VI. Mme Anne Dux, directrice des affaires scientifiques et réglementaires et chargée des relations européennes de la Fédération des entreprises de la beauté

L'Europe dispose de la législation la plus protectrice au monde en matière de cosmétiques, et vous ne le savez pas ! Cette législation a d'ailleurs été renforcée en 2013. Les ingrédients interdits sont au nombre de 2 000, contre 7 ou 8 aux États-Unis ! Un grand nombre d'entre eux sont des perturbateurs endocriniens, comme le bisphénol A ou les phtalates. D'autres font obligatoirement l'objet d'une autorisation de mise sur le marché : les colorants, les conservateurs et les filtres solaires - ce sont là les trois ingrédients les plus sensibles d'un cosmétique.

L'industriel doit construire un dossier rassemblant tous les éléments relatifs à la fabrication, à la composition et à la sécurité du produit. Une évaluation est fournie par un toxicologue, qui peut être un salarié ou un prestataire de l'entreprise. Enfin, le responsable de la mise sur le marché notifie cette démarche sur un portail dédié, de façon que les autorités puissent, si elles le souhaitent, contrôler le produit concerné.

Tout ingrédient peut être examiné par un comité d'experts indépendant, le CSSC, le Comité scientifique européen pour la sécurité des consommateurs, qui est l'un des trois comités scientifiques placés auprès de la Commission européenne. Il comprend notamment trois experts français, dont deux sont membres de l'ANSES. Ce comité a rendu, en 2014, un avis sur la question des perturbateurs endocriniens. Je rappelle que le règlement européen relatif aux produits cosmétiques prévoyait sa propre révision par la Commission, en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens, lorsque serait disponible une définition des critères d'identification desdites substances, ou au plus tard le 11 janvier 2015.

Quatre rapporteurs, dont Christophe Rousselle, ont participé à l'élaboration de cet avis. À cette occasion, le CSSC a adopté la définition de l'EFSA, l'autorité européenne de sécurité des aliments, et rappelé qu'il avait considéré comme « sûres » des substances comme le parabène, le triclosan, l'homosalate, les benzophénones, le 4-méthylbenzylidène camphor et le 3-benzylidène camphor, la mélatonine et le cyclométhicone. Le CSSC précisait ensuite qu'en prenant en compte les données in vitro et in vivo , il était en mesure d'évaluer la sécurité des ingrédients soumis à son examen. Le mémorandum se conclut sur un rappel qu'il ne faut jamais perdre de vue : nous n'avons plus le droit de mener des essais sur des animaux. Autrement dit, si des soupçons demeurent sur une substance, elle est écartée. Notre secteur ne peut développer de nouvelles substances pour son propre compte.

Pour conclure, comment sont choisies les substances testées par le CSSC ? Les demandes d'examen émanent en premier lieu des États membres. L'ANSM, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, saisit ainsi souvent le comité, comme ce fut le cas à propos du phénoxyéthanol. La Commission européenne joue également ce rôle et l'adoption du règlement REACH a entraîné le classement d'un grand nombre de substances en tant que « cancérogènes de catégorie 2 », dont l'utilisation doit faire l'objet d'une demande de dérogation. Enfin, les fabricants de matières premières eux-mêmes saisissent le comité, comme ce fut le cas pour le MBBT, un filtre solaire.

Quoi qu'il en soit, mieux vaut acheter ses produits cosmétiques en Europe !

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