Sommaire

Présidence de M. Loïc Hervé

Secrétaires :

M. Guy Benarroche, Mme Alexandra Borchio Fontimp.

1. Procès-verbal

2. Mises au point au sujet de votes

3. Communication relative à une commission mixte paritaire

4. Congrès et assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. – Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi organique dans le texte de la commission

Discussion générale :

M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois

Mme Corinne Narassiguin

M. Georges Naturel

M. Pierre Médevielle

M. Hervé Marseille

Mme Mélanie Vogel

M. Robert Wienie Xowie

M. André Guiol

M. Thani Mohamed Soilihi

M. Patrick Kanner

M. Mathieu Darnaud

Clôture de la discussion générale.

Avant l’article 1er

Amendement n° 1 de M. Rachid Temal. – Rejet.

Article 1er

Amendement n° 2 de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 2 (nouveau) – Adoption.

Vote sur l’ensemble

M. Georges Naturel

M. Pierre Médevielle

Adoption, par scrutin public n° 132, du projet de loi organique dans le texte de la commission.

Suspension et reprise de la séance

5. Rénovation de l’habitat dégradé. – Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement

Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois

Mme Dominique Estrosi Sassone

M. Jean-Luc Brault

M. Yves Bleunven

Mme Antoinette Guhl

Mme Marianne Margaté

M. Ahmed Laouedj

M. Bernard Buis

Mme Viviane Artigalas

M. Bruno Belin

M. Guislain Cambier

Mme Audrey Linkenheld

M. François Bonhomme

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué

Clôture de la discussion générale.

Articles 1er A (nouveau) et 1er – Adoption.

Article 1er bis

Amendement n° 144 de M. Bernard Buis. – Adoption.

Amendement n° 161 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 2

Amendement n° 145 de M. Didier Rambaud. – Adoption.

Amendement n° 118 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Retrait.

Amendement n° 119 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Devenu sans objet.

Amendement n° 84 de Mme Viviane Artigalas. – Devenu sans objet.

Amendement n° 120 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Devenu sans objet.

Amendement n° 123 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 162 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 124 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 163 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 146 de M. Didier Rambaud. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 2

Amendement n° 19 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.

Amendement n° 55 de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Amendements identiques nos 6 de M. Rémi Féraud et 116 de M. Ian Brossat. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 5 de M. Rémi Féraud et 73 rectifié bis de Mme Marianne Margaté. – Rejet des deux amendements.

Article 2 bis A (supprimé)

Amendements identiques nos 20 rectifié de Mme Antoinette Guhl, 91 rectifié de Mme Viviane Artigalas et 125 du Gouvernement. – Adoption des trois amendements rétablissant l’article.

Amendement n° 56 de Mme Marianne Margaté et sous-amendement n° 175 de M. Bernard Buis. – Devenus sans objet.

Article 2 bis – Adoption.

Article 2 ter A (nouveau)

Amendement n° 126 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.

Article 2 ter (nouveau)

Amendement n° 122 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 2 ter

Amendement n° 96 rectifié de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Article 3

Amendements identiques nos 67 de Mme Marianne Margaté et 83 rectifié de Mme Viviane Artigalas. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 164 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 103 rectifié de Mme Audrey Linkenheld et 147 de M. Bernard Buis. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 165 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 21 de Mme Antoinette Guhl, 77 de M. Ian Brossat et 97 de Mme Viviane Artigalas. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 127 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 3

Amendement n° 44 rectifié de M. Pierre Jean Rochette. – Rejet.

Amendement n° 45 rectifié de M. Pierre Jean Rochette. – Rejet.

Amendement n° 86 rectifié bis de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Amendement n° 66 rectifié de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Article 3 bis AA (nouveau) – Adoption.

Après l’article 3 bis AA

Amendement n° 33 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 68 rectifié bis de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Amendement n° 89 rectifié bis de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Article 3 bis A

Amendement n° 92 de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 3 bis B et 3 bis – Adoption.

Après l’article 3 bis

Amendements identiques nos 8 rectifié de M. Rémi Féraud et 74 de Mme Marianne Margaté. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 9 rectifié bis de M. Rémi Féraud et 75 de Mme Marianne Margaté. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Organisation des travaux

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Sophie Primas

6. Modification de l’ordre du jour

7. Rénovation de l’habitat dégradé. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 3 ter

Amendements identiques nos 22 de M. Guillaume Gontard et 69 de Mme Marianne Margaté. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Après l’article 3 ter

Amendements identiques nos 136 du Gouvernement et 143 rectifié de M. Thani Mohamed Soilihi. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Article 4

Amendement n° 148 de M. Bernard Buis. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 5 – Adoption.

Après l’article 5

Amendement n° 109 de Mme Viviane Artigalas. – Retrait.

Article 5 bis A – Adoption.

Après l’article 5 bis A

Amendements identiques nos 23 rectifié de Mme Antoinette Guhl, 38 rectifié de Mme Anne-Catherine Loisier et 65 de Mme Marianne Margaté. – Adoption des trois amendements insérant un article additionnel.

Article 5 bis

Amendement n° 57 de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Amendement n° 149 de M. Bernard Buis. – Rejet.

Amendement n° 99 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 6

Amendement n° 166 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 7 – Adoption.

Article 7 bis A (nouveau)

Amendement n° 151 de M. Bernard Buis et sous-amendement n° 160 du Gouvernement. – Rejet du sous-amendement et adoption de l’amendement rédigeant l’article.

Article 7 bis

Amendements identiques nos 24 de Mme Antoinette Guhl et 85 rectifié de Mme Viviane Artigalas. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 150 de M. Bernard Buis. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 8

Amendement n° 79 rectifié ter de Mme Sylviane Noël. – Retrait.

Amendement n° 25 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 8

Amendement n° 90 rectifié de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Article 8 bis A (supprimé)

Amendements identiques nos 94 de Mme Viviane Artigalas et 153 de M. Bernard Buis. – Adoption des deux amendements rétablissant l’article.

Article 8 bis

Amendement n° 102 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Amendement n° 121 de M. Xavier Iacovelli. – Non soutenu.

Amendement n° 26 de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.

Amendement n° 117 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Rejet.

Amendement n° 101 de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Adoption de l’article.

Suspension et reprise de la séance

Article 8 ter

Amendement n° 27 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendements identiques nos 128 du Gouvernement et 152 de M. Bernard Buis. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 8 quater A

Amendement n° 167 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 28 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 8 quater B

Amendement n° 168 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 8 quater

Amendement n° 154 de M. Bernard Buis. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 8 quinquies (nouveau) – Adoption.

Après l’article 8 quinquies

Amendement n° 113 rectifié ter de M. Guislain Cambier. – Rejet.

Amendement n° 114 rectifié ter de M. Guislain Cambier. – Rejet.

Article 8 sexies (nouveau)

Amendement n° 129 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 88 rectifié de Mme Viviane Artigalas. – Adoption.

Amendement n° 107 de Mme Audrey Linkenheld. – Devenu sans objet.

Amendement n° 108 de Mme Viviane Artigalas. – Devenu sans objet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 8 sexies

Amendement n° 70 rectifié de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Amendement n° 76 rectifié de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Amendement n° 98 rectifié de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Amendement n° 87 rectifié bis de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Amendement n° 34 rectifié bis de Mme Antoinette Guhl. – Rejet.

Amendement n° 64 rectifié de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Article 9

Amendement n° 169 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 9

Amendement n° 16 rectifié de M. Philippe Grosvalet. – Rejet.

Amendement n° 17 rectifié bis de M. Philippe Grosvalet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 72 rectifié de Mme Marianne Margaté. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 32 de Mme Antoinette Guhl et 61 de Mme Marianne Margaté. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 62 de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

Article 9 bis A – Adoption.

Article 9 bis B

Amendement n° 170 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 9 bis

Amendement n° 13 rectifié de M. Christian Bilhac. – Adoption.

Amendement n° 100 de Mme Colombe Brossel. – Devenu sans objet.

Amendement n° 53 rectifié bis de Mme Martine Berthet. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 12 rectifié de M. Christian Bilhac, 50 rectifié de Mme Nadège Havet, 54 rectifié bis de Mme Martine Berthet et 81 rectifié de Mme Colombe Brossel. – Adoption des quatre amendements.

Amendement n° 18 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendement n° 137 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 9 bis

Amendement n° 15 rectifié de M. Christian Bilhac. – Rejet.

Article 9 ter A – Adoption.

Article 9 ter B (supprimé)

Amendement n° 63 de Mme Marianne Margaté. – Rejet.

L’article demeure supprimé.

Article 9 ter

Amendement n° 115 rectifié ter de M. Guislain Cambier. – Retrait.

Amendement n° 11 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.

Amendement n° 30 de M. Guillaume Gontard. – Rejet.

Amendement n° 93 de M. Rémi Féraud. – Rejet.

Amendements identiques nos 52 rectifié de Mme Nadège Havet et 130 du Gouvernement. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Renvoi de la suite de la discussion.

8. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Loïc Hervé

vice-président

Secrétaires :

M. Guy Benarroche,

Mme Alexandra Borchio Fontimp.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 15 février 2024 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, lors des scrutins publics nos 129, 130 et 131 portant respectivement sur les articles 1er, 2 et 4 de la proposition de loi visant à améliorer et garantir la santé et le bien-être des femmes au travail, Patricia Schillinger souhaitait voter pour.

M. Patrick Kanner. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 131 portant sur l’article 4 du même texte, Alexandra Borchio Fontimp souhaitait s’abstenir.

M. le président. Acte est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles figureront dans l’analyse politique des scrutins concernés.

3

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

4

 
Dossier législatif : projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie
Discussion générale (suite)

Congrès et assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie

Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi organique dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie
Avant l’article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie (projet n° 290, texte de la commission n° 336, rapport n° 335).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur et des outre-mer. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter ce projet de loi organique, dont l’objet est simple, puisqu’il prévoit le report des élections provinciales de Nouvelle-Calédonie à une date non fixée, mais ne pouvant aller au-delà du 15 décembre de cette année. Si le Parlement ne votait pas ce report, ces élections devraient se dérouler au printemps prochain.

Il faut noter que le congrès de Nouvelle-Calédonie a émis un avis favorable sur ce report. En d’autres termes, une partie des indépendantistes et une partie des non-indépendantistes ont voté pour les dispositions figurant dans ce projet de loi organique.

Compte tenu de son urgence pratique, ce texte est dissocié d’une autre réforme, que le Gouvernement a soumise au Parlement et que le Sénat examinera dans les semaines à venir, visant au « dégel » du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.

En Nouvelle-Calédonie, territoire de 270 000 habitants, on dénombre trois listes électorales : une liste électorale nationale, pour élire le Président de la République et les députés ; une liste électorale dite référendaire, pour que les Calédoniens puissent se prononcer sur l’avenir de leur pays – par trois fois au cours du premier quinquennat du Président de la République, ils ont voté oui ou non à l’autodétermination comme cela était prévu par l’accord de Nouméa – ; une liste électorale provinciale, les provinces étant des régions disposant de plus de compétences que celles de l’Hexagone.

Ces trois listes électorales ne sont pas toutes concernées par la modification constitutionnelle que le Gouvernement propose : seule sera visée la liste électorale des élections provinciales.

Le Conseil d’État, dans son analyse sur l’accord de Nouméa, a en effet considéré que les dispositions électorales pour les élections provinciales, notamment le tableau des électeurs, étaient de nature constitutionnelle. C’est l’objet du texte complémentaire que le Gouvernement a déposé, qui est inscrit à l’ordre du jour des travaux de cette assemblée pour la fin du mois de mars, mais qui ne se comprend pas sans le report de la date des élections provinciales aujourd’hui soumis à votre examen, mesdames, messieurs les sénateurs.

L’accord de Nouméa a créé une citoyenneté calédonienne, complémentaire à la citoyenneté française. Cette citoyenneté calédonienne ne se traduit que par le droit de voter aux élections propres à la Nouvelle-Calédonie. Seules des personnes disposant de la citoyenneté calédonienne, au sens électoral du terme, peuvent voter pour élire, tous les cinq ans, les membres du congrès et des assemblées des trois provinces.

Concrètement, ce corps électoral est restreint : il compte aujourd’hui 178 000 inscrits, contre 221 000 pour la liste électorale générale, celle qui permet d’élire le Président de la République en Nouvelle-Calédonie.

En d’autres termes, en Nouvelle-Calédonie, un électeur sur cinq ne dispose pas du droit de suffrage aux élections locales. Cela concerne parfois des Calédoniens nés de parents calédoniens : ils ne peuvent pas voter à des élections qui décident pourtant de l’avenir économique, social ou culturel de leur territoire. Avouez que cette situation pose à tout le moins de graves problèmes démocratiques au regard des standards tant de la France que de tous les pays qui se revendiquent des démocraties.

En 1999, au moment où ces décisions ont été prises alors que Jacques Chirac était Président de la République, cet écart n’était que de 7 %. Il se creuse mécaniquement chaque année, le corps électoral provincial étant gelé depuis la révision constitutionnelle de 2007.

Cette déconnexion croissante entre le corps électoral spécial et le corps électoral général est un sujet politique majeur en Nouvelle-Calédonie. Le « dégel » du corps électoral est en effet la première des revendications du camp dit non indépendantiste, alors que le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), qui représente le camp dit indépendantiste, rappelle que le corps électoral restreint est une émanation de la citoyenneté calédonienne, consacrée par l’accord de Nouméa.

La question du corps électoral a également constitué pour le Gouvernement un sujet majeur de préoccupation depuis la reprise des négociations au mois de septembre 2022, que j’ai l’honneur de conduire sous l’égide du Président de la République. Elle a d’emblée été posée comme un fil rouge dans les négociations. On peut admettre qu’au nom de la citoyenneté calédonienne le droit de vote pour les élections provinciales soit restreint aux personnes solidement établies sur le territoire autonome de Nouvelle-Calédonie.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement ne vient pas vous demander de dégeler totalement le corps électoral pour les élections provinciales ; il accepte l’idée qu’un corps électoral soit restreint par rapport à ce qui existe dans les autres territoires ultramarins et, bien évidemment, sur le territoire hexagonal. Je signale que seule la Nouvelle-Calédonie connaît ce régime électoral spécifique ; nulle part ailleurs, y compris dans les autres territoires autonomes de la République, cela n’existe.

C’est donc avec la modération nécessaire que le Gouvernement, qui entend la préoccupation politique, symbolique et bien sûr électorale de chacun des partis politiques qui composent la Nouvelle-Calédonie et qui sont reconnus par la Constitution comme concourant à la démocratie, considère qu’après trois référendums d’autodétermination ayant conclu au maintien sans contestation de la Nouvelle-Calédonie dans la République française, il n’est plus acceptable, d’un point de vue tant juridique que politique, d’exclure systématiquement du suffrage tous les citoyens français qui se sont installés après 1998 sur le territoire – il y a plus de vingt-cinq ans ! – et de voir des Calédoniens nés en Calédonie ne pas pouvoir voter à des élections locales.

Dans ce contexte, le Gouvernement, puis le Chef de l’État lui-même à Nouméa, ont toujours affirmé leur intention de procéder à un dégel du corps électoral, puisque ce gel était la conséquence des dispositions transitoires prévues par l’accord de Nouméa et la réforme constitutionnelle de 2007 concernant des élections locales et le corps électoral local, en attendant les réponses des Calédoniens aux trois référendums qui étaient prévus et qui ont été organisés.

La démarche du Gouvernement procède d’une initiative unilatérale. Le Gouvernement a d’ailleurs prévenu depuis deux ans que, si un accord politique global n’était pas trouvé en Nouvelle-Calédonie, il n’avancerait pas sur d’autres sujets, par respect pour les parties prenantes.

Je pense par exemple à l’organisation des institutions en Nouvelle-Calédonie, qui mériterait d’être rénovée – ce territoire compte cinq institutions pour 270 000 habitants –, à la coexistence de trois codes de l’environnement, cette compétence dépendant des provinces, à la situation de la filière nickel, qui est plus que complexe et qui dépend des autorités calédoniennes. Que cinq institutions traitent d’un dossier comme l’économie ne permet sans doute pas la plus grande efficacité. Je pense aussi aux simplifications qu’il peut être utile d’apporter à toute institution démocratique.

Un autre sujet concerne les modalités de l’autodétermination. Même si aucun référendum ne sera organisé dans les années qui viennent, il est évident que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes figure dans la Constitution. Le Gouvernement l’a toujours garanti et il faut désormais mettre en place des modalités pour appliquer ce droit, même si cela doit se faire à l’échelle de plusieurs générations.

Il ne faut pas sous-estimer les difficultés de ces discussions locales. Au bout de deux ans de discussions – j’ai moi-même fait sept déplacements en Nouvelle-Calédonie au cours de ces deux dernières années –, cet accord local n’existe pas encore. Pour autant, nous sommes confiants et pensons que, grâce à l’action des acteurs locaux, quels qu’ils soient, un tel accord se dégagera.

Le Gouvernement propose donc de maintenir les élections provinciales, quitte à les décaler de quelques mois – en démocratie, il faut tenir à peu près à l’heure les échéances électorales. Mais nous devons surtout permettre aux électeurs qui sont nés sur un territoire depuis plus de vingt-quatre ans de voter aux élections locales.

Malgré des discussions constructives tout au long de l’année 2023, nous avons constaté au début de l’année 2024 qu’aucun accord définitif n’est pour l’instant prévu entre le FLNKS, qui considère peut-être que rien ne presse, et les partis dits loyalistes ou non indépendantistes. C’est pourquoi le Gouvernement n’a pas enclenché de révision constitutionnelle globale.

Le Gouvernement a donc pris ses responsabilités et vous propose, d’une part, le report des élections provinciales – c’est l’objet de ce projet de loi organique –, d’autre part, le dégel à dix ans du corps électoral pour pouvoir organiser ces élections provinciales – ce sera l’objet du projet de loi constitutionnelle.

Le gel du corps électoral n’est conforme ni aux principes essentiels de la démocratie ni aux valeurs de la République. C’est une position politique que l’État assume depuis très longtemps et pas seulement une préoccupation d’ordre juridique. Chacun en conviendra, la vie démocratique et la continuité des institutions ne peuvent s’interrompre éternellement faute d’un accord local.

Il ne s’agit pas pour le Gouvernement de changer la façon dont les électeurs pourraient choisir leur avenir institutionnel. Il ne s’agit pas non plus pour lui d’imposer de nouvelles dispositions sans que les partis en soient d’accord. Il s’agit d’autoriser les Calédoniens à choisir leurs élus locaux – je parle ici devant la Haute Assemblée – dans des conditions au minimum conformes à celles d’une démocratie qui se respecte.

Le Gouvernement propose donc dès aujourd’hui le report des élections provinciales à une date que l’on pourrait qualifier de raisonnable, à savoir le 15 décembre 2024, pour donner aux négociations politiques locales une chance d’aboutir, tout en permettant l’adoption de la révision constitutionnelle permettant le dégel du corps électoral dans l’hypothèse où ces négociations n’aboutiraient pas. Le Conseil d’État a considéré que ce report constituait un motif d’intérêt général.

Lors de mon audition par la commission des lois, j’ai entendu les doutes de M. le rapporteur sur la capacité réelle du Gouvernement à convoquer des élections dans les temps.

Tout d’abord, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous rappelle que le congrès de la Nouvelle-Calédonie est lui-même en faveur de cette date, tout comme l’est une partie des indépendantistes qui le composent, puisque ce texte a été approuvé par trente-huit voix contre seize en janvier dernier.

Techniquement, l’État est en mesure de tenir cette échéance. Le projet de décret pour réviser les listes électorales est prêt. Il est même dans mon dossier et à votre disposition. (Ah ! sur de nombreuses travées.)

M. Rachid Temal. On veut bien le voir !

M. Gérald Darmanin, ministre. M. le haut-commissaire, à qui j’ai rendu visite voilà encore quelques jours, et ses services sont en ordre de bataille pour procéder aux opérations techniques dès l’entrée en vigueur du dispositif, c’est-à-dire dès que le Parlement aura voté cette disposition.

La responsabilité du calendrier relève donc d’abord du Parlement et de la capacité des deux chambres à voter conforme le texte constitutionnel. Le Gouvernement a fait son travail et il est tout à fait prêt à tenir les élections au plus tard le 15 décembre 2024.

Le groupe SER a pris par deux fois l’initiative de déposer un amendement visant à repousser la nouvelle date du scrutin au second semestre 2025, au regard de la nécessité de laisser davantage de temps pour qu’un accord soit conclu.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’entends votre préoccupation de ne rien vouloir brusquer, elle est tout autant la mienne que celle du Gouvernement. Il est vrai que, pour une discussion locale, un délai de trois ans peut sembler bien trop court… (Sourires sur les travées du groupe RDPI.)

Si le Gouvernement propose le report au 15 décembre 2024, un décret – c’est ce qu’a précisé le Conseil d’État – permettra de reporter de plusieurs mois en 2025 les élections provinciales. Le ministre de l’intérieur que je suis, sous l’autorité du Président de la République, se réserve donc le droit de repousser par ce biais la date des élections locales, sans convoquer une nouvelle fois les assemblées sur cette importante question, si jamais un accord était près d’aboutir.

Il me semble cependant important qu’au bout de trois ans de discussions les Calédoniens puissent choisir leurs responsables locaux, alors même que la Nouvelle-Calédonie connaît des difficultés économiques extrêmement fortes, notamment dans le secteur du nickel, secteur pourvoyeur de plus de la moitié des emplois directs et indirects en Nouvelle-Calédonie.

Il n’est plus temps de procrastiner. Il nous faut pousser les uns et les autres à fixer une échéance précise pour que chacun puisse s’organiser, qu’une campagne électorale puisse se tenir, que l’expression des suffrages puisse être entendue, comme c’est normal en démocratie, et que le Gouvernement comme les acteurs économiques aient en face d’eux des responsables politiques légitimes capables de prendre des décisions, d’engager des investissements et de sauver – peut-être – des emplois par milliers.

Je rappelle que le gouvernement autonome de Nouvelle-Calédonie gère les sujets sociaux. En d’autres termes, c’est par les cotisations payées par les Calédoniens eux-mêmes que la protection sociale et sanitaire des habitants de Nouvelle-Calédonie est assurée. Moins d’emplois veut dire moins de cotisations sociales, donc moins de protection sociale.

Veillons par conséquent à ce que la procrastination politique n’emporte pas de conséquences négatives fortes sur la vie quotidienne des Calédoniens.

Le Gouvernement est animé de l’envie de rassurer tous les acteurs et de la volonté de discuter. Pour autant, nous ne pouvons pas reporter aux calendes grecques ces élections provinciales : la date du 15 décembre 2024, qui représente quasiment un report de neuf mois, ou le mois de novembre 2025, si le ministre de l’intérieur prend un décret en ce sens, ce qui convoquerait les électeurs plus d’un an et demi après les élections locales, nous paraît raisonnable en termes de négociation politique.

Je ne sais pas si beaucoup d’élus hexagonaux accepteraient que l’on reporte d’un an et demi les élections locales, qui plus est si des électeurs nés depuis vingt-quatre ans sur le territoire concerné par ces élections ne pouvaient pas voter. Cela donnerait certainement lieu à des discussions d’une autre nature, monsieur le président de la commission des lois…

Le Gouvernement reste ouvert à la discussion et, comme l’a indiqué le Président de la République, se dit prêt, grâce à un mécanisme à double détente, si je puis m’exprimer ainsi, à suspendre le processus constitutionnel si un accord plus global entre les partis indépendantistes et non indépendantistes était sur le point d’aboutir. Personnellement, c’est le vœu que je forme à cette tribune.

D’ailleurs, si un accord global, et pas seulement un accord sur la question électorale, était trouvé par les partis, le Gouvernement le prendrait comme tel et le présenterait devant les assemblées, puis devant le Congrès à Versailles, jouant alors le rôle d’arbitre qui est le sien.

Le Gouvernement de la République n’a pas ménagé ses efforts pour créer les conditions d’une négociation entre toutes les parties depuis la convention des partenaires au mois de novembre 2022. Nous ne pouvons que nous féliciter qu’un dialogue local entre les deux camps ait enfin pu s’établir, comme le démontre le communiqué de presse de l’ensemble des parties publié voilà plusieurs semaines.

À ma connaissance, ces discussions sont actuellement suspendues jusqu’à la fin du mois de mars prochain, dans l’attente de la réunion du FLNKS. Toutefois, certains acteurs que j’ai pu rencontrer sur place et que j’ai même eus encore tout récemment au téléphone évoquent la reprise de ces négociations. Ce calendrier est compatible avec l’examen du projet de loi organique à l’Assemblée nationale, qui aura lieu le 13 mai prochain, mais aussi avec la discussion par le Sénat du projet de loi constitutionnelle prévue dans les semaines qui viennent.

À la suite de mon dernier déplacement en Nouvelle-Calédonie, je reste optimiste, même si la prudence est de mise. Ce projet de loi organique prévoit le report des élections provinciales pour laisser le temps à la discussion locale, mais nous voulons aussi, à l’issue des trois référendums prévus par l’accord de Nouméa, réparer une injustice en permettant à de jeunes Calédoniens qui, depuis vingt-quatre ans, vivent sur cette terre de voter pour leurs élus locaux.

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, tel est l’objet de la proposition du Gouvernement, dont j’espère qu’elle sera votée par votre assemblée, en attendant sa discussion à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par rappeler l’attachement du Sénat à la Nouvelle-Calédonie et exprimer sa profonde estime pour tous les Calédoniens, qui ont su, dans l’histoire de la République, trouver entre eux des accords leur permettant de construire le présent et l’avenir du territoire.

Aujourd’hui, il nous faut traiter d’une question qui paraît anodine, mais qui ne l’est pas, à savoir la date des élections provinciales et du renouvellement des membres du congrès de Nouvelle-Calédonie. Derrière la demande que nous fait le Gouvernement se cache toute la question de l’organisation de la vie démocratique de la Nouvelle-Calédonie. Il y a, d’un côté, la démocratie calédonienne qu’il faut organiser et que l’on ne peut pas suspendre et, de l’autre, l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.

Sur la démocratie calédonienne dont nous avons à débattre, le texte paraît simple : il s’agit de reporter les élections. Pour quelle raison ? Si elles n’étaient pas reportées, ces élections devraient se dérouler sur le fondement d’une liste électorale qui écarte aujourd’hui 19,3 % des électeurs en âge de voter en Nouvelle-Calédonie, contre seulement 7,5 % d’entre eux lorsque cette liste a été constituée. Pour accepter cette dérogation au principe de l’égalité de suffrage qui figure à l’article 3 de la Constitution, le constituant s’était appuyé sur cette donnée objective initiale.

Alors même que le processus juridique de transition qui a été amorcé par l’accord de Nouméa et organisé en application de cet accord par une révision constitutionnelle est achevé, cette nouvelle proportion pose évidemment problème.

Je ne discuterai pas ici du problème de principe : après tout, dans le passé, on a admis que les Calédoniens, par un accord passé entre eux, puissent proposer des dérogations à l’égalité de suffrage. En revanche, cela pose un problème de régularité des élections, celles-ci devant normalement se tenir au plus tard au mois de mai prochain.

Quoi que l’on pense des arrangements qui ont été trouvés dans le passé et de leur devenir, il faut bien que des élections soient organisées. Si elles l’étaient sur le fondement de la liste actuelle, ne doutez pas un seul instant, mes chers collègues, que le décret de convocation des électeurs serait attaqué…

M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr !

M. Philippe Bas, rapporteur. … et que, si les élections se déroulaient, leurs résultats seraient contestés avec des arguments solides. Naturellement, ce n’est pas à la tribune du Sénat que doit être évaluée l’appréciation que pourrait en faire le juge des élections ; reste qu’il n’y a guère de doute que cette étape démocratique se terminerait dans des conditions extrêmement douloureuses.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement nous propose de modifier la liste, tout en indiquant préférer que cela se fasse sur le fondement d’un accord. Néanmoins, il dépose à titre supplétif un projet de loi constitutionnelle visant à modifier la liste électorale, de sorte que celle-ci puisse se rapprocher de l’inscription de l’ensemble des Français en âge de voter, sans tout à fait atteindre ce périmètre.

Aussi, pour que l’on ait le temps soit d’adopter une révision constitutionnelle, soit de permettre la conclusion d’un accord qui serait ensuite traduit par des textes constitutionnel et organique, il est nécessaire de reporter les élections.

Ce n’est tout de même pas une bien grande affaire que de reporter les élections dans une collectivité territoriale ! Nous avons de nombreux précédents, qui ont permis au Conseil constitutionnel de définir les conditions d’un tel report.

Il faut déjà un motif d’intérêt général. En l’espèce, il est tout trouvé. L’organisation d’élections d’ici au mois de mai prochain sur les bases actuelles entraînerait de très graves désordres du point de vue tant juridique que de la libre expression du suffrage universel. Il paraît impossible de contester ce motif.

Il faut par ailleurs que la durée de la prolongation soit raisonnable. Une discussion a eu lieu à ce propos. Après tout, le ministre est chef de son administration et, s’il nous assure que son administration est capable d’organiser un scrutin d’ici au 15 décembre prochain sur le fondement de nouveaux textes qui lui permettront de constituer la liste électorale,…

M. Gérald Darmanin, ministre. Oui !

M. Philippe Bas, rapporteur. … quelles raisons aurais-je d’en douter ? Qui plus est, si celle-ci n’y parvenait pas ou s’il y avait des motifs heureux, par exemple un accord, entraînant la nécessité de reporter une nouvelle fois les élections, nous serons là, monsieur le ministre. (M. le ministre acquiesce.)

Je tiens tout de même à vous dire que nous préférons que le Gouvernement n’évince pas le Parlement, qui trouve un intérêt à soutenir ses démarches dans la mesure où il peut ainsi en vérifier le bien-fondé. Cette question ne se posera que dans quelques semaines et nous aurons alors l’occasion d’en débattre.

Pour ce qui me concerne, je considère, d’une part, que la condition liée au motif d’intérêt général du report des élections est remplie, puisque l’on ne peut pas organiser ces dernières sur les bases actuelles, d’autre part, que la date du 15 décembre n’est pas trop éloignée. Elle pourrait, pour des raisons administratives, paraître trop proche, mais c’est votre affaire, monsieur le ministre ! Je suis trop soucieux de la séparation des pouvoirs pour faire reproche au Gouvernement de montrer un certain volontarisme ; que celui-ci me laisse sceptique ou non n’a en vérité aucune importance.

Cette première étape sera suivie d’une autre, autrement plus importante, puisqu’il nous faudra nous prononcer au travers d’un projet de loi constitutionnelle non plus sur le report des élections, mais sur la détermination du corps électoral. Cela peut paraître surprenant, car, pour l’intégralité des élections concernant les collectivités territoriales, il n’est pas besoin de recourir à une disposition de nature constitutionnelle.

En Nouvelle-Calédonie, on veut continuer à déroger à l’application stricte de l’égalité de suffrage, en se fondant sur l’entente consacrée par l’accord de Nouméa. Une cote mal taillée consisterait à accepter que tous les natifs soient inscrits et à y ajouter les Français se trouvant depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie. Ce nouveau collège électoral ne représenterait donc pas tous les électeurs présents en Nouvelle-Calédonie. Le Gouvernement nous proposera de ce fait une option intériorisant un compromis qui ne s’est pas encore noué entre les parties calédoniennes.

Monsieur le ministre, forts d’une longue expérience d’évolutions de la Nouvelle-Calédonie décidées par la négociation entre les Calédoniens sous l’égide de l’État, nous continuons de préférer cette formule. C’est pourquoi j’ai qualifié la révision constitutionnelle, sans faire offense à notre loi fondamentale, de « méthode supplétive ».

Nous souhaitons évidemment – tel est le cas de la commission des lois – pouvoir aboutir très rapidement à un accord en Nouvelle-Calédonie de sorte que nous puissions avancer sur le fondement d’un consensus plutôt qu’en nous appuyant sur une démarche que vous avez vous-même qualifiée d’« unilatérale » et qui ne peut constituer que la dernière option, à défaut de toutes les autres.

Voilà ce que je tenais à vous dire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – MM. Olivier Bitz, Patrick Kanner et Hervé Marseille applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Corinne Narassiguin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a maintenant plus de trente-cinq ans, la Nouvelle-Calédonie était au bord de la guerre civile. Michel Rocard, alors Premier ministre, et Louis Le Pensec, alors ministre des départements et territoires d’outre-mer, devaient relever des défis majeurs : ramener la paix, renouer les liens de la confiance et engager un mouvement de décolonisation pacifique et viable.

Les accords de Matignon en 1988, puis l’accord de Nouméa en 1998 ont été de grands tournants pour maintenir la paix civile après le drame d’Ouvéa, puis l’assassinat de Jean-Marie Tjibaou.

Si la situation avait atteint un tel paroxysme, c’est en partie à cause de la marginalisation politique et économique des Kanaks, mais aussi, et surtout, en raison des manquements à la parole donnée par la France.

En 2008, dans une tribune commune, Michel Rocard et Lionel Jospin écrivaient : « Au terme du processus, entre quinze et vingt ans après la signature de l’accord de Nouméa, soit entre 2014 et 2018, la Nouvelle-Calédonie disposera donc de la quasi-totalité des compétences et des attributs de la souveraineté, et ses citoyens seront appelés à se prononcer pour savoir s’ils souhaitent le transfert des dernières compétences exercées par l’État. Cette construction originale doit permettre de bâtir un destin commun pour cette population pluriethnique, constituée du peuple d’origine et de ceux qui, depuis un siècle et demi, s’y sont installés durablement. Ce destin commun s’affirmera, soit dans la République française, soit dans un pays dont les liens avec la France seront à définir. »

Le processus engagé par l’accord de Nouméa et les trois consultations portant sur l’accession à la pleine souveraineté sont arrivés à leur terme le 12 décembre 2021, même si la troisième consultation pose de nombreux problèmes en termes d’organisation, de participation et donc de légitimité. Le Gouvernement s’est entêté à maintenir cette troisième consultation, sortant alors de sa neutralité et provoquant ainsi une période de blocage.

Il est clair que les élections provinciales qui doivent se dérouler entre le 12 avril et le 12 mai 2024 ne peuvent pas avoir lieu avec les listes électorales actuelles, qui excluent de trop nombreux Calédoniens. À l’issue de leurs travaux, François-Noël Buffet, Philippe Bas, Jean-Pierre Sueur et Hervé Marseille, rapporteurs de la mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, avaient préconisé le report des élections s’il s’avérait impossible de procéder autrement.

Dès lors, nous approuvons dans son principe le report des élections et nous proposerons même la date du 30 novembre 2025 au lieu du 15 décembre 2024. Il s’agirait alors d’un report de dix-huit mois, une telle durée, acceptable selon l’avis du Conseil d’État, nous semblant beaucoup plus adaptée pour laisser du temps aux discussions en cours.

En effet, le consensus politique doit être la priorité absolue. Un accord global entre les parties doit être trouvé, afin de permettre à la Nouvelle-Calédonie de disposer d’un cadre institutionnel stable au cours des prochaines décennies. Cela passera par la réforme du corps électoral, mais aussi par la confirmation du droit à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, par l’amélioration de la répartition entre les collectivités des compétences et par le renforcement de ces dernières.

Les discussions entre les parties ont repris officieusement en ce sens en septembre 2023 lors de la rencontre entre les loyalistes et les indépendantistes à Bourail et grâce à la démarche constructive de l’UNI-Palika. C’est une bonne nouvelle, car le dialogue demeure le seul chemin viable pour parvenir à un accord politique pérenne.

Compte tenu de la reprise du dialogue, nous ne comprenons pas la pression qu’exerce le Gouvernement en liant le présent projet de loi organique à un projet de loi constitutionnelle, qui sera examiné dans quelques semaines et risque de compromettre les discussions en cours.

Nous proposerons également un amendement visant à réaffirmer l’impartialité et le rôle moteur de l’État dans les discussions. Rappelons ici que la nomination au Gouvernement de Sonia Backès fut un très mauvais signal.

De plus, présenter un projet de loi partiel, ayant pour seul objet l’élargissement du corps électoral, risque de compromettre toutes les chances d’aboutir à un accord global et de cristalliser les antagonismes.

Pour terminer, je citerai de nouveau les mots de Michel Rocard et de Lionel Jospin : « Plus que jamais, il faut parler, diagnostiquer sans complaisance les injustices qui persistent et y porter remède, rechercher ce qui rassemble et discuter de ce qui divise. L’État, partenaire politique des accords, en charge de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, doit assurer une mission permanente de dialogue. Il ne doit pas relâcher ses efforts et sa vigilance. […] La question calédonienne est d’intérêt national. Il y va de la position de notre pays dans le Pacifique et de l’honneur de la France, qui doit rester fidèle à la parole donnée. » (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Georges Naturel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique qui nous est aujourd’hui soumis est clair et répond aux demandes que l’ensemble des forces loyalistes calédoniennes formule depuis plusieurs mois. Il vise à reporter au plus tard au 15 décembre 2024 les élections des membres du congrès et des assemblées de province en Nouvelle-Calédonie.

Nous aurions certes préféré respecter le calendrier électoral initial. Ces élections auraient dû en effet se tenir dans moins de trois mois, soit au mois de mai prochain. Néanmoins, la réalité de la situation politique calédonienne nous impose ce report pour que ces élections respectent des exigences démocratiques fondamentales.

Il est en effet impossible que les électeurs calédoniens renouvellent les assemblées des trois provinces – la province Nord, la province Sud et celle des îles Loyauté –, ainsi que le congrès, sans que l’on ait réglé préalablement la question du droit de vote en Nouvelle-Calédonie.

Cela a été dit, plus de 42 000 électeurs calédoniens sont aujourd’hui exclus du corps électoral provincial, sur un total de 221 000 électeurs. Près de 20 % des électeurs seraient donc privés du droit de vote lors des élections provinciales si elles avaient lieu au mois de mai prochain avec un corps électoral gelé dans les conditions actuelles. Vous admettrez que cette situation serait inacceptable au regard des exigences démocratiques de notre République !

Parmi ces 42 000 citoyens français ainsi privés du droit de vote aux élections provinciales, certains vivent en continu depuis vingt-cinq ans en Nouvelle-Calédonie. Le droit de vote leur est refusé, car ils se sont installés après novembre 1998, date à laquelle le corps électoral provincial a été vitrifié.

Parmi eux, certains ont aujourd’hui entre 18 et 25 ans. Ils sont nés et ont vécu toute leur enfance en Nouvelle-Calédonie. Leur avenir se situe clairement dans ce territoire. Pourtant, ils ne pourraient pas participer aux élections provinciales, pour une simple et unique raison : leurs parents se sont installés en Nouvelle-Calédonie après novembre 1998, date à partir de laquelle le corps électoral a été gelé, les nouveaux arrivants et leurs descendants ne pouvant en faire partie.

La prolongation de sept mois, soit jusqu’à la fin de cette année, du mandat des assemblées actuelles vise donc à nous laisser suffisamment de temps pour réviser la Constitution et mettre fin au gel du corps électoral provincial.

Certains partis indépendantistes approuvent également ce report. Consulté sur ce projet de loi organique, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a émis, à une large majorité, un avis favorable.

Les Calédoniens, dans leur très grande majorité, veulent que les assemblées locales soient renouvelées sans tarder, afin de renforcer leur légitimité démocratique. C’est pourquoi je serai opposé à l’amendement déposé par nos collègues socialistes, qui vise à reporter les élections provinciales jusqu’en novembre 2025.

Depuis mai 2019, la Nouvelle-Calédonie vit une situation politique paradoxale. Elle est dirigée au congrès et au gouvernement par une majorité indépendantiste, alors même que, à trois reprises – en 2018, en 2020 et en 2021 –, lors des consultations référendaires d’autodétermination, les Calédoniens se sont largement exprimés en faveur du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la République.

La détérioration économique particulièrement grave que connaît notre territoire, au regard notamment de la situation de sa filière nickel, impose des décisions fortes qui ne peuvent être prises que par des assemblées relégitimées par le suffrage universel des Calédoniens.

Il est donc urgent, monsieur le ministre, que se tiennent de nouveau des élections et que le délai maximal du 15 décembre 2024 soit tenu. Il faut, mes chers collègues, prendre la mesure de l’importance d’un report de ces élections.

Je vous invite donc à accueillir favorablement ce projet de loi organique, indispensable pour la Nouvelle-Calédonie, dans la version qui nous est proposée par la commission et à l’adopter avec la majorité la plus large possible. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Nouvelle-Calédonie, communément appelée « le Caillou », peut nous sembler lointaine, mais elle s’est prononcée trois fois d’affilée en faveur de son maintien dans la République.

En matière de biodiversité, elle abrite 80 % d’espèces végétales endémiques, ce qui la classe, rapporté à sa superficie de 18 575 kilomètres carrés, première au monde en matière d’endémisme. Elle constitue aussi une zone économique exclusive de 1,3 million de kilomètres carrés et un espace géographique de grande importance stratégique pour notre pays.

D’un point de vue juridique, la Nouvelle-Calédonie bénéficie d’un statut sui generis régi par le titre XIII de la Constitution et la loi organique du 19 mars 1999.

De par son statut particulier, elle dispose d’un partage de souveraineté avec l’État, bien que cette notion fasse l’objet d’un débat doctrinal parmi les juristes. Elle bénéficie de ses propres institutions : un congrès, un sénat coutumier et même un gouvernement. Elle jouit aussi d’une autonomie partielle et peut ainsi voter des lois du pays dans certains domaines énumérés par la loi organique qui détermine son statut.

Cette année 2024 est particulièrement importante pour la Nouvelle-Calédonie. En effet, deux projets de loi lui seront consacrés : un projet de loi constitutionnelle visant à modifier le corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province, qui sera examiné au mois de mars au Sénat, et un projet de loi organique visant à reporter les élections de ces mêmes institutions.

Je ne m’attarderai pas sur le premier projet de loi, dont nous aurons l’occasion de débattre pleinement dans cet hémicycle dans quelques semaines. J’espère encore qu’un accord pourra être trouvé entre les acteurs politiques locaux, dans l’intérêt de tous les Calédoniens et, plus largement, de notre démocratie.

Le second projet de loi porte sur les élections qui devaient se tenir en mai prochain. Il vise à les reporter au plus tard au 15 décembre de cette année.

Avec le texte que nous examinons aujourd’hui, nous sommes appelés à répondre à la question suivante : devons-nous, oui ou non, reporter les élections des membres du congrès et des assemblées de province ? M. le ministre et M. le rapporteur nous ont clairement expliqué la nécessité de ce report : la tenue de ces élections constituerait un déni de démocratie tout à fait insupportable.

D’un point de vue juridique, il s’agit de savoir si les conditions nécessaires sont réunies afin de procéder à ce report. La réponse est oui : selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, un tel report doit être limité, exceptionnel et motivé par un objectif d’intérêt général. Je ne m’attarde pas sur ce point, le rapporteur nous ayant parfaitement expliqué en quoi le texte satisfaisait à ces conditions.

D’un point de vue plus politique, presque moral, la question se pose de savoir si un tel report est légitime et nécessaire. Sur ce point, le fait est qu’il n’apparaît plus légitime aujourd’hui de procéder à des élections en Nouvelle-Calédonie sans réinterroger au préalable la composition du corps électoral.

Je le rappelle, celui-ci a été restreint en 1998 à la suite de l’accord de Nouméa. Le corps électoral a ensuite été tout bonnement gelé lors de la révision constitutionnelle de 2007.

En 1998, nous étions tout juste dix ans après le drame d’Ouvéa. Vingt-cinq ans plus tard, le contexte et l’évolution démographique nous éloignent encore davantage de ce qui avait alors justifié une dérogation à certains principes constitutionnels.

Surtout, les conditions fixées par l’accord de Nouméa et qui devaient conduire à réinterroger la composition du corps électoral ont été satisfaites. Je pense notamment aux trois référendums sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie qui ont eu lieu en 2018, en 2020 et en 2021. Il est donc désormais nécessaire et légitime d’avoir ce débat, lequel devra cette année trouver une issue afin que les élections puissent se tenir.

Reporter les élections en 2025 ne me semble pas raisonnable. Je pense que nous avons perdu suffisamment de temps. La Nouvelle-Calédonie est en souffrance économique et sociale et ses habitants ont besoin d’être rassurés. J’espère que, avec ce report et le projet de loi constitutionnelle que nous examinerons au mois de mars, nous pourrons leur apporter rapidement des réponses afin que la Nouvelle-Calédonie puisse avancer dans la sérénité et dans l’unité. Elle en a bien besoin.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce projet de loi, tel qu’il a été adopté par la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Hervé Marseille. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par les accords de Matignon du 26 juin et du 20 août 1988 et l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, la Nouvelle-Calédonie s’est engagée dans un processus unique, négocié et ensuite constitutionnalisé, d’émancipation au sein de la République française.

Depuis de nombreuses années, la Chambre haute a multiplié les initiatives pour permettre un suivi attentif du dossier calédonien : création d’une mission d’information dont j’ai eu l’honneur d’être l’un des rapporteurs ; mise en place d’un groupe de contact spécifique présidé par le président du Sénat, Gérard Larcher – cela témoigne de l’importance, comme l’a rappelé le rapporteur, que nous attachons au sujet – ; nombreux rendez-vous avec les autorités et les groupes politiques calédoniens.

Nous sommes arrivés aujourd’hui au bout du chemin engagé il y a trente-cinq ans. Les Calédoniens ont choisi de demeurer au sein de la République à trois reprises.

Toutefois, nous devons noter que l’expression d’une majorité s’est érodée au fil des consultations et que le troisième référendum a fait l’objet d’une abstention massive, à hauteur de 56 % du corps électoral, le FLNKS ayant décidé de ne pas y participer.

Eu égard à l’histoire du pays, d’une part, et aux résultats des consultations d’autodétermination, d’autre part, nous devons, en tant que responsables politiques, redoubler d’humilité et de sens des responsabilités.

L’accord de Nouméa prévoit qu’en cas de réponse négative à la question posée, « les partenaires politiques se réuniront pour examiner la situation ainsi créée ». C’est le processus qu’a engagé le Gouvernement ces deux dernières années, avec des fortunes diverses.

Aujourd’hui, le dialogue entre l’État et les indépendantistes est – hélas ! – quasiment rompu : l’Union calédonienne, principale formation politique du FLNKS, a décidé de ne plus participer à aucune rencontre et l’Union nationale pour l’indépendance (UNI) de Paul Néaoutyine a précisé que ses représentants étaient susceptibles de se retirer des discussions si la situation n’évoluait pas d’ici à la fin du mois de mars. Cette formation, pourtant traditionnellement très constructive, a même indiqué que la situation actuelle pourrait « ranimer une situation insurrectionnelle dans le pays ».

Différentes initiatives politiques ont été prises par ailleurs par les non-indépendantistes afin de renouer le dialogue avec les indépendantistes sans la présence de représentants de l’État.

Je pense notamment à celle prise par Calédonie ensemble – formation dont fait partie notre ancien collègue Gérard Poadja –, accompagné par l’UNI, qui a abouti à un document intitulé Propositions de convergences pour un grand accord. Une autre initiative a été engagée par les loyalistes, dont les résultats demeurent pour l’heure inconnus.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement a déposé deux textes : un projet de loi organique tendant à repousser la date des élections provinciales et un projet de loi constitutionnelle visant à faire évoluer la composition du corps électoral spécial pour les élections provinciales.

Le projet de loi organique que nous examinons aujourd’hui est un texte assez simple, « anodin » comme l’a dit le rapporteur, qui prévoit de reporter les élections provinciales à une date non précisée, au plus tard le 15 décembre 2024.

Ce texte a recueilli l’avis favorable d’une large majorité transpartisane du congrès, même si les groupes indépendantistes et non indépendantistes souhaitent ce report pour des raisons différentes.

Le second texte, de nature constitutionnelle, concerne le corps électoral spécial et son dégel. Ce sujet occupe une place centrale dans les discussions en cours, puisque c’est ce corps électoral spécial, issu de l’accord de Nouméa et gelé depuis 2007, qui sera amené à participer aux prochaines élections provinciales.

Or les évolutions démographiques sur l’île sont telles que, si les personnes exclues de cette liste représentaient près de 7,5 % des électeurs en 1999, elles sont aujourd’hui 19,3 %, soit presque un cinquième des électeurs.

Dans son avis du 7 décembre 2023, le Conseil d’État a rappelé qu’il était nécessaire de revenir à un corps électoral provincial glissant, les dispositions actuelles comportant « des dérogations aux principes d’universalité et d’égalité du suffrage » qu’il convient de modifier afin « d’en corriger le caractère excessif résultant de l’écoulement du temps ».

Le dépôt d’un texte constitutionnel ne traitant que de la question du dégel du corps électoral spécial, que le Sénat devrait examiner à la fin du mois de mars, est loin de faire l’unanimité, contrairement au report que nous examinons aujourd’hui.

Il s’agit d’une solution « partielle et unilatérale », qui, au lieu d’aiguillonner le dialogue entre les différentes parties prenantes, comme vous l’aviez évoqué en commission, monsieur le ministre, va au contraire contribuer à aggraver les tensions.

Il nous semble en conséquence opportun de nous interroger sur la temporalité envisagée pour l’examen de ce texte, d’autant plus que le report des élections proposé par le Gouvernement doit donner aux différentes parties plus de temps pour parvenir à un accord sous l’égide de l’État, à un consensus s’inscrivant dans un cadre républicain et démocratique.

Le cadre républicain, c’est l’accord de Nouméa qui a été constitutionnalisé et approuvé par 72 % des Calédoniens. Il doit constituer le plancher de ce nouveau consensus.

Le cadre démocratique, c’est le résultat des consultations référendaires, l’expression de la souveraineté du peuple calédonien sur son avenir, qui doit en constituer le plafond.

La mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie avait d’ailleurs souhaité que les différents sujets institutionnels ne soient pas traités de manière isolée, en silos, et avait marqué sa nette préférence pour un accord global.

Cette position est également celle du Conseil d’État, qui considère que la recherche du consensus, poursuivie depuis vingt-cinq ans par les gouvernements successifs constitue une donnée fondamentale de l’élaboration de l’organisation politique qui prendra la suite de celle issue de l’accord de Nouméa.

Les heurts qui se sont déroulés la semaine dernière ont constitué un exemple, si besoin en était, du contexte particulièrement préoccupant sur l’île.

Le groupe Union Centriste votera évidemment le projet de loi organique qui nous est présenté aujourd’hui.

Pour autant, nous appelons de nos vœux, monsieur le ministre, une nouvelle initiative. Nous savons que vous êtes déjà beaucoup engagé sur ce sujet, mais comme on dit à Tourcoing, « yes, you can » ! (M. le ministre sourit.) Une telle initiative devra permettre de construire un accord, dans le prolongement de la poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, dans le respect des principes de liberté, d’égalité et de fraternité, sur cette « terre de parole, terre de partage », puisque telle est la devise de la Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Bitz applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Mélanie Vogel. Alors que l’accord de Nouméa a ouvert la voie à un processus de décolonisation qui doit in fine pouvoir aboutir à une réelle mise en œuvre de l’autodétermination néo-calédonienne, la Nouvelle-Calédonie demeure traversée par de profondes inégalités dans tous les domaines. Ces inégalités sont le miroir de l’histoire coloniale. On constate ainsi un décrochage scolaire beaucoup plus important parmi les élèves dont la langue maternelle n’est pas le français, mais aussi des inégalités en termes de revenus ou d’occupation des postes à responsabilité dans l’économie – et j’en passe.

Ces problèmes ne peuvent évidemment pas être résolus dans le cadre du statut actuel, qui a toujours été conçu, nous le savons, comme transitoire. Vingt-cinq ans après la signature de l’accord de Nouméa, il est temps que ce statut évolue. C’est pourquoi les négociations en cours réunissant tous les acteurs locaux et l’État sont essentielles.

Dans l’esprit de la démocratie consociative, qui a permis de bâtir des ponts sur les fractures profondes, ces échanges doivent permettre un accord de long terme sur un nouveau statut : ils seront inclusifs ou ils ne seront pas ; ils se feront au rythme des acteurs concernés ou ils échoueront.

Le Gouvernement a décidé de ne pas reporter le troisième référendum et insisté pour l’organiser en plein covid-19 alors que les indépendantistes demandaient son report, que la pandémie touchait, de manière inégale par rapport au reste de la société, les Kanaks, en particulier les personnes les plus marginalisées, et que d’autres scrutins ont été reportés du fait du covid-19 – j’ai moi-même été élue dans le cadre d’un scrutin reporté d’un an à cause de la pandémie du covid-19. Cette décision a fait mal au processus en cours.

À l’époque, le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, avait déclaré : « En démocratie, les élections se tiennent à l’heure. » Deux ans plus tard, constatant l’échec de la stratégie de l’entêtement, le Gouvernement propose de lui-même un report des élections en Nouvelle-Calédonie, ce report ne faisant pas consensus sur place.

Tel est le contexte, difficile, dans lequel ce projet de loi nous est soumis. Certes, des circonstances exceptionnelles peuvent justifier le report d’un scrutin, le Conseil constitutionnel est extrêmement clair à ce sujet.

Mais le report qu’il nous est proposé de voter, ainsi que sa durée, ne résulte malheureusement pas d’une évaluation objective, ni du contexte, ni des circonstances exceptionnelles, lesquelles, nous le reconnaissons, existent bel et bien.

Le plan du Gouvernement est de pousser à ce que des négociations sur un nouveau corps électoral aient lieu en sept mois ou bien d’imposer une modification qu’il aura lui-même choisie. Cette proposition de loi, compte tenu de la manière dont elle nous est soumise et du moment où elle nous est présentée, est de nature à déstabiliser les négociations, dans un contexte déjà fragile.

Oui, c’est vrai, cela a été dit, un cinquième des habitantes et des habitants de la Nouvelle-Calédonie serait exclu du scrutin s’il avait lieu selon les règles actuelles. Oui, il s’agirait d’une atteinte manifeste au principe du suffrage universel. Oui, pour des raisons objectives – le temps passe ! –, cette situation, si elle n’est pas réglée, ne peut mathématiquement qu’empirer.

Donc oui, encore oui, cette situation doit évidemment évoluer, mais cette évolution doit impérativement être négociée avec tous les acteurs.

La procédure actuelle pourrait éventuellement être envisageable si le contenu de la réforme était consensuel, mais ce n’est manifestement pas encore le cas.

La réforme du corps électoral proposée par le Gouvernement ne peut pas aboutir, tout du moins aujourd’hui. Pis, en poussant cette réforme, alors que des négociations sont en cours et pourraient ne pas aboutir d’ici au mois de décembre, nous prenons un risque politique plus grand. Telle est la crainte du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Une réforme du corps électoral ne peut être actée qu’à l’issue d’un dialogue entre tous les acteurs. Un projet de loi constitutionnelle pourrait alors être déposé pour traduire cet accord commun. Ensuite, de nouvelles élections pourraient avoir lieu avec le corps électoral ainsi modifié, et ce même si des élections avaient lieu cette année, en mai, avant un éventuel accord.

Si nous ne sommes pas convaincus par le report des élections en décembre 2024, c’est donc non pas parce que nous considérons que le corps électoral actuel n’est pas un problème, au contraire, mais parce que, parmi les diverses options envisagées, dont, disons-le franchement, aucune n’est satisfaisante, nous avons l’impression que l’adaptation du calendrier électoral et la prise en compte de toutes les questions qui en découlent devraient intervenir à la suite d’un accord politique, et non en amont. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie.

M. Robert Wienie Xowie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par ce texte, le Gouvernement propose de reporter les élections du pays au plus tard le 15 décembre 2024, le temps de modifier la Constitution pour ouvrir plus largement le corps électoral et d’organiser le scrutin qui doit normalement se tenir en mai 2024.

Le Gouvernement, en facilitant l’intégration des nouveaux arrivants en prévoyant une durée de résidence de dix ans, cherche à légitimer une nouvelle forme de colonisation de peuplement en organisant une noyade démographique du peuple originel.

C’est totalement contraire aux résolutions des Nations unies, qui recommandent aux « puissances administrantes » de « veiller à ce que l’exercice du droit à l’autodétermination ne soit pas entravé par des modifications de la composition démographique dues à l’immigration ou au déplacement de populations dans les territoires qu’elles administrent ».

Dorénavant, le gouvernement français décide seul, au nom de la démocratie, qui sera citoyen calédonien et met ainsi fin aux équilibres ardemment négociés entre partenaires calédoniens.

Souvenons-nous que l’ouverture du droit à l’autodétermination aux communautés arrivées par la colonisation est le fruit de l’accord de Nainville-les-Roches en juillet 1983. Souvenons-nous que la citoyenneté calédonienne a été un enjeu essentiel de l’accord de Nouméa. Aujourd’hui, avec ce projet de loi, la question de la citoyenneté calédonienne est définitivement et unilatéralement préemptée par l’État.

Le Gouvernement veut ainsi revenir sur la réforme constitutionnelle de 2007 engagée par Jacques Chirac qui, lui, nous avait compris et dont je salue la mémoire.

Lors de l’examen de ce texte au congrès de la Nouvelle-Calédonie, le 17 janvier dernier, un hommage appuyé a été rendu à Louis Le Pensec, qui fut ministre des départements et territoires d’outre-mer dans le gouvernement de Michel Rocard. Ces deux hommes furent les principaux artisans des accords de Matignon : ils ont su bâtir des accords de paix.

Nous avions alors été habitués à un gouvernement privilégiant toujours le dialogue, l’intelligence et la compréhension mutuelle.

Malheureusement, cette méthode semble révolue. Sous prétexte d’encouragement au dialogue, le Gouvernement accélère la cadence et veut prendre de vitesse l’opinion française et le peuple kanak par la même occasion. La justification maladroite du projet de loi montre que l’objectif du report n’est pas de faciliter les discussions. Ce changement brutal de méthode suscite de très vives inquiétudes.

Les indépendantistes, au congrès, ont dénoncé l’incapacité de l’État français à apporter au dossier calédonien des solutions durables et souligné le non-respect de la parole donnée par Édouard Philippe, devant le comité des signataires, de reporter le référendum à la fin 2022. De même, ils ont dénoncé la légèreté avec laquelle sont traités des éléments fondamentaux de l’accord de Nouméa, qui n’appartiennent qu’aux discussions entre partenaires locaux.

La volonté de l’État de contraindre les partenaires indépendantistes à conclure absolument un accord global avant le 1er juillet ignore le temps du palabre.

Les accords de paix ont été les accords les plus aboutis que la Nouvelle-Calédonie ait connus ; ils ont même été cités en exemple dans le monde en plusieurs occasions.

Nous déplorons que cet esprit, qui a contribué à déployer le vivre-ensemble, n’anime plus nos interlocuteurs actuels. Le Gouvernement a choisi son camp et remet en cause le corps électoral, qui est l’essence même de ce processus novateur et inédit de décolonisation. Il annonce une date ultimatum pour conclure les discussions : le 1er juillet. Et, si un accord venait à être conclu, les élections provinciales pourraient être repoussées une nouvelle fois jusqu’à décembre 2025 pour laisser le temps de modifier la loi organique.

Or la Cour de cassation, dans son arrêt du 22 juin 2023, considère que les circonstances locales perdurent au regard des droits de l’Homme aussi longtemps que notre pays reste sur la voie de la décolonisation. Les élections provinciales pourraient donc, sans ambiguïté, se tenir normalement.

Au nom de la démocratie, on nous a refusé de reporter la date de la troisième consultation référendaire. Le ministre des outre-mer Sébastien Lecornu nous disait alors que, dans une démocratie, on tient ses élections à l’heure… Au nom de cette même démocratie, l’État sollicite un report « exceptionnel et transitoire », pour reprendre les termes de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le report à la fin 2022 de la troisième consultation n’aurait-il pas été tout aussi exceptionnel et transitoire ?

Un poids, deux mesures ! Et nous sommes de nouveau devant ce dilemme : si la démocratie se révèle être un obstacle à la décolonisation, laquelle de ces deux notions devient prioritaire ? Il n’y a pas de réponse prédéfinie. La réponse, une fois de plus, devrait être donnée par l’histoire.

Chez nous, le temps du palabre est plus profitable que la témérité. Le Président du Sénat l’a lui-même rappelé, lors de notre première rencontre : le temps du palabre est un temps de sagesse. N’oublions jamais que les accords de Matignon et de Nouméa sont des accords de paix, qui ont permis, depuis trente-six ans, un vivre-ensemble si cher aux Calédoniens.

M. le président. Il faut conclure.

M. Robert Wienie Xowie. Laissons les partenaires calédoniens renouveler leur légitimité en mai 2024 ! C’est aussi cela l’exigence démocratique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – Mme Catherine Conconne applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. André Guiol. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. André Guiol. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi organique nous rappelle une bien triste période : les affrontements identitaires du milieu des années 1980 entre Kanaks et Caldoches sont encore présents dans nos esprits.

Les accords de Matignon, en 1988, puis ceux de Nouméa ont permis de ramener la paix sur le territoire et d’ouvrir un nouveau chapitre institutionnel et politique. Nous sommes amenés aujourd’hui à nous réinterroger sur la structure du corps électoral de l’archipel, qui a forcément évolué depuis cette période.

Dès lors, nous considérons que ce projet de loi organique satisfait les exigences des parties engagées dans le processus d’accession à la pleine souveraineté prévu par l’accord de Nouméa et étalé sur vingt ans. Nos débats, portant strictement sur l’examen d’un texte qui reporte l’échéance d’élections, ne peuvent se mettre en retrait d’un contexte plus général relatif au dégel du corps électoral.

Le principe de restriction qui valait jusqu’alors était justifié par la reconnaissance de la citoyenneté calédonienne en complémentarité de celle de la nationalité française. Désuet, il constitue aujourd’hui une dérogation, si ce n’est une atteinte au principe d’universalité du suffrage fixé par l’article 3 de notre Constitution. Sans les deux textes que nous avons à examiner en ce début d’année, les dispositions actuelles continueraient d’exclure du vote un certain nombre d’électeurs pourtant nés et résidant depuis plusieurs décennies sur la Grande Terre.

Avec ces textes, quelque 25 000 Calédoniens pourront participer aux prochains scrutins locaux à partir de décembre 2024, ce qui apportera une solution équilibrée entre les diverses revendications qui s’expriment.

Le RDSE tient à saluer les efforts de toutes les parties pour faire accéder l’île et ses habitants à une plus grande sérénité institutionnelle, sociale et économique – sérénité évidemment sous-tendue par nos discussions. En effet, ces textes ouvriront une ardente bataille politique dans les assemblées locales et au congrès autour du processus d’autodétermination, sur la base du travail tripartite achevé en septembre dernier.

Ces projets de loi nous donnent une échéance, un horizon, pour nous laisser le temps de réfléchir à cette question : jusqu’où adapter le modèle républicain pour que la Nouvelle-Calédonie demeure française, si elle le demeure ?

Observons ici que bon nombre de femmes et d’hommes de par le monde aspirent à accéder à la nationalité française, et qu’il est surprenant que d’autres s’interrogent sur celle-ci ou rêvent de s’en libérer !

Le Gouvernement doit être en mesure de se saisir des travaux du Sénat, notamment des conclusions de la mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.

Nous serons particulièrement vigilants sur les points d’achoppements des deux parties. Les trois référendums passés ont laissé des plaies encore béantes et les clivages se sont considérablement accentués.

Dans ce contexte, monsieur le ministre, il est tout à fait légitime que le Sénat vous demande des garanties sur la sérénité des discussions en cours. L’État doit être impartial et transparent, l’État doit être loyal, l’État doit être intransigeant, pour préserver la sûreté de tous les citoyens calédoniens.

Les auditions conduites par nos collègues l’ont montré : le lien de confiance entre les citoyens de l’archipel et l’État est au point mort. Or la confiance se perd en litres, mais se gagne en gouttes, comme aimait le rappeler l’ancien président de notre groupe, Jean-Claude Requier.

Cela m’interpelle. Certes, les nombreux déplacements de délégations métropolitaines vers l’archipel, ces derniers mois, vont dans le bon sens. Mais comment ne pas prendre en compte cet inquiétant facteur dans l’équation géopolitique de l’Indo-Pacifique, complexifiée par la stratégie agressive de la République populaire de Chine ?

Le désir d’indépendance ne doit pas occulter l’équilibre très précaire qui règne dans la région. L’avenir de l’archipel ne peut s’organiser sans mettre en place une coopération renforcée dans les secteurs économiques, énergétiques et sociaux, déjà en souffrance.

Enfin, le Sénat y tient beaucoup : l’avenir doit s’écrire avec tous les acteurs et respecter le processus démocratique exigeant, à la hauteur de la devise du Caillou qui a été rappelée par notre collègue Hervé Marseille : terre de parole, terre de partage.

Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera ce projet de loi organique.

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis aujourd’hui prévoit le report des élections provinciales de Nouvelle-Calédonie du mois de mai à une date non précisée, mais qui ne pourra pas excéder le 15 décembre 2024. Il prévoit également le prolongement, par voie de conséquence, du mandat en cours des membres du congrès et des assemblées de province élus le 12 mai 2019.

Selon une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, les élections peuvent être reportées et le mandat des élus concernés prolongé, dès lors que la mesure est justifiée par la poursuite d’un intérêt général et qu’elle n’est pas disproportionnée.

Le Conseil d’État a estimé, dans ses avis du 7 décembre 2023 et du 25 janvier 2024, que le présent texte satisfaisait à cette double exigence de justification et de proportionnalité.

Il souligne d’abord que l’objectif est la mise en œuvre d’une révision constitutionnelle prévoyant la réforme du corps électoral en vue des prochaines élections provinciales. En effet, le corps électoral pour ces élections est gelé depuis la réforme constitutionnelle du 23 février 2007. Il en résulte qu’en 2022 près de 20 % des électeurs, soit 41 679 personnes, étaient inscrits sur la liste électorale générale de Nouvelle-Calédonie sans pour autant être inscrits sur la liste électorale spéciale pour les élections provinciales. Or les provinces exercent de larges compétences.

Organiser un scrutin sur cette base électorale restreinte pourrait entraîner des conséquences en droit électoral que personne ne souhaite. Il revient donc aux forces politiques calédoniennes de s’entendre pour déterminer la composition, dont on connaît l’importance et la spécificité pour ce territoire, du corps électoral appelé à voter pour les prochaines élections provinciales.

Ensuite, le Conseil d’État indique que le délai retenu, certes ambitieux, reste suffisant pour permettre la bonne tenue du scrutin.

Il vous appartenait néanmoins, monsieur le ministre, de parer à l’éventualité d’un échec des discussions. Aussi avez-vous déposé, le 29 janvier dernier, un projet de loi constitutionnelle modifiant le corps électoral pour les élections provinciales et l’ouvrant aux électeurs qui, inscrits sur la liste électorale générale de Nouvelle-Calédonie, sont nés sur ce territoire ou y sont domiciliés depuis au moins dix ans. Cette révision constitutionnelle entrerait en vigueur le 1er juillet 2024, après adoption par le Parlement réuni en Congrès, sauf si un accord politique et institutionnel était conclu entre les partenaires avant cette date – ce qui reste, bien évidemment, l’objectif premier du Gouvernement.

L’atmosphère dans laquelle s’est déroulé votre récent déplacement dans l’archipel ne doit pas faire oublier l’attention particulière que le Gouvernement a portée aux positions exprimées par les membres du congrès de la Nouvelle-Calédonie, y compris ceux qui ont exprimé des réticences vis-à-vis de toute révision du corps électoral, pour construire une solution pacifiée.

Pour conclure, je dirai que nous avons tous été témoins de la capacité de la Nouvelle-Calédonie à trouver des accords ; nous savons qu’elle en a la force et les ressources. Elle nous l’a démontré à plusieurs reprises : en 1988 avec les accords de Matignon, puis en 1998 avec ceux de Nouméa. Elle nous l’a montré alors même que s’étaient produits des conflits si lourds et si tragiques. Je suis certain qu’elle saura dépasser les clivages, cette fois encore, pour parvenir à un accord qui satisfasse l’ensemble des forces en présence.

Comparaison n’est pas raison, mais je sais ce que c’est que d’appartenir à un territoire singulier. C’est pourquoi je veux assurer les Calédoniens du soutien et de l’amitié du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, qui votera en faveur de ce projet de loi organique reportant de sept mois au plus les prochaines élections des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le débat qui nous anime aujourd’hui dépasse le simple cadre d’un projet de loi organique, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, le Gouvernement a fait le choix de lier le sujet du report des élections au projet de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral. Or ce dernier sujet, le corps électoral, est la clé de voûte des accords trouvés jusqu’ici. Sans cet élément majeur dans la construction de la paix en Nouvelle-Calédonie, c’est un compromis qui risque de s’effondrer – et je pèse mes mots.

En effet, au-delà du report des élections des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, c’est la considération de tous les Néo-Calédoniens qui est en jeu. Or c’est à eux, mes chers collègues, et à eux seuls, de trouver les chemins de la concorde.

Le sujet dépasse même les 270 000 habitants de l’île, car la méthode utilisée par le Gouvernement est contre-productive. Les accords de Matignon, signés en 1988 sous le Gouvernement de Michel Rocard, ou encore les accords de Nouméa, sous Lionel Jospin, ont pu être trouvés grâce à une logique de consensus, grâce à un credo : la discussion, encore et toujours, comme pilier de la résolution des conflits.

Aujourd’hui, le Gouvernement estime que les élections doivent être reportées – dont acte ! Il considère que le corps électoral doit être dégelé et il impose un délai de quelques mois pour que tout le monde se mette d’accord, en identifiant déjà dans ce projet de loi constitutionnelle une solution. C’est donc une rupture totale de méthode à laquelle nous faisons face ; cela ne correspond ni à l’histoire de ce territoire ni à l’esprit qui a conduit jusqu’ici aux solutions de paix.

Le sujet qui nous anime est celui de la décolonisation et son corollaire : quelle forme d’autodétermination ? Plus largement, c’est aussi la question du droit à l’émancipation qui nous est posée aujourd’hui. Ce ne sont pas là de vains mots, surtout pour la Nouvelle-Calédonie qui a une histoire complexe, parfois troublée, avec des drames faits de larmes et de sang.

Pour atteindre ses objectifs légitimes, l’État doit être le moteur et le pilier des discussions entre les partisans de l’indépendance et ceux qui s’y opposent, sachant que la diversité est grande dans les deux camps. Il doit faire preuve d’impartialité, j’y insiste, et de la plus grande neutralité, seules garantes de son rôle central et de la tenue de débats internes sereins.

En imposant une solution, en imposant des délais courts, le Gouvernement ne respecte plus ces préceptes et opère un changement de paradigme que j’estime dangereux. Quand la réflexion est contrainte, il ne reste souvent plus que l’émotion, qui est rarement bonne conseillère.

Les accords de Matignon comme de Nouméa sont le fruit de longs processus de discussion entre les forces en présence, animés par l’État, certes, mais sans que jamais celui-ci se substitue aux forces calédoniennes.

L’objectif qui doit rester le nôtre est le consensus. Les choix opérés depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron démontrent une partialité délétère. Ainsi, en 2021, comme cela a été rappelé plusieurs fois déjà, une controverse sur la date du dernier référendum prévu par l’accord de Nouméa a été soulevée et l’État a tranché de manière unilatérale, pour reprendre un terme utilisé tout à l’heure par le ministre de l’intérieur.

Mes chers collègues, nous ne nous prononçons aujourd’hui que sur un aspect très précis – rompant d’ailleurs ainsi avec l’esprit global de l’accord de Nouméa. Ce report, auquel nous sommes favorables, doit servir à de nouvelles discussions entre les responsables locaux, qui ont la lourde tâche de faire émerger une nouvelle solution partagée qui ne puisse pas être durablement remise en cause par un arbitrage trop dur de l’État – ce qui serait d’ailleurs contraire aux intérêts de la Nation.

Je veux dire au Gouvernement que la cohésion politique ne se décrète pas : elle se construit avec l’ensemble des acteurs locaux.

L’esprit de responsabilité qui a toujours animé les socialistes nous conduit aujourd’hui – même si nos amendements ne sont pas retenus – à constater l’impossibilité de tenir des élections et donc à être favorables au report. Il faut donner du temps au temps et, en Nouvelle-Calédonie, mes chers collègues, ce temps est nécessairement très long. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Mathieu Darnaud. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je commence par remercier le rapporteur pour son travail et par rappeler l’attachement de notre groupe, présidé par Bruno Retailleau, à la Nouvelle-Calédonie.

Cet attachement semble réciproque, puisque, par trois fois, ses électeurs ont réaffirmé qu’ils souhaitaient lier leur destin à celui de la République. Mais, dans notre assemblée, acquise à la décentralisation, nous savons qu’on ne pilote pas une collectivité à 17 000 kilomètres de distance.

Les sénateurs du groupe Les Républicains soutiendront ce projet de loi organique reportant au plus tard au 15 décembre 2024 l’élection des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. En effet, ce report s’inscrit dans le cadre plus large des négociations lancées après l’achèvement du processus politique balisé par l’accord de Nouméa et marqué, je le rappelle, par le troisième vote défavorable à l’indépendance du 12 décembre 2021.

Depuis cette date, les discussions entre acteurs calédoniens, mais aussi avec l’État, se poursuivent et s’intensifient avec pour objectif d’aboutir à un accord politique global et consensuel. Ces discussions, difficiles, n’ont malheureusement pas encore abouti. Pourtant, leur conclusion positive serait le gage d’un avenir institutionnel serein pour le Caillou et le maximum doit être fait afin d’en réunir les conditions.

Évidemment, le déroulement, en parallèle, d’une campagne électorale, suivie du renouvellement des assemblées provinciales et du congrès, risquerait de parasiter les négociations, d’autant plus que les mécanismes institutionnels sont eux-mêmes l’un des points de la discussion.

Or, la date de ces élections étant fixée au 12 mai 2024, il n’est pas réaliste d’envisager de conclure dans ce délai. Non seulement l’enchaînement d’un hypothétique accord et du scrutin serait délicat sur le plan pratique, mais un tel empressement serait presque certainement nuisible à la sérénité des travaux. Si nous voulons donner une chance au dialogue, ce report s’impose donc.

L’objectif d’intérêt général justifiant de différer la date des élections est indéniable, comme l’ont considéré le Conseil d’État dans ses récents avis ainsi que notre rapporteur, Philippe Bas, fin connaisseur du sujet, dont je salue les conclusions.

En outre, la consultation préalable du congrès sur ce projet de loi organique a démontré que le report était largement approuvé par les élus du territoire, puisque les deux tiers d’entre eux se sont exprimés en sa faveur.

Quoiqu’il paraisse difficile de dire avec certitude si un accord sera trouvé d’ici décembre, la commission a estimé préférable de s’en tenir, à ce stade, à la date proposée par le Gouvernement, position partagée par les sénateurs du groupe Les Républicains.

J’aborderai également la question du corps électoral. Souvenons-nous que la création d’un corps électoral spécial était une dérogation d’une telle ampleur au principe d’égalité devant le suffrage qu’elle avait nécessité de modifier la Constitution. Son évolution nécessitera donc une nouvelle réforme constitutionnelle.

À ce sujet, je tiens d’ailleurs à m’associer au souhait exprimé en commission des lois d’inscrire le futur texte constitutionnel dans le cadre d’un accord global entre les partenaires calédoniens. Un tel compromis est plus indispensable que jamais pour l’avenir de ce territoire qui fait face à d’importants défis économiques et sociaux – l’incertitude institutionnelle ne rend que plus compliqué de les relever. La fragilité de la filière nickel en est une illustration.

Pour leur développement, nos collectivités ont certes besoin d’un cadre institutionnel adapté et accepté. Mais cela ne constitue qu’un préalable et non un aboutissement. Pour faire exister le rêve français jusqu’en mer de Corail, nous devons offrir des perspectives à la jeunesse insulaire. Et la prospérité de demain se bâtit aujourd’hui, en faisant travailler ensemble le Gouvernement, le Parlement, les élus et les forces vives de la Nouvelle-Calédonie ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la nouvelle-calédonie

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie
Article 1er

Avant l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. Temal, Mme Narassiguin, M. Kanner, Mmes Artigalas et de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La recherche du consensus, initiée depuis les accords de Matignon signés le 26 juin 1988 par Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur, sous l’égide de Michel Rocard, Premier ministre et l’Accord de Nouméa signé le 5 mai 1998 par Lionel Jospin Premier ministre, avec Jacques Lafleur, et Roch Wamytan, constitue une donnée fondamentale de l’élaboration de l’organisation politique qui doit prendre la suite de celle issue de l’Accord de Nouméa.

Ainsi, à l’occasion du report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, l’État prend toute sa part à la création des conditions indispensables à l’émergence, par le dialogue et la reconnaissance mutuelle, d’une solution politique équilibrée, consensuelle et durable quant à l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à créer une forme de préambule au projet de loi organique, insistant sur la nécessité de préserver l’esprit des accords de Matignon et de Nouméa. Il tend également à formuler une mise en garde.

En premier lieu, il rappelle que la méthode de discussion entre les partenaires, adaptée à chaque fois aux circonstances nouvelles, apparaît comme une donnée structurante, un cadre intangible et contraignant, qui s’impose aujourd’hui à l’action des femmes et des hommes impliqués dans l’évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie pour définir l’après-accord de Nouméa.

Le temps de la discussion et du compromis constitue une variable déterminante dans l’histoire récente de ce territoire. Cette méthode a fait ses preuves, en rétablissant et en maintenant la paix civile, en faisant fonctionner des institutions spécifiques, en engageant le rééquilibrage en matière de développement économique et de formation et en permettant d’insérer la Nouvelle-Calédonie dans son environnement régional.

Il s’agit également d’une méthode qui témoigne de la confiance accordée aux responsables politiques de la Nouvelle-Calédonie. Ceux-ci font preuve d’un grand sens des responsabilités et d’une profonde maturité politique, qui ont toujours permis de surmonter les moments de doute ou de découragement.

Aujourd’hui, l’option retenue par le Gouvernement est à l’opposé de cette démarche constructive et pragmatique, qui s’appuie sur la réalité de la destinée de la Nouvelle-Calédonie et qui rejette toute décision imposée unilatéralement sans profiter à personne.

Si le Gouvernement persiste dans cette voie inappropriée en maintenant le projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral déposé dans le prolongement du présent projet de loi organique, il engage sa responsabilité au premier chef.

À chaque fois qu’il donne le sentiment d’être sorti de sa neutralité, il laisse la place aux tensions, qui risquent de s’aggraver, comme on a pu le constater à Nouméa lors du dernier déplacement du ministre de l’intérieur en Nouvelle-Calédonie. Nous appelons une fois de plus à de nouvelles initiatives pour retrouver la voie du consensus et de la conclusion d’un accord global.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a longuement étudié cet amendement. Elle en a débattu et je dois vous dire qu’elle en partage la bienveillance. En effet, la commission des lois tout entière souscrit à cette évidence, reconnue sur toutes les travées de notre hémicycle, que la recherche d’un accord est toujours préférable à l’action unilatérale de l’État.

Mais cet amendement n’est pas du droit ; il ne tend à poser aucune règle. Il s’agit, en quelque sorte, d’une profession de foi qu’on aurait fait précéder des mots « article additionnel » : ce n’est en rien un véritable article de loi.

La commission des lois approuve la profession de foi, mais elle est défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un bien mauvais procès fait aux gouvernements qui se sont succédé depuis les accords de Matignon et de Nouméa que de considérer qu’ils n’ont pas tous été guidés par la recherche du consensus, dont le comité des signataires a constitué le creuset – un gouvernement socialiste y a d’ailleurs pris sa part.

Jamais, dans cette affaire, l’État n’est sorti de sa neutralité. Je rappelle que la consultation de décembre 2021 a été demandée par les indépendantistes en avril 2021 et que sa date a été fixée après avis favorable du congrès.

Parvenir à un accord global a toujours été et demeure l’objectif prioritaire du Gouvernement. Ce dernier a multiplié les échanges bilatéraux avec chacun des deux camps, à Nouméa comme à Paris.

Conformément à la demande du FLNKS, un bilan d’ensemble de l’accord de Nouméa et un audit de la décolonisation ont été menés, afin que ces documents servent de base aux discussions sur l’avenir institutionnel du territoire.

Plusieurs groupes de travail ont été mis en place l’an dernier, sous l’égide du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, pour explorer les diverses options possibles. Le ministre de l’intérieur et des outre-mer s’est déplacé à six reprises – pas moins ! – en dix-huit mois dans l’archipel, pour tenter de renouer le dialogue nécessaire et de tisser des positions consensuelles.

Jamais – je dis bien jamais –, les membres du Gouvernement n’ont été aussi présents sur place et aussi soucieux de l’intérêt général de la Nouvelle-Calédonie. J’en reviens d’ailleurs moi-même. J’y ai passé cinq jours et j’ai fait un certain nombre d’annonces en matière d’immobilier judiciaire et de renforcement des ressources humaines et dans le domaine pénitentiaire.

Je ne crois pas que l’État soit d’une quelconque manière défaillant pour tenter de faire émerger une solution équilibrée, consensuelle et durable.

Le Président de la République a exprimé cette volonté avec force lors de son voyage officiel à Nouméa en juillet dernier, en invitant l’ensemble des Calédoniens à définir eux-mêmes le chemin de l’avenir, en ce qui concerne tant la question institutionnelle que bien d’autres enjeux essentiels, comme le développement et le rééquilibrage économiques, la lutte contre les inégalités ou la réponse, urgente, à apporter au défi du réchauffement climatique dans le Pacifique.

C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour explication de vote.

M. Georges Naturel. Les auteurs de cet amendement nous proposent en fait de consacrer ce que fait déjà l’État, depuis des années, dans les négociations entre les différentes parties en Nouvelle-Calédonie.

Malheureusement, l’article additionnel qu’ils nous proposent d’adopter constitue uniquement une déclaration d’intention. Il n’aurait aucune valeur, ni juridique ni politique.

Naturellement, sur le fond, nous nous rejoignons sur le fait que l’État doit jouer un rôle d’arbitre neutre dans le dossier calédonien pour permettre l’émergence d’un consensus et garantir la stabilité.

Néanmoins, qualifier d’« inappropriée », comme c’est le cas dans l’exposé des motifs de cet amendement, la démarche actuelle de l’État – démarche qui répond aux attentes des Calédoniens pour plus de justice et de démocratie – me semble exagéré et justement inapproprié…

Il est nécessaire de parvenir à un consensus et de continuer le dialogue. C’est important. Nous n’avons d’ailleurs cessé de le rappeler dans chacune de nos interventions sur ce texte et nous continuerons à le faire. Néanmoins, il n’est nullement utile de l’inscrire dans le corps même de ce projet de loi, qui vise uniquement à reporter la date des élections provinciales.

C’est pour cette raison que je voterai contre cet amendement et que j’invite mes collègues de la majorité sénatoriale à s’y opposer également. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement a effectivement, comme l’a indiqué le rapporteur, une valeur déclarative. Il traduit une intention : réaffirmer les principes qui ont toujours guidé la recherche d’un consensus aussi large que possible en Nouvelle-Calédonie.

Le but est justement, monsieur le garde des sceaux, de rappeler au Gouvernement que tous ses prédécesseurs ont, depuis 1988, recherché des solutions d’apaisement afin de mener à son terme le processus d’autodétermination.

Si nous avons choisi de déposer cet amendement et si nous le maintenons, alors que nous savons très bien qu’il n’a pas – je le reconnais – de portée juridique, c’est parce que le Gouvernement a fait le choix d’établir un lien entre ce projet de loi organique, dont nous ne contestons pas la nécessité, et le projet de loi constitutionnelle que nous aurons à examiner ultérieurement et qui constitue pour nous une rupture dans la manière de procéder ayant prévalu jusque-là.

C’est pourquoi nous voulons que le Sénat se prononce sur cet amendement. Son adoption constituerait une affirmation politique forte que la recherche du consensus est la voie qui doit prévaloir.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement nest pas adopté.)

Avant l’article 1er
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Article 2 (nouveau)

Article 1er

Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l’article 187 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, les prochaines élections des membres du congrès et des assemblées de province ont lieu au plus tard le 15 décembre 2024. La liste électorale spéciale et le tableau annexe mentionnés à l’article 189 de la même loi sont mis à jour au plus tard dix jours avant la date du scrutin.

Les mandats en cours des membres du congrès et des assemblées de province prennent fin le jour de la première réunion des assemblées nouvellement élues.

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par Mme Narassiguin, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Temal, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Remplacer la date :

15 décembre 2024

par la date :

30 novembre 2025

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. J’ai déjà eu l’occasion de défendre cet amendement en commission et lors de mon intervention liminaire.

Il faut mettre en perspective le présent projet de loi organique et le projet de loi constitutionnelle relatif à l’évolution du corps électoral spécial pour les élections au congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est encouragé à persévérer dans sa démarche, car il a entendu les doutes que le rapporteur lui-même a exprimés sur la méthode retenue par le Gouvernement.

En ce qui concerne la possibilité de tenir, sur le plan technique, le calendrier qui découlerait de l’adoption des deux projets de loi, le rapporteur a ainsi estimé, avec l’honnêteté qui le caractérise, que réussir à organiser les élections provinciales avant le 15 décembre constituerait une prouesse, compte tenu des différentes étapes qui doivent être franchies avant cela.

En outre, le projet de loi constitutionnelle comporte des dispositions unilatérales, alors même qu’une négociation est en cours parallèlement entre les partenaires locaux et que le Gouvernement dit lui-même qu’il privilégie cette voie.

La situation est très complexe sur le plan juridique, et plus encore sur le plan politique. Le rapporteur, qui s’est rendu en Nouvelle-Calédonie avec le président de la commission, François-Noël Buffet, et Jean-Pierre Sueur dans le cadre d’une mission de la commission des lois, a estimé que la conclusion d’un accord global constituait une condition déterminante pour l’approbation finale d’un accord par le Parlement via une révision constitutionnelle et l’adoption d’un projet de loi organique portant un statut renouvelé de la Nouvelle-Calédonie.

Compte tenu de ces considérations, notre groupe reprend à son compte l’interrogation que le rapporteur a exprimée au ministre de l’intérieur à l’occasion de son audition devant la commission des lois.

Dans la mesure où les discussions entre les formations indépendantistes et non indépendantistes ont débuté bien avant la présentation du projet de loi constitutionnelle, ne serait-il pas plus avisé de leur laisser davantage de temps, afin qu’elles ne puissent pas nous soupçonner d’exercer une pression sur elles en adoptant un texte comportant une solution à la fois unilatérale et partielle ?

Si nous estimons que le report des élections est nécessaire, nous vous proposons de retenir la date limite du 30 novembre 2025, qui figure également à l’article 2 du projet de loi constitutionnelle. Cela serait conforme à l’avis du Conseil d’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Retarder des élections, c’est forcément différer le fonctionnement normal de la vie démocratique. Je comprends que le Gouvernement ait voulu que le report dure le moins longtemps possible.

J’ai en effet fait part au ministre de mes interrogations sur la capacité de l’administration à organiser le scrutin au plus tard le 15 décembre prochain. Il nous a donné des réponses claires.

Nous avons donné l’alerte, vous la renouvelez, ma chère collègue, mais nous ne pouvons pas non plus reprocher au Gouvernement de ne pas vouloir prolonger, plus qu’il ne le juge nécessaire, la durée des mandats en cours.

À vrai dire, si un accord intervient, il faudra alors réaliser un certain nombre d’opérations pour organiser le scrutin, ce qui aura aussi pour effet, nécessairement, de le retarder. Mais dans ce cas, les parlementaires seront au rendez-vous, et le Conseil d’État a rappelé que l’on pouvait prolonger les mandats actuels d’encore quelques mois supplémentaires. Il nous suffira alors d’adopter une nouvelle loi organique, sur l’initiative du Gouvernement.

J’ajoute que je ne crois pas que nous puissions accepter que le Gouvernement reporte des élections sur le fondement d’un simple décret en Conseil d’État. Le Parlement est justement là pour apprécier la réalité d’une situation conduisant à un nouveau report des élections ; de même que nous statuons aujourd’hui par un texte de nature organique, nous ne manquerions pas de le faire de nouveau, si cela s’avérait utile, au cas où un motif légitime, tel que la conclusion d’un accord, rendait cette démarche nécessaire.

Retenons cette date du 15 décembre au plus tard : nous pourrons toujours la modifier par une nouvelle intervention législative en cas de nécessité.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Si je devais utiliser un anglicisme que je déteste, je dirais qu’il faut aller step by step

Le Gouvernement travaille sans relâche depuis plus de deux ans pour tenter de faire émerger un accord global qui poserait les bases d’un nouveau statut.

La question du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province constitue l’un des points de crispation les plus forts en Nouvelle-Calédonie. L’obtention d’un consensus dans le cadre d’un accord global sur ce point aurait été évidemment la meilleure des options.

De fait, il a fallu attendre que le Gouvernement dépose ces deux projets de loi pour que les négociations progressent. (Mme Corinne Narassiguin le conteste.) L’intérêt général, selon le Gouvernement, comme selon le Conseil d’État, c’est surtout d’éviter autant que possible de « s’asseoir » sur des principes constitutionnels – permettez-moi cette familiarité.

Le Gouvernement a clairement indiqué qu’interdire à des citoyens qui sont présents sur le territoire depuis vingt-cinq ans, ou qui y sont nés, de participer à la vie démocratique locale n’était plus conforme aux exigences d’un État démocratique ni aux engagements internationaux de la France.

Il a été tout aussi clair sur le fait que, faute d’un accord global entre les partenaires avant le 31 décembre 2023, il proposerait au Parlement un dégel du corps électoral sur la base médiane d’un temps de résidence de dix ans.

Il n’est évidemment pas possible d’éluder la question et de différer ces élections indéfiniment dans l’attente d’un consensus.

Quant à la question de leur organisation avant la fin de l’année, je le dis clairement : nous serons prêts. Les projets de décrets ont d’ores et déjà été finalisés par les services du ministère de l’intérieur et des outre-mer.

J’entends, mesdames, messieurs les sénateurs, la préoccupation qui est la vôtre, qui est aussi celle du Gouvernement, de ne rien vouloir brusquer. Je tiens à vous rassurer. Le projet de loi constitutionnelle prévoit, par un mécanisme à double détente, que le Gouvernement puisse décider d’un nouveau report des élections dans l’hypothèse où un accord serait conclu entre l’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle et la nouvelle date du scrutin. Votre préoccupation me semble donc ainsi prise en compte.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Je vois une contradiction entre les propos de l’exécutif et ceux du rapporteur. Pour notre part, nous souhaitons un report clair et précis des élections, le plus lointain possible, pour que les débats puissent avoir lieu sur le terrain.

Notre rapporteur nous a expliqué que, si un accord était en vue, nous pourrions toujours, en adoptant une nouvelle loi organique, modifier le délai prévu par le présent texte.

Ce n’est pas la position de l’exécutif, si j’en crois les propos qu’a tenus plus tôt dans nos débats le ministre de l’intérieur : il nous a dit que le Gouvernement était prêt, si la conclusion d’un accord était envisageable à court ou à moyen terme, à reporter, par voie réglementaire, la date initialement prévue. Ce n’est pas tout à fait la même chose…

Je ne souhaite pas que le Parlement soit dessaisi de ses compétences en la matière. M. Darmanin a dit que l’on ne pouvait pas le réunir de manière systématique, mais si ! Il faut le réunir si un nouveau report s’impose. C’est là que notre amendement prend tout son sens, puisqu’il vise à prévoir dès maintenant le temps nécessaire à la négociation.

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour explication de vote.

M. Georges Naturel. Ma chère collègue, vous nous proposez par cet amendement de repousser la date des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie au 30 novembre 2025 au plus tard. Cela me semble en décalage complet avec les attentes des Néo-Calédoniens et avec la situation politique et économique actuelle.

Comme je l’ai rappelé précédemment, les dernières élections en Nouvelle-Calédonie pour le renouvellement des assemblées de provinces et du congrès remontent à cinq ans.

Le territoire traverse une crise économique d’une ampleur sans précédent, qui impose des décisions fortes. Celles-ci doivent être prises le plus rapidement possible, par des assemblées renouvelées par le suffrage des Calédoniens.

Vous évoquez également l’avis du Conseil d’État de décembre 2023. Au regard des exigences constitutionnelles, un report à novembre 2025 est effectivement possible techniquement, mais il n’est souhaitable ni politiquement ni démocratiquement. Le Conseil d’État indique lui-même, dans son avis du 25 janvier 2024, que le report des élections au 15 décembre 2024 donne un délai suffisant pour permettre la bonne tenue du scrutin.

Le report des élections ne doit se comprendre qu’au regard de la révision constitutionnelle qui permettra de rétablir l’égalité devant le suffrage : les modalités de ce dernier ne satisfont plus aux exigences constitutionnelles et conventionnelles qui nous engagent. Maintenir le statu quo jusqu’en novembre 2025 serait irresponsable de la part de notre assemblée.

C’est pourquoi je m’oppose fermement à votre amendement et que j’invite mes collègues de la majorité sénatoriale à faire de même. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 2 (nouveau)

La présente loi organique entre en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel. – (Adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 2 (nouveau)
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Georges Naturel, pour explication de vote.

M. Georges Naturel. Alors que nous nous apprêtons à voter ce projet de loi organique, qui permet le report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie à une date ne pouvant aller au-delà du 15 décembre 2024, nous avons tous pris la mesure de l’importance que ce texte revêt au regard de la situation politique de cet archipel français du Pacifique.

Ce report est en effet indispensable et nous ne pouvons le comprendre qu’à la lumière de la révision constitutionnelle qui interviendra dans les prochaines semaines et qui permettra de mettre fin au gel du corps électoral pour les élections provinciales.

Si le Parlement adopte ce projet de loi organique, nous disposerons d’un délai supplémentaire de sept mois pour réviser la Constitution et modifier les dispositions qui instaurent une injustice pour des milliers de Calédoniens de cœur ou de naissance qui, aujourd’hui, ne sont pas autorisés à voter aux élections provinciales.

Songez, mes chers collègues, qu’en Nouvelle-Calédonie des milliers de citoyens français, qui y vivent sans interruption depuis vingt-cinq ans, se voient refuser le droit de vote aux élections provinciales, car ils se sont installés là-bas après le mois de novembre 1998, date couperet où le corps électoral spécial a été gelé !

Songez, mes chers collègues, qu’en Nouvelle-Calédonie des milliers de citoyens français, qui y sont nés, qui ont aujourd’hui entre 18 et 25 ans et qui y ont vécu toute leur jeunesse, se voient refuser le droit de vote aux élections provinciales, car leurs parents se sont installés sur le territoire après le mois de novembre 1998 !

Il est impossible que les prochaines élections provinciales aient lieu dans deux mois dans ces conditions. Différons-les ! Tel est l’objectif de ce projet de loi.

Révisons la Constitution, dégelons le corps électoral provincial, intégrons les électeurs qui répondent aux nouveaux critères de définition d’un corps électoral évoluant de manière glissante dans le temps. C’est seulement après que nous pourrons organiser sans délai les élections provinciales.

C’est pourquoi je voterai en faveur de ce projet de loi organique et je vous invite, mes chers collègues, à en faire de même le plus largement possible ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour explication de vote.

M. Pierre Médevielle. Je crois que tout a été dit sur la nécessité de ce projet de loi. Son adoption mettra fin à une aberration démocratique qui n’est plus supportable. La date de décembre me semble tout à fait raisonnable.

Comme cela a été dit par certains de mes collègues, la situation économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie ne nous permet pas de perdre plus de temps : il suffit de voir ce qui se passe en ce qui concerne la filière du nickel.

Nous devons rassurer la population, ainsi que les investisseurs. La Nouvelle-Calédonie doit repartir de l’avant au plus vite. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble du projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 132 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 307
Contre 34

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Stéphane Fouassin applaudit également.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi organique portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie
 

5

 
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Discussion générale (suite)

Rénovation de l’habitat dégradé

Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
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Article 1er A (nouveau)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement (projet n° 278, texte de la commission n° 343, rapport n° 342, avis n° 333).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un honneur pour moi de venir devant vous, pour la première fois, présenter et défendre un texte du Gouvernement.

En tant qu’ancien parlementaire et ancien président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, je suis particulièrement sensible à l’engagement et à l’implication des parlementaires, notamment des membres de cette assemblée, sur la question du logement.

Les parlementaires sont le cœur battant de la démocratie et des territoires. Ils sont au centre de la construction de la loi. J’en suis intimement et profondément convaincu.

Je tiens à remercier les membres des deux commissions saisies, qui ont adopté ce texte tout en l’enrichissant nettement. Le travail parlementaire, je veux le souligner, mesdames, messieurs les sénateurs, a été particulièrement fourni : alors que le projet de loi initial comportait dix-sept articles, le texte que nous avons maintenant à examiner est riche de quelque cinquante-cinq articles, qui contribueront puissamment, je l’espère, à améliorer et à renforcer le traitement de l’habitat dégradé dans notre pays.

Je veux tout particulièrement saluer l’engagement et l’implication de Mme la présidente Dominique Estrosi Sassone et de Mme la rapporteure Amel Gacquerre, avec qui nous avons eu des échanges constructifs, malgré des délais contraints : voilà qui présage, j’en forme le vœu, d’échanges aboutis sur d’autres sujets à l’avenir.

Je souhaite également remercier l’ensemble des sénateurs, qui ont manifesté leur intérêt prononcé sur ce texte et, de manière générale, leur volonté de travailler avec le Gouvernement et mes équipes pour répondre à la crise du logement. Je suis convaincu que celle-ci se résoudra de manière pragmatique, opérationnelle et transpartisane : ce texte en est une illustration.

Conformément à la volonté exprimée par le Président de la République de prendre des mesures d’exception pour produire plus rapidement des logements, le Premier ministre a demandé à son gouvernement d’accélérer et de simplifier toutes les procédures en la matière, afin de créer un choc d’offre dans le secteur.

C’est un point sur lequel nous commençons à agir dès ce premier texte, comme en témoigne l’article 14 qui comporte des leviers, auxquels je suis particulièrement attaché, pour accélérer la production de logements dans les territoires où les besoins sont les plus forts.

La première réponse au mal-logement, c’est de produire des logements là où la demande est la plus forte. Tel est l’objet du programme Territoires engagés pour le logement, que nous avons lancé ces dernières semaines : ce programme important permettra, dans les trois prochaines années, d’accélérer la construction de 30 000 logements dans vingt-deux territoires où les enjeux sont particulièrement importants.

Ainsi, la mise en œuvre des opérations d’intérêt national (OIN) sera accélérée grâce à la modification de plusieurs procédures du droit de l’urbanisme et du droit de l’environnement. Nous nous sommes inspirés des dispositions adoptées dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 : celles-ci ont fait leurs preuves et nous pouvons désormais les étendre, en tirant profit de ce premier retour d’expérience positif.

Je proposerai d’ailleurs, au nom du Gouvernement, deux mesures visant à compléter ces dispositifs destinés à accélérer les procédures : cette évolution est indispensable si nous souhaitons relancer durablement la construction de logements.

Le cœur du projet de loi consiste à permettre, à l’avenir, aux collectivités, aux opérateurs et à l’État de traiter plus rapidement et avec plus d’agilité les situations de dégradation financière et bâtie qui caractérisent notre parc d’habitat et qui ont des effets sur la vie de nos concitoyens.

Il est tout simplement intolérable que des personnes continuent de vivre aujourd’hui, dans notre pays, dans des conditions d’habitat dégradé, indécent ou indigne. Près de 1,5 million de logements sont dégradés : ce sont autant de foyers et de familles qui connaissent des situations de vie inacceptables.

Avec ce texte, nous nous attaquons directement à ce problème, en aidant les copropriétés à emprunter les sommes nécessaires pour faire les travaux de rénovation, en renforçant les outils à la disposition des élus et des opérateurs pour mener de grands projets de réhabilitation et en augmentant les sanctions contre ceux qui mettent à profit la dégradation de l’habitat.

C’est la continuation d’un travail que nous avons entamé dès 2017. Mes prédécesseurs en ont fait une priorité de leur action : Julien Denormandie a ainsi lancé, dès 2018, le plan Initiative Copropriétés (PIC) pour s’attaquer aux cas des grandes copropriétés en difficulté. L’État abonde ce plan de 2 milliards d’euros sur dix ans pour apporter une réponse concrète aux cas des copropriétés les plus dégradées. Emmanuelle Wargon a, elle, mené à bien le travail commencé par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, en réformant et en simplifiant, avec le député Guillaume Vuilletet, la police de l’habitat indigne.

S’attaquer à l’habitat indigne, c’est un travail de terrain, qui doit se faire avec les élus et les collectivités, que vous représentez tout particulièrement, mesdames, messieurs les sénateurs. C’est dans cet esprit qu’Olivier Klein a confié une mission à deux maires issus d’horizons différents, Mathieu Hanotin, maire socialiste de Saint-Denis, et Michèle Lutz, maire Les Républicains de Mulhouse, pour explorer les moyens d’améliorer la prise en charge de ces situations difficiles. Leurs travaux ont permis à mon prédécesseur, Patrice Vergriete, d’élaborer le texte qui vous est soumis, et qui a pour objet de mettre à la disposition des collectivités des outils pour enrayer et traiter la dégradation de l’habitat.

Nos efforts ont porté sur deux axes majeurs, qui se retrouvent dans les deux chapitres de ce projet de loi.

Il faut, d’une part, que nous anticipions mieux les situations de dégradation, qui mettent plusieurs années à s’installer et peuvent donc faire l’objet d’un traitement plus en amont. Pour cela, il est indispensable d’avoir une vision prospective afin de mieux prévenir l’émergence de dynamiques de fragilisation et d’intervenir plus tôt grâce au professionnalisme et à la mobilisation de tous les acteurs concernés.

Dans cette optique, le projet de loi crée notamment, à l’article 3, une nouvelle procédure d’expropriation qui permettra d’intervenir en amont du cycle de dégradation. Cette faculté, à la main des collectivités et de l’État, concernera les immeubles qui sont frappés par un arrêté de police, mais qui ne sont pas encore, pour autant, dans une situation de dégradation irrémédiable. Cette possibilité sera décisive pour que les pouvoirs publics anticipent leur intervention.

Un autre article particulièrement attendu, l’article 2, permettra aux syndicats de copropriétaires d’assurer le financement des travaux au moyen d’un emprunt collectif. Je tiens à le souligner, c’est une innovation majeure, qui a d’ailleurs soulevé un débat avec les banques et les professionnels, débat qui va certainement se poursuivre dans les semaines à venir.

Il s’agit d’un outil de simplification bienvenu pour surmonter les blocages et les difficultés inhérentes aux travaux dans les copropriétés. Il fera gagner plusieurs mois dans l’examen de dossiers individuels, au profit d’une approche collective et globale.

Au fond, ce prêt peut être, je le crois, l’innovation financière qui manque pour massifier la transition écologique dans chaque microdémocratie qu’est une copropriété. Bien sûr, cela ne peut pas se faire de manière floue, en endettant des copropriétés déjà fragiles : c’est pour cette raison que je vous présenterai un amendement visant à réintroduire la création d’un fonds de garantie pour ces prêts, en précisant ses modalités. J’imagine que c’est ce qu’a souhaité la commission en votant la suppression du dispositif initial.

Il importe, d’autre part, de poursuivre la lutte que nous avons engagée dès 2017 contre les marchands de sommeil et de renforcer les sanctions à leur encontre. Les marchands de sommeil sont des délinquants qui tirent une rente de la vulnérabilité des personnes. Sur l’initiative du député Lionel Royer-Perreaut, corapporteur du texte et élu d’un territoire très marqué par ce phénomène, l’Assemblée nationale a ajouté des dispositions importantes en la matière. Je veux remercier ici les sénateurs d’avoir largement repris et enrichi ces mesures, qui sont cruciales pour notre dignité collective.

De manière générale, je tiens à saluer l’esprit de consensus qui a guidé les travaux sur ce texte dans les deux assemblées. Cela montre à quel point la conscience de ces difficultés traverse les partis et dépasse les positionnements politiques.

Par ailleurs, il faut que nous traitions plus rapidement les dégradations les plus marquées avant qu’elles n’aboutissent à des situations d’indignité insupportables et irrémédiables. Nous devons éviter au maximum d’arriver à la situation dans laquelle démolir pour reconstruire est plus intéressant financièrement que rénover et réparer. Pour cela, nous souhaitons accélérer l’ensemble des procédures de recyclage et de transformation des copropriétés, qui prennent aujourd’hui trop de temps.

En effet, aujourd’hui, tous les acteurs en conviennent, les délais des opérations de réhabilitation sont beaucoup trop importants. Il faut parfois jusqu’à quinze ou vingt ans pour mener à bien un projet, ce qui provoque l’incompréhension des habitants et des élus, leur lassitude, et même la souffrance des propriétaires et des occupants qui se retrouvent dans des situations provisoires à durée indéterminée.

Plusieurs mesures de ce texte permettront d’accélérer de façon décisive les opérations de transformation. C’était la volonté du Président de la République, qui l’avait dit très clairement lors de son déplacement à Marseille à la fin du mois de juin dernier.

Le déroulement des opérations de traitement de la dégradation sera fluidifié par une meilleure capacité à répondre aux besoins de relogement inévitables qui en découlent. Ainsi, le maire pourra autoriser l’implantation, sans permis de construire, de logements temporaires pour reloger les personnes délogées par les chantiers. Tel est l’objet de l’article 7 bis.

Le maire pourra aussi faire réaliser, aux frais du propriétaire, la remise en état de biens lorsque des travaux ont été menés de façon irrégulière – c’est l’article 3 bis. Les articles 11 et 12 permettront quant à eux d’accélérer et de sécuriser les expropriations menées dans le cadre de la législation dite Vivien, qui est engagée lorsque des bâtiments sont atteints d’une dégradation irrémédiable.

Toutes ces mesures sont autant d’avancées opérationnelles souhaitées, parfois de très longue date, par les professionnels et les élus des territoires concernés. C’est la raison pour laquelle je souhaite vivement, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous puissions travailler ensemble pour enrichir ce projet de loi et en faire un levier d’accélération, de simplification et de rénovation encore plus performant.

Avec ce texte, donnons-nous les moyens de répondre à la crise du logement de manière pragmatique, opérationnelle et transpartisane, en nous attaquant aux problématiques des copropriétés dégradées, de la sécurité et de la qualité des logements.

Enfin, je forme le vœu que ce texte ne soit que la première étape d’une longue série de travaux partagés pour répondre ensemble aux défis du logement. (M. Bernard Buis applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement, que nous examinons à partir d’aujourd’hui, est un texte certes technique, mais qui ne doit pas faire oublier la réalité des copropriétés fragilisées ou dégradées de nos territoires. Une réalité qui conduit les maires à nous demander de leur redonner le pouvoir d’agir.

Vous le savez, la commission a lancé une consultation auprès des maires sur la plateforme dédiée du site internet du Sénat. Il en ressort que 58 % d’entre eux ont une ou plusieurs copropriétés dégradées dans leur commune et qu’il s’agit d’une question importante ou très importante pour les deux tiers de ceux-ci. Force est de constater que l’habitat dégradé n’est pas seulement l’affaire des villes au taux de pauvreté élevé ou des quartiers prioritaires : c’est un phénomène massif !

Le sujet des copropriétés en difficulté dépasse dorénavant les quelques opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) ou les OIN pour devenir le problème récurrent de petits immeubles dans nombre de centres-villes ou centres-bourgs anciens.

Or les maires sont trop souvent démunis face à la complexité des procédures à mettre en œuvre. Surtout, la longueur de ces procédures laisse prospérer les marchands de sommeil et se développer l’habitat indigne, jusqu’à aboutir parfois à de tragiques effondrements d’immeubles, comme ceux de la rue d’Aubagne, à Marseille.

Pour ma part, j’ai une idée simple : il faut simplifier pour accélérer. Il faut pouvoir aboutir en un mandat municipal et non en deux, trois voire quatre mandats ! Tel doit être pour moi l’objectif de ce projet de loi.

Ce texte est une boîte à outils que la commission a voulu enrichir et compléter pour répondre aux besoins des acteurs de terrain.

Nous avons entrepris d’améliorer le texte suivant trois axes : donner plus de moyens d’agir aux maires ; faciliter la rénovation des copropriétés ; renforcer la lutte contre les marchands de sommeil.

Sur le premier volet, nous avons souhaité faciliter le travail de tous les maires, y compris dans les petites communes.

Tout d’abord, nous avons intégré dans les missions de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) le conseil et le soutien aux collectivités territoriales en faveur de la rénovation de l’habitat dégradé, tout particulièrement lorsque celles-ci n’ont pas de services dédiés suffisants.

Nous avons aussi souhaité donner davantage d’outils aux maires pour prévenir la dégradation de l’habitat. Prolongeant une mesure introduite à l’Assemblée nationale, nous leur avons ainsi donné le pouvoir de faire réaliser d’office un diagnostic structurel des immeubles dans les zones d’habitat dégradé aux frais des propriétaires.

La commission des affaires économiques a aussi eu à cœur de faciliter les procédures. Notre idée-force est de permettre la mobilisation des dispositifs disponibles plus en amont, avant que la démolition ne devienne inéluctable.

Les conditions de déclenchement des opérations de restauration immobilière (ORI) ont été retravaillées en ce sens, et le texte crée une nouvelle procédure d’expropriation pour les immeubles dégradés à titre remédiable. Cette mesure était très attendue par les maires, pour qui la procédure d’expropriation Vivien, prévue pour les immeubles indignes à titre irrémédiable, est souvent trop difficile à mettre en œuvre.

Le texte étend aussi la possibilité pour les collectivités de recourir à des concessions d’aménagement dans le cadre d’opérations de résorption de l’habitat indigne, y compris ponctuelles, ce qui est très précieux pour les communes manquant d’ingénierie.

Toutes ces évolutions ont reçu un soutien unanime, tant des élus locaux que des aménageurs et autres parties prenantes.

La commission des affaires économiques s’est efforcée d’élargir ou de préciser le champ d’utilisation de ces dispositifs afin de faciliter leur mise en œuvre pour les petites copropriétés dégradées de nos centres-bourgs ou de nos centres-villes anciens, pour lesquelles il existe peu ou pas d’outils d’aménagement spécifiques. Nous avons ainsi élargi le champ de la concession d’aménagement aux immeubles frappés d’arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité et aux îlots contenant de tels immeubles. Nous avons également précisé, de manière explicite, que les Orcod pouvaient comprendre des monopropriétés, ce qui devrait faciliter leur utilisation par les collectivités dans les zones d’habitat dégradé diffus.

La commission des affaires économiques a aussi adopté plusieurs amendements visant à sécuriser les procédures d’expropriation, notamment des immeubles dégradés à titre remédiable, en précisant les modalités de réduction de l’indemnisation pour tenir compte de l’état de dégradation du bien. Nous souhaitons également assurer une meilleure protection des occupants.

Elle a aussi prolongé une disposition introduite par l’Assemblée nationale permettant le relogement d’occupants évincés dans le cadre d’actions de résorption de l’habitat dégradé dans des constructions temporaires. Nous sommes allés avec pragmatisme au bout de cette logique en supprimant l’échéance des cinq ans.

Dans le même temps, nous avons sécurisé le dispositif, à la fois pour les occupants délogés et pour les maires des communes concernées.

Je rappelle que plus de 90 % des maires ayant répondu à la consultation en ligne lancée par le Sénat ont soulevé les difficultés posées par le relogement des occupants. C’est un vrai problème, un vrai frein pour le lancement de projets de rénovation de l’habitat dégradé. Si nous voulons accélérer la lutte contre l’habitat indigne, ne nous privons pas de solutions pragmatiques et efficaces.

Toujours dans le souci de donner aux maires les moyens d’agir, la commission a introduit dans ce texte la possibilité de mettre gratuitement à leur disposition les immeubles confisqués aux marchands de sommeil pour réaliser des logements.

Enfin, la commission a décidé d’attribuer aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents le bénéfice des amendes en matière de permis de louer.

Nous avons par ailleurs introduit des mesures pour faciliter le redressement des copropriétés.

Nous soutenons pleinement la création d’un nouveau prêt global et collectif aux copropriétés, mais nous sommes convaincus que, pour qu’il soit un succès, il faut que les banques et les organismes de caution puissent s’y engager sans réserve. Pour cela, il faut que la copropriété ne soit pas une boîte noire et que les prêteurs et les cautions puissent respecter leur obligation de « prêt responsable ». Ils doivent pouvoir s’assurer que ce nouveau prêt ne contribuera pas au surendettement des copropriétaires fragiles.

Nous sommes tout autant convaincus qu’une contre-garantie publique est nécessaire, mais nous ne pouvons pas signer un chèque en blanc au Gouvernement sur un nouveau dispositif sans financement. Monsieur le ministre, nous espérons vos éclaircissements à ce sujet.

En outre, beaucoup d’espoirs sont mis dans la création de syndics d’intérêt collectif. C’est une demande forte des maires, confrontés parfois à des syndics ou à des administrateurs provisoires qui ne disposent pas de l’expérience nécessaire pour faire face aux difficultés rencontrées. Nous avons voulu que cette loi permette de constituer dans un premier temps un vivier de syndics volontaires et compétents pouvant prévenir le redressement ou l’accompagner. Il nous faudra faire le bilan de ce dispositif dans quelque temps avant d’aller plus loin.

Pour autant, il nous est apparu contraire à la volonté d’efficacité et de simplification qui anime ce texte qu’une forme de « syndic bashing » conduise à une réglementation exagérément alourdie, soupçonneuse, des rapports avec les copropriétaires.

Enfin, la commission des affaires économiques a également souhaité renforcer le volet portant sur la lutte contre les marchands de sommeil, initialement introduit par l’Assemblée nationale. Nous avons ainsi approuvé l’augmentation des peines souhaitées par les députés et je dois dire, monsieur le ministre, que c’est une surprise pour nous d’être en désaccord sur ce point avec l’ancien président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale que vous êtes… (M. le ministre délégué sourit.)

Nous avons néanmoins réécrit et précisé juridiquement plusieurs mesures importantes, notamment le passage de dix à quinze ans de l’interdiction d’acquérir un bien immobilier encourue par les marchands de sommeil ou encore la possibilité de réprimer le refus d’un bail écrit ou de la remise d’une quittance en cas de paiement en espèces. Il est en effet bien souvent difficile de faire condamner les marchands de sommeil, et les maires nous ont dit que cette nouvelle disposition allait les aider très concrètement pour y parvenir.

Pour lutter contre les marchands de sommeil, nous avons aussi facilité la mise en œuvre des permis de louer et de diviser, outils plébiscités par les maires, et nous avons introduit à titre expérimental la possibilité de déroger en mieux aux règles de droit commun en matière de surfaces et volumes minimaux de certains logements dans les zones d’habitat dégradé, et ce afin de lutter contre les subdivisions sauvages d’appartements ou de pavillons.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques a donc décidé de soutenir ce texte, en le renforçant, pour donner plus de moyens aux maires, faciliter l’entretien des copropriétés et mieux lutter contre les marchands de sommeil.

Dans ce travail, j’ai pu compter sur la coopération de ma collègue Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois. Nous avons réalisé en commun la plupart des auditions et déposé nombre d’amendements identiques. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP ainsi que des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois, au nom de laquelle j’ai l’honneur d’intervenir, s’est saisie pour avis de dix-neuf des articles qui composent le projet de loi qui nous réunit aujourd’hui. Ces articles ont plus particulièrement trait au droit de l’expropriation pour cause d’utilité publique, au droit de la copropriété et au droit pénal.

Soixante ans presque jour pour jour après l’appel de l’abbé Pierre, l’urgence à agir en faveur d’un habitat digne pour tous reste, malheureusement, pleinement d’actualité. Cette action ne peut ni ne doit laisser de côté les copropriétés : il s’agit d’un enjeu de taille, puisque 40 % des Français y vivent. Or, comme l’ont illustré de trop nombreux exemples assez médiatisés ces dernières années, de nombreuses copropriétés sont dans un état de dégradation avancé, parfois en raison de l’inertie volontaire des marchands de sommeil, ou tout simplement en raison des difficultés financières des copropriétaires ou de blocages en assemblée générale.

D’après les chiffres qui nous ont été transmis, 114 000 copropriétés seraient ainsi considérées comme particulièrement fragiles.

Dans ce contexte, la commission des lois soutient pleinement l’ambition que porte le projet de loi de moderniser les outils aux mains de l’État, des collectivités territoriales et des opérateurs pour leur permettre d’intervenir le plus en amont possible et ainsi prévenir la dégradation des copropriétés.

Parmi les nouveaux outils proposés, je retiendrai notamment la création d’une procédure spéciale d’expropriation pour cause d’utilité publique des bâtiments dont l’état de dégradation ou d’insalubrité est remédiable, sur le modèle de la procédure Vivien, qui permet déjà une expropriation sans enquête publique pour les bâtiments dont l’état de dégradation ou d’insalubrité est irrémédiable.

Cette mesure, qui a fait l’unanimité chez toutes les personnes que j’ai auditionnées, permettra ainsi d’intervenir plus facilement tant qu’il est possible de rénover le bâtiment.

Je pense également à l’extension des possibilités de scission ou de subdivision judiciaire du syndicat d’une copropriété ou encore à l’élargissement de la prise de possession anticipée à toutes les Orcod et à toutes les OIN, qui compléteront l’arsenal des moyens juridiques que pourront mobiliser les pouvoirs publics pour l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité.

Nonobstant cet accord sur les objectifs généraux du texte, la commission des lois a tout de même veillé à la proportionnalité des mesures proposées, notamment au regard du respect du droit de propriété, garanti par l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Nous avons considéré, dans l’ensemble, que le texte atteignait un équilibre satisfaisant entre la facilitation des opérations de rénovation, qui constitue un motif sérieux d’intérêt général, et l’accompagnement des copropriétaires en difficulté, y compris ceux qui seraient récalcitrants.

Suivant cette démarche constructive, la commission des lois a émis un avis favorable sur quinze des dix-neuf articles dont elle était saisie et a adopté vingt-deux amendements, dont dix-neuf ont été repris par la commission des affaires économiques et ainsi intégrés au texte qui nous est soumis aujourd’hui.

Je tiens à souligner la fluidité et la qualité du travail effectué avec Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques. Notre collaboration fut étroite et fructueuse afin de capitaliser sur les compétences de nos deux commissions. Il va donc sans dire que je partage aussi bien les constats que les propos et les préconisations mis en avant à l’instant par notre collègue.

Notre seul point de divergence a porté sur le renforcement des sanctions pénales à l’encontre des marchands de sommeil, aux articles 8 ter et 8 quater A. La commission des lois s’est en effet prononcée pour la suppression de ces deux articles.

Il n’y a, bien évidemment, aucun désaccord sur l’objectif de ces articles, bien au contraire ! La commission des lois s’est d’ailleurs prononcée en faveur des articles qui instaurent des peines complémentaires.

Cependant, nous avons relevé que le législateur avait modifié le quantum des peines applicables à l’encontre des marchands de sommeil voilà à peine un mois, dans le cadre de la loi Immigration du 24 janvier dernier. Il nous a paru nécessaire d’apprécier les effets de ces mesures avant d’en prendre de nouvelles.

Par ailleurs, nous avons estimé qu’augmenter le quantum des peines dans ces proportions posait un problème de cohérence dans l’échelle des peines. Concrètement, cela signifierait que la mise à disposition d’un hébergement indigne serait plus grave que le fait d’être de mauvaise foi dans le respect des obligations de mise en conformité des logements, alors même que l’occupant est une personne vulnérable.

Malgré cette divergence d’appréciation, au demeurant minime, la commission des lois soutient pleinement ce texte, qu’elle juge utile autant que nécessaire, et vous invite à l’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la rapporteure et Mme Sonia de La Provôté applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le président, monsieur le ministre, en examinant ce projet de loi, la commission des affaires économiques a voulu en faire l’outil le plus utile possible pour les maires et pour nos concitoyens, mais ce texte n’est pas celui que les Français attendent pour apporter des remèdes à la crise du logement, qui prend chaque jour des proportions plus inquiétantes.

Notre commission s’est saisie de ce texte très en amont et s’est inspirée de ses travaux antérieurs, effectués notamment à la suite de l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne. Nous avons notamment travaillé avec Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, maires de Saint-Denis et de Mulhouse. La commission s’est déplacée à Saint-Denis pour mieux comprendre les problèmes concrets. Pour ne donner qu’un seul exemple, nous avons été frappés par le fait que, plus de huit ans après les faits, l’immeuble où un marchand de sommeil hébergeait les terroristes du Bataclan, et qui avait été pris d’assaut par les forces de l’ordre, ne soit toujours pas réhabilité.

Nous avons, enfin, consulté les maires via la plateforme du Sénat pour mieux comprendre leurs attentes.

L’ensemble de ces travaux ont conduit la commission à améliorer le texte et à y introduire de nouveaux moyens d’action pour les collectivités, quelle que soit leur taille.

Nos deux rapporteures, Amel Gacquerre pour la commission des affaires économiques et Françoise Dumont pour la commission des lois, ont fait un travail de qualité. Je les en remercie. Pour autant, les améliorations qu’elles ont proposées, ainsi que celles qui ressortiront de nos débats, ne transformeront pas cette « boîte à outils » en un grand texte contre la crise du logement. On peut même parler de rendez-vous manqué.

Ce n’est que trois mois après avoir déposé ce texte, en décembre dernier, que le Gouvernement semble commencer à prendre la mesure de la crise du logement. Au manque de moyens des élus face à la spéculation foncière s’ajoute le risque de sortie du marché d’un très grand nombre de logements locatifs, faute d’avoir pris à temps les mesures à la hauteur de l’enjeu pour accompagner les bailleurs dans la rénovation de leur bien. Cette impréparation est d’autant plus frappante que, alors même que Christophe Béchu présentait dans la presse de futurs amendements, pourtant en dehors du périmètre du texte examiné, Bruno Le Maire annonçait 1 milliard de coupes budgétaires dans les aides de MaPrimeRénov’.

Face à ces déclarations pour le moins incohérentes, les maires n’ont de cesse de demander une solution pour traiter les biens sans maître ou en état d’abandon : 90 % des maires interrogés l’ont évoqué lors de notre consultation.

L’habitat dégradé est bien le sujet du projet de loi, mais, alors que nous sommes bloqués par l’article 40 de la Constitution, le Gouvernement ne propose aucune évolution sur ce point.

Cette loi « boîte à outils » touchant principalement quelques grandes opérations n’est pas non plus la grande loi de simplification des codes de l’urbanisme ou de la construction et de l’habitation que de nombreux professionnels attendent et que le nouveau Premier ministre a promise. Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), dit souvent qu’il faudrait imposer de supprimer deux normes quand on en crée une.

Les très complexes exceptions que nous voterons pour les Orcod, les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (Opah) ou les OIN ne sont-elles pas le signe évident qu’il nous faut chercher à simplifier non pas des dispositifs spécifiques, mais la règle générale ?

Monsieur le ministre, fort de l’expérience acquise avec les jeux Olympiques, Notre-Dame de Paris ou les émeutes urbaines, vous voulez créer des « territoires d’accélération » pour le logement, où tout serait plus simple. Je ne peux qu’approuver, tout en vous encourageant à faire de tout le territoire national un territoire d’accélération et de simplification pour relancer la construction et donner un logement à l’ensemble des Français.

Le texte que nous voterons cette semaine sera utile, mais nous avons besoin, vous le savez, d’un grand texte sur le logement. Nos concitoyens, nos élus en ont besoin. Mieux, nous avons besoin d’une vision d’ensemble, de cohérence et de long terme, c’est-à-dire d’une politique du logement qui ne se résume pas à des coupes budgétaires décidées à Bercy.

Puissiez-vous avoir dans vos nouvelles responsabilités, monsieur le ministre, les mains peut-être un peu plus libres que vos prédécesseurs et remporter les arbitrages. Vous devez faire en sorte qu’enfin le Gouvernement replace le logement au cœur des politiques publiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Guislain Cambier ainsi que Mmes Sonia de La Provôté et Antoinette Guhl applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Brault. (M. Daniel Chasseing applaudit.)

M. Jean-Luc Brault. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les rapporteures, le logement est devenu en France un sujet central de préoccupations. Les tensions se sont exacerbées ces dernières années. Sans être exhaustif, je pointerai la crise de la covid-19, la crise énergétique, l’offre insuffisante, surtout dans les grandes villes, mais aussi dans nos campagnes.

Cela a rendu plus compliqué pour les Français l’accession à un logement, surtout à un logement décent. Il manque aussi de logements pour nos jeunes, notamment ces jeunes apprentis qui vivent dans nos campagnes.

Combien ont « arrangé » leur dossier afin de pouvoir accéder à un logement ?

Combien de personnes à la recherche d’un toit pour leur famille sont prêtes à accepter des conditions de vie indignes ? Combien en profitent ?

Combien de nos concitoyens n’arrivent pas, par manque de volonté et de moyens, ou simplement à cause de procédures trop complexes, à préserver leurs habitats, qui finissent par se dégrader de manière irréversible ?

Chef d’entreprise dans les bâtiments et travaux publics (BTP), combien de fois ai-je été placé dans l’impossibilité de remettre en état des logements, faute d’investissements suffisants ?

Nous laissons une frange de la population aujourd’hui au bord du chemin.

Nous faisons face à des défis immenses : nous devons préserver nos terres, lutter contre le changement climatique, endiguer la crise économique et financière. Nous devons adapter nos villes et villages aux mouvements des Français entre nos territoires, aux aléas climatiques intenses qui fragilisent les habitats et les dégradent. Il n’est qu’à voir le nombre de logements traversés de fissures qui ne bénéficient d’aucune assurance.

Nous devons travailler à ce que l’offre et la demande de logements se rencontrent. Il faut aménager et réaménager notre territoire en conséquence. Cela prendra du temps et aura un coût certain.

Je me félicite donc que nous puissions débattre de ce projet de loi, tout en étant conscient qu’il n’est qu’une facette de la solution aux nombreux problèmes qui se posent à nous. Mais quelle facette ! Le nombre d’articles du texte a ainsi triplé depuis sa présentation par le Gouvernement, que je sais volontaire sur ce sujet.

Le nombre d’amendements déposés à l’Assemblée nationale et au Sénat est la preuve d’une importante mobilisation des élus. Maire pendant vingt-huit ans, je sais toute la complexité de la lutte contre les habitats dégradés et insalubres.

Le fait que le rapport de la commission des affaires économiques ait été adopté à l’unanimité – j’en profite pour saluer la qualité du travail de notre rapporteure – prouve la nécessité de traiter ce sujet maintenant et de le faire en bonne intelligence avec tous les acteurs.

Ma longue expérience de maire me permet d’appréhender sous un certain angle le sujet de l’habitat dégradé et des opérations d’aménagement.

Je comprends aussi les besoins des collectivités territoriales, qui fondent beaucoup d’espoirs dans ce texte. Ces problématiques concernent l’ensemble des territoires. Ces collectivités ne pourront continuer à se développer que si nous les aidons à nettoyer – j’insiste sur ce terme, même s’il n’est pas employé dans le secteur du BTP – les logements insalubres ; ce nettoyage est indispensable !

Offrir des outils plus simples, rapides et efficients sera – la commission des affaires économiques le souligne – un atout pour les grandes villes comme pour les plus petites d’entre elles. Mais ce sera tout aussi essentiel pour divers autres acteurs, au premier rang desquels on compte les copropriétés de taille modeste.

Sur le sujet spécifique des copropriétés, de nombreux points d’amélioration ont été inscrits dans le texte. Les syndics d’immeuble sont souvent décriés, parfois à juste titre. Le projet de loi rend leurs obligations plus transparentes et plus flexibles. Je tiens à dire que les syndics ont un rôle clé pour la gestion des copropriétés en difficulté, alors que nombre d’entre elles naviguent à vue aujourd’hui.

Nous sommes nombreux à avoir jugé, à cette tribune, que la création d’un syndic d’intérêt collectif – je dirais même « d’intérêt général » – peut être vue d’un bon œil. Même si des inconnues demeurent, le travail effectué en commission, notamment sur les missions de ce syndic, est intéressant. Nous garderons un œil vigilant sur la mise en place de ce mécanisme.

Je relève un autre point important qui concerne directement les copropriétés, particulièrement en matière de financement de travaux ô combien nécessaires quand l’habitat est dégradé : le prêt collectif.

Là aussi, la commission a procédé à des apports majeurs, en permettant des garanties pour les prêteurs et en introduisant de la flexibilité quant au remboursement.

Concernant les procédures d’expropriation des immeubles insalubres, le texte, en offrant une possibilité d’action bien plus en amont, semble aller dans le bon sens, tout comme les clarifications introduites en commission. Il faut essayer de prévenir au maximum afin d’éviter les situations irrémédiables. Il en va de même pour les mécanismes relatifs au relogement de personnes et pour ceux qui portent sur la gestion de situations irrégulières par les communes.

Je veux, en conclusion, évoquer le fléau des marchands de sommeil. Il faut sanctionner plus durement ; cela est primordial. C’est bien ce qui est proposé dans ce texte.

Des mécanismes concrets, bien que perfectibles, de la simplification et de l’accélération : voilà bien ce dont nous avons besoin dans un domaine qu’il est plus que temps de réformer. Aussi, le groupe Les Indépendants votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.  M. Bernard Buis applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Yves Bleunven. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 110 000 copropriétés sont aujourd’hui considérées comme fragiles. Ainsi, des centaines de milliers de personnes se trouvent condamnées à vivre dans des logements vétustes et insalubres.

Agir contre la dégradation des copropriétés dans nos métropoles et nos petites villes doit être notre priorité, à la fois pour augmenter le nombre de logements disponibles et pour entrer dans une dynamique d’adaptation de l’habitat à la transition écologique et énergétique.

Michèle Lutz et Mathieu Hanotin ont largement guidé, par leur connaissance pointue du terrain, la construction technique de ce texte. Grâce aux propositions concrètes et au travail de nos rapporteures Amel Gacquerre et Françoise Dumont, les collectivités territoriales devraient désormais disposer d’une boîte à outils renforçant la faculté des communes, des intercommunalités et de leurs opérateurs à mener leurs projets.

Ce texte aborde, de manière concrète, un sujet crucial pour le bien-être et la dignité des Français.

Des mesures financières et administratives, encore à nuancer, sont nécessaires pour surmonter les obstacles et permettre d’entreprendre des travaux majeurs. Plus tôt ces actions seront mises en œuvre pour rendre les habitations décentes et respectueuses des normes environnementales de base, moins cher elles coûteront aux propriétaires, aux locataires et aux collectivités. En somme, tout le monde sera gagnant !

Trois points de ce projet de loi ont particulièrement attiré mon attention.

Premièrement, l’article 2 offre aux syndicats de copropriétaires la faculté de contracter un prêt collectif pour financer les travaux essentiels et de rénovation énergétique. Cette mesure facilitera l’exécution des travaux et améliorera significativement le cadre de vie des occupants de logements. Je salue les ajouts de la commission, qui ont permis d’encadrer ce dispositif tout en le rendant plus souple.

Deuxièmement, pour anticiper, prévenir et résoudre les problèmes rencontrés, les pouvoirs publics et les syndics doivent, plus que jamais, travailler de concert lorsque les propriétaires font face à des difficultés.

Le chapitre II du projet de loi regroupe à cette fin des mesures visant à accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés.

Ainsi, les pouvoirs du maire se trouvent renforcés par la sécurisation du cadre juridique des expropriations nécessaires à la sécurité des citoyens et indispensables au recyclage des habitats urbains.

Il en va de même pour l’application des mesures de démolition des constructions jugées irrégulières et présentant des risques pour la sécurité et la santé des résidents.

En outre, pour mieux prendre en compte les problématiques des villes moyennes, nous devons porter une plus grande attention aux petites copropriétés des centres-villes anciens. Ainsi, en permettant au maire de faire procéder d’office à un diagnostic structurel des immeubles en zone d’habitat dégradé, on offre la possibilité d’agir avant que la situation ne devienne irrémédiable.

Troisièmement, la question du relogement doit, elle aussi, être au cœur de nos préoccupations. Qu’il s’effectue à titre temporaire ou définitif, le relogement de centaines de ménages n’est jamais une opération aisée et représente un frein à la rénovation des copropriétés dégradées. L’article 7 bis facilitera à cet égard le relogement provisoire des ménages dans des constructions temporaires.

En conclusion, je salue la volonté, qui s’exprime dans ce projet de loi, de permettre une intervention plus précoce des collectivités, ce qui permettra de planifier les opérations et de mieux anticiper les relogements, diminuant de la sorte le coût général de chaque opération.

Anticiper, accélérer, protéger : tels sont les trois axes qui ressortent de ce texte et en font un premier pas technique important. Pour cette raison, nous le voterons.

Cependant, monsieur le ministre, votre prédécesseur nous avait promis une grande loi, qui tarde grandement à venir. En parallèle, le Premier ministre a annoncé que le logement serait une des trois priorités de ses cent premiers jours. La boîte à outils du présent texte, aussi pertinente soit-elle, ne répond que très partiellement à l’urgence de la crise du logement. Nous attendons davantage ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Stéphane Fouassin applaudit également.)

Mme Antoinette Guhl. Marie-Emmanuelle Blanc, Simona Caprignano, Taher Hedfi, Julien Lalonde, Fabien Lavieille, Pape Niasse, Ouloume Said Hassani, Mohamed Cherif Zemar : ce sont les noms des huit victimes de l’effondrement, le 5 novembre 2018, de deux immeubles de la rue d’Aubagne, à Marseille. Oui, monsieur le ministre, vous le savez, l’habitat indigne tue !

Cette catastrophe a profondément marqué notre mémoire collective. Avec mon collègue Guy Benarroche, nous avons auditionné les familles et le collectif du 5 novembre - Noailles en colère. Une volonté commune a été clairement exprimée : éviter de nouvelles tragédies.

Or que s’est-il passé après ce drame ? D’autres drames, monsieur le ministre !

Il y a quatre semaines, un enfant de 7 ans a trouvé la mort dans un incendie survenu à Marseille, dans un immeuble dit « en bon état », mais un logement jugé, lui, « dégradé ».

Les exemples sont nombreux, trop nombreux, de l’inaction en matière de logement des gouvernements qui se sont succédé ces dernières années. Depuis 2017, vous restez sourds aux cris d’alarme !

Olivier Klein avait pourtant prédit, en 2022, que le logement serait « la bombe sociale de demain ». Mais vous, que faites-vous ? Pas plus tard que cette semaine, vous annoncez 736,8 millions d’euros de coupes budgétaires sur la mission « Cohésion des territoires », dont 300 millions d’euros pris sur l’aide à l’accès au logement et 359 millions au programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ».

Monsieur le ministre, 2,4 millions de personnes, en 2022, attendaient un logement social ; mais vous, vous détricotez la loi SRU !

Seulement 93 000 logements sociaux ont été financés en 2023 ; mais vous, vous détricotez la loi SRU !

Plus de 3 000 personnes, dont 900 enfants, demandent un hébergement à Paris ; mais vous, vous détricotez la loi SRU !

Enfin, 72 % des ménages franciliens peuvent prétendre à un logement très social ; mais vous, que faites-vous ? Vous faites la promotion du logement intermédiaire, qui répond aux problématiques de seulement 3 % des demandeurs actuels.

Vous l’aurez compris, sur la question du logement, nous ne sommes pas d’accord !

Pourtant, sur ce projet de loi, nous pouvons l’être ; je peux même dire que, globalement, nous le sommes.

La puissance publique se mobilise enfin, avec les élus locaux, qui agissent tant bien que mal, comme ils peuvent, mais toujours de leur mieux, avec les outils et les moyens qu’ils ont – le rapport de Michèle Lutz et Mathieu Hanotin en est une belle illustration –, et avec les élus nationaux, qui travaillent avec sérieux sur ces sujets prioritaires.

C’est un point de convergence entre nous, quelle que soit notre appartenance politique. Oui, nous partageons tous le constat alarmant qu’a fait la Fondation Abbé Pierre dans son dernier rapport : « L’écart [est] abyssal entre le nombre de logements indignes et le nombre de procédures engagées. » Aussi, l’accélération proposée dans ce projet de loi est plus que bienvenue.

Oui, il fallait accélérer ; vous le faites, nous le faisons avec vous.

Nous avons amendé et enrichi ce texte, pour qu’il intègre les bailleurs sociaux et pas uniquement les propriétaires privés, pour qu’il soit plus ambitieux en matière de protection des locataires et des propriétaires occupants, ou encore de lutte contre les marchands de sommeil, pour qu’il soit encore plus adapté au fonctionnement des syndicats de copropriétaires, et pour qu’il protège mieux les habitants de ces logements indignes.

En revanche, nous ne voulons pas rendre légal le relogement en Algeco, comme vous le proposez. Nous ne voulons pas faire la part belle aux recouvrements et à tous les desiderata des syndics. Enfin, nous ne voulons pas que les opérations d’intérêt national puissent, sous prétexte de les faciliter, être dispensées de toutes les études et concertations nécessaires – cela n’a rien à voir avec la lutte contre l’habitat insalubre !

J’espère que nos débats sur ce projet de loi, qui est – je veux le dire clairement – à la fois utile et bienvenu, progresseront dans un esprit de recherche de convergence.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, je compte sur vous pour étudier, voire accepter, sans posture idéologique, les amendements que les écologistes défendront.

Par une telle convergence, nous retrouverons l’honneur de la politique, en respectant les millions de ménages, propriétaires occupants ou locataires, jeunes ou vieux, qui subissent le froid l’hiver et les bouilloires thermiques l’été, qui ont des plafonds trop bas ou des fenêtres trop petites, qui déplorent des problèmes d’humidité et de moisissures, ou dont l’ascenseur est définitivement en panne, bref, en respectant celles et ceux qui souffrent du mal-logement ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – MM. Ian Brossat et Jean-Luc Brault applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd’hui, face à une crise du logement qui ébranle les fondations de notre société, c’est un message d’urgence que notre groupe tient à porter.

Cette crise, qui condamne 330 000 personnes à l’errance sans domicile et plonge 15 millions de personnes dans une précarité alarmante dans un pays aussi avancé que le nôtre, est intolérable.

Il y a tant à faire : dans le logement social, pour répondre aux 2,6 millions de demandeurs en attente ; dans la rénovation énergétique, pour rénover les 5 millions de logements mal isolés ; dans la construction, pour relancer un secteur à l’arrêt.

Pendant trop longtemps, les mesures prises pour répondre à cette crise ont été insuffisantes, voire contre-productives.

Nous avons assisté à une libéralisation du secteur du logement : on a poussé les bailleurs sociaux à vendre à la découpe ; on les a privés de 1,3 milliard de recettes sans compensation ; on a baissé les aides personnelles au logement (APL) pour les locataires ; enfin, on a facilité les expulsions des plus précaires, avec la loi Kasbarian. (M. le ministre délégué sourit.)

Vous avez exacerbé la précarité plutôt que de la soulager. Et cela continue !

Tout récemment, les premières annonces du nouveau gouvernement en matière de logement ont, encore un peu plus, renforcé nos inquiétudes. Nous y voyons une volonté de casser la loi SRU, en intégrant les logements intermédiaires, aux loyers élevés, dans le calcul du taux de logements sociaux présents sur chaque commune.

Le 1er février dernier, j’étais à la présentation du rapport de la Fondation Abbé Pierre. Soixante-dix ans après cet appel historique, qui avait déclenché un sursaut des citoyens et des pouvoirs publics, nous avons eu droit à un passage éclair du ministre de la transition écologique, qui en a profité pour accabler les sans-papiers, qui seraient responsables de leur maintien à la rue et engorgeraient les places d’hébergement. Aucune annonce, aucun sursaut !

Tous ces signaux doivent être perçus pour ce qu’ils sont : des attaques contre le droit au logement. Or ces attaques fonctionnent, puisque le nombre de mal-logés n’a jamais été aussi élevé depuis la Seconde Guerre mondiale.

Victor Hugo l’avait ainsi exprimé en son temps : « Vous n’avez rien fait tant que le peuple souffre ! Vous n’avez rien fait tant qu’il y a au-dessous de vous une partie du peuple qui désespère ! » Aujourd’hui, la souffrance du peuple est là. Elle nous oblige, car c’est un enjeu de dignité humaine.

Après avoir allumé le feu, le Gouvernement veut enfiler son costume de pompier et tenter d’éteindre, avec un petit extincteur, un brasier qui devrait mobiliser tous nos canadairs.

Le projet de loi qui nous est présenté est intéressant, mais certainement insuffisant. Il a déjà été, il faut le dire, amélioré par l’Assemblée nationale, ainsi que par notre commission des affaires économiques. Je compte sur la séance publique et nos amendements pour lui apporter des améliorations supplémentaires.

Ce texte contient plusieurs mesures qui semblent pertinentes, comme la labellisation de « syndic d’intérêt collectif », la possibilité pour les copropriétaires de souscrire à des prêts collectifs, une amélioration et une facilitation des procédures d’expropriation et d’intervention sur le bâti, avec une attention particulière portée aux résidents, et des peines plus lourdes contre les marchands de sommeil. Une plus grande vigilance et une fermeté accrue à l’égard des syndics défaillants sont aussi indispensables ; plusieurs de nos amendements visent à aller dans ce sens.

Ce texte exprime des intentions louables, qui laissent penser que dans quelques années l’habitat dégradé sera derrière nous. Pourtant, la marche est haute, et l’ascenseur semble toujours en panne : 9 milliards d’euros de travaux seraient nécessaires, selon la Banque des territoires, mais le projet de loi est muet sur les moyens budgétaires mis à disposition pour intervenir.

Il y aura bien des prêts collectifs pour les copropriétaires, mais avec quel argent ? Il y aura peut-être des interventions publiques, mais avec quels moyens ? Il y aura sans doute davantage de procédures contre les marchands de sommeil, mais avec quels effectifs dans les tribunaux judiciaires ?

Il y a quelques jours, vous avez annoncé 10 milliards d’euros d’économies sur le budget de l’État, dont 1 milliard pris sur MaPrimeRénov’. Le nouveau ministre du logement a, quant à lui, prévu de contourner la loi Climat et résilience en modifiant les critères du diagnostic de performance énergétique, laissant ainsi perdurer les passoires thermiques.

Alors, avec tout cela, qui ira dire aux mal-logés qu’ils peuvent attendre pour avoir un toit sur leur tête, pour allumer le chauffage sans se ruiner, ou pour vivre sans la crainte de voir leur balcon tomber sous leurs pieds ?

Trop de catastrophes sont déjà connues, à Marseille, à Paris, à Lille, ou encore à Grigny, avec la mort de la petite Solange dans l’incendie d’un logement indigne. La difficulté du quotidien, pour les 1,2 million de personnes qui vivent dans une copropriété dégradée, réduites à se dire que, au milieu des moisissures, sous des plafonds qui s’effritent avant, peut-être, de s’effondrer, on est déjà mieux qu’à la rue.

Nous espérons pouvoir voter ce projet de loi à l’issue des débats qui s’ouvrent. Nous prendrons nos responsabilités et nous souhaitons que le Gouvernement prenne les siennes, en donnant, enfin, des moyens pour répondre à cette crise du logement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.  M. Christophe Chaillou applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj.

M. Ahmed Laouedj. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 40 % des Français habitent un immeuble collectif. La qualité de cet habitat doit être une priorité de notre action politique.

Pourtant, l’habitat dégradé est un phénomène silencieux et massif, encore largement méconnu, qui n’est pas le problème de quelques villes pauvres ou quartiers prioritaires.

Je souhaite à cet égard saluer l’initiative de notre assemblée, qui a mis en œuvre une consultation des élus locaux sur la lutte contre l’habitat dégradé afin de mieux connaître les besoins de nos maires et leurs difficultés, et de recueillir leur avis et leurs suggestions sur les principales dispositions de ce texte.

Ainsi, le projet de loi qui nous a été soumis a pu être amendé de manière à le rendre plus juste et efficace, ainsi qu’à replacer avec pertinence les maires au cœur des politiques publiques du logement.

De fait, 58 % des maires interrogés ont ainsi déclaré avoir une ou plusieurs copropriétés dégradées dans leur commune. Deux tiers d’entre eux estiment que c’est une question importante, voire très importante.

Les copropriétés se retrouvent souvent en difficulté et se dégradent au point de nécessiter l’intervention des pouvoirs publics.

Leur rénovation est freinée par des difficultés inhérentes à l’habitat collectif, comme le coût élevé des travaux, l’impossibilité d’obtenir le soutien d’une majorité des copropriétaires réunis en assemblée générale, ou la concentration d’une population défavorisée dans certaines copropriétés.

Dans les grands ensembles, dans certains quartiers prioritaires ou dans des centres-villes anciens, ce problème peut prendre des proportions très importantes. De lourds moyens financiers et juridiques sont alors nécessaires pour y mettre un terme et éviter de mettre en danger les occupants et de faire le lit des marchands de sommeil.

Dans ce contexte, un tel projet de loi était plus qu’urgent.

Pourtant, au cours des trente dernières années, nous avons voté de nombreuses lois visant l’habitat dégradé.

Nous avons institué de nouveaux outils, parfois mal connus, dont le cumul rend l’utilisation de plus en plus complexe.

Du fait de l’importance des charges d’investissement, les délais de réhabilitation des immeubles se trouvent allongés, jusqu’à atteindre, parfois, quinze ou vingt ans. Les copropriétaires paupérisés se retrouvent alors dans l’impossibilité de payer leurs charges ou les travaux d’entretien, tandis que la valeur marchande des immeubles qui se dégradent ne cesse de baisser. Quant aux occupants, ils sont dans l’impossibilité financière de se loger ailleurs.

Tous les ingrédients sont donc réunis pour créer de l’habitat indigne, dont un million de Français sont aujourd’hui victimes. Pour nos concitoyens le mal-logement peut avoir de réels effets sur la santé, l’éducation, l’équilibre familial, l’insertion sociale et la vie professionnelle.

Nous attendons donc beaucoup de ce projet de loi : il faut redonner de la dignité aux personnes, il faut qu’elles puissent vivre dans des logements décents.

Je ferai plusieurs observations sur le projet de loi en lui-même.

S’agissant, tout d’abord, de l’intervention des collectivités et des opérateurs afin de lutter contre l’habitat indigne, je salue les travaux réalisés en commission pour leur donner, légitimement, des outils plus efficaces et plus rapides en vue de permettre une intervention plus précoce des pouvoirs publics, de la rendre moins coûteuse, mieux planifiée, et avec des relogements mieux anticipés et davantage inscrits dans le projet urbain. Je pense ici au syndic d’intérêt collectif et à l’emprunt global et collectif. Néanmoins, j’attends désormais que le Gouvernement s’engage à financer ce dernier, si nous ne voulons pas qu’il reste lettre morte.

Par ailleurs, nous relevons sur le terrain que les occupants de logement insalubre sont trop souvent laissés dans l’ignorance des procédures de rénovation et des actes qui les concernent.

Pour encore plus d’efficacité et d’opérabilité, le groupe du RDSE a déposé des amendements visant à mieux accompagner, protéger et informer les occupants de ces logements. J’entends ici exprimer notre volonté de simplifier l’accès à l’information des copropriétaires, en posant la dématérialisation comme principe, ou à communiquer le constat d’insalubrité aux copropriétaires en même temps qu’au préfet.

S’agissant de la problématique des marchands de sommeil, nous saluons le travail effectué en commission. Celle-ci s’est fondée sur le retour d’expérience des maires pour retenir, à titre préventif, plusieurs évolutions sur le permis de louer et le permis de diviser, facilitant ainsi leurs conditions de mise en œuvre et la lutte contre ces marchands de sommeil.

Je veux enfin signaler un point de vigilance concernant la procédure d’expropriation. Le nouvel outil envisagé est intéressant ; néanmoins, il ne résout pas l’un des plus gros points de blocage possible lors de la mise en place d’une telle procédure, à savoir celui du relogement des occupants, que ce soit à titre temporaire ou définitif, notamment dans les très grandes opérations, qui nécessitent le relogement simultané de centaines de ménages, principalement dans un parc social déjà saturé. Il s’agit d’un vrai frein pour certaines opérations ; d’ailleurs, plus de 90 % des maires ayant répondu à la consultation ont soulevé cette difficulté, y compris pour des opérations plus ponctuelles.

Pour autant, parce que ce texte répond à une demande et à un besoin urgent, parce qu’il vient compléter intelligemment les dispositifs existants, institués par le plan Initiative Copropriétés et par la loi Élan, les membres du groupe du RDSE voteront en sa faveur.

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Bernard Buis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur du logement subit une crise majeure causée par de multiples facteurs : une crise de l’offre, avec une chute des permis de construire et des mises en chantier en 2023, mais également une crise de la demande, avec une baisse du pouvoir d’achat immobilier liée à la hausse des taux d’intérêt et au maintien des prix à des niveaux élevés.

Si, avec ce projet de loi, nous ne prétendons pas résoudre l’entièreté de la crise, l’ambition est néanmoins d’apporter notre pierre à l’édifice dans deux chantiers titanesques : la rénovation de l’habitat dégradé et les grandes opérations d’aménagement. En la matière, force est de constater que nous devons accélérer et simplifier. Tel est bien l’esprit de ce projet de loi.

Face au nombre croissant de copropriétés particulièrement fragiles et à la complexité des procédures, il nous appartient de faciliter et de simplifier la vie des acteurs de terrain, à commencer par nos élus locaux.

Grâce à ce projet de loi, les élus disposeront demain de nouvelles attributions bienvenues, leur permettant d’intervenir le plus en amont possible sur le bâti dégradé, afin d’éviter de multiplier les constructions délaissées. L’objectif est clair : plus de prévention, pour moins de dégradations.

Alors, comment les élus pourront-ils concrètement agir ?

D’abord, en cas d’urgence, lorsque des travaux entrepris engendrent des installations présentant un risque certain pour la sécurité ou pour la santé, et lorsque la mise en demeure sera restée sans effet, le maire pourra désormais procéder d’office à la réalisation des mesures prescrites aux frais du propriétaire. Cela va dans le bon sens : il n’est pas juste de laisser une personne en irrégularité exemptée de toute obligation.

Les maires pourront également s’appuyer sur un rapport des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) pour motiver leurs arrêtés de mise en sécurité.

Je pense également au fait de rendre destinataires du procès-verbal de l’assemblée générale de copropriété le maire, le président de l’EPCI compétent ou le préfet. En outre, ces acteurs pourront désormais participer à ces assemblées générales.

Nos concitoyens subissent parfois l’immobilisme de certaines entités ; je pense à des professionnels de l’immobilier, mais aussi à des propriétaires. Il est donc logique que les maires et les préfets puissent être présents et participer à ces moments décisifs dans la vie d’une copropriété dont le bâti s’est dégradé. Cela permettra aux acteurs de terrain d’être informés des situations territoriales afin d’agir le plus rapidement possible.

Ensuite, mes chers collègues, pour faire davantage de prévention, encore faut-il avoir réalisé le bon diagnostic du bâtiment.

En ce sens, l’article 8 bis apporte une solution. Il permet de définir dans le plan local d’urbanisme, communal ou intercommunal (PLU ou PLUi), des secteurs dans lesquels la réalisation d’un diagnostic global de structure sera obligatoire, une fois tous les dix ans, afin de mieux surveiller la dégradation du bâti et de pouvoir intervenir sans attendre une dégradation irrémédiable.

Je crois que nous pouvons saluer ces mesures, qui démontrent que le Gouvernement souhaite faire davantage confiance aux élus locaux en matière de simplification.

Mais les élus locaux ne sont pas les seuls acteurs de terrain. N’oublions pas, en effet, le rôle essentiel des copropriétaires, qui demandent, eux aussi, plus d’accompagnement, notamment pour la rénovation énergétique.

Or, si nous voulons réduire le nombre de copropriétés dégradées, nous devons faciliter la rénovation énergétique de tous les bâtiments.

Cependant, ces travaux souvent très onéreux nécessitent, la plupart du temps, l’octroi d’un prêt.

Grâce à l’article 2 du projet de loi, un nouveau type de prêt collectif sera créé pour les copropriétés, qui pourront désormais souscrire un tel prêt pour financer les travaux essentiels à la rénovation énergétique. Afin d’éviter les blocages, il est prévu que tout copropriétaire n’indiquant pas son refus de souscrire un emprunt sera supposé y adhérer. La mise en place de cet emprunt sera toutefois soumise à un vote des copropriétaires, à la majorité.

À ce propos, notre groupe défendra des amendements visant notamment à intégrer les caractéristiques de ce prêt collectif aux éco-prêts à taux zéro (éco-PTZ) souscrits au nom des syndicats de copropriétaires.

Mes chers collègues, ce texte permettra également de renforcer notre lutte contre un fléau qui gâche le quotidien de nombreux Français, celui des marchands de sommeil.

Là encore, toujours en matière de prévention, il me semble que ce texte met une solution pertinente à la main des collectivités pour anticiper les situations critiques et ainsi mieux protéger les habitants.

Je fais référence à la création d’une nouvelle procédure d’expropriation des immeubles qui sont dans un état de dégradation encore remédiable.

Aujourd’hui, l’expropriation de certains immeubles insalubres est certes possible, mais elle ne peut être mise en place que pour les immeubles ayant fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement d’insalubrité ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’y habiter.

Pour que l’expropriation s’applique, il faudra désormais que deux arrêtés de sécurité ou de salubrité aient été pris en l’espace de dix ans sans que les travaux prescrits aient été exécutés. N’oublions pas non plus la réalisation d’un plan de relogement lorsqu’une interdiction temporaire d’habiter est prononcée.

Avec cette nouvelle procédure, nous ferons davantage de prévention pour éviter les dégradations irréversibles imposant des démolitions coûteuses.

Nous éviterons surtout aux habitants le traumatisme d’un départ forcé de leur domicile, tout en économisant l’argent public et en renforçant l’efficacité de l’action de la puissance publique.

Enfin, la lutte contre les marchands de sommeil nécessite également de renforcer les sanctions.

Je salue en ce sens les mesures adoptées en commission visant à porter de dix à quinze ans la durée de l’interdiction d’acquisition d’un bien immobilier encourue par un marchand de sommeil.

Les débats permettront, sans aucun doute, de renforcer encore davantage notre arsenal juridique.

Notre groupe propose, au travers d’un amendement, de rétablir comme délit le fait de mettre à la disposition d’une personne, moyennant une contrepartie, un hébergement contraire à la dignité humaine. D’autres amendements que nous avons déposés visent à autoriser les maires à sanctionner le non-respect des dispositions de déclaration de mise en location ou à faciliter la sortie des indivisions en outre-mer.

Mes chers collègues, nos concitoyens attendent des mesures fortes en matière de logement. Avant que de futurs textes ne soient soumis au Parlement, nous avons aujourd’hui l’occasion de légiférer sur un enjeu essentiel pour nombre de Français, à savoir la rénovation du bâti dégradé.

Aussi, j’espère qu’à l’issue de nos débats, sans qu’ils stigmatisent jamais l’une ou l’autre des parties, les outils proposés dans ce projet de loi seront renforcés. Bien évidemment, notre groupe le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Viviane Artigalas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il serait difficile de contester la nécessité de faire du chantier des copropriétés dégradées une cause nationale.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : on compte près de 400 000 logements indignes en métropole – la moitié sont occupés par leur propriétaire – et près de 150 000 en outre-mer.

Qu’il s’agisse de Marseille ou de Lyon, de Saint-Denis, de Villeurbanne, de Vaulx-en-Velin ou de tant d’autres villes, ce sont les maires socialistes qui ont inlassablement alerté sur l’urgence de la lutte contre l’habitat indigne.

Les procédures de traitement de l’habitat dégradé, en l’état actuel du droit, sont souvent très longues, laissant ainsi prospérer les marchands de sommeil et les situations à risque pour les occupants.

Dans les cas les plus graves, de telles situations conduisent à des effondrements ! Le drame survenu rue d’Aubagne à Marseille, le 5 novembre 2018, est resté dans toutes les mémoires. Pourtant, d’autres drames ont depuis lors eu lieu, à Lille en 2022, à Grigny, à Nanterre, à Paris ou à Stains en 2023. Une telle récurrence prouve qu’il y a urgence à agir.

À l’occasion de notre débat sur ce texte, j’ai une pensée pour Claude Dilain, ancien sénateur et maire de Clichy-sous-Bois ; certains d’entre vous ici l’ont peut-être connu. La lutte contre l’habitat indigne était au cœur de son engagement et de son action politique. En 2013, il a rendu un rapport sur le logement dégradé intitulé Copropriétés en danger. Ses travaux ont largement nourri le volet de lutte contre l’habitat indigne de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi Alur. Dix ans plus tard, c’est encore ce sujet qui nous réunit !

Ainsi, dans la loi de 2014, plusieurs mesures ont déjà renforcé l’arsenal législatif en la matière, mais force est de constater qu’elles demeurent insuffisantes. En tant que législateur, il était donc de notre devoir de doter au plus vite les collectivités de moyens supplémentaires et renforcés pour lutter contre ce phénomène, qui menace notre cohésion sociale.

Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure, qui a simplifié et amélioré ce texte dans un temps très contraint. Les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain l’ont aussi amélioré en commission. Aussi, je remercie Mme la rapporteure d’avoir tenu compte de nos amendements, particulièrement de ceux qui ont pour objet les aides aux collectivités.

En effet, en prenant appui sur le rapport de Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis, et de Michèle Lutz, maire de Mulhouse, nous avions en tête trois objectifs : la consolidation, pour les rendre véritablement opérationnels, des outils à disposition des maires ; la prévention des dégradations le plus en amont possible ; le renforcement de la protection des locataires et occupants.

Nous avons ainsi étendu les compétences de la commune pour le permis de louer, en introduisant le transfert de la compétence pour le recouvrement des amendes relatives au permis de louer aux communes et aux EPCI. Par ailleurs, l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) pourra mettre à disposition des collectivités territoriales les biens à titre gratuit.

Le texte crée aussi une nouvelle procédure d’expropriation, calquée sur la procédure instituée par la loi de 1970 tendant à faciliter la suppression de l’habitat insalubre, dite loi Vivien, pour les immeubles dont l’état est critique, mais qui peuvent encore être sauvés. Il s’agit donc de rénover plutôt que de démolir.

Nous avons également instauré un droit au relogement pérenne pour les occupants qui ne pourront pas réintégrer leur habitat initial, et une obligation de relogement définitif, si les travaux ne sont pas réalisés.

Nous avons introduit une sanction en cas de refus d’établir un bail écrit ou de remettre une quittance. Nous avons également élargi les mesures de protection des occupants dès le début de la procédure contradictoire contre des menaces ou congés abusifs de la part de propriétaires.

Je souligne aussi l’ajout de la rénovation de l’habitat dégradé dans les missions de l’ANCT pour mieux accompagner les maires qui ne disposent pas de l’ingénierie nécessaire pour intervenir dans les petites copropriétés.

Je pense également à l’extension à quinze ans de l’interdiction d’acquisition d’un bien immobilier qui est encourue par un marchand de sommeil.

Néanmoins nous demeurons vigilants sur certains points, dont nous ne manquerons pas de débattre durant la discussion des articles. Par exemple, si je me félicite de la création du prêt collectif, la question du fonds de garantie pour l’ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté doit être reposée. D’ailleurs, c’est ce que recommandait le rapport de la Banque des territoires sur le financement des travaux des copropriétés dégradées.

Mes chers collègues, il me semble nécessaire de faire en sorte que ce texte permette d’assurer de véritables suivis en amont des logements en déshérence, mais aussi en cours de réhabilitation.

À ce titre, il faut donner aux élus locaux et aux préfectures les moyens pour ce faire et de renforcer les procédures de contrôle à leur disposition.

Par ailleurs, gardons toujours à l’esprit qu’il faut accompagner les occupants de logements dégradés et non leur faire porter la responsabilité exclusive des signalements !

Les débats qui s’ouvrent aujourd’hui nous permettront donc, je l’espère, de perfectionner encore ce texte, qui va dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.  Mme Antoinette Guhl et M. Ian Brossat applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Belin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sonia de La Provôté applaudit également.)

M. Bruno Belin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise du logement est une réalité en France depuis deux ans.

Toutes les initiatives sont bonnes à prendre, mais je fais partie de ceux qui réclament – certains des orateurs qui m’ont précédé l’ont déjà fait – une grande loi Logement avant la fin du quinquennat, pour rendre effectif le droit d’avoir un toit, le droit à l’habitat digne et pour soutenir l’économie de la construction. (Mme la présidente de la commission renchérit.)

Quelle est la réalité, monsieur le ministre ? La population augmente et vieillit ; le stock de logements neufs stagne, le parc s’appauvrit et vieillit aussi. Oui, dans notre pays, nous manquons de logements !

Jamais il n’a été aussi difficile de se loger : crise de la production, coût du logement, cherté des travaux, montant des prêts, rareté de l’offre, etc. Même louer est devenu une vraie difficulté !

Cette situation fait le bonheur des marchands de sommeil. Pendant ce temps, le marché des passoires thermiques perdure.

Le mal-logement est devenu une réalité, inévitable et sans fin. La seule solution à cette crise est de recourir aux élus locaux, parce qu’ils sont pragmatiques ; ils connaissent la réalité du terrain.

Oui, libérer le logement est possible. Cela passe par une nouvelle donne, un volontarisme politique, qui octroie aux maires les moyens de mener une véritable politique d’aménagement du territoire.

Le texte qui nous est présenté cet après-midi est technique. Il n’est qu’un volet infime des moyens nécessaires que l’on doit donner aux élus locaux pour essayer de ralentir effectivement la dégradation de l’état de santé du logement en France.

Il faut donc aller plus loin, notamment pour réduire les difficultés d’un certain nombre de dispositifs. Le cas de MaPrimeRénov’ a déjà été cité : monsieur le ministre, essayez de faire une demande de subvention à l’Agence nationale de l’habitat (Anah), vous verrez combien c’est difficile ; cela pousse, parfois, nos concitoyens à abandonner leurs démarches !

Je pense aussi aux mesures à prendre contre les immeubles dégradés – Marseille a été déjà prise en exemple, mais allez à Bordeaux ! – ou pour relever le défi de l’isolation thermique de millions de logements – si l’on veut effectivement répondre au défi climatique, il va bien falloir aborder cette question et se donner les moyens d’y répondre –, ou encore pour faire face aux besoins des bailleurs sociaux pour adapter, moderniser, développer leur parc, alors même que leur budget est tant ponctionné par l’État !

Et que dire de la course à l’habitant que mènent les maires des communes rurales – et vous en connaissez en Eure-et-Loir, monsieur le ministre ! –, lesquels sont également confrontés au défi de l’habitat ancien vacant ! Chacun d’entre eux essaye d’attirer quelques habitants en plus, pour sauver l’école, pour sauver des commerces, pour sauver leur village.

Pourtant, leurs démarches sont compliquées par une prescription de l’architecte des Bâtiments de France (ABF), parce qu’il y a toujours un clocher classé, ou par des prescriptions de fouilles archéologiques, parce que l’histoire de nos villages est, bien sûr, multiséculaire. J’ai des exemples dans le département où je suis élu.

Nous pourrions évoquer toutes les autres formes d’habitat dégradé : vous connaissez bien, tout comme la présidente Dominique Estrosi Sassone, la question des squats.

Il faut donner aux élus les moyens de mener une nouvelle politique du logement. Je pense notamment à un outil qui existe et qui a été expérimenté dans un certain nombre de départements : les schémas départementaux du logement. Il faut les généraliser !

L’État octroie des moyens, sous l’autorité des préfets – ils sont indispensables –, avec les conseils départementaux et avec les élus locaux, pour écrire une nouvelle page de l’histoire du logement dans notre pays.

Toutes les initiatives seront salutaires pour améliorer l’accès au logement de qualité en France. C’est indispensable, l’enjeu est essentiel ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

M. Guislain Cambier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur toutes les travées, nous saluons la volonté affichée par le Premier ministre d’aller, selon ses propres termes, « chercher tous les logements possibles avec les dents ».

Par-delà la formule, comme dans d’autres domaines, ce sont des actes et des décisions qui sont attendus.

Il faudrait être aveugle et sourd pour ne pas constater les difficultés auxquelles se heurtent de nombreux ménages pour accéder simplement et humblement à un logement confortable.

Deux mesures sont à prendre. D’abord, créer un véritable choc de l’offre, alors que plus de 150 000 logements par an manquent pour répondre à la demande. Ensuite, permettre à chacun de rénover des logements existants grâce à un calendrier raisonnable.

C’est pour relever ce deuxième défi que vous présentez le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, monsieur le ministre.

Une part prépondérante du parc de logements dégradés correspond aux immeubles d’habitation collective. Parmi ces passoires thermiques, nombreuses sont celles qui relèvent de la copropriété privée.

À ce titre, les membres du groupe Union Centriste saluent le plan Initiative Copropriétés, piloté par l’Anah, qui propose un accompagnement, afin de requalifier plus de 80 000 logements situés dans des copropriétés. Voilà une initiative salvatrice !

Mais ce n’est pas suffisant, mes chers collègues.

Alors que les occupants sont parfois dans des locaux insalubres, voire dangereux, la complexité du droit ressemble beaucoup au mystère de la pierre de Rosette.

Chacun a pu noter la technicité du texte qui nous est présenté, et ses propositions de bon sens également. On sent pleinement la patte de Michèle Lutz et de Mathieu Hanotin, deux élus locaux ayant une profonde connaissance du terrain.

Nos rapporteures, Mmes Amel Gacquerre et Françoise Dumont, se sont pleinement investies pour enrichir le texte, afin d’en faire un véritable outil d’accélération de la rénovation des habitats indignes et dégradés.

Je souhaite saluer trois mesures introduites, qui me semblent être fondamentales pour donner aux élus et à l’État les outils pour atteindre cet objectif.

Tout d’abord, la possibilité pour toutes les copropriétés de souscrire un prêt collectif pour le financement de travaux essentiels et de rénovation énergétique. C’est un pas en avant pour que les propriétaires les plus modestes puissent s’associer pour financer des travaux.

En commission, sur l’initiative de notre rapporteure Amel Gacquerre, les modalités de mise en œuvre de ce prêt ont été assouplies. Par exemple, elles permettent désormais le remboursement anticipé ou laissent la faculté au prêteur d’écarter les copropriétaires incapables de rembourser leur part du prêt.

Ensuite, l’insaisissabilité des comptes bancaires des copropriétés en redressement. Cette mesure permettra de sécuriser le traitement de celles dont la gestion a été confiée par le juge à un tiers. Elle permettra également d’éviter la saisie des fonds publics par les créanciers tout en assurant leur bon emploi.

Enfin, nous avons renforcé la place des communes dans le processus de rénovation. Le nouvel article 2 ter A permettra ainsi aux communes d’être compétentes en matière de permis de louer, même lorsqu’elles n’ont pas la compétence de l’habitat.

L’article 7 bis A transfère également la compétence pour le recouvrement des amendes relatives au permis de louer aux communes et aux EPCI compétents. Nos collectivités doivent bénéficier d’un arsenal complet en matière de location pour assister les copropriétaires souhaitant rénover leur habitation.

Nous saluons donc les propositions formulées dans ce texte, dans sa version modifiée par la commission, qui apportent une première réponse concrète. Nous le voterons !

Elle vient suppléer l’absence, tant de fois pointée ici, d’une véritable politique du logement, comme l’a encore fait à la tribune Mme Dominique Estrosi Sassone.

Une grande loi est sans cesse promise, mais, pour l’instant, comme sœur Anne, nous ne voyons toujours rien venir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Audrey Linkenheld. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays traverse une grave crise du logement.

Il n’y a pas assez de logements à vendre ou à louer sur le marché immobilier ! Pas assez non plus de logements proposés à des prix ou loyers qui soient abordables et adaptés au pouvoir d’achat de nos concitoyens !

Et il y a trop de passoires thermiques, alors qu’il nous faut réduire drastiquement les consommations d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre !

Force est de constater que les divergences politiques sont profondes sur les solutions proposées pour faire face à cette crise du logement.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain réitère à cette tribune sa ferme opposition à tout coup de rabot sur les aides, à la ponction des bailleurs sociaux, au détricotage de la loi SRU et à tout renoncement à la qualité environnementale.

Pour autant, et sans minimiser ces fortes divergences, nous sommes favorables à ce projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement. C’est là un enjeu de taille et un combat de longue haleine. Année après année, avec la loi Alur de 2014 ou d’autres textes, l’arsenal législatif et réglementaire français s’est renforcé en la matière.

Pourtant, régulièrement encore, dans nos villes, des hommes, des femmes, des enfants souffrent, voire perdent la vie du fait d’un habitat dégradé non rénové. Les causes en sont multiples : malveillance, négligence, indigence, ignorance, etc.

Or les élus locaux n’arrivent pas toujours à y faire face, malgré les outils dont ils peuvent disposer. C’est ce qu’ont montré les élus Mathieu Hanotin et Michèle Lutz dans leur rapport, la consultation lancée par le Sénat à ce sujet, ou tout simplement nos expériences et nos discussions sur le terrain.

C’est pourquoi nous voterons l’essentiel des dispositions de ce projet de loi.

Mais nous proposons aussi d’aller plus loin dans la lutte contre l’habitat dégradé. Ainsi, largement inspirés de nos discussions avec des collectivités et des associations, nos amendements vont dans l’intérêt des élus locaux, mais aussi des occupants à protéger.

Par exemple, nous souhaitons, à l’article 3, renforcer l’effectivité de l’expropriation des immeubles indignes à titre remédiable, en la faisant mieux coller à la réalité des arrêtés pris par les maires.

Afin d’intervenir le plus en amont possible, nous proposons d’étendre l’utilisation de l’astreinte administrative à l’égard d’un propriétaire récalcitrant à d’autres cas d’indignité et de dégradation. C’est un outil qui a fait ses preuves, tout comme le bail réel solidaire, adossé aux organismes de foncier solidaire.

C’est pourquoi nous souhaitons, comme le prévoyait l’article 3 bis A, non seulement que l’expérimentation d’expropriation des parties communes prévue par la loi Alur soit prolongée, mais surtout qu’elle devienne possible pour les organismes de foncier solidaire (OFS). Plusieurs d’entre eux ont travaillé des projets concrets en ce sens ; ce serait leur envoyer un très mauvais signal que de les empêcher de faire ce test.

Dans le même esprit, nous soutiendrons la possibilité pour les organismes d’HLM d’utiliser un bail réel solidaire d’activité.

Enfin, vous vous en souvenez sûrement, ma ville de Lille a été touchée en novembre 2022 par un drame lié à l’habitat : deux immeubles se sont effondrés soudainement rue Pierre-Mauroy, coûtant malheureusement la vie à l’un des occupants. Sans la présence d’esprit de jeunes riverains, peut-être que le bilan aurait même été plus lourd. La particularité de ce drame est qu’il n’est pas un drame de l’habitat indigne ou insalubre et que les occupants n’étaient ni victimes de marchands de sommeil ni particulièrement paupérisés.

C’est pourquoi nous soutenons l’article 8 bis, qui introduit l’obligation d’un diagnostic structurel régulier pour les immeubles de certains secteurs d’habitat dégradé. Et nous souhaitons le compléter par un amendement tendant à autoriser les collectivités à cibler les secteurs d’habitat dégradé, mais aussi les centres anciens qui abritent des immeubles des siècles passés. Souvent, ces derniers, qui sont parfois de belle facture, ne sont pas identifiés comme dégradés, mais leurs structures ont été fragilisées avec le temps.

J’espère pouvoir convaincre les rapporteures et l’ensemble de l’hémicycle de voter cet amendement, afin d’obtenir leur soutien sur un sujet qui nous tient particulièrement à cœur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lutte contre l’habitat indigne est un sujet récurrent en matière de logement.

En témoignent les textes de loi adoptés ces dernières années dans ce domaine : la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, la loi Alur de 2014, la loi Élan de 2018.

Toutes ont doté les pouvoirs publics de moyens supplémentaires pour réduire la mise en location de logements indignes et l’activité de marchands de sommeil.

On pourrait ajouter le plan Initiative Copropriétés, lancé en 2018 par le Gouvernement ou encore l’ordonnance de septembre 2020, qui a permis la refonte des polices administratives spéciales de lutte contre l’habitat indigne et un partage plus clair des compétences entre le préfet et les maires.

Pour autant, la situation demeure toujours aussi préoccupante. Le rapport Hanotin-Lutz a évalué à 400 000 le nombre de logements indignes et à 100 000 le nombre de copropriétés fragiles. Cette situation a été confirmée par la consultation réalisée par notre présidente et notre rapporteure auprès des maires. Leur attente est très claire : garder la main sur le sujet de l’habitat dégradé, en collaboration avec l’État.

Toutefois, ils déplorent un manque d’information, notamment en provenance du registre national d’immatriculation des copropriétés ou encore de l’Anah, une complexification des procédures ou la méconnaissance de certains outils comme le plan Initiative Copropriétés ou les opérations d’intérêt national.

Au milieu de ces lacunes, seules les opérations de restauration immobilière semblent faire consensus en matière de procédures.

Avec une constante, ils regrettent tous, ou en tout cas très largement, la difficulté de reloger les habitants concernés. Dans ce contexte, l’objet du projet de loi, à savoir simplifier les procédures judiciaires et administratives pour accélérer le travail de copropriétés les plus dégradées, est bien compréhensible.

Il s’agit en fait d’intervenir le plus tôt possible avant que l’habitat dégradé ne devienne indigne, c’est-à-dire qu’il ne soit susceptible d’être démoli.

Il s’agit aussi de préserver l’intégrité des bâtiments et de réduire le coût sur le long terme.

En ce sens, plusieurs dispositifs contenus dans le texte sont tout à fait opportuns. En matière de prévention, il est envisagé de créer une nouvelle procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique des propriétaires de logements frappés de péril ou d’insalubrité.

Le droit de préemption simplifié devrait permettre, à la demande des collectivités, de réaliser des actions nécessaires à un office public de l’habitat (OPH), un plan de sauvegarde ou une opération de requalification de copropriétés dégradées. L’expropriation pourrait ainsi devenir possible avant que la situation ne soit devenue irrémédiable.

Le projet de loi prévoit aussi la possibilité pour les copropriétés de souscrire un prêt bancaire collectif pour faciliter le financement de travaux d’entretien et de préservation essentiels. Une garantie publique pour les copropriétés, dont la situation financière est dégradée, a également été ajoutée.

En revanche, que se passera-t-il dans le cas où pour les autres copropriétés, l’un ou plusieurs de ses membres deviendraient défaillants lors de la période de remboursement ? Qui prendra la relève ? Et surtout, avec quels financements ?

Afin d’aider les petites communes à mieux prévenir les phénomènes d’habitat dégradé, la commission a donné mission à l’ANCT d’apporter aux collectivités des conseils et un soutien sur le plan juridique et en matière d’ingénierie.

Pour la gestion, une procédure d’agrément préfectoral est prévue, laquelle vise à dégager un vivier de syndics dits d’intérêt collectif.

La commission a tenu aussi à apporter plus de souplesse à un dispositif trop rigide, notamment en créant un label attestant de compétences utiles au traitement des difficultés financières.

Le texte prévoit enfin la possibilité pour les opérations de requalification des copropriétés dégradées de demander la scission de grands ensembles en copropriété pour faciliter la gestion et éviter les dégradations de biens.

D’autres éléments, notamment en matière pénale, visent à sanctionner les marchands de sommeil, je n’y reviendrai pas.

Aussi, dans son ensemble, ce texte pragmatique devrait faire consensus, même si sa portée demeure modeste en matière d’urbanisme et de logement, malgré les améliorations sensibles apportées par Mme la rapporteure et Mme la présidente. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je souhaite reprendre la parole à l’issue de cette discussion générale pour répondre à certains points que vous avez soulevés, mesdames, messieurs les sénateurs.

Avant tout, je salue l’esprit constructif qui règne au Sénat sur le texte que nous nous apprêtons à examiner.

J’ai bien entendu les interventions des différents groupes, notamment de ceux avec lesquels nous pouvons avoir des divergences. Madame Guhl, madame Linkenheld, madame Margaté, vous avez évoqué un certain nombre d’éléments sur lesquels nous ne sommes pas d’accord, notamment la loi de 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, que j’ai portée. Je ne vais pas refaire le débat maintenant : elle a été largement adoptée par les sénateurs et par les députés.

Pour autant, malgré ces points de divergence parfois forts, nous arrivons à avancer dans l’intérêt général. Au reste, la question de l’habitat dégradé, dont nous débattons aujourd’hui, peut rassembler très largement au-delà des clivages idéologiques traditionnels, et je tenais à le signaler.

Ensuite, je voulais répondre à Mme la présidente de la commission, dont l’expertise sur le logement a toujours été reconnue par l’ensemble des acteurs de l’écosystème.

Mme Dominique Estrosi Sassone a depuis longtemps alerté sur la crise du logement, et ses propositions ont toujours été saluées et respectées par tous. Je connais également son attachement à l’équilibre des comptes… (Mme la présidente de la commission acquiesce en souriant.)

C’est pour cela que Mme la présidente m’a interpellé sur les économies réalisées. À cela, je lui réponds que, bien évidemment, je les assume, car je les juge nécessaires pour tenir la trajectoire de réduction de notre déficit.

Nous avons essayé d’être le plus justes possible. Vous l’avez rappelé, 1 milliard d’euros de crédits de paiement ont été annulés pour MaPrimeRénov’. Mais, en réalité, si l’on compare leur montant inscrit au budget pour 2023, les crédits sont tout de même en augmentation. Nous avions en effet prévu une énorme augmentation pour MaPrimeRénov’ dans le budget pour 2024.

Nous aurions tous souhaité, si le contexte avait été meilleur, maintenir ces crédits. En effet, nous les avons réduits, mais, je le répète, ils sont en augmentation dans le budget pour 2024 par rapport à celui de 2023.

M. Michel Savin. Ce n’est pas le cas dans le budget !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je souhaite également répondre à l’interpellation – très juste – de M. Belin sur la complexité du dispositif MaPrimeRénov’. Il m’a invité à venir en Eure-et-Loir et à solliciter moi-même l’aide pour me rendre compte des complexités potentielles de la procédure.

Il a parfaitement raison : MaPrimeRénov’ est devenu un instrument complexe. D’ailleurs, sous l’autorité de Christophe Béchu, nous avons organisé et lancé un grand chantier de simplification de MaPrimeRénov’, en lien avec la Fédération française du bâtiment (FFB) et la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), sur trois aspects.

Premièrement, il s’agit de Mon Accompagnateur Rénov’ : certains territoires ne sont pas dotés d’assez d’accompagnateurs sur des projets complexes ; il faut simplifier le dispositif.

Deuxièmement, il s’agit de simplifier l’obtention du label « reconnu garant de l’environnement » (RGE), sujet sur lequel les artisans nous interpellent.

Troisièmement, les aides « monogeste », c’est-à-dire les travaux de rénovation plutôt simples – le chauffage, par exemple –, mériteraient d’être, elles aussi, simplifiées.

Ces chantiers sont en cours. Nous y attachons beaucoup d’importance, tout comme notre administration. Nous allons donc répondre à la demande des artisans et des particuliers, qui constatent une certaine complexité dans l’usage de MaPrimeRénov’.

M. François Bonhomme. C’est une litote !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Monsieur Belin, votre interpellation était tout à fait pertinente.

Enfin, j’ai été interpellé par MM. Cambier et Bleunven, par Mme la présidente de la commission et par bien d’autres sur la grande loi Logement.

J’ai été député pendant sept ans. Lorsque nous avions la majorité absolue, de grandes lois ont été votées, notamment sur le logement, à l’instar de la loi Élan. J’ai aussi connu dix-huit mois de majorité relative en étant président de la commission des affaires économiques, au cours desquels j’ai tout de même essayé de faire passer des textes. Et j’ai noté que quand les textes étaient précis, ciblés, on arrivait à construire des majorités à l’Assemblée nationale et des compromis avec le Sénat. Cela a permis de faire passer des textes, notamment, on le sait, sur l’énergie nucléaire ou sur les énergies renouvelables. Nous n’avions pas mis tous ces sujets dans un seul et même véhicule ! Aussi ai-je pris l’habitude de proposer des textes précis, ciblés, qui sont malgré tout ambitieux et parfois même radicaux. Nous savons les expliquer et nous savons avec qui les voter. J’aime que les textes soient précis.

J’entends votre appel à avoir à voter plus de mesures législatives sur la question du logement, et je partage votre attente. J’ai été nommé pour mettre en œuvre pleinement la feuille de route du Premier ministre, que vous avez entendu lors de sa déclaration de politique générale.

Or elle contient des mesures législatives très importantes, très attendues, je le sais, par les sénateurs et par les élus locaux, qu’il s’agisse de la révision de la loi SRU de 2000 ou de l’attribution des logements sociaux. Ces questions vont nécessiter des modifications législatives et un débat au Parlement.

Je m’engage à mener, avec honnêteté et sincérité, toutes les consultations nécessaires pour que nous puissions travailler à l’émergence de ce texte et le coconstruire le plus en amont possible, en vue de le présenter d’ici à l’été prochain.

C’est l’objectif qui m’a été assigné ; je m’y emploierai avec ambition, dans le respect des parlementaires, avec qui nous allons coconstruire ce texte.

Ce texte sera-t-il un fourre-tout de tous les sujets du logement ? Pas sûr ! Je souhaite qu’il s’agisse d’un texte puissant, qui réponde aux attentes des Français, des élus locaux. Je souhaite que nous réussissions à avancer ensemble avec les sénateurs, qui, je le sais, l’attendent, sur ce sujet dont je connais l’importance pour les territoires. (M. Bernard Buis applaudit.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement

Chapitre Ier

Intervention en amont d’une dégradation définitive

Discussion générale (suite)
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Article 1er

Article 1er A (nouveau)

À la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 1231-2 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « du logement », sont insérés les mots : « , dont la rénovation de l’habitat dégradé ».

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er A.

(Larticle 1er A est adopté.)

Article 1er A (nouveau)
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Article 1er bis

Article 1er

(Non modifié)

Après le mot : « amélioration », la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme est ainsi rédigée : « , de rénovation, y compris énergétique lorsqu’elle conduit à une amélioration de la performance énergétique du logement ou du ou des immeubles concernés, de réhabilitation ou de démolition ayant pour objet ou pour effet de garantir la salubrité, l’intégrité ou l’habitabilité d’un ou de plusieurs immeubles ainsi que la sécurité des personnes, notamment au regard du risque d’incendie, par l’aménagement d’accès pour les services de secours et d’issues pour l’évacuation. » – (Adopté.)

Article 1er
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Article 2

Article 1er bis

Après le mot : « urbaine », la fin du 1° de l’article L. 313-34 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigée : « , dans le périmètre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat au sens de l’article L. 303-1, dans un immeuble faisant l’objet d’un arrêté pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 ou dans un îlot ou un ensemble cohérent d’îlots comprenant un tel immeuble, dans le périmètre d’une opération de restauration immobilière au sens de l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme ou dans le périmètre d’une opération d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du même code ayant pour objet de lutter contre l’habitat indigne ; ».

M. le président. L’amendement n° 144, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat et Bitz, Mme Schillinger, M. Mohamed Soilihi, Mme Havet, MM. Rambaud, Théophile, Lemoyne et Iacovelli, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Haye, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après la référence :

L. 303-1

insérer les mots :

ayant pour objet de lutter contre l’habitat indigne

et après les mots :

l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme

insérer les mots :

ou dans un îlot ou un ensemble cohérent d’îlots contenant au moins un immeuble soumis à un plan de sauvegarde tel que prévu à l’article L. 615-1 du présent code

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement vise à concentrer l’action de l’association Foncière Logement (AFL) sur les secteurs à enjeu de résorption de l’habitat dégradé, permettant ainsi un développement foncier cohérent avec les modalités d’intervention de l’association.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Comme cet amendement n’a pas pour effet de revenir sur l’extension du champ d’action de l’AFL, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement vise à clarifier le périmètre d’élargissement de l’objet social de l’AFL en concentrant son action sur l’habitat indigne, en cohérence avec les missions que le législateur a confiées à cette filiale du groupe Action Logement.

Par ailleurs, il tend à préciser que les immeubles soumis au plan de sauvegarde sont éligibles à l’intervention de l’association : ce sont des ajustements tout à fait utiles.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 144.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 161, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Remplacer les références :

L. 511-1 à L. 511-3

par les références :

L. 511-11 ou L. 511-19

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 161.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er bis, modifié.

(Larticle 1er bis est adopté.)

Article 1er bis
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Après l’article 2

Article 2

I. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :

1° L’article 26-4 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Au début du deuxième alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » et les mots : « premier alinéa » sont remplacés par la référence : « I » ;

b bis) (nouveau) Aux troisième et quatrième alinéas, les mots : « premier alinéa » sont remplacés par les mots : « même I » ;

c) Il est ajouté un III ainsi rédigé :

« III. – L’assemblée générale peut voter à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux concernant les parties communes ou des travaux d’intérêt collectif sur parties privatives, prévus aux a à e du II de l’article 24 et au f de l’article 25, la souscription d’un emprunt au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement de ces travaux.

« À moins qu’il ne s’y oppose dans les conditions fixées au dernier alinéa du présent III, chaque copropriétaire est réputé avoir accepté de participer à ce mode de financement des travaux.

« Tout copropriétaire peut refuser de participer à l’emprunt sous réserve de notifier au syndic son refus dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’assemblée générale et de verser la totalité de la quote-part du prix des travaux lui revenant dans un délai de six mois à compter de la notification de ce procès-verbal. À défaut, le copropriétaire est tenu par l’emprunt. » ;

2° Au premier alinéa de l’article 26-6, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au II de » ;

3° Au premier alinéa de l’article 26-7, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par les mots : « aux I et II de » ;

4° Après l’article 26-8, sont insérés des articles 26-9 à 26-15 ainsi rédigés :

« Art. 26-9. – Les fonds empruntés au titre du III de l’article 26-4, dont le montant ne peut excéder le montant total des quotes-parts de dépenses des copropriétaires n’ayant pas refusé le bénéfice de ce prêt collectif, sont versés par l’établissement prêteur sur un compte bancaire séparé au nom du syndicat à cet effet ainsi qu’au versement des subventions publiques accordées au syndicat des copropriétaires pour le financement des travaux à réaliser et des sommes mentionnées au premier alinéa de l’article 26-13. Ce compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion, ni d’une compensation avec un autre compte.

« Le paiement des travaux est réalisé sur présentation des factures par le syndic à l’établissement prêteur.

« Aucune mesure conservatoire ni d’exécution forcée ne peut être mise en œuvre sur les sommes portées au crédit du compte bancaire réservé en application du premier alinéa du présent article.

« Art. 26-10. – Seuls les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 sont tenus de contribuer chaque mois ou chaque trimestre, en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt selon la grille établie pour la répartition des quotes-parts de dépenses selon les principes prévus aux articles 10, 10-1 et 30 :

« 1° À son remboursement, en capital, intérêts et frais éventuels de caution, au syndicat des copropriétaires ;

« 2° Au paiement des frais et des honoraires afférents générés par le montage et par la gestion du prêt.

« Art. 26-11. – La charge de la contribution au remboursement de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 incombe au propriétaire du lot qui peut librement procéder au versement par anticipation de sa quote-part de l’emprunt restant à sa charge.

« Art. 26-12. – Le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires.

« Le cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, par une société de financement ou par une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier.

« Au regard de l’hypothèque légale prévue au 3° de l’article 2402 du code civil, les sommes correspondant au remboursement de l’emprunt ainsi qu’au paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et des travaux. Après mise en œuvre de la caution, celle-ci est subrogée de plein droit dans l’exercice de l’hypothèque légale du syndicat des copropriétaires mentionné au même 3°.

« Art. 26-13. – Les sommes dues par le copropriétaire ayant refusé de participer à l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 qui correspondent au remboursement du capital et des intérêts et au paiement des frais et des honoraires entrent définitivement, dès leur versement, dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires. Dès leur versement, elles sont affectées sans délai par le syndic au remboursement anticipé de l’emprunt.

« Elles ne donnent pas lieu à remboursement par le syndicat des copropriétaires à l’occasion de la cession d’un lot. L’acquéreur peut consentir à verser au vendeur un montant équivalent à ces sommes en sus du prix de vente du lot.

« Art. 26-14 (nouveau). – La durée de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 est fixée par décret en Conseil d’État.

« Art. 26-15 (nouveau). – L’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 comporte des facilités de remboursement anticipé pour tenir compte du versement des subventions publiques accordées pour la réalisation des travaux votés ou du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ayant refusé d’y participer. »

II et III. – (Supprimés)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 145, présenté par MM. Rambaud, Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

b …) Le troisième alinéa est supprimé ;

II. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

Aux troisième et quatrième alinéas

par les mots :

Au quatrième alinéa

III. – Alinéas 25 et 26

Supprimer ces alinéas.

IV. – Alinéa 27

Rétablir le II dans la rédaction suivante :

« II. - Le titre III du livre VII du code de la construction et de l’habitation, est complété par un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre …

« Prêt pour travaux consenti aux syndicats de copropriétaires

« Art. L. 732-1. – Le présent chapitre est applicable aux prêts destinés à financer les dépenses relatives à la réparation, à l’amélioration ou à l’entretien d’un immeuble qui sont souscrits par un syndicat de copropriétaires mentionné à l’article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

« Art. L. 732-2. – Dans le cas de l’emprunt prévu au III de l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le prêt est consenti pour une durée fixée par décret en Conseil d’État. Il permet de financer le coût des travaux non couvert par la mobilisation de fonds détenus par le syndicat des copropriétaires ou le coût des travaux éligibles à l’avance remboursable ne portant pas intérêt prévue à l’article 244 quater U du code général des impôts consentie à un syndicat de copropriétaires.

« Art. L. 732-3. – L’emprunt comporte des facilités de remboursement anticipé pour tenir compte du versement des subventions publiques accordées pour la réalisation des travaux votés ou du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ne souhaitant pas bénéficier du prêt. »

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement de mon collègue Didier Rambaud vise à supprimer une disposition introduite à l’article 26-4 de la loi du 10 juillet 1965 par la loi de finances pour 2024 permettant la souscription d’un éco-PTZ au nom du syndicat de copropriétaires à la même majorité que celle qui est requise pour le vote des travaux, au profit de la nouvelle formule d’emprunt qui reproduit ces conditions.

M. le président. L’amendement n° 118 rectifié, présenté par Mmes Lavarde et Aeschlimann, MM. Anglars et Belin, Mme Bellurot, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Drexler, M. Husson, Mme Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Mouiller, Pellevat, Rapin, Sautarel, Saury, Savin, Sido, Somon et Tabarot, Mme Ventalon et MM. C. Vial et Sol, est ainsi libellé :

Alinéa 23

1° Première phrase

Remplacer les mots :

au remboursement du capital et des intérêts et au paiement des frais et des honoraires

par les mots :

à la quote-part de dépenses de travaux afférente au lot de ce copropriétaire

2° Seconde phrase :

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Laurent Burgoa.

M. Laurent Burgoa. Il est défendu !

M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par Mmes Lavarde et Aeschlimann, M. Belin, Mme Bellurot, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Drexler, M. Husson, Mme Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Mouiller, Pellevat, Rapin, Sautarel, Saury, Savin, Sido, Somon et Tabarot, Mme Ventalon et MM. C. Vial et Sol, est ainsi libellé :

Alinéa 25

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Laurent Burgoa.

M. le président. L’amendement n° 84, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 26

Remplacer les mots :

comporte des facilités de remboursement anticipé pour tenir compte du

par les mots :

ne peut prévoir aucuns frais au titre du remboursement anticipé lorsque l’emprunteur s’acquitte du solde de l’emprunt suite au

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Le prêt global collectif est conçu pour accompagner les copropriétaires dans le financement des travaux à réaliser et, surtout, pour faciliter le préfinancement des subventions publiques. Ces prêts ont vocation à bénéficier d’une garantie publique dans les copropriétés en difficulté. Il nous paraît donc important de préciser dans la loi que le remboursement anticipé du solde de l’emprunt à la suite du versement des subventions publiques ne donne lieu à aucuns frais ni indemnité.

Nous profitons de cet amendement pour demander au Gouvernement de reconsidérer la recommandation de la Banque des territoires de porter le financement considéré à 150 millions d’euros par an pour permettre au réseau Procivis d’avancer sans intérêt le montant des subventions publiques.

M. le président. L’amendement n° 120 rectifié, présenté par Mmes Lavarde et Aeschlimann, MM. Anglars et Belin, Mme Bellurot, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Drexler, M. Husson, Mme Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Mouiller, Pellevat, Rapin, Sautarel, Saury, Savin, Sido, Somon et Tabarot, Mme Ventalon et MM. C. Vial et Sol, est ainsi libellé :

Alinéa 26

Supprimer les mots :

ou du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ayant refusé d’y participer

La parole est à M. Laurent Burgoa.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’amendement n° 145 a deux objectifs.

Le premier objectif est d’assurer l’articulation du nouveau prêt collectif global pour les copropriétés avec l’éco-PTZ copropriété. La commission n’y est pas opposée, même si elle avait estimé dans un premier temps que les deux dispositifs pouvaient fonctionner en l’état.

Le second objectif consiste à inscrire dans le code de la construction et de l’habitation des dispositions qui, aux termes du projet de loi initial, devaient figurer dans le code de la consommation. Là, la commission a estimé plus judicieux de faire apparaître l’ensemble des dispositions relatives au prêt collectif dans un seul et unique texte, à savoir la loi du 10 juillet 1965, et non dans deux textes différents, sans pour autant modifier en substance la législation. Voilà qui sera beaucoup plus lisible pour les copropriétaires. Sur cet amendement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

L’amendement n° 118 rectifié vise à ce que le copropriétaire refusant de participer au prêt ne soit redevable que de sa quote-part, et non des intérêts, des frais et des honoraires liés au prêt. Dans certains cas, des copropriétaires pourraient avoir versé leur quote-part avant la réception du prêt ; en revanche, dans le cas où ils feraient connaître leur refus au bout de deux mois avant de procéder au remboursement au bout de six mois, il ne serait pas anormal de leur imposer la prise en charge d’une partie des intérêts du prêt et de certains frais. En conséquence, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement n° 119 rectifié tend à ce que ce soient les copropriétaires et les banques qui fixent la durée du prêt en fonction des besoins et des situations, plutôt qu’un décret. L’idée de fixer la durée du prêt par décret et de retenir une durée unique résulte du rapport de la Banque des territoires : celle-ci avait estimé que la durée du prêt devrait être suffisamment longue pour minimiser les charges des copropriétaires, tout en évitant d’encourager les copropriétaires susceptibles de trouver des conditions favorables d’emprunt de le refuser.

Cette proposition, reprise dans le présent projet de loi, est présentée comme une garantie. J’invite le Gouvernement à nous expliquer ses intentions et à préciser si la durée du prêt sera bel et bien fixée par décret.

L’amendement n° 84 vise à aller au-delà des facilités de remboursement anticipé prévues par le texte en proposant un remboursement sans frais. Cela n’est pas forcément justifié, sachant que cette facilité reste un coût pour la banque. Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable, comme je l’ai fait lors de l’examen de cet amendement en commission.

Enfin, l’avis sera également défavorable sur l’amendement n° 120 rectifié, amendement de cohérence avec le précédent.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je tiens à saluer l’avis de sagesse de Mme la rapporteure sur l’amendement n° 145 de M. Rambaud. Le Gouvernement y est également favorable : il est pertinent dans ses deux dispositifs et assurera une meilleure coordination avec les avancées qui ont été votées via la loi de finances. Si le Sénat décidait de l’adopter, les autres amendements en discussion commune n’auraient plus d’objet. Je tiens néanmoins à vous présenter l’avis que le Gouvernement leur réservait.

Concernant l’amendement n° 118 rectifié, nous serions prêts à soutenir la première partie du dispositif : en effet, si les copropriétaires refusaient de participer au prêt, ils ne devraient pas avoir à en payer les frais. Néanmoins, la seconde partie du dispositif pose problème en ce qu’elle remet en cause le principe de solidarité entre copropriétaires, inhérent à la création de ce prêt. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.

J’en viens à l’amendement n° 119 rectifié. Confier à un décret le soin de fixer la durée du prêt visait initialement à s’assurer que celle-ci soit suffisamment longue. Mais cela peut s’avérer contraignant et il est difficile de réglementer une durée qui peut correspondre à des besoins très variés. Ainsi, nous demandons que cet amendement soit retiré, au profit de l’amendement n° 145.

Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 84 et 120 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 145 – je précise que son adoption ferait tomber les autres amendements en discussion commune, excepté le n° 118 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 119 rectifié, 84 et 120 rectifié n’ont plus d’objet.

Monsieur Burgoa, l’amendement n° 118 rectifié est-il maintenu ?

M. Laurent Burgoa. Compte tenu de l’avis de la commission et de l’excellente explication de Mme la rapporteure, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 118 rectifié est donc retiré.

L’amendement n° 123, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11

Remplacer les mots :

la première occurrence du mot : « à » est remplacée

par les mots :

à la première occurrence, et à la première phrase de l’article 26-8, le mot : « à » est remplacé

II. – Alinéa 19

Remplacer les mots :

qui peut librement procéder au versement par anticipation de sa quote-part de l’emprunt restant à sa charge

par les mots et une phrase ainsi rédigée :

et est transférée aux propriétaires successifs en cas de mutation. Le propriétaire du lot peut librement verser par anticipation au syndicat des copropriétaires les sommes dont il reste redevable au titre du remboursement de l’emprunt. Dès leur versement, ces sommes sont affectées sans délai par le syndic au remboursement de l’emprunt.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de rétablir le principe d’un emprunt attaché au lot de copropriété, et non à la personne du propriétaire.

Je rappelle que le prêt collectif que nous entendons créer au travers du présent texte a pour caractéristique innovante non pas de s’attacher aux copropriétaires individuels, mais au syndicat de copropriété : seule la situation du syndicat est examinée au moment de la souscription. Il n’y a donc aucune raison, en cas de vente, pour que soit requis l’accord de la banque et du garant avant le transfert au nouveau propriétaire de la charge de la contribution au remboursement de l’emprunt.

L’amendement tend à rétablir le principe d’un transfert de l’emprunt aux propriétaires successifs du lot, conservant ainsi la disposition introduite en commission qui permet au propriétaire du lot de procéder librement à un remboursement anticipé à tout moment, y compris à l’occasion de sa vente.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Pour rappel, le texte initial ne prévoyait pas de modalité de remboursement anticipé par un copropriétaire. Cette faculté est à la fois une liberté laissée au copropriétaire, comme à un futur acquéreur, et une garantie pour le prêteur et la caution, si la dette est soldée plus rapidement.

Cette faculté a été introduite en commission à l’Assemblée nationale, avant d’être supprimée en séance. Par la suite, la commission des affaires économiques du Sénat l’a réintroduite dans la forme existante pour les autres prêts, c’est-à-dire un remboursement de droit à la vente du lot, sauf accord du prêteur, de la caution et de l’acquéreur.

Par son amendement, le Gouvernement propose une formulation de compromis qui revient à la rédaction choisie en commission à l’Assemblée nationale. Nous y retrouvons ce que nous souhaitions, à savoir la faculté d’un remboursement anticipé, essentielle à nos yeux.

En conséquence, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 123.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 162, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 8

Remplacer les mots :

au dernier

par les mots :

au troisième

II. – Après l’alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Avant d’accorder le présent prêt, l’établissement prêteur peut consulter le fichier prévu à l’article L. 751-1 du code de la consommation, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 751-6 du même code, sans préjudice de la vérification de la solvabilité des copropriétaires qui participent à l’emprunt. » ;

III. – Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

3° bis Au deuxième alinéa de l’article 26-7, les mots : « ou une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier » sont remplacés par les mots : « , le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations ou La Poste, dans les conditions définies à l’article L. 518-25 du code monétaire et financier » ;

IV. – Alinéa 13, première phrase

Supprimer les mots :

, dont le montant ne peut excéder le montant total des quotes-parts de dépenses des copropriétaires n’ayant pas refusé le bénéfice de ce prêt collectif,

V. – Alinéa 21

Remplacer les mots :

ou par une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier

par les mots :

, par le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations ou La Poste, dans les conditions définies à l’article L. 518-25 du code monétaire et financier

VI. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le chapitre 1er du titre V du livre VII du code de la consommation est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 751-2, les mots : « à l’article 26-7 » sont remplacés par les mots : « aux articles 26-7 et 26-12 » et les mots : « à l’emprunt mentionné » sont remplacés par les mots : « aux emprunts mentionnés » ;

2° À l’article L. 751-3, au premier alinéa de l’article L. 751-5 et au deuxième alinéa de l’article L. 751-6, les mots : « au premier alinéa de » sont remplacés par le mot : « à ».

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Le nouveau prêt global et collectif créé à l’article 2 ne pourra fonctionner que si les banques et les cautions peuvent acquérir une juste vision du risque et respecter leur obligation de pratiquer un prêt responsable, c’est-à-dire de ne prêter qu’à des personnes en mesure de rembourser et de ne pas contribuer au surendettement de celles-ci ou conduire à un reste à vivre insuffisant. Tel est l’objet du présent amendement, qui vise précisément à permettre à l’établissement prêteur de consulter le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) en vue d’identifier les copropriétaires en situation de fragilité financière.

Toutefois, cette consultation ne peut se faire que dans le cadre d’une analyse de solvabilité classique, à l’image de ce qui existe déjà pour les crédits à la consommation et immobiliers.

Le dispositif proposé prévoit cette même possibilité pour l’organisme de caution, ce qui entraîne une adaptation des articles L. 751-2 et suivants du code de la consommation afin de permettre la levée du secret professionnel des agents de la Banque de France à l’égard de ces organismes.

En cohérence, l’amendement supprime une mention de l’article 26-9 de la loi du 10 juillet 1965, qui, tout en ayant la même finalité, n’était pas aussi complet.

Enfin, l’alinéa 20 de l’article 2 prévoit que « [l]e cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, par une société de financement ou par une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier ». On compte parmi ces institutions la Banque de France ; or une loi ne peut créer une charge financière, même hypothétique, à son encontre. En conséquence, nous proposons de supprimer les références à l’institut d’émission des départements d’outre-mer, à l’institut d’émission d’outre-mer et à la Banque de France.

M. le président. L’amendement n° 124, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 13, première phrase

1° Supprimer les mots :

, dont le montant ne peut excéder le montant total des quotes-parts de dépenses des copropriétaires n’ayant pas refusé le bénéfice de ce prêt collectif,

2° Après les mots :

au nom du syndicat

insérer les mots :

et réservé

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement est essentiel en ce qu’il permet de revenir à la philosophie du prêt collectif, qui doit être souscrit par le syndicat des copropriétaires.

La commission a voté un amendement visant à limiter le montant total des fonds empruntés au total des quotes-parts des dépenses des copropriétaires qui n’ont pas refusé le prêt. Cet ajout nous semble contraire à d’autres dispositions de l’article 2 qui prévoient explicitement le remboursement anticipé de la quote-part des copropriétaires. C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer cette disposition.

M. le président. L’amendement n° 163, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 13, première phrase

Après les mots :

au nom du syndicat

insérer les mots :

et réservé

La parole est à Mme la rapporteure pour présenter cet amendement puis pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 124.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement n° 163 tend à préciser que le compte bancaire recevant le prêt et les subventions pour travaux doit être à la fois séparé et réservé à cet effet.

Quant à l’amendement n° 124, il est doublement satisfait par ces deux amendements de la commission. Concernant le montant du prêt, l’amendement n° 162 opère une modification plus large, garantissant, par une autre modalité, la possibilité de consulter le fichier FICP tenu par la Banque de France. Quant à l’amendement n° 163, il vise, comme je viens de l’indiquer, à préciser la rédaction du texte sur le caractère réservé du compte bancaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 162 et 163 ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. L’amendement n° 162 révèle une différence d’approche entre le Gouvernement et la commission en ce qu’il remet en cause tout l’intérêt du prêt collectif, qui, comme son nom l’indique, doit être souscrit au nom du syndicat des copropriétaires.

L’analyse de la situation propre de chaque copropriétaire revient à proposer un prêt à adhésion individuelle. Or celui-ci existe déjà et n’est pas remis en cause par le présent texte. Le fait que la banque puisse refuser de prêter à tout copropriétaire qui aurait connu un incident de paiement empêchera la copropriété de recourir au prêt collectif.

L’amendement du Gouvernement est en réalité concurrent de l’amendement n° 162. Si celui-ci était adopté, il mettrait en grande difficulté le recours au prêt collectif qui, de facto, se verrait privé de sa substance.

En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 163.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 162.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 124 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 163.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 146, présenté par MM. Rambaud, Buis, Buval, Fouassin et Patriat, Mme Schillinger, MM. Bitz et Mohamed Soilihi, Mme Havet, M. Omar Oili, Mme Phinera-Horth, MM. Iacovelli, Lemoyne et Théophile, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Haye, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, MM. Patient, Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 26 - …. – Les dispositions de l’article 33 ne sont pas applicables aux décisions prises sur le fondement du III de l’article 26-4. »

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement, dont mon collègue Didier Rambaud est le premier cosignataire, a pour objet d’exclure expressément l’application de l’article 33 de la loi du 10 juillet 1965 au financement créé par l’article 2 du présent projet de loi.

L’article 33 permet aux copropriétaires opposants ou défaillants lors de la prise de décision de travaux de demander l’échelonnement des paiements sur dix ans. Dans le cadre du nouvel emprunt créé à l’article 2, tous les copropriétaires participent à l’emprunt selon les modalités contractuelles, ou, en cas de refus, versent dans un délai de six mois la totalité de leur quote-part du prix des travaux.

L’option d’échelonnement des paiements prévue à l’article 33 doit donc être écartée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement visant à rendre l’article 33 de la loi du 10 juillet 1965 inapplicable au nouveau prêt collectif est logique puisqu’il permet à un copropriétaire qui s’y est opposé ou qui n’a pas participé à la décision de demander au syndic l’échelonnement des paiements sur dix ans.

Or la durée du prêt sera fixée par décret et la différence de durée entre les deux dispositions pourrait rendre la situation très difficile à gérer pour les syndics, voire impossible, si un nombre important de copropriétaires demandaient à en bénéficier.

Cette exemption nous semble nécessaire. Aussi la commission émet-elle un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 146.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 2 bis A

Après l’article 2

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 19, présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article 244 quater V du code général des impôts, il est inséré un article 244 quater… ainsi rédigé :

« Art. 244 quater … - I. – Peuvent consentir aux copropriétés et bailleurs sociaux des prêts ne portant pas intérêt, dans les conditions prévues au présent article, les établissements de crédit et les sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier pour les opérations visées à l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme qui sont engagées soit par des copropriétés, soit par des bailleurs sociaux au sens de l’article L. 411-10 du code de la construction et de l’habitation et qui ont pour objet la rénovation énergétique ou des travaux ayant pour objet ou pour effet de garantir la salubrité, l’intégrité de l’immeuble ou la sécurité des personnes.

« II. – Peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des prêts ne portant pas intérêt mentionnés au I du présent article les établissements de crédit et les sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu ou d’un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

« Les conditions d’attribution et les modalités des prêts ne portant pas intérêt mentionnés au A sont fixées chaque année par décret signé par les ministres chargés du logement et de l’économie.

« III. – Le montant du crédit d’impôt est égal à l’écart entre la somme actualisée des mensualités dues au titre du prêt ne portant pas intérêt et la somme actualisée des montants perçus au titre d’un prêt de même montant et de même durée de remboursement, consenti à des conditions normales de taux à la date d’émission de l’offre de prêt ne portant pas intérêt.

« La période de mise à disposition des fonds n’est pas prise en compte pour le calcul du crédit d’impôt.

« Les modalités de calcul du crédit d’impôt et de détermination du taux mentionné au premier alinéa sont fixées par décret signé par les ministres chargés du logement et de l’économie.

« Le crédit d’impôt fait naître au profit de l’établissement de crédit ou la société de financement une créance, inaliénable et incessible, d’égal montant. Cette créance constitue un produit imposable rattaché à hauteur d’un cinquième au titre de l’exercice au cours duquel l’établissement de crédit ou la société de financement a versé des prêts ne portant pas intérêt et par fractions égales sur les exercices suivants.

« En cas de fusion, la créance de la société absorbée est transférée à la société absorbante. En cas de scission ou d’apport partiel d’actif, la créance est transmise à la société bénéficiaire des apports à la condition que l’ensemble des prêts ne portant pas intérêt y afférents et versés à des personnes physiques par la société scindée ou apporteuse soient transférés à la société bénéficiaire des apports.

« Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L du code général des impôts ou les groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C du même code ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à la condition que les associés soient redevables de l’impôt sur les sociétés ou soient des personnes physiques participant à l’exploitation au sens du 1° bis du I de l’article 156 dudit code. »

II. – Le I s’applique aux prêts en cause consentis entre le premier jour du premier mois à compter de la publication du décret prévu au I et le 31 décembre 2027.

III. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Grégory Blanc.

M. Grégory Blanc. Cet amendement vise à compléter la palette d’outils mis à disposition par le présent texte et à étendre le soutien aux personnes qui souhaitent s’engager dans des travaux de lutte contre l’insalubrité.

Il vise ainsi à créer un nouveau prêt à taux zéro, soutenu et réglementé par l’État, s’inscrivant dans la lignée des PTZ déjà existants et qui favorisent aujourd’hui les emprunteurs des zones urbaines et pour des logements neufs.

Nous souhaitons la mise en place d’un mécanisme financier consacré à ces rénovations, qui résulte d’ailleurs d’une préconisation du Conseil national de la refondation (CNR) de juin 2023 : il avait été constaté que l’acquisition d’un logement ancien en zone détendue, sous condition de réaliser des travaux de rénovation, nécessitait la mise en place de ce type d’outils.

M. le président. L’amendement n° 55, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – A. – Peuvent consentir aux copropriétés et bailleurs sociaux des prêts ne portant pas intérêt, dans les conditions prévues au présent article, les établissements de crédit et les sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier pour les opérations visées à l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme qui sont engagées soit par des copropriétés, soit par des bailleurs sociaux au sens de l’article L. 411-10 du code de la construction et de l’habitation et qui ont pour objet la rénovation énergétique ou des travaux ayant pour objet ou pour effet de garantir la salubrité, l’intégrité de l’immeuble ou la sécurité des personnes.

B. – Peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des prêts ne portant pas intérêt mentionnés au A du présent article les établissements de crédit et les sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu ou d’un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

Les conditions d’attribution et les modalités des prêts ne portant pas intérêt mentionnés au A sont fixées chaque année par décret signé par les ministres chargés du logement et de l’économie.

C. – Le montant du crédit d’impôt est égal à l’écart entre la somme actualisée des mensualités dues au titre du prêt ne portant pas intérêt et la somme actualisée des montants perçus au titre d’un prêt de même montant et de même durée de remboursement, consenti à des conditions normales de taux à la date d’émission de l’offre de prêt ne portant pas intérêt.

La période de mise à disposition des fonds n’est pas prise en compte pour le calcul du crédit d’impôt.

Les modalités de calcul du crédit d’impôt et de détermination du taux mentionné au premier alinéa sont fixées par décret signé par les ministres chargés du logement et de l’économie.

Le crédit d’impôt fait naître au profit de l’établissement de crédit ou la société de financement une créance, inaliénable et incessible, d’égal montant. Cette créance constitue un produit imposable rattaché à hauteur d’un cinquième au titre de l’exercice au cours duquel l’établissement de crédit ou la société de financement a versé des prêts ne portant pas intérêt et par fractions égales sur les exercices suivants.

En cas de fusion, la créance de la société absorbée est transférée à la société absorbante. En cas de scission ou d’apport partiel d’actif, la créance est transmise à la société bénéficiaire des apports à la condition que l’ensemble des prêts ne portant pas intérêt y afférents et versés à des personnes physiques par la société scindée ou apporteuse soient transférés à la société bénéficiaire des apports.

Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L du code général des impôts ou les groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C du même code ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt peut être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à la condition que les associés soient redevables de l’impôt sur les sociétés ou soient des personnes physiques participant à l’exploitation au sens du 1° bis du I de l’article 156 dudit code.

II. – Le I s’applique aux prêts en cause consentis entre le premier jour du premier mois à compter de la publication du décret prévu au même I et le 31 décembre 2027.

III. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous sommes nombreux à nous interroger sur les moyens mis en œuvre pour éradiquer l’habitat dégradé, ou tout du moins le résorber. Je l’ai dit lors de la discussion générale : plus de 9 milliards d’euros de travaux seront nécessaires.

Dans le sens de l’amendement précédent, nous proposons de créer un prêt à taux zéro pour ces travaux dans les copropriétés dégradées. Néanmoins, nous ne nous faisons aucune illusion sur les passoires énergétiques puisque le Gouvernement vient d’annoncer 1 milliard d’euros d’économies en rabotant le budget consacré au dispositif MaPrimeRénov’. En attendant, il ferait mieux de s’attaquer aux profits records des fournisseurs d’énergie.

Une chose est sûre : ces choix politiques ne seront bons ni pour tenir nos engagements en matière de réduction d’émissions de CO2, ni pour relancer le secteur du bâtiment, alors que 150 000 emplois sont menacés, ni pour alléger les factures d’énergies de nos concitoyens. Pour notre part, nous proposons, notamment au travers de cet amendement, de soutenir une autre politique du logement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cette proposition de prêt ne nous semble pas évidente tant au regard des dispositifs qui existent déjà, comme les éco-PTZ copropriété, que du nouveau prêt collectif dont il est question dans ce texte. Par ailleurs, aucun chiffrage de son coût n’est aujourd’hui fourni.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je rejoins complètement l’argumentation de Mme les rapporteure.

L’amendement n° 19 vise à créer un nouveau crédit d’impôt pour le financement à taux zéro des travaux permettant de garantir la salubrité, l’intégrité de l’immeuble ou la sécurité des personnes vivant en copropriété. Un tel dispositif crée un nouveau coût pour l’État. Or il n’a pas été évalué. Par ailleurs, l’éco-PTZ existe déjà pour financer des travaux à taux zéro en copropriété. (Protestations sur les travées du groupe GEST.) Actuellement, il permet de financer les travaux de rénovation énergétique et nous pourrions réfléchir à élargir le champ des travaux éligibles pour couvrir ceux qui sont réalisés à des fins de salubrité. (Mêmes mouvements.) Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Quant à l’amendement n° 55, il est satisfait puisque l’amendement n° 145, que vous avez adopté tout à l’heure, permet d’ores et déjà de mobiliser l’éco-PTZ dans le cadre de la création d’un nouveau prêt. Nous demandons donc qu’il soit retiré, faute de quoi l’avis sera défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 55.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 6 est présenté par M. Féraud, Mmes Brossel et de La Gontrie et M. Jomier.

L’amendement n° 116 est présenté par M. Brossat, Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 9-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article 9- … ainsi rédigé :

« Art. 9- …. – Lorsqu’un lot de copropriété fait l’objet de la déclaration prévue à l’article L. 324-1-1 du code du tourisme, le copropriétaire ou, par son intermédiaire, le locataire qui y a été autorisé, en informe le syndic. Un point d’information par le syndic relatif à l’activité de location de meublés touristiques au sein de la copropriété est inscrit à l’ordre du jour de la plus prochaine assemblée générale. Le syndic affiche cette information dans les parties communes de l’immeuble. »

La parole est à M. Rémi Féraud, pour présenter l’amendement n° 6.

M. Rémi Féraud. Cet amendement a trait aux meublés de tourisme. On parle souvent des locations touristiques saisonnières quand on évoque la crise du logement, mais aussi pour souligner la concurrence, en partie déloyale, qu’elles représentent pour l’hôtellerie classique – on peut penser au phénomène de niche fiscale, au taux de TVA à 0 %, aux différences de contrôles, etc.

En l’occurrence, nous souhaitons évoquer les meublés de tourisme au travers de l’habitat dégradé. En effet, ils entraînent des nuisances dans les copropriétés, à Paris comme dans l’ensemble du territoire national. Ceux qui mettent en location leur bien pour une courte durée ne sont soumis à aucune obligation d’information. Or ces modes de location peuvent créer des troubles de voisinages, d’autant plus lorsque des activités illicites sont pratiquées à cette occasion.

Le présent amendement a donc pour objet de renforcer la transparence et le principe de responsabilité, en imposant aux copropriétaires – ou aux locataires qui y ont été autorisés par leur propriétaire – de déclarer au syndic la location de leur logement pour une courte durée. De plus, nous souhaitons que cette information fasse l’objet d’un point à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires chaque année, lorsque cela est nécessaire.

Je suis certain que, face à certaines dérives et dégradations de la qualité de vie dans les immeubles, cet élément de transparence et de responsabilité sera de nature à améliorer grandement la situation.

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 116.

M. Ian Brossat. Cet amendement concerne, lui aussi, les locations touristiques de courte durée, notamment effectuées via la plateforme Airbnb.

Ceux d’entre nous qui sont élus locaux savent combien ces locations engendrent de nuisances et participent souvent à la dégradation des copropriétés. En effet, celles-ci ne sont pas conçues pour faire face à un afflux de touristes : le va-et-vient des valises, la diffusion des codes d’accès et la surutilisation des ascenseurs dégradent bien souvent les parties communes.

De plus, il est rare que les propriétaires informent le syndic de copropriété lorsqu’ils mettent en location leur bien via Airbnb. Pourtant, l’impact de cette activité sur l’ensemble de la copropriété rend nécessaire l’information des copropriétaires.

Nous proposons donc une mesure simple qui relève du bon sens : pour toute location touristique, le syndic doit recevoir une information préalable et celle-ci doit être affichée dans les parties communes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Nous savons tous qu’il y a matière à légiférer sur les locations de meublés de tourisme. Ces amendements identiques visent à rendre obligatoire l’information du syndic et des copropriétaires lorsqu’un lot est loué comme meublé de tourisme. Même si cette mesure nous semble intéressante sur le fond, nous considérons qu’elle ne répondra pas à l’objectif de ce texte, à savoir accélérer et simplifier la rénovation des copropriétés dégradées.

Nous pensons que ce sujet sera véritablement débattu lors de l’examen au Sénat d’une prochaine proposition de loi ; nous préférons donc vous donner rendez-vous à ce moment-là.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Nous abordons un certain nombre d’amendements relatifs à la location touristique, qui diffère de la location traditionnelle.

Je vous renvoie à la proposition de loi défendue par Annaïg Le Meur et Inaki Echaniz, adoptée par l’Assemblée nationale, qui vise justement à corriger les déséquilibres du marché locatif sur trois aspects.

Premièrement, sur le plan fiscal, il conviendra de rééquilibrer certains abattements – nous en débattrons plus tard, si vous le souhaitez.

Deuxièmement, cette proposition de loi offre aux élus locaux une palette d’outils permettant de mieux réguler les locations touristiques.

Enfin, elle traite des questions de rénovation énergétique, qui n’est nullement obligatoire pour les locations touristiques. Ce n’est pas normal, car le même appartement loué de façon traditionnelle serait soumis à un diagnostic de performance énergétique (DPE) et à des obligations de rénovation.

Cette très belle proposition de loi a été adoptée par l’Assemblée nationale avec le soutien du Gouvernement, et nous souhaitons la faire prospérer.

Nous l’inscrirons donc à l’ordre du jour du Sénat dans les semaines ou les mois à venir, afin de permettre un débat plein et entier sur la question du rééquilibrage entre location touristique et location traditionnelle.

Si les règles en vigueur induisent une distorsion, alors, évidemment, de plus en plus de propriétaires désertent le marché locatif traditionnel et cessent de louer à des résidents dont les besoins sont pérennes pour privilégier la location touristique. Nous souhaitons donc avancer sur ce sujet.

À ce stade de nos discussions, mesdames, messieurs les sénateurs, je demande le retrait de tous les amendements qui traitent de cette question – à défaut, l’avis serait défavorable –, en vous renvoyant à cette initiative parlementaire que le Gouvernement soutient.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 116.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 5 est présenté par M. Féraud, Mmes Brossel et de La Gontrie et M. Jomier.

L’amendement n° 73 rectifié bis est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, MM. Gay, Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :

1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« b bis) La modification des stipulations du règlement de copropriété relatives à la destination de l’immeuble et portant sur la réglementation des meublés de tourisme mentionnés à l’article L. 324-1-1 du code du tourisme, à l’exception des meublés de tourisme loués en conformité avec le premier alinéa du IV du même article ; »

2° Le dernier alinéa est complété par les mots : « à l’exception du cas mentionné au b bis) du présent article ».

La parole est à M. Rémi Féraud, pour présenter l’amendement n° 5.

M. Rémi Féraud. Cet amendement s’inscrit dans la même veine que les précédents : il a trait à l’encadrement de la location de meublés touristiques.

Il s’agit cette fois de faciliter la modification des règles régissant le fonctionnement des copropriétés. Actuellement, pour modifier un règlement de copropriété, l’unanimité de l’assemblée générale est requise ; autrement dit, un seul copropriétaire peut bloquer toute évolution.

Aussi proposons-nous, par cet amendement, que l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, c’est-à-dire la règle de la double majorité, s’applique à ce cas d’espèce : seraient prises désormais à la majorité des deux tiers des voix les décisions par lesquelles une copropriété modifie son règlement en vue d’encadrer plus strictement la pratique de la location de meublés touristiques, évitant ainsi que les habitants d’un immeuble ne soient victimes d’un copropriétaire qui louerait son bien dans des conditions préjudiciables à l’ensemble de la copropriété.

On nous renvoie à la proposition de loi sur les locations touristiques saisonnières ; mais nous l’attendons depuis tellement longtemps ! Elle a, certes, été adoptée par l’Assemblée nationale, mais ses dispositions ne figurent pas, à ma connaissance, dans le texte dont nous discutons aujourd’hui. Or, cet amendement n’ayant, pas plus que les précédents, été jugé irrecevable en application de l’article 45 de la Constitution, il ne saurait être considéré comme étant sans lien avec la question de la prévention de la dégradation de l’habitat.

Ces amendements auraient toute leur place dans le projet de loi que nous sommes en train d’examiner.

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 73 rectifié bis.

M. Ian Brossat. J’irai dans le même sens que mon collègue Rémi Féraud : il s’agit, par cet amendement, de faire en sorte que l’assemblée générale des copropriétaires puisse modifier la destination de l’immeuble et y encadrer la location de meublés de tourisme à la majorité des deux tiers, plutôt qu’à l’unanimité.

J’entends bien les arguments avancés par M. le ministre ; pour autant, sur ce sujet, nous avons depuis quelques années le sentiment que les manœuvres dilatoires sont très fréquentes. Je ne rappelle pas le temps qu’il a fallu pour que la proposition de loi que vous louez, et que j’approuve, soit adoptée…

Je rappelle, en revanche, que le Sénat avait voté la suppression de la niche fiscale relative aux locations touristiques, mais que Bercy s’en est mêlé et a décidé de ne pas appliquer la loi. Ce n’est pas tout à fait rien !

Le présent amendement me paraît tout à fait juste en plus d’être parfaitement dans le sujet du texte, puisqu’il concerne le fonctionnement des copropriétés ; je ne vois donc pas pourquoi nous ne le voterions pas. Un tel vote nous permettrait de commencer d’avancer sur cette question.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Notre collègue Féraud l’a justement souligné : il est vrai que cet amendement n’est pas irrecevable en application de l’article 45 de la Constitution, car il modifie la loi du 10 juillet 1965.

Cependant, comme je l’ai dit précédemment, nous allons avoir une belle occasion d’aborder cette question avec l’inscription prochaine à notre ordre du jour de la proposition de loi de nos collègues députés. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Comme l’a indiqué Mme le rapporteur, une belle occasion va nous être offerte.

Monsieur le ministre, vous avez déjà distillé quelques informations concernant l’inscription prochaine à notre ordre du jour de cette proposition de loi tant attendue. Vous l’avez constaté lors de la discussion générale, les parlementaires – les sénateurs – dans leur ensemble sont extrêmement mobilisés sur tous les sujets relatifs au logement, mais aussi à la régulation des locations saisonnières et des locations de meublés de tourisme.

Si nous voulons répondre à la crise du logement, il nous faut relancer la location de longue durée, laquelle est actuellement – vous le savez, monsieur le ministre – beaucoup moins rentable que ne le sont les locations touristique et saisonnière : le rendement de la première atteint 4 % en moyenne, quand les secondes peuvent rapporter jusqu’à 10 %.

Si nous ne parvenons pas à remettre des logements sur le marché de la location de longue durée, les mêmes graves difficultés qui prévalent aujourd’hui perdureront. Il y a là, en effet, l’un des remèdes qui peuvent être apportés aux problèmes de logement des Français.

Cette proposition de loi transpartisane recevra très certainement au Sénat un accueil favorable, et nous ne manquerons pas de l’enrichir, tant l’amélioration des textes qui nous sont soumis constitue notre marque de fabrique.

Monsieur le ministre, vous nous avez annoncé que ce texte serait inscrit prochainement à notre ordre du jour ; pour l’heure, néanmoins, en matière de calendrier, la visibilité continue de faire défaut. La conférence des présidents a établi un ordre du jour jusqu’au début du mois d’avril ; elle se réunira de nouveau le 20 mars, mais il faudra composer avec la suspension des travaux parlementaires en avril, après quoi il restera grosso modo deux mois, mai et juin. Or le Gouvernement a d’ores et déjà annoncé beaucoup de textes importants : le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, qui est très fortement attendu, ou le grand texte sur le logement, sans compter un éventuel projet de loi sur la souveraineté énergétique. Dans un tel contexte, comment cette proposition de loi pourra-t-elle être examinée ?

Le Sénat recevrait avec beaucoup d’intérêt les détails plus précis que vous pourriez nous donner à ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je tiens tout d’abord à exprimer mon total accord avec le diagnostic posé par la présidente Dominique Estrosi Sassone. Nous devons évidemment rétablir un équilibre entre la location touristique et la location traditionnelle.

Nous ne pouvons nous satisfaire de la situation actuelle : dans les grandes villes ou dans les zones sous tension, des centaines de candidats à la location se bousculent pour quelques biens disponibles en agence ; ils font la queue, envoient des mails et se retrouvent sur d’interminables listes d’attente.

Dans le même temps, on assiste à une éviction de nombreux biens du marché locatif traditionnel au profit de la location touristique, en raison d’une différence de rentabilité qui a été très bien décrite, aggravée par une distorsion d’abattement fiscal que l’Assemblée nationale et le Sénat ont voulu corriger.

Je vous invite à examiner les votes qui furent les miens à ce sujet lorsque j’étais encore député et président de la commission des affaires économiques. Monsieur Brossat, en effet, le processus législatif a été long, y compris entre le dépôt de cette proposition de loi, en avril 2023, et son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Tout a été fait, à l’époque, par la présidence de la commission des affaires économiques pour pousser à son examen ; vous pouvez donc me compter parmi vos alliés sur cette question.

Je peux vous assurer, madame la présidente de la commission, qu’en la matière ma volonté d’avancer ne présente aucune ambiguïté. Vous m’avez interrogé sur le calendrier précis ; je peux à tout le moins vous annoncer qu’une réunion interministérielle a bel et bien validé le principe d’une inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour du Sénat à l’occasion d’une prochaine réunion de la conférence des présidents. Je vous invite donc à soutenir ladite inscription lorsque la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement en formulera la demande, ce qu’elle fera avec joie dans les temps à venir.

Pour ce qui est des présents amendements, je vous renvoie donc à la discussion en cours sur les meublés touristiques.

Une alerte, toutefois : en l’état actuel du droit, la modification des stipulations du règlement de copropriété relatives à la destination de l’immeuble ne peut être décidée qu’à l’unanimité : chaque copropriétaire doit y consentir. Il est probable que, dans le cadre du futur débat sur la loi de rééquilibrage, nous ayons à vérifier la constitutionnalité de toute mesure assouplissant cette exigence. Mes services craignent qu’une telle modification des règles de majorité puisse être considérée comme une atteinte disproportionnée au droit de propriété, ce qui emporterait un risque constitutionnel. Je vous invite à en discuter de nouveau lorsque ce débat aura lieu : nous aurons à nous assurer qu’une telle disposition « tourne » bien constitutionnellement parlant et à avancer dans un esprit de consensus.

Je demande donc aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5 et 73 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Après l’article 2
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 2 bis

Article 2 bis A

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers amendements sont identiques.

L’amendement n° 20 rectifié est présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 91 rectifié est présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 125 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifiée :

1° À la fin de l’intitulé, le mot : « énergétique » est supprimé ;

2° L’article L. 312-7 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– au premier alinéa, la première occurrence du mot : « énergétique » est supprimé et, à la fin, sont ajoutés les mots : « et de rénovation des copropriétés en difficulté » ;

– au 2° , la référence : « 26-8 » est remplacée par la référence : « 26-13 » ;

b) À la seconde phrase du IV, les mots : « et la condition de ressources » sont remplacés par les mots : « , la condition de ressources ainsi que les catégories de copropriétés en difficulté ».

II. – Au c du 6° de l’article L. 221-7 du code de l’énergie, le mot : « énergétique » est supprimé.

III. – Au deuxième alinéa de l’article L. 315-14 du code de la consommation, le mot : « énergétique » est supprimé.

La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à rétablir l’article 2 bis A, supprimé en commission, qui nous semble particulièrement important en ce qu’il étend le champ d’intervention du fonds de garantie pour la rénovation énergétique à l’ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté.

La réintroduction de cet article dans le projet de loi est essentielle au regard des objectifs que nous nous sommes fixés et que nous avons amplement évoqués en discussion générale.

Pour rappel, cet article prévoit d’accorder la garantie de l’État aux copropriétés qui se trouvent exclues du prêt par les organismes de caution afin de leur offrir un accès effectif au crédit. Sa suppression va donc à l’encontre des objectifs que nous partageons.

Certes, un argument est susceptible de nous être opposé, selon lequel le financement de ce fonds relèverait d’un texte de nature financière. Je vous propose néanmoins de rétablir cet article issu d’un amendement déposé par le Gouvernement à l’Assemblée nationale. Je demande de surcroît une augmentation des ressources allouées au fonds, car ses besoins croissent avec l’élargissement de son objet.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 91 rectifié.

Mme Viviane Artigalas. L’article 2 bis A avait pour objet l’élargissement du champ d’intervention du fonds de garantie pour la rénovation énergétique à l’ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté.

À l’heure actuelle, 60 % des copropriétés sont inéligibles à un prêt collectif, en raison des impayés de charges. Plus de 80 000 copropriétés sont considérées comme fragiles, c’est-à-dire présentent des impayés supérieurs au seuil d’alerte ; elles abritent plus de 4,8 millions de ménages vivant sous le seuil de pauvreté.

Or le montant annuel des travaux de rénovation à réaliser, et donc potentiellement à financer, au cours des prochaines années est de l’ordre de 9 milliards d’euros. La garantie publique est, de ce fait, indispensable.

Les travaux de la commission ont à juste titre révélé que cette garantie publique n’était pas financée. Comme l’a dit la rapporteure, nous attendons, monsieur le ministre, que vous nous fournissiez des éléments d’information quant aux modalités de financement qui seront prévues pour que cette garantie soit effectivement opérationnelle, et ce dans les meilleurs délais.

Sous cette réserve, notre amendement vise à rétablir l’article 2 bis A.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l’amendement n° 125.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. À votre demande, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais prendre le temps de répondre à cette question, qui a fait l’objet de nombreux débats en commission. Le Gouvernement partage totalement la volonté de rétablir l’article 2 bis A ; précisément, cet amendement a pour objet de répondre à la nécessité que la garantie du nouveau prêt collectif soit financée. Ce prêt constitue un outil particulièrement innovant et intéressant ; reste à le consolider en instituant une garantie publique – là est le nerf de la guerre, comme vous l’avez bien indiqué, madame la rapporteure, tout au long de nos échanges.

Le Gouvernement propose d’étendre le champ d’intervention du fonds de garantie pour la rénovation énergétique pour y inclure l’intégralité des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté, sans le limiter aux seuls travaux de rénovation énergétique.

J’ai été interpellé sur la question des ressources qui seront allouées à ce fonds pour tenir compte de l’élargissement de son champ. Avant tout, nous devons poursuivre la concertation avec les parties prenantes, notamment avec les banques et les organismes de caution, au sujet des modalités de mobilisation de ce fonds de garantie : taux de couverture, typologie des copropriétés en difficulté qui seraient couvertes.

Ces éléments permettront de déterminer de manière extrêmement précise les besoins de financement de ce fonds, sachant que le risque d’impayés ne portera que sur le reste à charge de ces copropriétés, auxquelles l’Anah apporte par ailleurs une aide très importante, en proposant des taux de subvention de 80 % à 90 % à celles d’entre elles qui font l’objet d’un plan de sauvegarde.

Les ressources de ce fonds seront précisées en loi de finances, et toutes les options seront examinées, je m’y engage : mobilisation des ressources déjà disponibles du fonds de garantie, abondement par l’État ou par ses opérateurs. Nous ne demandons aucun chèque en blanc : nous poursuivons le travail en proposant une rédaction qui – je l’espère, madame la rapporteure – répond aux interrogations de la commission des affaires économiques de façon plus précise que ne le faisait le texte initial.

M. le président. L’amendement n° 56, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifiée :

1° À la fin de l’intitulé, le mot : « énergétique » est supprimé ;

2° L’article L. 312-7 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– au premier alinéa, le mot : « énergétique » est supprimé et, à la fin, sont ajoutés les mots : « et de rénovation des copropriétés en difficulté » ;

– au 2° , la référence : « 26-8 » est remplacée par la référence : « 26-13 » ;

b) À la seconde phrase du IV, les mots : « et la condition de ressources » sont remplacés par les mots : « , la condition de ressources ainsi que les catégories de copropriétés en difficulté ».

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous partageons la position exprimée par les auteurs des amendements précédents et demandons à notre tour le rétablissement de ce fonds de garantie pour la rénovation.

On le sait, intervenir efficacement suppose de s’attaquer à la pauvreté et au manque de moyens : ne voter que des mesures procédurales facilitant des interventions que personne ne sera en mesure de payer serait faire fausse route.

J’abonde dans le sens de mes collègues : il faut que ce fonds soit bien doté si l’on veut lutter efficacement contre la pauvreté et contre l’habitat dégradé qui en découle.

M. le président. Le sous-amendement n° 175, présenté par M. Buis, est ainsi libellé :

Amendement n° 56

Compléter cet amendement par deux paragraphes ainsi rédigés :

…. – Au c du 6° de l’article L. 221-7 du code de l’énergie, le mot : « énergétique » est supprimé.

…. – Au deuxième alinéa de l’article L. 315-14 du code de la consommation, le mot : « énergétique » est supprimé.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Les amendements nos 20 rectifié, 91 rectifié et 56 ont pour objet de rétablir l’article 2 bis A, supprimé en commission. Cet article prévoyait notamment de transformer le fonds de garantie pour la rénovation énergétique en fonds de garantie pour la rénovation afin de tenir compte de l’élargissement de son champ d’intervention à l’ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté, au lieu des seuls travaux de rénovation énergétique.

Ce fonds étant également mentionné dans le code de l’énergie et dans le code de la consommation, il est nécessaire d’adopter des mesures de coordination tendant à modifier l’intitulé de ce fonds en leur sein.

Il s’agit donc d’un sous-amendement de précision rédactionnelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La commission est favorable, sur le principe, à cette garantie : nous savons combien elle est nécessaire. Pour autant, nous l’avons supprimée, car nous avons observé qu’elle n’était pas financée, ce en quoi cet amendement de suppression est en réalité un amendement d’appel.

Nous avons pris note de vos explications, monsieur le ministre, et je vous en remercie. Cependant, vous ne nous avez apporté aucune garantie concrète et rassurante quant au financement du fonds. En réponse à nos interrogations sur les ressources, vous avez mis en avant une méthode : une concertation s’impose pour déterminer les besoins du fonds et définir les ressources nécessaires, avez-vous dit, nous donnant rendez-vous à la prochaine loi de finances.

À ce jour, le fonds de garantie proposé n’est toujours pas financé : le sentiment demeure que nous sommes en train de signer un chèque en blanc. Vous aviez évoqué un financement par le biais des certificats d’économie d’énergie, entièrement à la charge d’EDF, donc ; mais les travaux finançables vont au-delà de la seule rénovation énergétique.

Une autre piste avait été suggérée : le recours à des crédits budgétaires ajustés annuellement selon les besoins et inscrits dans le programme 114 « Appels en garantie de l’État », à l’instar de ce qui se fait pour le fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (FGAS). Nous ne vous avons pas entendu reprendre cette proposition.

Pour autant, compte non tenu de vos arguments, mais au regard de la nécessité de faire en sorte que ce prêt collectif fonctionne, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 56 et le sous-amendement n° 175 ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je remercie Mme la rapporteure de son avis de sagesse et m’engage à être aussi précis que possible, dans la suite de nos échanges, pour clarifier les modalités de ce fonds de garantie, y compris lors de la discussion du prochain projet de loi de finances.

Je remercie M. le sénateur Buis de la clarification rédactionnelle qu’il propose, mais le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement n° 56 et du sous-amendement n° 175 au profit des amendements identiques nos 20 rectifié, 91 rectifié et 125 ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 20 rectifié, 91 rectifié et 125.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 2 bis A est rétabli dans cette rédaction, et l’amendement n° 56 ainsi que le sous-amendement n° 175 n’ont plus d’objet.

Article 2 bis A
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Article 2 ter A (nouveau)

Article 2 bis

(Non modifié)

Le titre II de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires est complété par un article 10-1 ainsi rédigé :

« Art. 10-1. – Les associations syndicales libres peuvent, sous réserve des stipulations de leurs statuts et des dispositions de la présente ordonnance, souscrire un emprunt collectif au nom du syndicat qui règle les affaires de l’association pour le financement des travaux concernant les parties communes, les équipements et les terrains ou des travaux d’intérêt collectif sur des parties privatives des immeubles qui les composent.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » – (Adopté.)

Article 2 bis
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Article 2 ter (nouveau)

Article 2 ter A (nouveau)

I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° L’article L. 634-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa du I est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« I. – Le conseil municipal peut délimiter des zones soumises à déclaration de mise en location, au regard de l’objectif de lutte contre l’habitat indigne et en cohérence avec le programme local de l’habitat, s’il existe, et le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées. Ces zones peuvent concerner un ou plusieurs ensembles immobiliers.

« La commune exerce la mise en œuvre et le suivi de ce dispositif dans ces zones. » ;

b) Le III est ainsi rédigé :

« III. – Un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat peut exercer, en tout ou partie, sur le territoire d’une ou plusieurs de ses communes membres la compétence mentionnée au I, après accord des communes concernées.

« Ce transfert est décidé par délibérations concordantes de l’organe délibérant et des conseils municipaux concernés.

« Ce transfert entraîne de plein droit l’application à l’ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu’à l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des trois premiers alinéas de l’article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l’article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code général des collectivités territoriales. » ;

2° L’article L. 635-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa du I est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« I. – Le conseil municipal peut délimiter des zones soumises à autorisation préalable de mise en location sur les territoires présentant une proportion importante d’habitat dégradé. Ces zones sont délimitées au regard de l’objectif de lutte contre l’habitat indigne et en cohérence avec le programme local de l’habitat, s’il existe, et le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées. Ces zones peuvent concerner un ou plusieurs ensembles immobiliers.

« La commune exerce la mise en œuvre et le suivi de ce dispositif dans ces zones. » ;

b) Le III est ainsi rédigé :

« III. – Un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat peut exercer, en tout ou partie, sur le territoire d’une ou plusieurs de ses communes membres la compétence mentionnée au I, après accord des communes concernées.

« Ce transfert est décidé par délibérations concordantes de l’organe délibérant et des conseils municipaux concernés.

« Ce transfert entraîne de plein droit l’application à l’ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu’à l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l’article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l’article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5 du code général des collectivités territoriales. » ;

3° L’article L. 635-3 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, par le maire de la commune » sont remplacés par les mots : « le maire de la commune ou par le président d’un établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 » ;

b) Au début du second alinéa, les mots : « Le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire » sont remplacés par les mots : « Le maire ou le président d’un établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 » ;

4° L’article L. 635-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, à la commune » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou le maire de la commune » sont remplacés par les mots : « le maire de la commune ou le président d’un établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 » ;

5° L’article L. 635-7 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, de la commune » sont remplacés par les mots : « la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire de la commune » sont remplacés par les mots : « le maire de la commune ou le président d’un établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée au I de l’article L. 635-1 ».

II. – Dans les établissements publics de coopération intercommunale qui exercent au moins l’une des compétences mentionnées au I de l’article L. 634-1 et au I de l’article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation à la date de publication de la présente loi, chaque commune membre se prononce sur le maintien de l’exercice de la ou les compétences par l’établissement public de coopération intercommunale avant le 31 décembre 2025. Une ou plusieurs communes membres peuvent s’y opposer par délibération. À défaut de délibération à l’issue de ce délai, leur décision est réputée favorable au maintien de l’exercice de la ou des compétences par l’établissement public de coopération intercommunale.

L’établissement public de coopération intercommunale demeure compétent, dans les conditions antérieures à la date de publication de la présente loi, jusqu’au 31 décembre 2025.

À l’expiration de ce délai, les communes membres qui se sont opposées expressément par délibération au maintien de l’exercice de la ou des compétences exercent la compétence sur leur territoire selon les dispositions des articles L. 634-1 à L. 634-5 ou L. 635-1 à L. 635-11.

M. le président. L’amendement n° 126, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi l’article :

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° L’article L. 634-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, après les mots : « le programme local de l’habitat en vigueur », sont insérés les mots : «, s’il existe, » ;

b) Au III, la première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée : « La durée de la délégation est fixée par l’organe délibérant de l’établissement public mentionné au I. »

2° L’article L. 635-1 est ainsi modifié :

a) A la deuxième phrase du premier alinéa du I, après les mots : « le programme local de l’habitat en vigueur », sont insérés les mots : «, s’il existe, » ;

b) Au III, la première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée : « La durée de la délégation est fixée par l’organe délibérant de l’établissement public mentionné au I. »

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. L’amendement n° 126 vise à rétablir l’intercommunalité dans son rôle d’autorité compétente par défaut en matière de permis de louer.

Il est toutefois prévu que les intercommunalités auront la faculté de déléguer cette compétence, même lorsqu’il n’existe pas de programme local de l’habitat (PLH). À cet effet, les dispositifs de permis de louer et de déclaration de mise en location pourront être mis en place par décision de l’organe délibérant de l’EPCI, lorsque celui-ci est compétent en matière d’habitat.

La mise en œuvre du permis de louer peut bien sûr déjà être déléguée aux communes, qui connaissent bien leur territoire, mais seulement si un PLH est en vigueur. Or la réalisation d’un tel programme requiert des délais qui sont le plus souvent incompatibles avec la mise en œuvre effective des procédures concernées.

Pour ces raisons, et tout en maintenant la compétence en matière de permis de louer au niveau de l’EPCI compétent en matière d’habitat, le Gouvernement propose d’assouplir les modalités de la délégation aux communes de la gestion des dispositifs de déclaration et d’autorisation de mise en location en cessant de la subordonner à l’existence d’un PLH en cours de validité.

C’est donc une solution de compromis que je vous soumets, mesdames, messieurs les sénateurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. En commission, nous avons fait de la commune l’échelon compétent de droit commun pour ce qui concerne la mise en œuvre du permis de louer, car il arrive que l’EPCI compétent en matière d’habitat soit dans l’impossibilité de déléguer à la commune la compétence en matière d’autorisation de la mise en location, en l’absence d’un programme local de l’habitat exécutoire. Tel est le cas en particulier lorsque la compétence en matière d’habitat est en cours de transfert à l’EPCI.

Le Gouvernement propose un amendement de compromis qui nous convient : son adoption permettrait de lever les obstacles empêchant certaines communes d’exercer la compétence en matière de permis de louer.

Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. En commission, nous avons adopté un amendement visant à replacer les maires au cœur des dispositifs locaux de lutte contre l’habitat indigne : nous avons conféré aux maires la compétence en matière de permis de louer tout en ménageant la possibilité d’un transfert à l’intercommunalité.

Le Gouvernement propose quant à lui de supprimer la condition d’existence d’un PLH dont dépend actuellement la possibilité pour l’intercommunalité de déléguer sa compétence aux maires.

Cette disposition ne correspond pas à la demande formulée par les maires que nous avons auditionnés, lesquels sont engagés au quotidien dans des actions de lutte pour la résorption de l’habitat indigne.

En conséquence, nous voterons contre cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 126.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 2 ter A est ainsi rédigé.

Article 2 ter A (nouveau)
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Après l’article 2 ter

Article 2 ter (nouveau)

L’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire peut faire procéder à toutes visites qui lui paraissent utiles pour examiner le logement, dans le délai prévu au troisième alinéa de l’article L. 635-4. Lorsque les lieux sont à usage total ou partiel d’habitation, les visites ne peuvent être effectuées qu’entre 6 heures et 21 heures. L’autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés ces lieux est nécessaire lorsque l’occupant s’oppose à la visite ou que la personne ayant qualité pour autoriser l’accès au logement ne peut pas être atteinte. »

M. le président. L’amendement n° 122, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et avec l’accord de l’occupant

2° Troisième phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il s’agit d’un amendement de précision.

La commission a prévu que le maire dispose d’un droit de visite du bien dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de louer. Nous souhaitons préciser que cette visite s’effectue en accord avec l’occupant, lequel, en principe, s’agissant d’une demande de permis de louer, est le propriétaire. Celui-ci étant à l’origine de la demande, il n’y a pas de raison qu’il s’y oppose.

Dans le cas où l’occupant est un locataire auquel le propriétaire a donné congé, il n’y a pas non plus lieu qu’il s’oppose à la visite ; toutefois, son accord est requis.

Cette clarification me paraît suffisante, sans qu’il soit besoin d’un régime de visite domiciliaire exorbitant, pour sécuriser le dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Supprimer la possibilité de procéder à une visite du local lorsque le locataire occupant s’y oppose revient à différer la remise en location du logement.

Dans un contexte de tension sur le marché locatif, voilà qui n’est pas souhaitable et risque même de décourager les bailleurs diligents, qui essaient de se conformer à leurs obligations.

Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. J’abonderai dans le sens de notre rapporteure.

La disposition dont il est question a été introduite dans notre droit par la loi Alur, à la demande des élus locaux. Il s’agissait d’instaurer soit une déclaration soit une autorisation préalable de mise en location.

Mme la rapporteure a justement relevé que de telles démarches sont engagées surtout dans les villes où une tension s’exerce sur le marché du logement, et où, du fait de cette tension, la durée du préavis est souvent réduite à un mois au lieu de trois.

Il est donc très fréquent que le propriétaire dépose sa déclaration ou sa demande d’autorisation de mise en location alors que son bien est encore occupé, sachant qu’il sera bientôt libéré par l’actuel occupant. Dès lors, demander l’accord de ce dernier peut se révéler tout à fait bloquant : celui-ci, ayant prévu de quitter les lieux, n’est pas nécessairement enclin à en faciliter l’accès.

Je crains donc que cette précision ne vienne au contraire bloquer encore davantage un marché du logement qui – nous avons été nombreux à le dire – a déjà bien des difficultés en ce moment.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 122.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2 ter.

(Larticle 2 ter est adopté.)

Article 2 ter (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 3

Après l’article 2 ter

M. le président. L’amendement n° 96 rectifié, présenté par Mmes Linkenheld, Artigalas et Carlotti, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le représentant de l’État dans le département établit un bilan triennal du suivi du traitement de l’habitat dégradé qui porte particulièrement sur le suivi des signalements, des arrêtés pris par les maires et par le représentant de l’État dans le département et de leur exécution, des travaux d’office engagés ou réalisés, des relogements. Celui-ci est communiqué au comité régional de l’habitat et de l’hébergement.

Le représentant de l’État dans le département définit par arrêté les modalités de transmission des données nécessaires à l’établissement du bilan triennal mentionné à l’alinéa précédent et fixe la liste des communes concernées au regard de la proportion d’habitat dégradé sur leur territoire.

Cet article entre en vigueur à compter du 1er avril 2025.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Cet amendement vise à demander à l’État l’élaboration d’un bilan triennal de la situation de l’habitat dégradé dans chaque département de France, une attention particulière étant portée aux communes qui subissent ce phénomène.

Ce type de bilan est déjà réalisé dans les communes qui sont dotées d’outils de lutte contre l’habitat indigne ou dégradé ; je pense notamment à celles qui disposent, pour des raisons historiques, de services communaux d’hygiène et de santé ou à celles qui, à défaut de tels services, sont néanmoins très engagées dans cette lutte. Reste que cette pratique du bilan n’a pas cours partout sur le territoire.

Je précise que cette demande émane notamment d’associations de locataires, et par exemple de collectifs marseillais. Un tel bilan garantirait, en direction du grand public, une plus grande transparence en matière de suivi de la lutte contre l’habitat dégradé ; il permettrait également aux préfectures de savoir ce qui se passe dans les collectivités, communes et EPCI, et, le cas échéant, de leur proposer des outils qui leur sont peut-être inconnus.

Cet amendement se veut aussi simple que possible tout en étant aussi précis que nécessaire ; eu égard aux exigences de la lutte contre l’habitat dégradé, il mérite le soutien de cet hémicycle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les différents travaux menés dans le cadre de l’examen du présent projet de loi, ainsi que le rapport de la mission Hanotin-Lutz, ont permis de mettre en exergue le manque de données fiables sur le sujet des copropriétés et de l’habitat dégradés ; j’entends donc la préoccupation qu’a exprimée notre collègue Audrey Linkenheld.

Je nous mets néanmoins en garde contre notre tendance à poser et à imposer sans cesse de nouvelles obligations, tendance que, dans le contexte actuel d’inflation réglementaire et normative, il me semblerait judicieux de réfréner.

Il n’y a en cette matière aucun désaccord entre nous sur le fond, mais il serait peut-être préférable de demander à nos préfectures d’accompagner les collectivités plutôt que de produire de nouveaux rapports.

Tout en reconnaissant la pertinence de vos observations, ma chère collègue, la commission a donc émis un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mon argumentaire est en tout point semblable à celui qu’a très bien exposé Mme la rapporteure : avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. L’inflation normative, notamment législative, n’est pas contestable, mais elle n’apparaît jamais plus manifestement que lorsque, par exemple, on ajoute dans notre droit des peines de prison qui existent déjà. Je pourrais citer aussi la loi « anti-squat », qui a institué des normes dont il apparaît qu’elles sont bel et bien superfétatoires…

Ici, en revanche, il s’agit non pas de créer des normes pour créer des normes, mais simplement d’établir un diagnostic et de disposer d’un état des lieux précis de l’habitat dégradé. De la même manière qu’il est nécessaire de pouvoir s’appuyer sur un diagnostic fiable, par territoire, pour réussir la transition environnementale, il est absolument indispensable de recueillir ce type d’informations si nous voulons mettre en place des politiques de lutte contre l’habitat dégradé adaptées à chaque territoire.

Notre groupe votera cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Après avoir entendu les arguments de la rapporteure et du ministre, il me semble utile de préciser mon propos.

En réalité, ce n’est pas une nouvelle norme que nous proposons. Ce que nous souhaitons, c’est que les préfets établissent, tous les trois ans – pas tous les ans ! –, un bilan de la situation de l’habitat dégradé dans leur département.

Cela signifie qu’il incomberait au représentant de l’État de déterminer quelles seraient les communes concernées : il se pourrait qu’à beaucoup de collectivités on ne demande rien ; d’autres pourraient se voir demander un bilan que, de toute façon, elles produisent déjà ; reste le cas des communes auxquelles il vaudrait la peine de demander des informations, tant l’habitat est dégradé sur leur territoire et tant il serait utile de connaître plus précisément leurs difficultés pour tenter de mieux les résoudre.

Je précise en outre que la disposition dont nous sommes en train de parler serait mise en œuvre par arrêté préfectoral : nul besoin d’une nouvelle norme. Il est beaucoup question d’arrêtés préfectoraux en ce moment, en lien avec la situation des agriculteurs ; l’arrêté ici visé serait somme toute, vous l’admettrez, assez simple. Il me paraît donc de bonne politique de faire cette proposition.

Monsieur le ministre, puisque vous étiez d’accord avec Mme la rapporteure lorsqu’elle nous expliquait il y a un instant qu’elle comprenait parfaitement l’intérêt qu’il y aurait à mieux identifier l’habitat dégradé, que ne proposez-vous d’adresser aux préfets une circulaire pour leur demander d’effectuer ce travail, à défaut d’en passer par un arrêté si pareille démarche vous paraît exagérément normative ?

Il est tout à fait possible de demander aux préfets d’agir par d’autres moyens que celui que nous suggérons ; une telle mesure irait en tout état de cause dans le sens de l’intérêt général.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 96 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 2 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Après l’article 3

Article 3

I. – Le titre Ier du livre V du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :

1° À la fin de l’intitulé, les mots : « insalubres ou menaçant ruine » sont remplacés par le mot : « indignes » ;

2° Le chapitre unique devient le chapitre Ier et il est ajouté un intitulé ainsi rédigé : « Expropriation des immeubles indignes à titre irrémédiable » ;

3° Il est ajouté un chapitre II ainsi rédigé :

« CHAPITRE II

« Expropriation des immeubles indignes à titre remédiable

« Art. L. 512-1. – L’expropriation d’immeubles bâtis ou de parties d’immeubles bâtis, y compris leurs terrains d’assiette, peut être poursuivie au profit de l’État, d’une société de construction dans laquelle l’État détient la majorité du capital, d’une collectivité territoriale, du concessionnaire d’une opération d’aménagement mentionnée à l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme ou du titulaire d’un contrat mentionné à l’article L. 300-10 du même code, dans les conditions prévues aux articles L. 512-2 à L. 512-6 du présent code, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

« 1° L’immeuble a fait l’objet, au cours des dix dernières années civiles, d’au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation, ayant prescrit des mesures propres à remédier à la situation qui n’ont pas été intégralement exécutées ou à l’exécution desquelles il a dû être procédé d’office en application de l’article L. 511-16 du même code. Lorsque ces arrêtés concernent un lot privatif de l’immeuble, l’expropriation décidée au titre du présent article ne concerne que les lots concernés par lesdits arrêtés ;

« 2° Des mesures de remise en état de l’immeuble s’imposent pour prévenir la poursuite de la dégradation de celui-ci. Leur nécessité est attestée par un rapport des services municipaux, intercommunaux ou de l’État compétents ou d’un expert désigné par l’autorité compétente, établi dans les conditions prévues à l’article L. 511-7 dudit code ;

« 3° Lorsque l’immeuble est à usage d’habitation et occupé et que la réalisation des travaux de remise en état ou la préservation de la santé et de la sécurité des occupants justifie une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser, un projet de plan de relogement et, le cas échéant, d’hébergement est établi en application des articles L. 314-2 à L. 314-9 du code de l’urbanisme.

« Art. L. 512-2. – Par dérogation aux règles générales du présent code, l’autorité compétente de l’État déclare d’utilité publique l’expropriation des immeubles bâtis ou des parties d’immeubles bâtis, des installations et des terrains après avoir constaté que les conditions fixées à l’article L. 512-1 sont remplies et, s’il y a lieu, prescrit, par arrêté, une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser.

« Elle désigne la collectivité publique ou l’organisme au profit duquel l’expropriation est poursuivie. En cas d’interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser les lieux, l’expropriant ainsi désigné est tenu à une obligation de relogement, y compris des propriétaires.

« Par la même décision, elle déclare cessibles les immeubles bâtis et les parties d’immeubles bâtis, les installations et les terrains concernés par l’expropriation et fixe le montant de l’indemnité provisionnelle allouée aux propriétaires ainsi qu’aux titulaires de conventions d’occupation à usage autre que d’habitation, à l’exclusion de toute indemnisation en dédommagement de la suppression d’un commerce portant sur l’utilisation comme habitation de locaux impropres à cet usage. Cette indemnité ne peut être inférieure à l’évaluation réalisée par l’autorité administrative.

« L’autorité compétente de l’État détermine également la date à laquelle il peut être pris possession des immeubles bâtis et parties d’immeubles bâtis, des installations et des terrains expropriés après paiement ou, en cas d’obstacle au paiement, après consignation de l’indemnité provisionnelle. Cette date doit être postérieure d’au moins deux mois à la publication de la déclaration d’utilité publique.

« L’autorité compétente de l’État fixe, le cas échéant, le montant de l’indemnité de privation de jouissance. Lorsque le déménagement n’est pas assuré par l’administration, elle fixe le montant de l’indemnité provisionnelle de déménagement.

« L’accès de l’entité expropriante à l’immeuble est soumis à la procédure prévue à l’article L. 523-3.

« Art. L. 512-3. – Dans le mois qui suit la prise de possession, l’autorité compétente de l’État poursuit la procédure d’expropriation dans les conditions prévues au présent code.

« L’article L. 222-2 est applicable à la procédure prévue au présent chapitre. Par exception au même article L. 222-2, l’ordonnance d’expropriation ou la cession amiable consentie après l’intervention de la décision prévue à l’article L. 512-2 emporte subrogation du bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique dans les droits du propriétaire pour la poursuite des baux en cours.

« Art. L. 512-3-1 (nouveau). – L’indemnité d’expropriation est fixée et calculée conformément aux dispositions des articles L. 242-1 à L. 242-7 et du livre III, sous réserve de l’article L. 512-4.

« Art. L. 512-4. – Pour le calcul de l’indemnité due au propriétaire, la valeur du bien est fixée par référence à des mutations ou à des accords amiables portant sur des biens situés dans le même secteur et se trouvant dans un état de dégradation ou d’insalubrité comparable.

« Lorsque ces références sont en nombre insuffisant et que des opérations sur des biens de meilleure qualité sont retenues pour déterminer la valeur du bien, un abattement est pratiqué sur les montants des opérations retenues.

« Cet abattement est défini en fonction de la dépréciation résultant de la dégradation et de l’insalubrité du bien. Il comprend le montant des travaux ou autres mesures propres à remédier à la situation ayant justifié la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité non réalisés prescrits par les arrêtés non exécutés.

« Art. L. 512-5. – Lorsqu’un ou plusieurs arrêtés pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation a prescrit une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser les lieux expropriés :

« 1° L’indemnité d’expropriation est réduite du montant des frais du relogement ou de l’hébergement des occupants assuré, si le propriétaire n’y a pas procédé, en application de l’article L. 521-3-2 du même code ;

« 1° bis L’indemnité d’expropriation est réduite du montant des revenus locatifs éventuellement perçus par le propriétaire à compter de l’adoption des arrêtés mentionnés au premier alinéa du présent article ;

« 2° (Supprimé)

« Art. L. 512-5-1 (nouveau). – Lorsque la nature des mesures et travaux engagés par l’expropriant rendent impossible la réintégration des occupants, à terme, dans le local évacué, ces derniers bénéficient d’un relogement dans les conditions fixées à l’article L. 314-2 du code de l’urbanisme.

« Art. L. 512-5-2 (nouveau). – Le refus, par les occupants des locaux ou des installations qui font l’objet de la décision prévue à l’article L. 512-1 du présent code, du relogement qui leur est offert par l’expropriant, dans les conditions prévues, selon les cas, aux articles L. 314-2 ou L. 314-3 du code de l’urbanisme, autorise leur expulsion sans indemnité.

« Art. L. 512-6. – Lorsque, sur le fondement d’un rapport élaboré à la suite de l’inspection réalisée par les services municipaux, intercommunaux ou de l’État, un ou plusieurs propriétaires de l’immeuble sont suspectés du délit prévu à l’article 225-14 du code pénal, le maire, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ou le représentant de l’État dans le département saisit le procureur de la République territorialement compétent et en informe sans délai l’expropriant. Celui-ci peut saisir le juge des référés aux fins du placement sous séquestre du montant des indemnités prévues au présent chapitre, jusqu’au jugement définitif ou à la prise de l’ordonnance de non-lieu. En cas de condamnation devenue définitive, le juge prononce, sauf décision spécialement motivée, la confiscation en valeur de ces indemnités selon les modalités fixées aux neuvième et dixième alinéas de l’article 131-21 et à l’avant-dernier alinéa de l’article 131-39 du code pénal. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 67 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 83 rectifié est présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Bouad, Mme Narassiguin, MM. Ziane et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Remplacer les mots :

au cours des dix dernières années civiles, d’au moins deux arrêtés

par les mots :

depuis au moins trois ans, d’un arrêté

La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 67.

Mme Marianne Margaté. Dix ans, c’est très long ; deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, c’est trop, s’agissant de situations souvent insoutenables pour celles et ceux qui les vivent au quotidien. En outre, ce type d’arrêté n’est pas pris à la légère ni sans réfléchir par les élus ou les représentants de l’État qui en ont la responsabilité ; un avertissement doit suffire.

Un arrêté qui ne suscite aucune réponse de la part du propriétaire et trois ans sans intervention, ce n’est pas normal non plus ! Selon nous, de telles conditions devraient suffire à activer le dispositif de l’article 3 et les procédures d’expropriation qui en découlent, sans pour autant que, dans pareils cas, l’expropriation soit systématique.

Il faut le souligner, il n’a pas été fait preuve de tant de largesse et de clémence lorsqu’il s’est agi d’accorder un sursis aux locataires en difficulté pour payer leur loyer : ceux-ci ne disposent désormais plus que de deux mois pour quitter leur logement après une décision d’expulsion, sous peine d’amende.

Par cet amendement, nous proposons de laisser trois ans aux propriétaires pour intervenir et mettre en sécurité leur logement et, du même coup, les résidents et les voisins ; une telle durée nous semble nettement suffisante et bien assez longue pour faire respecter la loi.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié.

Mme Corinne Narassiguin. Permettez-moi tout d’abord de dire combien j’ai été émue d’entendre plusieurs de nos collègues rendre hommage à Claude Dilain, figure importante et emblématique pour les socialistes et pour toute la gauche en Seine-Saint-Denis. Placer ce projet de loi sous son patronage est un symbole fort.

L’article 3 crée un droit d’expropriation pour les immeubles indignes à titre remédiable. Cette mesure correspond à la recommandation n° 1 du rapport Hanotin-Lutz, qui préconise de doter la puissance publique d’une capacité à agir en expropriation même lorsque le caractère irrémédiable de la dégradation de l’immeuble n’est pas établi.

L’objectif est bien de permettre une intervention suffisamment précoce pour mettre fin à la spirale de dégradation des immeubles ; en effet, faute de mobilisation ou de capacité de la copropriété, il arrive que des arrêtés prescrivant des mesures ne soient pas suivis d’effets.

Cependant, la double condition à laquelle est subordonné, dans le projet de loi, l’engagement de la procédure, à savoir l’absence d’exécution des mesures prescrites par au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité au cours des dix dernières années civiles, risque de rendre ce nouvel outil inopérant.

Nous voulons appeler l’attention du Gouvernement sur ce point : pour garantir l’effectivité de cette mesure, il faut rendre la procédure plus simple d’utilisation et plus opérationnelle, sans que cela remette en cause le respect du droit de propriété.

Nous proposons, par cet amendement, une amélioration a minima du dispositif. Nous avions déposé un autre amendement plus opérationnel, sur une suggestion de Mathieu Hanotin, mais il a été déclaré irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution.

Nous invitons le Gouvernement à y regarder de plus près.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Certes, en la matière, il faut aller vite, il faut simplifier, mais sans oublier que l’expropriation est une atteinte forte au droit de propriété.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Bien sûr !

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. J’y insiste : n’oublions pas nos fondamentaux.

L’expropriation doit se justifier par un motif d’intérêt général et être précisément encadrée. Pour cette raison, le Conseil d’État a logiquement et fortement insisté, dans l’avis qu’il a rendu sur ce projet de loi, sur la nécessité de prouver une carence persistante du propriétaire ou de la copropriété.

Seule la répétition d’une telle carence, prouvée par la non-réalisation par le propriétaire des mesures prescrites par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité – et ce au moins par deux fois, comme le prévoit le texte –, doit donc pouvoir justifier l’engagement de la procédure d’expropriation.

J’ajoute que la période de référence de dix ans est au contraire à l’avantage de la collectivité qui souhaite exproprier : plus cette période est longue, plus il y a de chances que soient pris les deux arrêtés requis.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je partage là encore l’argumentaire de Mme la rapporteure. Je vais malgré tout préciser la position du Gouvernement, mesdames les sénatrices, afin que la discussion puisse s’engager.

La mise en œuvre de la procédure d’expropriation à titre remédiable est subordonnée, dans les termes prévus à l’article 3, à la double condition que l’immeuble ait fait l’objet d’au moins deux arrêtés de traitement de l’insalubrité ou de mise en sécurité non mis en œuvre au cours des dix années civiles précédentes. Je précise que cette durée de dix ans est une durée maximale : les conditions de déclenchement de la procédure peuvent donc tout à fait être réunies dans un laps de temps plus court, par exemple sur deux ou cinq ans.

Cette double condition est nécessaire pour justifier l’inaction répétée du propriétaire et la dégradation progressive de l’immeuble, toutes procédures confondues.

C’est cet équilibre, trouvé au terme de longs échanges, notamment avec le Conseil d’État, comme l’a rappelé Mme la rapporteure, qui permet de préserver la sécurité juridique du dispositif, lequel porte dès lors une atteinte proportionnée au droit de propriété.

L’adoption des amendements nos 67 et 83 rectifié, qui visent à remplacer cette double condition – au moins deux arrêtés pris au cours des dix années civiles précédentes – par une autre – un arrêté pris dans un délai minimal de trois ans –, remettrait en cause cet équilibre sans forcément faciliter la mise en œuvre du dispositif, comme je viens de le démontrer.

Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Tout d’abord, comme ma collègue Corinne Narassiguin, je tiens à m’associer à l’hommage qui a été rendu à Claude Dilain, avec lequel j’ai eu le plaisir et le bonheur de rapporter, en son temps, la loi Alur.

J’insiste par ailleurs, comme l’a fait ma collègue, sur le fait que, pour nous, cet amendement est un amendement de repli.

En première analyse, le texte initial, c’est-à-dire le principe d’une durée de dix ans pendant laquelle sont pris deux arrêtés, nous convenait. Simplement, quand on confronte cette rédaction à la réalité vécue par les élus locaux, notamment à celle de Mathieu Hanotin, le maire de Saint-Denis, qui a beaucoup travaillé sur le sujet, on s’aperçoit que le dispositif est inopérant.

Pour le rendre opérant, il eût fallu, non pas forcément raccourcir la durée prévue ni même réduire le nombre d’arrêtés requis, mais proposer une condition de cumul différente pour ces deux arrêtés.

C’est ce que nous proposions dans l’un des amendements que nous avons déposés : soit le cumul de deux arrêtés de mise en sécurité, l’un d’urgence et l’autre ordinaire, soit le cumul de deux arrêtés de traitement de l’insalubrité. Malheureusement, la commission des finances a considéré que l’adoption de cet amendement conduirait à élargir le champ de l’expropriation et, par conséquent, serait coûteuse pour les finances publiques.

Si le Gouvernement souhaite rendre opérante cette disposition à laquelle, comme nous, il est attaché, je lui suggère de réfléchir aux moyens par lesquels il pourrait faire ce que l’article 40 de la Constitution nous empêche, nous, de proposer.

Je le dis en toute sincérité, la rédaction que nous souhaitions présenter nous paraît la seule réellement opérante. Nous pouvons toujours nous faire plaisir – si je puis dire – en adoptant une autre rédaction, mais, dans les faits, nous n’aurons pas aidé ceux que nous cherchons à aider, c’est-à-dire nos élus locaux et les occupants des logements concernés.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 67 et 83 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 164, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 8, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Lorsque les arrêtés portent sur une partie privative dépendant d’un immeuble soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, l’expropriation engagée sur le fondement du présent article ne porte que sur le lot de copropriété concerné.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision juridique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 164.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 103 rectifié est présenté par Mmes Linkenheld et Artigalas, M. Kanner, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 147 est présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 10 et 12

Supprimer les mots :

ou d’utiliser

La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour présenter l’amendement n° 103 rectifié.

Mme Audrey Linkenheld. Voilà un petit amendement qui n’a l’air de rien ; je veux néanmoins en dire quelques mots.

Loin de nous l’idée selon laquelle il ne faudrait pas inclure les locaux utilisés, aux côtés des locaux occupés, dans le champ d’application de ce projet de loi ; mais l’amendement de coordination de la commission, qui a conduit à la réécriture des alinéas 10 et 12, nous semble créer davantage de complexité qu’il ne clarifie le texte, car il établit un parallèle, en matière de relogement, entre locaux d’habitation et locaux commerciaux.

Or chacun sait que le même droit ne s’applique pas de part et d’autre.

Nous estimons par conséquent qu’il vaudrait mieux nous en tenir au texte tel qu’il était initialement rédigé : il y était fait référence à l’utilisation des locaux sans pour autant que soit établi un parallèle qui, à notre avis, va poser d’énormes difficultés d’application et de jurisprudence.

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 147.

M. Bernard Buis. Cet amendement a pour objet de ne pas imposer à l’expropriant de prévoir le relogement des occupants de locaux à usage autre que d’habitation pour pouvoir enclencher la procédure de l’article 3. En effet, une telle mesure pourrait limiter le caractère opérationnel du dispositif en prescrivant des contraintes inappropriées.

Il est du ressort de la nouvelle procédure d’assurer la protection des occupants des logements indignes et l’interdiction d’utiliser des locaux devenus dangereux.

Pour autant, cette protection ne va pas au-delà d’une telle interdiction d’utiliser. Les commerçants évincés des locaux dangereux pourront par ailleurs se voir proposer un local de remplacement dans le cadre de la procédure d’indemnisation ultérieure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Pour rappel, la commission des affaires économiques a modifié l’article 3 afin d’inclure dans la procédure d’expropriation les locaux commerciaux et professionnels. Notre objectif était que ces derniers puissent être expropriés dans les mêmes conditions que les logements, en particulier pour ce qui est des modalités de fixation des indemnités d’expropriation, qui sont plus avantageuses pour l’expropriant. Il s’agissait, ce faisant, de faciliter la mise en œuvre de la nouvelle procédure.

Il nous semblait également légitime que les occupants de locaux professionnels et commerciaux puissent bénéficier, eux aussi, d’un relogement par l’expropriant.

Ces deux amendements visent à supprimer cette obligation de relogement lorsque les locaux commerciaux et professionnels sont frappés d’une interdiction temporaire d’utiliser, car cette obligation pourrait retarder la mise en œuvre de la procédure d’expropriation : il est vrai qu’il est plus difficile de trouver des locaux de substitution que des logements de substitution pour des habitants évincés.

Il ne s’agit pas de revenir sur la disposition sur laquelle les groupes politiques se sont entendus en commission, mais la réalité du terrain et le pragmatisme nous commandent de reconnaître que les choses sont parfois plus compliquées lorsqu’il s’agit de locaux commerciaux ou professionnels.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avant que la commission des affaires économiques n’examine et ne modifie le texte, la procédure d’expropriation prévue à l’article 3 ne s’appliquait qu’aux locaux frappés d’une interdiction d’habiter.

Or la nouvelle procédure doit aussi pouvoir viser les locaux commerciaux ou professionnels devenus dangereux.

L’introduction par voie d’amendement, en commission, de la notion d’interdiction d’utiliser aux alinéas 10, 11, 12 et 23 était donc pertinente. Aussi, je ne suis pas favorable à leur suppression et j’émets un avis favorable sur ces deux amendements identiques, qui me semblent aller dans le bon sens.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 103 rectifié et 147.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 165, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 15, première phrase

Après le mot :

indemnité

insérer le mot :

provisionnelle

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision juridique, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 165.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 21 est présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 77 est présenté par M. Brossat, Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 97 est présenté par Mmes Artigalas, Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 18, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour présenter l’amendement n° 21.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à supprimer la subrogation de l’expropriant dans les droits du propriétaire en cas d’expropriation d’un immeuble indigne à titre remédiable.

Nous considérons qu’une telle convention n’est pas justifiée et risque de perturber le processus d’action. Surtout, sa mise en œuvre allongerait les délais, ce qui n’est pas notre objectif.

Nous suggérons par conséquent d’en revenir au régime ordinaire défini à l’article L. 222-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui précise que « [l]’ordonnance d’expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés ».

Notre amendement est essentiel ; admettons que, dans le cadre d’une expropriation, un immeuble dispose d’un local commercial en rez-de-chaussée, et que seules deux des neuf années du bail se soient écoulées – le bail est donc encore en cours de validité –, il faudra attendre sept années supplémentaires pour éteindre les baux existants dans l’immeuble. Aux dix années prévues par le texte – cette durée que nos collègues socialistes voulaient réduire il y a tout juste quelques minutes –, il faudra donc ajouter la durée des baux existants au moment de l’expropriation.

Or, après dix-neuf ans – dix plus neuf –, il n’est plus question d’habitat indigne à titre remédiable, mais, plus vraisemblablement, d’habitat indigne à titre irrémédiable…

La Soreqa, la société de requalification des quartiers anciens, avec laquelle nous avons travaillé pour rédiger cet amendement, nous a indiqué que la prise en compte de cette dimension du problème était absolument capitale pour garantir l’efficacité des expropriations.

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 77.

M. Ian Brossat. J’irai dans le même sens qu’Antoinette Guhl.

Aujourd’hui, une procédure d’expropriation met fin à tous les baux existants sur une parcelle ; autrement dit, les baux s’arrêtent au moment de l’expropriation et les locataires sont protégés et indemnisés.

La nouvelle procédure d’expropriation mise en place par ce projet de loi prévoit un transfert des baux existants au moment de l’expropriation aux nouveaux propriétaires, en général une collectivité territoriale ou un opérateur public.

Très concrètement, cela signifie que, si l’immeuble exproprié comprend un commerce en rez-de-chaussée, le bail commercial sera maintenu. Par exemple, si le bail court encore pour une durée de neuf ans, le commerce pourrait se maintenir neuf ans.

Comme l’a très justement souligné ma collègue, les acteurs de la lutte contre l’habitat indigne nous indiquent qu’un tel dispositif pourrait allonger considérablement les délais des opérations de requalification du bâti dégradé et mettre en péril leur équilibre.

Aussi proposons-nous de maintenir, dans la nouvelle procédure d’expropriation, le dispositif de droit commun qui met fin aux baux et qui protège les locataires.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 97.

Mme Viviane Artigalas. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces amendements visent à supprimer la subrogation de l’expropriant dans les droits du propriétaire, sur le modèle de ce qui existe actuellement dans le cadre de la procédure dite Vivien instituée par la loi tendant à faciliter la suppression de l’habitat insalubre.

Voilà qui serait évidemment plus simple à gérer pour la collectivité ou pour l’opérateur expropriant, mais moins protecteur pour les occupants.

La nouvelle procédure d’expropriation a justement été conçue pour permettre autant que possible aux occupants de rester dans leur logement, ce qui n’empêchera pas leur éviction temporaire, si nécessaire, le temps des travaux.

La commission a donc émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21, 77 et 97.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 127, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 25 et 29

Supprimer ces alinéas.

II. – Compléter cet article par neuf alinéas ainsi rédigés :

4° À l’article L. 311-8, après les mots : « des articles L. 242-1 à L. 242-7, » est insérée la référence : « L. 311-8-1, » ;

5° Après l’article L. 311-8, il est inséré un article L. 311-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-8-1. – L’occupant qui a payé à l’exproprié des sommes en contrepartie de l’occupation d’un logement frappé par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, en violation des dispositions de l’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation, peut en demander la restitution devant le juge de l’expropriation dans le cadre de l’instance en fixation de l’indemnité d’expropriation.

« S’il fait droit à cette demande, le juge fixe le montant de la somme due à l’occupant, ordonne sa déduction de l’indemnité d’expropriation fixée au profit de l’exproprié et son versement à l’occupant, par l’expropriant, dans la limite du montant de l’indemnité d’expropriation.

« Le dispositif du jugement mentionne la créance de l’occupant, le montant de l’indemnité d’expropriation et, selon le cas, la somme restant due à l’exproprié après déduction du montant de la créance de l’occupant ou la somme restant due à l’occupant par l’exproprié après cette déduction.

« Cette condamnation vaut restitution au sens du même article L. 521-2. » ;

6° À l’article L. 311-9, après les mots : « L. 311-8 » sont insérés les mots : « L. 311-8-1 » ;

7° Après l’article L. 323-4, il est inséré un article L. 323-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 323-5.– Afin de permettre la saisie des fonds dont la confiscation est prévue par l’article 131-21 du code pénal, l’expropriant débiteur des indemnités fixées en application du présent titre envers une personne mise en cause pour l’une des infractions prévues aux articles 225-14 du code pénal, L. 511-22 et L. 521-4 du code de la construction et de l’habitation informe le procureur de la République du lieu de situation de l’immeuble de la date à laquelle il procédera à leur paiement ou à leur consignation. »

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Nous proposons, par cet amendement, deux mesures particulièrement nécessaires à la lutte effective contre les marchands de sommeil.

Une première mesure, inspirée des travaux de l’Assemblée nationale, permet de déduire du montant de l’indemnité d’expropriation les sommes correspondant au loyer que le locataire a continué de verser alors même que le logement faisait l’objet d’arrêtés de police de l’habitat.

Cet amendement tend ainsi à améliorer la rédaction actuelle du dispositif, en sorte que les fonds reviennent bien à l’intéressé.

La seconde mesure garantit une bonne articulation entre les procédures civiles et pénales, afin que les sommes débloquées par l’expropriant puissent être immédiatement saisies.

Il est en conséquence prévu de supprimer la mesure de séquestre pour la remplacer par une information systématique du procureur de la République par l’expropriant qui s’apprête à verser des indemnités à une personne mise en cause pour des faits d’habitat indigne. Cette disposition permettra au procureur de la République de procéder à la saisie immédiate de ces sommes dans le cadre de la procédure pénale.

Ces deux mesures sécurisent et renforcent le dispositif de l’article 3.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit en effet de deux mesures de sécurisation juridique : avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 127.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.

(Larticle 3 est adopté.)

Article 3
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Article 3 bis AA (nouveau)

Après l’article 3

M. le président. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par M. Rochette, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 511-17 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si le propriétaire ou toute personne mentionnée à l’article L. 511-10 ne s’est pas, au moins en partie, acquitté de sa créance envers l’autorité compétente à l’expiration d’un délai de deux ans après la date de publication de l’arrêté de mise en sécurité, l’immeuble ou le logement concerné est automatiquement cédé à titre gracieux à cette même autorité. »

La parole est à M. Pierre Jean Rochette.

M. Pierre Jean Rochette. Le présent amendement vise à apporter un soutien aux petites communes rurales, qui engagent des frais dans les procédures d’arrêté de péril.

Je propose que, s’ils n’ont pu être recouvrés, les frais engagés par les communes pour régler une situation dans laquelle un arrêté de péril a dû être pris donnent lieu à contrepartie : le cas échéant, et dans un délai de deux ans, la commune obtiendrait automatiquement la propriété du bien concerné. Dans ce genre d’affaires, les collectivités sont souvent confrontées à des propriétaires que je qualifierai, en restant courtois, d’inactifs…

Cet amendement tend tout simplement à prévoir la restitution du bien à la commune à l’échéance d’un délai de deux ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il est vrai que les collectivités hésitent parfois à faire exécuter les travaux d’office sur un bâtiment frappé d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, par crainte de ne pouvoir récupérer les fonds avancés.

Cela dit, il est déjà prévu que les frais avancés par la collectivité pour effectuer ces travaux d’office soient récupérés. En effet, le comptable public assure le recouvrement des créances émises, et il lui appartient de poursuivre ce recouvrement par tous moyens à sa disposition, selon les règles applicables du livre des procédures fiscales, y compris la saisie administrative sur les comptes bancaires du propriétaire débiteur ou sur les revenus ou créances de ce dernier sur des tiers.

Ces modalités de recouvrement ne sont peut-être pas parfaites, mais prévoir une cession gracieuse automatique de l’ensemble du bien, dont le montant excède parfois largement celui des travaux d’office réalisés, est sans doute disproportionné et exagérément attentatoire au droit de propriété.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous proposez que, dans l’hypothèse où une commune a pris en charge les frais de réparation et où le propriétaire ne s’est pas, au moins en partie, acquitté de sa créance envers elle dans un délai de deux ans, le logement concerné soit automatiquement cédé, à titre gracieux, à ladite commune.

C’est un peu radical… (Sourires.)

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Oui, un peu !

MM. Pierre Jean Rochette et Jean-Luc Brault. Non !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il se pourrait qu’un tel dispositif emporte un risque d’inconstitutionnalité.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Quant à moi, je voterai cet amendement.

Un délai de deux ans n’est certes peut-être pas suffisant, mais il nous faut agir pour que les choses avancent beaucoup plus rapidement.

La commune dont j’étais maire a pris plusieurs arrêtés de péril, retrouvé les propriétaires concernés et réalisé les aménagements nécessaires pour que les logements voisins ne soient pas dégradés. Or, après plusieurs années, aucune créance n’a encore été acquittée !

La commune doit pouvoir se rendre maîtresse des logements dont la dégradation altère les habitations qui leur sont contiguës.

M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour explication de vote.

M. Pierre Jean Rochette. Je vous remercie pour vos argumentaires, madame la rapporteure, monsieur le ministre ; je me dois néanmoins de faire observer que la disposition que je propose ne diffère pas, en pratique, de la façon dont s’applique actuellement le droit de la propriété : l’opération de recouvrement implique certes l’intervention du trésorier général, mais, en définitive, quand le titre est émis, le bien visé revient déjà à la commune. J’ai moi-même pratiqué cette procédure maintes fois dans ma commune.

Par ailleurs, je suis issu d’un territoire où le prix de l’immobilier est faible. Les travaux que nous réalisons pour le compte de nos communes rurales y sont d’un montant plus élevé que la valeur des biens.

Je le redis, le dispositif que je propose laisserait inchangé le droit de la propriété, puisque la procédure actuellement en vigueur aboutit au même résultat. (M. le ministre délégué se montre dubitatif.) Oui, le résultat est le même ! La seule différence, c’est qu’à l’heure actuelle le trésorier doit émettre un titre avant que le bien ne soit, pour finir, rendu à la commune. Je ne propose donc qu’une simple mesure de simplification, d’efficacité et d’accélération des démarches.

Or la simplification, l’efficacité et l’accélération sont précisément ce dont ont besoin, entre autres, les maires ruraux – tels sont les messages très clairs qui nous remontent du terrain.

M. Daniel Chasseing. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. À titre personnel, je suis très sensible aux situations que vous décrivez, mon cher collègue : nous connaissons tous, dans nos communes rurales respectives, de tels cas inextricables.

En revanche, attention, la mesure que vous nous soumettez risque d’être un cadeau empoisonné ! Les bâtiments sont parfois dans un tel état que ce n’est vraiment pas un cadeau à faire aux communes, en particulier celles qui ont de petits budgets, que de vouloir les leur céder : ce serait même plutôt les grever d’une charge supplémentaire.

Je crains qu’un tel dispositif ne soit en réalité à double tranchant ; bien qu’étant très sensible à votre proposition, je ne voterai donc pas cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 44 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 45 rectifié, présenté par M. Rochette, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 511-19–…. ainsi rédigé :

« Art. L. 511-19 –…. – En cas de danger imminent manifeste, l’autorité compétente est exemptée de la demande d’autorisation au juge des libertés et de la détention pour procéder aux visites mentionnées à l’article L. 511-7 du présent code lorsque l’occupant s’y oppose ou que la personne ayant qualité pour autoriser l’accès aux lieux ne peut pas être atteinte. »

La parole est à M. Pierre Jean Rochette.

M. Pierre Jean Rochette. Le présent amendement est, comme le précédent, un amendement de simplification : il s’agit d’alléger la procédure applicable à la visite d’un bien occupé frappé d’un arrêté de péril.

Cet amendement tend à accélérer les démarches, ne serait-ce que parce que, parfois, l’urgence à agir est absolue, jusqu’à revêtir un caractère vital.

Je l’ai vécu dans ma commune : il est problématique de devoir attendre l’autorisation du juge – comme cela est obligatoire aujourd’hui – quand on sait qu’un bâtiment est à deux doigts de s’effondrer.

Je propose donc de permettre au maire, dans le cadre d’un arrêté de péril validé par le tribunal, de procéder à la visite du bien sans l’autorisation du juge.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si le danger est imminent et manifeste, il n’y a en réalité pas besoin de faire procéder à une visite des locaux. Pour rappel, l’article L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation prévoit l’activation de la procédure d’urgence en cas de danger imminent.

Surtout, la disposition ici proposée est excessivement attentatoire à la vie privée.

Voilà pourquoi la commission vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je comprends l’urgence à agir que vous mentionnez à l’appui de votre argumentation, monsieur le sénateur.

De notre côté, il nous semble que votre souhait d’une action plus efficace est en réalité satisfait.

Ainsi, en cas d’extrême urgence, de danger immédiat, de situation grave et imminente, le maire doit déjà, quelle que soit la cause du danger, faire légalement usage de ses pouvoirs de police générale, et ce au titre de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Il doit notamment procéder à l’évacuation des occupants, instaurer un périmètre de sécurité, prescrire l’exécution des mesures de sécurité nécessaires et appropriées sur un immeuble.

Par ailleurs, l’article 122-7 du code pénal protège l’autorité compétente amenée à procéder à une visite en cas de danger imminent et manifeste.

Aussi le droit existant satisfait-il votre demande. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. Monsieur Rochette, l’amendement n° 45 rectifié est-il maintenu ?

M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le président, je ne retirerai pas cet amendement, car je suis de mauvaise humeur aujourd’hui. (Sourires.)

Il y a une différence entre l’arrêté de péril imminent et l’arrêté de péril tout court. Monsieur le ministre, votre description est juste pour ce qui concerne l’arrêté de péril imminent, mais non pour l’arrêté de péril, qui est soumis à la libre interprétation du juge.

Or, lorsque le maire d’une commune rurale doit faire à une situation d’urgence,…

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je suis aussi d’une commune rurale !

M. Pierre Jean Rochette. … les subtilités que vous évoquez – et vous avez parfaitement raison de le faire – sont très éloignées de ce qu’il vit, seul sur le terrain avec sa secrétaire de mairie.

C’est dans un tel esprit que j’ai déposé cet amendement, en vue de faire gagner du temps aux maires via l’accélération de la procédure.

Cela étant dit, libre à chacun de voter comme il l’entend. À votre bon cœur ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 45 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 86 rectifié bis, présenté par Mmes Artigalas, Linkenheld et Carlotti, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Ziane, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 4° de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« …° Lorsque l’immeuble ou l’installation est occupé, toute mesure afin que le logement remplisse les conditions minimales de confort et d’habitabilité définies par décret. »

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. L’expérience de la gestion de crise des périls et des évacuations montre que les conditions de réintégration ne sont pas toujours satisfaisantes. Des arrêtés d’interdiction d’occuper sont levés dès lors que les périls sont écartés, alors même que le logement ne respecte pas les conditions minimales de confort et d’habitabilité.

Aussi proposons-nous, par cet amendement, que les arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris dans le cadre de la lutte contre l’habitat indigne prescrivent explicitement les mesures requises afin que le logement, qui était régulièrement occupé, réponde aux normes de confort et d’habitabilité en sortie d’habitat indigne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. En commission, nous avons rejeté un amendement similaire, qui visait à permettre d’imposer la mise aux normes de décence pour lever un arrêté de police de l’habitat indigne. Nous avons estimé en effet que le respect des normes de décence ne relevait pas de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, laquelle a vocation à protéger la santé et la sécurité des occupants et des tiers.

Le même argument s’applique au présent amendement : par principe, des normes qui ont trait au confort et à l’habitabilité des logements n’ont pas leur place dans un arrêté relevant de cette police spéciale.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis, défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je comprends parfaitement l’argumentation de Mme la rapporteure, mais il se trouve que l’objet de cet amendement relève bien de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, puisque c’est dans le cadre des arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité que nous demandons le respect des normes de confort et d’habitabilité. Il y a bel et bien là exclusivement des normes dont, réglementairement parlant, rien n’empêche qu’elles soient couvertes par ces arrêtés.

Nous savons bien qu’il y a différentes polices, différents codes, différents règlements, par exemple le règlement sanitaire départemental. Il n’est évidemment pas question de prétendre imposer par un arrêté de police de l’habitat indigne le respect de normes qui dépendent d’un autre acte juridique.

C’est la raison pour laquelle nous avons pris la peine de préciser – y compris dans l’exposé des motifs – qu’une telle mesure de mise aux normes de confort et d’habitabilité s’inscrit bien dans le cadre de ce que peuvent couvrir les arrêtés de mise en sécurité et de traitement de l’insalubrité, et non de ce que couvre en général le règlement sanitaire départemental.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 86 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 66 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au II de l’article L. 521-3-1 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « caractère définitif », sont insérés les mots : « ou d’évacuation à caractère temporaire si les travaux n’ont pas été réalisés dans les délais fixés par l’arrêté pris au titre de l’article L. 511-11 du même code ».

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre …

Renforcer la protection des occupants de l’habitat dégradé

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Cet amendement vise à mieux prendre en compte la situation des résidents de logements dégradés, qui sont parfois temporairement relogés lorsque des travaux d’ampleur doivent être réalisés pour réhabiliter leur logement.

Dans ces cas précis, il arrive qu’un hébergement temporaire leur soit proposé le temps que les travaux se déroulent. Or nous savons parfaitement que, le cas échéant, la durée initialement prévue n’est pas toujours respectée, ce qui place les locataires dans une situation d’attente et d’instabilité.

Par ailleurs, en cas de relogement, l’hébergement prévu ne répond pas toujours aux besoins des locataires. Nous proposons donc que ces derniers soient relogés à titre définitif dès lors que la durée des travaux dépasse les délais prévus par arrêté.

Il peut de surcroît apparaître, au gré d’un tel dépassement des délais, que la nature des travaux à accomplir avait à l’origine été sous-estimée – peut-être involontairement – par le propriétaire, ce qui aurait pu justifier un relogement définitif dès le début du chantier.

Il s’agit donc également de corriger, lorsqu’il y a lieu, l’erreur manifeste d’appréciation qui a entaché la décision initiale et bénéficie au propriétaire, pour qui il peut être plus facile de trouver à son locataire un hébergement temporaire qu’un logement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement a pour objet de transformer automatiquement l’obligation d’hébergement que doit le propriétaire au locataire, lorsque son logement est frappé d’une interdiction temporaire d’habiter, en obligation de relogement pérenne, dès lors que les travaux prescrits par l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité n’ont pas été réalisés dans le délai imparti.

Ce délai est trop court, car, lorsque le propriétaire n’achève pas les travaux dans le temps imparti, la collectivité peut les faire réaliser d’office, ce qui permet aux occupants évincés de réintégrer leur logement. Par définition, ces travaux d’office ne peuvent être ordonnés qu’à l’issue du délai prévu par l’arrêté.

Je rappelle en outre que la commission a déjà renforcé la protection des occupants en prévoyant que l’obligation d’hébergement se transforme en obligation de relogement – définitif – au bout de trois ans.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis, défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 66 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 3
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Après l’article 3 bis AA

Article 3 bis AA (nouveau)

Le I de l’article L. 521-3-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au-delà de trois ans, toute éviction est considérée comme définitive et le II du présent article est applicable. » – (Adopté.)

Article 3 bis AA (nouveau)
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Article 3 bis A

Après l’article 3 bis AA

M. le président. L’amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme Guhl, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 3 bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du II de l’article L. 521-3-1 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « à ses besoins et à ses possibilités » sont remplacés par les mots : « à ses besoins, ses possibilités, se situant à proximité du logement d’origine pour permettre aux occupants évincés de poursuivre leur vie personnelle, familiale, professionnelle et scolaire, et adaptée à la composition du foyer et le cas échéant aux personnes en situation de handicap. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Les drames liés à l’habitat dégradé se multiplient et la question du relogement, nous venons de le voir, est un enjeu clé.

Par cet amendement, le groupe écologiste entend répondre aux attentes relayées par de nombreuses associations, en particulier les collectifs en lutte contre le mal-logement et l’habitat indigne à Marseille, qui ont élaboré une charte destinée à mieux préciser ce qui détermine le caractère adapté du logement ou de l’hébergement qui doit être proposé aux occupants protégés.

Il s’agit donc de renforcer la protection des occupants lorsque l’interdiction d’habiter est prononcée à titre définitif et que le propriétaire est tenu d’assurer le relogement.

À cet effet, nous proposons de préciser que, pour que l’obligation de relogement soit satisfaite, l’offre de logement présentée à l’occupant doit correspondre « à ses besoins, à ses possibilités, se situant à proximité du logement d’origine pour permettre aux occupants évincés de poursuivre leur vie personnelle, familiale, professionnelle et scolaire, et adaptée à la composition du foyer et le cas échéant aux personnes en situation de handicap ».

Les victimes et leurs enfants, qui sont souvent dans la précarité, doivent pouvoir poursuivre leur vie scolaire et sociale. Il convient d’éviter de les éloigner de leur lieu de vie pour ne pas ajouter davantage de complexité à leur situation.

Ainsi souhaitons-nous mieux préciser les critères encadrant les conditions de relogement des personnes victimes de l’habitat insalubre.

La justice pouvant déjà faire valoir ces critères en cas de litige, lorsque l’occupant refuse des propositions de relogement, il s’agit non pas de complexifier le droit en les mentionnant, mais de s’assurer qu’il en est bien tenu compte dès la première offre de relogement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si nous intégrons ces critères dans le texte, alors nous complexifierons bel et bien le droit.

Tous ces besoins, qu’ils soient relatifs à la vie personnelle, familiale ou scolaire ou à la situation de handicap, doivent être pris en considération – et ils le sont.

Vous l’avez dit vous-même, mon cher collègue : lorsqu’il y a litige concernant des propositions de relogement refusées par l’occupant évincé, le juge se prononce déjà selon ces critères.

Souhaitant ne pas introduire davantage de complexité – je reprends vos termes – dans la loi, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Monsieur le sénateur, en réalité, l’obligation de relogement pesant sur le propriétaire ou sur l’exploitant est satisfaite par la présentation à l’occupant d’une offre de logement correspondant « à ses besoins et à ses possibilités ».

Cette notion intègre d’ores et déjà les critères de la localisation du logement et de la situation familiale, professionnelle et scolaire des occupants ; elle permet la prise en compte des besoins particuliers de ces derniers. En ce sens, votre amendement est satisfait – vous l’avez d’ailleurs vous-même suggéré.

En détaillant plus avant dans la loi l’énumération de ces critères, on prend le risque de restreindre les possibilités de relogement et d’omettre des situations. L’adoption de cet amendement serait donc source de complexité et d’oubli de certains besoins. Je préfère que nous nous en tenions à une rédaction plus large, qui, du reste, répond aux besoins, plutôt que de prendre le risque, par excès de précision, de mettre des personnes en difficulté.

C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Monsieur le ministre, nombreux sont ceux qui, en pareils cas, rencontrent des difficultés pour obtenir d’être relogés ou, à tout le moins, se voient proposer des logements qui ne remplissent pas les critères que nous venons d’énumérer. Vous dites que mon amendement est satisfait par la loi – peut-être l’est-il…

En tout cas, les habitants qui nous font part de problèmes de ce genre, en particulier ceux qui, à Marseille, doivent être relogés définitivement après que leur immeuble a été déclaré insalubre et menacé de péril, nous disent exactement l’inverse : eux ne sont pas satisfaits, permettez-moi de vous le dire !

S’ils refusent une offre de logement, ils prennent un risque, car un juge doit alors se prononcer, ce qui peut prendre longtemps et donc les mettre dans une situation encore plus compliquée qu’elle ne l’est déjà. Dès lors qu’ils ont été chassés de leur logement à titre définitif, nous souhaitons qu’il soit tenu compte de tous les critères que j’ai cités dès la première offre visant à satisfaire à l’obligation de relogement.

À l’heure actuelle, certaines personnes demeurent dans des logements provisoires pendant très longtemps. Et eux, monsieur le ministre, ne sont pas du tout satisfaits que nous ne répondions pas à l’ensemble de leurs besoins, y compris scolaires et professionnels, ce qui arrive bel et bien à Marseille comme, je suppose, dans d’autres villes !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 33 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 68 rectifié bis, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. - Après l’article 3 bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Les mots : « de bonne foi » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés les mots : « sauf mauvaise foi avérée ».

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre …

Renforcer la protection des occupants de l’habitat dégradé

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Cet amendement vise à inverser la charge de la preuve en présumant que tous les locataires sont de bonne foi et en imposant au propriétaire souhaitant résilier le bail de prouver la mauvaise foi de son locataire.

En effet, cette notion de « bonne foi », juridiquement floue, permet au propriétaire de s’appuyer sur un défaut de paiement pour justifier la résiliation d’un bail.

Ce projet de loi contient des améliorations en matière de protection des locataires et des résidents. En adoptant cet amendement, nous ferions un pas de plus en faveur des locataires victimes de marchands de sommeil, tous ceux qui, après avoir été mal-logés pour des sommes indécentes, se retrouvent sans solution une fois leur bail résilié.

La crise du logement et l’inflation démesurée conjuguant leurs effets, il devient de plus en plus difficile pour certains locataires de changer de logement, et même de payer leur loyer. Notre amendement vise donc aussi à protéger les personnes qui ont vécu dans un habitat dégradé et n’ont pas les moyens de s’acquitter de leur loyer. Le propriétaire qui estime qu’elles ne sont pas de bonne foi devra désormais faire la preuve de leur mauvaise foi.

M. le président. L’amendement n° 89 rectifié bis, présenté par Mmes Artigalas, Linkenheld et Carlotti, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 3 bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Les mots : « de bonne foi » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés les mots : « sauf mauvaise foi avérée ».

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Les associations et collectifs réunis dans le mouvement de lutte contre le mal-logement à Marseille témoignent que de nombreux occupants en situation de précarité sociale se trouvent également sous le joug de marchands de sommeil. Ils jugent indispensable de lever les obstacles qui entravent la reconnaissance de leur situation et leur protection, afin qu’ils puissent déposer plainte et suivre les procédures de façon sereine.

Certains propriétaires indélicats parviennent à obtenir la résiliation judiciaire des baux en raison du défaut de paiement des loyers et des charges. Les occupants sont alors privés de leur droit au relogement et, éventuellement, de leur recours en indemnisation.

Pour renforcer la protection des occupants, nous proposons d’introduire à l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation une présomption de bonne foi de l’occupant. Ainsi le droit au relogement s’appliquerait-il, sauf en cas de mauvaise foi avérée de l’occupant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces deux amendements visent à créer une présomption de bonne foi pour les occupants.

L’expression « de bonne foi » n’a pas ici le même sens que dans le langage courant. Il s’agit d’un principe général du droit des contrats qui se trouve être plutôt protecteur pour les plus vulnérables, puisqu’il vise à prévenir l’abus de droit, y compris les clauses abusives au contrat.

La jurisprudence a à de nombreuses reprises précisé cette notion de bonne foi dans le cadre spécifique du droit au relogement : elle est extensive et très protectrice pour les occupants. Modifier le texte ainsi que le préconisent nos collègues nous ferait donc courir un risque d’insécurité juridique.

Vous souhaitez renforcer l’accompagnement des victimes des marchands de sommeil, et, comme nous avons eu l’occasion de le dire, nous partageons cette volonté, mais la solution que vous proposez ne nous paraît pas la plus adéquate.

Aussi la commission demande-t-elle le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis, défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 89 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 3 bis AA
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Article 3 bis B

Article 3 bis A

L’article L. 615-10 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° À la première phrase du I, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « vingt » ;

2° Il est ajouté un VII ainsi rédigé :

« VII. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, au plus tard six mois avant son terme. »

M. le président. L’amendement n° 92, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Pendant la durée de l’expérimentation prévue au I, lorsqu’un immeuble en copropriété se trouve dans la situation mentionnée à l’article L. 615-6, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat peut habiliter un opérateur mentionné au II du présent article à conclure avec le syndicat des copropriétaires une convention en vue de l’acquisition à titre onéreux du terrain d’assise de l’immeuble concerné, par laquelle il s’engage à revendre, à une date ultérieure, ledit terrain aux copropriétaires à un prix de vente limité à sa valeur initiale, actualisée selon des modalités définies par décret en Conseil d’État, et par laquelle les copropriétaires s’engagent à lui verser une redevance d’occupation, ou une convention en vue de l’acquisition à titre onéreux des parties communes et des équipements communs de l’immeuble, au sens de l’article 1er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, par laquelle les copropriétaires conservent à leur endroit un droit réel de ré-accession et s’engagent à verser à l’acquéreur une redevance d’utilisation, en échange d’un engagement de l’acquéreur à mener des travaux de réhabilitation sur ces parties communes et ces équipements communs. »

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Par cet amendement, notre groupe souhaite rétablir dans le projet de loi une disposition qui y avait été introduite lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale et a été malheureusement supprimée en commission au Sénat.

Il s’agit d’étendre une expérimentation qui était prévue dans la loi Alur : lors de son examen, l’adoption d’un amendement de votre serviteur avait permis la création du bail réel solidaire (BRS) et de son corollaire, les organismes de foncier solidaire (OFS).

Cette expérimentation a certes été prévue il y a dix ans, en 2014, mais elle portait sur des organismes et sur un type de bail tout à fait nouveaux, qui sont désormais – M. le ministre ne me contredira pas – très plébiscités. Ceux-ci se développent partout et d’aucuns plaident même pour les étendre, au-delà du seul logement à vocation sociale, au logement intermédiaire, voire au logement libre.

Ces outils semblent plaire tous bords politiques confondus ; il nous semble donc indispensable de prolonger cette expérimentation, qui n’a pas encore été mise en œuvre et est seulement en train de naître dans les territoires : il nous faut essayer de savoir si l’expropriation des seules parties communes d’un immeuble en état de carence est une bonne solution de rénovation et de lutte contre l’habitat dégradé.

Dans le cadre d’une telle expropriation des parties communes, les organismes de foncier solidaire doivent pouvoir organiser la dissociation du foncier et du bâti dans les copropriétés dégradées. Il est nécessaire que nous adoptions cet amendement pour que naisse enfin ce qui n’est qu’un test ; ainsi répondrions-nous à une demande qui s’exprime fortement sur le terrain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La commission a supprimé cette disposition, car elle soulève plus de difficultés et de questions qu’elle ne présente d’avantages.

Par exemple, aucune garantie n’est apportée quant à l’usage qui serait fait de fonds issus de la vente du terrain ; aucune précision n’est donnée quant au délai à l’échéance duquel le terrain devrait être rétrocédé aux propriétaires de l’immeuble ; on ne sait pas non plus précisément ce que recouvre le « droit réel de ré-accession » des copropriétaires.

Plus fondamentalement, il nous paraît dangereux d’essayer de contourner les difficultés budgétaires d’une copropriété en jouant sur le démembrement de propriété. Cela reviendrait à créer de facto une hypothèque sur les parties communes ou sur le terrain d’assise, ce qui pourrait aggraver les difficultés des copropriétaires en réduisant la valeur de leur bien.

Et je ne parle pas des difficultés qu’emporterait un tel dispositif pour les collectivités ou les opérateurs acquéreurs : ceux-ci pourraient se retrouver propriétaires du seul terrain, dont la valeur serait elle aussi fortement grevée.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Convaincu par l’argumentation de Mme la rapporteure, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je veux faire part d’une forte déception et d’une grande incompréhension.

Le bail réel solidaire et les organismes de foncier solidaire sont des innovations qui font leurs preuves. Je comprends que l’on puisse se poser les questions que vous avez énoncées, madame la rapporteure, mais j’ai senti dans ces questions une forme de défiance qui me paraît injuste, car, je l’ai dit, ces outils sont plutôt plébiscités.

Faisons confiance à ceux qui ont formulé cette proposition ! J’aurais aimé que nous les aidions à préciser certains éléments, ce que nous aurions pu faire, mes chers collègues, en travaillant sur la base de vos questions, en sous-amendant l’amendement ou en profitant de la navette parlementaire pour l’améliorer.

À défaut, j’assiste au simple rejet d’une disposition pourtant demandée par ceux qui, sur le terrain, sont confrontés au problème des copropriétés qui se dégradent. Chacun ici le sait, si nous avons créé le bail réel solidaire et les organismes de foncier solidaire, ce n’est pas pour réduire la valeur de quoi que ce soit : il s’agit d’outils considérés comme utiles dans la lutte pour le logement abordable.

Je suis déçue non pas tant par les avis défavorables qui viennent d’être émis que par l’absence de main tendue et de travail technique ; nous aurions pu sortir collectivement par le haut de ce débat à propos de ce qui n’est, je le rappelle, qu’une proposition d’expérimentation et d’innovation.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 92.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis A.

(Larticle 3 bis A est adopté.)

Article 3 bis A
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Après l’article 3 bis

Article 3 bis B

(Non modifié)

À titre expérimental, pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, le représentant de l’État dans le département peut prévoir, par arrêté, que les propriétaires soumis à une obligation de travaux en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation peuvent conclure avec un organisme intéressé un bail à réhabilitation en vue de la rénovation du ou des logements concernés. Ce bail à réhabilitation vient remplacer l’obligation de travaux qui est faite au propriétaire.

Un décret fixe les modalités d’application du présent article. – (Adopté.)

Article 3 bis

L’article L. 481-1 du code de l’urbanisme est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque les travaux entrepris et exécutés mentionnés au I du présent article ont produit des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé et lorsque la mise en demeure est restée sans effet au terme du délai imparti, l’autorité compétente peut procéder d’office à la réalisation des mesures prescrites, aux frais de l’intéressé.

« Lorsque ces installations sont occupées, l’occupant défini au premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation bénéficie du régime de protection des occupants défini aux articles L. 521-1 à L. 521-4 du même code.

« S’il n’existe aucun moyen technique permettant de régulariser les travaux entrepris ou exécutés en conformité avec les règlements, les obligations ou les prescriptions mentionnées au I du présent article, l’autorité compétente peut procéder à la démolition complète des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé, aux frais de l’intéressé, après y avoir été autorisée par un jugement du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond. » – (Adopté.)

Article 3 bis B
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Organisation des travaux (début)

Après l’article 3 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 8 rectifié est présenté par M. Féraud, Mme Brossel et M. Jomier.

L’amendement n° 74 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 126-15 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 126-15-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 126-15-1. – Le propriétaire, l’occupant ou, en cas de copropriété, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic, permet aux agents assermentés du service municipal du logement mentionnés à l’article L. 651-6 d’accéder, pour l’accomplissement de leurs missions, aux parties communes des immeubles d’habitation.

« Les propriétaires ou exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants peuvent accorder à ces agents une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de ces immeubles.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »

II. – Le II de l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …) L’autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes des immeubles accordée aux agents assermentés du service municipal du logement mentionnée à l’article L. 126-15-1 du code de la construction et de l’habitation. »

La parole est à Mme Colombe Brossel, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.

Mme Colombe Brossel. Les agents assermentés du service municipal du logement disposent d’un droit de visite des locaux d’habitation, après accord du propriétaire ou du locataire, ou au besoin après autorisation judiciaire, pour en constater l’état d’occupation. Mais, paradoxalement, ils ne disposent pas d’un droit d’accès de principe aux parties communes des immeubles en copropriété.

Cet amendement a pour objet de rendre les contrôles sur place beaucoup plus efficaces, tout en les sécurisant juridiquement : actuellement, plusieurs visites sont nécessaires pour accéder à un immeuble, la sollicitation préalable des copropriétaires ou du syndic entraînant des délais considérables et préjudiciables.

L’explosion du phénomène de la location de meublés touristiques entraîne une dégradation des copropriétés, ce qui nécessite d’y renforcer les contrôles.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 74.

Mme Marianne Margaté. Ce projet de loi traite des copropriétés dégradées, donc du partage des responsabilités sur le bâti entre copropriétaires. Les parties communes sont souvent les endroits les plus négligés des copropriétés dégradées ; les interventions dont il faut décider collectivement sont en effet les plus difficiles à faire voter et à financer.

Par ailleurs, il apparaît que ces parties communes sont difficiles d’accès pour les agents assermentés des services municipaux, ce qui obère la production de rapports légaux, alors même qu’elles présentent des risques importants pour les résidents.

Notre amendement vise donc à faciliter l’accès aux parties communes : il s’agit d’autoriser les agents assermentés à y pénétrer pour réaliser leurs missions d’enquête via un simple accord d’un des résidents. L’absence d’une telle possibilité peut compliquer les interventions, des éléments d’insalubrité ou d’insécurité étant restés dissimulés ou simplement inconnus.

Voilà qui pose aussi, de manière incidente, la question des moyens humains dont disposent les collectivités pour mener de telles enquêtes. Bien souvent, on le sait, elles en sont dépourvues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les agents assermentés du service municipal du logement sont habilités à visiter les locaux à usage d’habitation, et non les parties communes. L’accès aux parties communes doit donc leur être ménagé uniquement en tant qu’il leur permet d’accéder aux locaux d’habitation visés.

Aussi, sur présentation de leur ordre de mission par les agents qui l’obligent à consentir à l’entrée dans le logement, l’occupant ou le gardien du logement qui doit être visité est tenu de leur donner accès aux parties communes.

L’amendement étant donc satisfait par le droit existant, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Une fois n’est pas coutume, mon appréciation diverge de celle de Mme la rapporteure. En effet, le Gouvernement considère que l’article L. 651-6 du code de la construction et de l’habitation permet aux agents assermentés, qui sont nommés par le maire et prêtent serment devant le juge du tribunal d’instance, de visiter les locaux à usage d’habitation pour constater les conditions dans lesquelles ils sont occupés.

Or, dans la pratique – cela a été justement relevé par Mmes les sénatrices Brossel et Margaté –, les agents du service municipal sont souvent confrontés à des difficultés d’accès aux parties communes des immeubles d’habitation.

Ces amendements sont de nature à remédier à ce problème, dans un souci de respect du droit de propriété des copropriétaires : avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié et 74.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 9 rectifié bis est présenté par M. Féraud, Mme Brossel, M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 75 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 651-7 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « et leurs agents », sont insérés les mots : « , ainsi que les syndics de copropriété, ».

La parole est à Mme Colombe Brossel, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié bis.

Mme Colombe Brossel. Lorsqu’un meublé de tourisme est situé dans un immeuble en copropriété, ce qui est le cas le plus fréquent dans les grandes villes touristiques, les agents du service municipal du logement doivent s’adresser au syndic de l’immeuble afin d’obtenir les renseignements dont ils ont absolument besoin pour effectuer leurs contrôles. On pense évidemment aux codes d’accès, aux plans ou encore au règlement de copropriété de l’immeuble.

L’explosion du phénomène de la location de meublés de tourisme aggrave la dégradation des copropriétés ; il est donc nécessaire d’y renforcer les contrôles. Or les agents se heurtent régulièrement à l’inertie des syndics, voire, dans certains cas, à leur refus de communiquer les informations. Ces résistances compromettent leurs contrôles et assurent de fait l’impunité de certains loueurs.

L’article L. 651-7 du code de la construction et de l’habitation précise déjà que, « [s]ans pouvoir opposer le secret professionnel, les administrations publiques compétentes et leurs agents sont tenus de communiquer aux agents du service municipal du logement tous renseignements nécessaires à l’accomplissement de leur mission de recherche et de contrôle ». Nous proposons d’ajouter que les syndics de copropriété sont également soumis à cette obligation.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 75.

Mme Marianne Margaté. Nous plaidons pour que les syndics soient tenus de transmettre un certain nombre d’informations aux administrations communales qui les sollicitent, notamment aux services municipaux du logement.

Cette obligation de transmission concernerait notamment le règlement de copropriété, les plans et tout ce qui permet de faciliter les enquêtes conduites par les services municipaux.

À l’heure actuelle, il est parfois difficile d’obtenir ces documents, les agents ne pouvant imposer leur communication aux syndics récalcitrants. De telles obligations de transmission s’appliquent pourtant déjà aux administrations publiques : notre droit est plus clément avec les syndics…

La collecte de ces informations permettra une meilleure connaissance des copropriétés en difficulté. Nos communes devront certes mobiliser des moyens supplémentaires pour traiter les documents recueillis, mais nous irions dans le bon sens en rendant effective la transmission des renseignements indispensables aux contrôles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La mise en œuvre de ces dispositions permettrait d’accompagner les agents des services municipaux dans l’accomplissement de la mission qui leur est confiée : la transmission des informations ici visées leur serait bel et bien utile.

Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mesdames les sénatrices, je comptais initialement m’en remettre à la sagesse du Sénat. En effet, je redoutais la lourdeur de telles dispositions, qui risquaient d’ailleurs, à mon sens, de dépasser la compétence des syndics de copropriété.

Néanmoins, j’ai été convaincu par vos arguments ainsi que par l’avis émis par Mme la rapporteure : j’émets donc un avis favorable sur ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 rectifié bis et 75.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 bis.

Organisation des travaux

Après l’article 3 bis
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Organisation des travaux (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, la commission doit se réunir pour examiner un nouvel amendement du Gouvernement : nous nous retrouverons donc dans notre salle habituelle à vingt et une heures quinze, avant la reprise des débats en séance publique.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Sophie Primas.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sophie Primas

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Organisation des travaux (début)
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Discussion générale

6

Modification de l’ordre du jour

Mme la présidente. Mes chers collègues, pour des raisons tenant à l’agenda du ministre chargé de l’Europe, et en accord avec les commissions concernées et avec le Gouvernement, nous pourrions inverser les deux derniers points inscrits à l’ordre du jour de notre séance du mardi 19 mars prochain.

Nous examinerions ainsi la proposition de loi rendant obligatoires les tests PME et créant un dispositif « impact entreprises » en troisième point de notre ordre du jour, en fin d’après-midi, et éventuellement le mercredi 20 mars, à l’issue de l’espace réservé au groupe Union Centriste et, éventuellement, le soir. Le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 21 et 22 mars 2024 aurait lieu, quant à lui, à la reprise du soir du mardi 19 mars.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

7

Organisation des travaux (interruption de la discussion)
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Article 3 ter

Rénovation de l’habitat dégradé

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier, à l’article 3 ter.

Discussion générale
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Après l’article 3 ter

Article 3 ter

(Non modifié)

Au II de l’article 11-1 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer, les mots : « est en cours d’édification » sont remplacés par les mots : « a été construit depuis moins de quatre-vingt-seize heures ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 22 est présenté par M. Gontard, Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 69 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 22.

M. Guillaume Gontard. Mes chers collègues, cet article simplifie les procédures de démolition des habitats informels à Mayotte et en Guyane en élargissant le régime dérogatoire des ordres préfectoraux. Concrètement, il instaure un délai de quatre-vingt-seize heures, soit quatre jours, pendant lequel le préfet peut ordonner la démolition d’une construction venant d’être édifiée sans autorisation, dans un secteur d’habitat informel.

Soyons clairs : nous ne nous satisfaisons évidemment pas du développement de l’habitat informel, qui pose des problèmes évidents d’urbanisme, de respect du droit de propriété et de qualité de vie au sein des logements. Néanmoins, nous ne pensons pas que la solution à ce problème consiste à multiplier les destructions de ces habitats.

En réduisant, outre-mer, les délais d’évacuation des personnes mal-logées, l’on ne fait que renforcer la violence de leur expulsion, pour les placer dans des situations encore plus complexes. Comment trouver un nouvel endroit où loger sa famille en quatre jours à peine ?

La mise en œuvre des dispositions de cet article risque surtout d’accroître, à Mayotte et en Guyane, le nombre de personnes à la rue, dont la situation est encore moins satisfaisante que celle des personnes vivant dans des habitats informels. À terme, il est d’ailleurs probable que les personnes expulsées par ces destructions construisent de nouveaux habitats informels encore plus précaires.

Dès lors, au lieu de conduire des expulsions en quelques jours à peine, mieux vaut rendre salubres ces logements informels et améliorer progressivement les conditions de vie de leurs habitants, notamment via le renforcement des toitures, la pose de dalles au sol, la construction de toilettes et la sécurisation des raccordements électriques.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, et comme le demandent notamment la Fondation Abbé Pierre et l’association Droit au logement, nous vous proposons de supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 69.

Mme Marianne Margaté. Ce projet de loi vise à lutter contre l’habitat dégradé. Or, selon nous, l’article 3 ter a un autre but : il traite non pas de l’habitat dégradé, mais de la lutte contre les sans-abri. Il ne servira manifestement pas à loger les personnes à la rue ; au contraire, il aggravera la condition de celles et ceux qui survivent en construisant, pour leur famille, des abris de fortune.

En facilitant la démolition de ces bâtiments précaires à Mayotte et en Guyane sans prévoir de solution de relogement, vous condamnez des personnes à l’errance. Ce n’est pas ainsi que vous parviendrez à rassurer nos concitoyens, même si la présence de bidonvilles est insupportable et inacceptable dans la septième puissance économique mondiale.

Vous allez jusqu’à créer une disposition exceptionnelle pour que les démolitions puissent avoir lieu quatre jours après l’installation.

J’ai bien noté que le Gouvernement avait déposé un amendement visant à faciliter les constructions à Mayotte et en Guyane : il y a là sans aucun doute une urgence et nous soutiendrons ces dispositions. Mais, tant qu’il n’existe aucune autre solution de logement ou d’hébergement, il convient surtout de venir en aide aux populations mal logées, au lieu de leur enlever le bout de toit qu’elles se sont construit.

De telles habitations ont été édifiées en dehors de toute règle, certes, mais aussi à défaut de toute autre solution. Nous proposons donc de supprimer cet article, qui – j’y insiste – n’a pas vocation à lutter contre l’habitat dégradé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques. L’article 11-1 de la loi du 23 juin 2011, issu de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, renforce les moyens d’action dont dispose le préfet, en Guyane et à Mayotte uniquement, en matière d’évacuation et de démolition des bidonvilles.

Ainsi, lorsqu’un officier de police judiciaire (OPJ) constate par procès-verbal qu’un local ou une installation est en cours d’édification sans droit ni titre dans un secteur d’habitat informel, les préfets de ces deux départements peuvent, par arrêté, en ordonner la démolition sous vingt-quatre heures.

Toutefois, selon les retours d’expérience dont nous disposons – nous avons notamment auditionné le préfet de Mayotte –, cette disposition est privée d’effet par les stratégies de contournement qui sont mises en œuvre. Les locaux sont édifiés le week-end, à l’abri des regards, et le lundi matin ils ne sont plus « en cours d’édification » : ils ne peuvent donc plus être démolis.

L’article 3 ter du présent projet de loi vise justement à remédier à ce contournement de la loi en donnant aux pouvoirs publics un nouvel outil dans la lutte contre l’expansion de l’habitat informel, qui est aussi, bien souvent, un habitat indigne. Il remplace l’expression « en cours d’édification » par les mots « construit depuis moins de quatre-vingt-seize heures » afin de laisser aux autorités, notamment au maire et au préfet, le temps de détecter puis d’organiser la démolition d’un habitat informel nouvellement édifié sans droit ni titre.

Il s’agit là d’une mesure de bon sens. Nous devons mettre un coup d’arrêt à l’extension de ces bidonvilles, et ce dans l’intérêt des habitants comme des personnes, souvent en situation irrégulière, qui édifient ces installations.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. J’abonde pleinement dans le sens de Mme la rapporteure : les territoires de Mayotte et de Guyane sont confrontés à une expansion rapide des constructions illicites. Ce phénomène est à l’origine de troubles graves à l’ordre public et de drames humains liés à l’insalubrité des logements.

La lutte contre cet habitat illégal, souvent indigne, est une priorité du Gouvernement, qui entend donner aux préfets de Guyane et de Mayotte les moyens de la mener.

La loi du 23 juin 2011 a permis de résorber des poches d’habitat informel résiduelles aux Antilles et à La Réunion. En revanche, elle est insuffisante contre des bidonvilles en pleine expansion. C’est pourquoi nous avions introduit dans la loi Élan un certain nombre de dispositions législatives consacrées aux départements de Mayotte et de Guyane, tout en garantissant des droits aux occupants. Une procédure de référé devant le juge, pour suspendre toute démolition, est ainsi prévue ; s’y ajoute l’obligation de proposer une solution de relogement ou d’hébergement aux occupants.

Il s’agit donc ici, à l’article 3 ter, d’une disposition importante qu’attendent les élus locaux et les habitants de ces territoires.

Madame la sénatrice Margaté, vous insistez sur la nécessité de construire des logements en Guyane comme à Mayotte : c’est tout le sens de l’amendement n° 136, déposé par le Gouvernement, que nous examinerons dans quelques instants et dont les dispositions nous permettront de construire de façon légale des logements décents à destination de ces populations qui sont dans le besoin.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

M. Thani Mohamed Soilihi. Je confirme que les dispositions de l’article 3 ter sont très attendues à Mayotte.

Le délai dont disposent les pouvoirs publics pour détruire ces habitats, qui se construisent en l’espace de quelques heures, est aujourd’hui insuffisant ; c’est pourquoi les autorités locales demandent qu’il soit porté à quatre-vingt-seize heures.

Les auteurs de ces amendements identiques semblent, au fond, raisonner à l’envers. Je rappelle que plus de la moitié de la population de Mayotte est désormais composée d’étrangers. Dans ces circonstances, il faut avant tout faire en sorte que ce département cesse d’être attractif pour les migrants en situation irrégulière : il faut donc détruire les bidonvilles. À Mayotte, toute la classe politique plaide en ce sens.

Au demeurant, le maintien de telles constructions n’est vraiment pas un service à rendre aux habitants de ces quartiers, qui – il faut le souligner – ne sont pas tous des migrants : les bidonvilles tuent, notamment pendant la saison des pluies. Il y a quatre ou cinq ans, une mère et ses quatre enfants ont perdu la vie, emportés par une coulée de boue qui a ravagé le bidonville où ils étaient installés. Régulièrement, dans ce genre de lieux, de jeunes enfants meurent électrocutés.

La bonne démarche réside dans la destruction accélérée et intensifiée de telles constructions sauvages au profit d’un habitat régulier.

Je m’oppose donc totalement à ces deux amendements de suppression.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Mon cher collègue, les bidonvilles sont évidemment des habitats indignes et la situation des populations qui y vivent est inacceptable, d’autant que ces logements précaires sont parfois dangereux : nous sommes bien d’accord. Ce que nous contestons, c’est la procédure prévue à l’article 3 ter, qui n’est assortie d’aucune solution de relogement en cas de destruction.

M. Thani Mohamed Soilihi. Que les personnes rentrent chez elles !

M. Guillaume Gontard. Par l’amendement n° 136, le Gouvernement entend accélérer la construction, mais, par définition, puisqu’il s’agit de construire, aucune solution de relogement n’est actuellement disponible pour ceux dont l’habitat sera détruit…

Nous disons simplement que les dispositions de l’article 3 ter sont largement prématurées, compte tenu des possibilités de relogement qu’ont sous la main les pouvoirs publics.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 22 et 69.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3 ter.

(Larticle 3 ter est adopté.)

Article 3 ter
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Article 4

Après l’article 3 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 136 est présenté par le Gouvernement.

L’amendement n° 143 rectifié est présenté par MM. Mohamed Soilihi et Omar Oili, Mme Phinera-Horth, MM. Buis, Fouassin, Buval, Patriat, Théophile et Rohfritsch, Mme Nadille, MM. Kulimoetoke et Bitz, Mmes Schillinger et Havet, MM. Rambaud, Lemoyne, Iacovelli, Haye et Lévrier, Mmes Duranton, Cazebonne et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 3 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 427-2 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 427-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 427-3-… – À Mayotte, un décret en Conseil d’État arrête la liste des constructions nouvelles de logements, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les bénéficiaires des subventions et prêts visés à l’article R. 372-3 du code de la construction et de l’habitation, ainsi que par l’établissement visé au L. 321-36-1 du code de l’urbanisme et qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l’exigence d’un permis de construire et font l’objet d’une déclaration préalable. »

2° Le titre II du livre IV du code de l’urbanisme est complété par un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre …

« Dispositions particulières à la Guyane

« Art. L. 428-. – En Guyane, un décret en Conseil d’État arrête la liste des constructions nouvelles de logements, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les bénéficiaires des subventions et prêts visés à l’article R. 372-3 du code de la construction et de l’habitation, ainsi que par l’établissement visé au L. 321-36-1 du code de l’urbanisme et qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l’exigence d’un permis de construire et font l’objet d’une déclaration préalable. »

La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l’amendement n° 136.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement tend à faciliter la construction de logements à Mayotte et en Guyane : il s’agit de substituer une déclaration préalable au régime du permis de construire tout en préservant l’équilibre entre accélération des procédures, d’une part, et, de l’autre, garantie du respect des règles de fond et de droit applicables aux tiers.

Une telle simplification, qui me semble bienvenue dans ces territoires, est très attendue sur le terrain. M. le sénateur Mohamed Soilihi, qui connaît très bien ces sujets, entrera, s’il le souhaite, dans le détail de ces dispositions en présentant son propre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour présenter l’amendement n° 143 rectifié.

M. Thani Mohamed Soilihi. Mes chers collègues, voilà précisément des amendements qui vont dans le bon sens, qui ne prennent pas le problème à l’envers.

Ces deux territoires, Mayotte et la Guyane, dont vous connaissez parfaitement la situation, mes chers collègues – nous, élus de ces départements, l’évoquons fréquemment dans cet hémicycle –, sont confrontés à une très grave crise du logement, qui favorise l’expansion très rapide de constructions illicites.

Pendant des années, on a laissé faire : il faut que cela cesse.

Par cet amendement, nous tentons ainsi d’endiguer le développement exponentiel de l’habitat spontané et insalubre dans ces territoires. Il s’agit de simplifier et d’accélérer la production de logements décents en vue de reloger les personnes en sortie de bidonville, du moins celles qui sont susceptibles d’être relogées.

Notre collègue Guillaume Gontard déplorait l’absence de solution de relogement : mais la solution, pour les personnes qui sont en situation irrégulière, c’est de rentrer chez elles, tout simplement ! Ces personnes représentent aujourd’hui plus de la moitié de sa population ; Mayotte ne peut pas les accueillir !

Voilà la réponse qu’il faut apporter.

Nous proposons d’introduire dans le code de l’urbanisme deux articles précisant les modalités d’application de ce nouveau régime pour chacun des deux territoires et renvoyant à un décret en Conseil d’État pour l’établissement de la liste limitative des types d’opérations concernés, éligibles au régime de la déclaration préalable. Nous irions dans le bon sens en adoptant ce dispositif ainsi clairement encadré.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les dispositions de ces deux amendements identiques font écho aux conclusions du comité interministériel des outre-mer (Ciom) du 18 juillet 2023.

La mesure 50 dudit Ciom prévoit en effet la possibilité de construire plus facilement des habitations légères, dispensées de permis de construire, afin de contribuer à la résorption de l’habitat insalubre et du déficit chronique de construction de logements sociaux.

La commission émet donc un avis favorable sur ces amendements : les mesures visées traduisent l’engagement pris par le Gouvernement en juillet 2023. Bien sûr, ce nouveau type de logement ne saurait devenir la forme prédominante de l’habitat social dans les territoires concernés ; mais ces dispositions tout à fait concrètes permettront d’apporter une réponse effective aux problèmes actuels.

Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.

Mme Antoinette Guhl. Nous ne sommes pas satisfaits par ces amendements identiques, dans la mesure où ils visent à passer outre la procédure de droit commun qu’est le permis de construire.

Toutefois, compte tenu des difficultés actuelles de relogement qui sont clairement identifiées et de l’existence de la déclaration préalable – et uniquement au regard de cette situation très précise et, oserai-je dire, tout à fait exceptionnelle –, nous les voterons.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 et 143 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 ter.

Après l’article 3 ter
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Article 5

Article 4

(Non modifié)

I. – L’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par un V ainsi rédigé :

« V. – Aucune procédure d’exécution, de quelque nature qu’elle soit, sur les sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations au titre des missions accomplies sur le fondement des articles 29-1 à 29-7 n’est recevable. »

II. – Le I est applicable aux procédures d’exécution engagées après l’entrée en vigueur de la présente loi.

Mme la présidente. L’amendement n° 148, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Après le mot :

consignations

insérer les mots :

par l’administrateur judiciaire dans l’exercice de son mandat d’administrateur provisoire

2° Remplacer la référence :

29-7

par la référence :

29-14

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement tend à compléter l’amélioration rédactionnelle votée en commission, afin de préserver le sens de la disposition initiale de l’alinéa 2 de l’article 4.

Il convient en effet de préciser qu’il s’agit des sommes versées par l’administrateur judiciaire dans l’exercice de son mandat d’administrateur provisoire et de viser l’intégralité des articles relatifs à la procédure d’administration provisoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avis tout à fait favorable ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 148.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4, modifié.

(Larticle 4 est adopté.)

Article 4
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Après l’article 5

Article 5

La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :

1° L’article 29-1 A est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, après la référence : « 14-2-1 », sont insérés les mots : « ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans » ;

b) Au deuxième alinéa, après le mot : « comptes, », sont insérés les mots : « en l’absence de syndic ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans, » ;

1° bis (Supprimé)

2° Le II de l’article 29-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président du tribunal judiciaire peut imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic si ce dernier n’a pas saisi sur requête le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc dans les conditions prévues à l’article 29-1 A, après audition du syndic et du conseil syndical, sur le rapport de l’administrateur provisoire. » – (Adopté.)

Article 5
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Article 5 bis A

Après l’article 5

Mme la présidente. L’amendement n° 109, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, MM. Ros et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa du I de l’article L. 615-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Avant la dernière phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Cette convention prévoit également l’engagement par le syndic de la transmission de l’ensemble des pièces comptables aux partenaires publics, ainsi que la définition d’une stratégie de recouvrement des dettes de charges exigibles depuis plus de six mois. » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « La signature de la présente convention conditionne l’obtention des subventions nécessaires au redressement de la copropriété. »

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Cet amendement a pour objectif de renforcer, dans le cadre de la convention de mise en œuvre du plan de sauvegarde, l’efficacité de la stratégie de redressement des copropriétés, ainsi que d’assurer une meilleure coordination entre syndics et pouvoirs publics. Il s’agit de préciser davantage les engagements du syndic, relatifs notamment à la transmission des données comptables, et de définir une stratégie de recouvrement des impayés.

Il est important d’assurer la pleine implication des syndics si nous voulons nous doter des moyens suffisants et être ainsi en mesure de répondre aux objectifs de redressement des copropriétés. La signature de cette convention doit être aussi la contrepartie de l’obtention des subventions, afin que les moyens mobilisés pour le redressement ne pèsent pas financièrement sur les copropriétaires, déjà exsangues en raison du niveau des charges.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’obligation qui est ici proposée est déjà prévue par l’article L. 615-4-2 du code de la construction et de l’habitat. Celui-ci dispose que « le syndic met à la disposition du représentant de l’État dans le département, du maire, du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat et de la commission mentionnée à l’article L. 615-1 les documents nécessaires à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation du plan de sauvegarde ».

Cet amendement paraissant satisfait, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme Viviane Artigalas. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 109 est retiré.

Après l’article 5
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Après l’article 5 bis A

Article 5 bis A

(Non modifié)

À la seconde phrase de l’article L. 511-2 du code des procédures civiles d’exécution, après le mot : « chèque », sont insérés les mots : « , des provisions mentionnées au premier alinéa de l’article 19-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, exigibles ou rendues exigibles dans les conditions prévues au même article 19-2 ». – (Adopté.)

Article 5 bis A
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Article 5 bis

Après l’article 5 bis A

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 23 rectifié est présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 38 rectifié est présenté par Mmes Loisier et Guidez, M. Henno, Mme O. Richard, MM. Levi, Lafon et Courtial, Mme Billon, MM. Duffourg, Cambier et Canévet, Mmes Gatel et Jacquemet et M. Maurey.

L’amendement n° 65 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« b) Les honoraires du syndic afférents aux prestations qu’il doit effectuer pour l’établissement de l’état daté à l’occasion de la mutation à titre onéreux d’un lot ou d’une fraction de lot ; »

2° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les honoraires et frais perçus par le syndic au titre des prestations susmentionnées aux a et b ne peuvent excéder un montant fixé par décret. »

La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à rétablir le plafonnement des frais de recouvrement réclamés par le syndic en cas d’impayés d’un copropriétaire.

Initialement prévu par la loi Alur du 24 mars 2014, ce dispositif a été supprimé, sans explication, par l’ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis.

Le plafonnement avait été instauré dans un cadre juridique où les syndics bénéficiaient, et bénéficient toujours, d’une position avantageuse en matière de frais privatifs.

Il est très courant aujourd’hui de voir appliqués pour des lettres recommandées des tarifs exorbitants, qui peuvent atteindre jusqu’à 60 euros ! Certains syndics facturent même des services exceptionnels pour des démarches administratives de base, comme des frais d’appels téléphoniques, en plus de leurs honoraires fixes, augmentant ainsi artificiellement les dettes des copropriétaires et le montant des impayés.

Évoquer les copropriétés en difficulté, c’est parler d’impayés. C’est pourquoi nous demandons le rétablissement du plafonnement.

Cet amendement, que je vous invite à voter, mes chers collègues, a été travaillé avec la CLCV (Consommation, logement et cadre de vie) et la Fondation Abbé Pierre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 38 rectifié.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement vise à rétablir le plafonnement des frais de recouvrement réclamés par le syndic en cas d’impayés d’un copropriétaire.

Initialement prévu par la loi Alur, ce dispositif a été supprimé, sans explication, par l’ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis. Ce plafonnement était pourtant justifié par le contexte juridique très favorable aux syndics pour ce qui concerne les frais privatifs.

Il n’est pas rare de voir des lettres recommandées facturées plus de 30 euros. De même, certains syndics se contentent de démarches purement administratives – multiplication des relances et autres commandements de payer –, leur permettant ainsi de facturer des prestations exceptionnelles en sus de leurs honoraires de base.

Si les honoraires pouvant être réclamés par le syndic dans le cadre d’un état daté ont bien été plafonnés par décret, cela n’a jamais été le cas des frais de recouvrement.

Par ailleurs, le Conseil d’État, dans un arrêt du 5 octobre 2016, a confirmé que la loi Alur prévoyait bien le plafonnement par décret des frais de recouvrement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 65.

Mme Marianne Margaté. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Depuis la réforme opérée par l’ordonnance de 2019, les frais de recouvrement mis à la charge du débiteur relèvent de la liberté contractuelle dans le cadre du contrat de syndic.

Contrairement à ce qu’indique l’exposé des motifs de ces amendements identiques, on ne peut raccrocher cette question à un problème de pouvoir d’achat ou y voir une faille permettant à des syndicats défaillants des surfacturations.

C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Madame Guhl, l’amendement n° 23 rectifié est-il maintenu ?

Mme Antoinette Guhl. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Madame Loisier, l’amendement n° 38 rectifié est-il maintenu ?

Mme Anne-Catherine Loisier. Oui, je le maintiens également, madame la présidente.

Mme la présidente. Madame Margaté, l’amendement n° 65 est-il maintenu ?

Mme Marianne Margaté. Oui, je le maintiens de même, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 23 rectifié, 38 rectifié et 65.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5 bis A.

Après l’article 5 bis A
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 6

Article 5 bis

Après l’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, il est inséré un article 18-3 ainsi rédigé :

« Art. 18-3. – I. – L’agrément de syndic d’intérêt collectif atteste de la compétence de son bénéficiaire pour intervenir dans les copropriétés faisant l’objet des procédures prévues aux articles 29-1 A et 29-1.

« Le syndic d’intérêt collectif est présumé compétent pour gérer les copropriétés pour lesquelles un mandataire ad hoc a été désigné sur le fondement de l’article 29-1 A. Il peut également, à la demande d’un administrateur provisoire désigné sur le fondement de l’article 29-1, assister ledit administrateur dans ses fonctions de gestion.

« L’agrément est délivré par le représentant de l’État dans le département pour une durée de cinq ans, au regard notamment de la capacité et des compétences du syndic à accomplir les missions prévues au deuxième alinéa du présent I.

« II. – Le représentant de l’État dans le département transmet la liste des syndics d’intérêt collectif au Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires.

« III. – Les organismes d’habitations à loyer modéré mentionnés aux deuxième à quatrième alinéas de l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation et les sociétés d’économie mixte mentionnées à l’article L. 481-1 du même code peuvent demander l’agrément de syndic d’intérêt collectif mentionné au I du présent article.

« IV (nouveau). – Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »

Mme la présidente. L’amendement n° 57, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après l’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, il est inséré un article 18-3 ainsi rédigé :

« Art. 18-3. – Le syndic d’intérêt collectif est désigné sur le fondement de l’article 29-1 et exerce les missions d’administrateur provisoire.

« L’agrément est délivré par le représentant de l’État dans le département pour une durée de cinq ans. Le syndic d’intérêt collectif doit notamment remplir les conditions fixées à l’article 61-1-2 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

« Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Nous nous satisfaisons de la création du statut de syndic d’intérêt collectif, même s’il faudra encore garantir une formation pérenne de ces structures et les doter de moyens spécifiques pour que les missions complexes qui leur incombent soient menées efficacement.

Voilà qui est en décalage avec les annonces gouvernementales, puisque le Premier ministre a annoncé dans sa déclaration de politique générale sa volonté « de déverrouiller certaines professions, comme les syndics ». Le métier de syndic doit être reconnu et mieux valorisé, pour attirer des professionnels plus soucieux et plus compétents. Il ne doit pas être ubérisé, comme le laissent entendre les propos du Premier ministre.

Par ailleurs, pour faciliter leur intervention, nous pensons qu’un syndic d’intérêt collectif qui, par définition, aurait fait ses preuves, cette qualification, doit pouvoir assurer les missions d’administrateur judiciaire de la copropriété. Cela éviterait une multiplication d’acteurs et assurerait la prise en main par un syndic qui devrait être plus compétent que ceux qui n’auraient pas été labellisés.

Cet amendement vise donc à éviter une organisation en doublon, en clarifiant les modalités de désignation de ce syndic en lieu et place d’un administrateur provisoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement a pour objet une nouvelle rédaction de l’article 5 bis, qui crée un nouveau concept de syndic d’intérêt collectif.

La commission propose d’en rester à sa rédaction initiale, qui a pour objectif de créer un vivier de syndics volontaires reconnus pour leur expertise et leurs compétences, y compris des organismes de logement social.

La rédaction retenue par la commission est ouverte, ce qui permettra de répondre à certaines de vos demandes, ma chère collègue. Ainsi, le syndic pourra être désigné administrateur provisoire ou intervenir en soutien d’un administrateur judiciaire dans les grands ensembles. Cette rédaction ouverte n’interdit pas non plus aux autres acteurs d’intervenir et elle ne cantonne pas ces syndics aux seules copropriétés en difficulté.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Madame la sénatrice, vous proposez qu’un syndic d’intérêt collectif puisse également assumer les missions d’administrateur judiciaire de la copropriété.

Je ne puis malheureusement être d’accord avec vous, car les missions de syndic et d’administrateur judiciaire sont totalement distinctes : l’un assiste les copropriétaires dans leur responsabilité, l’autre s’y substitue sur décision du juge. Les syndics sont mandatés par l’assemblée générale des copropriétaires, même lorsqu’il s’agit d’un syndic d’intérêt collectif, alors que les administrateurs judiciaires, eux, sont nommés par le juge.

En revanche, l’objectif des acteurs de terrain est bien de renforcer la coopération entre ces deux acteurs lorsqu’il s’agit d’œuvrer au redressement des copropriétés qui sont en difficulté. Dans ce cas, le syndic d’intérêt collectif, au regard de ses compétences reconnues dans la gestion des copropriétés en difficulté, sera un soutien essentiel à l’action de redressement de l’administrateur.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 57.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 149, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer les mots :

pour lesquelles un mandataire ad hoc a été désigné sur le fondement de l’article 29-1 A

par les mots :

mentionnées à l’alinéa précédent, à l’exception de celles faisant l’objet d’une administration provisoire

II. – Alinéa 4

Supprimer les mots :

, au regard notamment de la capacité et des compétences du syndic à accomplir les missions prévues au deuxième alinéa du présent I

III. – Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi qu’aux maires des communes du département

IV. – Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L’agrément leur est alors accordé de droit.

V. – Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« …. – L’absence d’agrément ne fait pas obstacle à la désignation et à l’exercice des missions de syndic dans les copropriétés mentionnées au I.

« …. – Lorsqu’une copropriété ne dispose d’aucune offre de personne exerçant les missions de syndic à titre professionnel, elle peut solliciter le concours d’un syndic d’intérêt collectif.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement vise à apporter de nombreuses modifications à l’article 5 bis créant le syndic d’intérêt collectif. Si certaines nous conviennent, c’est moins le cas pour d’autres.

Ainsi, la commission est favorable à la communication au maire de la liste des syndics agréés ou encore à l’indication précisant que ces syndicats peuvent s’occuper d’autres copropriétés que celles qui sont en difficulté, et inversement, même si ces ajouts apportent peu à la rédaction actuelle.

En revanche, la commission est opposée à deux modifications : premièrement, celle qui vise à empêcher ce syndic d’être désigné administrateur provisoire, alors que la rédaction actuelle le permet et que cela répond à une demande forte des maires concernés, notamment à Saint-Denis, à Mulhouse ou à Grigny ; deuxièmement, celle qui supprime les conditions minimales d’agrément relatives à la compétence du syndic.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Le Gouvernement a une argumentation divergente.

Monsieur le sénateur, l’adoption de cet amendement viendrait utilement compléter le régime introduit à l’Assemblée nationale. En plus d’apporter des précisions rédactionnelles, elle offrirait, d’une part, une procédure simplifiée pour les bailleurs sociaux qui seraient demandeurs, et, d’autre part, une clarification concernant la capacité pour les syndics non agréés à continuer leur mission de gestion de copropriété sans exclusion. Enfin, elle permettrait d’assurer la parfaite information des maires, qui sont en première ligne sur ce sujet.

C’est pourquoi, sur cet amendement qu’il juge très utile, le Gouvernement émet un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 149.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 99, présenté par Mmes Linkenheld et Artigalas, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot

délivré

insérer les mots :

, après consultation du comité régional de l’habitat et de l’hébergement

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Puisque ce texte crée le syndic d’intérêt collectif, qui doit bénéficier d’un agrément du préfet, cet amendement vise à prévoir, en quelque sorte par parallélisme des formes avec ce que nous avons fait naguère et après la loi Alur avec les organismes de foncier solidaire, la consultation du comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH).

Les syndics d’intérêt collectif concernent finalement plusieurs milieux : les collectivités, les professionnels, les associations d’habitants ou de locataires. Par conséquent, il nous semble intéressant que ceux-ci soient informés que les syndics d’intérêt collectif peuvent se voir délivrer des agréments par le préfet.

Je précise qu’il s’agit d’une consultation, entendue au sens d’une information. Aucune demande d’avis conforme n’est donc prévue. Il s’agit simplement de partager une information, comme cela se fait pour les agréments délivrés par les préfets pour les organismes de foncier solidaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les auteurs de cet amendement souhaitent que le préfet soit obligé de consulter le comité régional de l’habitat et de l’hébergement avant d’agréer un syndic d’intérêt général, ce que nous pouvons entendre.

Toutefois, cela reste une lourdeur supplémentaire sans que la plus-value d’une telle mesure apparaisse évidente et nécessaire.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 99.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5 bis.

(Larticle 5 bis est adopté.)

Article 5 bis
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Article 7

Article 6

Après l’article L. 300-9 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 300-10 ainsi rédigé :

« Art. L. 300-10. – Par un contrat conclu dans les mêmes formes que celles prévues aux articles L. 300-4 et L. 300-5, il peut être confié à une personne y ayant vocation la réalisation d’actions nécessaires au traitement d’un immeuble faisant l’objet d’un arrêté pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation ou d’un îlot ou d’un ensemble cohérent d’îlots comprenant au moins un tel immeuble ou à une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 du même code, à un plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 dudit code ou à une opération de requalification de copropriétés dégradées prévue à l’article L. 741-1 du même code.

« Le contrat prévoit les actions ou les opérations, notamment foncières ou immobilières, à réaliser ainsi que les conditions d’acquisition, de cession et, le cas échéant, de démolition, de construction, de réhabilitation et de gestion des logements, des locaux ou des équipements concernés. »

Mme la présidente. L’amendement n° 166, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les références :

L. 511-1 à L. 511-3

par les références :

L. 511-11 ou L. 511-19

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 166.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
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Article 7 bis A (nouveau)

Article 7

(Non modifié)

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° La dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 211-2 est complétée par les mots : « ainsi qu’en vue de la réalisation d’opérations programmées d’amélioration de l’habitat prévues à l’article L. 303-1 du même code, de plans de sauvegarde prévus à l’article L. 615-1 dudit code ou d’opérations de requalification de copropriétés dégradées prévues à l’article L. 741-1 du même code » ;

2° Après l’article L. 211-2-3, il est inséré un article L. 211-2-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 211-2-4. – I. – Le droit de préemption institué dans les conditions prévues au présent chapitre peut être exercé en vue de la réalisation d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation, d’un plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 du même code ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées prévue à l’article L. 741-1 dudit code.

« II. – Pour la réalisation des actions ou des opérations mentionnées au I du présent article, le titulaire du droit de préemption urbain peut déléguer ce droit au concessionnaire d’une opération d’aménagement mentionnée à l’article L. 300-4 ou d’actions mentionnées à l’article L. 300-10.

« Le droit de préemption ainsi délégué peut, le cas échéant, porter sur les aliénations et cessions mentionnées à l’article L. 211-4.

« Les biens ainsi acquis entrent dans le patrimoine du délégataire. » – (Adopté.)

Article 7
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Article 7 bis

Article 7 bis A (nouveau)

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 634-4, après le mot : « chapitre », sont insérés les mots : « le maire de la commune ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée à l’article L. 634-1 ou, à défaut, » et les mots : « l’Agence nationale de l’habitat » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné, ou à l’Agence nationale de l’habitat en cas d’application de l’amende par le représentant de l’État dans le département » ;

2° L’article L. 635-7 est ainsi modifié :

a) Aux deux premiers alinéas, après le mot : « commune, », sont insérés les mots : « le maire de la commune ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence mentionnée à l’article L. 635-1 ou, à défaut, » ;

b) Au troisième alinéa, après le mot : « versé », la fin est ainsi rédigée : « à la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné, ou à l’Agence nationale de l’habitat en cas d’application de l’amende par le représentant de l’État dans le département. »

Mme la présidente. L’amendement n° 151, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 634-4,les mots :« le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « le maire de la commune exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 634-1 ou bénéficiant de la délégation prévue au III de l’article L. 634-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 634-1 » et les mots : « l’Agence nationale de l’habitat » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné » ;

2° L’article L. 635-7 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : « auprès de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, de la commune, le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « , le maire de la commune exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 635-1 ou bénéficiant de la délégation prévue au III de l’article L. 635-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 635-1 » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « notifiée par le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire de la commune, le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « , le maire de la commune exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 635-1 ou bénéficiant de la délégation prévue au III de l’article L. 635-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 635-1 » ;

c) Au troisième alinéa, les mots : « l’Agence nationale de l’habitat » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné ».

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Les établissements publics de coopération intercommunale et les communes décident en propre de mettre en place les dispositifs de déclaration de mise en location et d’autorisation préalable de mise en location sur leur territoire. À ce titre, elles doivent pouvoir exercer les pouvoirs de sanction du non-respect de ces procédures.

L’article 7 bis A adopté par la commission prévoit que le produit des amendes sera versé à la collectivité.

Cet amendement vise à aller au bout de la logique de décentralisation sur ce sujet, en donnant à ces collectivités un pouvoir de sanction. Cela simplifiera ces dispositifs et apportera de la cohérence dans leur mise en œuvre.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 160, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 151

I. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le même premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « En cas de mise en œuvre de la délégation prévue au III de l’article L. 634-1, la convention de délégation précise les modalités d’usage par les communes du produit des amendes. Les communes concernées rendent compte à l’établissement public de coopération intercommunale de l’usage du produit des amendes dans le cadre du rapport annuel sur l’exercice de cette délégation mentionné au dernier alinéa du même article. ».

II. – Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

…) Le même troisième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « En cas de mise en œuvre de la délégation prévue au III de l’article L. 634-1, la convention de délégation précise les modalités d’usage par les communes du produit des amendes. Les communes concernées rendent compte à l’établissement public de coopération intercommunale de l’usage du produit des amendes dans le cadre du rapport annuel sur l’exercice de cette délégation mentionné au dernier alinéa du même article. »

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. L’amendement n° 151 tend à permettre aux EPCI et aux communes de détenir les leviers nécessaires à l’application d’un dispositif dont l’instauration relève de leurs compétences. En ce sens, il s’agit d’un amendement de simplification et de rationalisation.

Il serait toutefois utile de préciser les modalités d’utilisation du produit des amendes en cas de délégation de l’EPCI à une commune, pour éviter toute difficulté opérationnelle. C’est pourquoi le Gouvernement présente un sous-amendement tendant à préciser que l’EPCI indique dans la convention de délégation les modalités d’utilisation du produit des amendes par la commune.

Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 151.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’amendement n° 151 a pour objet de prolonger la disposition introduite en commission, qui donne au maire ou au président de l’EPCI le pouvoir d’infliger des amendes en cas d’infraction au permis de louer et qui fait bénéficier les communes et EPCI concernés du produit de ces amendes.

Il tend ainsi à supprimer la compétence résiduelle du préfet. Il s’agit d’une simplification bienvenue, qui va tout à fait dans le sens de la position de la commission.

En revanche, le sous-amendement n° 160 a pour objet de préciser que, lorsque les communes mettent en œuvre le permis de louer par délégation d’un EPCI, la convention de délégation fixe les modalités d’usage par les communes du produit des amendes. Il s’agit là d’une restriction de la liberté octroyée aux communes par l’amendement n° 151 quant à l’usage du produit de ces amendes.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 160, mais un avis favorable sur l’amendement n° 151.

Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.

Mme Antoinette Guhl. Nous voterons l’amendement n° 151, dont les dispositions nous semblent aller dans le bon sens, puisqu’elles poussent jusqu’au bout la logique de décentralisation.

En revanche, le sous-amendement n° 160, qui tend à demander des comptes sur l’utilisation des amendes, ne correspond pas à notre conception de la liberté de fonctionnement des collectivités locales. C’est pourquoi nous voterons contre.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 160.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Quel est, désormais, l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 151 ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas rancunier : même si son sous-amendement n’a pas été adopté, il émet un avis favorable sur l’amendement n° 151. (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 151.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 7 bis A est ainsi rédigé.

Article 7 bis A (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 8

Article 7 bis

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° A (nouveau) L’article L. 314-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre des actions et opérations mentionnées à l’article L. 421-5-3, les occupants évincés définitivement peuvent, à titre exceptionnel et sous réserve de leur accord, bénéficier d’un relogement temporaire dans les constructions temporaires et démontables mentionnées au même article, pour une durée maximale de deux ans. » ;

1° Après l’article L. 421-5-2, il est inséré un article L. 421-5-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-5-3. – I. – Par dérogation aux articles L. 421-1 à L. 421-5, sont dispensées de toute formalité au titre du présent code pour la durée de l’opération, les constructions temporaires et démontables à usage exclusif de relogement temporaire des occupants délogés à titre définitif ou provisoire, rendu nécessaire par des opérations d’aménagement ayant pour objet la lutte contre l’habitat dégradé ou indigne ou réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain définies à l’article 9-1 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, ou par des actions de lutte contre l’habitat indigne réalisées dans le cadre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat mentionnée à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation ou d’une opération de requalification des copropriétés dégradées mentionnée à l’article L. 741-1 du même code, ainsi que dans le cadre des procédures d’expropriation mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

« Sont également dispensées de toute formalité au titre du présent code, jusqu’à la réintégration des occupants dans le local qu’ils ont évacué, et pour une durée maximale de trois ans, les constructions temporaires et démontables à usage exclusif de relogement temporaire des occupants délogés à titre définitif ou provisoire, rendu nécessaire à la suite d’une expropriation mentionnée aux mêmes articles L. 511-1 ou L. 512-1, lorsqu’elle n’est pas conduite dans le cadre de l’une des opérations mentionnées au premier alinéa.

« Les constructions mentionnées aux premier et deuxième alinéas du présent I remplissent des conditions minimales de confort et d’habitabilité fixées par décret.

« Le présent article s’applique sans préjudice des articles L. 314-1 à L. 314-9, relatifs à la protection des occupants et, le cas échéant, des articles L. 423-1 à L. 423-5 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, relatifs aux droits de relogement.

« II. – L’implantation des constructions mentionnées au I du présent article est soumise à l’accord préalable du maire de la commune d’implantation de la construction par le maître d’ouvrage, au plus tard un mois avant la date de début d’implantation. Cet accord précise la nature et l’usage du projet de construction ainsi que la date de début d’implantation. Il peut également préciser la date de fin d’implantation, si celle-ci est antérieure aux délais mentionnés au même I.

« III. – Avant l’expiration du délai mentionné audit I ou, si elle est antérieure, avant la date fixée au II, le maître d’ouvrage est tenu de remettre les lieux occupés dans leur état initial.

« IV. – Le présent article n’est pas applicable dans les zones où le fait de construire ou d’aménager est interdit par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou est soumis au respect de conditions de réalisation, d’utilisation ou d’exploitation prescrites par ce plan. » ;

2° À l’article L. 421-8, les mots : « et L. 421-5-2 » sont remplacés par les mots : « , L. 421-5-2 et L. 421-5-3 » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 433-1, les mots : « de l’article L. 421-5 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 421-5 et L. 421-5-3 » ;

4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 480-4, après la référence : « L. 421-5 », sont insérés les mots : « et L. 421-5-3 » ;

5° Au I de l’article L. 481-1, après la référence : « L. 421-5 », sont insérés les mots : « et L. 421-5-3 ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 24 est présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 85 rectifié est présenté par Mmes Artigalas, Linkenheld et Carlotti, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour présenter l’amendement n° 24.

Mme Antoinette Guhl. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, qui est fermement opposé à la mise en place des constructions temporaires et démontables à des fins de relogement exemptes de toute autorisation au titre de la réglementation de l’urbanisme, souhaite la suppression de l’article 7 bis.

La dispense d’autorisation d’urbanisme soulève également des interrogations quant à la responsabilité qui en découle. Certes, la simplification est louable pour accélérer le relogement dans le cadre d’opérations de renouvellement urbain ou de lutte contre l’habitat indigne, mais nous ne pouvons pas ignorer les inquiétudes exprimées par de nombreuses associations comme par de nombreux élus.

L’essentiel de ces préoccupations réside dans la nature temporaire de ces constructions, notamment dans le recours à des structures comme les algécos, destinées à héberger des ménages pour une durée prolongée.

Comme l’a souligné le rapport de la Fondation Abbé Pierre, les baraques de chantier, les algécos, les habitations légères de loisirs de type bungalow ou mobile home sont caractérisées par l’Insee comme des habitations de fortune. Pour notre part, nous ne voulons pas autoriser l’habitation de fortune, même temporairement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 85 rectifié.

Mme Viviane Artigalas. L’article 7 bis prévoit une dispense totale de toute formalité en matière d’urbanisme pour installer des constructions temporaires et démontables en vue du relogement temporaire des personnes évincées, à titre définitif ou provisoire.

Cette proposition, sans évaluation ni étude d’impact, ne nous paraît pas remplir toutes les conditions de sécurité des personnes à reloger, qui sont déjà victimes de mal-logement et qui ont subi une évacuation souvent traumatisante, comme le rappelle le collectif de lutte contre le mal-logement de Marseille.

Nous avons bien noté les efforts de Mme la rapporteure pour encadrer cette dispense, en prévoyant par exemple que le relogement des occupants évincés définitivement ne puisse se faire qu’à titre exceptionnel et sous réserve de leur accord, avec une durée de logement limitée à deux ans et une précision sur les conditions minimales de confort et d’habitabilité.

Nous proposons cependant, au travers de cet amendement, la suppression de cet article. En effet, il existe déjà un outil adapté, à savoir le permis de construire précaire, qui prévoit une dérogation légale aux règles d’urbanisme. Notre objectif n’est donc pas de fermer la porte au déploiement de constructions durables et déplaçables pour répondre aux enjeux d’hébergement et de relogement temporaires.

En revanche, la dispense de formalité et une trop forte exposition des maires qui devront donner leur accord sans aucune étude ni instruction de demande ne nous conviennent pas.

C’est pourquoi la dispense de toute formalité d’urbanisme apparaît comme une fausse bonne idée. Qui plus est, cela ne répondra pas à l’urgence. La préparation du terrain, la commande des modulaires et les branchements aux réseaux demandent du temps.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Tous les acteurs auditionnés par la commission ont souligné les très grandes difficultés causées par le relogement temporaire ou provisoire des occupants évincés de leur logement lors d’actions ou d’opérations de résorption de l’habitat insalubre ou dégradé. Cela constitue aujourd’hui un frein réel à la conduite de telles opérations.

C’est la raison pour laquelle la commission a décidé de renforcer cette disposition introduite à l’Assemblée nationale, qui constitue une solution pragmatique que tous les acteurs que j’ai entendus ont unanimement approuvée.

D’ailleurs, mesdames les sénatrices, pour répondre à vos craintes, la commission a conservé les garanties fixées par l’Assemblée nationale en matière de conditions minimales de confort et d’habitabilité pour le relogement des occupants évincés.

En outre, elle a bien précisé que, pour les occupants ayant droit à un relogement définitif, le recours à ces constructions temporaires ne pourrait se faire qu’avec leur accord et pour une durée limitée, afin de ne pas les installer dans un provisoire qui dure.

Enfin, j’insiste sur l’intérêt de cette disposition, qui fait en sorte de sortir les occupants de logements insalubres.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Bien sûr !

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si nous souhaitons le faire de façon pragmatique, il faut proposer des solutions qui sont temporaires, mais aussi, bien sûr, cadrées.

Par conséquent, la commission assume la disposition retenue et émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je partage tout à fait l’analyse de Mme la rapporteure et m’oppose à mon tour à ces amendements de suppression.

L’article 7 bis qui a été introduit par l’Assemblée nationale est très utile.

Il permet, d’une part, d’accélérer les opérations de rénovation de l’habitat indigne et des copropriétés dégradées, et, d’autre part, de trouver des solutions temporaires pour des personnes qui ont besoin d’être relogées, le tout avec des garde-fous que Mme la rapporteure a soulignés – on parle bien de constructions temporaires et démontables qui remplissent des conditions minimales de confort et d’habitabilité fixées par décret – et qui permettent de s’assurer que nous disposons d’outils de relogements temporaires et provisoires, à même de lutter réellement contre l’habitat indigne.

Nous devons prioriser les objectifs. Souhaite-t-on accélérer la rénovation de bâtiments et d’habitats indignes ? Si la réponse est oui, il faut bien des solutions rapides pour héberger de façon temporaire des personnes qui ont besoin d’être logées, le temps de réaliser les travaux de rénovation.

Si l’on met des obstacles à ces solutions provisoires d’attente, on ne pourra pas accélérer la rénovation de l’habitat indigne. Qui plus est, nous avons le soutien des acteurs, que vous avez interrogés dans le cadre des auditions que vous avez organisées, madame la rapporteure, et nous avons des protections et des garde-fous pour garantir le confort et la sécurité des occupants. Aussi, allons-y ! Essayons d’accélérer !

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Il n’est pas de bon ton, me semble-t-il, d’opposer ceux qui voudraient accélérer la rénovation de l’habitat indigne et ceux qui ne le voudraient pas, au motif que ces derniers soulignent qu’un hébergement temporaire, fût-il destiné à reloger des personnes qui étaient jusqu’alors mal logées, ne doit pas faire l’objet d’un permis de construire – car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Monsieur le ministre, oui, il existe des normes de confort et d’habitabilité, mais il faut aussi respecter d’autres règles !

Pour ma part, je n’imagine pas que l’on puisse, dans ma ville, installer sans permis de construire des constructions modulaires sur des terrains dont je sais qu’ils sont pollués. Un permis de construire ne vise pas seulement à vérifier les conditions de confort et d’habitabilité ; il sert également à s’assurer que la construction modulaire que l’on envisage d’installer ne se trouvera pas à un emplacement dangereux.

Tous les élus locaux, malgré leur envie d’installer sur leurs friches des containers, des algécos ou des habitats modulaires de très bonne facture y ont souvent renoncé, parce que ces terrains présentaient des risques pour les familles qui y auraient été logées, notamment les enfants.

Exiger un permis de construire n’a pas pour objectif d’alourdir les procédures ou de s’opposer à la simplification. Il s’agit plus prosaïquement de tenir compte de la réalité de nos territoires.

Monsieur le ministre, si l’on veut véritablement accélérer la rénovation de l’habitat dégradé, donnons plus de moyens aux particuliers et aux copropriétaires qui veulent rénover, plutôt que de sabrer MaPrimeRénov’. Donnons plus de moyens aux bailleurs sociaux, plutôt que de les ponctionner !

Je le répète, il me semble mal à propos d’opposer comme vous le faites ceux qui seraient favorables à l’accélération des logements temporaires et ceux qui ne le seraient pas, alors qu’il y va de la sécurité des occupants.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 et 85 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 150, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 2, 3 et 6

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

la durée de l’opération

par les mots :

une durée maximale de cinq ans

III. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

Les constructions mentionnées aux premier et deuxième alinéas du présent I

par les mots :

Ces constructions

IV. – Alinéa 9

1° Deuxième phrase

Remplacer les mots :

Cet accord

par les mots :

La demande

2° Troisième phrase

Remplacer le mot :

Il

Par le mot :

Elle

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Tout en conservant une partie des évolutions adoptées en commission, nous prévoyons au travers de cet amendement de simplifier le dispositif prévu par l’article 7 bis.

Il s’agit également de supprimer l’alinéa 6, qui crée un second régime de dispense et complexifie le dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Pourquoi revenir à une durée maximale de cinq ans pour la dispense d’autorisation d’urbanisme, plutôt qu’aligner celle-ci sur la durée de l’opération de résorption de l’habitat dégradé concerné, ce qui serait plus logique ?

Si la commission s’oppose à la durée maximale de cinq ans, c’est parce qu’utiliser ces constructions temporaires lors de l’ensemble des phases de mise en œuvre de ces opérations, avec une occupation successive par des ménages différents présente un intérêt évident. Qui plus est, cela permet non seulement d’abaisser le coût à la place, mais surtout d’optimiser ces emplacements.

Pour lever toute crainte, je précise que, afin d’éviter les implantations excessivement longues, la commission a prévu que ces dispenses ne s’appliqueraient que dans le cadre d’opérations conduites par la puissance publique et que l’accord donné par le maire à ces implantations puisse fixer une date de fin d’implantation. Ainsi, les collectivités sont protégées contre toute durée excessive et non bornée des implantations dispensées d’autorisation.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mon avis, malheureusement, diverge encore une fois de celui de Mme la rapporteure.

Nous sommes favorables à votre amendement, monsieur Buis, qui vise à simplifier le dispositif prévu à l’article 7 bis et à limiter à cinq ans la durée maximale d’implantation de ces constructions temporaires.

Une telle durée est raisonnable pour ce type de projet, s’agissant surtout de constructions temporaires, dispensées de toute formalité au titre du code de l’urbanisme. Une durée d’implantation alignée sur celle du projet, qui peut parfois être très longue, pourrait présenter des risques juridiques.

En outre, vous proposez de supprimer la création d’un second régime de dispense à l’alinéa 6, qui complexifie le dispositif.

Je répondrai à présent aux sénatrices qui s’interrogeaient précédemment sur le dispositif. Je vous invite à lire l’alinéa 11 de cet article, qui prévoit : « Le présent article n’est pas applicable dans les zones où le fait de construire ou d’aménager est interdit par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou est soumis au respect de conditions de réalisation, d’utilisation ou d’exploitation prescrites par ce plan. »

Vous parliez de zone de danger ou de zone de risque : en réalité, le dispositif prévoit bien le cas que vous avez évoqué en vous opposant à cet article.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 150.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7 bis.

(Larticle 7 bis est adopté.)

Article 7 bis
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Après l’article 8

Article 8

Le III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :

« III. – Figurent également au registre les principales données concernant la copropriété devant permettre :

« 1° De connaître la situation financière de la copropriété ;

« 2° De connaître les caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, notamment celles prévues dans les diagnostics obligatoires ;

« 3° Aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté ;

« 4° D’informer de l’existence d’un dépôt de plainte ou d’une condamnation sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal, si le syndic en a connaissance. »

Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié ter, présenté par Mmes Noël, Joseph et Dumont, MM. Anglars, Pellevat, D. Laurent, Mouiller et Houpert, Mme Muller-Bronn, MM. Favreau, Savin et Savoldelli, Mme Josende, M. C. Vial, Mme Berthet et MM. Klinger et Genet, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

en faisant apparaître le budget, le montant total des impayés copropriétaires et de toute dette de la copropriété

II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le syndic professionnel ou l’administrateur provisoire, dans le cas des procédures prévues à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, a l’obligation d’actualiser toutes ces données dans un délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal de l’assemblée générale de la copropriété.

« En cas de non-respect du délai fixé au précédent alinéa, le syndic professionnel ou l’administrateur provisoire, dans le cas des procédures prévues à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, s’expose à une sanction prononcée par le conseil syndical ou d’une majorité qualifiée des copropriétaires correspondant à 10 % des honoraires annuels qu’il perçoit pour la gestion de ladite copropriété. »

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. L’article 8 dresse la liste les données supplémentaires devant être inscrites dans le registre national des copropriétés.

En l’état actuel de sa rédaction, il s’agit des données relatives à la situation financière de la copropriété, des caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, des données permettant aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté et, enfin, de celles qui permettent d’informer de l’existence d’agissements consistant à abuser d’autrui.

Le présent amendement vise donc à ajouter aux données relatives à la situation financière de la copropriété le budget, le montant total des impayés des copropriétaires et toute dette de la copropriété.

En outre, l’amendement tend à rendre obligatoire l’actualisation de toutes les données inscrites au III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation dans les deux mois suivant la notification du procès-verbal d’assemblée générale de la copropriété.

Enfin, cet amendement vise à prévoir une astreinte afin de rendre ce dispositif plus effectif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement, qui a déjà été rejeté en commission, a pour objet de préciser les données financières devant être inscrites au registre national d’immatriculation des copropriétés.

Ces données figureront dans le décret qui sera pris en application de l’article. L’amendement me paraît donc satisfait sur le fond.

Sur la forme, cette disposition est contraire à la volonté de simplifier la loi et de renvoyer ces précisions, ainsi que d’éventuelles sanctions, au décret. En outre, il s’agit d’une obligation administrative, et une sanction prononcée par le conseil syndical ou par la majorité des copropriétaires ne paraît pas adaptée.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 79 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 25, présenté par M. Benarroche, Mme Guhl, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

et de l’existence d’agissements qui consistent à abuser d’autrui, soit directement, soit par un intermédiaire, en vendant, en louant ou en mettant à disposition, moyennant une contrepartie, un bien meuble, une partie de celui-ci ou tout ou partie d’un logement ou d’un local dans un immeuble, dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Mis en place par la loi Alur de 2014, le registre national d’immatriculation des copropriétés (RNIC) a été pensé comme un outil de connaissance. Il permet aux citoyens et aux pouvoirs publics de mieux connaître l’état des copropriétés. L’action de l’État, des collectivités, les programmes locaux de l’habitat (PLH) et l’Anah se fondent sur ce registre.

L’article 8 permet d’étendre les données recueillies dans le RNIC, notamment au diagnostic de performance énergétique, qui n’y figurait pas encore, ce qui sera utile pour le repérage des immeubles devant être prioritairement rénovés.

Lors de nos échanges avec un certain nombre de collectifs de citoyens, en particulier avec les associations et les collectifs en lutte contre le mal-logement et l’habitat indigne de Marseille, nous avons constaté que cette amélioration du RNIC en outil opérationnel de prévention et de traitement des copropriétés dégradées avait été très favorablement accueillie.

Néanmoins, nous avons aussi constaté, comme ces associations, que l’Assemblée nationale avait veillé utilement à ce que figurent également dans ce registre les données devant permettre de prévenir les agissements des marchands de sommeil.

Il est essentiel de lutter contre la prédation sur le marché de la précarité et de la pauvreté. À cet égard, les services de l’État et des collectivités territoriales doivent agir, et ils le font. Les marchands de sommeil constituent un phénomène caractéristique de la dégradation des copropriétés, et le registre doit servir à mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté.

Par cet amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires entend aller au-delà de la consignation des simples dépôts de plainte ou d’une condamnation sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal, si le syndic en a connaissance, en rétablissant la rédaction plus large issue de l’Assemblée nationale concernant le signalement des agissements des marchands de sommeil.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si la commission a supprimé certaines dispositions issues de l’Assemblée nationale pour ne retenir que des faits, notamment une condamnation ou un dépôt de plainte, c’est parce que le registre national d’immatriculation des copropriétés n’est pas le lieu pour effectuer des dénonciations et signaler des agissements. Le RNIC n’est pas une main courante ou le registre du commissariat ou de la gendarmerie !

Il s’agit non pas de restreindre la lutte contre les marchands de sommeil, mais, au contraire, d’en assurer la solidité juridique.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. J’aurai le même avis défavorable que Mme la rapporteure.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Il n’est pas question de délation ici. En outre, tout le monde s’accorde pour dire que la disposition que nous proposons serait efficace, ce qui est notre objectif premier.

Par ailleurs, l’amendement vise à remplacer dans le texte de la commission les mots « l’intention de réaliser un profit anormal ». En effet, je me suis interrogé sur cette formulation. Si l’on parle d’intention de réaliser un profit « anormal », cela sous-entend qu’il existerait une possibilité de réaliser un profit « normal » dans le cadre de la mise à disposition ou de la location d’un bien incompatible avec la dignité humaine.

Je ne comprends pas cette rédaction. On ne peut pas parler de profit « anormal », car, de fait, un profit réalisé dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine est anormal. Nous proposons donc une rédaction plus pertinente et voulons écrire : « moyennant une contrepartie ».

Monsieur le ministre, madame la rapporteure, la lutte contre l’habitat dégradé doit s’appuyer sur un droit lisible, clair et applicable par les juges.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
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Article 8 bis A (supprimé)

Après l’article 8

Mme la présidente. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par Mmes Artigalas et Narassiguin et MM. Ziane, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental, pendant une durée de six ans, dans le cadre du paragraphe 2 de la section 5 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de procédure pénale, les inspecteurs de salubrité ou agents de police municipale de catégorie A et B compétents pour la recherche et la constatation des infractions portant atteinte à la santé ou à la sécurité des occupants de locaux à usage d’habitation affectés à un service communal d’hygiène et de santé, disposent, pour les enquêtes judiciaires qu’ils diligentent sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d’instruction, des mêmes prérogatives et obligations que celles attribuées aux officiers de police judiciaire. La liste des communes volontaires et les modalités de l’expérimentation sont fixées par décret en Conseil d’État.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à mettre en place une expérimentation, pendant laquelle les inspecteurs de salubrité et les agents de la police municipale seraient dotés des pouvoirs d’enquête judiciaire en habitat indigne.

Cette expérimentation pourrait se dérouler dans les communes volontaires, situées dans les six territoires d’accélération de lutte contre l’habitat indigne.

L’objectif est de renforcer les pouvoirs des agents déjà mobilisés pour l’instruction des procédures, afin d’optimiser leur expérience du terrain et de faciliter l’instruction des actes judiciaires les plus simples : audition libre des mis en cause, des victimes, avis au parquet, rappel à la loi, avis à victime.

Il ne s’agit en aucun cas de se subroger aux obligations et responsabilités de la police. Cette mesure s’appliquerait dans le cadre d’une convention avec l’État et le parquet.

Cet amendement vise à traduire la recommandation n° 22 du rapport de Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, tous deux maires de communes particulièrement exposées à l’habitat indigne. Ils souhaitent que leur capacité d’intervention soit renforcée, afin d’être en mesure de mieux identifier les situations d’habitat indigne, de les évaluer et de mettre en œuvre plus rapidement les procédures les plus adaptées.

Mathieu Hanotin, en particulier, est volontaire pour expérimenter immédiatement à Saint-Denis cette recommandation phare de son rapport, dans un objectif d’efficacité de l’action des maires.

La rédaction proposée ici a été simplifiée et renvoie à un décret les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La proposition de donner des pouvoirs d’enquête judiciaire en matière d’habitat indigne aux inspecteurs de salubrité et aux agents de police municipale n’est pas nouvelle. On en parle assez régulièrement, cette disposition étant très demandée et très attendue par les élus locaux, notamment les maires. Je vous remercie de nous donner l’occasion de débattre ici de cette question, ma chère collègue.

Cette proposition, qui a été formulée dans le rapport de Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, reçoit, je l’ai dit, un large soutien des maires. Lors d’une consultation, 71 % d’entre eux s’y sont déclarés favorables. Plusieurs sénateurs m’ont d’ailleurs également interrogée sur ce sujet.

Pour tout vous dire, j’ai moi-même souhaité reprendre cette disposition, mais elle se heurte à des difficultés constitutionnelles, compte tenu du statut de ces agents, qui sont placés sous l’autorité du maire et non de l’État et du procureur de la République. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs déjà censuré des dispositions similaires.

Cette proposition soulève par ailleurs d’autres questions, notamment la prise en charge des coûts de ces missions effectuées pour le compte de l’État, coûts qui ne seraient sans doute pas compensés.

J’y ai donc renoncé, pour cette raison également. Le sujet n’est pas mûr aujourd’hui, même s’il est très présent dans nos débats.

La commission souhaite donc connaître l’avis et les intentions du Gouvernement sur ce sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je salue la lucidité de Mme la rapporteure : elle a rappelé les raisons pour lesquelles le Gouvernement sera défavorable à cette proposition.

Je comprends bien vos intentions : cet amendement vise à confier aux agents de la police municipale et aux inspecteurs de salubrité les mêmes prérogatives de police judiciaire que celles dont disposent les officiers de police judiciaire en matière d’habitat indigne.

Toutefois, confier aux policiers municipaux le soin de conduire seuls une enquête de police judiciaire dans son intégralité constitue un véritable bouleversement des missions qui leur sont confiées. Un tel changement doit s’inscrire dans le cadre d’une réflexion plus large.

À ce jour, il nous apparaît totalement inenvisageable de leur permettre, par exemple, de placer des personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction en garde à vue. Peut-on aujourd’hui leur confier cette mission ? Le Gouvernement aujourd’hui n’y est pas prêt.

Peut-être faudrait-il retravailler cet amendement dans un autre véhicule législatif, telle une proposition de loi, dans le cadre d’une réflexion plus large sur le rôle de la police municipale. Pour l’heure, je le répète, je ne souhaite pas voir prospérer cet amendement.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Une expérimentation dans des villes volontaires permettrait d’évaluer ce qu’il convient ensuite de faire sur ce sujet.

Tel qu’il est rédigé, cet amendement, qui tend par ailleurs à prévoir une convention avec l’État et le parquet, ne vise pas à laisser les agents exercer seuls des responsabilités qui incombent à l’État.

Le dispositif expérimental que nous proposons nous permettrait d’avancer sur la question de l’habitat indigne. Il s’agit de confier aux policiers municipaux des pouvoirs dans ce domaine, et uniquement dans ce domaine, non de revoir globalement leurs pouvoirs.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je précise qu’une mission d’information à l’Assemblée nationale a été conduite sur ce sujet, conjointement par Lionel Royer-Perreaut et Alexandre Vincendet. Peut-être pourriez-vous travailler sur le fondement de leurs travaux et de leurs conclusions pour réformer de façon plus large le rôle de chacun.

À ce stade, néanmoins, je le répète, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.

Mme Antoinette Guhl. Nous voterons cet amendement tendant à proposer une expérimentation, parce qu’il faut bien chercher des solutions.

La quasi-totalité des élus qui ont été auditionnés par la commission sont favorables à ce type d’expérimentation. Tous disent qu’ils ont besoin de mobiliser leur police municipale pour traiter l’habitat insalubre, faute, certes, d’effectifs suffisants et disponibles dans la police nationale.

Je pense qu’il vaut la peine de tenter cette expérimentation. Nous verrons ensuite s’il convient de la généraliser.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 90 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 8
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Article 8 bis

Article 8 bis A

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 94 est présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 153 est présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le 5° de l’article 776-1 du code de procédure pénale, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° À l’association pour le développement du service notarial, placée sous le contrôle du Conseil supérieur du notariat, en vue de mettre en œuvre l’article L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation. »

La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 94.

Mme Viviane Artigalas. Lors de l’examen du texte en commission, l’article 8 bis A relatif à l’accès des notaires au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales a été supprimé, au motif que cette disposition était satisfaite.

Cet article a été introduit dans le texte à l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, au motif que, en l’état actuel de la législation, les notaires ne peuvent avoir accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales.

Ce point est essentiel et mérite une clarification de la part du Gouvernement. Monsieur le ministre, les notaires ont-ils un accès effectif au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales ?

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 153.

M. Bernard Buis. Cet amendement vise à rétablir l’article 8 bis A supprimé en commission au Sénat.

Depuis le 1er mai 2019, les notaires doivent pouvoir consulter le bulletin n° 2 du casier judiciaire de tout acquéreur, personne physique ou morale, conformément aux dispositions de l’article L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation.

L’article L. 776-1 du code de procédure pénale fixe la liste des personnes habilitées à accéder au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales. Le présent amendement vise à compléter cette liste en l’ouvrant aux notaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’article 8 bis A avait été supprimé en commission à la suite d’échanges avec les services de la Chancellerie, qui nous ont indiqué que les notaires avaient d’ores et déjà accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes physiques comme des personnes morales. Ainsi, il n’est pas apparu pertinent de conserver dans le texte un article ouvrant une possibilité déjà existante.

Depuis lors, le Gouvernement semble avoir quelque peu changé d’avis sur cette question, qui ne semble finalement plus aller de soi.

Je me tourne donc vers M. le ministre pour lui demander si, oui ou non, les notaires ont accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales. Si tel n’est pas le cas, la commission émettra un avis favorable sur l’amendement visant à rétablir l’article 8 bis A.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cette disposition, qui a été introduite à l’Assemblée nationale et à laquelle le Gouvernement était favorable, a été supprimée lors de l’examen du texte par la commission des affaires économiques du Sénat.

Pour être très clair, après avoir vérifié avec mes services et la Chancellerie, je vous confirme que, en l’état actuel de la législation, les notaires ne peuvent pas avoir accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales.

En conséquence, je suis favorable au rétablissement de l’article 8 bis A, qui doit permettre de compléter la liste des personnes habilitées à accéder au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales et de l’ouvrir aux notaires, conformément aux dispositions de l’article L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation.

J’émets donc un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 94 et 153.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 8 bis A est rétabli dans cette rédaction.

Article 8 bis A (supprimé)
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Article 8 ter

Article 8 bis

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Après la section 1 du chapitre VI du titre II du livre Ier, est insérée une section 1 bis ainsi rédigée :

« Section 1 bis

« Diagnostic structurel de limmeuble

« Art. L. 126-6-1. – La commune peut définir des secteurs d’habitat dégradé dans lesquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet, à l’expiration d’un délai de quinze ans à compter de la réception des travaux de construction du bâtiment et au moins une fois tous les dix ans, d’un diagnostic structurel du bâtiment, incluant une description des désordres observés qui portent atteinte à sa solidité et évaluant les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle des tiers.

« Les périmètres des secteurs concernés sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques annexés au plan local d’urbanisme, au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale.

« Ce diagnostic est élaboré par une personne qui justifie de compétences et de garanties définies par décret en Conseil d’État. Cette personne est tenue de souscrire une assurance permettant de couvrir les conséquences d’un engagement de sa responsabilité en raison de ses interventions.

« Pour les immeubles à destination totale ou partielle d’habitation soumis au statut de la copropriété, l’obligation de réaliser un diagnostic structurel de l’immeuble est satisfaite par l’élaboration du projet de plan pluriannuel de travaux mentionné à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Dans ce cas, la personne ayant élaboré le projet de plan pluriannuel de travaux justifie des compétences et garanties définies par le décret en Conseil d’État mentionné au troisième alinéa du présent article.

« Le propriétaire de l’immeuble ou, dans le cas d’immeubles soumis au statut de la copropriété, le syndic, transmet le diagnostic ou, le cas échéant, le projet de plan pluriannuel de travaux à la commune.

« À défaut de transmission du diagnostic, ou, le cas échéant, du projet de plan pluriannuel de travaux en faisant office, le maire peut, dans le cadre de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du présent code, demander au propriétaire ou au syndic de le lui produire.

« À défaut de transmission dans un délai d’un mois à compter de la notification de la demande, le maire peut faire réaliser d’office le diagnostic en lieu et place du propriétaire ou du syndicat des copropriétaires et à ses frais.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » ;

2° Au 2° de l’article L. 731-1, après le mot : « immeuble », sont insérés les mots : « et des équipements communs ».

Mme la présidente. L’amendement n° 102, présenté par Mmes Linkenheld et Artigalas, M. Kanner, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

dégradé

insérer les mots :

ou des secteurs en centre ancien

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. J’espère que nous allons poursuivre sur cette belle lancée d’avis favorables de la part de la rapporteure et du Gouvernement et d’adoptions à la quasi-unanimité… Je plaisante, mais le sujet que je vais aborder à présent et que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer lors de la discussion générale est particulièrement grave.

Certains se souviennent peut-être que, en novembre 2022, deux immeubles se sont effondrés rue Pierre-Mauroy à Lille, en plein centre-ville.

Ces immeubles n’étaient ni indignes, ni insalubres, ni la propriété de marchands de sommeil ou de personnes pauvres. Il s’agissait d’immeubles du XVIIe ou du XVIIIe siècle, comme on en trouve dans notre centre ancien. Avec le temps, ces immeubles ont subi des modifications et des restructurations qui ont fragilisé leurs structures, voire leurs caves. Ils se sont effondrés soudainement, sans signes avant-coureurs que quiconque aurait pu percevoir, faute d’un diagnostic structurel.

Le texte prévoit l’obligation de réaliser tous les dix ans un diagnostic structurel des immeubles de plus de quinze ans situés dans des secteurs d’habitat dégradé. L’objet de cet amendement est d’étendre cette obligation aux immeubles des centres anciens, qui ne sont pas considérés comme étant situés dans des secteurs d’habitat dégradé.

Si la ville de Lille devait prendre une délibération et imposer un tel diagnostic en se fondant sur le critère du secteur d’habitat dégradé, je suis certaine qu’elle ne passerait pas le contrôle de légalité.

C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, d’étendre ce diagnostic aux immeubles situés dans les centres anciens. Il ne s’agit évidemment pas d’appliquer cette obligation à l’ensemble du cœur de ville ou d’un secteur sauvegardé : nous connaissons bien nos rues et savons quels immeubles datent du XVIIe ou du XVIIIe siècle.

Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ma chère collègue, vous souhaitez que le diagnostic structurel puisse être mis en place dans les centres anciens des villes, au motif que ces secteurs, qui ne présentent pas toujours de signes extérieurs d’habitat dégradé, nécessitent toutefois une vigilance accrue compte tenu de l’ancienneté du bâti. Vous avez raison, les dégradations ne sont pas toujours visibles.

En fait, l’article ne précise pas les critères permettant de caractériser une zone d’habitat dégradé. Aussi, il me semble que sa rédaction actuelle, très large, permettra la plupart du temps aux communes qui le souhaitent de mettre en place l’obligation de diagnostic structurel dans les centres anciens, surtout dans les cas où il s’agit de bâti ancien. Il me semble donc que l’amendement est satisfait.

En outre, l’expression « centres anciens » n’étant pas de nature juridique, il me paraît hasardeux de l’utiliser pour fonder l’instauration d’une telle obligation.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. J’aurais bien aimé, madame la sénatrice, qu’il y ait unanimité sur ce sujet !

Pour notre part, nous sommes favorables à votre amendement, qui vise à permettre aux communes d’instaurer une obligation de diagnostic structurel non seulement dans les secteurs d’habitat dégradé, mais aussi dans tous les centres anciens.

Nous avons été sensibilisés sur ce sujet par les maires, notamment par la maire de Lille, qui a contacté notre cabinet pour nous expliquer la situation.

La précision que vous proposez est bienvenue et nous paraît utile pour certaines villes dont le centre ancien comprend de nombreux immeubles dégradés. Nous pouvons faire confiance aux communes et aux maires pour manier cet outil avec discernement.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre compréhension.

Madame la rapporteure, je sais que vous comprenez le problème, mais j’insiste sur l’intérêt de cet amendement. Pour ma part, j’ai aussi participé à la création du permis de diviser et du permis de louer. Nous avons longtemps débattu au Parlement de la question des secteurs et de la formulation à retenir dans le code de la construction et de l’habitation.

Je suis certaine, malheureusement, que si mon centre ancien comprend de belles avenues et des immeubles de belle facture n’ayant pas du tout l’air d’être dégradés, le préfet prendra l’expression « secteur d’habitat dégradé » à la lettre ; il aura oublié l’esprit de nos échanges et retoquera la délibération.

J’aimerais donc être certaine que la formulation que nous allons adopter ce soir sera adaptée à ce type de situation, afin d’éviter qu’un drame tel que celui qu’a connu Lille ne se reproduise. Examiner de tels immeubles, c’est sauver des vies.

Je le répète, il ne s’agit pas de rendre ce diagnostic structurel obligatoire dans toutes les villes ayant un centre ancien ou dans des rues entières. Monsieur le ministre, vous avez raison, nous connaissons nos villes, les secteurs concernés seront très limités. Les collectivités qui jugeront ce diagnostic inutile ne l’imposeront pas, mais celles qui pensent qu’il pourrait sauver des vies et des immeubles doivent pouvoir l’instaurer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Mes chers collègues, permettez-moi d’attirer votre attention sur les diagnostics de performance énergétique (DPE).

Aujourd’hui, ces diagnostics sont très standardisés et totalement inadaptés à l’habitat ancien, qui est fait de matériaux plutôt durables et performants permettant aux bâtiments de respirer. Aujourd’hui, si on applique un DPE identique à tous ces bâtiments anciens, on risque d’entraîner une dégradation extrêmement forte du bâti.

Monsieur le ministre, c’est un appel au secours et à la raison que je formule sur ce sujet : il est essentiel de régler ce problème, sinon nous courrons à la catastrophe. Des travaux très coûteux seront engagés et auront des effets contre-productifs.

Je vous remercie d’écouter cet appel au secours et à la raison !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 102.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 121 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 26, présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

1° Après le mot :

solidité

insérer les mots :

ou sa salubrité, son intégrité, son habitabilité

2° Compléter cet alinéa par les mots :

et au moins tous les cinq ans, d’un diagnostic structurel des logements, incluant une description des désordres observés qui portent atteinte à leur salubrité, leur décence et évaluant les risques qu’ils présentent pour la sécurité et la santé des habitants

II. – Alinéa 7

1° Première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

après avis du Haut comité pour le droit au logement

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce diagnostic est soumis à un tarif réglementé par décret.

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à renforcer le diagnostic structurel de l’immeuble prévu à l’article 8 bis et à l’étendre au logement.

En effet, l’expérience montre que les problématiques d’hygiène et de salubrité dans les logements sont les signes précurseurs des désordres qui peuvent affecter les immeubles par la suite, lorsqu’ils ne sont pas convenablement traités.

Nous demandons également que ce diagnostic, sur le bâti ou sur le logement, soit soumis à un tarif réglementé par décret. Il s’agit de nous assurer de la qualité du diagnostic, mais aussi d’encadrer son coût, afin de le rendre accessible, et non rédhibitoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il convient de trouver un équilibre et de prévenir la dégradation de l’habitat sans accabler les propriétaires de normes. À cet égard, il me semble excessif d’inclure dans le diagnostic technique un diagnostic de salubrité. Il existe d’autres moyens de faire constater l’insalubrité, et ce avant même un délai de dix ans.

De même, la réduction à cinq ans de la durée des obligations relatives à la décence des logements me semble excessive.

Prévoir un diagnostic structurel par logement n’aurait pas réellement de sens, car un tel diagnostic doit prendre en considération l’ensemble du bâti. Il pourrait entraîner des chevauchements de calendrier pour les différents logements d’un même immeuble. Cela entraînerait des frais supplémentaires et serait source de complexité.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 117 rectifié, présenté par Mmes Lavarde et Aeschlimann, MM. Anglars et Belin, Mme Bellurot, MM. Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Drexler, M. Husson, Mme Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. Daniel Laurent et Lefèvre, Mmes Marie Mercier et Micouleau, MM. Mouiller, Pellevat, Rapin, Sautarel, Saury, Savin, Sido, Somon et Tabarot, Mme Ventalon et M. Cédric Vial, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les modalités du présent article trouvent également à s’appliquer à toutes les copropriétés ayant réalisé des travaux à l’issue d’un plan de sauvegarde ou d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat en copropriétés dégradées. »

La parole est à Mme Catherine Di Folco.

Mme Catherine Di Folco. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Le diagnostic structurel vise justement à anticiper et prévenir la dégradation de structures bâties dans des secteurs qui relèvent de l’habitat dégradé, certes, mais qui ne sont pas encore entrés en phase de traitement – ils se trouvent en phase curative, donc.

Comme vous l’indiquez, ma chère collègue, à l’issue du plan de sauvegarde ou de l’Opah (opération programmée d’amélioration de l’habitat), il n’y a plus de problèmes structurels, puisque ces derniers ont été résorbés.

Pendant combien de temps un immeuble qui aurait connu un plan de sauvegarde ou aurait été dans le périmètre d’une Opah serait-il soumis à une obligation de diagnostic structurel indépendamment de sa localisation en zone dégradée ? De deux choses l’une : ou bien l’immeuble est en zone dégradée et il est soumis à l’obligation de diagnostic structurel, ou bien il ne l’est pas, ou plus, et, pour être cohérent avec la philosophie de l’article, on peut considérer qu’il serait disproportionné d’imposer un tel diagnostic structurel.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 117 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 101, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :

3° Après le 4° de l’article L. 731-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Un diagnostic structurel de l’immeuble tel que prévu à l’article L. 126-6-1 du code de la construction et de l’habitation. »

…. – Le 3° du I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2028. »

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Le diagnostic technique global (DTG) pour les immeubles en copropriété se généralise progressivement.

À part quelques cas, sa réalisation relève d’une décision de l’assemblée générale des copropriétaires, prise, tout comme celle qui concerne ses modalités de réalisation, dans les conditions de majorité de l’article 24. Et le DTG ne comporte aucune obligation de vérifier la solidité du bâtiment.

Cet amendement vise non pas à créer une nouvelle obligation, mais à renforcer et à compléter le champ du DTG, en précisant qu’il comprend un diagnostic structurel de l’immeuble. Nous nous appuyons sur la recommandation n° 10 du rapport Hanotin-Lutz, qui propose la réalisation d’un diagnostic structurel au sein du DTG.

Comme l’a souligné Mme la rapporteure, l’habitat dégradé est un phénomène silencieux et massif. Il touche des quartiers entiers, mais également des petits immeubles diffus, y compris dans les petites villes. Ce diagnostic structurel constituerait un outil de prévention supplémentaire. C’est pourquoi nous proposons de le généraliser progressivement en l’intégrant aux DTG.

Notre amendement tend à fixer l’entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2028.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il est vrai que le DTG comporte non pas, à proprement parler, de diagnostic structurel, mais uniquement une analyse de l’état apparent des parties communes et équipements communs de l’immeuble.

Toutefois, toutes les copropriétés de plus de quinze ans doivent élaborer un projet de plan pluriannuel de travaux, qui doit être actualisé tous les dix ans. Ce projet de plan pluriannuel comprend bien, lui, une liste des travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble et à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants.

D’ailleurs, l’article 8 bis prévoit bien que c’est ce projet de plan pluriannuel de travaux qui peut faire office de diagnostic structurel pour les copropriétés, ce qui semble tout à fait logique.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 101.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 bis.

(Larticle 8 bis est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 8 bis
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Article 8 quater A

Article 8 ter

L’article 225-14 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;

2° Le nombre : « 150 000 » est remplacé par le nombre : « 200 000 ».

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 27, présenté par M. Benarroche, Mme Guhl, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 225-14 du code pénal est ainsi modifié :

1° Les mots : « ou d’hébergement » sont supprimés ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait de mettre à la disposition d’une personne, moyennant une contrepartie, un hébergement incompatible avec la dignité humaine est puni de sept ans d’emprisonnement et de 200 000 euros d’amende. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Cet amendement, comme celui que j’ai défendu tout à l’heure, a pour objet d’améliorer l’outil juridique prévu dans cet article pour mieux lutter contre un grand nombre de marchands de sommeil.

Dans la rédaction actuelle du texte, la vulnérabilité de la victime, c’est-à-dire la condition de la personne qui est la proie du marchand de sommeil, est considérée comme un fait constitutif du délit. Pour notre part, nous souhaiterions que la condition de la victime soit plutôt une circonstance aggravante. Ce sont les agissements et le comportement du marchand de sommeil qui doivent constituer le fait constitutif, quelle que soit la condition de la victime.

Cette nuance nous semble très importante et, d’ailleurs, elle avait été rétablie par l’Assemblée nationale, puisque la rédaction retenue par les députés supprimait la référence à l’état de vulnérabilité ou de dépendance comme élément constitutif du délit de mise à disposition d’un hébergement incompatible avec la dignité humaine.

Je le répète, l’élément constitutif, c’est le délit qui est commis par le marchand de sommeil, quelle que soit la situation de la victime, cette situation pouvant au demeurant constituer une circonstance aggravante.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 128 est présenté par le Gouvernement.

L’amendement n° 152 est présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 225-14 du code pénal est ainsi modifié :

1° Les mots : « ou d’hébergement » sont supprimés ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait de mettre à la disposition d’une personne, moyennant une contrepartie, un hébergement incompatible avec la dignité humaine est puni de cinq ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. »

La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l’amendement n° 128.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Le Gouvernement partage pleinement le souhait de renforcer la lutte contre les marchands de sommeil. C’est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de rétablir le nouveau délit de mise à disposition d’un hébergement contraire à la dignité humaine, moyennant une contrepartie dont la création avait été proposée par l’Assemblée nationale.

Ce nouveau délit permettra de sanctionner plus efficacement ces pratiques, sans qu’il soit nécessaire de prouver la vulnérabilité ou l’état de dépendance de la victime.

J’ai écouté avec attention Mme la rapporteure pour avis de la commission des lois, et nous veillons donc à la cohérence avec le quantum des peines prévu pour les autres infractions pénales de même type, notamment en matière de traite des êtres humains.

Ce nouveau délit serait donc puni de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende. Aller au-delà de ce quantum des peines créerait deux risques. Le premier serait d’augmenter trop fortement les peines pour ce délit en les alignant sur celles qui pèsent sur la traite des êtres humains. Le second serait de décorréler les peines théoriques prévues par le code pénal des peines réelles prononcées par le juge.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 152.

M. Bernard Buis. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces deux amendements identiques tendent à rétablir l’échelle des peines initiale, soit cinq ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende, contre sept ans d’emprisonnement et 200 000 euros d’amende prévus au départ, ce qui reviendrait sur l’alourdissement des peines contre les marchands de sommeil voté à l’Assemblée nationale et confirmé par la commission.

Nous sommes opposés à ce recul. Nous sommes tous mobilisés pour lutter contre les marchands de sommeil et nous souhaitons donc maintenir des peines aggravées.

Par ailleurs, les trois amendements visent également à rétablir une définition de l’infraction commise par les marchands de sommeil en supprimant la notion de vulnérabilité et de dépendance de leurs victimes, et cela pour faciliter leur condamnation. La commission pense que cette nouvelle définition pose plus de problèmes qu’elle n’en résout, pour trois raisons.

Tout d’abord, la suppression de la vulnérabilité n’est pas opérationnelle, car les victimes des marchands de sommeil sont vulnérables et dépendantes. D’ailleurs, l’article 225-15-1 du code pénal dispose que les étrangers ou les mineurs récemment arrivés sur le territoire sont présumés vulnérables.

Or ce sont les principales victimes des marchands de sommeil, puisqu’ils n’ont pas le droit au logement. Cette notion de vulnérabilité est en outre intrinsèque à toute la partie du code pénal relative aux atteintes à la dignité de la personne, et cette infraction serait la seule à ne plus retenir la fragilité des victimes, ce qui ne serait pas cohérent.

De plus, cette notion de vulnérabilité est également invoquée pour des infractions analogues dans le code de la construction et de l’habitat, ce qui rendrait plus complexe l’application de l’ensemble des peines susceptibles d’être prononcées contre les marchands de sommeil.

Enfin, supprimer la vulnérabilité dans l’infraction initiale ouvrirait la voie à la reconnaissance d’une nouvelle circonstance aggravante, avec une augmentation des peines qui est l’objet de l’amendement n° 27 de M. Benarroche.

En réalité, toutes les victimes sont vulnérables, et la plupart d’entre elles sont même présumées l’être. L’adoption de ces amendements aboutirait à un bouleversement de l’échelle des peines, où l’infraction visée par l’article 225-14 serait punissable de dix ans de prison et 300 000 euros d’amende, c’est-à-dire des niveaux équivalents à ceux qui sont prévus pour la traite des êtres humains, le proxénétisme et l’exploitation de la mendicité.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 27 ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je sollicite son retrait, au profit de l’amendement n° 128 du Gouvernement.

Je le répète, sept ans d’emprisonnement et 200 000 euros d’amende, c’est le quantum de peine qui est réservé à la traite des êtres humains. Pour respecter la proportionnalité des sanctions, le Gouvernement souhaite prévoir une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 128 et 152.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 ter.

(Larticle 8 ter est adopté.)

Article 8 ter
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Article 8 quater B

Article 8 quater A

Les I, II et III de l’article 225-15 du code pénal sont ainsi modifiés :

1° Au 1°, les mots : « et 225-14 » sont supprimés ;

2° Au 2°, après le mot : « article », sont insérés les mots : « 225-14 et ».

Mme la présidente. L’amendement n° 167, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Rédiger ainsi ces alinéas :

1° Au 1°, les mots : « Les infractions définies aux articles 225-13 et 225-14 sont punies » sont remplacés par les mots : « L’infraction définie à l’article 225-13 est punie » ;

2° Au 2°, les mots : « L’infraction définie à l’article 225-14-1 est punie » sont remplacés par les mots : « Les infractions définies aux articles 225-14 et 225-14-1 sont punies ».

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il est favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 167.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par M. Benarroche, Mme Guhl, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le même article 225-15 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

«… – Lorsqu’elles sont commises à l’égard de personnes vulnérables ou en situation de dépendance, l’infraction définie à l’article 225-14 est punie de dix ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Cet amendement est lié au précédent. Il a été débattu avec nombre d’associations et de collectifs de lutte contre le mal-logement et l’habitat indigne, en particulier à Marseille. Il tend à conforter les sanctions pénales encourues par les personnes qui se livrent aux pratiques des marchands de sommeil.

Priver ces individus des moyens d’opérer leurs activités lucratives vise un double objectif : garantir à chacun les conditions d’un hébergement décent et prévenir la dégradation des copropriétés.

C’est pourquoi cet amendement tend à faire de l’état de dépendance ou de vulnérabilité de la victime une circonstance aggravante, qui, comme l’a dit M. la rapporteure, porterait le quantum des peines encourues par les marchands de sommeil à dix ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende. Nous pensons que la lutte contre l’habitat indigne et les marchands de sommeil doit être une priorité dans la politique du logement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 quater A, modifié.

(Larticle 8 quater A est adopté.)

Article 8 quater A
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 8 quater

Article 8 quater B

I. – Au 2° du I de l’article 225-26 du code pénal, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze ».

II (nouveau). – Au premier alinéa du I de l’article L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « au 3° du III » sont remplacés par les mots : « aux IV et V ».

Mme la présidente. L’amendement n° 168, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il est favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 168.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 quater B, modifié.

(Larticle 8 quater B est adopté.)

Article 8 quater B
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Après l’article 8 quinquies

Article 8 quater

Après l’article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un article 3-4 ainsi rédigé :

« Art. 3-4. – Le fait, pour un bailleur ou tout intermédiaire, de refuser l’établissement d’un contrat conforme à l’article 3 et la délivrance d’un reçu ou d’une quittance mentionnés à l’article 21 ou de dissimuler ces obligations, est puni d’un an d’emprisonnement et de 20 000 euros d’amende. Les personnes morales déclarées responsables pénalement de ce fait encourent une amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal. »

Mme la présidente. L’amendement n° 154, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. La création d’une infraction qui viendrait sanctionner le recours au bail verbal et l’absence de fourniture de quittances par le bailleur n’apparaît ni utile ni efficace. En effet, tant le code de la construction et de l’habitation que le code pénal contiennent des dispositions pénales permettant de réprimer l’ensemble des comportements propres aux marchands de sommeil.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. C’est à la demande des maires que la commission a réécrit et sécurisé cette nouvelle infraction. Ceux-ci veulent pouvoir faire condamner des marchands de sommeil par ce biais. L’infraction créée est très factuelle, puisqu’il s’agit du refus d’un bail écrit, d’une quittance ou d’un reçu, qui sont de droit.

L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Le Gouvernement partage la position des auteurs de cet amendement : il est favorable à la suppression du délit de refus d’établissement d’un contrat de location écrit et de délivrance d’une quittance de loyer ou de dissimulation de ces obligations posées par la loi de 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

Tout d’abord, les liens entre de tels faits et les situations d’habitats indignes sont assez distendus. Dans ces conditions, la création d’une telle infraction apparaît très excessive et peu utile pour améliorer la lutte contre les marchands de sommeil. Les dispositions du code pénal et du code de la construction et de l’habitation permettent déjà de sanctionner convenablement de telles pratiques.

Ensuite, la définition de cette infraction n’est toujours pas satisfaisante, puisqu’elle ne permet pas de circonscrire précisément le champ de la répression.

Il est donc délicat de déterminer précisément les comportements que l’on souhaite ainsi réprimer. De telles incertitudes sur le champ de la répression ne sont pas compatibles avec le principe constitutionnel de précision et de clarté de la loi pénale.

Le Gouvernement a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 154.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8 quater.

(Larticle 8 quater est adopté.)

Article 8 quinquies (nouveau)

La première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale est ainsi modifiée :

1° Les mots : « ainsi que » sont remplacés par le signe : « , » ;

2° La première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;

3° Sont ajoutés les mots : « et de collectivités territoriales ». – (Adopté.)

Article 8 quater
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Article 8 sexies (nouveau)

Après l’article 8 quinquies

Mme la présidente. L’amendement n° 113 rectifié ter, présenté par M. Cambier, Mme Romagny, MM. Canévet, Henno et Maurey, Mme O. Richard et MM. Lafon, Courtial, Kern, Duffourg et P. Martin, est ainsi libellé :

Après l’article 8 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 634-3, les mots : « du ministre chargé du logement » sont remplacés par les mots : « de l’assemblée délibérante de l’établissement public de coopération intercommunale, ou à défaut de la commune, » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 635-4, les mots : « arrêté du ministre chargé du logement » sont remplacés par les mots : « l’assemblée délibérante de l’établissement public de coopération intercommunale, ou à défaut de la commune ».

La parole est à M. Guislain Cambier.

M. Guislain Cambier. Nous proposons ici d’introduire de la clarté et de l’adaptabilité. Cet amendement tend à concilier la nécessité d’intégrer l’étiquette énergétique comme critère de décence des logements avec une flexibilité suffisante pour s’adapter aux réalités locales et aux spécificités des projets de rénovation.

Il s’agit, en somme, d’adapter les Cerfa nationaux ou de créer des formulaires locaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement vise à remplacer, pour le permis de louer, les formulaires normalisés au plan national par des formulaires adaptés localement par l’EPCI et la commune. Toutefois, si chaque EPCI ou commune a son propre formulaire, cela revient à introduire plus de complexité encore…

L’objectif d’une telle évolution serait aussi d’intégrer l’étiquette énergétique comme critère de décence des logements, tout en offrant une flexibilité suffisante pour s’adapter aux réalités locales. Or la norme de décence, notamment énergétique, est fixée par la loi ou le règlement. Elle ne paraît pas pouvoir faire l’objet d’adaptations locales.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il est défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Cambier, l’amendement n° 113 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Guislain Cambier. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 113 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 114 rectifié ter, présenté par M. Cambier, Mme Romagny, MM. Canévet, Henno et Maurey, Mme O. Richard, MM. Lafon, Courtial et Kern, Mme Jacquemet et MM. Duffourg et P. Martin, est ainsi libellé :

Après l’article 8 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au quatrième alinéa de l’article L. 634-3 les mots : « renouvelée à chaque nouvelle mise en location » sont remplacés par les mots : « valable deux ans » ;

2° Au dernier alinéa de l’article L. 635-4 les mots : « doit être renouvelée à chaque nouvelle mise en location » sont remplacés par les mots : « est valable deux ans ».

La parole est à M. Guislain Cambier.

M. Guislain Cambier. Cet amendement, qui est sollicité notamment par les territoires en tension, vise à introduire une durée de validité de deux ans pour le permis de louer, ce qui contribuerait à assurer une gestion efficace des autorisations de location.

En effet, le dispositif repose beaucoup sur les propriétaires qui font les demandes de permis et qui doivent redéposer une demande pour chaque nouvelle mise en location, ce qui peut être régulier sur les territoires en tension.

Il pourrait donc être considéré qu’une autorisation obtenue reste valable durant deux années à compter de la notification de l’arrêté, afin d’alléger les démarches pour les propriétaires bailleurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La déclaration de mise en location, comme l’autorisation préalable de mise en location (APML), doit être obtenue ou renouvelée à chaque mise en location avec un nouveau locataire.

Cette démarche peut certes paraître contraignante, mais, en deux ans, un bien peut se dégrader considérablement. Pour que le dispositif soit opérationnel, mais surtout pour le confort et la sécurité des occupants, il est plus logique de s’en tenir à la rédaction actuelle.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable à son adoption.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Cambier, l’amendement n° 114 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Guislain Cambier. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 114 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 8 quinquies
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Après l’article 8 sexies

Article 8 sexies (nouveau)

I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 126-20, les mots : « les quinze jours » sont remplacés par les mots : « le mois » ;

2° L’article L. 635-9 est complété par les mots : « ou lorsqu’une infraction au code de l’urbanisme a été constatée dans les conditions fixées à l’article L. 480-1 du code de l’urbanisme et qu’une mise en demeure mentionnée à l’article L. 481-1 du même code a été prononcée ».

II. – À titre expérimental et pour une durée de dix ans à compter de la publication de la présente loi, les établissements publics de coopération intercommunale et les communes compétents en matière d’habitat ayant institué l’autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation peuvent demander, aux fins de lutte contre l’habitat indigne et dégradé, à ce que le dispositif régi par le présent article soit mis en place.

Sur proposition du demandeur, un décret détermine le périmètre du territoire sur lequel, par dérogation à la deuxième phrase du II de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, lorsqu’une colocation est formalisée par la conclusion de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur, la surface et le volume habitables des locaux privatifs doivent être au moins égaux respectivement à 14 mètres carrés et à 33 mètres cubes.

Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation.

Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 129, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 3 à 7

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement vise à aligner les délais d’instruction entre le permis de louer et le permis de diviser, mais aussi à supprimer les dispositions votées en commission concernant les conditions de délivrance du permis de louer et la colocation à baux multiples.

Le texte de la commission, qui aligne les délais d’instruction du permis de diviser et du permis de louer, apparaît bienvenu, madame la rapporteure, et le Gouvernement propose donc de maintenir le I. 1° de cet article.

Toutefois, les dispositions relatives, d’une part, à l’introduction d’une condition liée au non-respect des règles d’urbanisme et à la délivrance de l’autorisation, et, d’autre part, aux colocations à baux multiples, n’apparaissent pas cohérentes. Je vous propose donc de supprimer le I. 2°, les règles d’urbanisme n’étant pas liées à des considérations de décence et d’habitat indigne.

Par ailleurs, le seul constat du non-respect de la règle d’urbanisme ne préjuge pas de la décision du juge ; il ne faut pas fragiliser la décision de refus, par l’autorité administrative, de délivrer l’APML.

Enfin, il n’apparaît pas pertinent de modifier les dispositions relatives aux colocations à baux multiples figurant dans la loi Élan, qui présentent des avantages pour les colocataires, notamment en évitant la solidarité inhérente au bail unique.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose donc de supprimer le II de cet article.

Mme la présidente. L’amendement n° 88 rectifié, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, MM. Ros et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4 et 5

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

II. – À titre expérimental et pour une durée de dix ans à compter de la publication de la présente loi, par dérogation à la deuxième phrase du II de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les établissements publics de coopération intercommunale et les communes ayant institué la déclaration de mise en location mentionnée à l’article L. 634-1 du code de la construction et de l’habitation ou l’autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du même code, peuvent prévoir, par délibération, que lorsqu’une colocation est formalisée par la conclusion de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur, la surface et le volume habitables des locaux privatifs doivent être au moins égaux respectivement à 14 mètres carrés et à 33 mètres cubes, et ces derniers doivent être pourvus d’une installation d’alimentation en eau potable.

II. – Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Nous approuvons l’esprit de l’article 8 sexies, introduit en commission, car celui-ci traduit bien la volonté des élus d’être mieux armés pour lutter contre le fléau des divisions de logement pratiquées par les marchands de sommeil.

Les assouplissements apportés par la loi Élan en cas de colocation à baux multiples ont des effets désastreux dans les secteurs où ceux-ci prospèrent. Aussi, notre amendement tend à simplifier le dispositif et à le laisser plus facilement à la main des maires confrontés à cette problématique : ceux-ci doivent pouvoir s’emparer de cette possibilité d’encadrement par simple délibération.

Notre amendement vise ainsi à appliquer le dispositif aux zones couvertes non seulement par l’APML, comme il est prévu dans le texte de la commission, mais également par la déclaration de mise en location. Il tend également à prévoir que les locaux loués dans le cadre d’une colocation à baux multiples dans les zones couvertes par le permis de louer doivent être pourvus d’une installation d’alimentation en eau potable.

Notre objectif est clairement de permettre aux élus qui le souhaitent de durcir les dispositions applicables aux colocations dans les zones particulièrement exposées à l’habitat indigne.

Mme la présidente. L’amendement n° 107, présenté par Mmes Linkenheld et Artigalas, MM. Ros et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

l’autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation

par les mots :

la déclaration de mise en location mentionnée à l’article L. 634-1 du code de la construction et de l’habitation ou l’autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du même code

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Il s’agit d’un amendement de repli.

Je souhaite insister sur cette question de la colocation, abordée en son temps par la loi Alur. En effet, avec le temps, elle se révèle, plus qu’une solution de lutte contre les marchés tendus du logement, une opportunité pour des propriétaires indélicats et des marchands de sommeil de loger des occupants dans des conditions indignes.

Je veux attirer l’attention du Gouvernement sur ce point : nous devons nous pencher très sérieusement sur cette question des colocations à baux multiples ou à baux uniques.

Plus nous encadrons les baux multiples, plus les propriétaires sont tentés d’aller vers le bail unique. Or ce dernier fixe des conditions d’habitabilité qui ne sont pas les mêmes et qui, paradoxalement, permettent la suroccupation de petits logements, sans encadrement.

Par ailleurs, les colocations à baux multiples échappent très souvent au permis de diviser, qui était justement fait pour éviter que des appartements ou des pavillons ne soient divisés et ne se transforment en petits logements, souvent indignes ou insalubres. Une colocation à baux multiples peut se faire sans permis de construire : il suffit parfois de poser quelques serrures, sans qu’il y ait besoin d’une autorisation d’urbanisme.

Bref, une solution intéressante a priori – nous sommes tous favorables au principe de la colocation – est finalement dévoyée pour devenir un outil mis au service, parfois, de propriétaires indélicats.

Nombre de collectivités se sentent démunies face à ces situations, que ce soit sur les conditions d’habitabilité ou, même, sur l’encadrement des loyers. Il est temps de se pencher de nouveau sur cette question.

Mme la présidente. L’amendement n° 108, présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, MM. Ros et Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

, et ces derniers doivent être pourvus d’une installation d’alimentation en eau potable

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Le Gouvernement souhaite, au travers de son amendement n° 129, revenir sur deux mesures introduites par la commission, qui sont pourtant très attendues par les maires.

La première est la possibilité de refuser un permis de louer lorsqu’un édifice n’est pas conforme aux règles de l’urbanisme. Il y a en effet des situations absurdes, où le maire est contraint de délivrer un permis de louer parce qu’un local est conforme aux règles du code de la construction, alors même que l’édifice a été construit sans droit ni titre.

La seconde est la possibilité pour les collectivités de déroger à titre expérimental, pour une durée de dix ans, aux dispositions relatives aux seuils légaux de surface et de volume minimaux des parties privatives dans les colocations à baux multiples. Il s’agit pourtant d’une mesure efficace pour lutter contre les marchands de sommeil et les divisions sauvages d’appartements.

Je suis un peu déçue par l’attitude du Gouvernement, car la commission a encadré le dispositif : elle a limité son périmètre aux seules zones d’habitat dégradé ; elle n’a traité, dans un premier temps, que les questions de surface et de volume ; enfin, elle a prévu que les collectivités souhaitant bénéficier du dispositif devraient y être autorisées par décret.

Toutefois, si l’État ne veut pas accompagner la mise en œuvre du dispositif, peut-être faut-il permettre aux collectivités d’agir plus directement.

C’est l’objet de l’amendement n° 88 rectifié, qui vise à tirer parti des assouplissements prévus par la loi organique de 2021 relative à la simplification des expérimentations locales. Ses auteurs souhaitent ainsi simplifier le mécanisme que nous avons introduit en commission, en supprimant l’autorisation par décret pour déroger aux seuils légaux.

Si le Gouvernement ne veut pas accompagner les collectivités dans cette démarche, donnons-leur en tout cas la compétence en la matière, car ce dispositif sera utile – j’en suis convaincue –, et je ne doute pas que les collectivités qui s’en empareront sauront le faire avec mesure et discernement.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 129, mais un avis favorable sur l’amendement n° 88 rectifié, ainsi que sur les amendements nos 107 et 108.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je suis désolé de décevoir Mme la rapporteure, dont je connais l’attachement à ce dispositif, mais on ne peut pas être d’accord sur tout !

Mon objectif est de développer au maximum l’offre locative sur le marché, alors que celui-ci, comme on le sait, est tendu. (Marques dagacement sur les travées du groupe GEST.) Les mesures qui apportent un surcroît de complexité appellent donc un avis défavorable de ma part, car le risque – bien réel – est qu’elles n’entraînent un retrait des logements du marché locatif. (Exclamations sur des travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

Le Gouvernement ayant déposé l’amendement n° 129, il est logiquement défavorable aux trois autres amendements, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Nous voterons bien évidemment contre l’amendement du Gouvernement, car de nombreux élus dénoncent le manque d’encadrement de la colocation, ce qui a des conséquences urbaines et sociales désastreuses. Les communes se retrouvent à gérer et à combattre ces divisions anarchiques, alors qu’il suffirait d’interdire tout simplement cette pratique, tout au moins dans les secteurs particulièrement exposés à l’habitat indigne.

La nécessité d’encadrer cette pratique de location à baux multiples dans les quartiers où prospèrent les marchands du sommeil est une évidence.

Comme le souligne le maire de Grigny, la colocation tend à devenir la norme au sein de certaines grandes copropriétés. L’objectif est non pas de répondre aux besoins des occupants, mais d’obtenir une rentabilité financière exorbitante. Cette pratique prend au piège une population toujours plus précaire et, de fait, plus captive.

L’entêtement du Gouvernement est étonnant. Comment peut-on parler d’avantages pour les colocataires quand il s’agit de suroccupation, d’insalubrité manifeste et de location subie, et quand les élus décrivent les effets désastreux de cette pratique ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 129.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 88 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 107 et 108 n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 8 sexies, modifié.

(Larticle 8 sexies est adopté.)

Article 8 sexies (nouveau)
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Article 9 (texte non modifié par la commission)

Après l’article 8 sexies

Mme la présidente. L’amendement n° 70 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deux dernières phrases du premier alinéa du II de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « En application de l’article 6 de la présente loi, chaque pièce doit respecter les dispositions applicables aux logements d’une seule pièce telles que définies par le décret en Conseil d’État pris en application du même article. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Cet amendement vise à garantir la qualité des logements mis en colocation.

Nous souhaitons définir un certain niveau d’exigence et instaurer des normes de confort pour les pièces louées en copropriété, afin que celles-ci assurent à chaque occupant des conditions dignes d’existence.

Les baux séparés ne permettent pas toujours de distinguer les pièces réellement disponibles pour les colocataires, et les marchands de sommeil en profitent en créant des situations de suroccupation très rentables pour eux, mais très coûteuses pour la santé des résidents. Ces derniers n’ont pas toujours accès à des sanitaires et vivent dans des espaces trop étroits, ce qui ne sera plus possible si notre amendement est adopté, puisque les obligations en termes d’hygiène et de surface des baux classiques s’appliqueront plus strictement aux baux séparés.

J’en profite pour rappeler quelques chiffres issus du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre : près de 3 millions de personnes vivent dans des conditions très difficiles, dont 1,2 million en surpopulation dans leur logement et 1,8 million sans confort. L’adoption de cet amendement permettra, je l’espère, d’en réduire le nombre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces dispositions, qui s’appliqueraient à l’ensemble des colocations à baux multiples et sur tout le territoire, contraindraient excessivement, si elles étaient adoptées, le marché locatif, ce qui, dans le contexte actuel, n’est pas du tout souhaitable.

On le sait, dans de nombreux cas, le partage d’une cuisine ou d’une installation sanitaire, en colocation, ne pose pas de problème aujourd’hui. Évitons les solutions excessives.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je suis en parfait accord avec l’argumentation que vient de tenir Mme la rapporteure. Nous connaissons une crise locative ; des centaines de personnes font la queue pour visiter les quelques biens mis en location. Certaines agences reçoivent tellement de demandes qu’elles n’arrivent pas à les traiter et qu’elles sont contraintes de ne plus publier les offres locatives.

Le dispositif proposé vise à accroître encore les contraintes sur l’offre. Notre objectif, j’y insiste, doit être de développer l’offre locative sur le marché, et non de la réduire. Plus le nombre de biens mis en location diminue, plus les locataires et les candidats à la location se retrouvent en difficulté. Or tel serait le résultat de l’adoption de cet amendement.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 70 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par une phrase et un alinéa ainsi rédigés : « Pour les logements situés dans un périmètre concerné par une opération mentionnée à l’article L. 741-1 et L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, les colocations nécessitent obligatoirement un permis de diviser tel que prévu à l’article L. 126-18 du code de la construction et de l’habitation.

« Les contrats de colocation mentionnent systématiquement le nombre de personnes résidant au sein du logement ainsi que le montant global du loyer de la colocation. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous avons eu plusieurs échanges avec des élus locaux, notamment avec Philippe Rio, le maire de Grigny. Cette commune abrite sur son territoire la plus grande copropriété de France, Grigny 2, pour laquelle un plan d’intervention important a été mis en place, ce qui nous permet de bénéficier d’un retour d’expérience sur lequel nous pouvons nous appuyer collectivement.

Parmi les éléments qu’il nous a communiqués, le maire de Grigny a notamment mis l’accent sur le flou qui règne sur les baux de copropriété dans le cas où un permis de diviser est nécessaire, ce qui n’est pas toujours le cas.

Nous souhaitons rendre obligatoire le permis de diviser pour les copropriétés situées dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (Orcod), afin de garantir que les colocataires disposent de logements décents.

Par ailleurs, il nous semble opportun de modifier la rédaction des contrats de copropriété pour qu’ils prévoient explicitement l’inscription dans les contrats de colocation du nombre de résidents, afin d’éviter que la loi ne soit contournée et que trop de personnes ne soient logées dans des espaces trop petits, comme le font souvent les marchands de sommeil.

Nous proposons aussi que le montant global du loyer soit indiqué dans le bail, ce qui permettra de mieux veiller au respect du permis de diviser et de louer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les collectivités ont déjà la possibilité de mettre en place le permis de diviser, ainsi que des permis de louer, dans les zones d’habitat dégradé. Et les zones qui font l’objet d’une Orcod sont des zones d’habitat dégradé.

En revanche, le permis de diviser, tel qu’il existe actuellement, ne concerne que les divisions qui requièrent des travaux, et non pas les divisions de fait résultant d’une mise en colocation.

Le permis de louer, qui peut lui aussi être mis en place dans des zones d’habitat dégradé, y compris donc dans les Orcod, semble ainsi mieux répondre à la préoccupation des auteurs de cet amendement. D’une certaine manière, ce dernier est donc satisfait par le droit existant.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. La position des auteurs de cet amendement converge avec celle du groupe socialiste.

À l’évidence, les baux de colocation soulèvent des difficultés. Il est vrai que, sur le plan juridique, le permis de louer et le permis divisé doivent être distingués : l’un relève du droit de la construction, l’autre du droit de l’habitation. Le permis de diviser ne peut donc pas être utilisé comme le souhaiteraient les auteurs de cet amendement.

Il n’en demeure pas moins qu’il faut entendre la souffrance de nos élus locaux et des occupants, qui ne savent pas comment traiter la question de ces colocations à baux multiples ou à baux uniques, qui se transforment peu à peu en logements de marchands de sommeil, dont les occupants sont littéralement exploités – j’utilise ce terme à dessein.

Je répète donc, puisque je n’ai pas eu de réponse sur ce point tout à l’heure, monsieur le ministre, qu’il me semblerait utile que nous nous mettions autour de la table pour résoudre cette question.

Pour des raisons juridiques, la solution proposée par les auteurs de cet amendement ne constitue sans doute pas une réponse, mais le problème reste entier. Je ne crois pas, en effet, que l’amendement soit satisfait. J’aimerais vraiment qu’un groupe de travail soit créé pour travailler sur la question des colocations transformant en quelque chose qui ne correspond pas à leur destination initiale.

Mme la présidente. Madame Margaté, l’amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marianne Margaté. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 98 rectifié, présenté par Mmes Linkenheld, Artigalas et Carlotti, M. Kanner, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental et pour une durée de 10 ans à compter de la publication de la présente loi, dans les zones soumises à déclaration de mise en location mentionnée à l’article L. 634-1 du code de la construction et de l’habitation ou à autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du même code, le maire peut prendre un arrêté de mise en demeure avec astreinte de réaliser des travaux de mise en conformité d’un local d’habitation, à l’encontre d’un propriétaire qui a fait l’objet de signalements répétés concernant le respect des règles sanitaires, d’hygiène et de salubrité édictées.

Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation.

Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Comme je l’ai expliqué lors de la discussion générale, cet amendement vise à étendre, dans un premier temps à titre expérimental, le champ de la mise en demeure avec astreinte administrative.

En effet, ce dispositif, qui existe depuis plusieurs années, même s’il est encore relativement récent dans notre droit, est bien utilisé et bien connu par les collectivités locales. Il a fait ses preuves en matière de lutte contre l’habitat indigne, notamment dans les cas les plus graves.

Il nous semble intéressant d’étendre, à titre expérimental, la possibilité de prononcer une astreinte administrative aux cas d’indignité ou de dégradation de l’habitat un peu moins graves. Je n’entrerai pas dans les détails techniques, mais l’idée est toujours la même : plus on dispose d’outils en amont, plus on peut prévenir les dégradations.

C’est pourquoi nous proposons cette expérimentation. Certaines communes sont d’ailleurs déjà volontaires pour y participer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’existence d’un signalement ne peut suffire à fonder une mise en demeure avec astreinte : il faut que l’infraction au règlement sanitaire départemental (RSD) soit caractérisée.

En outre, le décret du 29 juillet 2023 portant règles sanitaires d’hygiène et de salubrité des locaux d’habitation et assimilés, qui est entré en vigueur le 1er octobre dernier, prévoit que les infractions au règlement sanitaire départemental sont punies d’une amende de quatrième classe.

Attendons d’avoir un retour d’expérience avant de lancer, si c’est nécessaire, une expérimentation sur ce thème.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 98 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 87 rectifié bis, présenté par Mme Artigalas, M. Devinaz, Mme Linkenheld, M. Kanner, Mmes Carlotti et Narassiguin, M. Ziane, Mme Brossel, MM. Féraud, Lurel, Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La surface habitable et le volume habitable des locaux privatifs doivent être au moins égaux, respectivement, à 9 mètres carrés et à 20 mètres cubes. La surface habitable d’un logement est la surface de plancher construite, après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d’escalier, gaines, embrasures de portes et de fenêtres. Pour le calcul de la surface habitable, il n’est pas tenu compte de la superficie des combles non aménagés, caves, sous-sols, remises, garages, terrasses, loggias, balcons, séchoirs extérieurs au logement, vérandas, volumes vitrés, locaux communs et autres dépendances des logements, ni des parties de locaux d’une hauteur inférieure à 2,20 mètres. Le volume habitable correspond au total des surfaces habitables ainsi définies multipliées par les hauteurs sous plafond. »

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Publié le 30 juillet 2023 et entré en vigueur depuis le 1er octobre, le décret qui précise les règles sanitaires d’hygiène et de salubrité des locaux d’habitation a nourri les inquiétudes.

Si ce décret réaffirme qu’une hauteur sous plafond de 2,2 mètres est suffisante et que, sinon, le logement doit être considéré comme impropre à l’habitation, il prévoit une exception dans l’hypothèse où le local est conforme aux dispositions du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent.

Une telle rédaction conduit potentiellement à permettre la mise en location de logements dont le volume habitable est au moins égal à 20 mètres cubes, c’est-à-dire de logements de 12 mètres carrés possédant une hauteur sous plafond de 1,8 mètre. Mes chers collègues, nous vous proposons de lever toute ambiguïté en adoptant cet amendement.

Cette disposition aurait aussi le mérite de simplifier l’action de l’État et des collectivités dans le cadre de la lutte contre l’habitat indigne, notamment en ce qui concerne le contrôle du respect des règles d’hygiène et de santé, ou encore l’instruction des permis de louer.

Cet amendement est le reflet, mais aussi le relais des incompréhensions que ce décret a suscité auprès des associations, des élus et acteurs de terrain. Il appartient au législateur d’éclaircir la situation, car, en l’état, l’ambiguïté demeure. Monsieur le ministre, prévoyez-vous de clarifier la rédaction de ce décret ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’amendement n° 87 rectifié bis et les amendements 34 rectifié bis et 64 rectifié, qui seront examinés dans un instant, ont en fait le même objet : il s’agit de revenir sur le décret de juillet 2023, qui visait à harmoniser certaines règles permettant de qualifier des locaux de propres ou impropres à l’habitation.

Il est tout à fait exact que ce décret a conduit certains bailleurs peu scrupuleux à couper des appartements en deux, dans le sens de la hauteur, pour mettre en location des logements de plus de 9 mètres carrés et de 20 mètres cubes, mais d’une hauteur sous plafond de 1,8 mètre, ce qui n’est évidemment pas acceptable.

Cependant, comme je l’ai déjà indiqué en commission, édicter une règle générale selon laquelle la hauteur sous plafond devrait obligatoirement être d’au moins 2,2 mètres ferait sortir du parc des logements toutes les chambres de bonnes en soupente, qui logent par exemple nombre d’étudiants – mais pas seulement ! Dans le contexte de crise du logement que nous connaissons, ce n’est évidemment pas souhaitable.

L’amendement n° 87 rectifié bis vise uniquement les logements locatifs ; les amendements nos 34 rectifié bis et 64 rectifié ont pour objet tous les logements.

Pour tous ces amendements, la commission émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mon propos portera également sur les trois amendements en même temps.

L’amendement n° 87 rectifié bis vise à préciser au niveau législatif la surface et le volume habitables d’un logement, des éléments qui sont aujourd’hui définis au niveau réglementaire. Mais cette disposition va beaucoup plus loin que la législation en vigueur et que les règles actuelles, qui existent d’ailleurs depuis de nombreuses années, car elle impose de réviser les règles de calcul en vigueur, et cela sans que l’impact d’une telle évolution ait été évalué sur le parc existant.

Comment évoluera l’offre ? Je ne sais pas combien cette mesure entraînera de retraits de biens du marché. Si l’offre locative était pléthorique et si les locataires potentiels avaient le choix entre quatre ou cinq appartements, on pourrait se permettre de renforcer les critères et de relever les hauteurs sous plafond, les volumes ou la luminosité, notamment. Mais la situation est radicalement inverse.

Chacun peut le constater, l’offre s’effondre sur tout le territoire. Je suis prêt à étudier cet amendement, mais je ne dispose pas d’étude d’impact.

Mme Audrey Linkenheld. Demandez-en une !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Madame la sénatrice, dans le Nord, il y a des corons bas de plafond ; dans les villes, il y a des logements sous combles, comme le rappelait Mme la rapporteure ; dans l’Est, il y a des habitats à colombages… Ces habitations présentent des spécificités architecturales.

On ne peut donc pas prendre ce type de décision, sans mesurer leur impact en termes de retraits de biens du marché locatif, dans un contexte de crise.

Mme Audrey Linkenheld. Il ne s’agit que de rétablir une disposition qui existait auparavant !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il ne serait pas responsable de ma part de déclarer qu’il faut accroître l’offre locative et, en même temps, d’émettre un avis favorable sur votre amendement, sans savoir quelles seraient ses conséquences, c’est-à-dire sans savoir combien de logements seraient retirés du marché, collectivité par collectivité, localité par localité. (Mme Audrey Linkenheld proteste.)

Faute d’informations précises et d’une étude d’impact, j’émettrai un avis défavorable aujourd’hui. Mais la discussion n’est pas fermée : le débat pourra se poursuivre au niveau local. Nous pourrons aussi discuter de nouveau de cette question quand l’offre locative sur le marché sera plus abondante. Mais, dans le contexte d’effondrement total de l’offre locative que nous connaissons, nous ne pouvons pas prendre le risque de réduire celle-ci encore davantage.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 87 rectifié bis, comme il le fera sur les amendements nos 34 rectifié bis et 64 rectifié qui seront examinés dans un instant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. On comprend bien désormais, après quelques heures de débat, que la politique du logement du Gouvernement se résume essentiellement à essayer d’accroître l’offre de logements, non pas « quoi qu’il en coûte » – car on ne voit guère d’argent –, mais « quoi qu’il en soit », autrement dit quelle que soit la qualité des logements, leur performance énergétique, leur surface, leur hauteur sous plafond, etc.

Tel est le point de vue du Gouvernement. Mais ce n’est pas le nôtre. Nous, nous sommes pour une politique du logement régulatrice, qui offre des logements à la fois abordables et de qualité, et cela nous semble possible.

Cela étant, monsieur le ministre, pour en revenir à l’amendement, j’indique que celui-ci vise à rétablir un texte existant, d’ordre réglementaire. Nul besoin d’une étude d’impact pour revenir à l’existant ! Votre argument ne vaut donc pas.

Le décret a fait couler beaucoup d’encre et fâché nombre d’associations. Vous ne pouvez pas ne pas le savoir. Dites-nous plutôt clairement que vous êtes défavorable à notre amendement, mais ne vous cachez pas derrière une absence d’étude d’impact, car nous n’en avons pas besoin : il s’agit, je le redis encore une fois, de rétablir des dispositions qui ont déjà été en vigueur, et non pas d’en créer de nouvelles.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Ce n’est pas vrai, madame la sénatrice ! Cet amendement vise non pas à rétablir une disposition ancienne, mais à créer de nouveaux critères.

J’ai une question simple : combien de Lillois ou d’habitants du département du Nord dont vous êtes l’élue seront touchés par votre amendement ? Combien de biens locatifs seront concernés sur le marché lillois ? Pourriez-vous indiquer à nos concitoyens combien de logements seraient retirés du marché si cet amendement était adopté ?

Si j’avais une étude d’impact me permettant de connaître toutes les conséquences de cette disposition dans chaque territoire et de savoir combien de biens sortiront du marché, je serais prêt à en discuter. Mais je n’ai pas d’étude d’impact…

C’est pourquoi je ne puis émettre un avis favorable. Pour le reste, oui, le Gouvernement souhaite mener une politique de l’offre, en soutenant l’offre locative, en facilitant la remise de biens sur le marché, en luttant contre les logements vacants, en incitant les propriétaires à louer leurs biens de manière pérenne et durable, tout en les rassurant sur le fait que l’investissement locatif a de l’avenir, etc.

Tel est notre objectif, parce que, j’y insiste, l’offre manque terriblement. Aujourd’hui, les candidats à la location font la queue dans les agences immobilières pour visiter les quelques logements disponibles !

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Si je comprends bien, monsieur le ministre, vous ne voyez pas d’objection à ce que des bidonvilles se reconstituent,…

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Oh !

M. Guy Benarroche. … alors que nous avions toujours eu à cœur de les détruire. Pardonnez-moi, mais si nous poussons votre raisonnement à l’extrême, voilà à quoi nous aboutissons !

Mme Françoise Gatel. Oui, à l’extrême !

M. Guy Benarroche. Par ailleurs, un certain nombre de propositions de loi ont été présentées par des députés ou des sénateurs de la majorité, avec le soutien du Gouvernement, pour éviter la réalisation d’études d’impact. Maintenant vous nous demandez, à nous parlementaires, d’en faire !

Le Gouvernement a pourtant des services pour cela. Est-ce à nous de faire des études d’impact ? Comptez-vous procéder avec le Parlement et les parlementaires comme vous le faites avec les communes et les maires, auxquels vous demandez déjà de payer vos décisions ? Ce n’est pas possible ! Vos arguments ne sont pas recevables.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Dans ce cas, votez n’importe quoi !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 87 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 34 rectifié bis, présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre unique du titre V du livre V du code de la construction et de l’habitation est complété par un article L. 551-… ainsi rédigé :

« Art. L. 551-…. – Les logements respectent des dimensions minimales de hauteur sous plafond, de surface habitable et de volume habitable :

« 1° Le logement dispose d’au moins une pièce principale ayant une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et présente un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes.

« 2° Les pièces de vie et de service du logement ont une hauteur sous plafond suffisante et continue pour la surface exigée permettant son occupation sans risque. Une hauteur sous plafond égale ou supérieure à 2,20 mètres est suffisante. Les locaux dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres et dont la largeur sont impropres à l’habitation.

« 3° Les pièces de vie du logement ont une largeur suffisante pour la surface exigée permettant son occupation sans risque. Une largeur égale ou supérieure à 2 mètres est suffisante. Les locaux dont la largeur est inférieure à 2 mètres sont impropres à l’habitation.

« La surface habitable et le volume habitable sont déterminés conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’article R. 156-1. »

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement a déjà reçu deux avis défavorables de la part de la commission et du Gouvernement, avant même d’être présenté… (Sourires.)

Vous avez indiqué, monsieur le ministre, que vous souhaitiez augmenter l’offre de logements sur le marché, quoi qu’il en coûte, y compris donc au détriment de la dignité humaine. Car, au fond, c’est de cela qu’il s’agit dans l’examen de ce texte.

N’est-ce pas ce qui est en jeu lorsque l’on met en location des logements de moins de 1,8 mètre de hauteur sous plafond et d’une largeur de moins de 1,6 mètre ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mais non ! Relisez le décret, madame la sénatrice !

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement a pour objet de corriger les effets contre-productifs du décret du 29 juillet 2023.

Alors que jusque-là, la hauteur minimale sous plafond d’un logement devait être de 2,2 mètres, ce texte a introduit la notion vague de « volume habitable suffisant », le seuil étant fixé à 20 mètres cubes.

Ce décret autorise donc la location de divers types de logements : logements en sous-sol, logements possédant une hauteur sous plafond de 1,8 mètre, logements en forme de couloir de moins de 2 mètres de large, logements constitués d’une seule pièce et ne possédant d’autre ventilation que la porte ou la fenêtre, logements sans ouverture extérieure autre qu’un vasistas ou une porte, etc.

Dans le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre, il est indiqué que 250 000 ménages vivent dans des logements dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,2 mètres – c’est une étude d’impact, en quelque sorte… (Sourires sur les travées des groupes GEST et SER.) Ce n’est pas sérieux !

Le directeur de la santé publique à l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France considère que juger sain un logement avec une hauteur sous plafond de 1,8 mètre constitue un recul en matière de santé publique.

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Antoinette Guhl. Ce décret encourage l’habitat indigne. Je vous appelle donc, mes chers collègues, à voter notre amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 64 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 8 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre unique du titre V du livre V du code de la construction et de l’habitation est complété par un article L. 551-… ainsi rédigé :

« Art. L. 551-…. – Les logements respectent des dimensions minimales de hauteur sous plafond, de surface habitable et de volume habitable :

« 1° Le logement dispose d’au moins une pièce principale ayant une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et présente un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes.

« 2° Les pièces de vie et de service du logement ont une hauteur sous plafond suffisante et continue pour la surface exigée permettant son occupation sans risque. Une hauteur sous plafond égale ou supérieure à 2,20 mètres est suffisante. Les locaux dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres sont impropres à l’habitation.

« La surface habitable et le volume habitable sont déterminés conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’article R. 156-1 du code de la construction et de l’habitation. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. La question de la décence des logements est au cœur de ce texte. Le Gouvernement a pourtant tenté de déposer un amendement pour contourner l’interdiction des passoires thermiques ; heureusement, il a été déclaré irrecevable.

Dans la même logique, j’espère que, si le Gouvernement avait déposé un amendement pour réduire les normes d’habitabilité, par exemple en abaissant la hauteur sous plafond, celui-ci aussi aurait été déclaré irrecevable, car il eût été scandaleux.

Pourtant, vous n’avez pas attendu ce texte pour défendre une telle mesure, monsieur le ministre, puisque le Gouvernement a abaissé les normes par décret, en réduisant la hauteur sous plafond autorisée à 1,8 mètre. Nul parmi nous n’accepterait de vivre, ou que ses proches vivent, dans un logement si bas de plafond !

Puisque nous sommes réunis pour examiner un texte visant à agir contre l’habitat indigne, saisissons l’occasion de corriger cette aberration et de rendre explicitement impropre à l’habitation, donc à la location, les logements dont la hauteur sous plafond est inférieure à 1,8 mètre.

Notre rôle est de protéger nos concitoyens, de faire en sorte qu’ils aient accès à une offre de logements dignes et de ne pas faciliter les affaires des marchands de sommeil, même s’il est à craindre que la file d’attente chez ces derniers soit toujours plus longue, à cause de la crise du logement que le Gouvernement a aggravée ces dernières années.

Mme la présidente. Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont déjà émis des avis défavorables sur ces amendements.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je saisis cette occasion pour répéter au ministre que nous ne proposons rien de nouveau !

Avant la publication du décret, la hauteur sous plafond d’un logement ne devait en aucun cas être inférieure à 2,2 mètres pour que celui-ci soit considéré comme étant propre à l’habitation. Désormais, une exception est prévue dans le cas où le logement est considéré comme décent – auquel cas il est possible de descendre jusqu’à 1,8 mètre.

Ce n’est donc pas à nous, monsieur le ministre, de vous donner un chiffrage du nombre de logements dont la hauteur sous plafond, à Paris, Lille, Bagnolet ou ailleurs, est inférieure à 2,2 mètres et supérieure à 1,8 mètre !

Comptez-vous nous demander, chaque fois que nous déposons un amendement, si nous savons exactement combien de logements à Lille il viserait, quelle est la taille exacte de ces logements, s’ils sont carrés, rectangulaires ou triangulaires, quelle est leur hauteur sous plafond, etc. ?

Ce n’est évidemment pas aux collectivités ni aux parlementaires de mesurer l’impact des mesures. Et si quelqu’un doit faire ce travail d’évaluation, c’est bien votre administration, monsieur le ministre !

J’y insiste, au travers de ces amendements, nous avons simplement proposé de revenir à l’existant. Imaginez que vous souhaitiez aller à l’hôtel. Si je comprends bien votre argument, monsieur le ministre, cet établissement, s’il a une, deux, trois ou quatre étoiles, doit avoir une hauteur sous plafond de 2,2 mètres ; mais s’il a cinq étoiles – et pour cette raison même – il pourrait n’avoir que 1,8 mètre sous plafond. Et tant pis si l’on est grand de taille !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 64 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 8 sexies
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Après l’article 9

Article 9

(Non modifié)

I. – Le I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« – d’informer les copropriétaires et les occupants de la copropriété qu’un immeuble fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation. »

II. – L’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Après le 11°, il est inséré un 12° ainsi rédigé :

« 12° S’ils existent, les arrêtés pris au titre de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations régies par le titre Ier du livre V du présent code. » ;

b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et 7° » sont remplacés par les mots : « , 7° et 12° » ;

2° Au deuxième alinéa du II, les mots : « au 5° » sont remplacés par les mots : « aux 5° et 12° ».

Mme la présidente. L’amendement n° 169, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le deuxième alinéa de l’article 511-10 et le premier alinéa de l’article 511-12 du code de la construction et de l’habitation sont complétés par les mots : « et les occupants ».

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement vise à permettre au syndic d’informer l’ensemble des occupants d’un immeuble, et pas seulement les copropriétaires, que celui-ci fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité.

Cette information aurait lieu au stade de la procédure contradictoire et à celui de la notification de l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité. Il s’agit d’une précision importante, puisque l’information des occupants, tout particulièrement des locataires, est essentielle pour l’exercice de leurs droits et de leur protection.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Nous avions initialement jugé que cet amendement était satisfait. Mais j’entends vos arguments, madame la rapporteure.

Aussi, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 169.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9, modifié.

(Larticle 9 est adopté.)

Article 9 (texte non modifié par la commission)
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Article 9 bis A

Après l’article 9

Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié, présenté par MM. Grosvalet et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 511-8 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « représentant de l’État dans le département », sont insérés les mots : « et à l’occupant, ».

La parole est à M. Ahmed Laouedj.

M. Ahmed Laouedj. Dans la continuité des dispositions prévues à l’article 9 portant obligation d’information des copropriétaires et des occupants lorsqu’un immeuble ou un logement est concerné par des procédures de lutte contre l’habitat indigne, nous souhaitons particulièrement renforcer l’information des occupants, trop souvent laissés dans l’ignorance des procédures les concernant, pourtant censées les protéger.

Ainsi, le constat d’insalubrité, aujourd’hui communiqué au préfet par un rapport du directeur général de l’agence régionale de santé ou par le directeur du service communal d’hygiène et de santé, serait également communiqué simultanément aux occupants de l’habitat concerné, qui restent, je le rappelle, les principaux intéressés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les auteurs de l’amendement souhaitent que le rapport du directeur général de l’agence régionale de santé ou du directeur du service communal d’hygiène et de santé soit remis à l’occupant du logement en même temps qu’il est remis au préfet.

Autant il semble nécessaire d’informer les habitants au moment de la procédure, qui a des conséquences sur leurs droits, autant il ne paraît pas nécessairement approprié de leur communiquer un document interne à l’administration, qui n’a pas encore donné lieu à une décision. C’est la raison pour laquelle la commission est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 16 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié bis, présenté par MM. Grosvalet et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 511-10 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité compétente à l’initiative de la procédure informe concomitamment les occupants de l’engagement de la procédure contradictoire, par courrier ou remise contre signature, ou par affichage sur la façade de l’immeuble. »

La parole est à M. Ahmed Laouedj.

M. Ahmed Laouedj. Toujours dans le même esprit, à savoir renforcer l’information des occupants d’une copropriété dégradée sur les procédures et actes de lutte contre l’habitat indigne les concernant, nous souhaitons que ces derniers soient informés de l’engagement de la procédure contradictoire préalable à la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité du logement dans lequel ils vivent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, il est important que les occupants, surtout les locataires, soient informés dès la phase contradictoire que l’immeuble fait l’objet d’une procédure de police de la sécurité et de la salubrité.

Le texte de la commission couvre le cas des immeubles en copropriété, mais il ne vise pas les immeubles en monopropriété, qui ne sont pas soumis à la loi de 1965. Il me semble donc qu’il s’agit d’un complément utile pour préserver le droit des victimes de l’habitat indigne. L’avis est cette fois favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 17 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.

L’amendement n° 72 rectifié, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa du I de l’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les locaux visés par un jugement au titre de non-respect des dispositions de l’article L. 126-7 du présent code, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l’occupation du logement cesse d’être dû à compter du premier jour du mois qui suit l’envoi de la notification du jugement ou de son affichage à la mairie et sur la façade de l’immeuble. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. La crise du logement n’est pas la même pour tout le monde et certains en profitent pour s’enrichir. Nous pouvons souligner les efforts faits dans ce texte, qui intègre plusieurs dispositions qui vont compliquer la vie des marchands de sommeil.

Notre amendement s’inscrit dans cette continuité, pour que les personnes mal logées dans un logement dont le propriétaire a fait l’objet d’une condamnation pour division illégale n’aient plus à payer de loyer le temps que la situation soit réglée ou que les locataires aient pu être relogés.

Il faut que la peur change de camp ! Certes, tout le monde ne connaît pas bien le droit et il faudrait soutenir davantage les associations de locataires afin de réduire les non-recours et faire correctement appliquer la loi. Aujourd’hui, les locataires qui refusent de payer leur loyer, car c’est souvent leur seul recours pour contraindre leur propriétaire à intervenir, risquent d’être expulsés pour impayé. Avec cet amendement, les locataires pourront rester à l’abri sans avoir à répondre au chantage d’un bailleur de mauvaise foi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les auteurs de l’amendement entendent permettre la suspension du paiement du loyer pour les logements où est constaté par le jugement que la carence du ou des propriétaires des équipements communs d’un bâtiment collectif à usage principal d’habitation entraîne un fonctionnement défectueux ou un défaut d’entretien de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre leurs conditions d’habitation. Cette disposition ne lui paraissant pas disproportionnée au regard des objectifs du texte, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. En amont de l’engagement d’une procédure pénale à l’encontre d’un bailleur, son bien fait l’objet d’une procédure de police spéciale de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité. À ce titre, la protection des occupants s’applique donc avant toute condamnation et le loyer est déjà suspendu en application des dispositions du code de la construction et de l’habitation. Aussi, nous considérons que la demande est déjà satisfaite.

Par ailleurs, je veux apporter une précision, madame la sénatrice, sur l’article L. 126-7 du code de la construction et de l’habitation, visé par l’amendement, et qui concerne non seulement la prescription de mesure, mais aussi les modalités de notification d’un arrêté de police spéciale par l’autorité compétente en matière de lutte contre l’habitat indigne. Je pense que l’amendement ne peut être adopté dans sa rédaction actuelle, la référence au code de la construction et de l’habitation n’étant pas assez précise pour être opérante.

Pour ces deux raisons, je sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Madame Margaté, l’amendement n° 72 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marianne Margaté. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 72 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 32 est présenté par Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 61 est présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le septième alinéa de l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsque la procédure contradictoire prévue à l’article L. 511-10 du code de la construction et de l’habitation est engagée, la possibilité pour un bailleur de donner congé à un locataire et la durée du bail sont suspendues à compter de la première visite prévue à l’article L. 511-7 du même code. Le congé délivré entre cette première visite et l’arrêté pris à l’issue de la procédure contradictoire est nul de plein droit. »

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 32.

M. Daniel Salmon. Cet amendement a pour objet de suspendre la possibilité pour le propriétaire de résilier le bail d’un locataire dès la constatation d’une situation d’insalubrité lors d’une inspection menée par les autorités compétentes, c’est-à-dire le directeur général de l’agence régionale de santé, le directeur du service communal d’hygiène et de santé, des services municipaux ou intercommunaux compétents, ou d’un expert désigné.

Le locataire doit pouvoir bénéficier de mesures conservatoires pour être protégé le plus tôt possible. En effet, trop de congés sont délivrés par les bailleurs après le déclenchement d’un contrôle de salubrité dans le but de se dégager de toute responsabilité de relogement et de travaux. Ainsi, il est primordial de renforcer les dispositifs de protection des locataires.

Il faut considérer que les obligations du bailleur priment à cet égard, dès lors qu’il louait son logement au moment où ce dernier est considéré comme indigne par les services publics, sachant qu’il conserve son droit de vendre son logement occupé et en l’état. J’y insiste, notre but est de protéger le locataire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 61.

Mme Marianne Margaté. Nous souhaitons également mieux protéger les trop nombreux locataires qui vivent dans un habitat dégradé, et pas toujours en copropriété, d’ailleurs.

Pour autant, notre amendement vise à empêcher les résiliations de bail lorsqu’une procédure contradictoire prévue à l’article L. 511-10 du code de la construction et de l’habitation est engagée. Il s’agit d’une procédure qui concerne des logements insalubres dans lesquels les locataires n’ont pas plaisir à rester, mais dont il peut être difficile de partir pour trouver mieux ailleurs.

Le temps pour le propriétaire de mettre son logement en conformité ou pour le locataire de s’en aller de son plein gré, certains propriétaires négligents peuvent contraindre leur locataire à quitter les lieux soit pour se venger d’un signalement, soit pour tenter de dissimuler cette procédure à un futur locataire, qui continuera d’alimenter le compte bancaire du propriétaire. Avec notre amendement, cela ne sera donc plus possible, puisque le propriétaire ne pourra plus résilier le bail entre la visite des services compétents et l’arrêté pris à l’issue de la procédure contradictoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les auteurs de ces amendements souhaitent interdire au bailleur de donner congé au locataire dès la première visite effectuée par les services municipaux ou préfectoraux en vue de l’établissement du rapport mettant en évidence une situation justifiant la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité. Aujourd’hui, cette interdiction ne court qu’à compter de l’engagement de la procédure contradictoire.

Il nous semble important que le bailleur ait été préalablement prévenu de l’engagement de la procédure. C’est pourquoi il me paraît difficile d’interdire la résiliation du bail avant le premier acte qui porte à sa connaissance l’engagement de la procédure.

Avis défavorable sur les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32 et 61.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le huitième alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le syndic présente, lors de chaque assemblée générale, un état des procédures, amiables ou contentieuses en cours ayant trait à l’état de l’immeuble, à la jouissance de l’immeuble et au recouvrement des charges dans un document joint à l’ordre du jour. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous souhaitons mettre en place une meilleure information des copropriétaires, qui ont parfois du mal à en obtenir auprès de leur syndic.

Nous proposons donc que le syndic soit tenu de fournir un état des procédures en cours lors de chaque assemblée générale, ce qui sera l’occasion pour lui de présenter sa bonne gestion des litiges et l’avancement de leur résolution. La transparence de l’information paraît indispensable, puisque le syndic agit pour le compte de la copropriété, des copropriétaires qui l’ont mandaté, et non pas pour son propre compte. Pour se mettre au service des copropriétaires, il semble donc tout à fait logique que le syndic présente ces informations à l’assemblée générale. Cela permettra aussi de mieux prévenir les risques de défaillance des syndics.

Notre amendement n’est pas de nature à ajouter une charge insurmontable au syndic, puisque les éléments qu’on leur demande de communiquer sont en leur possession.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement, s’il est adopté, créera une nouvelle obligation à la charge du syndic avec l’envoi d’un nouveau document annexé à la convocation de l’assemblée générale des copropriétaires, document qui ferait le point sur l’ensemble des procédures amiables et contentieuses sur l’état de l’immeuble.

Non seulement il s’agit d’une nouvelle contrainte pour les syndics, mais ces éléments sont déjà inclus dans le rapport du conseil syndical au cours de l’assemblée générale et/ou dans les documents fournis par les syndics, puisque les retards de paiement et les procédures apparaissent dans les documents comptables. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 9
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Article 9 bis B

Article 9 bis A

(Non modifié)

L’article L. 126-14 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Le mot : « huissiers » est remplacé par le mot : « commissaires » ;

b) Les mots : « ou d’exécution » sont remplacés par les mots : « , d’exécution ou d’affichage » ;

2° Au second alinéa, le mot : « huissiers » est remplacé par le mot : « commissaires ». – (Adopté.)

Article 9 bis A
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Article 9 bis B

Article 9 bis B

La section 2 du chapitre II de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complétée par des articles 29-16 et 29-17 ainsi rédigés :

« Art. 29-16. – Lorsqu’un immeuble fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation, le signataire de l’arrêté de police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations définie aux articles L. 511-1 à L. 511-3 du même code est destinataire du procès-verbal de l’assemblée générale de copropriété, à laquelle il peut participer ou se faire représenter.

« Art. 29-17. – (Supprimé) ».

Article 9 bis B
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Article 9 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 170, présenté par Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

participer ou se faire représenter

par les mots :

assister ou se faire représenter et formuler des observations sur les questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. L’article 9 bis B prévoit que le maire ou le préfet, dès lors qu’il a enclenché une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité, puisse suivre l’état d’un immeuble en copropriété soit en recevant les procès-verbaux des assemblées générales, soit en y étant présent ou en s’y faisant représenter.

En d’autres termes, nous introduisons la possibilité pour les maires ou les préfets non seulement d’assister, mais également d’émettre des observations.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 170.

(Lamendement est adopté.)

Article 9 bis B
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Article 9 bis

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9 bis B, modifié.

(Larticle 9 bis B est adopté.)

Article 9 bis
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Après l’article 9 bis

Article 9 bis

I. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :

1° (Supprimé)

2° L’article 18 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Après le cinquième alinéa du VIII, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le syndic est tenu de convoquer une assemblée générale dans un délai de deux mois à compter de la première présentation de la lettre recommandée, lorsque le président du conseil syndical en fait la demande. À défaut, le président du conseil syndical est habilité à la convoquer. » ;

3° (Supprimé)

II. – (Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

1° L’article 14-1 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Les avis d’appel de fonds sont établis par le syndic et adressés aux copropriétaires avant la date d’exigibilité conformément à leur contenu fixé par décret. » ;

La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Cet amendement vise à rétablir les dispositions supprimées en commission concernant les appels de fonds. Il y a autant de types d’appels de fonds que de syndics. Certains sont bien rédigés et informent correctement les copropriétaires sur les fonds demandés, mais d’autres sont incompréhensibles, illisibles pour les destinataires.

Aussi, nous proposons qu’un décret fixe un modèle unique d’appel de fonds pour toutes les copropriétés.

Mme la présidente. L’amendement n° 100, présenté par Mmes Brossel, Artigalas et Linkenheld, MM. Kanner, Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

1° L’article 14-1 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Les avis d’appel de fonds sont établis par le syndic et adressés aux copropriétaires. Leur contenu est fixé par décret. » ;

La parole est à Mme Colombe Brossel.

Mme Colombe Brossel. Le groupe socialiste a choisi de déposer cet amendement pour rétablir cette disposition supprimée par la commission qui vise à fixer le contenu des avis d’appel de fonds par voie réglementaire. Cette mesure nous paraît utile pour une meilleure lisibilité des appels de fonds et la bonne compréhension des sommes à payer par les copropriétaires. C’est une mesure de bon sens.

Mme la présidente. L’amendement n° 53 rectifié bis, présenté par Mmes Berthet et Belrhiti, MM. Bouchet et Burgoa, Mmes Di Folco, Joseph et Lassarade et MM. D. Laurent, Pellevat, Sido, Tabarot, Lefèvre, Favreau, Klinger et Bacci, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

1° L’article 14-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les avis d’appel de fonds sont établis par le syndic selon un contenu fixé par décret. »

La parole est à Mme Martine Berthet.

Mme Martine Berthet. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces amendements visent à rétablir une disposition supprimée par la commission qui tendait à la normalisation des appels de charges par décret.

Je rappelle que l’objectif du projet de loi est non pas de traiter des relations entre les copropriétaires et les syndics, mais plutôt de simplifier et d’accélérer les procédures.

Cette normalisation aura des conséquences, notamment financières, importantes, dès lors qu’il faudra modifier les logiciels comptables et l’organisation des syndics.

Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je comprends le souhait d’améliorer la lecture que peuvent faire les copropriétaires des avis d’appel de charges qu’ils reçoivent. Je mesure également, comme Mme la rapporteure, les implications techniques que cette disposition pourrait avoir sur les concepteurs de logiciels destinés aux syndics et le coût de la mise à jour, qui se répercuterait sur les copropriétés.

Je suis donc assez partagé et je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Bilhac, pour explication de vote.

M. Christian Bilhac. Madame la rapporteure, je suis attristé et ému par vos considérations sur le sort des syndics, obligés de modifier leurs logiciels – j’en pleurerais presque. Je crois que je ne vais pas en dormir de la nuit…(Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 13 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 100 et 53 rectifié bis n’ont plus d’objet.

Monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, il est minuit ; je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi afin d’avancer dans l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé. J’en profite pour souhaiter à cette heure un bon anniversaire à M. le ministre délégué. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

Mais revenons-en à notre texte !

Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 12 rectifié est présenté par M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 50 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Buis, Iacovelli, Fouassin et Lemoyne, Mme Duranton, MM. Lévrier, Omar Oili et Haye et Mme Nadille.

L’amendement n° 54 rectifié bis est présenté par Mmes Berthet et Belrhiti, MM. Bouchet et Burgoa, Mme Di Folco, M. Favreau, Mme Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade et MM. D. Laurent, Pellevat, Sido, Tabarot, Lefèvre et Bacci.

L’amendement n° 81 rectifié est présenté par Mme Brossel et M. Féraud.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 4

Rétablir le a dans la rédaction suivante :

a) Le deuxième alinéa du II est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le syndic doit donner sans délai au président du conseil syndical dès sa désignation ou, à défaut, à un membre du conseil syndical désigné à cet effet par l’assemblée générale un accès numérique aux comptes bancaires séparés de la copropriété, permettant de consulter, en lecture seule, les comptes et les opérations bancaires ; »

La parole est à M. Christian Bilhac, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.

M. Christian Bilhac. Il s’agit d’un amendement qui n’entraîne de dépenses pour personne…

Nous souhaitons garantir au conseil syndical un accès numérique à tout moment au compte bancaire de la copropriété. Actuellement, le conseil n’a connaissance des mouvements bancaires que lorsque la banque édite le relevé mensuel. Or, en un mois, il peut se passer beaucoup de choses.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 50 rectifié.

Mme Nadège Havet. M. Bilhac a très bien défendu cette mesure.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 54 rectifié bis.

Mme Martine Berthet. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour présenter l’amendement n° 81 rectifié.

Mme Colombe Brossel. C’est un amendement que j’ai cosigné avec Rémi Féraud. Le conseil syndical ne dispose actuellement d’aucun moyen pour vérifier en temps réel les opérations bancaires effectuées par le syndic sur le compte du syndicat des copropriétaires. Il ne dispose des relevés bancaires qu’en fin de mois, après les avoir demandés au syndic si celui-ci ne les lui a pas transmis spontanément.

Or de nombreuses opérations bancaires frauduleuses ou litigieuses peuvent être faites au cours du mois sans que le conseil syndical puisse en être informé et réagir. Les conséquences financières pour la copropriété peuvent parfois être importantes.

Pour éviter cette situation, nous proposons donc que le président du conseil syndical ou un membre dudit conseil désigné par l’assemblée générale puisse consulter à tout moment, en lecture seule, le compte bancaire de la copropriété afin de contrôles les opérations effectuées par le syndic. Cet amendement a été rédigé en concertation avec l’Association des responsables de copropriétés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces amendements visent à rétablir une disposition figurant à l’article 9 bis du texte transmis par l’Assemblée nationale, qui a été supprimée par la commission.

Aujourd’hui, le conseil syndical dispose déjà des relevés mensuels et peut accéder à de nombreuses autres informations sur la gestion du syndic. Cette disposition serait lourde et vraisemblablement difficile à mettre en œuvre, tout en étant le signe d’une profonde défiance vis-à-vis du syndic, dont le conseil syndical souhaiterait contrôler la gestion au jour le jour.

Je le répète, l’objet du texte n’est pas de traiter des relations entre les copropriétaires et les syndics. Ne nous trompons pas d’objectif.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Madame la présidente, je vous remercie d’abord de votre délicate attention, à laquelle je suis très sensible.

Pour en revenir aux amendements, je précise qu’un décret du 23 mai 2019 relatif à l’extranet des copropriétés prévoit que les membres du conseil syndical ont accès, via cet extranet, aux balances générales des comptes du syndicat des copropriétaires, au relevé général des charges et produits de l’exercice échu et, le cas échéant, aux relevés périodiques des comptes bancaires séparés ouverts au nom du syndicat de copropriétaires. Cela représente déjà pas mal d’informations.

Pour autant, les auteurs de ces amendements proposent d’obliger également le syndic à donner au président du conseil syndical un accès au compte bancaire de la copropriété en lecture seule. Cette disposition est de nature à créer des lourdeurs pour les professionnels. Néanmoins, l’Assemblée nationale s’étant déjà prononcée en ce sens, avant d’être désavouée par la commission des affaires économiques du Sénat, je propose de m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 rectifié, 50 rectifié, 54 rectifié bis et 81 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 18 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° L’article 42-1 est ainsi rédigé :

« Art. 42-1. – I – Les notifications et mises en demeure sont valablement faites par voie électronique.

« II. – Tout copropriétaire peut demander à recevoir les notifications et mises en demeure par voie postale.

« La demande peut être faite par tout moyen auprès du syndic de copropriété. Le syndic est tenu, dès réception de la demande exprimée, de modifier le mode de notification et de mise en demeure du copropriétaire.

« III. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, et au plus tard un mois avant la première notification ou mise en demeure qui suit la promulgation de la loi, le syndic de copropriété informe chaque copropriété dont il a la charge, par affichage dans les parties communes et notification par la voie choisie par chaque copropriétaire avant la promulgation de la loi, de l’évolution du mode de notification et mise en demeure.

« Il informe les copropriétaires des moyens qui s’offrent à eux pour conserver un mode d’information par voie postale. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. André Guiol.

M. André Guiol. Cet amendement tend à approfondir les modalités de dématérialisation des échanges entre les syndics et les copropriétaires. Pour cela, nous souhaitons rétablir les dispositions allant en ce sens supprimées par la commission, en faisant de la notification électronique le principe par défaut de communication envers les copropriétaires, l’envoi postal devenant l’exception.

Cette mesure, soutenue par l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), est également demandée par l’ensemble de la profession de syndic, ainsi que par la principale association de copropriétaires de France.

La notification électronique des convocations aux assemblées générales est beaucoup plus rapide, efficace et écologique que l’envoi d’une lettre recommandée. La prévention de la dégradation des copropriétés et la réalisation des travaux nécessaires à la réhabilitation et à la rénovation des propriétés impliquent une circulation fluide de l’information en direction des copropriétaires. Or, trop souvent, ils ne reçoivent les convocations aux assemblées générales qu’après que celles-ci se sont tenues.

Cet amendement vise donc à favoriser la dématérialisation des convocations et des échanges, tout en permettant aux propriétaires victimes d’illectronisme et d’exclusion de conserver un mode d’information par voie postale.

Mme la présidente. L’amendement n° 137, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° L’article 42-1 est ainsi rédigé :

« Art. 42-1. Les notifications et les mises en demeure sont faites par voie électronique.

« Les copropriétaires peuvent à tout moment demander à recevoir les notifications et mises en demeure par voie postale. »

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Cet amendement représente vraiment un compromis, une sorte de synthèse entre ce qui a été voté à l’Assemblée nationale et en commission au Sénat.

J’ai bien noté que votre commission des affaires économiques avait émis un doute sur la question de la dématérialisation des notifications et mises en demeure au sein des copropriétés.

Aussi, notre amendement reprend certaines dispositions introduites à l’Assemblée nationale avec le soutien du Gouvernement, avant d’être supprimées en commission au Sénat, et vise à faire de la dématérialisation l’option par défaut pour les notifications. De plus, nous précisons, dans un esprit de compromis, que toute personne qui le souhaiterait pourrait, sans justification de quelque ordre que ce soit et à tout moment, conserver ou retrouver une notification par voie postale.

Cet amendement sur la dématérialisation et la numérisation, très attendu par les acteurs du secteur, est respectueux de la liberté de choix. Nous connaissons les difficultés dans certains territoires et nous sommes aussi conscients que certaines personnes ne souhaitent pas utiliser le numérique.

Nous ne forçons personne et laissons aux intéressés la liberté la plus totale. Nous demandons seulement : avez-vous une adresse mail et, si oui, êtes-vous d’accord pour recevoir tel ou tel document par voie électronique ? Si la personne répond par la négative ou ne souhaite pas communiquer son adresse mail, elle continuera de bénéficier de la version papier.

J’y insiste, cet amendement a pour ambition de répondre à des attentes et des aspirations fortes des acteurs du secteur en matière de numérisation, mais il est parfaitement respectueux de la volonté de chacun de recourir ou non au format électronique.

Tel est le compromis que vous propose le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Vous avez raison, nous allons vers plus de numérisation et de dématérialisation, mais nous devons nous poser les questions suivantes : à quel rythme ? Jusqu’où ?

Je reprends les éléments qui nous amènent à avoir ce débat.

L’amendement du Gouvernement vise à rétablir le principe de la validité des notifications et des mises en demeure par voie électronique, sauf opposition des copropriétaires, qui a été supprimé par la commission des affaires économiques du Sénat. Aujourd’hui, c’est l’accord exprès qui est nécessaire. Pour notre part, nous souhaitons que, par défaut, les copropriétaires continuent à recevoir les documents par voie postale, sauf s’ils donnent leur accord pour les recevoir sous la forme numérique.

En fait, la mesure que vous proposez, et qui vise à renforcer l’usage des communications électroniques, est bien complexe pour finalement ne rien changer à la façon dont les choses vont se dérouler. En effet, la voie électronique est toujours autorisée aujourd’hui, et les copropriétaires peuvent conserver le droit de recevoir les documents par voie postale.

Certes, je le reconnais, nous allons tous vers la dématérialisation et la numérisation, mais respectons ceux de nos concitoyens qui ne sont pas outillés : nous parlons de 15 % de nos concitoyens victimes d’illectronisme. Il faut également savoir que le taux d’ouverture des mails est en moyenne de 20 % à 30 %. La numérisation n’est pas la réponse à tout.

Pour toutes ces raisons, nous sommes défavorables à ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 18 rectifié ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je veux rassurer tout le monde sur la rédaction de l’amendement que le Gouvernement dépose. Je reprends ses termes qui sont clairs : « Les notifications et les mises en demeure sont faites par voie électronique. Les copropriétaires peuvent à tout moment demander à recevoir les notifications et mises en demeure par voie postale. » Nous ne forçons personne à se digitaliser. À tout moment, on peut demander à revenir à la voie postale.

C’est la meilleure solution de compromis que nous ayons trouvée. Si aucun amendement n’est adopté sur le sujet, il n’y aura pas de digitalisation et nous resterons à du 100 % papier.

Mme Audrey Linkenheld. Pas du tout !

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. À tout le moins, il n’y aura pas d’accélération sur la numérisation. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) C’est la raison pour laquelle je maintiens notre amendement et j’encourage les auteurs de l’amendement n° 18 rectifié à le retirer au profit de celui du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Nous sommes défavorables à ces amendements.

Pour la bonne compréhension de chacun et éviter de mauvaises interprétations ou des malentendus, je vous lis l’article 42-1 de loi Alur : « Les notifications et mises en demeure, sous réserve de l’accord exprès des copropriétaires, sont valablement faites par voie électronique. »

Monsieur le ministre, la dématérialisation est déjà parfaitement possible pour tous ceux qui le veulent. La seule condition, c’est l’accord exprès des copropriétaires. Cela revient au même. Franchement, pourquoi ne pas s’en tenir au texte en vigueur, qui existe depuis dix ans ? Le phénomène de numérisation va évidemment s’accélérer de lui-même, au fur et à mesure de la résorption de la fracture numérique et de l’illectronisme. Nous avons un très bel article qui fonctionne parfaitement : laissons-le prospérer !

Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.

Mme Antoinette Guhl. Les membres du groupe GEST voteront contre ces deux amendements. En effet, ils tiennent à ce que les copropriétaires qui n’ont pas accès à internet ou n’ont pas envie de recevoir ces informations par voie électronique puissent continuer à être informés sur papier. Ce doit être la formule par défaut ; rien n’empêche celles et ceux qui le veulent, qui sont plus habitués aux communications électroniques, de demander à recevoir ces éléments par mail.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 137.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9 bis, modifié.

(Larticle 9 bis est adopté.)

Article 9 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 9 ter A

Après l’article 9 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de manquement du syndic ayant entraîné un préjudice pour le syndicat des copropriétaires, le président du conseil syndical est habilité à déclarer un sinistre auprès de la compagnie d’assurance de responsabilité civile du syndic afin que le syndicat puisse être indemnisé. »

La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Cet amendement vise à permettre au président du conseil syndical de déclarer un sinistre, à tout moment, auprès de la compagnie d’assurance de responsabilité civile du syndic, dans le cas où ce dernier aurait commis un manquement ayant entraîné un préjudice pour le syndicat des copropriétaires.

En effet, aujourd’hui, le syndic est le seul représentant légal de la copropriété ; par conséquent, en cas de manquement de ce dernier, nul n’est habilité à engager sa responsabilité. Cet amendement vise à corriger cette lacune pour permettre au conseil syndical de se retourner vers un assureur, ce qui n’est pas possible actuellement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Les auteurs de cet amendement souhaitent permettre au président du conseil syndical de déclarer un sinistre auprès de l’assureur de responsabilité civile du syndic.

Il est toutefois inenvisageable d’ouvrir une telle possibilité, car le syndicat des copropriétaires et le président du conseil syndical sont des tiers au contrat qui lie le syndic à son assureur.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 9 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 9 ter B (supprimé)

Article 9 ter A

(Non modifié)

Le quatrième alinéa de l’article 29 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, lorsque la copropriété est en difficulté au sens de la section 2 du présent chapitre, le retrait de cette union est décidé par l’assemblée générale du syndicat à la majorité prévue à l’article 25. » – (Adopté.)

Article 9 ter A
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Article 9 ter (début)

Article 9 ter B

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 63, présenté par Mmes Margaté et Corbière Naminzo, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L’article 3-1 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Suivant les modalités fixées par le décret mentionné au deuxième alinéa du présent article, l’obligation de formation continue à laquelle sont soumises les personnes physiques ou morales qui exercent les fonctions mentionnées au 9° de l’article 1er assure la mise à jour et le perfectionnement des connaissances et des compétences nécessaires à la gestion des copropriétés en difficulté. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Nous souhaitons, par cet amendement, rétablir l’article 9 ter B, adopté par l’Assemblée nationale, mais supprimé en commission.

Cet article prévoyait que soient fournies aux syndics des formations continues visant, notamment, à leur permettre de se saisir pleinement de l’enjeu des copropriétés dégradées et ainsi d’assurer une bonne gestion de celles-ci. Cette mesure nous semble indispensable, d’autant que ce projet de loi vise justement à répondre à cette problématique. Pour rappel, 115 000 copropriétés sont en difficulté, ce qui constitue une part non négligeable des 550 000 copropriétés de notre pays. Tous les syndics professionnels peuvent être confrontés à ce type de situation.

C’est pourquoi nous avons déposé cet amendement de rétablissement : il s’agit à nos yeux d’une mesure de bon sens et non d’une lourdeur inutile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement tend, une nouvelle fois, à instaurer une obligation pour les syndics ; cette fois, une obligation de formation continue sur les copropriétés en difficulté.

La commission a estimé qu’une telle mesure relève, en réalité, du domaine réglementaire et que cette nouvelle obligation ne permettrait pas forcément de former les syndics au sujet qui nous occupe aujourd’hui, puisque la durée de la formation continue légale est minimale.

L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 63.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 9 ter B demeure supprimé.

Article 9 ter B (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Article 9 ter (interruption de la discussion)

Article 9 ter

La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :

1° et 2° (Supprimés)

2° bis L’article 25-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le projet de résolution a pour objet la réalisation de travaux prévus au f de l’article 25 et qu’il n’a pas recueilli au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, une nouvelle assemblée générale, si elle est convoquée dans un délai de trois mois sur un projet identique, peut statuer à la majorité prévue à l’article 24. » ;

3° (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 115 rectifié ter, présenté par M. Cambier, Mmes Gatel et Romagny, MM. Canévet, Henno et Maurey, Mme O. Richard, MM. Lafon, Courtial et Kern, Mme Jacquemet et MM. Duffourg et P. Martin, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :

1° Le II de l’article 24 est ainsi modifié :

a ) Le b est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« b) Les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces travaux peuvent comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent b. » ;

b ) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« …) L’installation de compteurs d’eau froide divisionnaires ;

« …) L’installation de compteurs d’énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage ;

« …) La demande d’individualisation des contrats de fourniture d’eau et la réalisation des études et travaux nécessaires à cette individualisation. » ;

2° Après l’article 24-11, il est inséré un article 24-… ainsi rédigé :

« Art. 24-…. – Les modalités de réalisation et d’exécution des travaux rendus obligatoires en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou d’un arrêté de police administrative relatif à la sécurité ou à la salubrité publique, notifié au syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic sont mises en œuvre sans vote de l’assemblée générale. » ;

3° Les f, k, l et o de l’article 25 sont abrogés.

La parole est à M. Guislain Cambier.

M. Guislain Cambier. Cet amendement a pour objet de simplifier les règles de vote des travaux en copropriété et de faciliter la mise en œuvre des travaux prescrits par la puissance publique en cas de danger pour les occupants ou sur la voie publique. Ainsi, les travaux d’économie d’énergie et d’individualisation des compteurs de fluides seraient soumis au vote à la majorité simple ; les travaux prescrits par la puissance publique, pour leur part, ne seraient pas soumis au vote de l’assemblée générale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. En adoptant cet amendement, on changerait profondément les règles de vote des travaux dans les copropriétés. Ainsi, les travaux d’économie d’énergie ne seraient plus soumis qu’à un vote à la majorité simple. Par ailleurs, serait créée une catégorie de travaux qui ne ferait plus l’objet d’un vote, catégorie qui nous semble mal définie, puisqu’il s’agirait de tous les travaux résultant d’obligations dictées par la puissance publique.

Je ne peux qu’être défavorable à ces deux évolutions.

En effet, la commission a fait le choix de maintenir le vote selon les modalités de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 pour les travaux d’économie d’énergie, en raison de leur coût, tout en prévoyant une passerelle et la possibilité, au cours d’une seconde assemblée générale, d’un vote selon les modalités de l’article 24 de ladite loi.

En outre, il me semble nécessaire que les copropriétaires donnent toujours leur accord à des travaux, d’une part, parce qu’il faudra qu’ils en assument le coût et, d’autre part, parce que, même lorsqu’une remise en état est prescrite par la puissance publique, les copropriétaires conservent la faculté de décider de la manière dont ils vont procéder et de choisir entre les devis qui leur sont soumis.

L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

M. Guislain Cambier. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 115 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsque le projet n’a pas recueilli au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, une nouvelle assemblée générale, si elle est convoquée dans le délai maximal de trois mois, peut statuer à la majorité de l’article 24. » ;

La parole est à M. Ahmed Laouedj.

M. Ahmed Laouedj. Cet amendement vise à réintroduire la possibilité de convoquer une assemblée générale de rattrapage, qui statuerait selon les modalités de vote prévues à l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, lorsqu’une résolution relevant de l’article 25 de ladite loi n’a pas été adoptée et qu’aucune passerelle de majorité ne peut être actionnée faute d’un nombre suffisant de participants.

L’ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis a supprimé ce dispositif, jugé superflu au regard de l’instauration du vote par correspondance et de la possibilité de participer aux assemblées générales à distance. Or il n’est pas rare, au vu du développement de l’absentéisme, que certaines résolutions ne puissent tout simplement pas être adoptées. Ainsi, certaines copropriétés ne peuvent désigner de syndic, ce qui rend nécessaire la saisine du juge en vue de remédier à la situation.

Le texte initial envisageait de rétablir ce dispositif uniquement pour les travaux d’économie d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est proposé ici de l’étendre à l’ensemble des résolutions relevant de l’article 25 de la loi précitée, comme cela était le cas auparavant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement vise à généraliser le recours à une seconde assemblée générale des copropriétaires lorsque le recours à la passerelle, c’est-à-dire un second vote à la majorité simple, suivant les modalités de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, n’a pas pu être organisé parce que la résolution n’avait pas recueilli le soutien d’au moins un tiers des copropriétaires.

Autant la commission a donné son accord à ce dispositif pour les travaux d’économie d’énergie, autant il ne nous apparaît pas souhaitable de généraliser un tel dispositif, qui peut être considéré comme un coup de force présentant des risques de contentieux et a été supprimé en 2019 eu égard à la généralisation des facilités de vote par correspondance.

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 11 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 30, présenté par M. Gontard, Mme Guhl, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Après l’article 25-2, sont insérés des articles 25-2-1 et 25-2-2 ainsi rédigés :

« Art. 25-2-1. – Chaque copropriétaire peut faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes de l’immeuble. À cette fin, le copropriétaire notifie au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.

« Jusqu’à la réception des travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage.

« L’assemblée générale peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux, par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble, à ses éléments d’équipements essentiels ou aux modalités de jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires ou par la programmation de ces travaux dans le cadre du plan pluriannuel de travaux adopté par le syndicat des copropriétaires.

« Art. 25-2-2. – Un ou plusieurs copropriétaires peuvent effectuer, à leurs frais, des travaux qui affectent les parties communes de l’immeuble, sous réserve que ceux-ci soient nécessaires à la conservation, à l’isolation, à la salubrité ou à la sécurité des parties privatives définies à l’article 2 et qu’ils ne mettent pas en cause la structure de l’immeuble, sa destination, ses éléments d’équipements essentiels ou la sécurité des occupants.

« À cette fin, le ou les copropriétaires notifient au syndic une demande ayant pour objet l’inscription à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale d’un projet de résolution, accompagné d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.

« L’assemblée générale peut autoriser la réalisation des travaux à la majorité des voix des copropriétaires prévue à l’article 25.

« Jusqu’à la réception des travaux, le ou les copropriétaires exercent les pouvoirs et assument la responsabilité dévolus au maître d’ouvrage.

« Les copropriétaires qui subissent un préjudice du fait de l’exécution des travaux peuvent réclamer une indemnité. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à rétablir plusieurs dispositions utiles visant à débloquer les travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés, dispositions supprimées en commission.

Concrètement, la rédaction initiale de cet article prévoyait, d’une part, la possibilité pour chaque copropriétaire de faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes de l’immeuble. D’autre part, elle permettait à un ou plusieurs copropriétaires d’effectuer, à leurs frais, des travaux nécessaires à la conservation, à l’isolation, à la salubrité ou à la sécurité des parties privatives, tant que ces travaux ne mettent pas en cause la structure de l’immeuble, sa destination, ses éléments d’équipement essentiels ou la sécurité des occupants.

Dans les deux cas, ces possibilités seraient encadrées. Dans le premier cas, l’assemblée générale pourrait s’y opposer, à la majorité des voix des copropriétaires, en cas d’atteinte à la structure de l’immeuble ou à ses équipements essentiels. Dans le second cas, l’acceptation de l’assemblée générale serait requise, à la majorité définie à l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 ; en outre, le ou les copropriétaires demandeurs assumeraient les responsabilités propres au maître d’ouvrage. En cas de préjudice, les copropriétaires concernés pourraient réclamer une indemnité.

Tout cela nous semble donc bien encadré juridiquement. Ces dispositions nous paraissent constituer une avancée : l’autorisation, par l’assemblée générale, de travaux essentiels d’isolation, de salubrité, de sécurité ou d’amélioration de la toiture, bloquée par la législation actuelle, serait simplifiée. Cela permettrait d’accélérer le lancement de ces travaux essentiels pour les copropriétés en mauvais état, ambition qui est justement au cœur du projet de loi dont nous débattons.

Mme la présidente. L’amendement n° 93, présenté par M. Féraud, Mmes Brossel, Artigalas et Linkenheld, MM. Kanner et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Après l’article 25-2, est inséré un article 25-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 25-2-1. – Chaque copropriétaire peut faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes de l’immeuble. À cette fin, le copropriétaire notifie au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.

« Jusqu’à la réception des travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage.

« L’assemblée générale peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux, par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble, à ses éléments d’équipements essentiels ou aux modalités de jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires ou par la programmation de ces travaux dans le cadre du plan pluriannuel de travaux adopté par le syndicat des copropriétaires. »

La parole est à M. Rémi Féraud.

M. Rémi Féraud. La rédaction de cet amendement n’est pas exactement la même que celle du précédent, mais l’objectif est le même.

Il faut reconnaître que la question de l’adaptation des immeubles à la canicule est absolument essentielle, notamment pour ceux qui habitent sous les toits et qui sont, parfois, les occupants les plus modestes. Les travaux d’isolation des toitures permettent d’annuler la surmortalité que l’on constate, en cas de canicule, chez les personnes qui vivent sous les toits ; cette surmortalité est une réalité !

C’est pourquoi nous proposons de rétablir le dispositif, supprimé en commission, qui permettrait aux copropriétaires directement concernés, avec l’accord de la copropriété ou, en tout cas, en l’absence d’opposition de sa part, de se substituer à elle et d’effectuer les travaux sur la toiture. Je pense qu’il s’agit d’une mesure de bon sens qui pourrait tout à fait susciter un consensus.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 52 rectifié est présenté par Mme Havet, MM. Buis, Iacovelli, Lemoyne et Fouassin, Mme Duranton, MM. Lévrier, Omar Oili et Haye et Mme Nadille.

L’amendement n° 130 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Après l’article 25-2, il est inséré un article 25-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 25-2-1. – Chaque copropriétaire peut faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes de l’immeuble, à condition que ces travaux ne portent pas atteinte à la structure de l’immeuble, à ses éléments d’équipements essentiels, à sa sécurité, à sa salubrité ou aux modalités de jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires ou ne fassent pas l’objet d’une programmation dans le cadre du plan pluriannuel de travaux adopté par le syndicat des copropriétaires. À cette fin, le copropriétaire notifie au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.

« Jusqu’à la réception des travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage.

« L’assemblée générale peut, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux, par décision motivée par leur non-conformité aux exigences prévues au premier alinéa. »

La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié.

Mme Nadège Havet. Cet amendement a pour objet de permettre à un copropriétaire de faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes. En effet, lorsque la copropriété n’a pas l’intention de faire réaliser de tels travaux, il convient de laisser la possibilité aux copropriétaires volontaires de le faire à leurs frais.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l’amendement n° 130.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. L’objet de cet amendement est similaire à celui des précédents : tous tendent à réintroduire dans le texte un dispositif supprimé par votre commission, dispositif qui permet à un copropriétaire de faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture qui affectent les parties communes de l’immeuble. On offrirait ainsi aux copropriétaires volontaires la possibilité de faire réaliser ces travaux quand la copropriété n’a pas l’intention de les engager.

Vous avez parlé de bon sens, monsieur Féraud ; je crois que c’est bien la logique dans laquelle nous nous inscrivons. Cette mesure avait d’ailleurs suscité un large consensus à l’Assemblée nationale quand elle a été soumise à son vote.

Toutefois, nous sommes vraiment à l’écoute des travaux de la commission et de votre rapporteure, avec laquelle nous nous sommes réunis. C’est pourquoi, dans l’amendement que le Gouvernement vous soumet, comme dans celui que vient de présenter Mme Havet, nous avons voulu inscrire des éléments de sécurité juridique, puisque des arguments de cette nature nous avaient été opposés.

Ainsi, la rédaction retenue dans ces amendements précise bien que les travaux en question ne doivent pas porter « atteinte à la structure de l’immeuble, à ses éléments d’équipements essentiels, à sa sécurité, à sa salubrité ou aux modalités de jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires ». En outre, ces travaux ne doivent pas faire l’objet « d’une programmation dans le cadre du plan pluriannuel de travaux adopté par le syndicat des copropriétaires ».

Il me semble que ces deux ajouts justifient que l’on réintroduise dans le texte une mesure qui a été plébiscitée à l’Assemblée nationale. Nous avons pris en considération les remarques que Mme la rapporteure avait formulées pour proposer un compromis apportant des gages de sécurité juridique sans nous écarter du bon sens auquel appelle M. Féraud.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Ces amendements visent tous à rétablir la possibilité offerte à un copropriétaire, dans le texte adopté par l’Assemblée nationale, de faire réaliser, à ses frais, des travaux d’isolation de la toiture sauf opposition de la majorité des copropriétaires de l’immeuble.

Il s’agirait ici d’étendre l’exception qui existe en matière de travaux d’accessibilité pour les personnes handicapées à des travaux d’isolation de la toiture. Or, si les premiers sont nécessaires au maintien dans le domicile, tel n’est pas le cas des seconds. En outre, les travaux d’accessibilité, s’ils touchent aux parties communes, ne viennent pas modifier des éléments essentiels, comme la toiture de l’immeuble.

Il ne paraît pas concevable que des travaux portant atteinte au couvert de l’immeuble, donc à sa structure et à sa salubrité, puissent être réalisés par un seul copropriétaire sauf opposition d’une majorité des copropriétaires, sans possibilité de s’y opposer techniquement.

Non, en réalité, cette mesure ne relève pas forcément du bon sens. Surtout, c’est après avoir écouté des professionnels concernés que nous avons estimé que l’adoption d’une telle disposition pourrait entraîner d’importants désordres et avoir des effets contraires à l’objet du projet de loi – assurer la rénovation de l’habitat dégradé.

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 30 et 93 ?

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Le Gouvernement invite leurs auteurs à les retirer au profit des amendements identiques nos 52 rectifié et 130 ; à défaut, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je voudrais, tout en expliquant mon vote, éclaircir un point de manière à permettre à tous les membres de notre assemblée présents ce soir de se prononcer de manière unanime sur ces amendements, qui ont tous un objet similaire.

Je comprends évidemment que l’on puisse craindre que des travaux engagés par un copropriétaire sur la toiture fragilisent celle-ci, voire la structure de l’immeuble dans son ensemble.

Il me semble néanmoins – M. le ministre et ses services pourront le confirmer – que, au-delà de l’accord de la copropriété, de tels travaux doivent faire l’objet d’une déclaration, d’une autorisation d’urbanisme, ou encore d’un permis de construire. En effet, même s’il ne s’agit que d’isolation, j’ai peine à imaginer que celle-ci ne se fasse que par l’intérieur et n’affecte en rien l’extérieur de l’immeuble. Dès lors, s’il faut une autorisation d’urbanisme, on peut compter sur les services de la collectivité compétente pour l’instruction de la demande : à l’évidence, ils ne délivreront l’autorisation que si les travaux projetés ne mettent pas en danger l’immeuble ou autrui.

Soit je n’ai pas bien saisi de quel type de travaux il est ici question, auquel cas j’aimerais que nous soyons mieux éclairés sur les amendements en discussion ; soit, comme je le crois, la procédure normale d’autorisation d’urbanisme s’applique, auquel cas je ne vois pas où serait le danger.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. En réponse à Mme Linkenheld, je veux d’abord rappeler que, aux termes de nos amendements, si une majorité de copropriétaires s’opposait aux travaux, ceux-ci ne se feraient pas. On n’autoriserait pas quiconque à entreprendre librement des travaux, sans contrôle ni verrou de la copropriété. Si la majorité dit non, c’est clair : on ne peut pas engager les travaux.

Par ailleurs, si la copropriété ne s’y oppose pas, les règles d’urbanisme ne s’en trouveront pas pour autant modifiées. Il s’agit en l’occurrence de travaux d’isolation, cas tout à fait classique : si la moindre modification extérieure de la toiture est prévue, cela peut imposer une déclaration, un permis de construire, éventuellement l’avis d’un architecte des Bâtiments de France (ABF), comme d’ordinaire.

Nous essayons d’apporter un maximum de sécurité juridique à un dispositif qui est déjà, somme toute, très cadré : il ne s’agit nullement de dire à tout un chacun qu’il peut faire n’importe quoi sur la toiture ! Ce n’est l’objet d’aucun des amendements en discussion, en particulier des amendements identiques de compromis nos 52 rectifié et 130.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 30.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 93.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 rectifié et 137.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9 ter.

(Larticle 9 ter est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais lever la séance.

Nous avons examiné 120 amendements au cours de la journée ; il en reste 37 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 9 ter (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
Discussion générale

8

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 28 février 2024 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

À seize heures trente et le soir :

Projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (texte n° 299, 2023-2024) ;

Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur le thème « L’avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale » ;

Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur le thème « Architectes des Bâtiments de France : périmètre et compétences » ;

Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :

- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord global dans le domaine du transport aérien entre les États membres de l’association des nations de l’Asie du sud-est, et l’Union européenne et ses États membres (procédure accélérée ; texte de la commission n° 341, 2023-2024) ;

- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre concernant la démarcation et l’entretien de la frontière (texte de la commission n° 339, 2023-2024) ;

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement (texte de la commission n° 343, 2023-2024).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 28 février 2024, à zéro heure trente-cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER