B. ... EN DÉPIT D'UNE SITUATION QUI S'EST BRUTALEMENT DÉGRADÉE

Le rapporteur pour avis a rendu public au mois de juillet 2022 un rapport 1 ( * ) exposant de manière détaillée les mécanismes de la crise de la presse quotidienne régionale. L'analyse, qui met en exergue les conséquences des difficultés de la presse à monétiser sa présence en ligne et, de manière plus immédiate, les conséquences que l'on peut sans peine qualifier de cataclysmique de la hausse des prix des consommables , en particulier du papier, est, hélas, assez largement transposable à toute la presse en France et à l'étranger .

La presse quotidienne régionale

Lue par 43 millions de lecteurs chaque mois, la PQR demeure une famille de presse appréciée dont les ventes d'exemplaires ont mieux résisté que la presse quotidienne nationale. Le rapport a cependant souligné que ce résultat, qui témoigne du fort attachement du lectorat, dissimule en réalité un retard estimé à six années dans la mise en oeuvre de la transition numérique, retard qui constitue aujourd'hui la principale faiblesse de la PQR.

En effet, avec l'explosion des prix du papier, toute la presse, mais plus encore celle qui repose encore sur des ventes d'exemplaires « physiques », est aujourd'hui gravement menacée dans son modèle économique. À la crise structurelle qu'elle traverse depuis plus de 10 ans se surajoute ainsi une crise conjoncturelle qui frappe d'ailleurs l'ensemble des secteurs industriels.

L'indice des prix du papier était de 92 début 2010, et est demeuré relativement stable jusqu'à la fin 2020 autour de 100. Il s'établissait en mai 2022, au moment de la publication du rapport, à près de 150, en très forte croissance depuis le début 2021. Au mois d'août, il avait encore progressé de 10 points. Le papier importé progresse dans les mêmes proportions.

Dès lors, le surcoût pour la presse est colossal. Le groupe EBRA, premier groupe de presse quotidienne, l'estime maintenant à 18 millions d'euros , le groupe Ouest France à 12 millions . Pour la seule presse quotidienne, la charge supplémentaire s'établirait à plus de 175 millions d'euros en année pleine.

En conséquence, toute la presse supporte aujourd'hui une crise qui dépasse probablement celle du reste de l'économie. En effet, le coût du papier a progressé bien plus fortement que celui des autres produits. Cette crise se surajoute donc à celle, structurelle, avec laquelle vit le secteur depuis plus de 10 ans.

Or, contrairement à ce que le rapport précité recommandait, le présent projet de loi de finances s'avère très décevant, en ne tenant absolument pas compte de ce nouveau contexte .

L'adoption par la commission des finances de l'Assemblée nationale d'un amendement d'un montant de cinq millions d'euros, prélevés sur le programme « Livre et industries culturelles », apparaît en tout état de cause comme largement insuffisante.

Si l'argument budgétaire est légitime, il se heurte cependant, dans ce cas précis, à l'échec cinglant du crédit d'impôt pour un premier abonnement , qui prive la filière de sommes qui lui ont été promises.


* 1 https://www.senat.fr/notice-rapport/2021/r21-805-notice.html

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