B. LA CRÉATION DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « FACÉ »

1. Une nécessaire sécurisation juridique du FACÉ

La gestion du FACÉ par Électricité de France (EDF) faisait échapper ce fonds au contrôle du Parlement et au cadre de la gestion budgétaire et comptable publique , alors même que la contribution prélevée par les distributeurs s'apparentait à une imposition de toute nature et que les aides versées aux collectivités publiques constituaient des dépenses publiques devant à ce titre figurer au budget de l'État. La question se posait donc de la constitutionnalité du statut du FACÉ , puisqu'au regard de l'article 34 de la Constitution « la loi fixe les règles concernant [...] l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature ».

Lors des réunions du conseil du FACÉ de fin 2010 et début 2011, la question de la modernisation de ce fonds et de sa soumission aux principes budgétaires et comptables est débattue. Un groupe de travail technique est alors mis en place pour étudier les évolutions possibles de ce fonds, qui propose la création d'un compte d'affectation spéciale (CAS) lors de la réunion du conseil du FACÉ du 25 octobre 2011.

Cette solution est retenue par le Gouvernement, qui inscrit cette réforme dans le projet de loi de finances rectificative pour 2011. L'article 7 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 vient substituer au fonds d'amortissement des charges d'électrification un compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » reprenant ainsi l'acronyme « FACÉ» .

Ce compte retrace, en recettes, les contributions dues par les gestionnaires des réseaux publics de distribution, et en dépenses, les aides liées au financement d'une partie des coûts des travaux de développement et d'adaptation des réseaux ruraux de distribution publique d'électricité ainsi que les frais liés à la gestion de ces aides.

La création du CAS a permis de sécuriser le dispositif existant sur le plan juridique et comptable en le rendant conforme à la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) 8 ( * ) et en garantissant l'intervention du comptable public lors du maniement des crédits. Chaque année, le Parlement est désormais amené à se prononcer sur le montant des crédits dédiés aux aides aux travaux d'électrification rurale.

2. Un exercice transitoire difficile

Si la création du CAS-FACÉ a constitué un progrès en matière de transparence et de contrôle par le Parlement de l'utilisation des crédits, le transfert de la gestion du FACÉ d'EDF au ministère de l'environnement et la mise en place d'un nouveau circuit d'engagement et de paiement des dépenses a eu pour corolaire un allongement important des délais d'instruction des dossiers et de paiement des aides.

En effet, les services de l'État ont rencontré plusieurs difficultés techniques lors de la mise en place du compte d'affectation spéciale , qui ont été présentées de manière détaillée par notre collègue Frédérique Espagnac dans son rapport relatif aux crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » à l'occasion du projet de loi de finances pour 2013 9 ( * ) .

Ainsi, la mise en place du circuit financier d'inscription des recettes du CAS au sein de l'application Chorus n'est intervenue qu'en mars, ce qui a occasionné un premier retard de paiement des acomptes. Par ailleurs, l'absence d'autorisations d'engagement (AE) enregistrées en comptabilité pour les dépenses restant à payer au titre des programmes de travaux antérieurs à la création du CAS a bloqué temporairement le versement des aides. En conséquence, la circulaire de notification des enveloppes d'aides pour le programme de travaux 2012 n'a été publiée que le 3 mai de cette même année.

Des difficultés sont également survenues s'agissant des pièces justificatives demandées dans les dossiers de demande de subventions, le ministère exigeant une liste plus détaillée qu'auparavant de documents et d'informations relatives aux travaux prévus, ce qui a occasionné de nombreux cas de non-conformité des dossiers.

Afin de lever ces blocages et de permettre de relancer les procédures d'engagement et de paiement, le Gouvernement a réalisé certains aménagements pour permettre davantage de souplesse, en particulier l'extension d'un an de la date limite pour la soumissions des projets exigibles aux aides du CAS-FACÉ au titre de la programmation 2012, ainsi que la possibilité pour les projets de faire l'objet d'un commencement matériel d'exécution dans les deux ans après la notification aux bénéficiaires des enveloppes d'aides 10 ( * ) .

À la fin de l'année 2012, près de 125 millions d'euros de crédits qui n'avaient pas pu être engagés ont été reportés sur l'exercice 2013. Les retards importants d'instruction des demandes de subvention et de paiement ont fini par se résorber au cours de l'année 2013.

La mise en place du CAS-FACÉ, d'effet immédiat au 1 er janvier 2012 sans période de transition, a donc pâti d'une certaine impréparation des services ministériels qui n'avaient pas anticipé des difficultés d'ordre comptable et pas suffisamment informé les autorités concédantes des nouvelles modalités d'examen des dossiers et de versement des aides.


* 8 La gestion des crédits du FACÉ est désormais soumise au respect des obligations fixées par l'article 21 de la LOLF relatif aux comptes d'affectation spéciale.

* 9 Annexe 20 du rapport général n° 148 fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2013.

* 10 Cette possibilité a été confirmée par le décret n° 2013-46 du 14 janvier 2013 relatif aux aides pour l'électrification rurale.

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