B. FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DES MODALITÉS ALTERNATIVES DE RÉPARTITION INTERNE DU FPIC AU SEIN DES TERRITOIRES

Le développement des modalités alternatives de répartition interne du FPIC dans le but d'en faire un réel levier de solidarité territoriale, que les rapporteurs spéciaux appellent de leurs voeux, implique également de surmonter des obstacles de deux ordres :

- des obstacles d'ordres juridique et administratif appelant, dans la mesure du possible, un assouplissement de l'encadrement des modalités de répartition dérogatoires ;

- des obstacles d'ordre technique appelant un développement de l'expertise en la matière au niveau local.

1. Le difficile assouplissement de l'encadrement des modalités de répartition alternative du FPIC
a) L'assouplissement des procédures de répartition se heurte à des obstacles juridiques

De nombreux élus auditionnés ont souligné que les critères de majorité renforcée voire d'unanimité pouvaient constituer des obstacles dirimants pour la mise en place de modalités de répartitions dérogatoires ou libres .

Certains élus ont également relevé le caractère très strict de l'encadrement de la répartition du FPIC entre l'EPCI et les communes membres dans le cadre de la répartition dérogatoire , qui ne peut s'écarter de 30 % de la répartition de droit commun déterminée à partir du coefficient d'intégration fiscale (CIF). Ces contraintes peuvent contribuer à expliquer la très faible utilisation des modalités de répartitions dérogatoires (3 % des EI en matière de prélèvement et 6 % des EI en matière de reversement).

Néanmoins, les marges de manoeuvre en la matière paraissent juridiquement très limitées eu égard au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958. Il convient en effet d'admettre que les règles de répartition de droit commun doivent pouvoir continuer de jouer leur rôle de « filet de sécurité » pour les communes.

Dans un avis rendu public sur le sujet 22 ( * ) , le Conseil d'État a en effet rappelé que « selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, telle qu'elle ressort notamment des décisions susvisées, si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements à des obligations ou réduire leurs ressources, c'est à la condition que les mesures qu'il prend en ce sens répondent à des fins d'intérêt général, soient définies de façon suffisamment précise quant à leur objet et leur portée et selon des critères objectifs et rationnels en lien avec l'objectif poursuivi, qu'elles soient proportionnées à la réalisation de cet objectif et qu'elles ne soient pas d'une ampleur telle que la libre administration des collectivités concernées s'en trouverait entravée ou dénaturée. »

Appliquant ce raisonnement aux règles de répartition interne du FPIC, le Conseil d'État a considéré qu' « au regard des principes rappelés [ci-dessus] et des positions qu'il a lui-même prise lors de la création du FPIC et de l'examen de celle de ses modifications qui lui ont été soumises, le Conseil d'État (section des finances) estime difficile d'envisager un assouplissement significatif [de ces] règles, en particulier du plafond de 30 % . En effet, la possibilité de déroger localement aux critères légaux de répartition des prélèvements et versements effectués au titre de ce mécanisme national de péréquation des ressources communales et intercommunales doit nécessairement être strictement encadrée dans le cas où elle peut jouer nonobstant l'avis d'une commune concernée ».

b) La possibilité d'assouplir le calendrier de notification du FPIC

Plusieurs élus d'ensembles intercommunaux auditionnés par les rapporteurs spéciaux ont par ailleurs souligné le caractère très contraint du délai dont ils disposent pour prendre une délibération tendant à la mise en place d'une modalité de répartition dérogatoire , fixé à deux mois à compter de la notification par les préfectures aux ensembles intercommunaux du montant qui leur sera prélevé ou reversé. Une telle délibération est d'autant plus difficile à adopter qu'en pratique cette notification a lieu à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet et que la période estivale se prête peu à un travail technique approfondi sur les modalités de répartition interne à adopter ou à la recherche d'un consensus politique sur ces modalités. Dans les faits, les ensembles intercommunaux ont donc tendance à reconduire par défaut les modalités de répartition de l'année précédente.

Pour remédier à cette situation, une piste pourrait consister à pérenniser le dispositif qui avait été mis en place en 2020, dans un contexte perturbé par la crise sanitaire et le report du second tour des élections municipales . Le directeur général des collectivités locales, par une circulaire du 7 juillet 2020, avait en effet demandé aux préfets d'informer les ensembles intercommunaux sur le montant qui leur serait prélevé ou reversé dès que les données sont disponibles et de les interroger à cette occasion sur leurs souhaits de mettre en place une répartition interne dérogatoire ou libre. Le cas échéant, il est demandé aux préfets de retarder la notification officielle du montant prélevé ou reversé de façon à ce que celle-ci intervienne à une date compatible avec la mise en oeuvre effective de cette répartition alternative.

Recommandation n° 6 : adapter au cas par cas le calendrier de notification du FPIC pour permettre aux ensembles intercommunaux souhaitant mettre en oeuvre une répartition dérogatoire ou libre du FPIC de disposer du temps nécessaire pour le faire.

2. Favoriser la construction et la diffusion d'indicateurs adaptés aux réalités locales

Les rapporteurs spéciaux considèrent que conception d'un système pertinent et juste de répartition interne du FPIC suppose que les élus intercommunaux aient la volonté politique de se donner eux-mêmes les moyens de disposer d'une réelle expertise financière et socio-économique de leur territoire .

Cependant, il convient que les ensembles intercommunaux les moins bien dotés mais motivés par le projet d'améliorer l'efficacité de leur répartition interne puissent également solliciter un appui technique des services de l'État en la matière.

Recommandation n° 7 : encourager les ensembles intercommunaux à développer leur expertise financière et socio-économique aux fins de la définition d'un dispositif de répartition interne du FPIC adapté à leur territoire. Veiller à ce que les services de l'État puissent au besoin apporter un appui technique aux ensembles intercommunaux disposant de moyens plus limités mais souhaitant améliorer leur propre dispositif.

Favoriser le développement d'une telle expertise passe notamment par la diffusion des bonnes pratiques dans les territoires et l'accessibilité des données financières pertinentes .

Les élus auditionnés ont en effet regretté leur méconnaissance des modalités de répartition du FPIC mises en place dans les autres ensembles intercommunaux, qui pourraient pourtant constituer une source d'inspiration pour améliorer leur propre dispositif. Une base de données pourrait par exemple être instituée pour recenser les différents modèles de répartition existants.

Recommandation n° 8 : favoriser la diffusion des bonnes pratiques en matière de répartition interne du FPIC.

Enfin, toujours selon les élus auditionnés, la transparence des données financières pertinentes pour permettre aux collectivités et opérateurs intéressés de travailler sur le FPIC et ainsi de concevoir des mécanismes de répartition efficaces pourrait être améliorée . À titre d'exemple, une donnée aussi importante que le PFIA par habitant des ensembles intercommunaux n'est pas publiquement accessible.

Recommandation n° 9 : améliorer la transparence et l'accessibilité des données pertinentes pour la définition de modalités de répartitions internes du FPIC.


* 22 Conseil d'État, section des finances, avis n° 391635, 12 juillet 2016.

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