B. LA MISE EN PLACE DE LA POLICE D'AGGLOMÉRATION ET LES RÉFORMES SUCCESSIVES DU RENSEIGNEMENT INTÉRIEUR ONT CONFORTÉ LA SPÉCIFICITÉ DE LA PRÉFECTURE DE POLICE

1. La police d'agglomération

Tout d'abord, cette réduction limitée des pouvoirs du préfet de police est à mettre en regard de l'extension de sa compétence territoriale aux départements de la petite couronne.

Comme le rappelle le sociologue M. Fabien Jobard, cette évolution s'explique « en partie » par les difficultés rencontrées lors des émeutes de 2005 et 2007 pour coordonner l'action policière sur l'ensemble de l'agglomération, obtenir et partager rapidement les informations sur la diffusion des émeutes d'une commune à l'autre et acheminer à temps les troupes et les équipements nécessaires au-delà des limites administratives traditionnelles 41 ( * ) .

La réforme de la police d'agglomération , mise en place le 14 septembre 2009, répond ainsi à un double objectif :

- renforcer la coopération entre les services et fluidifier le partage de l'information afin de mieux prendre en compte la dimension interdépartementale des phénomènes de délinquance ;

- mutualiser les moyens humains et matériels afin de renforcer la capacité de projeter rapidement des forces en tout point de l'agglomération et d'éviter de désorganiser les commissariats de banlieue du fait de charges récurrentes ou exceptionnelles liées à l'ordre public.

À cette fin, le préfet de police se voit confier l'exercice des attributions dévolues au représentant de l'État en matière d'ordre public dans les 123 communes de la petite couronne . Par conséquent, un décret 42 ( * ) fusionne les directions départementales de sécurité publique des départements de la petite couronne avec les directions actives de la préfecture de police, plaçant ainsi l'ensemble des forces sous un commandement unique.

2. Les réformes de l'architecture du renseignement intérieur

Par ailleurs, les réformes successives du renseignement intérieur de 2008 et 2013 ont conforté les spécificités de l'organisation policière parisienne.

En effet, si les renseignements généraux de la préfecture de police de Paris (RGPP) sont devenus, en 2008, la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP), ils ont conservé les mêmes missions (information générale, lutte contre le terrorisme et les extrémismes à potentialité violente et lutte contre l'immigration clandestine et le travail illégal des étrangers) .

Cette organisation spécifique n'a pas été remise en cause par la réforme de 2013 , en dépit de la création de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), directement rattachée au ministre de l'intérieur .

Comme pour les autres directions relevant de la police active, le ressort territorial de la DRPP a par ailleurs été élargi par la réforme de la police d'agglomération , qui a retiré à la direction centrale de la sécurité publique (DCSP) la tutelle sur les trois services départementaux d'information générale de la petite couronne parisienne mis en place en 2008 à la suite de la disparition des renseignements généraux (RG).

Au total, la mise en place de la police d'agglomération et les réformes successives du renseignement intérieur ont donc non seulement préservé les particularismes de l'organisation policière à Paris, mais en ont étendu le champ d'application à la petite couronne.

Marquée par l'histoire, la préfecture de police demeure ainsi une institution à part dont les particularismes ne sauraient être justifiés par le seul statut de capitale de la ville de Paris.

Or, cette singularité semble aujourd'hui constituer un frein à la modernisation d'une institution fragilisée .


* 41 Fabien Jobard, « La police en banlieue après les émeutes de 2005 », Mouvements , La découverte , 2015/3 (n° 83), p. 75-86.

* 42 Décret n° 2009-898 du 24 juillet 2009 relatif à la compétence territoriale de certaines directions et de certains services de la préfecture de police.

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