II. LE BILAN DES RÉFORMES INTERNES ENGAGÉES PAR LES ADMINISTRATIONS DE LA MISSION EST GLOBALEMENT SATISFAISANT, QUOIQU'ENCORE INACHEVÉ ET PERFECTIBLE

Quatre axes ont fait l'objet d'un suivi spécifique de la part des rapporteurs spéciaux ces dernières années :

- la transformation du réseau , avec l'impératif de concilier la rationalisation des emprises, la dématérialisation des procédures et la qualité du service public, que ce soit auprès des contribuables ou des collectivités territoriales ;

- le transfert du recouvrement de la plupart des taxes et impositions relevant de la DGDDI à la DGFiP, avec la volonté de recentrer les Douanes sur ses missions « coeur de métier » (contrôle des flux et des marchandises) ;

- les adaptations apportées au contrôle fiscal avec un rôle toujours plus important accordé au traitement de la donnée, qui va désormais au-delà de la mission de contrôle ;

- les investissements informatiques et l'impératif de traiter de la dette technologique des administrations.

A. LA DGFIP ET LA DOUANE ONT DÛ FAIRE FACE AUX CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE ET DU BREXT

1. La crise sanitaire : des administrations pleinement mobilisées pour soutenir les citoyens et les acteurs économiques

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, les rapporteurs spéciaux ont salué le travail accompli par la DGFiP et par la Douane pour continuer d'assurer leurs fonctions essentielles et pour absorber de nouvelles missions , directement liées aux conséquences de la crise sanitaire sur les acteurs publics et économiques.

La DGFiP a été chargée de la mise en oeuvre, dans des délais extrêmement courts, du fonds de solidarité , tandis que la Douane a participé à l'importation d'équipements de protection sanitaire , avec l'impératif de les contrôler rapidement pour éviter la mise en circulation de produits contrefaits. Dans ce domaine, la DGFiP a également apporté son concours puisqu'elle a répondu, le plus souvent en quelques heures, à 654 saisines d'hôpitaux, de collectivités ou encore d'Ehpad pour contrôler l'honorabilité des fournisseurs de masques et de gel hydroalcoolique 19 ( * ) . 510 enquêtes ont ensuite été ouvertes par la DGDDI.

2. Brexit : une gestion facilitée par une longue période de transition

La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne et la fin de la période transitoire sont effectives depuis le 31 décembre 2020. Au regard des inquiétudes qui avaient pu être exprimées sur les risques d'embouteillage et d'engorgement, le rétablissement d'une tierce frontière entre la France et le Royaume-Uni n'a pas causé de difficultés majeures, en tout cas du côté français.

Le contexte économique n'y est pas étranger. Comme l'avait confié la directrice des douanes lors de son audition par la commission des finances au mois d'avril 2021 20 ( * ) , l'épidémie de covid-19 et son impact sur les flux de marchandises et de passagers ont réduit les risques d'engorgement et ont de fait facilité cette transition pour l'administration douanière.

La Douane a également pu s'assurer du bon fonctionnement de son dispositif de « frontière intelligente » , construit pendant la période de transition, et qui permet d'assurer un passage plus fluide à la frontière. C'est d'autant plus important que le trafic routier est désormais revenu à 95 % de son niveau d'avant-crise, alors même que 80 % des flux routiers entre l'Europe continentale et le Royaume-Uni transitent par la France.

La « frontière intelligente » (« SI Brexit »)

Le dispositif de « frontière intelligente » repose sur l'anticipation de leurs formalités déclaratives par les opérateurs économiques. Ils doivent déposer leur déclaration en douane quelques jours avant le passage de la frontière. Un code barre est alors attribué et la plaque d'immatriculation du véhicule est enregistrée.

Avant de passer la frontière, le véhicule est identifié et les formalités douanières et sanitaires anticipées y sont rattachées. En fonction de ces informations, et au débarquement, le transporteur est automatiquement dirigé en fonction du statut attribué à sa marchandise (vert : pas de contrôle ; orange : contrôle), soit pour compléter ses formalités douanières, soit pour un contrôle.

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux et audition de Mme Isabelle Braun Lemaire, directrice générale des douanes et des droits indirects, par la commission des finances le 6 avril 2021

Plus généralement, la Douane peut s'appuyer sur un taux élevé de dématérialisation des procédures et des formalités déclaratives , de 88 % en 2020 21 ( * ) . L'objectif est d'éviter que le délai moyen d'immobilisation des marchandises, de 2 minutes et 31 secondes en 2020 22 ( * ) , ne bondisse avec le Brexit. Une incertitude demeure sur le trafic voyageurs, encore bien en-deçà du niveau constaté en 2019.

Les difficultés sont donc, pour le moment, davantage du côté britannique , ce qui s'explique également par un effet de taille : si les échanges avec le Royaume-Uni représentent 8 % à 10 % du commerce de l'Union européenne, pour le Royaume-Uni, les échanges avec l'Union européenne représentent 50 % de son commerce extérieur. À cette difficulté s'ajoutent des problèmes organisationnels et de personnel en nombre insuffisant (inspecteurs sanitaires, professionnels du dédouanement) 23 ( * ) .

Sur le plan budgétaire, 700 emplois « Brexit » ont été alloués à la DGDDI entre 2018 et 2021 . 47 % de ces emplois sont rattachés à la branche d'activité « administration générale/opérations commerciales » de la Douane, l'autre branche correspondant aux missions de surveillance. Sur ces 47 % (328 emplois), 89 % ont été affectés dans les bureaux douaniers identifiés comme ayant à traiter des flux commerciaux volumineux avec le Royaume-Uni, dont 56 % dans les bureaux de la façade Manche/Mer du Nord 24 ( * ) .

Au total, le montant des dépenses engagées par la Douane sur le Brexit s'élève à 81 millions d'euros, dont 62,4 millions d'euros au titre des dépenses de personnel et 17,6 millions d'euros pour les équipements (informatique, immobilier) 25 ( * ) .

L'effet du Brexit sur les crédits de la Douane devrait désormais être plus limité, à l'exception des améliorations apportées aux systèmes d'information ainsi que l'organisation des dernières campagnes d'information à destination des entreprises en 2022 26 ( * ) . La Douane développe également le projet France Sésame , un point de contact portuaire unique permettant de coordonner les contrôles opérés par la DGDDI, la direction générale de l'alimentation (DGAL) et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). En 2022, 13 millions d'euros en dépenses d'investissement seraient consacrés à l'ensemble des projets menés par la DGDDI pour promouvoir les échanges internationaux et la qualité du dédouanement (action 04 du programme 302).


* 19 D'après les données transmises dans le rapport d'activité pour l'année 2020 de la direction générale des finances publiques.

* 20 Audition de Mme Isabelle Braun-Lemaire, directrice générale des douanes et des droits indirects , par la commission des finances du Sénat le mardi 6 avril 2021.

* 21 D'après les données figurant dans le rapport d'activité pour l'année 2020 de la direction générale des douanes et droits indirects,

* 22 Ibid.

* 23 Ainsi que l'a indiqué lors de son audition par la commission des finances Mme Braun-Lemaire , directrice générale des douanes et des droits indirects (6 avril 2021).

* 24 Selon les données transmises en réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 25 Montant des dépenses consolidé par la direction du budget et le secrétariat général du ministère de l'économie, des finances et de la relance au premier semestre 2021.

* 26 Le Royaume-Uni rétablira en effet ses formalités à l'importation à compter du 1 er janvier 2022 pour les formalités et les contrôles douaniers et à compter du 1 er juillet 2022 pour les contrôles sanitaires et phytosanitaires, ainsi que les contrôles en matière de sûreté-sécurité. Seules les formalités à l'exportation s'appliquent aujourd'hui du côté britannique.

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