CHAPITRE VI
EVALUATION ET CONTRÔLE

Article 36
Mission de contrôle de l'inspection générale de l'administration

Cet article précise le rôle de l'inspection générale de l'administration dans la conduite du contrôle et de l'évaluation des actions de sécurité civile.

Le corps de l'inspection générale de l'administration, classé dans la catégorie A de la fonction publique de l'Etat 175 ( * ) et placé sous l'autorité directe du ministre de l'intérieur, est régi par les dispositions du décret du 12 mars 1981 modifié 176 ( * ) .

L'article premier de ce dernier lui confère une « mission générale de contrôle, d'audit, d'étude et de conseil à l'égard des services centraux et déconcentrés qui relèvent du ministre de l'intérieur. Il assume également des missions d'évaluation des politiques publiques, de formation et de coopération internationale ». Les membres de l'inspection exercent ainsi « au nom du ministre, le contrôle supérieur de tous les personnels, services, établissements, institutions et organismes qui relèvent du ministre de l'intérieur ».

Mais ce pouvoir de contrôle et d'évaluation concerne aussi tous les personnels, services, établissements, institutions et organismes sur lesquels les préfets exercent leur contrôle « sous réserve, dans ce dernier cas, de l'accord express ou tacite du ministre intéressé » ou les personnels, services, établissements, institutions et organismes relevant d'autres ministères sur décision du Premier ministre. En outre, l'inspection formule à l'intention des ministres tous avis, études et propositions entrant dans son champ de compétences .

Le législateur a reconnu d'autres prérogatives à l'inspection semblables à celles de l'inspection générale des finances . Elle dispose ainsi des pouvoirs d'investigation nécessaires à l'examen, sur pièces et sur place, des écritures, du bilan et des comptes des sociétés, syndicats, associations ou entreprises de toute nature qui ont fait appel au concours des collectivités locales, départementales ou communales. Pour l'exercice de leurs missions, les membres de l'inspection générale de l'administration ont libre accès aux structures précitées et ceux-ci sont tenus de leur prêter leur concours 177 ( * ) .

L'inspection générale de l'administration peut ainsi aujourd'hui opérer des contrôles dans les services de collectivités territoriales . Elle peut ainsi évaluer l'organisation et le fonctionnement des services de police municipale 178 ( * ) . Elle peut aussi être amenée, comme l'inspection générale des affaires sociales ou l'inspection générale de l'agriculture, à contrôler les « autorités de gestion et de paiement, notamment les collectivités territoriales » qui bénéficient des fonds structurels communautaires pour le compte de la commission interministérielle de coordination des contrôles portant sur les opérations cofinancées par les fonds structurels européens 179 ( * ) .

Enfin, l'inspection générale de l'administration joue déjà un rôle essentiel dans la conduite de missions d'évaluation à la suite d'accidents majeurs (incendie du tunnel du Mont Blanc du printemps 1999) ou de catastrophes naturelles (tempêtes de décembre 1999). A l'issue des incendies exceptionnels de l'été 2003, l'inspection générale de l'administration a été chargée de vérifier la réalité de certains dysfonctionnements locaux dans l'organisation des secours 180 ( * ) mais aussi de formuler des préconisations sur la protection contre les feux de forêt en collaboration avec plusieurs inspections spécialisées.

Au-delà des missions liées aux circonstances , l'examen de la pertinence et de la cohérence des actions menées en matière de sécurité civile n'est pas facilité par le partage des compétences.

Le présent article clarifie les interventions de l'inspection générale de l'administration dans le domaine de la sécurité civile en lui confiant explicitement une mission de contrôle et d'évaluation des « actions relatives à la sécurité civile menées par les collectivités territoriales, par leurs établissements publics ainsi que, (...) les associations agréées 181 ( * ) » au titre de l'article 31 du projet de loi.

En outre, elle pourrait « procéder à l'évaluation des actions de prévention et des dispositifs mis en oeuvre à la suite de sinistres ou de catastrophes ».

Le dispositif se fonde sur les compétences reconnues à l'inspection au regard des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des associations de sécurité civile par les textes précités du droit en vigueur en les étendant explicitement à la sécurité civile. Le principe de libre accès de l'inspection générale de l'administration aux services des collectivités, établissements et associations précités est ainsi affirmé.

Ceux-ci sont « tenus de prêter leur concours aux membres de l'inspection (...), de leur fournir toutes justifications et tous renseignements utiles et de leur communiquer tous documents, pièces et éléments nécessaires à l'accomplissement de leurs missions ».

Ces prérogatives s'exercent « dans les conditions fixées par le ministre chargé de la sécurité civile », sans préjudice de celles des autres corps d'inspection et de contrôle.

La reconnaissance de telles compétences dans la loi permettrait en premier lieu à l'inspection générale de l'administration de bénéficier d'une légitimité juridique sans équivoque pour effectuer ses missions de contrôle ou de préconisations .

En second lieu, cette réforme répondrait à une demande des acteurs des secours, désireux de bénéficier d'une évaluation régulière, liée à une expertise technique et à des recommandations pratiques , afin de garantir l'efficacité de leurs interventions.

En troisième lieu, elle est une nécessité pour l'évaluation de la politique de sécurité civile, issue du principe de la solidarité nationale, posé par le douzième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, dont l'efficacité relève de l'intérêt général.

Conformément à la définition posée à l'article premier, la sécurité civile recouvre des actions de prévention des risques et de protection des populations. Dans un souci de clarification, votre commission vous propose un amendement tendant à préciser que « les actions relatives à la sécurité civile » qui pourraient être évaluées et contrôlées par l'inspection générale de l'administration « à la demande du ministre chargé de la sécurité civile » et conformément au premier alinéa du présent article, seraient celles « relatives à la mise en oeuvre de la protection des populations ». Les actions de prévention pourraient en effet déjà être l'objet d'une évaluation spécifique de l'inspection, prévue au deuxième alinéa.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 36 ainsi modifié .

Article 37
Rôle de l'inspection de la défense et de la sécurité civiles

Cet article précise les missions d'évaluation et de contrôle de l'inspection de la défense et de la sécurité civiles.

La création d'une « inspection technique permanente des corps de sapeurs-pompiers et des services de secours et de défense contre l'incendie des départements et des communes de territoire, à l'exception de la ville de Paris » par un décret-loi du 12 novembre 1938 est à l'origine de l'existence d'une structure permanente d'inspection des services d'incendie et de secours placée au ministère de l'intérieur.

L'inspection de la défense et la sécurité civiles (composée aujourd'hui de six membres), dans sa dénomination actuelle est ainsi mentionnée à l'article 2 de l'arrêté du ministre de l'intérieur portant organisation et attributions de la direction de la défense et de la sécurité civiles en date du 24 août 2000.

L'article 3 du même arrêté prévoit les missions de l'inspection, que celle-ci exerce sous l'autorité du directeur de la défense et de la sécurité civiles : « l'inspection de la défense et de la sécurité civiles contrôle l'ensemble des services de défense et de sécurité civiles et veille à l'observation par ces services des textes législatifs et réglementaires en vigueur.

« Elle propose en tant que de besoin toutes mesures propres à augmenter l'efficacité de ces services en matière d'organisation, d'instruction, d'équipement et d'engagement opérationnel de leurs moyens.

« Enfin, peuvent lui être confiées toutes missions d'enquête et de contrôle jugées utiles ».

Dans ce cadre, l'inspection de la défense et de la sécurité civiles est appelée à contrôler et à évaluer régulièrement non seulement le fonctionnement des services de l'Etat (groupement des moyens aériens...) mais aussi celui des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), dont les missions spécifiques de prévention des risques et de protection des populations sont essentielles pour l'organisation des secours.

L'existence d'une inspection technique nationale en soutien aux services départementaux d'incendie et de secours est une nécessité pour maintenir la cohérence technique et l'efficacité opérationnelle du dispositif national de sécurité civile.

L'inspection de la défense et de la sécurité civiles, analyse ainsi périodiquement l'action des services départementaux d'incendie et de secours.

Toutefois, la sécurité juridique de cette mission est mal assurée à l'heure actuelle car elle ne repose que sur des textes réglementaires.

Le présent article répond à ces fragilités en prévoyant dans la loi que l'inspection de la défense et de la sécurité civiles « assure l'évaluation périodique et l'inspection technique des services territoriaux d'incendie et de secours ».

Par ailleurs, ses relations avec l'inspection générale de l'administration, dont les compétences en matière de sécurité civile sont explicitement posées par l'article 36, sont précisées.

A la demande de l'autorité ministérielle, dénomination en vérité assez floue pour signifier le ministre de l'intérieur, chargé de la sécurité civile et responsable des deux inspections, l'inspection de la défense et de la sécurité civiles apporte « son concours à l'accomplissement des missions exercées par l'inspection générale de l'administration en application de l'article36. »

A nouveau, il s'agit d'élever dans la loi une pratique existante, les personnels affectés à l'inspection de la défense et de la sécurité civiles faisant déjà bénéficier l'inspection générale de l'administration de leur expertise technique depuis quelques années.

Votre commission vous soumet deux amendements , l'un rédactionnel, l'autre tendant à préciser que c'est à la demande « du ministre chargé de la sécurité civile » que l'inspection apporterait son concours à l'inspection générale de l'administration et vous propose d'adopter l'article 37 ainsi modifié .

Article 38
Sanction des entraves à une inspection

Cet article tend à sanctionner les entraves aux missions d'inspection opérée en application des articles 36 et 37 du projet de loi.

L'inspection générale de l'administration (IGA), qui serait chargée par l'article 36 d'une mission d'évaluation et de contrôle spécifique aux actions relatives à la sécurité civile menées par les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les associations agréées, ainsi que des actions de prévention et des dispositifs mis en oeuvre à la suite de crises de sécurité civile, éventuellement aidée par l'inspection de la défense et de la sécurité civiles, disposerait pour cela de toutes les prérogatives nécessaires (libre accès aux services ; concours et fourniture de toutes les données utiles...).La détermination dans la loi des obligations des services devrait faciliter l'accomplissement satisfaisant des missions précitées.

Toutefois, afin d'éviter que les équipes de l'inspection se heurtent à une résistance des personnels concernés peu enclins à collaborer, ce qui se traduit par des difficultés dans l'obtention des documents et des renseignements nécessaires ou même par des « pressions » exercées sur les interlocuteurs compétents les dissuadant d'apporter leur coopération, le présent article sanctionnerait le fait de mettre obstacle à l'accomplissement des contrôles précités d'une amende de 15.000 €.

Ce montant est comparable à ceux qui sont fixés pour des actions similaires, à l'exemple du dispositif de l'article 43 de la loi n° 96-314 du 12 août 1996 sanctionnant l'entrave aux missions de contrôle de l'inspection des finances ou de l'inspection générale de l'administration.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 38 sans modification .

* 175 Article 29 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1924 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat.

* 176 Décret n° 81-241 du 12 mars 1981 portant statut de l'inspection générale de l'administration au ministère de l'intérieur.

* 177 Article 2 du décret précité.

* 178 Article L. 2212-8 du code général des collectivités territoriales. Ce contrôle peut être effectué à la demande du maire, du représentant de l'Etat dans le département ou du procureur de la République et sur décision du ministre de l'intérieur.

* 179 Loi n°2002-1576 du 30 décembre 2002-loi de finances rectificative pour 2002.

* 180 Ce rapport d'octobre 2003 sur les modalités d'intervention des secours lors de l'incendie dit de « Santa Maria di Lota » (Haute-Corse), exceptionnellement rendu public, concluait que les évènements avaient mis à jour les limites du dispositif sans pour autant permettre de constater des fautes dans l'accomplissement du service.

* 181 A titre d'exemple sur les pouvoirs de contrôle des inspections relatifs aux activités associatives, il convient de rappeler que les associations faisant appel à la générosité du public sont soumises au contrôle de l'inspection générale des affaires sociales, afin de permettre aux adhérents et aux donateurs de s'assurer de la conformité des dépenses engagées aux objectifs poursuivis (loi n°96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire).

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