Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Nous voterons bien évidemment contre l’amendement du Gouvernement, car de nombreux élus dénoncent le manque d’encadrement de la colocation, ce qui a des conséquences urbaines et sociales désastreuses. Les communes se retrouvent à gérer et à combattre ces divisions anarchiques, alors qu’il suffirait d’interdire tout simplement cette pratique, tout au moins dans les secteurs particulièrement exposés à l’habitat indigne.

La nécessité d’encadrer cette pratique de location à baux multiples dans les quartiers où prospèrent les marchands du sommeil est une évidence.

Comme le souligne le maire de Grigny, la colocation tend à devenir la norme au sein de certaines grandes copropriétés. L’objectif est non pas de répondre aux besoins des occupants, mais d’obtenir une rentabilité financière exorbitante. Cette pratique prend au piège une population toujours plus précaire et, de fait, plus captive.

L’entêtement du Gouvernement est étonnant. Comment peut-on parler d’avantages pour les colocataires quand il s’agit de suroccupation, d’insalubrité manifeste et de location subie, et quand les élus décrivent les effets désastreux de cette pratique ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 129.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 88 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 107 et 108 n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 8 sexies, modifié.

(Larticle 8 sexies est adopté.)

Article 8 sexies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 9 (texte non modifié par la commission)

Après l’article 8 sexies

Mme la présidente. L’amendement n° 70 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deux dernières phrases du premier alinéa du II de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « En application de l’article 6 de la présente loi, chaque pièce doit respecter les dispositions applicables aux logements d’une seule pièce telles que définies par le décret en Conseil d’État pris en application du même article. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Cet amendement vise à garantir la qualité des logements mis en colocation.

Nous souhaitons définir un certain niveau d’exigence et instaurer des normes de confort pour les pièces louées en copropriété, afin que celles-ci assurent à chaque occupant des conditions dignes d’existence.

Les baux séparés ne permettent pas toujours de distinguer les pièces réellement disponibles pour les colocataires, et les marchands de sommeil en profitent en créant des situations de suroccupation très rentables pour eux, mais très coûteuses pour la santé des résidents. Ces derniers n’ont pas toujours accès à des sanitaires et vivent dans des espaces trop étroits, ce qui ne sera plus possible si notre amendement est adopté, puisque les obligations en termes d’hygiène et de surface des baux classiques s’appliqueront plus strictement aux baux séparés.

J’en profite pour rappeler quelques chiffres issus du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre : près de 3 millions de personnes vivent dans des conditions très difficiles, dont 1,2 million en surpopulation dans leur logement et 1,8 million sans confort. L’adoption de cet amendement permettra, je l’espère, d’en réduire le nombre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces dispositions, qui s’appliqueraient à l’ensemble des colocations à baux multiples et sur tout le territoire, contraindraient excessivement, si elles étaient adoptées, le marché locatif, ce qui, dans le contexte actuel, n’est pas du tout souhaitable.

On le sait, dans de nombreux cas, le partage d’une cuisine ou d’une installation sanitaire, en colocation, ne pose pas de problème aujourd’hui. Évitons les solutions excessives.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je suis en parfait accord avec l’argumentation que vient de tenir Mme la rapporteure. Nous connaissons une crise locative ; des centaines de personnes font la queue pour visiter les quelques biens mis en location. Certaines agences reçoivent tellement de demandes qu’elles n’arrivent pas à les traiter et qu’elles sont contraintes de ne plus publier les offres locatives.

Le dispositif proposé vise à accroître encore les contraintes sur l’offre. Notre objectif, j’y insiste, doit être de développer l’offre locative sur le marché, et non de la réduire. Plus le nombre de biens mis en location diminue, plus les locataires et les candidats à la location se retrouvent en difficulté. Or tel serait le résultat de l’adoption de cet amendement.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 70 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par une phrase et un alinéa ainsi rédigés : « Pour les logements situés dans un périmètre concerné par une opération mentionnée à l’article L. 741-1 et L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, les colocations nécessitent obligatoirement un permis de diviser tel que prévu à l’article L. 126-18 du code de la construction et de l’habitation.

« Les contrats de colocation mentionnent systématiquement le nombre de personnes résidant au sein du logement ainsi que le montant global du loyer de la colocation. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous avons eu plusieurs échanges avec des élus locaux, notamment avec Philippe Rio, le maire de Grigny. Cette commune abrite sur son territoire la plus grande copropriété de France, Grigny 2, pour laquelle un plan d’intervention important a été mis en place, ce qui nous permet de bénéficier d’un retour d’expérience sur lequel nous pouvons nous appuyer collectivement.

Parmi les éléments qu’il nous a communiqués, le maire de Grigny a notamment mis l’accent sur le flou qui règne sur les baux de copropriété dans le cas où un permis de diviser est nécessaire, ce qui n’est pas toujours le cas.

Nous souhaitons rendre obligatoire le permis de diviser pour les copropriétés situées dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (Orcod), afin de garantir que les colocataires disposent de logements décents.

Par ailleurs, il nous semble opportun de modifier la rédaction des contrats de copropriété pour qu’ils prévoient explicitement l’inscription dans les contrats de colocation du nombre de résidents, afin d’éviter que la loi ne soit contournée et que trop de personnes ne soient logées dans des espaces trop petits, comme le font souvent les marchands de sommeil.

Nous proposons aussi que le montant global du loyer soit indiqué dans le bail, ce qui permettra de mieux veiller au respect du permis de diviser et de louer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les collectivités ont déjà la possibilité de mettre en place le permis de diviser, ainsi que des permis de louer, dans les zones d’habitat dégradé. Et les zones qui font l’objet d’une Orcod sont des zones d’habitat dégradé.

En revanche, le permis de diviser, tel qu’il existe actuellement, ne concerne que les divisions qui requièrent des travaux, et non pas les divisions de fait résultant d’une mise en colocation.

Le permis de louer, qui peut lui aussi être mis en place dans des zones d’habitat dégradé, y compris donc dans les Orcod, semble ainsi mieux répondre à la préoccupation des auteurs de cet amendement. D’une certaine manière, ce dernier est donc satisfait par le droit existant.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. La position des auteurs de cet amendement converge avec celle du groupe socialiste.

À l’évidence, les baux de colocation soulèvent des difficultés. Il est vrai que, sur le plan juridique, le permis de louer et le permis divisé doivent être distingués : l’un relève du droit de la construction, l’autre du droit de l’habitation. Le permis de diviser ne peut donc pas être utilisé comme le souhaiteraient les auteurs de cet amendement.

Il n’en demeure pas moins qu’il faut entendre la souffrance de nos élus locaux et des occupants, qui ne savent pas comment traiter la question de ces colocations à baux multiples ou à baux uniques, qui se transforment peu à peu en logements de marchands de sommeil, dont les occupants sont littéralement exploités – j’utilise ce terme à dessein.

Je répète donc, puisque je n’ai pas eu de réponse sur ce point tout à l’heure, monsieur le ministre, qu’il me semblerait utile que nous nous mettions autour de la table pour résoudre cette question.

Pour des raisons juridiques, la solution proposée par les auteurs de cet amendement ne constitue sans doute pas une réponse, mais le problème reste entier. Je ne crois pas, en effet, que l’amendement soit satisfait. J’aimerais vraiment qu’un groupe de travail soit créé pour travailler sur la question des colocations transformant en quelque chose qui ne correspond pas à leur destination initiale.

Mme la présidente. Madame Margaté, l’amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marianne Margaté. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 98 rectifié, présenté par Mmes Linkenheld, Artigalas et Carlotti, M. Kanner, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental et pour une durée de 10 ans à compter de la publication de la présente loi, dans les zones soumises à déclaration de mise en location mentionnée à l’article L. 634-1 du code de la construction et de l’habitation ou à autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du même code, le maire peut prendre un arrêté de mise en demeure avec astreinte de réaliser des travaux de mise en conformité d’un local d’habitation, à l’encontre d’un propriétaire qui a fait l’objet de signalements répétés concernant le respect des règles sanitaires, d’hygiène et de salubrité édictées.

Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation.

Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Comme je l’ai expliqué lors de la discussion générale, cet amendement vise à étendre, dans un premier temps à titre expérimental, le champ de la mise en demeure avec astreinte administrative.

En effet, ce dispositif, qui existe depuis plusieurs années, même s’il est encore relativement récent dans notre droit, est bien utilisé et bien connu par les collectivités locales. Il a fait ses preuves en matière de lutte contre l’habitat indigne, notamment dans les cas les plus graves.

Il nous semble intéressant d’étendre, à titre expérimental, la possibilité de prononcer une astreinte administrative aux cas d’indignité ou de dégradation de l’habitat un peu moins graves. Je n’entrerai pas dans les détails techniques, mais l’idée est toujours la même : plus on dispose d’outils en amont, plus on peut prévenir les dégradations.

C’est pourquoi nous proposons cette expérimentation. Certaines communes sont d’ailleurs déjà volontaires pour y participer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’existence d’un signalement ne peut suffire à fonder une mise en demeure avec astreinte : il faut que l’infraction au règlement sanitaire départemental (RSD) soit caractérisée.

En outre, le décret du 29 juillet 2023 portant règles sanitaires d’hygiène et de salubrité des locaux d’habitation et assimilés, qui est entré en vigueur le 1er octobre dernier, prévoit que les infractions au règlement sanitaire départemental sont punies d’une amende de quatrième classe.

Attendons d’avoir un retour d’expérience avant de lancer, si c’est nécessaire, une expérimentation sur ce thème.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 98 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 87 rectifié bis, présenté par Mme Artigalas, M. Devinaz, Mme Linkenheld, M. Kanner, Mmes Carlotti et Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La surface habitable et le volume habitable des locaux privatifs doivent être au moins égaux, respectivement, à 9 mètres carrés et à 20 mètres cubes. La surface habitable d’un logement est la surface de plancher construite, après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d’escalier, gaines, embrasures de portes et de fenêtres. Pour le calcul de la surface habitable, il n’est pas tenu compte de la superficie des combles non aménagés, caves, sous-sols, remises, garages, terrasses, loggias, balcons, séchoirs extérieurs au logement, vérandas, volumes vitrés, locaux communs et autres dépendances des logements, ni des parties de locaux d’une hauteur inférieure à 2,20 mètres. Le volume habitable correspond au total des surfaces habitables ainsi définies multipliées par les hauteurs sous plafond. »

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Publié le 30 juillet 2023 et entré en vigueur depuis le 1er octobre, le décret qui précise les règles sanitaires d’hygiène et de salubrité des locaux d’habitation a nourri les inquiétudes.

Si ce décret réaffirme qu’une hauteur sous plafond de 2,2 mètres est suffisante et que, sinon, le logement doit être considéré comme impropre à l’habitation, il prévoit une exception dans l’hypothèse où le local est conforme aux dispositions du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent.

Une telle rédaction conduit potentiellement à permettre la mise en location de logements dont le volume habitable est au moins égal à 20 mètres cubes, c’est-à-dire de logements de 12 mètres carrés possédant une hauteur sous plafond de 1,8 mètre. Mes chers collègues, nous vous proposons de lever toute ambiguïté en adoptant cet amendement.

Cette disposition aurait aussi le mérite de simplifier l’action de l’État et des collectivités dans le cadre de la lutte contre l’habitat indigne, notamment en ce qui concerne le contrôle du respect des règles d’hygiène et de santé, ou encore l’instruction des permis de louer.

Cet amendement est le reflet, mais aussi le relais des incompréhensions que ce décret a suscité auprès des associations, des élus et acteurs de terrain. Il appartient au législateur d’éclaircir la situation, car, en l’état, l’ambiguïté demeure. Monsieur le ministre, prévoyez-vous de clarifier la rédaction de ce décret ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’amendement n° 87 rectifié bis et les amendements 34 rectifié bis et 64 rectifié, qui seront examinés dans un instant, ont en fait le même objet : il s’agit de revenir sur le décret de juillet 2023, qui visait à harmoniser certaines règles permettant de qualifier des locaux de propres ou impropres à l’habitation.

Il est tout à fait exact que ce décret a conduit certains bailleurs peu scrupuleux à couper des appartements en deux, dans le sens de la hauteur, pour mettre en location des logements de plus de 9 mètres carrés et de 20 mètres cubes, mais d’une hauteur sous plafond de 1,8 mètre, ce qui n’est évidemment pas acceptable.

Cependant, comme je l’ai déjà indiqué en commission, édicter une règle générale selon laquelle la hauteur sous plafond devrait obligatoirement être d’au moins 2,2 mètres ferait sortir du parc des logements toutes les chambres de bonnes en soupente, qui logent par exemple nombre d’étudiants – mais pas seulement ! Dans le contexte de crise du logement que nous connaissons, ce n’est évidemment pas souhaitable.

L’amendement n° 87 rectifié bis vise uniquement les logements locatifs ; les amendements nos 34 rectifié bis et 64 rectifié ont pour objet tous les logements.

Pour tous ces amendements, la commission émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mon propos portera également sur les trois amendements en même temps.

L’amendement n° 87 rectifié bis vise à préciser au niveau législatif la surface et le volume habitables d’un logement, des éléments qui sont aujourd’hui définis au niveau réglementaire. Mais cette disposition va beaucoup plus loin que la législation en vigueur et que les règles actuelles, qui existent d’ailleurs depuis de nombreuses années, car elle impose de réviser les règles de calcul en vigueur, et cela sans que l’impact d’une telle évolution ait été évalué sur le parc existant.

Comment évoluera l’offre ? Je ne sais pas combien cette mesure entraînera de retraits de biens du marché. Si l’offre locative était pléthorique et si les locataires potentiels avaient le choix entre quatre ou cinq appartements, on pourrait se permettre de renforcer les critères et de relever les hauteurs sous plafond, les volumes ou la luminosité, notamment. Mais la situation est radicalement inverse.

Chacun peut le constater, l’offre s’effondre sur tout le territoire. Je suis prêt à étudier cet amendement, mais je ne dispose pas d’étude d’impact.

Mme Audrey Linkenheld. Demandez-en une !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Madame la sénatrice, dans le Nord, il y a des corons bas de plafond ; dans les villes, il y a des logements sous combles, comme le rappelait Mme la rapporteure ; dans l’Est, il y a des habitats à colombages… Ces habitations présentent des spécificités architecturales.

On ne peut donc pas prendre ce type de décision, sans mesurer leur impact en termes de retraits de biens du marché locatif, dans un contexte de crise.

Mme Audrey Linkenheld. Il ne s’agit que de rétablir une disposition qui existait auparavant !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il ne serait pas responsable de ma part de déclarer qu’il faut accroître l’offre locative et, en même temps, d’émettre un avis favorable sur votre amendement, sans savoir quelles seraient ses conséquences, c’est-à-dire sans savoir combien de logements seraient retirés du marché, collectivité par collectivité, localité par localité. (Mme Audrey Linkenheld proteste.)

Faute d’informations précises et d’une étude d’impact, j’émettrai un avis défavorable aujourd’hui. Mais la discussion n’est pas fermée : le débat pourra se poursuivre au niveau local. Nous pourrons aussi discuter de nouveau de cette question quand l’offre locative sur le marché sera plus abondante. Mais, dans le contexte d’effondrement total de l’offre locative que nous connaissons, nous ne pouvons pas prendre le risque de réduire celle-ci encore davantage.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 87 rectifié bis, comme il le fera sur les amendements nos 34 rectifié bis et 64 rectifié qui seront examinés dans un instant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. On comprend bien désormais, après quelques heures de débat, que la politique du logement du Gouvernement se résume essentiellement à essayer d’accroître l’offre de logements, non pas « quoi qu’il en coûte » – car on ne voit guère d’argent –, mais « quoi qu’il en soit », autrement dit quelle que soit la qualité des logements, leur performance énergétique, leur surface, leur hauteur sous plafond, etc.

Tel est le point de vue du Gouvernement. Mais ce n’est pas le nôtre. Nous, nous sommes pour une politique du logement régulatrice, qui offre des logements à la fois abordables et de qualité, et cela nous semble possible.

Cela étant, monsieur le ministre, pour en revenir à l’amendement, j’indique que celui-ci vise à rétablir un texte existant, d’ordre réglementaire. Nul besoin d’une étude d’impact pour revenir à l’existant ! Votre argument ne vaut donc pas.

Le décret a fait couler beaucoup d’encre et fâché nombre d’associations. Vous ne pouvez pas ne pas le savoir. Dites-nous plutôt clairement que vous êtes défavorable à notre amendement, mais ne vous cachez pas derrière une absence d’étude d’impact, car nous n’en avons pas besoin : il s’agit, je le redis encore une fois, de rétablir des dispositions qui ont déjà été en vigueur, et non pas d’en créer de nouvelles.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Ce n’est pas vrai, madame la sénatrice ! Cet amendement vise non pas à rétablir une disposition ancienne, mais à créer de nouveaux critères.

J’ai une question simple : combien de Lillois ou d’habitants du département du Nord dont vous êtes l’élue seront touchés par votre amendement ? Combien de biens locatifs seront concernés sur le marché lillois ? Pourriez-vous indiquer à nos concitoyens combien de logements seraient retirés du marché si cet amendement était adopté ?

Si j’avais une étude d’impact me permettant de connaître toutes les conséquences de cette disposition dans chaque territoire et de savoir combien de biens sortiront du marché, je serais prêt à en discuter. Mais je n’ai pas d’étude d’impact…

C’est pourquoi je ne puis émettre un avis favorable. Pour le reste, oui, le Gouvernement souhaite mener une politique de l’offre, en soutenant l’offre locative, en facilitant la remise de biens sur le marché, en luttant contre les logements vacants, en incitant les propriétaires à louer leurs biens de manière pérenne et durable, tout en les rassurant sur le fait que l’investissement locatif a de l’avenir, etc.

Tel est notre objectif, parce que, j’y insiste, l’offre manque terriblement. Aujourd’hui, les candidats à la location font la queue dans les agences immobilières pour visiter les quelques logements disponibles !

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Si je comprends bien, monsieur le ministre, vous ne voyez pas d’objection à ce que des bidonvilles se reconstituent,…

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Oh !

M. Guy Benarroche. … alors que nous avions toujours eu à cœur de les détruire. Pardonnez-moi, mais si nous poussons votre raisonnement à l’extrême, voilà à quoi nous aboutissons !

Mme Françoise Gatel. Oui, à l’extrême !

M. Guy Benarroche. Par ailleurs, un certain nombre de propositions de loi ont été présentées par des députés ou des sénateurs de la majorité, avec le soutien du Gouvernement, pour éviter la réalisation d’études d’impact. Maintenant vous nous demandez, à nous parlementaires, d’en faire !

Le Gouvernement a pourtant des services pour cela. Est-ce à nous de faire des études d’impact ? Comptez-vous procéder avec le Parlement et les parlementaires comme vous le faites avec les communes et les maires, auxquels vous demandez déjà de payer vos décisions ? Ce n’est pas possible ! Vos arguments ne sont pas recevables.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Dans ce cas, votez n’importe quoi !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 87 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 34 rectifié bis, présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre unique du titre V du livre V du code de la construction et de l’habitation est complété par un article L. 551-… ainsi rédigé :

« Art. L. 551-…. – Les logements respectent des dimensions minimales de hauteur sous plafond, de surface habitable et de volume habitable :

« 1° Le logement dispose d’au moins une pièce principale ayant une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et présente un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes.

« 2° Les pièces de vie et de service du logement ont une hauteur sous plafond suffisante et continue pour la surface exigée permettant son occupation sans risque. Une hauteur sous plafond égale ou supérieure à 2,20 mètres est suffisante. Les locaux dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres et dont la largeur sont impropres à l’habitation.

« 3° Les pièces de vie du logement ont une largeur suffisante pour la surface exigée permettant son occupation sans risque. Une largeur égale ou supérieure à 2 mètres est suffisante. Les locaux dont la largeur est inférieure à 2 mètres sont impropres à l’habitation.

« La surface habitable et le volume habitable sont déterminés conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’article R. 156-1. »

La parole est à Mme Antoinette Guhl.