Avis n° 118 (2022-2023) de M. Jean SOL , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 17 novembre 2022

Disponible au format PDF (761 Koctets)

Synthèse du rapport (460 Koctets)


N° 118

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet
de
loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale
en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, pour
2023 ,

TOME V

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

Par M. Jean SOL,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche , présidente ; Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge , vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, MM. Abdallah Hassani, Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Mélanie Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273, 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374, 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2023, marqués par la revalorisation des prestations sociales et la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés. Elle a également émis un avis favorable à l'adoption de l'article 46 quater , rattaché à la mission, et proposé l'adoption d'un amendement relatif au financement du GIP « France enfance protégée ».

I. UNE MISSION AU RÔLE D'AMORTISSEUR FACE À LA SUCCESSION DES CRISES

A. DES DÉPENSES DYNAMIQUES PORTÉES PAR L'INFLATION ET LA REVALORISATION DES PRESTATIONS

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances met en oeuvre les politiques publiques destinées à lutter contre la pauvreté, réduire les inégalités et protéger les personnes vulnérables. Les dépenses de la mission sont, en grande majorité, des dépenses d'intervention.

Pour 2023, les crédits demandés pour l'ensemble de la mission s'élèvent (en crédits de paiement) à 29,9 milliards d'euros , après 27,6 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2022 - soit une hausse de 8,3 % . Au total, les dépenses auront augmenté de 68 % depuis la loi de finances pour 2017.

La mission comprend quatre programmes dont le poids budgétaire est inégal. Le programme « Inclusion sociale et protection des personnes » finance notamment la prime d'activité (10,9 milliards d'euros) , tandis que le programme « Handicap et dépendance » comprend les crédits de l'allocation aux adultes handicapés (AAH, 12,5 milliards d'euros) . À elles deux, ces prestations représentent 78 % des crédits de la mission.

Le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », doté de 1,2 milliard d'euros, centralise les emplois et les moyens de fonctionnement des ministères des solidarités et de la santé. Il porte également la subvention pour charges de service public versée aux agences régionales de santé (ARS).

Enfin, le programme « Égalité entre les femmes et les hommes » représente moins de 0,2 % des crédits de la mission.

Répartition par programme des crédits de la mission

Source : Commission des affaires sociales

Le dynamisme des crédits de la mission est notamment porté par la revalorisation anticipée de 4 %, à compter du 1 er juillet 2022, de diverses prestations sociales dont la prime d'activité, l'AAH et le revenu de solidarité active (RSA), prévue par la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat 1 ( * ) . Cette revalorisation s'imputera, au 1 er avril 2023, sur la revalorisation annuelle légale de ces prestations en fonction de l'évolution de l'indice des prix à la consommation. L'impact de cette mesure sur le budget de la mission avoisinerait 900 millions d'euros en 2023 .

Impact budgétaire prévisionnel, en 2022 et 2023,
de la revalorisation de 4 % des prestations

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur

La même loi du 16 août 2022 a prévu la déconjugalisation de l'AAH à compter du 1 er octobre 2023 au plus tard. Le coût budgétaire de cette mesure serait de 93 millions d'euros en 2023 puis de 560 millions d'euros en année pleine .

B. UNE MISSION MISE À CONTRIBUTION POUR FAIRE FACE À L'URGENCE SOCIALE

Depuis 2019, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » a porté des dispositifs d'urgence destinés à répondre à la crise des « gilets jaunes », à faire face aux conséquences sociales de la crise sanitaire, puis à préserver le pouvoir d'achat des Français face à la hausse des prix.

En 2022 , les crédits de la mission ont encore fortement varié en cours d'exercice. La 1 ère loi de finances rectificative pour 2022 2 ( * ) a prévu l'ouverture, au titre du programme « Inclusion sociale et protection des personnes », de 1,2 milliard d'euros pour financer une prime exceptionnelle de rentrée concernant environ 11 millions de foyers . Cette aide versée selon le cas par la CAF, Pôle emploi ou le Crous s'est élevée à 100 euros, auxquels se sont ajoutés 50 euros par enfant à charge, pour les bénéficiaires de minima sociaux et les étudiants boursiers ne percevant pas d'aide au logement. Les bénéficiaires de la prime d'activité ont pour leur part bénéficié en novembre d'un versement de 28 euros, complété de 14 euros par enfant à charge.

Par ailleurs, la 1 ère LFR a ouvert des crédits de 55 millions d'euros pour apporter un soutien exceptionnel en faveur de l'aide alimentaire.

Crédits ouverts et exécutés au titre de la mission depuis 2019

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales / documents budgétaires

Le caractère répété de ces interventions discrétionnaires en cours de gestion tendent à démontrer que les dispositifs financés par la mission, et plus généralement notre système de prestations de solidarité, ne jouent pas spontanément un rôle stabilisateur.

Dans le même temps, les associations de solidarité, qui sont également fragilisées par la hausse des prix et notamment du coût de l'énergie, ne bénéficient pas d'une compensation spécifique en dépit de leur rôle essentiel en matière de cohésion sociale.

II. HANDICAP ET DÉPENDANCE : UN VIRAGE EN FAVEUR DE L'AUTONOMIE DES PERSONNES HANDICAPÉES

A. LA CONCRÉTISATION DE LA DÉCONJUGALISATION DE L'AAH

• La suppression de la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH , longtemps soutenue par le Sénat contre l'avis du Gouvernement, se substituera en 2023 au dispositif d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint introduit par la loi de finances pour 2022 3 ( * ) . Cette mesure devrait bénéficier à 160 000 allocataires (dont 80 000 nouveaux entrants dans la prestation) pour un gain moyen de 300 euros par mois. Elle s'accompagne d'un maintien du calcul actuel de la prestation pour les bénéficiaires en couple qui seraient perdants , afin de ne pas les pénaliser. La déconjugalisation sera automatique - et irréversible - dès lors qu'elle sera plus favorable au bénéficiaire, sur la base des calculs qui seront effectués régulièrement par les CAF.

La mise en oeuvre de la déconjugalisation, qui nécessite d'importants développements informatiques, attendra probablement la date butoir du 1 er octobre 2023 même si le ministre des solidarités, auditionné par la commission, n'a pas fermé la porte à une entrée en vigueur anticipée.

Il convient de remarquer que cette mesure n'a pas été étendue à Mayotte , qui dispose d'un régime spécifique de protection sociale. Le rapporteur pour avis a attiré l'attention du Gouvernement à ce sujet.

• Au cours du précédent quinquennat, l'AAH a fait l'objet d'une revalorisation exceptionnelle en deux temps : son montant maximum a été porté à 860 euros au 1 er novembre 2018, puis à 900 euros au 1 er novembre 2019. Elle a également bénéficié de la revalorisation anticipée de 4 % au 1 er juillet 2022 qui a porté son montant à 956,65 euros . Le nombre de bénéficiaires atteindrait 1,26 million en 2022.

Pour 2023, 12,5 milliards d'euros sont ainsi demandés au titre de l'AAH. Au total, malgré les mesures d'économies intervenues au cours du quinquennat précédent, les crédits dédiés à l'allocation auront progressé de 38 % entre la loi de finances pour 2017 et le PLF pour 2023.

• D'autres évolutions de l'AAH sont à envisager afin d'améliorer les conditions de son cumul avec des revenus d'activité , notamment en milieu ordinaire. En particulier, il pourrait être opportun de procéder à une révision de la notion de restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (RSDAE) qui permet à une personne ayant un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 % de bénéficier de l'allocation (« AAH-2 »). En effet, l'activité en milieu ordinaire est compatible avec la reconnaissance d'une RSDAE mais seulement pour une durée de travail inférieure au mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap de la personne. Ces conditions peuvent contribuer à décourager des personnes qui connaissent, par définition, des difficultés d'insertion ou de maintien dans l'emploi.

B. LA POURSUITE DU PLAN DE TRANSFORMATION DES ESAT

• Le programme « Handicap et dépendance » contribue également à soutenir les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) à hauteur de 1,5 milliard d'euros en 2023. L'impact de la hausse du SMIC sur la rémunération des quelque 120 000 personnes handicapées travaillant en ESAT conduit en effet à une hausse des crédits de l'aide au poste pour la garantie de ressources des travailleurs handicapés (GRTH) de 87 millions d'euros.

• L'année 2023 doit voir la réalisation de deux mesures « phares » du plan de transformation de l'offre d'ESAT annoncé lors du comité interministériel du handicap du 5 juillet 2021 :

- la possibilité, pour une personne handicapée orientée en ESAT, de partager son temps de travail entre le milieu protégé et le milieu ordinaire de travail dans la limite de la durée maximale de travail ;

- la mise en place, pour les personnes sortant d'ESAT vers le marché du travail, d'un parcours renforcé en emploi leur permettant de bénéficier d'un accompagnement médico-social et professionnel afin de favoriser leur maintien en emploi.

L'application de ces mesures nécessite un décret en Conseil d'État. Il conviendra en particulier de prêter attention à l'impact sur l'AAH du cumul entre des activités en ESAT et en milieu ordinaire. Dans cette perspective, une réflexion sur l'harmonisation sur une base trimestrielle des périodes de référence pour l'AAH et la prime d'activité serait également bienvenue.

• En revanche, les crédits du fonds d'accompagnement de la transformation des ESAT (Fatesat) , dotés de 15 millions d'euros en 2022 dans le cadre de la mission « Plan de relance », ne seront pas reconduits en 2023 . D'après les informations fournies par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), les mesures financées par ces crédits via le fonds d'intervention régional (FIR) des ARS n'ont pas encore été pleinement déployées et seront évaluées en 2023.

C. EMPLOI ACCOMPAGNÉ : LA PÉRENNISATION DES CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE

Les travailleurs handicapés nécessitant un accompagnement médico-social pour s'insérer durablement sur le marché du travail peuvent bénéficier d'un dispositif d'emploi accompagné , comportant un volet médico-social et un soutien à l'insertion professionnelle , en vue de leur permettre d'accéder et de se maintenir dans l'emploi rémunéré 4 ( * ) .

Alors que l'efficacité du dispositif est reconnue, sa dimension est modeste mais en croissance : 6 500 personnes étaient accompagnées mi-2022 contre 3 700 fin 2020, l'objectif étant d'atteindre 10 000 personnes accompagnées fin 2023.

Dans cette perspective, le dispositif évolue depuis 2021 afin de fonctionner sous la forme de plateformes départementales de services intégrés.

En outre, l'enveloppe supplémentaire de 7,5 millions d'euros, inscrite au titre du Plan de relance en 2021 et 2022, est pérennisée dans le programme « Handicap et dépendance » en 2023. Le total des crédits se maintient ainsi à 22,4 millions d'euros .

III. INCLUSION SOCIALE : DES POLITIQUES EN VOIE DE RENOUVELLEMENT

A. LA PRIME D'ACTIVITÉ : UNE DÉPENSE DYNAMIQUE À RATIONALISER

Les crédits inscrits au PLF au titre de la prime d'activité, qui s'élèvent à 10,9 milliards d'euros pour 2023, sont en hausse de 11 % : 4 points s'expliquent par la hausse tendancielle des dépenses, à laquelle s'ajoute une hausse exceptionnelle liée à la revalorisation anticipée de 4 % des barèmes de la prestation au 1 er juillet 2022 (+ 7 points). La revalorisation de la prime d'activité apparaît ainsi comme le premier facteur d'augmentation des crédits de la mission . L'effectif des bénéficiaires reste stable et atteindrait 4,54 millions de foyers en moyenne en 2023.

Le versement de la prime d'activité pourrait connaître une forme d'automatisation dans le cadre de la « solidarité à la source » promise par le Président de la République. En tout état de cause, une amélioration du versement à bon droit de la prestation semble nécessaire : le dernier rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, qui consacre un chapitre aux prestations sociales versées sous conditions de ressources, fait état de nombreuses anomalies et recommande d'engager un chantier de simplification.

Selon la Cour des comptes, 1 euro de prime d'activité sur 5 serait versé à tort à titre définitif.

Le rapporteur pour avis regrette que, dans la perspective des prochaines réformes des prestations de solidarité, le rapport de Fabrice Lenglart sur le revenu universel d'activité n'ait pas été rendu public.

B. UNE ANNÉE DE TRANSITION EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

• La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté arrivant en fin de cycle, les crédits consacrés à cette action au sein du programme 304 diminuent de 327,6 millions à 252 millions d'euros entre 2022 et 2023. Ce plan, qui repose pour une large part sur la contractualisation entre l'État et les départements, entre en effet dans une année de transition au cours de laquelle les conventions seront renouvelées.

Parmi les mesures emblématiques de la stratégie au niveau national, l'offre de cantine scolaire à 1 euro a atteint son objectif, après plusieurs ajustements de ses paramètres, puisque 115 000 élèves en bénéficient actuellement dans 1 550 communes. Les crédits qui lui sont consacrés augmenteraient de 7 millions d'euros en 2023.

À l'inverse, le plan de formation des travailleurs sociaux n'a pas répondu aux attentes : selon le comité d'évaluation de la stratégie pauvreté, 16 420 professionnels auraient été formés au total, soit 16,4 % de l'objectif.

Un nouveau « Pacte des solidarités » prendrait la suite de la stratégie 2018-2022 en structurant la politique de lutte contre la pauvreté autour de quatre priorités stratégiques :

- la prévention de la pauvreté , afin d'éviter la reproduction de la pauvreté entre générations et de protéger les personnes dans les moments de rupture ;

- l'insertion par l'emploi , en particulier des personnes les plus éloignées de l'emploi et notamment des bénéficiaires du RSA, axe qui s'inscrit dans le chantier France Travail ;

- la lutte contre la grande marginalité , en restaurant l'égale dignité de chacun par la garantie d'un même accès aux droits et aux services ;

- l'organisation d'une transition écologique et solidaire afin de réduire le poids des dépenses contraintes (alimentation, mobilité, logement).

• L'expérimentation du transfert à l'État du financement et de la gestion du RSA a été lancée en 2022 dans deux départements volontaires : la Seine-Saint-Denis et les Pyrénées-Orientales. Selon les informations fournies par la DGCS, l'ouverture à une seconde vague de départements par la loi « 3DS » 5 ( * ) n'a suscité que quatre candidatures. Au regard des conditions financières prévues par la loi de finances pour 2022 6 ( * ) , seuls les départements anticipant une augmentation de leurs dépenses et un accroissement de leur reste à charge ont intérêt à entrer dans l'expérimentation. Compte tenu des critères récemment fixés par décret et du retrait de la Guadeloupe, seule la candidature de l'Ariège a été retenue pour entrer dans l'expérimentation en 2023.

Les départements participant à l'expérimentation, d'une durée de 5 ans, s'engagent à développer et déployer de nouvelles politiques d'insertion à destination des bénéficiaires du RSA. Ainsi, le conseil départemental doit formaliser dans une convention avec l'État les engagements qu'il prend en matière d'augmentation de ses dépenses d'insertion, de renforcement des effectifs dédiés à l'accompagnement vers l'emploi des bénéficiaires du RSA et de développement des offres de solutions d'insertion.

Par ailleurs, l'attribution et le financement du RSA ont été recentralisés de manière pérenne, depuis 2019, en Guyane et à Mayotte et, depuis 2020, à La Réunion.

Au total, les crédits dédiés au RSA recentralisé augmenteraient en 2023 de 1,42 milliard à 1,56 milliard d'euros sous l'effet notamment de la revalorisation anticipée de 4 % de la prestation au 1 er juillet 2022.

• De nouvelles expérimentations sont simultanément lancées en matière d'accompagnement des bénéficiaires du RSA, qui ont vocation à converger vers France Travail :

- l'expérimentation d'un RSA sous conditions d'activité , qui répond à un engagement de campagne du Président de la République, sera lancée en début d'année 2023 dans dix territoires correspondant à des bassins d'emploi. 43 départements ont déposé leur candidature. Dans ce cadre, la logique d'engagements réciproques sera renforcée autour d'un accompagnement plus dense et tourné vers l'emploi ;

- l'expérimentation de « territoires zéro non recours » vise à favoriser l'accès aux droits sociaux sur dix territoires et pour une durée de trois ans à compter de la publication d'un décret en Conseil d'État prévu par l'article 133 de la loi « 3DS » .

Elle comportera a minima des actions de lutte contre le non-recours au RSA et à la prime d'activité. Les collectivités territoriales candidates seront chargées du pilotage des projets au niveau local. Les territoires sélectionnés bénéficieront d'une participation financière de l'État et devront apporter un cofinancement dont le taux n'est pas défini à ce stade. 2 millions d'euros inscrits au titre de la stratégie pauvreté seront ainsi fléchés vers cette expérimentation en 2023.

C. DE NOUVEAUX MOYENS DÉDIÉS À L'AIDE ALIMENTAIRE

• Un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires doté de 60 millions d'euros en 2023 sera créé pour « verdir » l'aide alimentaire, portant à 117 millions d'euros le total des crédits consacrés à cette action. Ses interventions se composeront de deux volets :

- un volet national, déployé au moyen d'appels à projets auprès des acteurs nationaux de l'aide alimentaire, pour améliorer la qualité environnementale et nutritionnelle, ainsi que la diversité des aliments distribués ;

- un volet territorial pour développer les réseaux locaux de solidarité alimentaire « producteurs, associations, collectivités » ciblant les approvisionnements locaux, en circuits courts ou sous label de qualité.

Si les réseaux de l'aide alimentaire considèrent que la création de ce fonds va dans le bon sens, ils restent en attente de précisions sur le calendrier de sa mise en place et ses modalités de fonctionnement.

• Les associations sont cependant frappées par un redoutable « effet de ciseaux » dans le contexte actuel de crise inflationniste et de tensions sur les marchés alimentaires.

Déjà très sollicitées pendant la crise sanitaire, les banques alimentaires doivent à nouveau faire face à un afflux de demandeurs . Selon la Fédération française des banques alimentaires (FFBA), la demande a augmenté de 9 % au premier semestre 2022. Quant aux Restos du Coeur, ils constatent une augmentation d'environ 15 % de leur fréquentation depuis 6 mois.

Dans le même temps, la pression sur les approvisionnements , dont la multiplication des lots infructueux dans le cadre des marchés publics du programme européen FSE+ est un symptôme, devient une préoccupation majeure. À l'initiative du Sénat, une enveloppe de 40 millions d'euros a été prévue par le 1 er PLFR pour 2022 afin de compenser une partie de la perte liée à ces lots infructueux. Au regard des incertitudes actuelles, cette enveloppe risque toutefois de se montrer rapidement insuffisante.

D. L'ACCOMPAGNEMENT FINANCIER DE L'ÉTAT À LA MISE EN oeUVRE DE LA LOI SUR LA PROTECTION DES ENFANTS

• Les crédits de la stratégie de prévention et de protection de l'enfance sont maintenus à 140 millions d'euros du fait de l'achèvement de la contractualisation, désormais étendue à l'ensemble des départements volontaires.

En outre, 50 millions d'euros sont inscrits pour 2023 afin d'aider financièrement les départements à mettre en oeuvre l'obligation, prévue par la loi du 7 février 2022 sur la protection des enfants 7 ( * ) , d'accompagner les jeunes majeurs de moins de 21 ans sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE) sans ressources ni soutien familial. Pour l'Assemblée des départements de France, ce soutien est néanmoins insuffisant dans un contexte d'augmentation des dépenses de l'ASE.

L'article 46 quater du PLF , inséré dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale et rattaché à la mission, prévoit que la part de l'État dans le financement du nouveau groupement d'intérêt public (GIP) « France enfance protégée » créé par la loi du 7 février 2022 pourra, à titre dérogatoire, être supérieure à celle des départements en 2023, alors que la loi prévoit un financement à parts égales 8 ( * ) . Toutefois, le coût supplémentaire qui en résulte pour l'État n'a pas été répercuté dans les crédits de la mission. Afin que le report de la montée en charge de la contribution des départements ne compromette pas la capacité du GIP à exercer ses missions, la commission a adopté un amendement abondant de 1,4 million d'euros les crédits de l'action 17 (Protection et accompagnement des enfants).

Par ailleurs, l'État compensera à hauteur de 20 millions d'euros , soit 30 % des dépenses supplémentaires pour les départements, les revalorisations salariales des professionnels de la protection maternelle et infantile (PMI) actées lors de la conférence des métiers du 18 février 2022.

• Alors que les flux d'entrée de mineurs non accompagnés (MNA) repartiraient à la hausse, la contribution de l'État aux dépenses des départements continue à baisser de 93 millions d'euros en 2022 à 90 millions d'euros en 2023. Sur ce montant :

- 54 millions d'euros , après 64,7 millions en 2022, pourraient être versés au titre de la phase initiale d'évaluation de la minorité et de mise à l'abri des personnes se présentant comme MNA (composante « amont ») ;

- 36 millions d'euros , après 28,2 millions en 2022, correspondent à la contribution « exceptionnelle » aux dépenses supplémentaires pesant sur l'ASE à la suite de l'admission de MNA (composante « aval »).

Dépenses de l'État au titre de la prise en charge des mineurs non accompagnés

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales / documents budgétaires

La contribution forfaitaire de l'État à la phase « amont » est désormais conditionnée à la conclusion d'une convention avec le préfet pour la mise en oeuvre du dispositif d'appui à l'évaluation de la minorité (AEM) et à la transmission mensuelle au préfet du sens et des dates des décisions du conseil départemental en la matière, ce qui peut avoir un impact à la baisse sur les dépenses de l'État. Bien que la loi du 7 février 2022 ait rendu obligatoire le recours au fichier AEM, 15 départements n'ont pas encore conclu de convention. Toutefois, l'impact de cette conditionnalité, estimé à 2,9 millions d'euros par la DGCS, est loin d'expliquer l'ampleur de la chute des crédits inscrits sur ce volet de 115 millions d'euros en loi de finances pour 2020 à 54 millions d'euros pour 2023. Selon la DGCS, la sous-consommation de ces crédits depuis 2020 s'explique notamment par le décalage de près d'un an constaté entre les flux d'arrivée de MNA et le paiement aux départements, par l'Agence de services et de paiement (ASP), de la contribution de l'État, voire par un non-recours de certains départements à cette contribution forfaitaire.

• Les crédits de l'action 17 financent également, à hauteur de 7,4 millions d'euros, le plan national de lutte contre les violences faites aux enfants. Un amendement retenu par le Gouvernement à l'Assemblée nationale prévoit en outre un crédit de 1,5 million d'euros pour financer la création d'une cellule de soutien pour les professionnels confrontés à des cas d'enfants victimes de violences sexuelles.

E. PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS : UN FINANCEMENT QUI N'EST PAS À LA HAUTEUR DE L'ENJEU DE SOCIÉTÉ

Les crédits inscrits au titre du financement de la protection juridique des majeurs s'élèvent en 2023 à 802 millions d'euros après 734 millions d'euros en 2022, soit une hausse de 9 % . Cette hausse prend en compte non seulement l'augmentation prévisionnelle du nombre de mesures de protection (de 498 000 en 2022 à 517 000 en 2023) mais également la prime de 183 euros accordée dans le cadre du « Ségur III » et le recrutement en cours de 200 mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) en équivalent temps plein (ETP).

Une participation plus importante de l'État reste toutefois attendue des représentants du secteur afin d'améliorer la qualité du travail des mandataires judiciaires et l'attractivité du métier, compte tenu de l'augmentation prévisible de la population des personnes qui ne sont pas en mesure de pourvoir à leurs intérêts du fait d'un handicap, d'une maladie ou d'un accident.

Afin de limiter à 45 le nombre de mesures confiées aux MJPM, contre un peu moins de 60 actuellement, et de garantir ainsi un travail de qualité auprès des majeurs protégés, il serait nécessaire de disposer de 8 390 salariés au sein des services mandataires, donc de créer 1 634 postes supplémentaires. La DGCS estime à 63,5 millions d'euros par an le coût de ces créations de poste, sans compter le nécessaire recrutement de personnels d'encadrement pour accompagner les effectifs nouveaux (évalué à 10,8 millions d'euros).

IV. ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES : UN EFFORT BUDGÉTAIRE SOUTENU

A. LA PRIORITÉ DONNÉE À LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Même si leur poids reste modeste, avec 57,7 millions d'euros demandés pour 2023, les crédits du programme « Égalité entre les femmes et les hommes » ont doublé depuis 2019 et augmentent de 14 % par rapport à 2022. En outre, il convient de préciser que ces crédits n'ont pas vocation à financer la totalité des mesures prises par l'État en la matière.

4,2 millions d'euros supplémentaires sont notamment dédiés à la montée en charge des mesures de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes : soutien aux dispositifs d'accueil et d'aide à la mobilité pour mettre en sécurité les victimes, renforcement du réseau des lieux d'écoute, d'accompagnement et d'orientation (LEAO) et des accueils de jour, lancement d'un « pack nouveau départ » sur 5 sites expérimentaux, consolidation de la plateforme téléphonique « 39 19 », actions ciblées sur les violences sexistes et sexuelles au travail.

En outre, un amendement de crédit tendant à augmenter de 2,9 millions d'euros les moyens dévolus à la Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF), en charge de la gestion de la plateforme téléphonique « 39 19 », a été retenu dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale, portant ainsi le total des crédits de paiement de la mission à 60,6 millions d'euros .

En matière d'accès aux droits, les crédits dédiés aux centres d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) connaissent une augmentation de 1,6 million d'euros pour atteindre 6,3 millions d'euros au total. Le réseau des CIDFF intervient également dans le domaine de la lutte contre les violences sexistes.

B. LA VOLONTÉ D'ACCÉLÉRER LE DÉPLOIEMENT DU PARCOURS DE SORTIE DE LA PROSTITUTION

Six ans après la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel, une instruction interministérielle a rappelé l'impératif de finaliser l'installation dans tous les départements des commissions départementales de lutte contre la prostitution et d'ouvrir des parcours de sortie de la prostitution (PSP) dès lors qu'ils répondent aux prérequis.

En effet, ces commissions départementales ne sont toujours pas installées sur l'ensemble du territoire. Au 1 er septembre, 87 commissions avaient été installées sous l'autorité des préfets (contre 80 au 1 er janvier 2021), et 62 commissions seulement s'étaient réunies au moins une fois dans l'année.

Le parcours de sortie de la prostitution représente un processus long et complexe nécessitant un travail social intense. Néanmoins, la volonté d'accélérer son déploiement commence à porter ses fruits : 529 parcours de sortie de la prostitution avaient été autorisés par décision préfectorale au 1 er septembre, soit une augmentation de 18 % en 8 mois.

Pour 2023, les crédits dédiés à l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle des personnes engagées dans un parcours de sortie (AFIS) augmentent pour la deuxième année consécutive, atteignant 1,6 million d'euros (+ 150 000 euros par rapport à 2022).

Réunie le mercredi 23 novembre 2022 sous la présidence de Catherine Deroche, la commission des affaires sociales a examiné le rapport pour avis de Jean Sol sur les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2023.

Elle a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission ainsi qu'à l'article 46 quater qui lui est rattaché, sous réserve de l'adoption d'un amendement visant à garantir le financement du GIP « France enfance protégée ».

TRAVAUX DE LA COMMISSION

___________

I. AUDITION DE M. JEAN-CHRISTOPHE COMBE,
MINISTRE DES SOLIDARITÉS, DE L'AUTONOMIE
ET DES PERSONNES HANDICAPÉES

(Mercredi 23 novembre 2022)

- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente -

Mme Catherine Deroche , présidente . - Mes chers collègues, nous entendons cet après-midi M. Jean Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2023.

J'indique que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo qui sera retransmise en direct sur le site du Sénat et disponible en vidéo à la demande.

Avec près de 30 milliards d'euros de crédits de paiement, la mission « Solidarité », est l'une des plus importantes du budget de l'État. Elle finance à titre principal deux dispositifs, l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et la prime d'activité, et comprend le programme support du ministère.

Monsieur le ministre, vous avez la parole.

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées . - Madame la présidente, madame la rapporteure générale, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, ce premier examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est pour moi un moment important. Je rappelle que je porte ces crédits avec la ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap, Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte, de la diversité et de l'égalité des chances, Isabelle Rome, et la secrétaire d'État à l'enfance, Charlotte Caubel.

C'est une mission porteuse de sens pour mon ministère, puisqu'elle finance des actions concrètes dans le domaine de la lutte contre la pauvreté, de la réduction des inégalités et de la protection des personnes vulnérables.

C'est un moment d'autant plus important que le contexte dans lequel se tient cette audition est particulier. La période est faite de nombreuses incertitudes, notamment liées à l'inflation, contre laquelle le Gouvernement a fortement agi, en particulier depuis cet été, pour protéger les ménages, les entreprises et les collectivités.

C'est aussi un moment de transition, notamment parce que nous sommes en fin de cycle concernant notre stratégie de lutte contre la pauvreté. Il faut désormais lui redonner une nouvelle dynamique. C'est également un moment de transformation profonde pour notre pays, qui se retrouve au pied du mur de la transition démographique. La question du vieillissement de la population est plus essentielle que jamais.

L'urgence est pour moi de soutenir les ménages les plus modestes et les personnes les plus vulnérables, avec la double nécessité de concilier les temps courts et les temps longs, d'anticiper, de prévoir et de nous adapter à tous les changements à venir.

Quelques chiffres clés à propos de cette mission... La hausse des crédits de la mission « Solidarité », pour 2023, est de 7,8 %, soit 2 milliards d'euros de crédits supplémentaires, particulièrement visibles sur le programme 304, « Inclusion sociale et protection des personnes ». À périmètre constant, ce programme augmente de 1,2 milliard d'euros. C'est une hausse importante, d'abord pour faire face à l'inflation avec, en année pleine, la revalorisation de 4 % des prestations sociales décidée cet été ; ensuite pour préparer l'avenir, avec notamment l'impact de la déconjugalisation de l'allocation adulte handicapé, décidée également cet été.

Cette même conciliation des temps courts et des temps longs, on la retrouve dans les crédits qui sont dédiés à la question de l'aide alimentaire, avec la création d'un fonds pour l'aide alimentaire durable doté de 60 millions d'euros inscrits dans la mission « Solidarité ». À court terme, l'idée est de lutter de façon puissante et efficace contre la précarité alimentaire. Dans notre pays, ce sont environ 7 à 8 millions de personnes qui sont concernées.

L'objectif à court terme est aussi d'améliorer la qualité de l'alimentation distribuée à l'ensemble des ménages précaires, dans un contexte compliqué du fait des difficultés d'approvisionnement et de la hausse des prix.

À plus long terme, notre objectif est qualitatif : il s'agit de varier l'alimentation qui est distribuée, de réduire son impact environnemental, tout en développant les liens avec les producteurs locaux, pour aller vers une alimentation plus locale et plus durable.

C'est l'objet du déplacement que nous avons réalisé avec la Première ministre il y a une quinzaine de jours pour annoncer la création de ce fonds de 60 millions d'euros, première étape dans la dynamique de modernisation et de transformation de l'aide alimentaire.

Nous avons visité, à Reims, les locaux des banques alimentaires, dont la dynamique est particulièrement efficace. On a retrouvé là de nombreux acteurs qui travaillent ensemble et se coordonnent au service de la solidarité sur ce territoire : entreprises, producteurs agricoles, industrie agroalimentaire, associations, élus locaux, collectivités.

L'autre élément important relatif à l'alimentation, c'est l'abondement de 7 millions d'euros supplémentaires pour continuer à développer la tarification dans les cantines pour des repas à un euro maximum. Ceci est indispensable, notamment parce que les enfants des familles modestes sont deux fois moins nombreux que ceux des familles aisées à pouvoir s'offrir un repas à la cantine. Compte tenu de l'impact de ces repas sur l'équilibre alimentaire des enfants, l'intérêt est de continuer à investir fortement contre les inégalités de destin et contre la pauvreté.

Un peu plus de trois ans après la mise en place de ce dispositif, plus d'une commune éligible sur huit y est engagée. Nous avons devant nous de forts potentiels de développement de cette mesure extrêmement importante. 10 millions de repas à un euro au moins sont servis chaque année dans les cantines scolaires. Il s'agit d'une mesure qui est plébiscitée, qu'on reprendra dans la suite de la stratégie de lutte contre la pauvreté.

Je voudrais également rappeler ici que la mission « Solidarité » porte un certain nombre de crédits pour prolonger les actions qui ont été soutenues dans le cadre de la stratégie des 1 000 premiers jours de l'enfant par Adrien Taquet. Boris Cyrulnik a développé cette théorie et mis en avant l'importance de ces trois premières années pour le développement des enfants. Nous allons donc continuer à investir dans cette dynamique extrêmement forte.

Il faut également souligner que des crédits en hausse de 9 % sont consacrés à la protection des adultes, notamment via le dispositif de protection juridique des majeurs. En France, 900 000 personnes bénéficient de cette protection juridique. Avec le vieillissement de la population, on devrait atteindre d'ici 2040 les 2 millions de personnes concernées. L'augmentation des crédits dans le budget 2023 traduit donc bien cette dynamique, qui vise aussi à renforcer l'attractivité des métiers dans les services mandataires en revalorisant les salaires, en renforçant le nombre de recrutements pour faire diminuer le nombre de mesures par salariés et en promouvant l'information et le soutien aux tuteurs familiaux.

Un mot enfin sur l'évolution des emplois du ministère. Il est indispensable de pouvoir disposer en nombre suffisant d'équipes formées aux enjeux et à la technicité des sujets que nous portons. Pour la troisième année consécutive, le schéma d'emploi est positif, avec une augmentation de 58 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au sein du ministère. Le plafond d'emplois intègre de manière pérenne les 50 emplois créés pendant la crise sanitaire, qui vont nous permettre de capitaliser, au sein des ministères sociaux, sur l'expertise acquise dans le cadre de la crise. Avec mon collègue François Braun, nous avons lancé une mission pour travailler à la création d'une direction de préparation et de réponse aux crises au sein des ministères sociaux.

À noter enfin - sujet auquel vous tenez particulièrement - l'inscription dans ces crédits des 120 équivalents temps plein (ETP) consacrés aux missions d'inspection contrôle au sein des agences régionales de santé (ARS), qui permettront de répondre à l'engagement pris par le Gouvernement de contrôler nos 7 500 EHPAD dans les deux ans à venir.

Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

M. Jean Sol , rapporteur pour avis sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » . - Mes questions ne porteront pas sur l'AAH, car j'ai eu l'occasion, la semaine dernière, d'échanger avec Mme la ministre chargée des personnes handicapées. Je laisserai mes collègues vous interroger à ce sujet s'ils le souhaitent.

Mes questions porteront plutôt sur le programme « Inclusion sociale et protection des personnes ».

Tout d'abord, l'exercice 2023 est présenté comme une année de transition de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, ce qui expliquerait la baisse de 23 % des crédits de cette action. Quelles seront les orientations du nouveau « pacte des solidarités » annoncé par le Gouvernement et les priorités de la nouvelle génération de conventions État-département ?

Deuxièmement, le dernier rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la Sécurité sociale consacre un chapitre aux prestations sociales versées sous conditions de ressources. Celui-ci fait état de nombreuses anomalies. Ainsi, un euro de RSA sur six et un euro de prime d'activité sur cinq seraient versés à tort à titre définitif. La Cour recommande d'engager un chantier de simplification et d'autoriser l'usage du dispositif de ressources mensuelles (DRM) pour les contrôles. Quels sont les leviers sur lesquels le Gouvernement entend agir pour améliorer le versement à bon droit de ces prestations ? Je rappelle que, dans le PLF pour 2023, 11 milliards d'euros sont inscrits au titre de la prime d'activité.

Troisièmement, les orientations présentées en janvier dernier par Fabrice Lenglart à notre commission, notamment la proposition de créer un revenu social de référence pour l'ensemble des prestations de solidarité, seront-elles poursuivies dans le cadre du projet de solidarité à la source du Gouvernement ? Quand le Parlement sera-t-il en mesure de disposer du rapport de M. Lenglart, que nous attendons depuis maintenant un an ?

Quatrièmement, le Gouvernement a lancé plusieurs expérimentations relatives au RSA, notamment une recentralisation du financement et de la gestion dans les départements volontaires, déjà déployée en Seine-Saint-Denis et dans les Pyrénées-Orientales ; une expérimentation de territoires « zéro non-recours » ou « 100 % accès aux droits » prévue par la loi 3DS, dont on attend le décret d'application, et une expérimentation du RSA sous condition d'activité, qui répond à un engagement de campagne du Président de la République. Pourriez-vous préciser comment s'articulent entre eux ces différents projets ? Quelles mesures concrètes recouvrent-ils ? Quelle sera la place des collectivités territoriales dans leur mise en oeuvre et quel pourrait être leur point d'atterrissage ?

Cinquièmement, s'agissant du dispositif d'accueil et d'orientation des mineurs non accompagnés (MNA), comment expliquez-vous que la contribution de l'État aux dépenses des départements passe de 93 à 90 millions d'euros, alors qu'il est prévu un retour progressif au volume d'arrivées de MNA constaté avant la crise sanitaire, ce que nous observons dans nos départements respectifs ?

M. Jean-Christophe Combe, ministre . - S'agissant de votre question sur la suite de la stratégie de lutte contre la pauvreté, on constate effectivement une baisse des crédits pour 2023, année de transition.

Tout d'abord, cette baisse concerne essentiellement le poste de la contractualisation avec les départements en matière d'insertion des personnes et les bénéficiaires du RSA. C'est en réalité un jeu d'écritures, l'objectif étant, pour cette année de transition, de finir la contractualisation sur la base de la stratégie précédente. Beaucoup de départements ont contractualisé de juin à juin, ce qui explique la diminution de 50 millions d'euros des crédits de la stratégie de lutte contre la pauvreté.

Environ 20 millions d'euros concernent la fin de l'expérimentation des petits déjeuners gratuits dans les écoles de métropole. Nous concentrons les crédits sur les territoires ultramarins, où cela fonctionne. Nous garderons ce système dans les métropoles qui le souhaitent, notamment en Île-de-France.

S'agissant de la baisse de 50 millions d'euros des crédits destinés à l'insertion des bénéficiaires du RSA, nous avons prévu 15 millions d'euros pour les départements impactés par une fin de contractualisation fin juin, afin de renforcer leurs moyens d'insertion et d'accompagnement à l'insertion.

Avec la Première ministre, nous avons réuni, il y a une dizaine de jours, les acteurs de la lutte contre la pauvreté et de la solidarité pour lancer une concertation afin de renouveler notre stratégie en la matière. L'objectif est de déboucher sur un nouveau pacte de solidarité regroupant l'État, les collectivités et les acteurs de la solidarité, notamment associatifs. Nous avons prévu de travailler essentiellement sur quatre axes et de reprendre les trois axes principaux de la stratégie précédente.

Le premier axe concerne la lutte contre la pauvreté par l'investissement social, en vue de lutter contre les inégalités de destin, de combattre la pauvreté à la racine et de prévenir la reproduction sociale. Notre politique en faveur des 1 000 premiers jours de l'enfant est également dédiée à l'accompagnement de l'enfance, que nous souhaitons reprendre.

Le deuxième axe est tourné vers la société du plein emploi et l'accompagnement renforcé des bénéficiaires du RSA. J'aurai l'occasion d'y revenir en répondant à vos questions.

Le troisième axe a été quelque peu délaissé dans la stratégie précédente, mais me tient particulièrement à coeur. C'est celui de la lutte contre la très grande pauvreté et la grande exclusion, réclamée notamment dans le rapport de France Stratégie qui m'a été remis cet été. Une bonne chose, si l'on veut vraiment faire reculer la pauvreté dans notre pays, est de s'attaquer à la très grande pauvreté, en remobilisant les personnes très éloignées du droit commun.

Enfin, le dernier axe consiste à faire de la transition écologique une transition solidaire. Je crois profondément qu'on peut faire de la transition écologique un vrai levier de la lutte contre la pauvreté en agissant sur les dépenses contraintes des ménages les plus modestes. Le Secours catholique m'a remis avant-hier son rapport sur la pauvreté en France. Il décrit très bien le phénomène. Nous allons donc travailler sur les dépenses contraintes que sont l'accès à l'alimentation, le logement, la précarité énergétique et la mobilité, qui pèsent pour environ 60 % sur le budget des ménages modestes, contre 20 à 30 % pour les autres ménages.

La question des prestations sous conditions de revenus est un autre sujet qui me tient à coeur, car il conditionne la confiance que l'on peut avoir dans notre système et la crédibilité de notre pacte social, à la fois en termes de lutte contre le non-recours et d'accès aux droits. Un certain nombre de nos concitoyens n'ont aujourd'hui pas le droit aux prestations auxquelles ils pourraient prétendre. En parallèle, pour lutter contre la fraude et les indus, qui représentent des sommes assez considérables, il faut arriver à sécuriser le système.

En matière de lutte contre le non-recours et l'accès au droit, des expérimentations ont été conduites en 2019 et 2020 par les services de l'État et la CAF, notamment pour mieux gérer les données. Le Data Mining a permis de proposer en 2019 à 60 000 allocataires potentiels une ouverture de droits et, en 2020, à 45 000 allocataires. C'est dans ce domaine que nous allons mettre en oeuvre, dès 2023, dans une dizaine de départements que nous n'avons pas encore choisis, ce qui a été ouvert par la loi 3DS en manière d'expérimentation sur les territoires zéro non-recours. Ce sont les départements qui vont être à la manoeuvre sur ces questions. L'idée est d'aller chercher des personnes en dehors du système, dont on ne connaît absolument pas la situation financière et qui sont très exclues. Je crois que nous avons prévu dans le budget 2 millions d'euros pour accompagner ces expérimentations.

Parallèlement, nous allons lancer le chantier de la solidarité à la source, qui vise à la fois à lutter contre le non-recours, la fraude et les indus, en sécurisant le système et en généralisant le dispositif de ressources mensuelles (DRM). Dès 2024, l'objectif est de pouvoir adresser aux potentiels bénéficiaires d'allocations des formulaires préremplis. On pourra corriger ces formulaires si la situation financière n'est pas exacte. Il appartiendra à la personne de demander son allocation. C'est pour cela que je lutte contre le terme d'« automatisation », qui laisse à penser qu'on ne demande pas leur avis aux personnes. Cela va permettre de sécuriser le système et de limiter le versement d'indus qu'on a du mal à récupérer - ou de fraudes concernant certaines prestations.

À terme, l'objectif est de pouvoir interconnecter l'ensemble des systèmes d'information. Il nous reste trois ans avant la fin de la mandature pour sécuriser complètement le système et travailler à une harmonisation des bases de ressources décrites par M. Lenglart, qui a dû vous en vous en parler. Il est en effet grand temps d'harmoniser l'ensemble du système de prestations sociales, de les simplifier et de mieux les piloter, afin de les sécuriser et de les rendre plus incitatifs à la reprise d'un emploi.

J'ai découvert le rapport Lenglart à mon arrivée au ministère. J'ai compris qu'il s'agissait d'un rapport d'administration qui n'avait pas vocation à être diffusé plus largement, en particulier parce qu'il fait un certain nombre de propositions qui n'ont pas été retenues par le Gouvernement, notamment le fait d'aller vers un revenu universel.

Le projet que nous portons dans le cadre de la solidarité à la source comporte un panier de prestations au départ plus restreint que celui proposé dans l'étude de M. Lenglart, et concerne le RSA, la prime d'activité et les bourses étudiantes. Nous nous interrogeons sur l'opportunité d'y connecter d'autres prestations. Ces trois prestations représentent 90 % des bénéficiaires et la très grande majorité des crédits consacrés à ces prestations sociales.

Les différentes expérimentations relatives au RSA sont toutes interconnectées. Elles ont pour objectif d'insérer les bénéficiaires du RSA dans l'emploi, dans une dynamique de société du plein emploi. Les départements concernés disposant de moyens supplémentaires pour accompagner les bénéficiaires du RSA, les territoires choisis pour les différentes expérimentations, notamment le RSA sous conditions d'activité, étant par définition tournés vers l'accompagnement des bénéficiaires. Il existe une très bonne articulation entre mon ministère et celui d'Olivier Dussopt, même si le ministère des solidarités a plutôt pour vocation de s'occuper des personnes très éloignées du système.

Nous travaillons sur le versement du RSA en fonction d'un certain nombre d'heures d'activité, dans une dynamique de renforcement de l'accompagnement des bénéficiaires. La moitié des bénéficiaires du RSA perçoivent cette aide depuis plus de cinq ans. Quelque chose ne fonctionne donc pas dans notre système. 20 % d'entre eux ne bénéficient d'aucun accompagnement. Nous avons un gros travail à réaliser dans ce domaine.

M. Jean Sol , rapporteur pour avis . - L'accent sera-t-il mis sur la durabilité en matière d'insertion par l'emploi et l'activité économique ?

M. Jean-Christophe Combe, ministre . - Il existe des crédits pour renforcer l'insertion par l'activité économique et l'insertion dans l'emploi des personnes qui en sont très éloignées. Je parlais tout à l'heure de remobilisation. Je pensais à des dispositifs comme « Convergence » ou « Premières heures », qui visent à faire la transition entre l'inactivité de personnes très éloignées du système, en particulier les sans-abri, pour les diriger vers des dispositifs d'insertion par l'activité économique et des formations.

Enfin, nous n'avons pas retrouvé le niveau d'avant-crise concernant les entrées de mineurs non accompagnés. L'aide forfaitaire de l'État s'élève à 500 euros par évaluation de la minorité, auxquels s'ajoute une aide de 90 euros par jeune et par nuit pour la mise à l'abri durant quatorze jours. Elle tombe ensuite à 20 euros les neuf jours suivants, soit 23 jours au total, afin d'inciter les départements à protéger et à accompagner les mineurs.

Au 31 décembre 2021 le nombre de MNA confiés aux départements s'élevait à 19 893 contre 31 009 au 31 décembre 2019, soit quasiment 30 % de moins. On ne prévoit pas une augmentation très rapide. Il faut savoir en outre qu'il existe quasiment un an de décalage entre les flux de personnes que les départements accueillent et le remboursement par l'État.

Je considère que le chiffre qui vous est présenté est sincère au regard des données qui sont les nôtres. En tout état de cause, le dispositif ne change pas. Il s'agit d'une projection de flux.

Mme Michelle Meunier . - Monsieur le ministre, je voudrais en premier lieu vous faire part de ma colère concernant le drame, à la fin de l'année dernière, du bébé retrouvé décédé au Mans, à la suite de graves défaillances du département de Loire-Atlantique et du département de la Sarthe. Ce bébé bénéficiait de mesures d'action éducative en milieu ouvert (AEMO) mal exécutées ou non exécutées. Il était passé plusieurs fois par les services d'urgences pédiatriques pour des fractures multiples du col du fémur.

Je sais que vous avez diligenté une inspection de l'IGAS et de la justice. Quel gâchis ! Trois grandes lois balisent le secteur de la protection de l'enfance : la loi de 2007, la loi de 2016 et la loi de 2022. Ce n'est pourtant pas faute d'avoir voté des mesures d'organisation, de vigilance, de structuration de la prise en charge dans les départements !

Je ne porte pas de jugement sur les professionnels, qui font ce qu'ils peuvent, aussi bien dans le secteur de l'aide sociale à l'enfance (ASE) que dans celui de la justice, mais il est inacceptable qu'un bébé meure encore aujourd'hui sous les coups de ses parents !

Ma question concerne les départements et la protection de l'enfance. On lit que 70 millions d'euros seront versés chaque année aux départements en faveur de l'accompagnement financier de l'obligation de prise en charge à 21 ans, qu'on a votée il y a peu de temps, ainsi que pour la prise en charge par l'État, à hauteur de 30 %, du coût de la revalorisation des personnels soignants exerçant dans les structures sociales et médico-sociales des départements.

J'ai posé la question la semaine dernière en défendant un amendement dans le cadre du PLFSS : peut-on penser que, dans ces 70 millions, figureront bien 20 millions d'euros environ pour compenser la revalorisation des médecins territoriaux, dont les médecins de la protection maternelle et infantile (PMI), sachant que la prise en charge des jeunes majeurs est évaluée à environ 50 millions d'euros ? Pouvez-vous être plus précis sur ce sujet ?

M. Laurent Burgoa . - Monsieur le ministre, je souhaite revenir sur la tarification à un euro du repas des cantines, ce qui est une excellente chose, puisque c'est parfois malheureusement le seul repas complet et équilibré que prennent certains jeunes. Vous savez qu'étant donné la flambée des prix, il existe actuellement un surcoût pour les communes, tant en régie qu'en délégation de service public (DSP). L'État envisage-t-il de prendre à sa charge, complètement ou partiellement, le surcoût du prix du repas ?

S'agissant des MNA, nous avions, avec plusieurs collègues, rédigé un rapport sur le sujet. Grâce à l'amabilité du rapporteur, Bernard Bonne, certaines propositions ont été reprises dans la loi sur la protection de l'enfance. Tous les départements devaient mettre en application le fichier d'appui à l'évaluation de la minorité (AEM) : appliquent-ils désormais la loi Taquet ?

Mme Monique Lubin . - Monsieur le ministre, vous connaissez le concept des résidences de répit partagé, qui proposent un accueil simultané à des personnes handicapées ou âgées et à leurs aidants, dans le cadre d'une formule hybride qui couple, sur un même site, un accompagnement médico-social spécialisé pour la personne aidée et un accueil hôtelier tourisme pour l'aidant.

Un certain nombre de projets voient le jour en France. Je suis sénatrice des Landes. Je sais que le président de mon département vous en a parlé lorsque vous êtes venu visiter le village Alzheimer. Seriez-vous prêt, dans le cadre de ce budget, à abonder une ligne pour que les départements puissent lancer ce type de projet ?

Mme Mélanie Vogel . - Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur le fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires ? Quel sera son mécanisme ? À qui sera-t-il réservé et quels seront les mécanismes de certification ou décisions destinés aux produits qui seront concernés par ce fonds ? L'objectif, si j'ai bien compris, est d'améliorer l'accès à une alimentation saine pour toutes et tous, ce qui aura un effet positif sur le climat, les inégalités sociales et la santé, donc sur les comptes de la Sécurité sociale.

Ma deuxième question concerne l'égalité professionnelle. Existe-t-il une réflexion au sein du Gouvernement sur l'index d'égalité professionnelle qui, aujourd'hui, a le défaut de considérer les inégalités entre les femmes et les hommes uniquement au sein de chaque entreprise, alors que cette inégalité se rencontre plutôt entre secteurs à prédominance féminine et à prédominance masculine ? On a vu pendant la Covid que les secteurs à prédominance féminine sont majoritairement les secteurs du soin, qui sont globalement sous-valorisés. Les femmes travaillant dans ces domaines sont sous-payées par rapport aux salariés des secteurs à prédominance masculine. Le Gouvernement mène-t-il une réflexion pour améliorer la comparaison entre les secteurs et mettre en place des mécanismes de correction pour les secteurs sous-valorisés ?

Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale . - Monsieur le ministre, je vous encourage à mener votre politique de lutte contre la pauvreté ainsi que le programme relatif aux 1 000 jours de l'enfant dans la durée. J'ai beaucoup apprécié ces deux lancements successifs, qui ne peuvent en effet se mesurer que sur le long terme.

Je rejoins ma collègue Mélanie Vogel à propos de la question de l'aide alimentaire. Je fais partie du réseau des banques alimentaires. J'ai récemment participé à l'assemblée générale d'une petite épicerie sociale, et je sais que les problématiques qui sont remontées à cette occasion sont les mêmes que dans tous les endroits où l'on fait de la distribution alimentaire.

Comment ces épiceries sociales peuvent-elles aujourd'hui obtenir des produits de première nécessité ? Autrefois, la banque alimentaire départementale fournissait le lait, les yaourts, la viande, le poisson. Aujourd'hui, chaque épicerie achète avec ses petits moyens, mais elles ont du mal à fournir des repas équilibrés.

L'idée d'un chèque alimentaire lancée lors du précédent mandat n'a finalement plus lieu d'être aujourd'hui, mais j'ai toujours pensé que l'aide aurait été plus bénéfique si elle avait été versée aux épiceries sociales ou aux associations, qui auraient pu se mettre en lien avec des producteurs locaux. Même les épiceries solidaires sont actuellement obligées de se tourner vers les discounters pour trouver des produits qui ne sont pas toujours d'une qualité exemplaire. Je ne devrais pas le dire, mais c'est pourtant le cas ! On a baissé en qualité faute de moyens. Des chèques aux associations locales auraient donc été plus judicieux, car les épiceries solidaires accompagnement aussi les bénéficiaires dans le choix des produits et la confection des repas. Cela a donc bien plus de sens d'aller vers une telle aide plutôt que vers une aide individuelle, apparemment difficile à mettre en place.

Un deuxième point m'est remonté durant cette assemblée générale. Il s'agit du problème des volontaires qui aident à la distribution et au ravitaillement. Avec la crise de la Covid, beaucoup de bénévoles ont cessé leur activité. Je pense qu'une campagne nationale est nécessaire, sous peine de se retrouver devant les plus grandes difficultés. Qui fera ce que ne feront plus les associations ? C'est un véritable appel au secours que je lance.

M. Bernard Bonne . - Monsieur le ministre, un point en particulier avait préoccupé la mission d'information sur le contrôle des EHPAD, c'est la question des 120 personnes supplémentaires dans les ARS. Cela représente un peu plus d'une personne par département. Or, s'il existe 7 500 établissements pour les personnes âgées, il y en a aussi beaucoup dans le reste du secteur médico-social. Nous avions privilégié un contrôle des groupes privés lucratifs qui n'ont pas été contrôlés - ou insuffisamment, car on a mis à jour beaucoup de problèmes. Nous pensons que contrôler 7 500 établissements est peut-être excessif, dans la mesure où on n'aurait pu traiter que les informations préoccupantes et les signes de maltraitance. Cela pouvait suffire dans un premier temps.

Nous avons reçu les syndicats des inspecteurs, des médecins et des pharmaciens qui nous ont dit qu'on assistait depuis plusieurs années à une diminution des moyens des inspections, et qu'on faisait surtout face à une demande du Gouvernement de ne pas privilégier ce type de contrôle. Qu'en est-il aujourd'hui ? Ces 120 personnes seront-elles exclusivement affectées à des contrôles ou, comme beaucoup d'autres, affectées à plusieurs missions ?

M. Jean-Christophe Combe, ministre . - Madame Meunier, vous m'avez posé des questions sur la compensation de la revalorisation salariale des personnels de la PMI. Les crédits sont bien inscrits et s'élèvent à 20 millions d'euros. Nous les avons d'ailleurs « sanctuarisés », dans le cadre des conclusions des premières réunions du comité des financeurs, avec les départements.

Je ne reviens pas sur la réponse que je vous avais faite. Certains départements ont choisi un mode de compensation différent des 183 euros que vous aviez proposés, souvent avec un régime indemnitaire supérieur à 183 euros. C'est pour cela que je ne m'étais pas positionné en faveur de votre amendement.

S'agissant de la question de la compensation des repas à un euro pour les collectivités, le dispositif s'applique aux communes de moins de 10 000 habitants, qui ont encore moins les moyens que les autres de pouvoir appliquer cette tarification sociale et sont les plus fortement impactées par l'inflation. On n'a pas prévu de crédit pour compenser l'inflation de ce point de vue. Il existe d'autres mesures pour accompagner les collectivités en difficulté, notamment en matière d'approvisionnement en énergie, avec l'extension du bouclier tarifaire pour les plus petites d'entre elles et le filet de sécurité, qui a été doté de plusieurs centaines de millions d'euros.

S'agissant des mineurs non accompagnés, je vous confirme qu'il existe bien un dispositif visant, en application de la loi du 7 février 2022, à ne pas verser tout ou partie de la compensation décrite pour les départements dans le cadre de l'évaluation de la minorité, de l'isolement et de la mise à l'abri de ces mineurs. On passe de 500 à 100 euros, cette somme correspondant à l'évaluation de l'état de santé. Quinze départements ne répondent pas encore à leurs obligations. Nous essayons d'être le plus incitatif possible.

Ce forfait de 100 euros n'est pas encore tout à fait en place. Le décret et l'arrêté fixant les nouvelles conditions ont reçu un avis favorable du Conseil d'État. Ces nouvelles conditions vont être examinées par le prochain bureau du Conseil national de la protection de l'enfance, le 17 novembre prochain. La mise en oeuvre se fera dans la foulée afin d'obliger les départements concernés à avoir recours au fichier.

S'agissant des maisons de répit partagé, des expérimentations issues de la loi d'adaptation de la société au vieillissement sont menées. Plusieurs opérateurs se chargent aujourd'hui de ces expérimentations, qui ont du mal à sortir. La Croix-Rouge était bénéficiaire de l'une d'entre elles en Bourgogne. Ce sont des projets extrêmement lourds, sur lesquels on a peu de recul. Les opérateurs ne sont pas forcément habitués aux activités à caractère hôtelier. Il y a, dans le PLFSS, des crédits qui peuvent bénéficier aux porteurs de projets de cette nature. Je suis favorable à la construction de dispositifs de cette nature en faveur des familles et des personnes accompagnées. Cela aurait pu d'ailleurs amener une dimension intéressante au village landais, mais j'ai cru comprendre que le projet de l'établissement pouvait évoluer dans cette direction.

Madame Vogel, s'agissant de la question de l'égalité professionnelle, des réflexions sont menées pour améliorer l'index et la comparaison entre les entreprises et les secteurs. Mon périmètre ministériel est fortement concerné par la très forte féminisation des métiers du lien, du soin et de l'accompagnement. Isabelle Rome cherche à améliorer les choses. Je trouve quoi qu'il en soit intéressante l'idée d'élargir le périmètre sur lequel mesurer et mettre en oeuvre cet index.

Pour ce qui est de la question du fonds d'aide alimentaire, l'idée est bien, à ce stade, de soutenir les grands réseaux nationaux - Banque alimentaire, Restos du Coeur, Secours populaire et Croix-Rouge - pour les aider à acheter plus de produits diversifiés, notamment des produits frais. Tous ces grands réseaux sont aujourd'hui « victimes » de la mise en oeuvre de la loi EGalim et bénéficient beaucoup moins de la ramasse de produits frais ou des invendus de la grande distribution. L'idée est donc de diversifier les approvisionnements au niveau national, de réserver une grande partie de ces crédits au niveau local et de favoriser des alliances locales, comme celle des banques alimentaires de la Marne, pour pouvoir créer entre les centres communaux d'action sociale (CCAS), les associations de solidarité, les producteurs locaux, l'industrie ou parfois la grande distribution des alliances permettant d'avoir recours à des produits de meilleure qualité, diversifiés et en circuit court, pour répondre ainsi à l'ensemble des objectifs en termes de santé, de protection de l'environnement et de lutte contre les inégalités.

La ventilation de ces crédits n'a pas encore été décidée. Nous allons travailler avec les collectivités et les acteurs de la solidarité. Nous ne perdons pas de vue la question du chèque alimentaire même si, pour moi, la priorité, à travers ce fonds, était de répondre à ce qui était ressorti de la Convention citoyenne sur le climat en favorisant les alliances locales afin de disposer de produits en circuit court et de meilleure qualité.

Le chèque alimentaire existe déjà. On peut le développer le cas échéant, si des CCAS ou d'autres structures locales souhaitent en bénéficier davantage. Ces acteurs utilisent déjà des chèques d'accompagnement personnalisés ou autres. Beaucoup ont été développés pendant la crise sanitaire. L'idée n'est toutefois pas de l'étendre.

Enfin, pour répondre à Bernard Bonne au sujet du contrôle, les 120 ETP sont bien uniquement dédiés aux inspections de contrôle. Je rappelle que dans les ARS, 500 personnes sur 2 700 sont mobilisées sur des missions d'inspection et de contrôle. L'idée n'est pas d'avoir le même niveau de contrôle pour tous les établissements. La « granularité » s'opère en fonction des faisceaux d'indices et au fur et à mesure de ce qu'ils trouvent dans chaque établissement. On l'a introduite cette année. À partir du 1 er janvier 2023, on pourra étendre les contrôles à l'ensemble des sièges et des groupes commerciaux, privés ou autres, notamment non lucratifs, peu contrôlés jusqu'alors.

Mme Annie Le Houerou . - Ma première question porte sur la lutte contre la prostitution et sur le montant de l'aide financière à l'insertion sociale (AFIS), qui me paraît déraisonnablement bas et ne permet pas, par exemple, de se loger. Je regrette qu'on ne retrouve rien dans le PLF à ce sujet.

Ma deuxième question porte sur la protection juridique des majeurs. Vous avez dit que 900 000 personnes étaient concernées et que 2 millions de personnes le seraient à terme. L'interfédération de la protection juridique des majeurs évalue le besoin en personnel à 2 000 professionnels. Le budget, cette année, en prévoit 200. Cela me paraît marginal par rapport aux besoins. L'interfédération nous signale par ailleurs qu'un certain nombre de personnels, notamment les moins bien payés, sont exclus du Ségur, ce qui crée dans les équipes de très grosses difficultés.

Par ailleurs, ne faudrait-il pas prévoir un pilotage national interministériel ? Certaines mesures relèvent du ministère de la justice et d'autres de votre responsabilité. Compte tenu de l'importance de ces métiers pour la cohésion sociale, il ne serait pas aberrant de pouvoir compter sur un délégué interministériel pour prendre en charge et coordonner l'ensemble des actions.

Ma dernière question concerne l'hébergement d'urgence. De plus en plus de personnes à la rue, de femmes et d'enfants sont accueillis pour des durées de plus en plus longues, avec de plus en plus de nuitées d'hôtel, qui coûtent très cher et ne constituent pas des conditions acceptables. Ne serait-il pas plus opportun de financer des associations qui recourent à des hébergements accompagnés ?

M. Philippe Mouiller . - Monsieur le ministre, s'agissant de la déconjugalisation de l'AAH, je rappelle que, juridiquement, il est possible d'anticiper sa prise d'effet avant octobre 2023. Les crédits alloués intègrent-ils cette potentielle anticipation ? Dans le cas contraire, cela signifie que vous avez définitivement acté son entrée en vigueur au 1 er octobre 2023.

Par ailleurs, les moyens alloués aux structures d'insertion, en dehors des expérimentations, demeurent au même niveau. Si l'on tient compte de l'inflation, on peut même considérer qu'il s'agit d'un recul. Où est la cohérence, alors qu'on met plus de moyens pour accompagner les titulaires du RSA et qu'on maintient au même niveau le budget des structures d'insertion, en dehors des expérimentations ?

Enfin, concernant le revenu universel d'activité (RUA), pouvons-nous conclure de vos propos que vous clôturez définitivement ce sujet ?

Mme Victoire Jasmin . - Monsieur le ministre, il existe un vrai sujet concernant les accueils téléphoniques et physiques dans certains services des caisses d'allocations familiales (CAF). Depuis la pandémie, le télétravail s'est imposé dans bien des domaines. Or, s'il existe un domaine où le télétravail n'est pas pertinent, c'est bien dans le secteur des CAF, des maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH), de la sécurité sociale et dans les services départementaux de façon générale. Certaines personnes sont touchées par l'illectronisme et ne peuvent avoir de réponse au téléphone. En outre, les personnes qui ne maîtrisent pas l'outil informatique ont parfois recours à des associations qui ne sont pas forcément habilitées à gérer leurs données personnelles. Certaines personnes qui ne font pas partie de la famille détiennent aujourd'hui des coordonnées bancaires, alors qu'elles ne le devraient pas.

C'est un vrai problème. Il faudrait aménager les postes de travail, mais aussi demander une présence physique pour accompagner les personnes. Je ne remets pas en cause le télétravail, mais ces situations doivent être prises en compte.

Mme Laurence Cohen . - Monsieur le ministre, le Secours catholique explique que, pour les personnes en situation de précarité, la priorité est l'éducation, l'alimentation venant en dernier, d'où l'importance du travail d'information et d'éducation qu'il faut mener.

Ma deuxième remarque concerne la baisse de 23 % des crédits de l'action de stratégie et de prévention de lutte contre la pauvreté des jeunes et des enfants. J'ai compris que cette baisse était due au fait que l'année 2023 allait être consacrée à une évaluation. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus, compte tenu des chiffres, qui sont extrêmement alarmants. L'Insee indique que, dans notre pays, près de 3 millions d'enfants vivent sous le seuil de pauvreté. Quelles conséquences peut avoir cette année de transition, et quelles actions avez-vous mises en place en parallèle ?

En ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes, la Fédération nationale solidarité femmes s'étant mobilisée, 2,9 millions d'euros supplémentaires ont été alloués à la gestion du numéro d'urgence 3919. L'égalité entre les femmes et les hommes a beau être grande cause nationale, il est inquiétant de constater qu'il a fallu faire pression pour obtenir un budget supplémentaire.

Enfin, je me réjouis de la déconjugalisation de l'AAH, qui va effectivement dans le sens de la mobilisation de nombre d'entre nous, notamment au niveau de mon groupe.

Mme Annick Jacquemet . - Monsieur le ministre, vous avez dit dans votre propos liminaire que l'accompagnement était destiné à amener les titulaires du RSA vers l'emploi. C'est un souhait que nous partageons tous.

J'ai été surprise, en prenant mes fonctions de première vice-présidente du conseil départemental du Doubs en charge des solidarités, de voir le faible pourcentage de contrats d'engagement réciproque (CER) qui ont été signés. Quel est votre avis à ce sujet ? Il me semble important que les bénéficiaires du RSA s'engagent dans un parcours, que ce soit lors de l'accompagnement social ou pour ceux qui sont capables de retrouver un emploi.

Avez-vous les chiffres au niveau national du pourcentage de ces CER ? On sent un frein aussi bien du côté des bénéficiaires que du côté des travailleurs sociaux. Ne faudrait-il pas, au moment de la formation des travailleurs sociaux, insister davantage sur l'importance de ces contrats ?

Mme Pascale Gruny . - Monsieur le ministre, mon département est parmi les dix plus pauvres de France et le premier en matière d'illettrisme et d'illectronisme. Nous comptons énormément de bénéficiaires du RSA et de personnes très éloignées de l'emploi. Nous aurions voulu faire partie de l'expérimentation de recentralisation du RSA, mais ce n'est pas possible compte tenu des sommes que l'on doit donner à l'État au titre de la compensation.

Je fais donc appel à votre bienveillance, car chaque nouvelle mesure est souvent accompagnée d'un cofinancement. Toutefois, quand on n'a pas les moyens d'assurer correctement le budget, on passe bien souvent à côté d'opérations qui peuvent éventuellement aider les personnes à sortir de la précarité. Je rappelle que les départements ont la charge de la solidarité. Or le président du conseil départemental de l'Aisne réclame toujours la péréquation. Pouvez-vous vous en faire l'écho auprès de vos collègues, sans quoi nous n'avancerons pas ?

Une de mes collègues s'interroge par ailleurs sur l'index d'égalité entre les hommes et les femmes. L'Inspection générale des affaires sociales l'a présenté comme une usine à gaz. Ne peut-on simplifier cet indice pour les entreprises ?

M. Xavier Iacovelli . - Monsieur le ministre, vous avez indiqué que les grands réseaux nationaux figurent parmi les nombreux acteurs pouvant bénéficier de l'augmentation des crédits en matière d'aide alimentaire. Or les CCAS sont aussi des acteurs locaux qui permettent la redistribution et le soutien aux plus précaires d'entre nous. 50 % des bénéficiaires perçoivent l'aide alimentaire depuis moins de deux ans. Le lien avec les CCAS et les collectivités est donc à mon sens important. Comment ces crédits vont-ils être fléchés ? Pouvez-vous les détailler ?

Mme Jocelyne Guidez . - Monsieur le ministre, lors de la campagne présidentielle, le candidat Emmanuel Macron s'était engagé à créer des fonds territoriaux d'accessibilité afin de rendre la France accessible. Or cet engagement de campagne ne figure pas dans le présent projet de loi de finances. Ce sujet n'a même pas été abordé lors du comité interministériel du handicap du 6 octobre 2022. Quelle est votre position sur ce sujet ?

Enfin, le logement est un frein pour les personnes en perte d'autonomie. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait accorder des moyens supplémentaires à l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour mettre en oeuvre une politique d'adaptation des logements via le dispositif « Habiter facile » ?

M. Jean-Christophe Combe, ministre . - J'ai bien noté vos commentaires sur la question de la lutte contre la prostitution. Cette lutte bénéficie d'un certain nombre de crédits, avec 200 000 euros en faveur de l'AFIS.

Les crédits du programme 137 s'appuient par ailleurs sur le fonds de concours de l'Agence de gestion de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), dont on ne connaît malheureusement le montant qu'en cours d'exercice. Un certain nombre de crédits sont affectés à la lutte contre la prostitution des mineurs, qui concerne entre 7 000 et 10 000 enfants dans notre pays. Le plan interministériel a été publié le 15 novembre dernier. En 2022, il comporte treize actions pour environ 14 millions d'euros.

S'agissant de la protection juridique des majeurs, on enregistre une augmentation exceptionnelle de 9 % des crédits. L'Inter-fédération demande 200 000 postes. Nous en avons inscrit 200 dans le dans le budget. C'est un début. Ces crédits sont aussi consacrés à la revalorisation des salaires. Nous allons affiner les choses avec eux.

Je connais bien la question des personnels exclus du Ségur. Aujourd'hui, mon souhait est d'aborder la question de façon plus large et transversale, afin de pouvoir engager de vraies négociations salariales au niveau des branches, des entreprises ou des opérateurs et que tout le monde puisse être concerné par ces revalorisations, qui ne traitent plus que des iniquités dues à la mise en oeuvre du Ségur et des questions de baisse de pouvoir d'achat liées à l'inflation. On sait que toutes les organisations sont confrontées à cette question des salaires.

S'agissant de l'hébergement d'urgence, on ne peut se satisfaire des nuitées hôtelières. Je rappelle que nous avons maintenu les crédits en 2023 pour l'hébergement d'urgence. 200 000 places ont été conservées cette année. Notre objectif, dans la dynamique du plan « Logement d'abord », est de trouver des solutions plus qualitatives que les nuitées hôtelières ou même l'hébergement d'urgence en général. On ne peut se satisfaire de cette situation.

Monsieur Mouiller, je vous confirme que les hypothèses budgétaires que nous avons faites concernant l'AAH ne retarderont pas le projet de déconjugalisation. Si on arrive, comme je l'espère, à mettre en oeuvre cette mesure plus tôt que prévu, nous aménagerons le budget en conséquence et abonderons les crédits nécessaires. Je rappelle que 560 millions d'euros seront consacrés à la déconjugalisation de l'AAH en 2023.

Le RUA ne figure pas dans ma feuille de route. Le Gouvernement a choisi une autre option que le revenu universel d'activité. C'est pour cela que nous n'avons pas repris les recommandations de M. Lenglart, qui avait travaillé sur cette question. La priorité est le projet de solidarité à la source. Un système de prestations sociales qui compense certaines situations est plus sain. Cela permet de savoir à quoi servent ces prestations et quelles fragilités celles-ci viennent compenser.

Nous sommes dans une année de transition. Tous ces crédits vont être refondus dans le cadre de France Travail. Avec Olivier Dussopt, nous nous sommes battus pour que les crédits soient sanctuarisés pour 2023. On aura donc normalement le même accompagnement et les mêmes prestations qu'en 2022.

S'agissant de la digitalisation et de la modernisation des CAF et des MDPH, nous sommes tout à fait d'accord sur le fait qu'il faut aller vers un renforcement de l'accompagnement humain, qui est extrêmement important. L'objectif des maisons France services est de pouvoir avoir des points sur l'ensemble du territoire permettant un accès et un accompagnement des personnes très éloignées des services publics, notamment en matière d'inclusion numérique. J'ai vu que des ateliers étaient organisés par Emmaüs Connect, avec l'aide de collectivités rurales à ce sujet.

Mon objectif, au travers de la modernisation du système de prestations sociales, est de sanctuariser voire d'augmenter les moyens humains, tout en renforçant l'efficience de ce travail. Il convient de faire en sorte que la digitalisation et l'automatisation d'un certain nombre de process en matière de versement ou de calcul des prestations sociales permettent de consacrer du temps à l'accompagnement humain à travers tout le territoire.

C'est ce que demandent de fait les agents de la CAF, qui ne sont guère heureux de consacrer leur temps à des tâches administratives et informatiques. Ce n'est pas pour cela qu'ils se sont engagés dans ces métiers.

Madame la sénatrice Cohen, s'agissant de l'alimentation, la démarche du Secours catholique est très intéressante en ce qu'elle donne la parole aux personnes directement concernées. Je pense qu'en termes de dignité et de pertinence, leurs propositions sont très intéressantes. Le Conseil national de la lutte contre les exclusions a aussi permis à des personnes accompagnées de prendre la parole et de maîtriser davantage l'élaboration et les propositions des politiques publiques qui les concernent directement.

J'ai aussi été frappé par le témoignage de cette dame qui expliquait que son but était que ses enfants vivent une meilleure vie que la sienne et qui investissait tout ce qu'elle pouvait dans leur éducation, les postes consacrés à l'alimentation étant ceux sur lesquels elle rognait le plus. C'est pourquoi notre investissement en la matière est important.

Le bénévolat est également un vrai sujet, porté notamment par Marlène Schiappa, qui travaille sur la reconnaissance de l'engagement bénévole. Cela fait partie des moteurs de cet engagement, avec la valorisation des acquis de l'expérience, notamment pour les jeunes. C'est un sujet dont je traite aussi beaucoup dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) « Bien vieillir ». La mise en avant de la société du bien vieillir est aussi une formidable opportunité de valoriser l'engagement des seniors. La moitié de nos bénévoles ont aujourd'hui plus de 60 ans. Il est important de les accompagner, car ils sont précieux pour notre cohésion sociale et pour l'exercice de missions d'intérêt général.

La semaine prochaine et la suivante, les Restos du Coeur lancent leur campagne annuelle. Les banques alimentaires sont à la recherche de bénévoles pour les aider dans le cadre de la collecte annuelle dans les supermarchés.

S'agissant des prestations sociales, je rappelle que nous avons augmenté cet été l'ensemble des prestations de 4 %. La plupart avaient déjà connu une première augmentation en début d'année, car elles bénéficient d'une indexation automatique sur l'inflation. Nous avons donc déjà fait un effort extrêmement important de revalorisation.

Nous avons concentré un certain nombre de mesures, notamment dans le cadre du PLFSS, sur les familles monoparentales, qui sont les plus fragiles. Je rappelle que 30 % d'entre elles vivent sous le seuil de pauvreté. La réforme du complément de mode de garde, l'extension aux enfants de 6 à 12 ans, la revalorisation de 50 % de l'allocation de soutien familial sont autant de mesures qui vont permettent d'aider ces familles et de faire reculer la pauvreté. J'ai par ailleurs bien noté vos autres remarques.

Madame Jacquemet, je ne connais pas le chiffre du contrat d'engagement réciproque, mais on peut considérer que nous n'allons aujourd'hui pas suffisamment loin. C'est pour cela que nous voulons réformer l'accompagnement des bénéficiaires du RSA. On se rend compte qu'un certain nombre d'entre eux, soit du fait de la culture qui est installée chez nos travailleurs sociaux, soit parce qu'on ne les incite pas suffisamment, ne s'engagent pas réellement dans le parcours d'insertion. C'est tout l'objectif des expérimentations que nous conduisons, d'où l'obligation d'activité et le renforcement des moyens en matière d'accompagnement à l'insertion. C'est toute la logique de France Travail dans laquelle nous sommes engagés.

J'ai bien noté vos questions sur les moyens des départements et la notion de péréquation dont est en charge mon collègue Christophe Béchu.

Malgré le cofinancement à 50-50 demandé aux départements et aux métropoles en matière de stratégie de lutte contre la pauvreté, l'ensemble des départements a aujourd'hui contractualisé. Nous allons rediscuter avec les départements. Je suis dans une dynamique de coconstruction avec les collectivités. Nous avons abandonné la contractualisation régionale, qui n'était pas forcément un échelon très pertinent en matière de lutte contre la pauvreté. En revanche, le département et la métropole sont des échelons extrêmement appropriés.

J'ai répondu à Mme Vogel concernant l'index de l'égalité entre les femmes et les hommes. Une réflexion est engagée sur l'élargissement de cet indice.

Monsieur Iacovelli, j'ai partiellement répondu tout à l'heure à la question du fléchage des crédits du fonds d'aide alimentaire durable annoncé par la Première ministre, avec une ventilation entre le soutien aux acteurs nationaux pour l'achat de denrées alimentaires, notamment de produits frais plus variés et de qualité. Une grande partie de ces crédits est concentrée sur les acteurs locaux et favorise des alliances locales entre CCAS, centres intercommunaux d'action sociale (CIAS), associations, producteurs, distributeurs, etc . Il s'agit de favoriser les circuits courts, l'alimentation saine et durable, et de protéger aussi l'environnement.

Rien n'a été décidé en matière de ventilation. Nous allons le faire en concertation avec les représentants des collectivités, l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (UNCCAS), les départements et les associations de solidarité. Je crois profondément dans l'intérêt de favoriser ce niveau local.

Mme Guidez, l'accessibilité a bien fait l'objet d'annonces spécifiques. Un délégué interministériel va être nommé pour piloter ces questions. On a vu que la loi ne suffit pas. On arrive au bout des premiers agendas, et il reste beaucoup de chemin à parcourir. Nous allons planifier beaucoup les choses de manière plus cadrée. La Première ministre a rappelé tout son engagement et celui de l'ensemble du Gouvernement en matière d'accessibilité universelle. Chacun des ministres a pris des engagements sur cette question. Ils seront réitérés dans le cadre de la conférence nationale du handicap, au premier trimestre 2023.

Je suis d'accord avec vous à propos de la question du logement. Je pense qu'il faut qu'on investisse beaucoup plus dans ce domaine. C'est d'ailleurs un sujet qui n'était pas dans le CNR initialement. À l'issue de la première réunion autour du Président de la République, le 8 septembre, la question du logement est ressortie comme un point majeur, comme celle de la lutte contre les inégalités. Nous avons vraiment besoin d'un plan Marshall.

Il existe en outre derrière tout cela un enjeu de transition écologique. Il nous faut donc accompagner la transformation des logements de façon plus importante. Il existe aussi une question d'adaptation du logement liée au vieillissement et à la perte d'autonomie. Il nous faut là aussi accélérer les choses. J'espère que les conclusions du CNR nous donneront la dynamique nécessaire pour y parvenir.

- Présidence de M. Philippe Mouiller, vice-président -

M. René-Paul Savary . - La reprise par l'État du RSA serait logique. Pourquoi cela ne se fait-il pas ? Rien n'a vraiment évolué par rapport aux discussions qu'on a pu avoir antérieurement, qui n'ont pas abouti parce qu'on n'était pas d'accord sur la date de reprise par rapport au nombre de bénéficiaires de RSA.

Dans mon département, lors de la mise en place de la loi par Martin Hirsch, le RSA représentait 42 millions d'euros de recettes transférées. Il coûte maintenant 94 millions d'euros. Si on demande que l'État reprenne le RSA, celui-ci calcule la différence entre 94 et 42. Cela signifie que le département est appauvri à vie, à un moment où le nombre de bénéficiaires du RSA est encore très élevé. C'est pourquoi les départements ne s'engagent pas dans cette voie. Il faudrait trouver une hypothèse de reprise compréhensible pour les départements. On ne peut les pénaliser ainsi ! Il est possible de les associer au retour à l'activité, mais pas dans les conditions actuelles. C'est à mon avis inacceptable.

Les départements savent traiter de l'insertion. Or leur budget étant complètement asséché par la rémunération des bénéficiaires, ils n'ont plus de crédits d'insertion. On tourne donc en rond. On ne rend pas service aux gens, et il faut vraiment trouver une solution.

Par ailleurs, je pense qu'il faut, par rapport à l'activité, introduire des modifications législatives. Un certain nombre de départements ont essayé de conditionner l'attribution du RSA à des activités. On s'est vite heurté au fait que le dispositif n'était pas entièrement bordé sur le plan législatif.

Le point mérite d'être creusé. Ce ne sont pas forcément des modifications importantes, mais elles permettraient que le RSA reprenne son titre. C'est un revenu de solidarité active : cela nécessite une activité ! Cela justifie la reprise sur le plan national et l'avancée par rapport à une contrepartie en termes d'activité.

M. Jean-Christophe Combe, ministre . - Les expérimentations de recentralisation sont relativement récentes. M. Sol citait son département : la recentralisation remonte à 2022. Il nous faut avoir un peu de recul, mais les premières projections montrent que c'est plutôt favorable pour les départements.

Toutefois, il ne faudra pas mettre les départements en difficulté et rendre le dispositif plus incitatif, car il est loin de faire l'unanimité, pas seulement pour des questions financières, mais aussi des questions plus politiques. J'ai rencontré des avis très tranchés et très différents. Il faut donc faire très attention.

Vous avez raison concernant la question du conditionnement du versement du RSA à l'activité. À droit constant, ce n'est pas possible. Il y a donc a minima des mesures législatives voire constitutionnelles à prendre.

C'est pourquoi nous sommes prudents dans l'approche et le langage, vous l'aurez compris.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat .

II. EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 23 novembre 2022, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport pour avis de M. Jean Sol sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2023.

Mme Catherine Deroche , présidente. - Nous examinons à présent les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

M. Jean Sol , rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». - Les crédits de paiement de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élèveront à 29,9 milliards d'euros en 2023, soit une hausse de 8,3 % par rapport à l'année 2022.

Deux prestations représentent 78 % des crédits de la mission : la prime d'activité et l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Depuis 2017, les crédits de la mission auront augmenté de 68 % sous l'effet notamment des revalorisations de ces prestations.

Le dynamisme des crédits est principalement porté par la revalorisation anticipée de 4 %, à compter du 1 er juillet 2022, de diverses prestations sociales dont la prime d'activité, l'AAH et le revenu de solidarité active (RSA) prévue par la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat. L'impact de cette mesure sur le budget de la mission avoisinerait 900 millions d'euros en 2023.

En 2022, une fois de plus, la mission a été mise à contribution pour gérer l'urgence sociale et les crédits ont à nouveau fortement varié en cours d'exercice. Afin de préserver le pouvoir d'achat des Français face à la hausse des prix, la loi de finances rectificative du 16 août 2022 a prévu une ouverture de crédits à hauteur de 1,2 milliard d'euros, pour financer une prime exceptionnelle de rentrée à destination des bénéficiaires des minima sociaux et de la prime d'activité. Par ailleurs, 55 millions d'euros ont été prévus pour apporter un soutien exceptionnel en faveur de l'aide alimentaire. De leur côté, les associations de solidarité, qui sont également fragilisées par la hausse des prix, notamment par celle du coût de l'énergie, n'ont pas bénéficié d'une compensation spécifique, en dépit de leur rôle essentiel en matière de cohésion sociale.

L'évolution du programme 157, « Handicap et dépendance », témoigne d'un virage en faveur de l'autonomie des personnes handicapées.

La loi du 16 août 2022 précitée a prévu la déconjugalisation de l'AAH à compter du 1 er octobre 2023 au plus tard. Le coût budgétaire de cette mesure serait de 93 millions d'euros en 2023, puis de 560 millions d'euros en année pleine. La suppression de la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH, longtemps soutenue par le Sénat contre l'avis du Gouvernement, se substituera donc en 2023 au dispositif d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint introduit par la loi de finances pour 2022. Cette mesure s'accompagne d'un maintien du calcul actuel de la prestation pour les bénéficiaires en couple qui seraient perdants, afin de ne pas les pénaliser : concrètement, la déconjugalisation sera automatique, et irréversible, dès lors qu'elle sera plus favorable au bénéficiaire, sur la base des calculs qui seront effectués régulièrement par les caisses d'allocations familiales (CAF).

Il semble peu probable que la mise en oeuvre de la déconjugalisation, qui nécessite des développements informatiques importants, intervienne avant la date butoir du 1 er octobre 2023, même si le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, n'a pas fermé la porte à une entrée en vigueur anticipée lors de son audition.

Il convient de remarquer que cette mesure n'a pas été étendue à Mayotte, qui dispose d'un régime spécifique en matière de protection sociale. J'ai attiré l'attention de la ministre Geneviève Darrieussecq à ce sujet lors de son audition.

L'AAH a par ailleurs bénéficié de la revalorisation anticipée de 4 % au 1 er juillet 2022, portant son montant à 956,65 euros. Le nombre de bénéficiaires atteindrait 1,26 million en 2022. Pour 2023, 12,5 milliards d'euros sont ainsi demandés au titre de cette allocation. Au total, malgré les mesures d'économies intervenues au cours du quinquennat précédent, les crédits dédiés à l'allocation auront progressé de 38 % entre la loi de finances pour 2017 et le PLF pour 2023.

D'autres évolutions de l'AAH seraient à envisager, afin d'améliorer les conditions de son cumul avec des revenus d'activité, notamment en milieu ordinaire. Ces conditions peuvent contribuer à décourager des personnes qui connaissent, par définition, des difficultés d'insertion ou de maintien dans l'emploi.

Le programme « Handicap et dépendance » contribue également à soutenir les établissements et services d'aide par le travail (Ésat) à hauteur de 1,5 milliard d'euros en 2023. L'impact de la hausse du Smic conduit en effet à une hausse de 87 millions d'euros des crédits de l'aide au poste au titre de la garantie de ressources des travailleurs handicapés (GRTH).

L'année prochaine doit voir la réalisation des principales mesures du plan de transformation de l'offre d'Ésat annoncé lors du comité interministériel du handicap du 5 juillet 2021, notamment la possibilité, pour une personne handicapée orientée en Ésat, de partager son temps de travail entre le milieu protégé et le milieu ordinaire de travail, ainsi que la mise en place, pour les personnes sortant d'Ésat vers le marché du travail, d'un parcours renforcé en emploi leur permettant de bénéficier d'un accompagnement médico-social et professionnel.

En revanche, les crédits du Fonds d'accompagnement de la transformation des Ésat (Fatésat), doté de 15 millions d'euros en 2022 dans le cadre de la mission « Plan de relance », ne sont pas reconduits en 2023.

Quant au dispositif d'emploi accompagné, dont les résultats sont encourageants, il poursuit une croissance progressive : 6 500 personnes étaient accompagnées à la mi-2022, contre 3 700 fin 2020, l'objectif étant d'atteindre 10 000 personnes accompagnées fin 2023.

Dans cette perspective, l'enveloppe supplémentaire de 7,5 millions d'euros, inscrite au titre du plan de relance en 2021 et 2022, est pérennisée dans le programme « Handicap et dépendance » en 2023. Le total des crédits dédiés à l'emploi accompagné se maintient ainsi à 22,4 millions d'euros.

Au sein du programme 304, «  Inclusion sociale et protection des personnes », doté de 14,5 milliards d'euros au total, les crédits inscrits au titre de la prime d'activité s'élèveront en 2023 à 10,9 milliards d'euros, soit une hausse de 11 % : la revalorisation anticipée de 4 % des barèmes de la prestation y contribue pour une large part. L'effectif des bénéficiaires reste stable et atteindrait 4,54 millions de foyers en moyenne en 2023.

Le versement de la prime d'activité pourrait connaître une forme d'automatisation dans le cadre de la « solidarité à la source » promise par le Président de la République. En tout état de cause, une amélioration du versement à bon droit de la prestation semble nécessaire : le dernier rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, qui consacre un chapitre aux prestations sociales versées sous conditions de ressources, fait état de nombreuses anomalies et recommande d'engager un chantier de simplification. Selon la Cour, 1 euro de prime d'activité sur 5, soit plus de 2 milliards d'euros au total, serait versé à tort à titre définitif.

Dans la perspective des réformes des prestations de solidarité qui s'annoncent, on peut regretter que le rapport de Fabrice Lenglart sur le revenu universel d'activité, dont il a présenté certaines des conclusions devant notre commission en janvier dernier, ne soit pas rendu public.

La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté arrivant en fin de cycle, les crédits consacrés à cette action au sein du programme 304 diminuent de 327,6 millions à 252 millions d'euros entre 2022 et 2023. Ce plan entre en effet dans une année de transition, au cours de laquelle les conventions État-département seront renouvelées.

Un nouveau pacte de solidarité prendrait la suite de la stratégie 2018-2022, en structurant la politique de lutte contre la pauvreté autour de quatre priorités stratégiques : la non-reproduction de la pauvreté, l'insertion par l'emploi - un axe qui s'inscrit dans le chantier France
Travail -, la lutte contre la grande marginalité et la transition écologique et solidaire.

Le Gouvernement a lancé plusieurs expérimentations relatives au RSA : une recentralisation du financement et de la gestion du RSA dans les départements volontaires, déjà déployée en Seine-Saint-Denis et dans les Pyrénées-Orientales et qui devrait être étendue en 2023 à l'Ariège ; une expérimentation de « territoires zéro non-recours », prévue par la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS ) et dont on attend le décret d'application ; et l'expérimentation d'un RSA sous conditions d'activité, qui répond à un engagement de campagne du Président de la République. Ces différents projets, dont l'articulation ne se dessine pas encore avec évidence, ont vocation à converger vers France Travail.

Au total, les crédits dédiés au RSA recentralisé, y compris ceux qui sont dédiés à la reprise pérenne par l'État du financement du RSA dans trois collectivités d'outre-mer, passeront en 2023 de 1,42 milliard à 1,56 milliard d'euros, sous l'effet notamment de la revalorisation de 4 %.

En matière d'aide alimentaire, un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires doté de 60 millions d'euros, comprenant un volet national et un volet territorial, sera créé en 2023 pour « verdir » l'aide alimentaire, portant à 117 millions d'euros le total des crédits consacrés à cette action.

Si les réseaux de l'aide alimentaire considèrent que la création de ce fonds va dans le bon sens, ils restent en attente de précisions sur le calendrier de sa mise en place et ses modalités de fonctionnement.

Les associations sont cependant frappées par un redoutable effet de ciseaux dans le contexte actuel de crise inflationniste et de tensions sur les marchés alimentaires. Déjà très sollicitées pendant la crise sanitaire, elles doivent à nouveau faire face à un afflux de demandeurs. Parallèlement, la pression sur les approvisionnements devient une préoccupation majeure, et le soutien exceptionnel d'urgence apporté en 2022 pourrait bientôt s'avérer insuffisant.

En matière de protection de l'enfance, 50 millions d'euros sont inscrits au PLF, afin d'aider financièrement les départements à mettre en oeuvre l'obligation, prévue par la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, d'accompagner les jeunes majeurs de moins de 21 ans sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE) sans ressources ni soutien familial.

L'article 46 quater , inséré dans le PLF à l'Assemblée nationale et rattaché à la mission, prévoit que la part de l'État dans le financement du nouveau groupement d'intérêt public (GIP) « France enfance protégée » créé par la loi précitée pourra, à titre dérogatoire, être supérieure à celle des départements en 2023 alors que la loi prévoit un financement à parts égales. Toutefois, le coût supplémentaire qui en résulte pour l'État n'a pas été répercuté dans les crédits de la mission. Afin que le report de la montée en charge de la contribution des départements ne compromette pas d'emblée la capacité du GIP à exercer ses missions, je vous présenterai un amendement abondant les crédits de l'action « Protection et accompagnement des enfants » de 1,4 million d'euros.

Par ailleurs, il est prévu que l'État compense à hauteur de 20 millions d'euros, soit 30 % des dépenses supplémentaires pour les départements, les revalorisations salariales des professionnels de la protection maternelle et infantile (PMI) actées lors de la conférence des métiers du 18 février 2022.

S'agissant des mineurs non accompagnés (MNA), alors que les flux d'entrée semblent repartir à la hausse, la contribution de l'État aux dépenses des départements continue à baisser, passant de 93 millions d'euros en 2022 à 90 millions en 2023. Sur ce montant, 54 millions d'euros pourraient être versés au titre de la phase initiale d'évaluation de la minorité et de mise à l'abri des personnes se présentant comme MNA, tandis que 36 millions d'euros correspondent à la contribution « exceptionnelle » aux dépenses supplémentaires pesant sur l'ASE à la suite de l'admission de MNA.

La contribution forfaitaire de l'État à la phase « amont » est désormais conditionnée à la conclusion d'une convention avec le préfet pour la mise en oeuvre du dispositif d'appui à l'évaluation de la minorité (AEM). Bien que la loi du 7 février 2022 ait rendu obligatoire le recours au fichier AEM, quinze départements n'ont pas encore conclu de convention.

Au titre de la protection juridique des majeurs, les crédits s'élèveront en 2023 à 802 millions d'euros, après 734 millions d'euros en 2022, soit une hausse de 9 %. Cette hausse prend en compte le recrutement en cours de 200 équivalents temps plein (ETP) dans les services mandataires. Une participation plus importante de l'État reste toutefois attendue des représentants du secteur afin d'améliorer la qualité du travail des mandataires judiciaires et l'attractivité du métier, compte tenu de l'augmentation prévisible de la population des personnes qui ne sont pas en mesure de pourvoir à leurs intérêts.

Enfin, même si leur poids reste modeste, avec 57,7 millions d'euros initialement demandés pour 2023, les crédits du programme « Égalité entre les femmes et les hommes » ont doublé depuis 2019 et augmentent de 14 % par rapport à 2022. Je rappelle que ces crédits n'ont pas vocation à financer la totalité des mesures prises par l'État dans ce domaine. Ainsi, 4,2 millions d'euros supplémentaires sont notamment dédiés à la montée en charge des mesures de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, tandis que les crédits dédiés aux centres d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) connaissent une augmentation de 1,6 million d'euros.

En outre, un amendement tendant à augmenter de 2,9 millions d'euros les moyens dévolus à la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), chargée de la gestion de la plateforme téléphonique 39.19, a été retenu dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale, portant ainsi le total des crédits de paiement (CP) de la mission à 60,6 millions d'euros.

Enfin, les crédits dédits à l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution augmentent pour la deuxième année consécutive, atteignant 1,6 million d'euros. Une instruction interministérielle du 13 avril 2022 a rappelé l'impératif de finaliser l'installation dans tous les départements des commissions départementales de lutte contre la prostitution et d'ouvrir des parcours de sortie de la prostitution, dès lors qu'ils répondent aux prérequis. En effet, six ans après l'entrée en vigueur de la loi qui les a prévues, ces commissions départementales ne sont toujours pas installées sur l'ensemble du territoire. La volonté d'accélérer le déploiement du parcours de sortie de la prostitution commence néanmoins à porter ses fruits : 529 parcours avaient été autorisés par décision préfectorale au 1 er septembre, soit une augmentation de 18 % en huit mois.

Au total, l'évolution de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » témoigne d'une intervention croissante de l'État face à la succession des crises. Son poids dans les finances publiques devrait nous conduire à suivre avec attention les chantiers qui s'ouvrent en matière de lutte contre la pauvreté, d'insertion et d'emploi, qui auront nécessairement une incidence pour les collectivités territoriales.

Aussi, je vous propose de donner un avis favorable aux crédits de la mission, ainsi qu'à l'article 72 quater qui lui est rattaché.

Mme Victoire Jasmin . - Il existe déjà des expérimentations de recentralisation du RSA dans les territoires d'outre-mer. Plusieurs d'entre eux, notamment la Guadeloupe, avaient sollicité cette reprise par l'État compte tenu du taux de chômage important dans ces territoires et de la manière dont le RSA pèse sur le budget. L'augmentation prévue dans le rapport tient-elle déjà compte de l'expérimentation ?

Par ailleurs, quelle analyse peut-on faire des faibles moyens alloués à l'amélioration de la santé mentale au regard des enjeux exprimés lors des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie qui se sont tenues récemment ?

Enfin, on constate une véritable carence de la prise en charge des enfants à la maternelle dans le cadre de la protection maternelle et infantile sur l'ensemble du territoire. Cette carence a-t-elle été prise en compte dans le budget, en dehors des efforts consentis en faveur des personnels ?

Mme Annie Le Houerou . - Si l'on constate une évolution positive des crédits de 8,3 %, nous sommes loin de pouvoir combler les besoins exprimés, ne serait-ce que pour maintenir les crédits existants : l'inflation se situe en réalité à 12 % plutôt qu'à 8 % pour les personnes dans le besoin.

Par ailleurs, l'aide alimentaire connaît effectivement une valorisation par rapport à 2022, mais il ne faut pas oublier que le budget avait connu une baisse en 2022 par rapport à l'année 2021. Ainsi, les associations témoignent du fait qu'il faudrait garantir un minimum de 50 euros par mois et par personne ; or nous sommes plutôt à 5 euros selon le Secours catholique.

De même, s'agissant de la protection juridique des majeurs, le besoin d'accompagnement est évalué à 2 000 personnes, alors que le budget ne pourra financer que 200 accompagnements. On assiste donc à une forme de course à l'accompagnement pour lutter contre la précarisation, mais sans prévoir les moyens nécessaires.

Nous voterons l'amendement proposé sur l'accompagnement des enfants et des jeunes. D'ailleurs, on peut regretter qu'aucune mesure marquante ne soit proposée en faveur de la lutte contre la précarité des enfants, sachant qu'un enfant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.

En ce qui concerne la prostitution, on regrette que l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle n'ait pas été revalorisée : les mesures financières d'accompagnement n'atteignent même pas les minima sociaux, ce qui ne permet pas aux femmes et aux hommes de sortir du système.

S'agissant de l'égalité entre les femmes et les hommes, on note une évolution positive du budget concernant le 39.19. Cette évolution permet en effet aux personnels de bénéficier des primes Ségur. Néanmoins, ces crédits ne permettront pas de mettre en place un observatoire des féminicides, par exemple, ou de répondre aux demandes formulées dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes, alors qu'il s'agit d'une priorité du Gouvernement. Je m'abstiendrai donc lors du vote des crédits de la mission.

M. Daniel Chasseing . - Je me réjouis de l'augmentation des crédits de cette mission.

En effet, la prime d'activité a augmenté, avec une hausse de 71 % depuis 2018 ; l'aide alimentaire a doublé ; et la protection des majeurs est également valorisée. De même, on peut saluer la déconjugalisation de l'AAH, qui est mise en application.

Je voterai donc en faveur de l'amendement et des crédits.

M. Jean Sol , rapporteur pour avis. - Madame Jasmin, pour répondre à la question relative à la recentralisation du RSA dans les outre-mer, il ne s'agit pas d'une expérimentation mais d'une mesure pérenne en ce qui concerne Mayotte, la Guyane et La Réunion. De plus, la Guadeloupe était effectivement candidate pour rejoindre l'expérimentation mais, au regard des conditions financières proposées, elle y a finalement renoncé.

S'agissant de la santé mentale, ce sujet relève plutôt du PLFFS que de cette mission, mais nous aurons l'occasion d'y revenir ultérieurement. Et en ce qui concerne les PMI, le PLF ne résout effectivement pas la prise en charge des enfants de maternelle évoquée.

Madame Le Houerou, il faut noter que la revalorisation des prestations sociales qui a eu lieu le 1 er juillet 2022 a été de 4 % et qu'une revalorisation automatique interviendra au 1 er avril 2023.

En ce qui concerne l'aide alimentaire, les crédits avaient effectivement baissé en 2022 pour une raison purement comptable, qui était liée à l'amélioration de la gestion des fonds européens.

S'agissant de la protection des majeurs, il faudrait effectivement en réalité 75 millions d'euros de plus pour arriver à 45 mesures de protection par mandataire, mais il est illusoire de penser que les 2 000 recrutements nécessaires pourraient se faire miraculeusement.

Enfin, l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle a bien été revalorisée à hauteur de 4 %, comme les autres prestations, mais son montant reste très faible, puisque l'on reste en dessous de 400 euros.

M. Daniel Chasseing . - Pourquoi le budget dédié aux MNA diminue-t-il au moment où les départements voient les arrivées de MNA se multiplier ?

M. Jean Sol , rapporteur pour avis. - Nous avons des difficultés à recueillir des données précises dans les territoires et le mode calcul de la compensation de l'État repose sur des règles qui nous échappent ; nous avions soulevé cette question l'an passé auprès du ministre Adrien Taquet.

Mme Annick Jacquemet . - S'agissant du RSA, je salue la revalorisation du montant de 4 % du RSA, votée l'été dernier, tout comme la volonté de faire aboutir la solidarité à la source pour lutter contre le non-recours au droit. Néanmoins, le RSA doit rester un dispositif d'insertion, et je suis persuadée que son efficacité est liée à l'effectivité des contreparties qui engagent les bénéficiaires. Dans ce cadre, j'ai interrogé la semaine dernière le ministre Jean-Christophe Combe sur le pourcentage de contrats d'engagements réciproques (CER). Il ne faudrait pas que le dispositif d'allocation à la source diminue encore cet engagement des bénéficiaires, la vigilance est donc de mise.

M. Jean-Luc Fichet . - Pourquoi le dispositif de déconjugalisation ne s'applique-t-il pas à Mayotte ? Que répond la ministre aux questions qui lui ont été posées ?

Mme Laurence Rossignol . - Il faut modérer notre enthousiasme au regard de l'inflation, qui sera, en outre, bien supérieure pour les populations défavorisées que le taux moyen annoncé.

Premièrement, s'agissant de la protection de l'enfance, je souhaite alerter sur le fait que les enfants sont en grande détresse : nous ne pouvons pas nous satisfaire du système actuel centré sur les MNA.

Deuxièmement, il est nécessaire de revaloriser l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle, qui plus est au regard de l'augmentation de la prostitution des mineurs. En effet, il faut aider les majeurs à sortir de la prostitution, car certains ont tendance à donner aux mineurs une vision glamour de la prostitution et ont donc une influence néfaste sur eux.

M. Jean Sol , rapporteur pour avis. - Madame Jacquemet, s'agissant des contreparties du RSA, il faudra effectivement être attentif aux diverses expérimentations en matière de contreparties réciproques, de manière que celles-ci ne soient pas éphémères.

Monsieur Fichet, nous aurions pu déposer un amendement concernant la déconjugalisation pour Mayotte si nous n'étions pas limités par l'article 40 de la Constitution. Néanmoins, le Gouvernement nous a dit vouloir déposer un amendement sur ce sujet : il n'existe en effet aucune raison objective qui empêcherait d'appliquer cette mesure à Mayotte. Nous verrons si le Gouvernement tient ses engagements.

Madame Rossignol, s'agissant de la protection de l'enfance, il faut savoir que la mission consacre 140 millions d'euros à des mesures cofinancées avec les départements dans le cadre des conventions.

Mme Colette Mélot . - Je signale que le rapport de l'Unicef, paru récemment, montre que nous pouvons faire mieux pour protéger et améliorer la santé des enfants. Cela concerne la santé mentale des enfants âgés de 6 à 18 ans, l'accueil des 42 000 jeunes qui vivent dans la rue, ou encore la recrudescence d'enfants confiés à l'ASE au moment même où les conditions d'accueil se dégradent.

Mme Annick Jacquemet . - J'ai été choquée de lire qu'un enfant meurt tous les cinq jours sous les coups de ses parents en France et que 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année.

Mme Catherine Deroche , présidente. - Nous en venons à l'amendement du rapporteur.

M. Jean Sol , rapporteur pour avis. - L'amendement n° II- 329 rappelle que le groupement d'intérêt public « France enfance protégée », créé par la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, résulte du regroupement du GIP Enfance en danger (Giped), de l'Agence française de l'adoption (AFA), du Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (Cnaop) et du Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE).

À compter du 1 er janvier 2023, le nouveau GIP exercera, au niveau national, des missions d'appui aux pouvoirs publics dans la mise en oeuvre de la politique publique de protection de l'enfance, d'adoption nationale et internationale et d'accès aux origines personnelles. Il contribuera à l'animation, à la coordination et à la cohérence des pratiques sur l'ensemble du territoire.

L'article L. 147-15 du code de l'action sociale et des familles prévoit que le GIP est financé à parts égales par l'État et les départements dans les conditions définies par sa convention constitutive.

Répondant à une demande des départements, l'article 46 quater du PLF, inséré à l'Assemblée nationale, prévoit que la part de l'État dans ce financement pourra, à titre dérogatoire, être supérieure à celle des départements en 2023. Toutefois, le coût supplémentaire qui devrait en résulter pour l'État n'a pas été répercuté dans les crédits de la mission. Afin que le report de la montée en charge de la contribution des départements ne compromette pas la capacité du GIP à exercer ses missions, cet amendement vise à abonder de 1,4 million d'euros les crédits dédiés à leur financement.

Cette augmentation des crédits de l'action n° 17, Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables, du programme 304 est gagée sur une diminution des crédits de l'action n° 17 au sein du programme 124.

L'amendement n° II-329 est adopté .

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », sous réserve de l'adoption de son amendement, ainsi que l'article 46 quater.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES

___________

Auditions

• Ministère des solidarités et de la santé

Francis Bouyer , adjoint de Mme Marine Jeantet, déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté

• Association des paralysés de France (APF France Handicap)

Carole Saleres , conseillère nationale Travail, emploi, formation
et ressources

• Fédération des acteurs de la solidarité (FAS)

Emmanuel Bougras , responsable du service stratégie et analyse des politiques publiques

Marine Malberg , chargée de mission hébergement, droit des femmes, prostitution et précarité alimentaire

• Fédération française des banques alimentaires (FFBA)

Laurence Champier , directrice fédérale

Barbara Mauvilain , responsable du service des relations institutionnelles

• Restos du coeur

Louis Cantuel , responsable du pôle institutionnel et stratégique

• Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

Jean-Benoît Dujol , directeur général

Hélène Furnon-Petrescu , cheffe du service des droits des femmes

Katarina Milectic-Lacroix , cheffe de bureau du budget et performance

Sandrine Miclon-Hautbois , sous-directrice adjointe à l'inclusion sociale, insertion et lutte contre la pauvreté

• Inter-fédération de la protection juridique des majeurs (IF-PJM)

Hadeel Chamson , délégué général (Fnat)

Valérie Bonne , coordinatrice du pôle protection et des droits des personnes (Unaf)

Anne Lebas de Lacour , chargée de mission protection juridique des majeurs, représentant Luc Gateau, le président de l'Unapei (Unapei)

Séverine Dallard , chargée de mission (Fnat)

Alexandre Cobret , consultant (Séance publique)

Contributions écrites

• Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (Fnath)

• Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei)

• Assemblée des départements de France (ADF)


* 1 Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

* 2 Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

* 3 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 - Article 202.

* 4 Article L. 5213-2-1 du code du travail.

* 5 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale - Article 132.

* 6 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 - Article 43.

* 7 Loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants - Article 10.

* 8 Article L. 147-15 du code de l'action sociale et des familles.

Page mise à jour le

Partager cette page