état, mais de multiplier les points de contact à l'échelle d'un département .

Le Gouvernement cible ainsi une augmentation des « points de contact mobiles » de 30 % , avec un accès à un accueil de proximité à moins de 30 minutes dans l'ensemble des cantons. Selon le sous-indicateur de performance dédié à cet objectif, le nombre de communes dans laquelle il existe un accueil de proximité de la DGFiP a augmenté de 14 % en 2020, pour atteindre 2 254 communes, et augmenterait, par rapport à l'année 2019 de 20 % en 2021 et de 25 % en 2022 (2 570 communes).

Dans le cas du NRP, une charte est signée avec chaque département : elle décrit les services présents, y compris les conseillers aux décideurs locaux, les modalités de présence, l'offre de service, la contribution de la DGFiP au fonctionnement des accueils de proximité. Elle entérine également l' instauration d'un comité de suivi présidé par le directeur départemental des finances publiques et chargé de suivre la bonne application de ces dispositions.

Le déploiement du NRP, deux ans après le lancement de cette nouvelle approche, est encore parcellaire : au 1 er octobre 2021, 45 chartes ont été signées avec des présidents de conseils départementaux , 543 avec des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale et 70 avec des communes ou associations locales de maires 27 ( * ) . Ainsi, selon les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, la finalisation du NRP est désormais prévue pour la fin de l'année 2023, avec un objectif de présence permanente de la DGFiP dans 2 570 communes , et près de 3 000 en tenant compte des conseillers aux décideurs locaux.

Il faut toutefois bien distinguer ce que recouvrent ces points de contact, entre le passage d'un bus itinérant ou la tenue d'une permanence une demi-journée par semaine. Les rapporteurs spéciaux ont eu l'occasion ces dernières années de rappeler que les objectifs d'accueil ne pouvaient pas être seulement quantitatifs, en affichant des points sur la carte : la qualité du service doit être préservée, et conciliée à un maillage fin du territoire.

Certains de nos concitoyens sont dans l'incapacité d'effectuer leurs démarches par internet et, les services sont difficilement joignables par téléphone : dans ce contexte, il faut conserver un accueil physique des contribuables. Dans une étude commandée en octobre 2019 par le ministère de l'économie et des finances à BVA sur la perception du nouveau réseau de proximité par les habitants d'unités urbaines de moins de 35 000 habitants, les personnes de plus de 65 ans indiquaient ainsi que passer par internet était pour eux beaucoup plus difficile et ne constituait donc pas leur mode de contact privilégié.

De ce point de vue, il semble peut-être plus prometteur de garantir, y compris par un rehaussement de son effort humain et financier, la proximité des services publics par la participation de la DGFiP au réseau des Maisons France Services (MFS), que ce soit par une présence effective ou par des activités de formation à destination des animateurs de ces maisons, afin qu'ils puissent répondre aux interrogations les plus simples des contribuables, ou tout du moins les orienter. Comme le précise la Charte nationale d'engagement France Services, le rôle de ces maisons est d'assurer « une information de premier niveau en matière de fiscalité des particuliers » et d'orienter les usagers vers les interlocuteurs compétents, qui pourront ensuite recourir à des référents locaux, qui tiendront lieu de back office .

c) La relocalisation des services publics : un calendrier publié tardivement

Auparavant dénommée « démétropolisation », la relocalisation de certains services publics des métropoles vers les territoires périurbains et ruraux a été inscrite comme un objectif prioritaire à l'issue du quatrième comité interministériel de la transformation publique, le 15 novembre 2019 28 ( * ) . Si l'ensemble des administrations de l'État sont concernées, la DGFiP devrait être le contributeur le plus important à ce processus : 2 542 agents seront concernés, sur un objectif total de 6 000 emplois d'État transférés.

Après un appel à candidatures lancé au mois d'octobre 2019, 50 premières villes ont été choisies au mois de septembre 2020, puis 16 autres au mois de décembre , sur plus de 408 candidatures. Trois critères ont conduit à leur sélection : la capacité immobilière de la ville, l'existence de compétences métiers et la situation géographique (bassin d'emploi dynamique, proximité avec le service de la métropole dont l'activité est transférée) 29 ( * ) .

Le calendrier a donc finalement été publié et finalisé au début de l'année 2021 . Les transferts pourront par ailleurs être effectués par étape et regroupements successifs, parfois sur deux à trois ans.

Calendrier du programme de « relocalisation »
des services de la DGFiP

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux 30 ( * )

Il est compréhensible que ce processus prenne du temps, avec notamment un vrai enjeu de gestion des ressources humaines . Le ministère a ainsi annoncé qu'il n'y aurait pas de « mobilité forcée » et que les services se constitueront au gré des départs en retraite, des mutations ou des promotions.

Les dispositifs visant à encourager la mobilité des agents

De nouveaux outils ont été développés au sein de l'administration pour encourager les mobilités et accompagner la transformation du réseau et des métiers.

Peuvent tout d'abord être distingués les dispositifs indemnitaires :

- la prise en charge des frais de changement de résidence (1986) ;

- l'accompagnement indemnitaire de la mobilité consécutive à une opération de restructuration (2019). Il vient en complément de la prime de restructuration (2008), de l'allocation d'aide à la mobilité du conjoint, fixé forfaitairement à 7 000 euros (2008) et du complément indemnitaire d'accompagnement (2014) ;

- l'indemnité d'accompagnement à la mobilité fonctionnelle (2019), versée à l'issue d'une formation professionnelle ;

- le bénéfice de l'ancien emploi (2019). Si un fonctionnaire perd son emploi fonctionnel du fait d'une nouvelle organisation des services et est nommé sur un nouvel emploi fonctionnel, il conserve, s'il y a intérêt et pendant cinq ans, le bénéfice des dispositions régissant leur ancien emploi et l'ensemble des primes et indemnités y afférant ;

- les indemnités de départ de la fonction publique : indemnité de départ volontaire (2008) ou rupture conventionnelle (2019) ;

- les indemnités visant à accompagner et encourager la mobilité des agents publics dans certains territoires ou pour pourvoir certains emplois : indemnité temporaire de mobilité (mobilité fonctionnelle ou géographique), primes d'attractivité et de fidélisation territoriales.

Parmi les autres dispositifs, se trouvent un accompagnement RH des agents touchés par les restructurations (priorité de mutation ou de détachement, droit à l'accompagnement personnalité, formation professionnelle, congé de transition professionnelle), ainsi qu'une amélioration de l'information des agents (amélioration de l'espace « Place de l'emploi public » pour donner davantage de visibilité à l'ensemble des offres à pourvoir dans la fonction publique).

Dans ce contexte, et de manière globale sur le projet NRP, la DGFiP bénéficie d'un cofinancement à hauteur de 50 % du Fonds pour l'accompagnement interministériel RH. Il devrait s'élever à 10,3 millions d'euros en 2021 .

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Parmi les principaux services concernés par la relocalisation figurent la mise en place d'antennes de services d'impôt pour les entreprises, de centres d'appels mais également une vingtaine de services d'appui à la publicité foncière, qui traiteront à distance une partie de l'activité des services de publicité foncière des grandes villes, afin de les désengorger. La création de centres d'accueil téléphonique est tout à fait bienvenue pour pallier les effets de la dématérialisation croissante des démarches sur certains publics vulnérables ou dont la situation ne correspond pas aux situations les plus communes. Les chiffres publiés par la DGFiP le confirment : le nombre d'appels reçus sur l'assistance aux usagers a augmenté de 5 millions entre 2018 (7,5 millions d'appels) et 2020 (12,7 millions d'appels) 31 ( * ) . Cette croissance de 70 % peut être utilement comparée à celle des courriels reçus de la part des particuliers, de 43 % sur la même période.

2. À la faveur du Brexit, un rééquilibrage des implantations territoriales de la Douane

Au sein de la DGDDI, la réorganisation du réseau se traduit d'abord par un basculement géographique : alors que des emprises régulières sont allégées dans les départements de l'est et du sud de la France, d'autres structures sont créées au nord de la France, afin d'adapter le réseau douanier dans les Hauts-de-France, en Normandie et en Bretagne-Pays de la Loire aux conséquences du Brexit.

Deux bureaux ouverts en continu ont ainsi été créés à Calais et à Dunkerque, tandis que quatre brigades de surveillance extérieure ont été installées à Calais, Lille et Dunkerque 32 ( * ) . La DGDDI compte près de 670 implantations territoriales 33 ( * ) , regroupant un peu plus de 13 330 ETP.

La Douane est moins concernée par la relocalisation des services publics, du fait d'une organisation en grande partie d'ores et déjà déconcentrée : les ressources humaines sont à Bordeaux, les finances à Lyon, les systèmes informatiques à Osny, la formation à Tourcoing et à la Rochelle. Certains services à fiscalité spécialisée ont en outre été créés à Nice (fiscalité environnementale) ou à Metz (fiscalité routière) ou répartis sur cinq pôles (fiscalité énergétique). Toutefois, le transfert du recouvrement et de la gestion de ces impositions à la DGFiP, prévu d'ici 2024, devrait se traduire par des ajustements, que ce soit en termes d'emprises territoriales ou de ressources humaines (cf. infra ).


* 27 Selon les données transmises dans le questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 28 Il reprenait un engagement du président de la République au mois d'avril 2019, à l'issue des conclusions du grand débat national.

* 29 Selon les informations transmises dans le dossier de presse du ministère de l'économie, des finances et de la relance sur la relocalisation des services des finances publiques dans les territoires , 30 septembre 2020.

* 30 Le nombre de services total indiqué sur le graphique est supérieur au nombre de villes sélectionnées puisque certaines d'entre elles devraient accueillir plusieurs services.

* 31 D'après les données figurant dans le rapport d'activité pour l'année 2020 de la direction générale des finances publiques.

* 32 D'après les données figurant dans le rapport de la Cour des comptes sur « La direction générale des douanes et des droits indirects. Exercices 2013-2019. Un recentrage nécessaire » (septembre 2020).

* 33 119 sites ont été fermés depuis 2013.

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