Art. 1er
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Art. 3

Article 2

Le présent statut s'applique aux militaires de carrière, aux militaires servant en vertu d'un contrat, aux militaires réservistes qui exercent une activité au titre d'un engagement à servir dans la réserve opérationnelle ou au titre de la disponibilité et aux fonctionnaires en détachement qui exercent, en qualité de militaires, certaines fonctions spécifiques nécessaires aux forces armées.

Les statuts particuliers des militaires sont fixés par décret en Conseil d'Etat. Ils peuvent déroger aux dispositions de la présente loi qui ne répondraient pas aux besoins propres d'un corps particulier, à l'exception de celles figurant au titre Ier et de celles relatives au recrutement, aux conditions d'avancement et aux limites d'âge.

Mme la présidente. L'amendement n° 35, présenté par Mme Luc, MM. Bret,  Biarnès,  Hue et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du second alinéa de cet article, après les mots :

Ils peuvent

insérer les mots :

après avis du Conseil supérieur de la fonction militaire

La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Il s'agit d'un simple amendement de précision, qui concerne les statuts particuliers dérogeant éventuellement aux dispositions du présent projet de loi.

Selon nous, toute disposition dérogatoire doit être soumise pour avis au CSFM, ce qui constitue d'ailleurs un moyen de renforcer la légitimité et la qualité des missions de cette instance.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. André Dulait, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'article 18 du projet de loi, qui prévoit que le CSFM « est obligatoirement saisi des projets de texte d'application de la présente loi ayant une portée statutaire. »

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, qui alourdirait la rédaction de l'article 2.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. La préoccupation exprimée dans cet amendement est effectivement déjà prise en compte à l'article 18. Le Gouvernement est donc, lui aussi, défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Madame Luc, l'amendement n° 35 est-il maintenu ?

Mme Hélène Luc. Je le maintiens car la rédaction que je propose est meilleure.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

TITRE IER

DROITS ET OBLIGATIONS

CHAPITRE IER

Exercice des droits civils et politiques

Art. 2
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Art. 4

Article 3

Les militaires jouissent de tous les droits et libertés reconnus aux citoyens. Toutefois, l'exercice de certains d'entre eux est soit interdit, soit restreint dans les conditions fixées par la présente loi.  - (Adopté.)

Art. 3
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Art. 5

Article 4

Les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques sont libres.

Elles ne peuvent cependant être exprimées qu'en dehors du service et avec la réserve exigée par l'état militaire. Cette règle s'applique à tous les moyens d'expression. Elle ne fait pas obstacle au libre exercice des cultes dans les enceintes militaires et à bord des bâtiments de la flotte.

Indépendamment des dispositions du code pénal relatives à la violation du secret de la défense nationale et du secret professionnel, les militaires doivent faire preuve de discrétion pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la loi, les militaires ne peuvent être déliés de cette obligation que par décision expresse de l'autorité dont ils dépendent.

L'usage de moyens de communication et d'information, quels qu'ils soient, peut être restreint ou interdit pour assurer la protection des militaires en opération, l'exécution de leur mission ou la sécurité des activités militaires.  - (Adopté.)

Art. 4
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Art. 6

Article 5

Il est interdit aux militaires en activité de service d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique.

Sous réserve des inéligibilités prévues par la loi, les militaires peuvent être candidats à toute fonction publique élective ; dans ce cas, l'interdiction d'adhésion à un parti politique prévue par le premier alinéa du présent article est suspendue pour la durée de la campagne électorale. En cas d'élection et d'acceptation du mandat, cette suspension est prolongée pour la durée du mandat.

Les militaires qui sont élus et qui acceptent leur mandat sont placés dans la position de détachement prévue à l'article 51.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 36, présenté par Mme Luc, MM. Bret,  Biarnès,  Hue et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Tout militaire en activité de service peut adhérer à des groupements ou associations à caractère politique sous réserve d'une obligation de discrétion.

Sous réserve des inéligibilités prévues par la loi, les militaires peuvent être candidats à toute fonction élective.

Les militaires qui sont élus et qui acceptent leur mandat, sont placés dans la position de détachement prévue à l'article 51 pour la durée du mandat.

La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. La question des droits politiques et syndicaux des militaires se pose avec une acuité particulière.

Effectivement, en 2005, nous pouvons légitimement nous demander, mes chers collègues, pour quels motifs les droits politiques et syndicaux ne s'exerceraient pas dans les cantonnements et les casernements

Il y a une certaine hypocrisie à interdire aux militaires ce que l'ensemble des êtres humains s'autorisent. En effet, il existe aujourd'hui des vecteurs d'information échappant au contrôle de quelque autorité que ce soit, et les militaires ne sont pas moins ouverts à leur usage que les autres membres de la communauté nationale.

De même, le fait qu'un ancien officier général de notre armée de terre, désormais hors du cadre d'active, exerce aujourd'hui des fonctions électives au niveau européen ne nous semble pas critiquable.

Mais, au-delà de cette hypocrisie, qu'il convient de faire disparaître, demeurent les termes mêmes de ce qui fonde le socle de notre démocratie, à savoir le bloc de constitutionnalité, comme ce qui est appelé à le renforcer.

Je prendrai quelques exemples.

L'article X de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, texte incontestable, dispose : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. ». Et l'article XI ajoute : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi. ». Ces dispositions, madame la ministre, ne sont pas en contradiction avec ce que vous avez dit tout à l'heure.

Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en son sixième alinéa, énonce : « Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. » Cela vaut bien sûr aussi pour l'article 6 que nous examinerons tout à l'heure.

Par ailleurs, comment ne pas rappeler ici les termes de l'article 4 de la Constitution du 4 octobre 1958 ?

« Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.

« Ils contribuent à la mise en oeuvre du principe énoncé au dernier alinéa de l'article 3 » - il s'agit de la parité entre les hommes et les femmes - « dans les conditions déterminées par la loi. »

En outre, pour achever cette analyse objective de la situation, il convient de citer la Charte des droits fondamentaux, dont le projet de traité constitutionnel européen que nous examinerons bientôt fait l'un de ses pivots. Elle indique, en son article 12 : « Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique, ce qui implique le droit de toute personne de fonder avec d'autres des syndicats et de s'y affilier pour la défense de ses intérêts.

« Les partis politiques au niveau de l'Union contribuent à l'expression de la volonté politique des citoyens ou citoyennes de l'Union. »

Par conséquent, mes chers collègues, il nous faut désormais être cohérents : ou bien on considère que les cantonnements militaires sont des lieux dans lesquels n'ont pas à s'appliquer les règles constitutionnelles en vigueur ni celles que l'on souhaite voir mises en oeuvre dans les meilleurs délais ; ou bien on décide, avec un large consensus, que ces dispositions s'y appliquent, et il convient alors de mettre le statut général des militaires en conformité avec celles-ci. C'est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 29, présenté par M. Boulaud, Mmes Bergé-Lavigne et  Voynet, MM. Rouvière,  Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I - Au début du premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

Il est interdit

par les mots :

Il est permis

II - Après les mots :

peuvent être candidats à

rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa de cet article :

toute fonction élective.

La parole est à M. Didier Boulaud.

M. Didier Boulaud. En présentant cet amendement, qui traite d'un point particulièrement important à nos yeux, je reviendrai sur le débat qui a eu lieu hier soir et qui s'est poursuivi tout à l'heure.

Certes, notre groupe s'est largement exprimé lors de la discussion générale, mais, à nos yeux, le débat n'est pas définitivement clos sur ce point.

Il nous paraît impossible de débattre de la réforme du statut général des militaires sans poser publiquement la question de leurs droits politiques, civiques et démocratiques.

A ce titre, je rappelle que l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a rédigé une recommandation sur ce sujet. Il me paraît sage de la porter à la connaissance non seulement du Sénat, mais aussi des militaires.

Certes, madame la ministre, j'ai bien entendu, tout à l'heure, votre réponse : si nous n'allons pas à la montagne, c'est la montagne qui viendra à nous. Autrement dit, nous allons éclairer le chemin !

Dans les pays où les militaires ont déjà le droit d'adhérer à des partis politiques ou à des organisations syndicales, on leur expliquera que, puisque les Français ne bénéficient pas de tels droits, il serait bon qu'ils y renoncent, pour que l'on puisse mettre sur pied une grande armée européenne. Il est bien connu que nous éclairons le monde !

L'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe recommande que le Comité des ministres invite les gouvernements des Etats membres : « à autoriser les membres des forces armées et le personnel militaire à s'organiser dans des associations représentatives ayant le droit de négocier sur des questions concernant les salaires et les conditions de travail ; à lever les restrictions actuelles inutiles au droit d'association pour les membres des forces armées ; à autoriser les membres des forces armées et le personnel militaire à adhérer à des partis politiques légaux ; à inscrire ces droits dans les règlements et dans les codes militaires des Etats membres ; à étudier la possibilité de mettre en place le bureau d'un médiateur auquel le personnel militaire pourrait s'adresser en cas de conflit du travail et d'autres questions relatives à l'exercice des fonctions ».

Il serait sage, par conséquent, de prévoir dès à présent la mise en conformité de notre législation avec une évolution européenne inévitable.

Des militaires responsables, citoyens à part entière dans une démocratie moderne : tel est notre objectif et le sens de l'amendement n° 29.

Par ailleurs, madame la présidente, je demande un scrutin public sur l'article 5.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. André Dulait, rapporteur. Ayant adopté le principe de l'interdiction de la participation des militaires tant aux organisations syndicales qu'aux partis politiques, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. J'ai déjà développé assez longuement les raisons pour lesquelles je ne suivrai pas les propositions de Mme Luc. J'ai rappelé les principes qui nous guident Par ailleurs, les discussions très ouvertes que j'ai eues au CSFM montrent qu'il n'existe pas de demande en ce sens. Au contraire, la position du Gouvernement est très largement approuvée par l'ensemble des militaires. Je n'insiste donc pas sur ce point.

Monsieur Boulaud, je vous transmettrai le texte de l'intervention de votre collègue socialiste M. Boucheron, qui constituera la meilleure réponse que l'on puisse vous faire.

M. Didier Boulaud. Vous trouverez des interventions émanant de vos rangs !

Mme la présidente. La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote sur l'amendement n° 36.

M. Josselin de Rohan. Ce débat me rappelle un sujet que j'ai traité en passant un concours administratif : « le fonctionnaire est-il un citoyen spécial ? »

Aujourd'hui, la question qui nous est posée est celle-ci : « le militaire est-il un citoyen spécial ? »

Assurément, le militaire, comme le fonctionnaire, est un citoyen spécial ! Servitude et grandeur du métier militaire.

Madame Luc, monsieur Boulaud, le débat que vous avez engagé n'est pas médiocre. Il est, au contraire, très intéressant. C'est pourquoi je souhaite expliquer les raisons pour lesquelles je suis foncièrement hostile à votre suggestion.

Je me souviens d'un temps où un ministre de la défense, Jules Moch, avait cantonné à Versailles tous les officiers membres du parti communiste. C'était l'époque de la guerre d'Indochine.

Parmi ces officiers, se trouvait un compagnon de la Libération pour qui nous avons tous un immense respect : le colonel Rol-Tanguy

Ses camarades et lui-même ne pouvaient accepter la guerre d'Indochine. Loyalement, ils l'ont fait savoir Or, la plupart de ces officiers n'ont pu, en raison de leurs convictions politiques, effectuer une carrière normale.

On comprend d'ailleurs bien qu'ils aient été écartelés entre leurs convictions politiques et la guerre qui était menée à l'époque.

J'avancerai un argument de bon sens. Des partis politiques peuvent être pacifistes, et sont donc contre toutes les guerres. Que signifierait l'adhésion d'un officier à un parti pacifiste ? Croyez-vous vraiment que cela soit possible ?

Si les partis pacifistes existent et sont parfaitement respectables, il n'en demeure pas moins qu'un militaire est amené à porter les armes, et parfois à tuer.

Par ailleurs, vous savez qu'il existe des formations politiques, qui ne sont pas interdites, qui ont pignon sur rue, dont les chefs émettent des propos infiniment scabreux. Imaginer que des militaires en uniforme adhèrent à un parti dont le chef nie l'existence des camps de concentration ? (Mme Hélène Luc s'exclame.) Que diriez-vous si des officiers se solidarisaient avec une telle formation politique ? C'est pourquoi la sagesse l'a emporté.

Monsieur Boulaud, je voudrais me référer au témoignage de Charles Hernu, que je respectais. Voilà vingt ans, lors du congrès des anciens de la gendarmerie qui se tenait à Lorient -  dans mon département -, il avait rappelé qu'il était fils de gendarme, qu'il était né dans une caserne de gendarmerie et qu'il nourrissait pour la gendarmerie la plus grande affection, mais il avait ajouté : « si vous voulez que nos rapports cessent et que je devienne hostile à la gendarmerie, alors, demandez l'adhésion des gendarmes à des syndicats ». Il avait parfaitement compris que certains métiers ne peuvent pas être politisés.

Madame Luc, puisque vous avez fait allusion à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen,...

Mme Hélène Luc. Absolument !

M. Josselin de Rohan. ...je terminerai mon propos en rappelant que la souveraineté appartient au peuple et que nulle section du peuple ne peut se l'approprier. L'armée appartient à la nation ; aucune section de la nation ne peut se l'approprier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Au sein de notre groupe, nous nous sommes interrogés l'opportunité de voter les amendements présentés par Mme Luc et par M. Boulaud : il ne nous a pas semblé possible de le faire. D'ailleurs, le débat qui vient de s'instaurer n'aurait pas dû avoir lieu puisque les articles 1er et 2 qui fixent les missions dévolues à notre armée ont été adoptés. Comment peut-on souhaiter faire entrer les militaires dans des catégories qui, comme M. de Rohan l'a dit à juste titre, ont essentiellement pour objet de contester ou d'appuyer les décisions du Gouvernement ?

Dans un pays démocratique comme le nôtre, où les rapports sociaux sont très complexes, il n'est pas admissible ni raisonnable d'envisager la création, au sein des armées, de sections syndicales ou de partis politiques. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.

Mme Hélène Luc. Tout à l'heure, M. de Rohan est parti dans une envolée lyrique, qui cache mal son embarras. (Rires sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Philippe Nogrix. C'est incroyable !

M. Robert Bret. Cela transparaissait !

Mme Hélène Luc. Nos propositions ne sont pas en contradiction avec le rôle de l'armée. D'ailleurs, vous n'avez rien trouvé de répréhensible dans les propos que j'ai tenus hier. J'avais notamment évoqué l'image de l'armée, sa responsabilité, le rôle qu'elle joue en Afghanistan et au Kosovo. Il est évident, madame la ministre, que notre armée est l'une des meilleures du monde. Nous ne le contestons pas. Nous disons simplement que l'article 5 du projet de loi porte sur les droits civiques accordés ou non aux militaires. Or nous divergeons sur ce point. En effet, cet article prévoit en réalité le strict cantonnement de ces droits a minima, car il interdit aux militaires en activité d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique.

Quel regard portera-t-on sur cette loi dans les années à venir ? Car vous y viendrez ! Au début du XXIe siècle, une réforme ambitieuse doit être engagée. Selon nous, il est essentiel de mettre la législation en conformité avec la réalité.

Certains militaires militent dans des partis politiques sous des pseudonymes ou sans être formellement inscrits. Et c'est d'ailleurs normal : au nom de quels principes les militaires n'auraient-ils pas le droit de donner leur avis sur la politique de défense ? (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Philippe Nogrix. Ils le font !

Mme Hélène Luc. Je ne vous ai pas interrompus ! Permettez-moi de m'exprimer.

Les partis politiques ont besoin de connaître l'avis des militaires sur la politique de défense.

L'argument de la neutralité n'est pas convaincant, pour trois raisons.

D'abord, les militaires ont le droit d'être candidats à une fonction publique élective et peuvent, pendant leur mandat, adhérer à un parti politique.

Ensuite, tous les fonctionnaires, qui ont une obligation de neutralité dans l'exercice de leurs fonctions, peuvent adhérer à une organisation politique. Il faut être très rigoureux pour faire respecter ce droit.

Enfin, cette interdiction paraît aussi anachronique que celle qui concernait le droit de vote des militaires avant 1944 : il était alors considéré comme incompatible avec les règles de neutralité des armées.

Il est fort probable que les arguments utilisés aujourd'hui étaient déjà de mise à l'époque pour justifier ces interdictions.

Pourtant, la réflexion des partis politiques sur les questions de défense ne peut que s'enrichir de la participation des militaires Loin de nous l'idée de faire des casernes et cantonnements des tribunes politiques permanentes, mais il convient de préserver et de développer la citoyenneté des militaires, gage de la bonne intégration républicaine des armées.

En fait, madame la ministre, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, vous manquez de confiance dans nos militaires ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Philippe Nogrix. C'est la meilleure !

Mme Hélène Luc. Notre groupe demande un scrutin public sur l'article 5, qui est très important.

Mme la présidente. La parole est à M. Eric Doligé, pour explication de vote.

M. Eric Doligé. Je ne regrette jamais de venir dans cet hémicycle, et encore moins aujourd'hui ! Vous vous dévoilez. Je suis très surpris de la position que vous adoptez. Pourquoi n'avez-vous pas émis ces idées il y a quelques années ? Pouvez-vous confirmer que, si d'aventure vous reveniez au pouvoir, vous proposeriez de syndicaliser et de politiser l'armée ? Souhaitez-vous l'existence au sein de l'armée, comme dans les entreprises, des délégués syndicaux et des temps syndicaux ? Allez jusqu'au bout de votre idée : proposez que 2 % des militaires puissent bénéficier d'un temps syndical lorsqu'ils seront sur un théâtre d'opérations, pour tenir des réunions syndicales. Excusez-moi de vous le dire, tout cela est d'un ridicule achevé !

Mme Hélène Luc. C'est votre avis ! Respectez les opinions des autres !

M. Eric Doligé. D'ailleurs, cela me donne des idées. Dans mon conseil général, par exemple, un certain nombre d'élus sont des principaux de collèges et conseillers généraux. Ils sont juge et partie.

M. Josselin de Rohan. C'est scandaleux !

M. Eric Doligé. Prenez garde : vos arguments me donnent presque envie de revenir en arrière dans un certain nombre de domaines.

Mme Hélène Luc. Ce sont vos idées ! Vous avez le droit de les avoir !

M. Eric Doligé. Quoi qu'il en soit, je ne peux pas admettre que l'on dise - comme hier, au cours de la discussion générale - que les militaires sont des personnes de deuxième zone. Pour ma part, je les considère plutôt comme des personnes au-dessus de la société. Permettez-moi de prendre une position opposée à la vôtre. Je regrette que vous ayez tenu de tels propos. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 81 :

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 200
Contre 118

Le Sénat a adopté.

Art. 5
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Art. 7

Article 6

L'exercice du droit de grève est incompatible avec l'état militaire.

L'existence de groupements professionnels militaires à caractère syndical ainsi que l'adhésion des militaires en activité de service à des groupements professionnels sont incompatibles avec les règles de la discipline militaire.

Il appartient au chef, à tous les échelons, de veiller aux intérêts de ses subordonnés et de rendre compte, par la voie hiérarchique, de tout problème de caractère général qui parviendrait à sa connaissance.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 30, présenté par M. Boulaud, Mme Bergé-Lavigne, MM. Plancade,  Rouvière,  Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I - Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :

Il est permis aux militaires en activité d'adhérer à des groupements professionnels ou à des syndicats.

II - Supprimer les deuxième et troisième alinéas de cet article.

La parole est à M. Didier Boulaud.

M. Didier Boulaud. Cet article prévoit le maintien de l'interdiction d'adhésion à un syndicat ou à un groupement professionnel.

Je rappellerai que, parmi les fonctionnaires civils, seuls les membres du corps préfectoral sont aujourd'hui privés du droit d'adhérer à un syndicat, mais ils conservent le droit d'être membre d'une association professionnelle.

Cette question a été exclue d'emblée des travaux de la commission de révision du statut, et nous le regrettons. Sous leur forme actuelle, les conseils de la fonction militaire ne peuvent suffire. Nous devrons néanmoins revenir sur cette question à l'avenir, ne serait-ce qu'au regard d'une harmonisation souhaitable au niveau européen - j'en reviens aux arguments qui ont été avancés s'agissant de l'engagement dans les partis politiques - et des droits dont jouissent les militaires en la matière.

Enfin, s'il peut paraître encore étrange à d'aucuns de rencontrer des syndicats dans les armées, il n'en demeure pas moins que des syndicats existent dans certains pays, notamment en Allemagne et en Suède.

Concernant le syndicalisme dans l'armée, le rapport récent de l'un des comités de l'IHEDN - Institut des hautes études de défense nationale -, au cours de sa cinquante- cinquième session, c'est-à-dire en 2003, précisait : «  A chaque fois que ce thème » - j'entends bien que ce rapport n'engage pas la position officielle de l'IHEDN - « est abordé en France, le débat tourne vite à l'aigre. »

« Pourtant, il semble aujourd'hui » - d'ailleurs notre débat cet après-midi en est un témoignage vivant - « très clair qu'un système de représentation qui apportera plus de confiance que les CFM doit être élaboré, car si les problèmes ne peuvent se régler en interne, ils déborderont de plus en plus rapidement sur la place publique. »

Mme Hélène Luc. C'est ce qui s'est produit !

M. Didier Boulaud. Sage parole, allais-je dire, car, connaissant le fonctionnement de l'IHEDN pour l'avoir fréquenté voilà quelques années - lors de sa quarante-huitième session, hélas ! et non de sa cinquante-cinquième session - je sais que dans chaque comité siègent des colonels. Or ceux qui ont été nommés en 2003 ont quelque chance d'obtenir des étoiles... On peut donc en conclure, mes chers collègues, qu'il y a quand même quelques espoirs de voir progresser la situation !

Mme la présidente. L'amendement n° 37, présenté par Mme Luc, MM. Bret,  Biarnès,  Hue et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa de cet article :

Tout militaire en activité peut adhérer aux groupements professionnels ou interprofessionnels à caractère syndical.

 

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Cet amendement tend à autoriser les militaires à se syndiquer. Nous vous avons bien entendue, madame la ministre, mais nous ne pouvons partager vos arguments.

En effet, l'interdiction nous paraît de plus en plus contestable - et l'avenir nous dira qui a raison - non seulement pour des raisons d'ordre juridique, au vu du préambule de 1946, de l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, de plusieurs résolutions du Conseil de l'Europe et des droits fondamentaux, mais aussi du point de vue de la jurisprudence européenne, je pense notamment à la Cour de justice des Communautés européennes, à laquelle, demain, certains militaires pourraient éventuellement demander de trancher.

Par ailleurs, pour des raisons politiques, ce droit est, sauf erreur de ma part, reconnu aux militaires en Belgique, en Grande-Bretagne et en Allemagne, alors que, dans le passé, les fonctionnaires ont été privés de ce droit dans notre pays jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour raison d'incompatibilité avec le fonctionnement normal de l'Etat. Or, lorsque ce droit leur a été rendu, la République ne s'est pas effondrée pour autant, mes chers collègues. Pourquoi en irait-il autrement pour les militaires ?

En fait, il convient, là encore, de provoquer l'avancée juridique nécessaire, qui permettra effectivement aux 300 000 militaires de carrière que compte notre pays de disposer des droits civiques et naturels dont jouissent l'ensemble de nos concitoyens, sous réserve bien sûr de quelques ajustements.

Mme la présidente. L'amendement n° 38, présenté par Mme Luc, MM. Bret,  Biarnès,  Hue et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Cependant, tout militaire peut adhérer aux confédérations syndicales reconnues.

 

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Cet amendement de repli vise à permettre aux militaires, à titre individuel, d'adhérer aux organisations syndicales professionnelles de leur choix, dans le champ des organisations confédérées reconnues représentatives.

Il s'agit donc non pas de faciliter la constitution de sections syndicales spécifiques dans nos casernes et cantonnements, et encore moins sur les théâtres d'opérations extérieures, mais de laisser la simple liberté aux militaires de participer, à leur mesure, aux activités de ces organisations.

Aussi, pour renforcer le lien entre la nation et son armée, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 39, présenté par Mme Luc, MM. Bret,  Biarnès,  Hue et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les militaires en activité de service peuvent adhérer librement aux groupements et associations non visés par l'interdiction posée à l'alinéa précédent.

 

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Cet amendement tend à permettre aux militaires en activité de participer à la vie associative, en levant les ambiguïtés de l'article 6, aux termes duquel l'adhésion des militaires en activité à des groupements professionnels est incompatible avec les règles de la discipline militaire.

Qu'en est-il, par exemple, des associations de militaires retraités, qui font valoir leur caractère convivial et leur rôle dans le maintien du lien entre l'armée et la nation ? Je pense aussi aux associations dans la gendarmerie qui jouent un rôle, et pas seulement pour les retraités. Qu'en est-il également des associations regroupant les femmes du bataillon des marins-pompiers de Marseille pour faire entendre les préoccupations légitimes de leur mari, bataillon qui est à la seule charge des contribuables marseillais ?

De la même manière, alors que nos forces sont de plus en plus souvent impliquées dans des missions de caractère humanitaire dans des pays frappés par des cataclysmes et catastrophes naturelles majeures - et l'actualité, hélas ! en est la démonstration -, pourquoi ne pas permettre aux militaires de participer, à leur manière, aux activités des associations qui ont précisément pour objet d'intervenir dans de telles situations ?

Cet amendement répond à un souci de clarification.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. André Dulait, rapporteur. Comme nous l'avons indiqué lors de la présentation du rapport, la commission n'a pas souhaité modifier l'équilibre du projet de loi en matière de groupements professionnels et syndicaux. C'est pourquoi elle émet un avis défavorable sur les amendements nos 30, 37 et 38.

Quant à l'amendement n° 39, il ne nous semble pas utile. En effet, les militaires sont libres d'adhérer aux associations non visées par l'interdiction posée à l'article 6. C'est la raison pour laquelle la commission est également défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je distinguerai les trois premiers amendements et le quatrième.

S'agissant des amendements n°s 30, 37 et 38, nous revenons à la question de fond qui a déjà été évoquée et sur laquelle nous avons une divergence de principe.

Je voudrais simplement, s'agissant de certains des arguments avancés, apporter quelques précisions.

Tout d'abord, je rappelle que l'IHEDN accueille des stagiaires venant de tous les horizons, y compris des partis politiques et des syndicats. Par conséquent, que ces problèmes soient notamment évoqués par certaines personnes de votre entourage, madame Luc, cela n'a rien de surprenant, et il ne faut pas en tirer des conséquences sur la position des militaires.

Ensuite, je précise qu'il n'y a pas de syndicats dans les armées américaine et britannique. Il en existe, c'est vrai, dans l'armée allemande, qui n'est pas une armée professionnelle. Les grandes armées professionnelles opérationnelles, donc l'armée américaine et l'armée britannique, ne connaissent pas l'existence de syndicats. Je tenais à vous livrer cette information, que vous sembliez ne pas connaître.

Enfin, selon nous, l'association professionnelle et le syndicat, c'est la même chose, car le but est le même.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux trois premiers amendements.

Quant à l'amendement n° 39, qui concerne la vie associative en général, j'y suis opposée pour une question forme. En effet, ce texte est tout à fait inutile dans la mesure où le droit d'association est reconnu, et l'a d'ailleurs toujours été. J'y ai ajouté le droit de prendre des responsabilités au sein des associations dès lors qu'il ne s'agit pas d'associations interdites de par leur caractère syndical, professionnel ou partisan.

Par conséquent, cet amendement n'apporte rien, et j'y suis donc défavorable non pas sur le fond, mais parce qu'il est redondant par rapport à ce qui figure déjà dans le texte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Eric Doligé, pour explication de vote sur l'article 6.

M. Eric Doligé. Je voterai l'article 6.

Ce que je viens d'entendre m'a, une nouvelle fois, quelque peu surpris.

La société évolue parfois de façon surprenante.

En effet, il y a une trentaine d'années, alors que je commençais à m'intéresser à la politique, personne ne se demandait si un préfet, un recteur ou un magistrat était de droite ou de gauche.

Or, aujourd'hui, que se passe-t-il ? Il semble que ce soit l'inverse et nous sentons qu'un certain voile est en train de se s'installer qui est quelque peu gênant dans cette société où il n'est pas utile de connaître les opinions politiques, surtout quand on songe que ces personnalités les expriment parfois publiquement.

Je serais personnellement très embarrassé que, dans mon département, qui compte tout de même 6 000 militaires, un chef de corps ou un général vienne se présenter en affichant son opinion politique. En effet, je n'ai nul besoin de connaître celle-ci. Ce que je veux simplement, c'est parler au représentant de l'armée.

Par ailleurs, la meilleure défense syndicale, c'est d'avoir un bon ministre. Depuis quelque temps, le meilleur défenseur de l'armée, c'est notre ministre actuel ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) En effet, regardez comment sont votés les budgets, qui les défend et qui soutient les militaires ? Il me paraissait important de le dire. Le ministre de la défense actuellement en fonction laissera certainement un grand souvenir dans la mémoire des militaires.

Je suis un peu surpris que les membres de l'opposition aient en permanence la volonté d'enfoncer un coin. A les entendre, ce ne serait pas grave, il s'agirait d'un point tout à fait secondaire, puisqu'il y aura des syndicats. Or, dans ce genre de choses, chacun sait qu'il ne faut pas mettre le doigt dans l'engrenage.

C'est pourquoi je demande à mes collègues et amis d'être prudents et, surtout, de ne pas accepter les modifications qui leur sont proposées à travers ces amendements.

Mme Hélène Luc. Vous n'avez pas le monopole de la défense des armées !

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Boulaud, pour explication de vote.

M. Didier Boulaud. Aujourd'hui, il existe, certes, une forme de défense syndicale dans les armées. En effet, nous savons tous qu'il existe des associations de gendarmes en retraite (Murmures sur les travées de l'UMP) qui, régulièrement, sont porteurs des messages des gendarmes en activité.

Nous savons aussi que les épouses de gendarme se sont constituées en association pour faire valoir les revendications de leur mari.

Mme Hélène Luc. Exactement !

M. Didier Boulaud. Tout à l'heure, Mme la ministre s'est réjouie du fait que les revendications des gendarmes avaient uniquement été dirigées contre un gouvernement de gauche. Mais il ne faut jamais insulter l'avenir. On ne sait jamais ce qui vous attend. Il faut être très prudent en la matière.

M. Doligé disait tout à l'heure que voilà trente ans il ne se demandait pas si tel ou tel préfet était de gauche ou de droite. Rassurez-vous, mon cher collègue, nous non plus, nous ne nous posions pas la question.

Quant à la référence faite par M. de Rohan à Charles Hernu, cela remonte, comme il l'a précisé, à vingt ans. Or, nous ne cessons de faire valoir que, depuis vingt ans, la société a évolué. Nous ne nous sommes pas arrêtés à 1981 ni à 1982, même si, j'en conviens, 1981 vous a durement marqués. (M. Josselin de Rohan s'exclame.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Guy Branger, pour explication de vote.

M. Jean-Guy Branger. Je ne polémiquerai pas sur un sujet aussi important. J'ai siégé très longtemps à l'Assemblée nationale avec des collègues que je retrouve ici, et c'est sympathique. Pourquoi les membres de l'opposition posent-ils, avec tant de véhémence et d'acharnement, ce problème, alors qu'ils ont eu la possibilité, j'en ai été témoin, de mettre en oeuvre tout ce qu'ils nous proposent aujourd'hui ? Il faut cesser de débattre de cette manière.

Sans vouloir polémiquer, je m'inquiète du niveau des propos tenus : ce débat n'est pas sain, et d'abord pour l'institution militaire elle-même, qui mérite mieux.

Les militaires ne souhaitent pas de syndicat ; ils ne souhaitent pas revendiquer ; ils savent parfaitement s'exprimer. Je rejoins parfaitement M. Doligé : notre ministre de la défense est leur meilleur défenseur.

A chaque fois que des problèmes se posent, nous sommes d'ailleurs, les uns et les autres, attentifs à ce que nous dit l'institution militaire par la voix de ces représentants.

N'allons donc pas faire entrer le loup dans la bergerie !

Chers collègues, n'essayez pas d'introduire aujourd'hui dans la loi ce que vous n'avez pu y intégrer lorsque vous étiez aux affaires, parce que le président de la République de l'époque n'y était pas favorable.

Cessons par conséquent un débat qui n'a pas lieu d'être. Restons sereins et repoussons ces amendements inopportuns qui ne reflètent pas l'importance du sujet.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.

Mme Hélène Luc. A vous entendre, messieurs, on pourrait penser que vous tentez par tous les moyens de contenir une évolution que vous craignez.

Je crois que M. Boulaud a eu raison de rappeler l'action des épouses, celles des militaires et, peut-être plus encore, celles des pompiers et des gendarmes, qui ont su faire passer leur message au Gouvernement.

Je puis vous dire, connaissant nombre de ces femmes, qu'elles expriment ce que pensent leurs maris, y compris sur les problèmes de la vie familiale.

Il est important de les écouter et de les entendre : cela permettrait, justement, d'éviter les débordements que vous redoutez, messieurs. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

En raison de l'importance de cet article, nous demandons au Sénat de se prononcer par scrutin public, monsieur le président.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis de Broissia, pour explication de vote.

M. Louis de Broissia. N'aurais-je pas entendu l'intervention de Mme Luc, je me serais volontiers satisfait des paroles de M. de Rohan et de nos collègues, qui se sont exprimés avec justesse.

Chacun le sait ici, je suis issu du milieu militaire. Le nom de Broissia est porté dans l'armée davantage qu'au Sénat ou à l'Assemblée nationale. Vous m'en excuserez ! Je me trouve donc assez proche des militaires dont nous parlons aujourd'hui.

Je puis vous dire que j'ai eu la honte de ma vie, pour moi et pour la gendarmerie nationale, le jour où, pour la première fois dans ma carrière, des gendarmes, dont une femme, sont venus me voir, en uniforme, avec le véhicule de service, dans ma permanence électorale. Je leur ai dit : « Plus jamais ça ! ».

Cela se passait sous le précédent gouvernement. Je ne veux pas revoir cela ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Hélène Luc. Peu importe !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 82 :

Nombre de votants 325
Nombre de suffrages exprimés 325
Majorité absolue des suffrages exprimés 163
Pour l'adoption 207
Contre 118

Le Sénat a adopté.