N° 689

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 juillet 2017

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur le volet méditerranéen de la politique de voisinage : le cas de l' Algérie ,

Par M. Simon SUTOUR,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Bizet, président ; MM. Michel Billout, Michel Delebarre, Jean-Paul Émorine, André Gattolin, Mme Fabienne Keller, MM Yves Pozzo di Borgo, André Reichardt, Jean-Claude Requier, Simon Sutour, Richard Yung, vice-présidents ; Mme Colette Mélot, M Louis Nègre, Mme Patricia Schillinger, secrétaires , MM. Pascal Allizard, Éric Bocquet, Philippe Bonnecarrère, Gérard César, René Danesi, Mme Nicole Duranton, M. Christophe-André Frassa, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Pascale Gruny, M. Claude Haut, Mmes Sophie Joissains, Gisèle Jourda, MM. Claude Kern, Jean-Yves Leconte, François Marc, Didier Marie, Robert Navarro, Georges Patient, Michel Raison, Daniel Raoul, Alain Richard, Alain Vasselle.

AVANT-PROPOS

La révision de la politique européenne de voisinage, en décembre 2015, a contribué à conférer un deuxième souffle à la relation entre l'Union européenne et l'Algérie. Les autorités algériennes, elles-mêmes auparavant réservées sur le bien-fondé de l'accord d'association signé en 2002, semblent également en demande d'un approfondissement de ces liens. Elles entendent ainsi que soient valorisés la position géostratégique du pays, dans un contexte régional tendu, et son apport à la politique énergétique de l'Union européenne. Elles souhaitent, dans le même temps, que ce rapprochement puisse faciliter une modernisation de ses structures économiques, rendue indispensable par l'évolution des prix des hydrocarbures, sa principale ressource.

Le déplacement de votre rapporteur en Algérie du 6 au 9 juillet 2016 a permis d'évaluer la position des autorités locales quant au rapprochement avec l'Union européenne. Il s'agissait également d'observer sur place la mise en oeuvre concrète de l'accord d'association au travers des jumelages institutionnels ou de l'activité des entreprises européennes installées sur le territoire algérien.

Il a constitué, en outre, l'occasion de vérifier la pertinence de quelques-unes des recommandations de la résolution européenne du Sénat adoptée en juin 2016 sur la révision du volet méditerranéen de la politique de voisinage. Il a ainsi pu recueillir l'appréciation des autorités algériennes sur la nécessité pour l'Union européenne de relancer des projets d'intégration régionale à l'instar de l'Union du Maghreb arabe, du dialogue 5+5 et de l'Union pour la Méditerranée.

L'ALGÉRIE EN QUELQUES CHIFFRES

Superficie : 2 381 740 km 2

Population : 39,2 millions d'habitants

Taux de fécondité : 2,86 enfants par femme

Densité : 16 habitants au km 2

PIB (2014) : 214,08 milliards de dollars

Part des principaux secteurs d'activités dans le PIB (2015) :

- Agriculture : 11 %

- Industrie : 46 %

- Services : 43 %

PIB par habitant en SPA (2014) : 14 259 dollars 1 ( * )

Taux de croissance (estimation 2017) : 1,3 %

Solde budgétaire (estimation 2017) : - 3 % du PIB

Taux d'endettement (2017) : 18,3 % du PIB

Taux d'inflation (février 2017) : 7,7 %

Taux de chômage (septembre 2016) : 10,5 %

Principaux clients : Espagne, Italie, France, Royaume-Uni

Principaux fournisseurs : Chine, France, Italie, Espagne

I. UN RAPPROCHEMENT CONSTANT AVEC L'UNION EUROPÉENNE...

Les relations entre l'Algérie et la Communauté économique européenne ont été établies dans la foulée de l'accession à l'indépendance de l'ancien département français. Il s'agissait, en premier lieu, de permettre aux produits algériens - produits agricoles, vin - de continuer à accéder au marché européen.

À l'instar du Maroc et de la Tunisie, l'Algérie a été intégrée en 1972 au sein de l'Approche globale méditerranéenne développée par la Communauté. En 1976 a été signé un accord de coopération, d'une durée illimitée, destiné à contribuer au développement économique et social de l'Algérie. Ce document comprend trois volets :

- un volet commercial : des concessions sont octroyées aux exportations algériennes sur le marché européen. Seuls les produits agricoles sont soumis à un contingentement ;

- un volet économique et financier : la Communauté finance des projets dans ce domaine via des protocoles quinquennaux. Quatre protocoles ont été mis en oeuvre entre 1976 et 1995 ;

- un volet social : celui-ci est resté en large partie inappliqué, les accords bilatéraux passés entre certains États membres et l'Algérie s'avérant plus ambitieux que l'accord de coopération.

La nouvelle approche méditerranéenne développée par l'Union européenne à partir de 1991 conduit à privilégier progressivement un objectif de coopération sur le soutien aux réformes économiques et sociales.

A. L'ACCORD D'ASSOCIATION

La Déclaration de Barcelone de novembre 1995, qui jette les bases d'un Partenariat euro-méditerranéen, contribue à dépasser ce cadre en dressant les contours d'une coopération plus étendue, abordant notamment les questions politiques et culturelles et plaçant les relations entre l'Union européenne et les pays de la rive Sud de la Méditerranée dans une perspective régionale.

C'est dans ce contexte qu'ont été signés plusieurs accords d'association entre l'Union européenne et ses partenaires de la rive Sud. L'accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne a été signé le 22 avril 2002 , six ans après l'adoption d'un traité équivalent entre l'Union européenne et le Maroc. Il est entré en vigueur le 1 er janvier 2005.

Le texte vise en premier lieu le développement des échanges. Il s'agissait d'établir progressivement une zone de libre-échange entre l'Union européenne et l'Algérie à l'issue d'une période transitoire de douze ans. L'accord prévoyait une clause de rendez-vous cinq ans après son entrée en vigueur afin d'aboutir à une plus grande libéralisation du commerce des produits agricoles à partir de la sixième année, soit 2011. La coopération économique que l'accord d'association institue vise, par ailleurs, la coopération régionale, les sciences et techniques, l'environnement, l'industrie, la protection et la promotion des investissements, la mise en avant de normes communes et le rapprochement des législations, les services financiers, l'agriculture et la pêche, les transports, les télécommunications et la société de l'information, l'énergie et les mines, le tourisme et l'artisanat, les douanes et les statistiques ainsi que la protection des consommateurs

En ce qui concerne les services , l'Union européenne est tenue d'accorder un traitement non moins favorable aux fournisseurs algériens que celui accordé aux fournisseurs issus des États membres. À l'inverse, l'Algérie accorde aux fournisseurs de services européens un traitement non moins favorable que celui accordé à ses entreprises. La conclusion d'un accord d'intégration économique est par ailleurs envisagée.

Le texte prévoit, en outre, une coopération dans le domaine de la justice et des affaires intérieures visant le renforcement des institutions et de l'État de droit, la libre circulation des personnes, la réadmission, la prévention et la lutte contre la criminalité organisée, contre le terrorisme, contre le blanchiment de l'argent, contre le racisme et la xénophobie, contre la drogue ainsi que contre la corruption.

Dans le domaine social, l'accord d'association vise à mettre en place un régime fondé sur la non-discrimination pour les travailleurs des deux parties en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération et de licenciement. La coordination des régimes de sécurité sociale est également visée.

L'accord vise enfin à promouvoir un dialogue culturel et une coopération soutenue sans exclure a priori un domaine d'activité. Une attention particulière est portée à l'encouragement des échanges de jeunes, à la presse et l'audiovisuel. L'accord concerne également la protection du patrimoine, les traductions, la formation et les échanges des expositions d'art et des artistes, ainsi que la coopération en matière de formation et d'éducation.

Le Conseil d'association (niveau ministériel) et le Comité d'association (niveau administratif) sont en charge de la mise en oeuvre de l'accord. Ils ont été installés en janvier 2005. Des sous-commissions techniques ont également été créées. Elles couvrent cinq domaines :

- l'accompagnement des réformes économiques ;

- les politiques commerciales ;

- l'énergie ;

- la circulation des personnes ;

- la lutte contre le terrorisme.


* 1 Exprimé en standard de pouvoir d'achat, c'est à dire corrigé des effets de change et de prix.

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