Rapport d'information n° 353 (2016-2017) de M. Philippe DOMINATI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 1er février 2017

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N° 353

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 1 er février 2017

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la préfecture de police de Paris ,

Par M. Philippe DOMINATI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

LES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les principales observations

1. Née en 1800 pour réunir entre les mains d'une seule personne l'ensemble des pouvoirs de police de la capitale, la préfecture de police continue d'occuper une place singulière au sein de l'organisation policière qui ne connaît aucun véritable équivalent en France et à l'étranger.

2. En dépit des réformes intervenues au cours de la période récente, la préfecture de police est aujourd'hui fragilisée par la complexité de son organisation et l'enchevêtrement de ses compétences , susceptibles de se traduire non seulement par une déperdition de moyens mais également par des difficultés de coordination.

3. Dans un contexte marqué par une forte hausse de la délinquance et une diminution importante des effectifs dédiés à la sécurité de proximité (- 13 % entre 2008 et 2015), la préfecture de police est l'objet d'une contestation croissante sur le plan politique .

4. La préfecture de police ne bénéficie plus d'aucun « privilège » par rapport au reste de la police nationale, comme en témoignent l'évolution de ses effectifs (- 7 % entre 2008 et 2015, contre - 5,5 % dans l'ensemble de la police nationale) et le manque d'entretien de son parc immobilier , dont la vétusté nuit aux conditions de travail du personnel et d'accueil du public.

5. La crise que traverse l'institution se traduit également par un certain « désamour » des policiers, qui demandent à quitter l'institution dès la fin de leur obligation minimale de service - phénomène qui a conduit en 2015 à contingenter à mille le nombre de départs de la préfecture de police.

Les principales préconisations

1. Transférer à la DGPN et à la DGSI les compétences du préfet de police en matière de police judiciaire, de police aux frontières et de renseignement, afin de recentrer la préfecture de police sur son coeur de métier.

2. En contrepartie, élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police à l'ensemble du territoire de la métropole , afin de rapprocher le périmètre de la police d'agglomération des bassins de délinquance.

3. Rapprocher la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris du régime de droit commun, afin de permettre la mise en place d'une police municipale de plein exercice .

4. Redéfinir les relations avec les élus et les représentants de l'État , afin de remédier au sentiment d'éloignement lié à la mise en place de la police d'agglomération et de renforcer l'efficacité de l'action publique.

5. Augmenter les dépenses de maintenance immobilière afin de remédier à l'état de délabrement du parc et d'améliorer le cadre de travail des policiers.

6. Modifier les dispositifs visant à fidéliser les personnels afin de renforcer leur caractère incitatif et de tenir compte des durées minimales d'affectation.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Création de Bonaparte fortement inspirée de la lieutenance générale de police d'Ancien régime, la préfecture de police de Paris est née en 1800 afin de « réunir, entre les mains d'un seul homme, tous les pouvoirs de police de la capitale » 1 ( * ) , siège des institutions et point de départ des bouleversements révolutionnaires.

Si, comme le rappellent les historiens Jean-Marc Berlière et René Levy, cette « " institution consulaire" honnie par les républicains » a réussi à survivre « à toutes les révolutions et à tous les changements de régime » pour « occuper - jusqu'à nos jours - une position éminente dans la pyramide administrative et la hiérarchie policière » 2 ( * ) , la préfecture de police semble actuellement traverser une période de doute .

L'institution est tout d'abord confrontée à un mouvement de contestation politique qui traverse les clivages partisans. Dans son livre-programme consacré à la sécurité, l'actuel ministre de la justice Jean-Jacques Urvoas caractérisait ainsi la préfecture de police d'« hérésie juridique qu'il est urgent d'abolir » 3 ( * ) . Plus récemment, notre collègue député Philippe Goujon indiquait dans une tribune que la préfecture de police, « malade », serait devenue « l'ombre d'elle-même » 4 ( * ) .

Cette crise se traduit également par un certain « désamour » des policiers , qui demandent à quitter l'institution dès la fin de leur obligation minimale de service - phénomène qui a conduit en 2015 à contingenter à mille le nombre de départs de la préfecture de police. Ainsi, les policiers « ne choisissent plus de servir à la Préfecture de police (...) et dans ses unités prestigieuses, alors qu'elle était le point de passage obligé pour les carrières d'exception » 5 ( * ) .

Cette insatisfaction a naturellement trouvé un écho au Parlement : alors que la dernière remise en cause des pouvoirs du préfet de police remontait à 1999 6 ( * ) , deux propositions de loi 7 ( * ) visant à revenir sur l'exception parisienne ont été déposées en l'espace de seulement trois ans - l'une d'elles ayant même été adoptée par le Sénat.

Même si le changement proposé est d'une ampleur limitée, le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain 8 ( * ) actuellement en discussion vise également à transférer au maire de Paris certaines des compétences jusqu'alors confiées au préfet de police, afin de recentrer l'institution sur ses missions régaliennes. Cette évolution apparaît d'autant plus remarquable que la période récente avait au contraire été marquée par un renforcement des pouvoirs du préfet de police , qui ont notamment été étendus en 2009 aux départements de la petite couronne dans le cadre de la réforme de la police d'agglomération.

C'est donc précisément pour évaluer la pertinence de ces inquiétudes que la commission des finances a confié à votre rapporteur spécial une mission de contrôle sur la préfecture de police de Paris. Les enjeux financiers sont en effet considérables pour le programme « Police nationale », qui représente 98 % des 3,15 milliards d'euros de crédits relevant du budget de l'État exécutés par le préfet de police en 2014.

Ce choix apparaît d'autant plus légitime que l'institution a paradoxalement été très peu étudiée par les parlementaires, en dépit de son importance dans l'organisation administrative et policière. Ainsi, les travaux de contrôle récents n'évoquent son action qu'à titre incident, dans le cadre de missions plus larges portant par exemple sur le renseignement 9 ( * ) ou l'ordre public 10 ( * ) . La dernière étude transversale sur la préfecture de police réalisée par une institution indépendante de l'exécutif remonte ainsi au contrôle effectué par la Cour des comptes en 1998 11 ( * ) .

PREMIÈRE PARTIE - UNE INSTITUTION MARQUÉE PAR L'HISTOIRE DONT LES PARTICULARISMES DEMEURENT IMPORTANTS

I. UNE INSTITUTION À PART

A. UNE ORGANISATION ADMINISTRATIVE ET BUDGÉTAIRE SINGULIÈRE LIÉE À LA CONCENTRATION PAR LE PRÉFET DE POLICE DE MULTIPLES POUVOIRS

1. Des compétences multiples
a) À Paris

Désigné par le pouvoir exécutif, le préfet de police se singularise dès l'origine par un cumul d'attributs préfectoraux et municipaux, définis par la loi du 28 pluviôse an VIII et l'arrêté du 12 messidor an VIII. Ainsi, la ville de Paris , « dépouillé de son maire, en subit deux, non issus de l'élection » 12 ( * ) .

À Paris, le préfet de police continue aujourd'hui d'intervenir à la fois en qualité de représentant de l'État et d'autorité municipale, cumulant « approximativement, en matière de police, les pouvoirs d'un préfet et d'un maire » 13 ( * ) .

En effet, l'article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales prévoit la compétence du préfet de police de Paris - et non du maire 14 ( * ) - s'agissant de la police générale . De ce fait, le maire de Paris ne dispose que de compétences d'attribution dans certaines matières limitativement énumérées par le code général des collectivités territoriales.

En outre, comme le rappelle notre collègue Alain Marc, le préfet de police de Paris détient « plus de cinquante polices spéciales, certaines en lieu et place du maire - comme la police des édifices menaçant ruine (article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation) ou celle des animaux dangereux et errants (article L. 211-28 du code rural) -, d'autres en lieu et place du préfet de département - comme l'admission en soins psychiatriques de personnes souffrant de troubles mentaux (article L. 3213-10 du code de la santé publique) ou la fermeture d'établissements de vente à emporter de boissons alcoolisées (article L. 332-1 du code de la sécurité intérieure) » 15 ( * ) .

Sur le plan juridique, ce bloc de compétences du préfet de police a été jugé conforme au principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales par le Conseil constitutionnel 16 ( * ) .

b) Au-delà de la ville de Paris

Au-delà de la ville de Paris, le préfet de police exerce également de nombreuses compétences dérogatoires au droit commun sur différents territoires .

S'il serait vain de prétendre à l'exhaustivité, il doit être noté que le préfet de police est responsable de la sécurité civile à Paris et dans les départements des Hauts-de-Seine (92), de la Seine-Saint-Denis (93) et du Val-de-Marne (94) 17 ( * ) . Exerçant les compétences habituellement confiées aux services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) en matière de lutte contre l'incendie, il dispose à cet effet de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) .

Par ailleurs, il détient au niveau de la zone de défense et de sécurité les attributions classiques d'un préfet de zone (défense non militaire, sécurité civile et sanitaire notamment), en tant que préfet de la zone de défense de Paris 18 ( * ) , ainsi que certaines attributions régionales complémentaires, telles que la direction de l'action des services de police et de gendarmerie sur les réseaux de transport en commun par voie ferrée 19 ( * ) .

Mais les compétences du préfet de police ne recoupent pas nécessairement les limites administratives usuelles. À titre d'illustration, il est chargé d'édicter la réglementation applicable aux taxis et véhicules de remise « sur le territoire des quatre-vingt communes composant l'ancien département de la Seine et, depuis 1974, de six "parties de communes" situées sur l'emprise des aéroports de Roissy et d'Orly » 20 ( * ) .

Les compétences du préfet de police apparaissent ainsi relever davantage d'une lente sédimentation historique que d'une construction rationnelle. Il n'est dès lors pas étonnant qu'à cet enchevêtrement des compétences réponde une organisation administrative et budgétaire singulière.

2. Une organisation singulière
a) Sur le plan administratif

Au niveau administratif, la préfecture de police est organisée principalement autour de dix directions et services , qui peuvent être regroupés en trois ensembles en fonction de leur ressort territorial principal.

Ainsi, deux directions exercent, essentiellement à Paris, des missions relevant de la police administrative , qu'elle soit étatique ou municipale :

- la direction de la police générale , chargée de la délivrance des titres régaliens, de l'exercice de certaines polices spéciales (ex : armes, agents immobiliers, interdiction de stade), de la gestion des associations et de l'administration des étrangers ;

- la direction des transports et de la protection du public, chargée de la prévention et de la lutte contre certains risques et nuisances (ex : insalubrité, nuisances sonores et olfactives, pollution, intoxications alimentaires, risques incendies, infractions liées à la salubrité).

En complément, cinq directions exercent, principalement à Paris et dans la petite couronne, des compétences relevant de la sécurité intérieure :

- la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP) , principalement chargée de la sécurité publique ;

- la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) , chargée du maintien de l'ordre public, de la protection des institutions et des représentations diplomatiques, de la sécurité des déplacements et séjours officiels et de la circulation ;

- la direction régionale de la police judiciaire , chargée des affaires relevant de la police judiciaire en application des différents protocoles signés avec l'autorité judiciaire ;

- la direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) , chargée de l'information générale, de la lutte contre le terrorisme et les extrémismes à potentialité violente ainsi que de la lutte contre l'immigration clandestine et le travail illégal des étrangers ;

- la direction opérationnelle des services techniques et logistiques (DOSTEL), qui a pour mission de répondre à l'ensemble des besoins en équipements des directions de la préfecture de police ainsi que des services de police de la petite couronne.

Enfin, trois directions et services sont chargées de fonctions dites « support », y compris au niveau zonal depuis la mise en place du secrétariat général pour l'administration du ministère de l'intérieur (SGAMI) au 1 er janvier 2016 :

- la direction des ressources humaines ;

- la direction des finances, de la commande publique et de la performance ;

- le service des affaires immobilières .

Il peut être noté que l'institution comporte également d'autres structures aux missions plus spécifiques telles que la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), unité militaire chargée du secours et de la défense contre l'incendie, ou encore le laboratoire central, service commun chargé à Paris et dans la petite couronne de missions tant municipales (ex : protection de l'environnement) qu'étatiques (ex : déminage).

À cette pluralité de ressorts territoriaux correspond une diversité des statuts des personnels , qui peuvent relever de la fonction publique d'État - tant civile que militaire - mais aussi des administrations parisiennes.

Répartition des effectifs de la préfecture de police en 2015

(en ETP)

Corps

Effectifs

Fonction publique « État »

Fonction publique civile

Police nationale

27 428

Intérieur

2 747

Fonction publique militaire

BSPP

8 168

Total « État »

-

38 343

Fonction publique territoriale

Secrétaire administratif

-

422

Adjoint administratif

-

1 802

Agent de surveillance de paris

-

1 705

Autres corps

-

1 657

Total « administrations parisiennes »

-

5 586

Total « préfecture de police »

43 929

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

b) Sur le plan budgétaire

Au niveau budgétaire, la diversité des missions exercées par la préfecture de police se traduit également par une organisation dérogatoire au droit commun, qui se singularise par son dualisme . En effet, par application de l'article L. 2512-25 du code général des collectivités territoriales, les recettes et les dépenses relevant à titre principal de la police active sont inscrites au budget de l'État. À l'inverse, les recettes et les dépenses des services d'intérêt local sont inscrites au budget de la commune de Paris. Le financement de la préfecture de police repose ainsi sur deux budgets distincts .

S'agissant des crédits relevant du budget de l'État , le préfet de police exécute des crédits de paiement relevant de onze programmes .

Crédits de paiement relevant du budget de l'État exécutés
par le préfet de police en 2014

(en millions d'euros)

Programme

Mission

Crédits

Coordination du travail du Gouvernement

Direction de l'action du Gouvernement

1,58

Gendarmerie nationale

Sécurité

21,76

Intervention des services opérationnels

Sécurité civile

5,75

Police nationale

Sécurité

3 092,85

Sécurité et circulation routières

Écologie, développement et aménagement durables

0,33

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

Administration générale et territoriale de l'État

18,60

Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer

Écologie, développement et aménagement durables

0,05

Vie politique, culturelle et associative

Administration générale et territoriale de l'État

0,0002

Immigration et asile

Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

10,84

Entretien des bâtiments de l'État

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

1,62

Contribution aux dépenses immobilières

Gestion du patrimoine immobilier de l'État

0,21

Total

3 153,59

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire budgétaire)

Le programme « Police nationale » occupe toutefois une place prépondérante : il représente 98 % des crédits exécutés .

Crédits de paiement relevant du programme « Police nationale »
mis à la disposition de la préfecture de police en 2015

(en millions d'euros)

Exécution

Dépenses de personnel

2 820

Dépenses de fonctionnement

170

Dépenses d'investissement

85

Contribution au budget spécial

29

Total

3 103

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

Concernant le budget spécial de la ville de Paris, il s'agit d'un budget communal principal « dérogatoire au droit commun de la décentralisation, le maire de Paris n'étant, en l'espèce, que le président de l'assemblée délibérante » 21 ( * ) . En effet, si le budget spécial est voté par le conseil de Paris en qualité d'assemblée délibérante, c'est le préfet de police qui en est l'ordonnateur et l'organe exécutif.

Sur le plan du financement, il est essentiellement alimenté par des participations de la ville de Paris, de l'État, des communes et des départements de la petite couronne.

Évolution du budget spécial entre 2014 et 2015

(en millions d'euros)

2014

2015

État

123,5

120,4

Ville de Paris

290,7

285,1

Départements

105,8

105,1

Communes

69,5

69,3

Produits divers

69,1

75

Total

658,6

654,9

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

Les modalités de financement du budget spécial sont particulièrement complexes et varient selon les services . À titre d'illustration, les dépenses inscrites à la section de fonctionnement du budget spécial primitif pour 2016 concernent principalement :

- la BSPP , qui fait l'objet d'un financement de l'État et des collectivités territoriales de petite couronne, pour un total de 361 millions d'euros ;

- les « autres services parisiens » 22 ( * ) , intégralement à la charge de la ville de Paris, pour un total de 151,7 millions d'euros ;

- les dépenses du service de contrôle du stationnement, intégralement à la charge de la ville de Paris, pour un total de 73,7 millions d'euros ;

- les services logistiques (ensembles immobiliers, mobilier, service du matériel, imprimerie, informatique et, pour partie, administration générale), financés par les collectivités territoriales à hauteur de 43,1 millions d'euros ;

- les quatre services dits « communs » à la ville de Paris et aux trois départements de la petite couronne (service des objets trouvés, institut médico-légal, laboratoire central hors service des explosifs et laboratoire central des services vétérinaires), financés à hauteur 13,5 millions d'euros ;

- les services dits « financés par l'État » (laboratoire de toxicologie, infirmerie psychiatrique, service des explosifs du laboratoire central), pour un total de 11,7 millions d'euros ;

- le service interdépartemental de la protection civile , service dit « mixte » faisant l'objet d'un financement commun par l'État et la ville de Paris, pour un total de 1,4 million d'euros.

Cette singularité de la préfecture de police de Paris tant sur le plan administratif que budgétaire est confortée par la place atypique qu'elle occupe au sein de la police nationale .

B. UNE PLACE ATYPIQUE AU SEIN DE LA POLICE NATIONALE QUI NE CONNAÎT AUCUN ÉQUIVALENT EN FRANCE ET À L'ÉTRANGER

1. Une place atypique au sein de l'organisation policière

Historiquement, l'organisation policière française a longtemps été caractérisée par un dualisme inégalitaire : non seulement la préfecture de police est restée indépendante de l'institution chargée de la police sur le plan national, mais elle a également bénéficié d'une forme de prééminence.

Ce dualisme inégalitaire s'explique avant tout par la difficile émergence d'une structure chargée de façon autonome et pérenne de la police au niveau national 23 ( * ) . Alors que l'existence de la préfecture de police n'a jamais été remise en cause depuis sa création en 1800, le ministère de la police est supprimé à quatre reprises entre 1796 et 1853. Si la direction de la sûreté générale, créée en 1853, connaît une existence plus durable, elle est subordonnée à la préfecture de police de 1859 à 1870 puis de 1874 à 1876 et rétrogradée au rang de simple sous-direction de 1881 à 1882 et de 1899 à 1903.

Par la suite, si la préfecture de police et la sûreté, devenue « nationale » en 1934, demeurent indépendantes, il subsiste entre les deux institutions un écart important sur le plan des moyens matériels et humains. Comme le soulignent Jean-Marc Berlière et René Lévy, « face à la préfecture richement dotée, aux effectifs nombreux et spécialisés, l'indigence de la sûreté, pourtant supposée diriger toutes les polices de France, semble caricaturale » 24 ( * ) .

À cet égard, si la loi Frey de 1966 25 ( * ) , conséquence directe de l'affaire « Ben Barka », constitue un indéniable point de rupture avec la mise en place de la police nationale, l'unification est imparfaite : elle concerne essentiellement les statuts des personnels, et non l'organisation administrative.

De ce fait, la préfecture de police conserve aujourd'hui une place à part au sein de la police nationale , caractérisée par l'absence de lien hiérarchique entre le préfet de police et le directeur général de la police nationale.

En effet, l'article 1 er de l'arrêté du 12 messidor an VIII dispose que le préfet de police exerce ses fonctions « sous l'autorité immédiate des ministres ». Nommé par décret du président de la République en Conseil des ministres, le préfet de police est ainsi placé sous l'autorité directe du ministre de l'intérieur, et non du directeur général de la police nationale .

Concrètement, le préfet de police s'entretient quotidiennement avec le ministre de l'intérieur ou son directeur de cabinet . Comme l'a rappelé Jean-Marc Falcone lors de son audition, le directeur général de la police nationale n'est destinataire des informations transmises par le préfet de police que lorsqu'il existe un impact potentiel sur sa zone de compétence ou en gestion. Par ailleurs, ce dernier ne dispose pas d'une vision consolidée du budget de la préfecture de police, dans la mesure où il n'a aucun droit de regard sur le budget spécial.

Cette spécificité apparaît directement liée à la multiplicité des pouvoirs du préfet de police . Interrogée à ce sujet, la préfecture de police justifie en effet l'absence de lien hiérarchique entre les deux autorités par le « large panel de compétences » du préfet de police - et plus spécifiquement par son statut de représentant de l'État. Le préfet de police étant au « même niveau que le préfet de zone de défense et de sécurité dans la zone, le préfet de région dans la région et le préfet de département dans le département », il ne saurait être placé sous l'autorité du directeur général de la police nationale, « à l'instar de tous les autres préfets territoriaux » 26 ( * ) .

À cet égard, le poste de préfet de police semble demeurer plus attractif que celui de directeur général de la police nationale. Ainsi, « lorsque le préfet Michel Gaudin, directeur général de la police nationale depuis 2002, est nommé préfet de police de 2007 à 2012, il s'agit d'une promotion » 27 ( * ) . La nomination de Pierre Verbrugghe en 1988 relève du même schéma.

La singularité de cette organisation apparaît d'autant plus marquée qu'elle ne connaît aucun équivalent en France et à l'étranger.

2. Une organisation policière sans équivalent en France et à l'étranger

En France, la volonté de mener « une action forte et coordonnée » 28 ( * ) en matière de sécurité intérieure dans les Bouches-du-Rhône a conduit en 2012 à la création d'un préfet de police de « plein exercice » , en remplacement du traditionnel préfet délégué pour la défense et la sécurité, rattaché au préfet de département.

Placé sous l'autorité directe du ministère de l'intérieur, il dispose de compétences propres , définies par les textes réglementaires et normalement dévolues au préfet de département 29 ( * ) . En particulier, il a la charge de l'ordre public dans le département des Bouches-du-Rhône. À ce titre, il a « autorité sur les forces de police et les unités de gendarmerie », « coordonne leur action » et assure certaines missions de police administrative concourant à la sécurité intérieure normalement dévolues au préfet de département 30 ( * ) .

Cette création contemporaine, dont les commentateurs n'ont pas manqué de souligner les points de convergence avec le modèle parisien 31 ( * ) , permet en réalité de mesurer à quel point ce dernier demeure singulier.

Tout d'abord, l'autorité du préfet de police des Bouches-du-Rhône sur les forces de police et de gendarmerie est relativement faible . En effet, son autorité est de nature fonctionnelle, et non hiérarchique. Le préfet de police des Bouches-du-Rhône ne dispose d'aucun pouvoir s'agissant des notations et des mutations des agents. Les différents directeurs continuent de dépendre hiérarchiquement de leur direction centrale. Leur autonomie est renforcée par leur périmètre d'intervention, aujourd'hui zonal, qui contraste avec celui de préfet de police, limité au seul département des Bouches-du-Rhône.

En outre, les compétences du préfet de police des Bouches-du-Rhône ne sont pas comparables avec celles de son homologue parisien . Sur le plan policier, il ne dispose pas d'une compétence générale mais de compétences d'attribution limitativement définies. En pratique, il ne cumule pas les pouvoirs d'un préfet et d'un maire. Sur le plan administratif, ses attributions sont quasi inexistantes, l'objectif étant de faire du préfet de police des Bouches du Rhône « un chef de la police à temps plein », concentré sur l'opérationnel. Aussi, il ne s'occupe pas de la délivrance des titres régaliens, de l'immobilier ou encore des ressources humaines, contrairement au préfet de police de Paris.

De ce fait, les effectifs directement placés sous l'autorité hiérarchique du préfet de police se limitent à une quarantaine d'agents - soit une structure se rapprochant d'un simple cabinet qui ne saurait être comparée avec la préfecture de police de Paris.

Un constat similaire peut être dressé s'agissant de l'organisation policière des capitales étrangères .

En l'espèce, les comparaisons internationales sont particulièrement intéressantes dans la mesure où le statut de capitale de la ville de Paris est régulièrement avancé dans le débat public pour justifier les particularismes de la préfecture de police.

À titre d'exemple, si le Conseil d'État a récemment jugé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les pouvoirs étendus du préfet de police en matière de circulation et de stationnement, c'est parce qu'il estimait que ces dispositions sont « justifiées par la situation particulière, au regard de la sécurité des personnes et des biens et du maintien de l'ordre public, de la capitale et de certains secteurs de son territoire, notamment en raison de la présence du siège des institutions de la République et des représentations diplomatiques » et ne peuvent donc être regardées comme « introduisant, entre la ville de Paris et les autres communes ou entre les habitants de la capitale, des différences de traitement contraires à la Constitution » 32 ( * ) .

Or, les comparaisons internationales s'accordent pour confirmer que, d'une part, l'organisation policière de nombreuses capitales étrangères ne présente aucun caractère dérogatoire et que, d'autre part, les particularismes, lorsqu'ils existent, n'ont pas l'ampleur de ceux observés à la préfecture de police.

Dès 1990, notre regretté collègue Lucien Lanier, rapporteur au nom de la commission des lois, relevait ainsi « qu'il résulte d'une étude effectuée par la cellule de législation comparée du service des affaires européennes du Sénat (...) que la situation extrêmement dérogatoire au droit commun qui est celle du maire de Paris en matière de police constitue une exception » 33 ( * ) .

Plus récemment, le professeur Olivier Renaudie indiquait en conclusion de son étude de droit comparé « qu'il n'existe pas d'institution équivalente à la préfecture de police » dans les principales capitales étrangères et que, parmi les capitales présentant un particularisme policier, « Paris est assurément celle qui, par le biais de la préfecture de police, présente l'originalité statutaire la plus prononcée » 34 ( * ) .

Typologie des principales capitales étrangères selon leur organisation policière

Absence de particularisme

Existence d'un régime spécifique

Périmètre restreint sur lequel l'État fédéral est compétent

Conditions de nomination dérogatoires du chef de la police

Pouvoirs étendus du chef de la police

Bruxelles

X

Berlin

X

Londres

X

X

Madrid

X

Tokyo

X

Washington

X

Source : commission des finances du Sénat (à partir des informations transmises par Olivier Renaudie à la suite de son audition)

Ainsi, même la comparaison avec la police métropolitaine de Londres, souvent avancée pour relativiser les particularismes de la préfecture de police de Paris 35 ( * ) , doit être nuancée dans la mesure où :

- la police métropolitaine exerce ses compétences sous la responsabilité d'une agence dirigée par le maire de Londres et majoritairement composée d'élus locaux (qui prépare et contrôle le budget et fixe les priorités ainsi que les objectifs des forces de police) 36 ( * ) ;

- les compétences de la police métropolitaine sont nettement moins étendues (à titre d'exemple, elles ne comprennent ni le secours et la défense contre l'incendie, ni le stationnement et la circulation) ;

- la police métropolitaine exerce ses compétences sur un territoire unique (le Grand Londres) ;

- le ressort territorial de la police métropolitaine ne recouvre pas l'ensemble de la ville de Londres (en raison du régime particulier prévu pour la City ) .

Finalement, il est loisible de se demander si la singularité de la préfecture de police ne tiendrait pas « avant tout à la persistance d'une conception de l'État (...) héritière d'un modèle d'administration marqué par l'importance accordée au centre » 37 ( * ) .

À cet égard, force est de constater que si la création de la fonction de maire de Londres par le Greater London Authority Act du 11 novembre 1999 a immédiatement conduit à une réforme d'ampleur de l'organisation policière de la capitale anglaise visant à circonscrire ses particularismes, tel n'a pas été le cas à Paris.

II. DES RÉFORMES RÉCENTES QUI N'ONT PAS REMIS EN CAUSE LES SPÉCIFICITÉS DE L'INSTITUTION

A. LE RENFORCEMENT DES COMPÉTENCES DU MAIRE DE PARIS N'A QUE MARGINALEMENT ATTÉNUÉ LE CARACTÈRE DÉROGATOIRE DES POUVOIRS DE POLICE RELEVANT DU PRÉFET DE POLICE

1. Des transferts limités

En dépit de son élection au suffrage universel depuis la loi portant réforme du régime administratif de la ville de Paris de 1975 38 ( * ) , le maire de Paris n'a vu ses pouvoirs de police s'accroître que tardivement et de façon particulièrement limitée, par trois lois successives 39 ( * ) .

Tout d'abord, la loi n° 86-1308 du 29 décembre 1986 portant adaptation du régime administratif et financier de la ville de Paris confie au maire :

- la police de la salubrité sur la voie publique ;

- la police de la conservation des dépendances domaniales incorporées au domaine public de la ville de Paris (voirie, parcs, jardins) ;

- le maintien du bon ordre dans les foires et marchés ;

- la délivrance des permissions et concessions d'emplacement sur la voie publique et des permis de stationnement aux petits marchands.

Par ailleurs, la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité et la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles transfèrent au maire de Paris la police des troubles de voisinage et la compétence générale en matière de circulation et de stationnement .

2. Des transferts encadrés

Les pouvoirs de police du maire de Paris apparaissent d'autant plus limités qu'ils sont souvent partagés ou assortis de modalités d'exercice contraignantes réservant au préfet de police certaines prérogatives.

Ainsi, en matière de circulation et de stationnement 40 ( * ) , le préfet de police reste compétent pour des motifs liés à l'ordre public, à la sécurité des personnes et des biens ou à la protection des institutions et des représentations diplomatiques. Une compétence temporaire du préfet de police est également prévue en c as de manifestation de voie publique à caractère revendicatif, festif, sportif ou culturel. Enfin, sur les axes permettant d'assurer la continuité des itinéraires principaux dans l'agglomération parisienne et la région, les règles de circulation et de stationnement sont déterminées par le maire de Paris après avis conforme du préfet de police.

Au total, si le renforcement des compétences du maire de Paris constitue une évolution notable, force est de constater qu'il n'a que marginalement atténué le caractère dérogatoire des pouvoirs de police relevant du préfet de police.

Par ailleurs, cette évolution a été contrebalancée par plusieurs réformes portant sur l'organisation policière, qui ont conforté la spécificité de la préfecture de police et étendu son ressort territorial.

B. LA MISE EN PLACE DE LA POLICE D'AGGLOMÉRATION ET LES RÉFORMES SUCCESSIVES DU RENSEIGNEMENT INTÉRIEUR ONT CONFORTÉ LA SPÉCIFICITÉ DE LA PRÉFECTURE DE POLICE

1. La police d'agglomération

Tout d'abord, cette réduction limitée des pouvoirs du préfet de police est à mettre en regard de l'extension de sa compétence territoriale aux départements de la petite couronne.

Comme le rappelle le sociologue M. Fabien Jobard, cette évolution s'explique « en partie » par les difficultés rencontrées lors des émeutes de 2005 et 2007 pour coordonner l'action policière sur l'ensemble de l'agglomération, obtenir et partager rapidement les informations sur la diffusion des émeutes d'une commune à l'autre et acheminer à temps les troupes et les équipements nécessaires au-delà des limites administratives traditionnelles 41 ( * ) .

La réforme de la police d'agglomération , mise en place le 14 septembre 2009, répond ainsi à un double objectif :

- renforcer la coopération entre les services et fluidifier le partage de l'information afin de mieux prendre en compte la dimension interdépartementale des phénomènes de délinquance ;

- mutualiser les moyens humains et matériels afin de renforcer la capacité de projeter rapidement des forces en tout point de l'agglomération et d'éviter de désorganiser les commissariats de banlieue du fait de charges récurrentes ou exceptionnelles liées à l'ordre public.

À cette fin, le préfet de police se voit confier l'exercice des attributions dévolues au représentant de l'État en matière d'ordre public dans les 123 communes de la petite couronne . Par conséquent, un décret 42 ( * ) fusionne les directions départementales de sécurité publique des départements de la petite couronne avec les directions actives de la préfecture de police, plaçant ainsi l'ensemble des forces sous un commandement unique.

2. Les réformes de l'architecture du renseignement intérieur

Par ailleurs, les réformes successives du renseignement intérieur de 2008 et 2013 ont conforté les spécificités de l'organisation policière parisienne.

En effet, si les renseignements généraux de la préfecture de police de Paris (RGPP) sont devenus, en 2008, la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP), ils ont conservé les mêmes missions (information générale, lutte contre le terrorisme et les extrémismes à potentialité violente et lutte contre l'immigration clandestine et le travail illégal des étrangers) .

Cette organisation spécifique n'a pas été remise en cause par la réforme de 2013 , en dépit de la création de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), directement rattachée au ministre de l'intérieur .

Comme pour les autres directions relevant de la police active, le ressort territorial de la DRPP a par ailleurs été élargi par la réforme de la police d'agglomération , qui a retiré à la direction centrale de la sécurité publique (DCSP) la tutelle sur les trois services départementaux d'information générale de la petite couronne parisienne mis en place en 2008 à la suite de la disparition des renseignements généraux (RG).

Au total, la mise en place de la police d'agglomération et les réformes successives du renseignement intérieur ont donc non seulement préservé les particularismes de l'organisation policière à Paris, mais en ont étendu le champ d'application à la petite couronne.

Marquée par l'histoire, la préfecture de police demeure ainsi une institution à part dont les particularismes ne sauraient être justifiés par le seul statut de capitale de la ville de Paris.

Or, cette singularité semble aujourd'hui constituer un frein à la modernisation d'une institution fragilisée .

DEUXIÈME PARTIE - UNE INSTITUTION AUJOURD'HUI FRAGILISÉE

I. UNE ORGANISATION INADAPTÉE

A. UNE ORGANISATION ADMINISTRATIVE TROP COMPLEXE POUR ÊTRE EFFICACE

1. L'organisation interne

En dépit des réformes intervenues au cours des dernières années, la préfecture de police est aujourd'hui fragilisée par une organisation interne trop complexe pour être véritablement efficace .

En effet, comme l'observe le professeur Olivier Renaudie, « les missions et compétences de la préfecture de police apparaissent particulièrement enchevêtrées, aussi bien sur le plan matériel que territorial : loin de se présenter sous la forme d'un jardin à la française (...) elles semblent imbriquées les unes dans les autres de façon parfois si désordonnée qu'il est difficile de s'y retrouver » 43 ( * ) .

À titre d'exemple, plusieurs rapports parlementaires 44 ( * ) se sont récemment étonnés du fait que la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP) garde une compétence en matière de lutte contre l'immigration clandestine et le travail illégal , en complément des compétences dévolues en la matière à la DSPAP - et ce alors même que sur le reste du territoire la police aux frontières s'occupe tant du traitement de masse des interpellations d'étrangers en situation irrégulière que de l'investigation en matière de filières et de travail illégal.

Observant que « l'exercice de cette mission relève d'un accident de l'histoire : en 1973, la police de l'air et des frontières est détachée de la direction centrale des renseignements généraux (DCRG), à l'exception de la région parisienne », notre ancien collègue Jean-Jacques Urvoas en concluait ainsi que « le bon sens voudrait que cette compétence ainsi que ces fonctionnaires quittent le giron de la DRPR pour rejoindre la DCPAF, dont c'est le métier » 45 ( * ) .

Lors de ses déplacements, votre rapporteur spécial a par ailleurs été surpris par l'existence de trois salles de commandement à la préfecture de police.

Ce constat est également valable s'agissant des multiples ressorts géographiques de certaines des directions de la préfecture de police.

En l'espèce, si le fait que « les missions dévolues aux différents services de la préfecture de police s'exercent, comme c'est le cas des compétences du préfet de police, sur un territoire variable » n'a « rien d'étonnant. (...) Ce qui l'est davantage, c'est qu'il n'est pas toujours aisé de saisir la rationalité de l'ensemble ainsi formé » 46 ( * ) .

À titre d'exemple, le rapport d'évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne remis en mars 2016 relève que les services de la préfecture de police gérant les déplacements ont tous une compétence régionale et demeurent pourtant « disséminés entre trois directions » dont le ressort territorial principal est limité à la petite couronne 47 ( * ) :

- la DSPAP, avec la sous-direction régionale de la police des transports ;

- la DOPC, avec la sous-direction régionale de la circulation et de la sécurité routière ;

- la DOSTEL, avec la brigade fluviale et l'unité de contrôle technique de lutte contre la pollution.

Or, cet enchevêtrement des missions et des périmètres d'action peut non seulement se traduire par des difficultés opérationnelles et un manque de coordination, mais également engendrer des risques non négligeables tant sur le plan budgétaire que juridique pour l'État .

Ainsi, en matière immobilière, certaines missions relevant clairement d'activités régaliennes sont exercées dans des bâtiments propriétés de la ville de Paris, sans garantie sur le plan juridique . Le laboratoire central occupe par exemple environ 4 300 mètres carrés sur trois sites propriétés de la ville de Paris, sans que ces derniers ne fassent l'objet d'une convention d'occupation ni ne figurent dans le décret de 1967 48 ( * ) organisant le transfert des biens des anciens départements de la Seine et de la Seine-et-Oise vers les nouveaux départements composant la région parisienne. Aussi, dans un contexte marqué par la volonté de la ville de Paris d'utiliser l'un des sites pour y aménager des logements, la préfecture de police se trouve dans l'obligation de trouver une « solution pérenne et clarifiée » qui permettra de « sécuriser le statut juridique de l'occupation des emprises » 49 ( * ) .

2. L'articulation avec la direction générale de la police nationale

Au-delà de la complexité de l'organisation interne de la préfecture de police, l'efficacité de l'action administrative de l'État est également fragilisée par l'éclatement de l'organisation policière , lié à l'absence de hiérarchie entre le préfet de police de Paris et le directeur général de la police nationale (DGPN).

Alors que la gendarmerie est caractérisée par l'unité de sa direction, trois personnalités coexistent au sommet de la hiérarchie policière : le DGPN, le préfet de police et le DGSI.

Or, l'absence d'unité de l'organisation policière est susceptible de se traduire non seulement par une déperdition de moyens mais également par des difficultés de coordination - voire des conflits - entre les services.

C'est d'ailleurs précisément pour remédier à cette dernière difficulté qu'une unification de l'organisation policière avait été envisagée en 1966 à la suite de l'affaire « Ben Barka ».

À cet égard, l'exemple du renseignement démontre que le risque de « guerre des polices » n'est pas seulement théorique. René Bailly, directeur du renseignement de la préfecture de police, a ainsi admis devant la commission d'enquête relative aux moyens mis en oeuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 avoir été nommé en 2009 pour « rétablir la circulation » entre l'île de la Cité [la DRPP] et « le reste du monde » 50 ( * ) .

Si des progrès ont indéniablement été réalisés en la matière, avec la mise en place de nombreux mécanismes de coordination entre la DRPP et les autres services concourant au renseignement intérieur, le rapport d'évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne remis en 2016 constate toutefois que « le partage du renseignement constitue toujours une interrogation » 51 ( * ) .

À titre d'exemple, la mission relève que :

- la DRPP ne participe pas à certaines réunions zonales organisées par la DGSI avec les départements de la petite et grande couronne ;

- la relation entre la DRPP et le service central du renseignement territorial « apparaît, dans la pratique, améliorable », dans la mesure où « la fluidité de la transmission de l'information n'est pas toujours avérée ».

Le risque de conflit apparaît aujourd'hui d'autant plus grand que l'organisation administrative semble en contradiction croissante avec l'organisation budgétaire.

En effet, si le préfet de police n'est pas sous l'autorité hiérarchique du DGPN, il ne dispose que d'une autonomie budgétaire très limitée vis-à-vis de ce dernier dans la mesure où, comme le rappelle la préfecture de police, l'architecture budgétaire du programme « Police nationale » fait du préfet de police un simple responsable de budget opérationnel de programme (BOP), « soumis en ce sens aux décisions du responsable de programme, le DGPN, qui définit les enveloppes et les modalités de gestion » 52 ( * ) .

La plupart des dépenses n'étant pas déconcentrées, elles relèvent ainsi directement de la direction générale de la police nationale , à l'instar des dépenses de personnel (le DGPN affecte à la préfecture de police un schéma d'emplois), de l'essentiel les dépenses immobilières (à l'exception des loyers et des travaux d'entretien mineurs) et de la dotation en véhicules.

En réalité, le préfet de police n'a véritablement la « main » que sur les crédits relevant du BOP zonal n° 2 , qui s'élèvent en 2016 à 167 millions d'euros en crédits de paiement, soit 5 % des crédits qu'il exécute .

Répartition prévisionnelle des crédits du BOP zonal n° 2 en 2016

(en millions d'euros)

Nature de la dépense

Montant

Fonctionnement courant

10,6

Moyens mobiles

20,7

Équipement

3,8

Systèmes d'information et de communication

3,4

Immobilier

81,6

Remboursements au budget spécial

27,9

Cartes de circulation

18,6

Autres

0,5

Total

167,1

Source : commission des finances du Sénat (d'après les informations recueillies lors des auditions)

En outre, avec la fusion des secrétariats généraux pour l'administration de la police (SGAP) et la mise en place du SGAMI, ce BOP rassemble désormais les crédits dédiés à l'équipement et au fonctionnement des services de police de l'ensemble de la zone - y compris ceux situés en grande couronne.

L'organisation administrative apparaît donc doublement contradictoire au regard de l'organisation budgétaire :

- le préfet de police n'est pas placé sous l'autorité hiérarchique du DGPN mais ce dernier détermine son budget et ses effectifs en tant que responsable de programme ;

- les services de police de grande couronne sont placés sous l'autorité hiérarchique du DGPN mais dépendent du préfet de police pour leurs crédits d'équipement et de fonctionnement.

Si la majorité des acteurs rencontrés s'accordent sur le fait que ce hiatus n'a jusqu'à présent jamais conduit à de graves conflits entre le DGPN et le préfet de police, votre rapporteur spécial observe que cela n'est nullement garanti par l'organisation administrative et dépend entièrement de la bonne intelligence des hommes.

B. UNE ORGANISATION BUDGÉTAIRE INÉQUITABLE ET SOURCE DE DIFFICULTÉS POUR LES SERVICES

1. Un manque d'association des collectivités territoriales de la petite couronne

Le caractère inéquitable de l'organisation budgétaire de la préfecture de police tient d'abord au manque d'association des collectivités territoriales de la petite couronne.

En effet, l'organisation budgétaire actuelle conduit à faire voter le seul conseil de Paris sur un budget auquel la ville de Paris ne contribue pourtant de que façon minoritaire (44 %).

Évolution du budget spécial entre 2014 et 2015

(en millions d'euros, en %)

2015

Part dans le financement total

État

120,4

18 %

Ville de Paris

285,1

44 %

Départements

105,1

16 %

Communes

69,3

11 %

Produits divers

75

11 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

Une concertation est prévue pour les seules dispositions du budget spécial qui se rapportent au financement de la BSPP , dans le cadre d'une commission consultative de gestion 53 ( * ) au sein de laquelle siègent deux conseillers généraux et deux maires par département de la petite couronne.

La définition des contributions des différents financeurs du budget spécial repose ensuite sur des clefs de répartition fixées pour les différents services par le code général des collectivités territoriales ou de façon conventionnelle 54 ( * ) .

En outre, comme le relève la chambre régionale des comptes d'Île-de-France, les collectivités de la petite couronne « financent les seuls actifs de la commune de Paris », les biens acquis sur le budget spécial étant automatiquement incorporés au patrimoine de la ville de Paris 55 ( * ) .

Ainsi, les collectivités de la petite couronne financent près du tiers du budget spécial alors même qu'elles n'en votent pas les crédits, ne sont pas consultées sur la totalité de ses dispositions et que les biens acquis par son biais ne sont pas intégrés à leur patrimoine.

Aussi, il n'est pas surprenant que cette organisation budgétaire peu inclusive ait pu, par le passé, être à l'origine conflits entre les différents financeurs. À titre d'illustration, l'obligation de supporter une partie des dépenses relatives à la BSPP sur la base d'un budget à l'élaboration duquel les représentants élus des départements ne participent pas a été contestée devant le Conseil d'État par les départements du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis au motif qu'elle serait contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales et instituerait une forme de tutelle de la ville de Paris sur la petite couronne . En l'espèce, le Conseil d'État a toutefois pu écarter ce motif dans la mesure où les requérants mettaient en cause non la légalité du seul décret attaqué, mais le bien-fondé d'une décision prise par le législateur 56 ( * ) .

Si l'organisation budgétaire actuelle apparaît insuffisamment inclusive, elle ne permet pas non plus d'assurer une juste répartition des charges entre les différents financeurs.

2. Des modalités de financement peu lisibles qui ne permettent pas d'assurer une juste répartition des charges entre les différents financeurs

Comme cela a été montré précédemment, les services de la préfecture de police peuvent faire l'objet d'un financement du budget spécial et du budget de l'État.

En pratique, pour la plupart des services, le principe de répartition est fondé sur des considérations organiques : comme le relève Olivier Renaudie, « ce qui est pris en compte pour savoir si le financement d'un service relève de l'un ou l'autre des deux budgets, c'est le statut des agents qui y sont affectés ».

Ce principe, déjà discutable dans la mesure où il ne repose pas sur des considérations fonctionnelles, souffre toutefois de nombreuses exceptions . À titre d'illustration, la participation de l'État est fixée à 25 % la BSPP et à 40 % pour le service interdépartemental de protection civile (SIPC).

Comme le relevait déjà la Cour des comptes en 1998, « il n'existe donc pas de clef de partage unique du financement des services relevant du préfet de police de Paris, mais un ensemble de dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles, qui se sont stratifiées au cours du temps » 57 ( * ) - ce qui ne saurait garantir une juste répartition des charges entre les acteurs.

En outre, les modalités de financement actuelles de la préfecture de police se traduisent par des financements croisés totalement dérogatoires au droit commun de la décentralisation .

Ainsi, certaines dépenses régaliennes demeurent prises en charge par la ville de Paris , en application de l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII et des dispositions de l'article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales, alors même qu'elles incombent sur le reste du territoire à l'État .

Interrogée sur ce point, la préfecture de police précise qu'il s'agit « principalement de certains services ou agents de la direction de la police générale (titres relatifs aux étrangers, permis de conduire, cartes grises, une partie de la procédure des titres d'identité), de certaines parties de services de la direction des transports et de la protection du public pour certaines polices spéciales relevant de l'État et de l'administration directement liée à l'autorité préfectorale (frais de réception, fonctionnement du cabinet et de la zone de défense) » 58 ( * ) .

Si la préfecture de police a indiqué à votre rapporteur spécial ne pas disposer d'un chiffrage dédié concernant les montants en jeu - ce qui est regrettable -, la chambre régionale des comptes conclut dans son rapport publié en 2012 que « le budget communal supporte indûment une charge importante » de 39 millions d'euros 59 ( * ) , à partir d'une évaluation portant sur un périmètre plus restreint 60 ( * ) . L'essentiel de ce montant (38 millions d'euros) correspond en réalité au financement des coûts liés à la direction de la police générale, qui exerce essentiellement des tâches « préfectorales » (délivrance des titres régaliens, etc.).

À l'inverse, certaines dépenses prises en charge par l'État devraient normalement être financées par les collectivités territoriales au regard du droit commun de la décentralisation.

Il s'agit tout d'abord des dépenses correspondant à la rémunération des emplois communaux d'encadrement . À titre d'exemple, les emplois de catégorie A administratifs de la direction des transports et de la protection des publics relèvent du budget de l'État, alors qu'il s'agit d'un service administratif financé par le budget spécial.

En effet, la préfecture de police considère que la création d'emplois de catégorie A administratifs et d'emplois de direction exclusivement dédiés à l'exercice de missions municipales conduirait à « mettre en cause l'unicité de commandement et de direction » et pourrait avoir « des conséquences inflationnistes en impliquant, notamment pour les fonctions supports, certains dédoublements de la chaîne hiérarchique » 61 ( * ) .

Toutefois, l'essentiel des dépenses indûment supportées par l'État au regard du droit commun de la décentralisation concerne la BSPP.

En application de l'article L. 2512-19 du code général des collectivités territoriales, l'État participe aux dépenses de fonctionnement de la BSPP , pour un montant de 80,5 millions d'euros en 2014. Le programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » constitue le support de ce financement, qui représente près d'un quart du budget de fonctionnement de la BSPP.

En outre, le régime des pensions des sapeurs-pompiers de la brigade est intégralement pris en charge par l'État . La BSPP perçoit à ce titre une participation financière indirecte du ministère de la défense, estimée à 120 millions d'euros par an 62 ( * ) . De façon plus anecdotique, la sélection des recrues est réalisée par les centres d'information et de recrutement des forces armées (CIRFA), sans que les coûts induits ne fassent l'objet d'une refacturation à la brigade.

Eu égard à ces montants, l'équilibre global des financements croisés entre les collectivités territoriales et l'État apparaît donc défavorable à ce dernier.

Enfin, au sein même du budget de l'État, certaines dépenses relevant normalement d'autres programmes budgétaires sont indûment supportées par le programme « Police nationale ».

À titre d'exemple, l'activité de déminage du laboratoire central est prise en charge par le programme « Police nationale », et non par le programme « Sécurité civile », comme c'est le cas pour le reste du territoire.

3. Des difficultés pratiques liées au caractère dérogatoire de l'organisation budgétaire

Si les modalités de financement actuelles de la préfecture de police ne permettent pas d'assurer une juste répartition des charges entre les différents financeurs, elles peuvent par ailleurs être à l'origine de difficultés pratiques pour les services de la préfecture.

Une première illustration concerne les dépenses qui sont prises en charge a priori par la ville, puis font l'objet d'un remboursement par l'État en fin d'exercice .

En 2014, ces dépenses s'élevaient à 28,6 millions d'euros et correspondaient au financement de :

- certaines fonctions dites de « support » (masse salariale des agents des administrations parisiennes, dépenses immobilières de sites partagés, etc.) ;

- certains services pris en charge intégralement par l'État (ex : infirmerie psychiatrique, service des explosifs du laboratoire central).

Pour ces derniers, il a été indiqué à votre rapporteur spécial que ce mode de gestion est susceptible de retarder certains investissements indispensables.

S'agissant d'activités purement régaliennes, la ville de Paris peut en effet se montrer récalcitrante à l'idée d'avancer des dépenses importantes - par exemple l'achat d'un robot de déminage - dans un contexte budgétaire contraint.

La déclinaison des différents plans annoncés en 2015 et visant à renforcer des moyens du ministère de l'intérieur constitue également une bonne illustration des difficultés pratiques liées au caractère dérogatoire de l'organisation budgétaire de la préfecture de police.

En effet, la préfecture de police ne dispose actuellement d'aucun support budgétaire dédié 63 ( * ) au sein des programmes « Administration territoriale », « Immigration et asile », « Sécurité routière » et « Sécurité civile », alors même qu'elle exerce sur l'agglomération parisienne certaines missions financées sur le reste du territoire national par ces programmes budgétaires.

Or, l'absence de ces supports budgétaires s'est traduite pour la préfecture de police par des difficultés à obtenir les renforts annoncés au niveau national au titre des différents plans de lutte contre le terrorisme et l'immigration.

À titre d'exemple, il a été indiqué à votre rapporteur spécial que si la préfecture de police n'a pas bénéficié des créations de postes visant à renforcer les préfectures dans l'accomplissement de leurs missions en lien avec la prévention de la radicalisation, c'est parce que ces renforts ont été financés par abondement du programme « Administration territoriale » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 64 ( * ) .

Comme l'ont rappelé plusieurs responsables lors des auditions, ces difficultés étaient jusqu'à présent surmontées grâce au budget spécial, qui permettait généralement de « faire l'appoint ». Dans un contexte budgétaire particulièrement contraint pour les collectivités territoriales, le budget spécial ne pourra toutefois plus tenir ce rôle de « variable d'ajustement ».

II. UNE INSTITUTION AUJOURD'HUI CRITIQUÉE

Si la préfecture de police apparaît aujourd'hui fragilisée par son organisation administrative et budgétaire, elle doit par ailleurs composer avec une contestation croissante sur le plan politique et un déficit d'attractivité auprès des policiers.

A. UNE CONTESTATION CROISSANTE SUR LE PLAN POLITIQUE

1. Une insatisfaction des élus

Sur le plan politique, les entretiens menés par votre rapporteur spécial ont mis en évidence l'insatisfaction des élus locaux à l'égard de la préfecture de police.

Un premier motif d'insatisfaction tient à la faiblesse des liens entre la préfecture de police et les élus , en particulier depuis la mise en place de la police d'agglomération.

Si les élus entretiennent généralement des relations étroites avec les commissaires de police de leur circonscription, ils déplorent l'absence de lien avec la direction de la DSPAP et la préfecture de police. À titre d'exemple, le procureur de la République réunit chaque année les maires d'arrondissement, contrairement au préfet de police.

Ces liens distendus s'accompagnent en outre d'une absence de transparence concernant les effectifs policiers . En effet, les seules informations transmises aux élus concernent les chiffres bruts de la délinquance de l'année.

2. Un manque de transparence qui entretient inutilement la défiance

Ce manque de transparence est d'autant plus dommageable qu'il entretient inutilement les soupçons d'une répartition géographique défavorable à certains territoires , souvent évoqués par les élus.

En effet, l'examen de la pertinence de la répartition des effectifs policiers par circonscription mené par la mission d'évaluation de la police d'agglomération parisienne à partir des statistiques démographiques et administratives n'a pas révélé de disparités flagrantes entre les territoires 65 ( * ) .

L'utilisation des statistiques administratives en matière de délinquance induit toutefois un double biais statistique lié au fait que :

- de nombreuses infractions ne parviennent jamais à la connaissance des forces de sécurité ;

- la présence plus importante de policiers au sein d'un territoire peut contribuer à « révéler » un nombre plus grand de faits.

Aussi, il a semblé utile à votre rapporteur spécial de compléter cette évaluation par une comparaison entre la répartition géographique des effectifs départementaux de la DSPAP et les résultats des enquêtes de victimation réalisées directement auprès des ménages, afin de vérifier la cohérence globale des résultats obtenus.

Une telle comparaison est facilitée en Île-de-France par l'existence d'une enquête de victimation propre à la région réalisée depuis plusieurs années par l'Institut d'aménagement et d'urbanisme (IAU) et dont les derniers résultats remontent à 2013 66 ( * ) . Ainsi, un nombre de faits de délinquance par département peut être calculé à partir des taux de victimation de l'enquête 67 ( * ) , puis être comparé avec les effectifs 2013 de chaque direction territoriale de la sécurité de proximité.

Comparaison de la répartition géographique des effectifs de la DSPAP et de la délinquance

(en %)

Département

Faits dans le département

% du total des faits

Effectifs

% des effectifs

Paris

403 561

36 %

6 645

41 %

Hauts-de-Seine

241 363

21 %

3 038

19 %

Seine-Saint-Denis

267 544

24 %

3 944

24 %

Val-de-Marne

209 419

19 %

2 662

16 %

Source : commission des finances du Sénat (à partir des résultats 2013 de l'enquête de l'IAU, des réponses au questionnaire adressé à la préfecture de police et des données 2013 de l'Insee)

Les résultats obtenus sont cohérents avec ceux de la mission d'évaluation de la police d'agglomération parisienne 68 ( * ) :

- il n'existe pas de « déséquilibre systémique » entre les départements ;

- les circonscriptions parisiennes semblent toutefois avoir « une marge d'action plus large » .

Un autre motif d'insatisfaction régulièrement évoqué par les élus tient à l'insuffisance des moyens dédiés aux formes de délinquance de basse intensité , en raison notamment de l'importance des services d'ordre dans l'agglomération parisienne.

Il s'agit d'une critique ancienne qui avait conduit en 1999 à la séparation des missions de sécurité publique et des fonctions de maintien de l'ordre public et de la protection des institutions au sein de deux directions distinctes , la DSPAP et la DOPC. Comme le rappelait à l'époque Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'intérieur, cette réforme des services de la préfecture de police, « toute entière ordonnée à l'objectif de police de proximité », visait à « répondre aux attentes qui s'expriment en matière de prévention de la délinquance et de lutte contre l'insécurité au quotidien » en sanctuarisant les moyens affectés à la sécurité publique 69 ( * ) .

3. Une contestation liée à la baisse des effectifs, dans un contexte de hausse de la délinquance

Si cette critique est aujourd'hui revenue au coeur du débat sur l'organisation de la préfecture de police, c'est tout d'abord en raison de l'évolution particulièrement défavorable des statistiques de la délinquance sur l'agglomération parisienne .

Évolution des statistiques de la délinquance
sur l'agglomération parisienne entre 2012 et 2015

(en %)

Indicateur

Évolution

2012-2015

Tendance

Atteintes volontaires à l'intégrité physique

3,1 %

?

Atteintes aux biens

6,9 %

?

Escroqueries et infractions économiques et financières

55,5 %

?

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses du ministère de l'intérieur)

En comparant l'année 2012 à l'année 2015 en termes de faits enregistrés par les services de la préfecture de police, il apparaît que tous les principaux indicateurs sont orientés à la hausse .

Premièrement, les atteintes volontaires à l'intégrité physique (AVIP) sont en augmentation de 3,1 % 70 ( * ) .

Cette tendance, qui concerne tous les départements de l'agglomération parisienne à l'exception de la Seine-Saint-Denis, est principalement liée à la progression des violences physiques non crapuleuses entre 2013 et 2015 - et notamment des coups et blessures volontaires non suivis de mort (+ 7 %). À l'inverse, les violences physiques crapuleuses sont quant à elles en net recul.

Deuxièmement, les atteintes aux biens affichent une hausse de 6,9 %.

Là encore, cette tendance concerne tous les départements de l'agglomération parisienne, à l'exception de la Seine-Saint-Denis, qui enregistre un repli de 6,9 %.

Parmi les évolutions observées, il peut être noté que les cambriolages augmentent fortement (+ 14,3 %). Tous les départements de l'agglomération sans exception affichent une hausse au cours de la période. Les efforts entrepris en la matière ont toutefois permis de stabiliser la hausse des cambriolages en 2014 (- 0,1 %) et d'amorcer une baisse en 2015 (- 1,7 %).

Troisièmement, les escroqueries et infractions économiques et financières sont en hausse de 55,5 % .

Cette évolution défavorable concerne tous les départements de l'agglomération et résulte principalement de la forte augmentation de la délinquance astucieuse et des délits de vente à la sauvette.

Or, cette hausse de la délinquance au sein de l'agglomération parisienne survient dans un contexte marqué par la baisse importante des effectifs de la préfecture de police - et plus particulièrement de ceux de la DSPAP.

Comme l'a confirmé la mission d'évaluation de la police d'agglomération, les effectifs de la préfecture de police ont davantage diminué (- 7 %) que ceux de l'ensemble de la police nationale (- 5,5 %) au cours de la période 2008-2015 71 ( * ) . La DSPAP a particulièrement touchée, avec une diminution de 13 % de ses effectifs au cours de la période.

Ainsi, la capitale ne semble pas bénéficier d'un quelconque « privilège » sur le plan des moyens humains , contrairement à ce qui est régulièrement avancé dans les médias sur la base de comparaisons effectuées à partir des effectifs globaux de la préfecture de police - et non des seuls effectifs affectés à la sécurité publique 72 ( * ) .

À titre d'exemple, si l'étude comparative des effectifs policiers à Paris et à Marseille est rendue difficile par les différences de périmètre, les données disponibles ne permettent pas de conclure en faveur de la thèse d'un sureffectif parisien.

Comparaison des effectifs policiers dédiés à la sécurité publique à Paris et à Marseille

(en ETP, en millions d'habitants)

Effectifs

Population totale

Effectifs pondérés

Marseille (hors police municipale)

3 224

0,864

1 policier pour 268 habitants

Marseille (y.c. police municipale)

3 625

0,864

1 policier pour 238 habitants

Paris

7 571

2,25

1 policier pour 298 habitants

Note de lecture : les effectifs marseillais comprennent les personnels affectés à la direction départementale de la sécurité publique au 1 er mars 2016 ainsi que les effectifs de la police municipale au 15 janvier 2016 ; les effectifs parisiens comprennent les personnels relevant de la direction territoriale de la sécurité de proximité (DTSP 75) au 31 décembre 2015, une quote-part des personnels des services centraux et spécialisés de la DSPAP à la même date ainsi qu'une quote-part des personnels de la DRPP afin de prendre en compte les effectifs affectés sur les missions d'information générale à Paris ; les données utilisées pour la population correspondent aux données légales 2013 de l'Insee.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des réponses au questionnaire, des informations recueillies lors des auditions et des déplacements ainsi que des données de l'Insee)

Il pourra être objecté que la comparaison, en excluant les effectifs de la DOPC, ne prend pas en compte certains personnels qui effectuent des missions relevant à Marseille de la direction départementale de la sécurité publique.

Toutefois, ce biais doit être relativisé .

En effet, le critère de la population, qui correspond au nombre d'habitants, est très défavorable à Paris dans la mesure où, comme le relevait en 2011 le président de l'observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, Alain Bauer, « si Paris compte un peu plus de 2 millions d'habitants, plus de 5 millions de personnes s'y trouvent le jour et environ 3 millions la nuit » 73 ( * ) .

Par ailleurs, la DSPAP conserve en réalité la responsabilité des « petits services d'ordre locaux » et est amenée à renforcer les effectifs de la DOPC « pour les évènements les plus importants ou lorsqu'ils sont trop nombreux » 74 ( * ) . Ainsi, la moitié des policiers affectés à la sécurisation de la fan-zone parisienne pendant le championnat d'Europe 2016 relevaient de la DSPAP.

Au total, la critique des élus concernant l'insuffisance des moyens dédiés aux formes de délinquance de basse intensité semble donc fondée .

La situation apparaît d'autant plus préoccupante que cette contestation croissante sur le plan politique s'accompagne d'un déficit d'attractivité auprès des policiers .

B. UNE BAISSE DES EFFECTIFS QUI RÉSULTE PRINCIPALEMENT D'UN DÉFICIT D'ATTRACTIVITÉ AUPRÈS DES POLICIERS

1. Une dynamique baissière qui contraste avec le reste de la police nationale

Sur le plan des effectifs, la préfecture de police connaît une dynamique inverse de celle observée pour l'ensemble de la police nationale depuis 2013.

Exécution du schéma d'emplois et du plafond d'emplois
du programme « Police nationale » depuis 2013

(en ETP, en ETPT, en %)

2013

2014

2015

Variation depuis 2013

Schéma d'emplois

- 197

822

553

+ 1 178

Plafond d'emplois

dont : personnels administratifs, techniques et scientifiques (PATS)

dont : corps d'encadrement et d'application

142 286

142 767

143 982

1,2 %

18 460

18 852

20 030

8,5 %

100 875

100 898

101 388

0,5 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

En effet, le schéma d'emplois et le plafond d'emplois du programme « Police nationale » sont clairement orientés à la hausse sur la période. Cette évolution concerne tant les policiers actifs (+ 0,5 % pour le corps d'encadrement et d'application) que les personnels administratifs, techniques et scientifiques (+ 8,5).

À l'inverse, les effectifs globaux de la préfecture de police (hors BSPP) restent orientés à la baisse (- 0,8 %) , la diminution étant concentrée sur les effectifs des administrations parisiennes (- 4 %) et les policiers actifs et adjoints de sécurité (- 2,5 %).

Évolution des effectifs de la préfecture de police depuis 2013 (hors BSPP)

(en %)

2013

2014

2015

Variation depuis 2013

Policiers actifs et adjoints de sécurité

28 121

26 895

27 428

- 2,5 %

Personnels administratifs techniques et scientifiques (PATS)

2 116

2 628

2 747

29,8 %

Administrations parisiennes

5 821

5 629

5 586

- 4,0 %

Total

36 058

35 152

35 761

- 0,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire)

2. Une évolution qui s'explique par le déficit d'attractivité de la préfecture de police

D'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial, ce contraste s'explique principalement par le déficit d'attractivité de la préfecture de police auprès des personnels , qui demandent leur mutation dès qu'ils ont rempli leurs obligations minimales de service 75 ( * ) .

De ce fait, la préfecture de police dépend fortement des sorties d'école , dont elle se voit attribuer environ 70 % des effectifs. La baisse du nombre de policiers actifs observée jusqu'en 2014 traduit ainsi la diminution des sorties d'école, qui n'ont plus permis de compenser les départs.

Dans ce contexte, il a été décidé de contingenter à mille le nombre de départs de la préfecture de police en 2015 . D'après les informations recueillies lors des auditions, cette mesure de contingentement, non reconduite en 2016, aurait permis d'éviter environ 400 départs, soit 75 % de la hausse du nombre de policiers actifs et adjoints de sécurité enregistrée en 2015.

Si la hausse des sorties d'école attendue à compter de 2016 devrait permettre de renforcer les effectifs de la préfecture de police à court terme, la trajectoire des effectifs actifs de la préfecture de police n'apparaît pas soutenable à moyen terme dans la mesure où elle dépend de :

- l'affectation d'un nombre toujours plus élevé de personnels en sortie d'école ;

- la mise en place de mesures de contingentement très mal vécues par les personnels 76 ( * ) et qui peuvent donc difficilement être reconduites sur plusieurs années.

Sans restauration de son attractivité auprès des personnels, la préfecture de police pourrait ainsi connaitre une baisse sans précédent de ses effectifs lorsque les personnels recrutés dans le cadre des différents plans de renforcement des moyens des forces de sécurité intérieure décidés en 2015 auront rempli leurs obligations minimales de service.

TROISIÈME PARTIE - UNE ÉVOLUTION INDISPENSABLE POUR ASSURER L'EFFICACITÉ ET LA LÉGITIMITÉ DE L'INSTITUTION

I. CIRCONSCRIRE LA SPÉCIFICITÉ DE L'ORGANISATION POLICIÈRE PARISIENNE AUX SEULES CONTRAINTES INHÉRENTES AU STATUT DE CAPITALE

A. RETIRER DES MISSIONS À LA PRÉFECTURE DE POLICE AFIN DE LA RECENTRER SUR SON CoeUR DE MÉTIER

Afin de remédier à ces difficultés, il apparaît aujourd'hui nécessaire d'admettre que la préfecture de police ne peut, ni ne doit, « tout faire » en matière de sécurité publique dans l'agglomération parisienne.

1. Mettre en place des échelons zonaux déconcentrés de la DGSI et des directions centrales spécialisées de la DGPN

À cet égard, la place particulière qu'occupe la préfecture de police au sein de l'organisation policière s'explique par le statut de la ville de Paris , qui justifie l'existence d'un lien direct entre le ministre de l'intérieur et le représentant de l'État chargé de la sécurité et de l'ordre public dans la capitale.

En dehors de ce qui constitue le « coeur » de sa compétence, il pourrait toutefois être envisagé de s'appuyer davantage sur la DGPN et la DGSI , dans la mesure où l'enchevêtrement des compétences et des zones d'intervention est susceptible, comme cela a été précédemment mis en évidence, de se traduire non seulement par une déperdition de moyens mais également par des difficultés de coordination.

À l'occasion d'une précédente mission de contrôle, votre rapporteur spécial avait déjà proposé une telle évolution dans les domaines du renseignement - selon des modalités qui convergent avec les conclusions de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale relative aux moyens mis en oeuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 77 ( * ) - et de l'immigration

Le rapport 78 ( * ) recommandait ainsi d'achever l'évolution débutée en 1965 avec le transfert de la mission de contre-espionnage de la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP) à la direction de la surveillance du territoire (DST), en :

- transférant à la DGSI la mission de lutte contre le terrorisme et les extrémismes violents ;

- confiant à l'unité chargée du renseignement territorial la mission d'information générale ;

- transférant à la DCPAF la mission de lutte contre l'immigration clandestine et le travail illégal.

Afin de renforcer la cohérence de l'action publique en matière de sécurité, la même logique pourrait être appliquée à la police judiciaire , compte tenu de la présence de la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) à Versailles et des offices centraux relevant de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) à Nanterre - d'autant que certains incidents semblent suggérer que la police judiciaire n'est pas toujours la direction la plus perméable à l'autorité du préfet de police. Le déménagement du siège de la direction régionale de la police judiciaire dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) Clichy-Batignolles constitue à cet égard une opportunité - y compris en termes d'image, comme en témoigne l'exemple du New Scotland Yard .

À terme, des échelons zonaux déconcentrés de la DGSI et des directions centrales spécialisées de la DGPN (police aux frontières, police judiciaire, renseignement territorial) seraient donc mis en place.

Le préfet de police garderait en revanche sous son autorité la DSPAP et la DOPC, qui sont au coeur de sa compétence et de sa légitimité.

En outre, il jouerait naturellement un rôle majeur dans le dispositif de coordination au niveau de la zone , dont la portée est aujourd'hui fortement amoindrie par l'absence de directeurs zonaux et interrégionaux de la police nationale. À cet égard, il peut être rappelé que le préfet de police préside déjà la conférence de sécurité intérieure de la zone de Paris, en application de l'article R. 122-41-1 du code de la sécurité intérieure. Il pourra à cet effet s'appuyer sur le secrétariat général de la zone de défense et de sécurité de Paris - actuellement dirigé par un préfet placé sous son autorité -, dont les activités se limitent aujourd'hui essentiellement aux domaines de la sécurité civile, de la sécurité économique et de la défense civile.

Recommandation n° 1 : transférer à la DGPN et à la DGSI les compétences du préfet de police en matière de police judiciaire, de police aux frontières et de renseignement, afin de recentrer la préfecture de police sur son coeur de métier.

2. Revoir la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris

Afin de faire du bas du spectre de la délinquance et des problématiques de tranquillité publique de véritables priorités opérationnelles, il apparaît nécessaire, en complément, de revoir la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris .

À cet égard, le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain actuellement en navette propose un transfert de compétences limité au profit du maire de Paris .

Comme le souligne notre collègue rapporteur Mathieu Darnaud 79 ( * ) , seraient transférées au maire de Paris :

- « une partie de la police de salubrité des bâtiments, la police des funérailles et celle des baignades (article 21) » ;

- « une compétence accrue sur la circulation et le stationnement (articles 21 et 23) » ;

- « la délivrance des cartes nationales d'identité et des passeports (article 22) ;

- « la sécurité des occupants d'immeubles collectifs à usage d'habitation et une partie de la police des édifices menaçant ruine (article 25) ».

Dans l'étude d'impact, le périmètre des compétences dont le transfert est proposé est évalué à 2 226 ETP . Les agents concernés seront détachés ou transférés vers la ville de Paris.

Agents exerçant les compétences dont le transfert est proposé par le projet de loi

(en ETP)

Domaines

Nombre d'ETP concernés

Verbalisation du stationnement payant

1 162

Verbalisation du stationnement gênant

486

Fourrières

225

Réception et délivrance des titres d'identité et de voyage

184

Fonctions support

111

Bruits de voisinage

27,4

Lutte contre l'habitat indigne

23

Police des funérailles

7,6

Total

2 226

Source : commission des finances du Sénat (d'après l'étude d'impact et le rapport de Mathieu Darnaud précité)

Sur le plan financier, la mairie de Paris exercerait ces missions nouvelles en contrepartie d'une compensation financière par l'État dont le montant est évalué à 111 millions d'euros 80 ( * ) . L'équilibre actuel des financements croisés n'est donc nullement remis en cause, le transfert se voulant neutre sur le plan budgétaire.

En réalité, le transfert concerne essentiellement la circulation et le stationnement, qui représentent 74 % du volume d'ETP. Si cette évolution se justifie pleinement, dans la mesure où « le contrôle du stationnement et de la circulation ne fait pas partie des priorités opérationnelles de la préfecture de police » 81 ( * ) , le dispositif proposé conserve le régime hérité de la loi du 28 pluviôse an VIII et de l'arrêté consulaire du 12 messidor an VIII. En particulier, la police administrative générale , qui recouvre les actions visant à prévenir les atteintes à l'ordre public, resterait de la compétence du préfet de police.

Ce manque d'ambition est directement lié à la volonté d'écarter la mise en place d'une police municipale à Paris . Comme l'a rappelé Anne Hidalgo, maire de Paris, devant nos collègues députés : l'« objectif a été simple : nous rapprocher le plus possible du droit commun des autres villes, à une exception près - la police municipale » 82 ( * ) .

Si, au terme du transfert, 2 000 personnels devraient s'ajouter aux 1 900 agents municipaux déjà en place au sein de la « brigade de lutte contre les incivilités » chargée de « répondre aux problèmes de voisinage, de stationnement, de propreté et de rassurer Parisiens et touristes » 83 ( * ) , la réforme apparaît donc insuffisante pour que les affaires relevant de la tranquillité publique et du bas du spectre de la délinquance bénéficient désormais de toute l'attention qu'elles méritent dans la capitale .

En comparaison, la proposition de loi tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police, déposée en 2015 par nos collègues Yves Pozzo di Borgo et Pierre Charon ainsi que par votre rapporteur spécial, fait preuve d'une toute autre ambition .

En effet, elle propose de confier au maire de Paris la compétence de police générale inscrite à l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. En complément de ses missions de maintien de l'ordre public, le préfet de police conserverait bien évidemment des compétences d'attribution dans les matières présentant un lien direct avec le statut de capitale de la ville de Paris telles que la sécurisation des institutions, des représentations diplomatiques et des grands rassemblements.

Si ces dispositions ont été reprises par le Sénat lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif au statut de Paris - ce dont votre rapporteur spécial ne peut que se féliciter -, l'Assemblée nationale est néanmoins revenue, moyennant quelques aménagements mineurs, au texte initial du projet de loi - rétablissant ainsi la compétence générale du préfet de police.

Aussi, votre rapporteur spécial tient à réaffirmer la nécessité de rapprocher la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris du régime de droit commun, afin de recentrer la préfecture de police sur son coeur de métier et de permettre la mise en place d'une police municipale de plein exercice.

Recommandation n° 2 : rapprocher la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris du régime de droit commun, afin de permettre la mise en place d'une police municipale de plein exercice.

B. ADAPTER LE PÉRIMÈTRE DE LA POLICE D'AGGLOMÉRATION AUX BASSINS DE DÉLINQUANCE

1. Élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police en matière d'ordre et de sécurité publics à l'ensemble de la métropole

En contrepartie de ce dessaisissement, la compétence opérationnelle de la préfecture de police pourrait être étendue.

Comme le rappellent l'IGA et l'IGPN, il est généralement admis que l'unité urbaine constitue « le périmètre le plus pertinent en matière de police » 84 ( * ) . Ses contours sont déterminés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) selon des critères reposant sur « la continuité du bâti et le nombre d'habitants » 85 ( * ) .

Comme le montre la carte ci-dessous, la zone constituée par Paris et la petite couronne est loin de recouvrir l'ensemble de l'unité urbaine , suggérant ainsi que le périmètre actuel de la police d'agglomération reste trop étriqué au regard des bassins de délinquance. Ainsi, la troisième ville la plus peuplée de la région, Argenteuil, se trouve exclue de la zone de compétence de la préfecture de police.

Cartographie de la région Île-de-France

Source : commission des finances du Sénat (à partir d'une carte réalisée par l'institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France, dont la légende a été modifiée)

Ce constat amène naturellement à s'interroger sur le périmètre administratif le plus pertinent pour l'exercice des compétences en matière d'ordre et de sécurité publics.

À cet égard, la région constitue une zone bien trop large , dans la mesure où l'unité urbaine comprend seulement 31 % du territoire régional, contre 89 % des habitants 86 ( * ) . En outre, la présence de zones de compétence de la gendarmerie serait source de complication.

Une solution intermédiaire consisterait à faire coïncider le périmètre de compétence de la préfecture de police avec celui de la Métropole du Grand Paris (MGP) , ce qui permettrait notamment d'intégrer des villes telles qu'Argenteuil et Viry-Châtillon et de disposer - nous y reviendrons plus en détail dans la partie consacrée à la modernisation de l'organisation budgétaire - d'un cadre institutionnel permettant à l'ensemble des élus locaux de s'exprimer sur le budget spécial.

À cet égard, il doit être souligné qu'il avait initialement été envisagé de confier à la MGP une compétence s'agissant des dispositifs locaux de prévention de la délinquance. L'article 12 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) prévoyait à cet effet la création d'un « conseil métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance » chargé de coordonner « les grandes orientations en matière de prévention de la délinquance sur le territoire de la métropole du Grand Paris ». Les dispositions relatives à la prévention de la délinquance ont toutefois été remises en cause par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe).

Recommandation n° 3 : en contrepartie, élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police à l'ensemble du territoire de la métropole afin de rapprocher le périmètre de la police d'agglomération des bassins de délinquance.

2. Redéfinir en parallèle les relations avec les élus locaux et les autres représentants de l'État

En parallèle, il apparaît nécessaire de renforcer les relations avec les élus locaux et les représentants de l'État .

Il peut d'ailleurs être souligné que l'article 12 de la loi Maptam comportait des dispositions allant dans ce sens . Ainsi, le préfet de police devait informer « régulièrement le président de la métropole du Grand Paris des résultats obtenus en matière de lutte contre l'insécurité ». En outre, le préfet de police et le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, étaient chargés « d'arrêter conjointement le plan de prévention de la délinquance » de la métropole après « avis du conseil métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance ».

Il est vrai que, comme cela a été précédemment rappelé, la réforme de la police d'agglomération a suscité chez les élus locaux et les représentants de l'État un sentiment d'éloignement et de dépossession , en raison de la faiblesse des liens entretenus avec la préfecture de police.

Or, la recherche d'une meilleure articulation avec ces acteurs se justifie pleinement sur le plan de l'efficacité de l'action publique .

En effet, les collectivités territoriales de petite couronne « participent de manière croissante à la fabrique de la sécurité » aux côtés de la préfecture de police 87 ( * ) . Comme le relève l'Institut d'aménagement et d'urbanisme (IAU) dans une récente publication, les trois-quarts des communes de petite couronne disposent d'une police municipale et 80 % d'un dispositif de vidéosurveillance 88 ( * ) . La région a également décidé de mener une politique active en matière de sécurité, avec un budget d'investissement qui devrait atteindre 21,8 millions d'euros en 2017 89 ( * ) .

S'agissant des représentants de l'État , il doit être rappelé que le droit en vigueur donne explicitement aux préfets de département la compétence pour « faire cesser les troubles à l'ordre public dans le département, sauf lorsque les troubles affectent un autre département » 90 ( * ) - justifiant ainsi de les associer étroitement aux activités de maintien de l'ordre des directions de la préfecture de police. Cette coordination renforcée apparaît d'autant plus nécessaire que pas moins de onze préfets exercent sur le territoire de la préfecture de police.

Tant du point de vue de la légitimité que de l'efficacité de son action, il serait donc dommageable que la préfecture de police se tienne à l'écart, dans son fonctionnement, des préfets et des élus locaux.

Recommandation n° 4 : redéfinir les relations avec les élus et les représentants de l'État afin de remédier au sentiment d'éloignement lié à la mise en place de la police d'agglomération et de renforcer l'efficacité de l'action publique.

II. MODERNISER L'ORGANISATION ADMINISTRATIVE ET BUDGÉTAIRE

A. POURSUIVRE UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DE RATIONALISATION ET D'ATTRACTIVITÉ

1. Concrétiser les synergies et les pistes d'économies identifiées

Si cette rationalisation des compétences du préfet de police se traduirait déjà par une simplification appréciable de l'organisation de la préfecture de police, des réformes complémentaires ont été évoquées afin de réduire l'enchevêtrement actuel des missions et des périmètres d'action.

À titre d'exemple, la mission IGA-IGPN suggère d'étudier l'opportunité de regrouper trois structures au sein d'une même direction 91 ( * ) :

- la sous-direction régionale de la police des transports, actuellement rattachée à la DSPAP ;

- la sous-direction régionale de la circulation et de la sécurité routière, qui relève de la DOPC ;

- la brigade fluviale et l'unité de contrôle technique de lutte contre la pollution, rattachée à la DOSTEL.

Comme cela a été précédemment rappelé, ces trois unités présentent en effet la particularité d'exercer leur compétence sur l'ensemble de la région - contrairement aux directions auxquelles elles sont actuellement rattachées - et de traiter de sujets proches liés aux problématiques de déplacement , pour lesquels des synergies existent.

À ce stade, votre rapporteur spécial considère en revanche qu'il ne serait pas opportun de fusionner la DSPAP et la DOPC , comme cela a parfois été évoqué lors des entretiens.

S'il existe indéniablement une certaine porosité entre les effectifs des deux directions lorsque les circonstances l'exigent (ex : COP21, Euro 2016), l'étanchéité reste la règle et la DOPC s'efforce de ne pas « ponctionner » les effectifs des commissariats pour participer au maintien de l'ordre - en sollicitant lorsque cela est possible les seuls services spécialisés ainsi que les effectifs sortis d'école n'ayant pas encore été affectés à la DSPAP. Plus fondamentalement, revenir sur la séparation des missions de sécurité publique et des fonctions de maintien de l'ordre décidée en 1999 risquerait de renforcer cette porosité , au détriment de la lutte contre l'insécurité au quotidien.

S'il reste des synergies à exploiter pour simplifier l'organisation interne de la préfecture de police, il apparaît également nécessaire de concrétiser les opportunités de mutualisation et de rationalisation ouvertes par la mise en place du SGAMI au 1 er janvier 2016 .

Comme cela a été précédemment rappelé, « depuis le 1 er janvier 2016, le SGAMI Île-de-France est chargé de la gestion et de la paye de plus de 52 000 agents dont 42 000 fonctionnaires de police, 9 500 personnels administratifs et techniques et 750 personnels civils de la gendarmerie nationale en Île-de-France » 92 ( * ) .

Dans ce cadre, force est de constater que de nombreux chantiers de modernisation ont déjà été lancés.

La fusion des secrétariats généraux pour l'administration de la police (SGAP) de Paris et de Versailles a ainsi permis de regrouper sur un site unique l'ensemble des plates-formes Chorus préexistantes , pour un gain de 21 ETP 93 ( * ) . Une nouvelle étape a été franchie en 2016 avec la mise en place d'une plate-forme Chorus commune à la police et à la gendarmerie, pour un gain supplémentaire de 9 ETP.

La rationalisation des « missions support » au sein des directions d'emploi de la préfecture de police constitue désormais un chantier prioritaire du préfet de police . Après un examen des organisations internes réalisé par la direction de projet entre octobre 2015 et janvier 2016, les pistes d'amélioration identifiées devraient progressivement être mises en oeuvre. À titre d'illustration, « l'économie liée à cette rationalisation sur la partie "ressources humaines" pourrait s'élever à une cinquantaine d'emplois » 94 ( * ) .

Recommandation n° 5 : concrétiser les opportunités de mutualisation et de rationalisation ouvertes par la mise en place du SGAMI au 1 er janvier 2016 afin de permettre des économies d'échelle.

Votre rapporteur spécial souhaite néanmoins attirer l'attention sur la stratégie immobilière de la préfecture de police .

En effet, il apparaît que cette question a été trop longtemps délaissée , le dernier schéma immobilier ayant été élaboré en 2008, alors même que le périmètre de compétence du service des affaires immobilières a été étendu en 2011 à l'ensemble des services de police de la petite couronne puis, à compter de la fusion des SGAP au 1 er janvier 2014, à la grande couronne 95 ( * ) .

Cette lacune apparaît d'autant plus surprenante que le parc immobilier de la préfecture de police représente un million de mètres carrés et génère des coûts consolidés d'occupation estimés à 100 millions d'euros , dont 84 millions au titre du programme « Police nationale » 96 ( * ) .

Surtout, votre rapporteur spécial a pu constater que ce parc, essentiellement « opérationnel », est aujourd'hui en bien mauvais état , ce qui pèse sur le moral des policiers.

Il apparaît en effet que la maintenance a été délaissée ces dernières années, au profit de la construction . D'après les informations recueillies lors des auditions, la préfecture de police consacre environ six euros par mètre carré au titre des dépenses d'entretien, alors que le niveau de quinze euros par mètre carré est considéré comme un seuil minimum en-deçà duquel il n'est pas opportun de descendre - la norme dans le secteur privé étant comprise entre vingt euros et vingt-cinq euros par mètre carré dans le cadre d'une stratégie de maintenance dite « préventive ».

Compte tenu de ces difficultés - mais également des opportunités de mutualisation et de rationalisation induites par la mise en place du SGAMI -, un nouveau schéma immobilier pluriannuel est en cours d'élaboration.

Un avant-projet élaboré par les services de la préfecture de police a toutefois été transmis à votre rapporteur spécial, qui partage pleinement ses principales orientations :

- augmenter progressivement les dépenses de maintenance, avec un objectif cible compris entre 10 millions d'euros et 15 millions d'euros ;

- mettre en oeuvre un programme volontariste de rénovation ;

- rationaliser les emprises locatives ;

- regrouper les commissariats ;

- réorganiser les garages.

S'agissant de la maintenance, il apparaît impératif, compte tenu de l'état du parc, de retenir une cible de 15 millions d'euros au minimum (soit environ 15 euros par mètre carré).

Recommandation n° 6 : augmenter les dépenses de maintenance immobilière afin de remédier à l'état de délabrement du parc et d'améliorer le cadre de travail des policiers.

2. Renforcer l'attractivité de la plaque parisienne

En complément, une politique visant à remédier au déficit d'attractivité de la préfecture de police auprès des personnels doit être poursuivie.

En effet, comme cela a été précédemment montré, les demandes de mutation de la préfecture de police sont en sans cesse compensées par les sorties des écoles de police, alors même que l'agglomération parisienne comprend de nombreux territoires difficiles sur lesquels la présence de policiers expérimentés apparaît nécessaire.

Les incitations financières constituent à cet égard un levier d'action privilégié , dans la mesure où le différentiel entre le coût de la vie en région parisienne - et plus particulièrement à Paris et en petite couronne - ne cesse de se creuser par rapport au reste du territoire métropolitain.

Dans une étude parue en avril 2016, l'Insee indique ainsi que les prix pratiqués dans l'agglomération parisienne sont en moyenne 9 % plus élevés que ceux observés en province (hors Corse), après neutralisation des différences d'habitudes de consommation 97 ( * ) .

De ce fait, les personnels de la préfecture de police affectés en Île-de-France bénéficient déjà de différents dispositifs d'incitation financière.

Récapitulatif des dispositifs d'incitation financière dont peuvent bénéficier les personnels du corps d'encadrement et d'application affectés en Île-de-France

Nom

Nature

Ciblage

Dispositifs interministériels

Indemnité de résidence

Indemnité majorée égale à 3 % du traitement brut

Agents franciliens

Avantage spécifique d'ancienneté

Avancement accéléré à l'échelon supérieur

Agents affectés dans une circonscription « difficile » (18 600 agents concernés à la préfecture de police)

Prime spécifique d'installation

2 068 euros

Nouveaux fonctionnaires franciliens ou lillois dont l'indice est inférieur à un certain seuil

Dispositifs spécifiques à la police nationale

Indemnité compensatoire pour sujétions spécifiques

145 euros par mois,
soit 1 740 par an

SGAMI Île-de-France, services centraux et Corse

Indemnité de fidélisation

Versement dont le montant évolue pour atteindre un plafond annuel de 1 805 euros à la 11 ème année

Fonctionnaires actifs affectés en secteur « difficile », après 2 ans ou 5 ans de service continu selon l'affectation

Complément de fidélisation

9 000 euros versés en trois fois (lors de la titularisation, après 5 ans, après 10 ans d'affectation)

Lauréats du concours avec affectation régionale en Île-de-France

Source : commission des finances du Sénat

Comme le montre le tableau ci-dessus, il s'agit moins d'un ensemble cohérent de mesures visant à fidéliser les personnels qu'un empilement de dispositifs hétéroclites aux caractéristiques et objectifs partiellement contradictoires.

À cet égard, trois logiques semblent s'affronter :

- une logique de « compensation » visant à réduire le différentiel de coût de la vie entre Paris et la province - qui conduit à mettre en place des primes mensuelles versées à l'ensemble des agents tout au long de leur service en Île-de-France (ex : indemnité compensatoire pour sujétions spécifiques) ;

- une logique de « fidélisation » visant à inciter les policiers franciliens à rester dans la région au-delà de leur obligation minimale de service - qui conduit à mettre en place des primes d'un montant élevé mais versées en une seule fois afin de maximiser leur effet déclencheur (ex : complément de fidélisation) ;

- une logique de « pénibilité » visant à rémunérer davantage les agents exerçant dans des secteurs sensibles - qui conduit à mettre en place des primes mensuelles auxquelles sont éligibles les seuls policiers franciliens exerçant des missions opérationnelles dans les circonscriptions de police « difficiles » (ex : avantage spécifique d'ancienneté).

L'empilement des différents dispositifs a pour conséquence qu'il est très difficile pour un policier de calculer ce qu'il « perdrait » en quittant l'agglomération parisienne , ce qui est de nature à porter atteinte à l'effet déclencheur de ces mesures.

En outre, plutôt que de disposer d'un instrument par objectif, chaque dispositif semble poursuivre plusieurs objectifs simultanément, au risque de n'en atteindre aucun .

À titre d'illustration, le complément de fidélisation de 9 000 euros est versé en trois fois (lors de la titularisation, après cinq ans et après dix ans d'affectation). Or, comme cela a été rappelé précédemment, les policiers affectés en Île-de-France après leur réussite au concours ont une obligation minimale de service de huit ans avant de pouvoir obtenir leur mutation. Le « profil » du complément de fidélisation apparaît donc incohérent : si l'objectif - comme le nom du dispositif le suggère - était réellement de fidéliser ces personnels, les primes seraient versées après la fin de l'obligation de service de huit ans. À l'inverse, si l'objectif consiste en réalité à réduire le différentiel de coût de la vie entre Paris et la province, il serait préférable de forfaitiser la prime et de la verser mensuellement.

Cet enchevêtrement d'objectifs n'est d'ailleurs pas sans poser d'importantes difficultés sur le plan juridique, comme en témoigne le contentieux relatif à l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA).

Le contentieux de l'ASA

L'ASA a été mis en place sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, qui dispose que « les fonctionnaires de l'État et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'État dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret ».

L'arrêté interministériel du 17 janvier 2001 a toutefois limité la liste des secteurs éligibles à l'ASA aux circonscriptions de police relevant des secrétariats généraux pour l'administration de la police de Paris et de Versailles - basculant ainsi d'une logique initiale de « pénibilité » à une logique de « compensation » du coût de la vie propre à la région francilienne .

Dans une décision n° 327428 rendue le 16 mars 2011, le Conseil d'État a toutefois annulé l'arrêté , estimant qu'en écartant par principe du bénéfice de l'ASA les fonctionnaires affectés en dehors des secteurs franciliens précités, sans tenir compte de la situation concrète des circonscriptions de police au regard du critère géographique du « quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles », les ministres avaient commis une erreur de droit .

Depuis cette décision, 16 409 recours ont été déposés devant les tribunaux administratifs, qui ont déjà donné lieu à 10 399 jugements condamnant le ministère de l'intérieur à reconstituer la carrière des requérants .

Un nouvel arrêté interministériel est venu en décembre 2015 abroger l'arrêté du 17 janvier 2001 et fixer la liste des 161 circonscriptions de police éligibles à l'ASA. Il a notamment pour effet d'exclure du bénéfice de l'ASA les fonctionnaires franciliens non affectés dans une circonscription « difficile ». Aussi, une majoration de la prime de fidélisation devrait en compensation être accordée aux fonctionnaires affectés en Île-de-France ne pouvant plus bénéficier de l'ASA.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses au questionnaire budgétaire adressé par votre rapporteur spécial)

Ainsi, il apparaît indispensable de simplifier et d'améliorer la cohérence des dispositifs d'incitation financière dont bénéficient les agents de la préfecture de police, ce qui suppose en particulier de rechercher une meilleure articulation avec les durées minimales d'affectation, dans un objectif de fidélisation.

Recommandation n° 7 : modifier les dispositifs visant à fidéliser les personnels afin de renforcer leur caractère incitatif et de tenir compte des durées minimales d'affectation.

En complément, le logement peut également constituer un moyen d'action privilégié pour restaurer l'attractivité de la plaque parisienne et freiner le mouvement de « fuite » vers la province.

Compte tenu de leur niveau de rémunérations, les policiers rencontrent d'importantes difficultés pour se loger . En effet, « un tiers des écarts de prix [par rapport à la province] est dû au coût des loyers, supérieurs de près de 50 % pour les habitants de la région parisienne » 98 ( * ) .

Ces difficultés sont encore aggravées par le fait que, lorsque des logements sociaux sont disponibles, ils sont souvent situés dans des quartiers présentant un climat d'insécurité tel qu'il peut être difficile pour un policier de s'y installer, eu égard à la nature de ses fonctions. Selon la préfecture de police, le principal problème réside ainsi dans le type et la localisation des logements sociaux du parc actuel , constitué de près de 12 000 logements 99 ( * ) .

Des efforts ont toutefois été engagés, conjointement avec la mairie de Paris, auprès des bailleurs sociaux , afin d'obtenir des logements adaptés aux besoins des policiers et situés dans des quartiers plus accueillants pour leurs familles. À titre d'illustration, un nouveau programme constitué de 73 logements situés dans le 19 e arrondissement de la capitale et exclusivement réservés aux jeunes actifs de la préfecture de police a été inauguré le 12 janvier dernier 100 ( * ) .

Cette politique de réservation ciblée doit être poursuivie, dans l'objectif de remédier au problème d'inadaptation de l'offre de logement - au besoin en cédant les logements dont le profil et la localisation apparaissent structurellement inadaptés à la demande.

B. RÉNOVER L'ORGANISATION BUDGÉTAIRE DE LA PRÉFECTURE DE POLICE

Cette politique ambitieuse de rationalisation et d'attractivité pourrait opportunément être accompagnée d'une réforme du mode de financement de la préfecture de police .

1. Revoir les modalités de financement de la préfecture de police

Comme cela a été précédemment montré, l'organisation budgétaire actuelle est source de difficultés pratiques pour les services et ne permet pas d'assurer une juste répartition des charges entre les différents financeurs.

Aussi, la rationalisation du mode de financement des services de la préfecture de police par les différents programmes budgétaires relevant de l'État devrait être engagée . À cet égard, il n'apparaît pas justifié que le programme « Police nationale » assure le financement de l'activité de déminage du laboratoire central, qui relève manifestement du programme « Sécurité civile ». En outre, la préfecture de police devrait bénéficier de supports budgétaires dédiés au sein de l'ensemble des programmes du budget général portant des politiques publiques auxquelles elle contribue.

En complément, une révision des modalités de répartition des charges entre les différents financeurs pourrait être décidée.

Lorsque cela est possible, il semble pertinent de faire reposer la répartition des charges sur des considérations fonctionnelles - et non plus organiques -, à l'image de ce qui existe déjà pour le financement du laboratoire central.

Dans le cas contraire, le principe d'une révision périodique des clés de répartition , sur la base d'éléments statistiques concernant l'activité effective des services, devrait être acté.

À plus long terme, l'opportunité d'un « décroisement budgétaire » pourrait être étudiée , afin de rapprocher les modalités de financement des services de la préfecture de police du droit commun de la décentralisation.

Recommandation n° 8 : réexaminer les modalités de financement des services de la préfecture de police de Paris afin de limiter les financements croisés et d'assurer une juste répartition des charges entre les différents acteurs.

2. Transformer le budget spécial en un véritable support commun de financement de la préfecture de police

En parallèle, il apparaît nécessaire de remédier au fait que le Conseil de Paris vote seul le budget spécial , alors même que la commune de Paris n'y contribue que de manière minoritaire.

L'organisation budgétaire pourrait être revue dans l'objectif de faire du budget spécial un véritable support commun de financement de la préfecture de police, en permettant à des élus issus de l'ensemble des collectivités territoriales concernées de s'exprimer sur le niveau des crédits d'origine communale. Le conseil de la métropole du Grand Paris constituerait la structure naturelle pour procéder à cette évolution.

Un scénario moins ambitieux consisterait à élargir le champ de la concertation actuellement prévue à l'article 1 er du décret n° 2009-1347 du 29 octobre 2009 précité pour les seules dispositions du budget spécial qui se rapportent au financement de la BSPP.

Recommandation n° 9 : faire du budget spécial un véritable support commun de financement de la préfecture de police, afin de permettre à des élus issus de l'ensemble des collectivités territoriales concernées de s'exprimer sur le niveau des crédits d'origine communale.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 1 er février 2017 sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a entendu une communication de M. Philippe Dominati, rapporteur spécial, sur la préfecture de police de Paris.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - La préfecture de police de Paris est une institution à part qui n'a pas d'équivalent dans les principales capitales européennes. Son particularisme s'explique par l'histoire : il s'agit d'une institution bicentenaire, qui a longtemps rayonné essentiellement sur la commune de Paris. Une réforme importante a toutefois étendu en 2009 son périmètre d'intervention à la petite couronne.

Sur le territoire de la ville de Paris, le préfet de police a des compétences particulières qui sont dévolues sur le reste du territoire au maire.

Au-delà de la capitale, ses attributions dérogent également au droit commun. Ainsi, il exerce les compétences habituellement confiées aux services départementaux d'incendie et de secours en matière de lutte contre l'incendie dans l'ensemble de la petite couronne. Par ailleurs, il possède des attributions au niveau de la zone de défense et de sécurité, en tant que préfet de la zone de défense de Paris, ainsi que certaines compétences régionales - et même au-delà, jusqu'à Orléans, s'agissant des transports.

Ces compétences multiples et cette organisation particulière ont souvent été justifiées par le statut de capitale de la ville de Paris - en considérant qu'il est normal qu'une organisation policière spécifique existe pour protéger les institutions et assurer l'ordre public. En réalité, ce n'est pas ce que l'on constate à l'étranger. Il n'existe aucune organisation policière spécifique à Berlin, Madrid et même Bruxelles. Lorsque des particularismes existent, comme à Londres, Washington ou Tokyo, ils n'ont pas l'ampleur de ceux observés à la préfecture de police et concernent souvent le mode de nomination.

Sous la V e République, il y a eu des tentatives pour décliner le modèle du préfet de police sur le reste du territoire. Depuis 2012, il existe ainsi un préfet de police pour les Bouches-du-Rhône. Mais cette création contemporaine est très éloignée du modèle parisien. Les compétences, les pouvoirs et les effectifs du préfet de police des Bouches-du-Rhône restent très en-deçà de ceux de son homologue parisien. Il s'agit d'une structure légère, centrée sur l'opérationnel et le travail de coordination. D'ailleurs, l'ancien préfet de police Philippe Massoni disait souvent que, dans l'administration française, il n'y a pas besoin de préciser « de Paris » lorsque l'on parle du préfet de police. Il n'y a véritablement qu'un seul préfet de police.

La préfecture de police est aujourd'hui fragilisée par la complexité de son organisation et l'enchevêtrement des compétences. Les différentes réformes intervenues - par exemple après l'affaire Ben Barka - n'ont pas ramené l'institution dans le droit commun, voire ont accentué ses spécificités. La préfecture de police conserve ainsi son propre service de renseignement, qui d'ailleurs s'occupe également de la lutte contre l'immigration.

Tout cela pose naturellement la question de la coordination. Sur le territoire de la préfecture de police, on trouve pas moins de onze préfets. Alors que la gendarmerie est caractérisée par l'unité de sa direction - on identifie d'ailleurs clairement son patron dans l'opinion -, trois personnalités coexistent au sommet de la hiérarchie policière : le directeur général de la police nationale, le préfet de police et le directeur général de la sécurité intérieure. L'organisation policière est morcelée, le préfet de police étant directement placé sous l'autorité du ministre de l'intérieur.

Sur le plan budgétaire, les enjeux sont très importants : la préfecture de police représente une dépense de 3,1 milliards d'euros pour le programme « Police nationale ». Le financement de la préfecture de police repose néanmoins sur deux budgets distincts, les services d'intérêt local étant pris en charge par un budget spécial abondé principalement par les collectivités territoriales.

Mais l'organisation budgétaire apparaît incohérente. Certaines dépenses régaliennes demeurent prises en charge par la ville de Paris. À l'inverse, certaines dépenses prises en charge par l'État devraient normalement être financées par les collectivités territoriales au regard du droit commun de la décentralisation. Par ailleurs, l 'organisation budgétaire conduit à faire voter le seul conseil de Paris sur un budget auquel la ville de Paris ne contribue pourtant de que façon minoritaire. Et l'ensemble des investissements tombent dans le patrimoine de la ville de Paris, alors qu'ils ont en partie été financés par les collectivités territoriales de petite couronne.

En outre, l'organisation budgétaire apparaît contradictoire avec l'organisation administrative. Si le préfet de police dépend hiérarchiquement du ministre de l'intérieur, et non du directeur général de la police nationale, ce dernier détermine son budget et ses effectifs en tant que responsable de programme. Le préfet de la police ne maîtrise réellement que 5 % des crédits qu'il exécute !

Dans ce contexte, la préfecture de police est aujourd'hui contestée. Je vous ai amené un ouvrage de Jean-Jacques Urvoas, publié en 2011.

Mme Michèle André , présidente . - Très bonne lecture !

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - En effet ! Dans ce livre, l'actuel ministre de la justice qualifiait la préfecture de police d'« hérésie juridique qu'il est urgent d'abolir », dans un chapitre intitulé « Supprimer la préfecture de police ». Mais cette contestation dépasse les clivages partisans. Notre collègue député Philippe Goujon, maire d'un arrondissement de la ville de Paris, indiquait ainsi récemment dans une tribune que la préfecture de police est « malade ».

Cette insatisfaction s'explique notamment par une hausse de la délinquance : les missions sont parfois mal remplies. Il y a aussi un sentiment d'éloignement, renforcé par la police d'agglomération.

À cet égard, la question des moyens joue certainement un rôle. Les effectifs ont davantage baissé que sur le reste du territoire national, notamment parce que les policiers demandent à quitter la préfecture de police dès qu'ils en ont la possibilité, pour partir en province. En 2015, le nombre de départs a même été plafonné. C'est évidemment sous-optimal sur le plan de l'efficacité : des jeunes peu expérimentés sont amenés à exercer dans des territoires particulièrement sensibles. Il existe des dispositifs d'incitation financière, mais ces derniers sont insuffisants et mal calibrés.

La question des locaux a également retenu mon attention. Je m'attendais à ce que cette institution bicentenaire soit un peu avantagée sur ce plan. Ce n'est pas le cas du tout. On trouve des locaux d'une vétusté surprenante. Le commissariat du 8 e arrondissement est un bon exemple. Cela s'explique notamment par un sous-investissement dans la maintenance. Ces dernières années, la préfecture de police a dépensé environ 6 euros par mètre carré, alors que la norme est plutôt de 15 euros au minimum. Le nouveau chef du service immobilier est en train de définir un nouveau plan stratégique pour remédier à ces difficultés - le dernier remontait à 2008 !

Face à ce constat, quelles sont mes préconisations ?

Il faut recentrer la préfecture de police sur son coeur de métier : l'ordre et la sécurité publics. Dans cette optique, il faudrait transférer à la direction générale de la police nationale et à la direction générale de la sécurité intérieure les compétences du préfet de police en matière de police judiciaire, de police aux frontières et de renseignement. Sur le renseignement et l'immigration, ces préconisations rejoignent celles formulées dans mon précédent rapport. Pour la police judiciaire, l'évolution serait bénéfique, compte tenu de la présence de la direction régionale de la police judiciaire à Versailles et des offices centraux à Nanterre. Le nouveau siège à Batignolles constitue à cet égard une belle opportunité.

En complément, la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris du régime de droit commun, afin de permettre la mise en place d'une police municipale de plein exercice. Des évolutions ont déjà eu lieu en ce sens, mais il faudrait aller plus loin. Je note d'ailleurs que les trois quarts des communes de petite couronne disposent déjà d'une police municipale.

En contrepartie, on pourrait élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police à l'ensemble du territoire de la métropole, afin de rapprocher le périmètre de la police d'agglomération des bassins de délinquance. Actuellement, des villes comme Argenteuil ou Viry-Châtillon sont exclues du périmètre d'intervention du préfet de police. La logique serait d'englober l'ensemble de l'unité urbaine, mais la métropole du Grand Paris constituerait déjà un périmètre plus adapté. Cela permettrait en plus de faire voter l'ensemble des collectivités concernées sur le budget spécial.

Enfin, une politique ambitieuse doit être engagée pour restaurer l'attractivité de la préfecture de police, en augmentant les dépenses d'entretien du parc immobilier et en renforçant les incitations financières visant à fidéliser les personnels.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ce sujet a fait l'objet d'une question d'actualité hier car les statistiques tendent à montrer que les cambriolages et les atteintes aux biens sont en augmentation en région parisienne. Si on ajoute à cela la menace terroriste, la question de l'organisation de la préfecture de police de Paris mérite d'être posée, et je remercie Philippe Dominati d'avoir étudié le sujet. Quand on voit que la commune d'Argenteuil n'est pas dans le ressort de la préfecture de police, on peut s'interroger sur son périmètre d'action. Je souhaiterais poser deux questions à notre rapporteur spécial : quels sont les effectifs policiers de la préfecture de police effectivement présents sur le terrain à un instant donné, en service de jour comme de nuit ? Car derrière les chiffres théoriques, j'imagine que l'organisation du temps de travail et la présence de nombreux services « support » doivent diminuer leur nombre réel, alors même que certaines tâches pourraient probablement être déléguées à des acteurs privés.

Deuxième question : faudrait-il envisager de mettre fin à l'exception parisienne de la préfecture de police, ce qui reviendrait à donner davantage de pouvoir à la ville ? Le coût est-il connu et la ville de Paris serait-elle en mesure de la financer ?

Par ailleurs, notre rapporteur envisage-t-il une suppression des pouvoirs de police relatifs à la circulation du préfet de police ? Pour ma part, je tiens à ce qu'il les conserve pour que la ville de Paris ne prenne pas de nouvelles décisions aussi problématiques que la fermeture des voies sur berge : il est heureux qu'un préfet de police puisse parfois tempérer les initiatives intempestives de certains élus !

Si l'idée est de créer une police municipale à Paris, je suis d'accord, mais je suis en revanche opposé au transfert à la mairie des pouvoirs de circulation.

M. Roger Karoutchi . - Je ne suis pas favorable au système des préfectures de police. Je ne suis pas convaincu qu'il ne faille pas remettre en question ce système ancien, que ce soit à Marseille ou à Paris. On croit qu'il fonctionne bien mais, pour ma part, j'estime qu'il fonctionne mal et qu'il est complétement dépassé face aux nouvelles formes de délinquance.

Je ne pense pas qu'il faille élargir le périmètre de compétence de la préfecture de police à l'ensemble de la métropole, dans la mesure où je doute qu'elle soit parfaitement efficace sur le territoire dont elle a déjà la charge, à savoir Paris et sa petite couronne. N'aurions-nous pas plutôt intérêt à avoir une autorité départementale plus forte, avec des effectifs réellement déconcentrés dans les départements ?

J'ai rendu il y a quelque temps une étude assez approfondie sur les réseaux de délinquance et l'on constate qu'en Île-de-France, les bandes organisées agissent à Paris et dans les départements de la petite couronne mais également de plus en plus dans ceux de la grande couronne, notamment en Seine-et-Marne et le Val-d'Oise. C'est pourquoi j'estime qu'il faut soit conserver le système de la préfecture de police tel qu'il est, soit étendre son périmètre d'intervention à l'ensemble de l'Île-de-France, soit le remettre en cause. Mais je pense que vouloir uniquement la concentrer sur la zone centrale serait une erreur.

M. Philippe Dallier . - En tant que sénateur de la Seine-Saint-Denis, je vais rappeler ce qui se passait dans mon département avant l'arrivée de la préfecture de police. Avec les effectifs de la Seine-Saint-Denis, les soirs de match au stade de France, nos commissariats étaient vides car tous les policiers étaient mobilisés pour assurer sa sécurité. De fait, il faut traiter les problèmes de la zone dense de manière globale et je dois vous dire que j'y suis absolument favorable car je sais qui seraient les parents pauvres si l'on revenait à la situation antérieure : nous serions seuls dans notre coin à gérer nos problèmes ! Or le périphérique n'empêche nullement les délinquants de passer d'un côté à l'autre et la police métropolitaine a du sens.

Je voulais également insister sur les polices municipales. Les élus de Paris débattent de l'opportunité d'en créer une, mais la question ne se pose plus en banlieue. Presque tous les départements de petite couronne disposent d'une police municipale et la question de la coordination de l'ensemble, dans un souci d'efficacité, devrait être posée. Il serait également souhaitable de s'interroger sur le découpage des secteurs d'intervention des différentes polices, car il serait possible d'être beaucoup plus efficace en transférant des zones d'un commissariat à l'autre. J'ai cherché à sensibiliser le ministre de l'intérieur sur ce sujet et on m'a fait valoir qu'il s'agissait d'un chantier difficile et coûteux mais je pense qu'il faut aller vers une police d'agglomération contrôlée par les élus locaux et coordonnée avec celle de l'État. Quel est le sentiment de notre rapporteur spécial sur ce point ?

M. Francis Delattre . - Les zones couvertes par la préfecture de police, telles que la Seine-Saint-Denis, bénéficient d'une présence policière deux fois plus importante que celles situées à l'extérieur, telles que le Val-d'Oise, alors que les deux territoires que je viens de citer sont confrontés à des défis analogues.

C'est un facteur de tensions entre petite et grande couronne. Du point de vue de mon département, cette situation est insupportable, car nous avons dû créer des polices municipales qui sont coûteuses. Et je peux vous assurer qu'à chaque fois que le ministre de l'intérieur annonce des créations de poste à Marseille, nous en perdons dans mon département alors que la préfecture de police n'en perd jamais. C'est un État dans l'État, très puissant, qui conduit à une situation d'inégalité entre des territoires qui devraient être tous traités de la même façon, car lorsque l'on passe d'Épinay à Enghien, on a affaire aux mêmes délinquants.

Par ailleurs, nous avons un vrai problème de logement des policiers, qui doivent être installés à proximité immédiate de leur lieu de travail, et je pense qu'il pourrait être utile de mettre en place pour eux un fonds de garantie des loyers, d'autant que beaucoup de policiers sont endettés.

M. Claude Raynal . - Sur le principe, une police d'agglomération est toujours une bonne idée mais, comme je le vis à Toulouse, cela ne se traduit pas toujours par une meilleure prise en compte des besoins des territoires périphériques, la tendance étant souvent de vider les commissariats de banlieue pour concentrer les moyens en centre-ville. Pour éviter ce genre de travers, il faut définir précisément les missions de la police à l'échelle de l'agglomération dans son ensemble.

Je ne suis pas certain que créer une police municipale à Paris soit une très bonne idée car lorsqu'il existe une police municipale, la police nationale tend souvent à considérer qu'elle n'a plus à assurer la même présence sur les territoires concernés et il n'est donc pas certain, au bout du compte, que leurs habitants soient davantage en sécurité. En outre, il s'agit d'un transfert de charge de l'État vers les collectivités territoriales. Enfin, je veux rappeler que l'enjeu du maintien de l'ordre public à Paris, capitale de la France et siège de ses institutions, ne saurait être comparé avec les problématiques de sécurité rencontrées par les autres villes françaises.

M. Marc Laménie . - Je souhaiterais que notre rapporteur spécial nous apporte quelques compléments d'information sur les effectifs de la préfecture de police de Paris, sur sa stratégie de communication, notamment vis-à-vis des élus locaux et sur son patrimoine immobilier, qui est malheureusement en mauvais état.

M. Jean-Claude Requier . - Il me paraît indispensable de faire coïncider le périmètre d'intervention de la préfecture de police de Paris avec celui de la métropole. Un provincial comme moi peine à saisir les différences entre la ville de Paris, la métropole du Grand Paris, le Grand Paris, la région Île-de-France, etc. ! Il faut chercher à simplifier et ne pas multiplier les périmètres de compétences sans souci de cohérence d'ensemble, à l'instar de ce qui existait sous l'Ancien Régime !

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - En réponse à la question du rapporteur général sur les effectifs, la préfecture de police de Paris représente 42 000 fonctionnaires, dont environ 4 500 fonctionnaires qui dépendent de la ville de Paris. Sur ce total, les effectifs opérationnels représentent environ 27 000 fonctionnaires.

Ceci permet de répondre par anticipation à la question de Claude Raynal sur la délégation à la municipalité de certains pouvoirs de police. Le préfet de police dispose en effet de pouvoirs de police spéciale dans une cinquantaine de domaines. Il ne s'agit pas de sujets de nature à mettre en danger la République. Leur transfert à la municipalité était d'ailleurs l'objet d'une proposition de loi adoptée par le Sénat.

Pour répondre à Francis Delattre, la préfecture de police de Paris est bien loin d'accaparer les effectifs. Ses effectifs ont davantage baissé que ceux de la police nationale entre 2008 et 2015.

En réponse à la deuxième question du rapporteur général, sur les attributions du préfet de police, je rappelle que celui-ci continue de disposer de certains pouvoirs en matière de circulation. Pour les voies sur berge, les décisions de la maire de Paris sont soumises à l'avis conforme du préfet de police. Le problème ne vient donc pas de l'absence de prérogatives de l'État, car celles-ci sont prévues par le droit actuel, quand il s'agit d'axes structurants.

Je suis évidemment sensible à la question posée par Roger Karoutchi sur la pertinence du maintien d'une préfecture de police, qui aurait d'ailleurs pu constituer l'axe principal d'un rapport de la commission des finances. Mais il s'agit là d'un débat politique d'ampleur nationale, et je vous renvoie à cet égard aux trois pages de l'ouvrage de Jean-Jacques Urvoas que je viens de mentionner. L'objet de mon travail était avant tout d'éclairer le fonctionnement et les dysfonctionnements de la préfecture de police, et d'assurer la cohérence de son évolution institutionnelle. Il est vrai qu'on peut aller jusqu'à poser la question de l'utilité même d'une préfecture de police, comme cela a été fait par plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche. Ce débat aura peut-être lieu dans un cadre plus large, le cas échéant en séance publique.

Sur le périmètre de l'Île-de-France, je pense que la région constitue une zone bien trop large. L'unité urbaine comprend moins d'un tiers du territoire régional mais 89 % de ses habitants. Une autre difficulté tient à la présence de zones gendarmerie sur la région - ce qui n'est pas le cas pour le territoire métropolitain.

Les choses sont toutefois compliquées : le préfet de département a perdu sa compétence de police de proximité au profit du préfet de police de Paris, mais combien de fois l'élu de Seine-Saint-Denis - et peut-être demain d'Argenteuil - a-t-il rencontré le préfet de police de Paris ? La permanence des effectifs permise par le passage à un système « dual » est peut-être satisfaisante mais il faut aussi se poser la question de la proximité.

Une dernière remarque : auparavant, une « belle » carrière dans l'administration préfectorale se terminait par un poste de préfet de région puis de préfet de la région Île-de-France - lequel incarne traditionnellement le corps préfectoral et préside l'association des préfets. Souvenons-nous par exemple de notre ancien collègue Lucien Lanier, préfet de la région Île-de-France. Aujourd'hui, l'ampleur des tâches administratives du préfet de police est telle que cette fonction peut constituer l'aboutissement naturel d'une carrière préfectorale : la dimension « civile » du métier l'a emporté sur sa dimension « policière ». Là encore, cela nous ramène à la question, posée entre autres par Jean-Jacques Urvoas, Roger Karoutchi ou encore Philippe Goujon, de la justification de l'existence même de la préfecture de police de Paris.

La commission a donné acte à M. Philippe Dominati de sa communication et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

I. AUDITIONS AU SÉNAT

1. Préfecture de police de Paris

- M. Michel CADOT, préfet de police de Paris.

Secrétariat général de la zone de défense et de sécurité de Paris

- M. Marc MEUNIER, préfet, secrétaire général de la zone de défense et de sécurité de Paris ;

- M. Frédéric SAPOT, général, chef d'état-major de la zone de défense et de sécurité.

Direction régionale de la police judiciaire de Paris

- M. Christian SAINTE, directeur ;

- M. Thierry HUGUET, chef d'état-major.

Direction des transports et de la protection des publics

- M. Jean BENET, directeur.

Direction opérationnelle des services techniques et logistiques

- M. Philippe CARON, directeur ;

- M. Gautier BERANGER, sous-directeur.

Direction de la police générale

- M. Cyrille MAILLET, directeur.

Direction des ressources humaines

- M. David CLAVIERE, directeur ;

- M. Bertrand LEFEVRE de SAINT-GERMAIN, sous-directeur des personnels de la préfecture de police ;

- M. Jérôme FOUCAUD, adjoint.

Direction du renseignement

- M. René BAILLY, directeur.

Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne

- M. Jacques MÉRIC, directeur ;

- M. Nelson BOUARD, commissaire divisionnaire, chef d'état-major ;

- M. Bernard BOBROWSKA, chef de la sous-direction du soutien opérationnel.

Service des affaires immobilières

- M. Gérard PARDINI, chef de service.

Direction des finances et de la commande publique

- M. Gérard CLERISSI, directeur.

2. Direction générale de la police nationale

- M. Jean-Marc FALCONE, directeur général de la police nationale ;

- M. Emmanuel DUPUIS, conseiller budgétaire.

3. Table ronde avec les organisations syndicales

- Unité SGP Police : M. Nicolas COMPTE, secrétaire général adjoint ;

- Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI) : M. Christophe DUMONT, secrétaire national ;

- Syndicat des commissaires de police nationale (SCPN) : Mme Céline BERTHON, secrétaire générale et M. Jean-Luc TALTAVULL, adjoint.

- Alliance police nationale : MM. Stanilas GAUDON, secrétaire administratif général adjoint et Philippe LAVENU, secrétaire national de la section Île-de-France Alliance police nationale.

- Synergies officiers : Mme Bérangère MAGUET, secrétaire nationale et M. Benjamin ISELI, conseiller technique.

- SNAPATSI : Mme Nathalie MAKARSKI, secrétaire générale et M. Jérôme DRUART, secrétaire zonal (Île-de-France).

- Syndicat indépendant des commissaires de la police nationale (SICP) : M. Jean-Paul MEGRET, secrétaire national.

4. Autres

- M. Philippe GOUJON, député, maire du 15 e arrondissement de Paris.

- M. Olivier RENAUDIE, professeur de droit public à l'Université de Lorraine.

II. DÉPLACEMENTS

1. À Paris

Visite du laboratoire central de la préfecture de police de Paris

- M. Pierre CARLOTTI, directeur.

Visite de la salle d'information et de commandement de la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP)

- M. Nelson BOUARD, commissaire divisionnaire, chef d'état-major ;

Visite du centre d'information et de commandement de la direction de l'ordre public et de la circulation

- M. Alain GIBELIN, directeur.

2. À Marseille

- M. Laurent NUMEZ, préfet de police de Marseille ;

- M. Christophe REYNAUD, sous-préfet, directeur de cabinet du préfet de police de Marseille ;

- M. Christophe GROULT, commissaire divisionnaire et M. Frantz TAVART, colonel, conseillers du préfet de police de Marseille ;

- M. Éric ARELLA, directeur interrégional de la police judiciaire de Marseille ;

- M. Olivier HARGUINDEGUY, commissaire divisionnaire, chef du service zonal du renseignement territorial ;

- Mme Marjorie GHIZOLI, commissaire divisionnaire, directrice zonale adjointe de la police aux frontières ;

- Mme Caroline POZMENTIER, vice-présidente de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), adjointe au maire de Marseille, déléguée à la sécurité et à la prévention de la délinquance ;

- M. Yannick BLOUIN, commissaire divisionnaire, directeur départemental adjoint de la sécurité publique ;

- M. le général de corps d'armée David GALTIER, commandant la région de gendarmerie PACA et la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Sud ;

- M. le colonel Frédéric BOUDIER, commandant le groupement de gendarmerie des Bouches-du-Rhône ;

- M. le colonel Sylvain NOYAU, commandant la section des recherches.


* 1 Jean-Marc Berlière et René Lévy, Histoire des polices en France. De l'ancien régime à nos jours , Paris, Nouveau Monde Éditions, 2011, p. 57.

* 2 Jean-Marc Berlière et René Lévy, Histoire des polices en France. De l'ancien régime à nos jours, précité, p. 59.

* 3 Jean-Jacques Urvoas, 11 propositions chocs pour rétablir la sécurité , Fayard, 2011, p. 83.

* 4 Philippe Goujon, « La préfecture de police de Paris est malade », Le Figaro, 20 octobre 2016.

* 5 Ibid .

* 6 Proposition de loi visant à modifier le titre Ier du livre V du code général des collectivités territoriales sur l'organisation administrative de Paris, Marseille et Lyon, présentée par Laurent Dominati, Gilbert Gantier et Claude Goasguen et enregistrée à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 septembre 1999.

* 7 Proposition de loi tendant à la suppression du régime d'exception applicable à Paris en matière de pouvoirs de police de Yves Pozzo di Borgo, déposée au Sénat le 11 octobre 2012. Proposition de loi tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police n° 391 (2014-2015) de Yves Pozzo di Borgo, Pierre Charon et Philippe Dominati, déposée au Sénat le 1 er avril 2015.

* 8 Projet de loi n° 815 (2015-2016) de Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, déposé au Sénat le 3 août 2016.

* 9 Voir par exemple : rapport d'enquête n° 2794 chargée d'établir un état des lieux et de faire des propositions en matière de missions et de modalités du maintien de l'ordre républicain, dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens de Pascal Popelin, déposé le 21 mai 2015.

* 10 Voir par exemple : « Renforcer l'efficacité du renseignement intérieur », rapport d'information n° 36 (2015-2016) de Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances et déposé le 7 octobre 2015.

* 11 Cour des comptes, rapport au président de la République, 1998, pp. 130-175.

* 12 Edmond Mouneyrat, La Préfecture de police , thèse de Droit, Paris, 1906, p. 176.

* 13 Cf. Olivier Renaudie, La préfecture de police , 2008, Lextenso éditions, p. 274.

* 14 Le régime de droit commun est prévu à l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.

* 15 Rapport n° 433 (2014-2015) de Alain Marc, fait au nom de la commission des lois et déposé le 12 mai 2015, p. 9.

* 16 Conseil constitutionnel, décision n° 70-63 L du 9 juillet 1970, cons. 3.

* 17 Article L. 2512-17 du code général des collectivités territoriales.

* 18 Il peut être observé qu'il s'agit là aussi d'une compétence dérogatoire dans la mesure où ces compétences sont normalement dévolues au préfet du département situé au chef-lieu de la zone.

* 19 Article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

* 20 Réponses au questionnaire adressé à la préfecture de police.

* 21 Chambre régionale des comptes d'Île-de-France, « Budget spécial de la préfecture de police de Paris », rapport d'observations définitives, 2012, p. 13.

* 22 Il s'agit notamment des services assurant les missions suivantes : police administrative, administration générale, aides aux associations, contrôle des garnis, périls d'immeubles, direction des services vétérinaires, lutte contre les nuisances, dons et legs.

* 23 Olivier Renaudie, La préfecture de police , précité, p. 390-392.

* 24 Jean-Marc Berlière et René Lévy, Histoire des polices en France. De l'ancien régime à nos jours , précité, p. 87.

* 25 Loi n° 66-492 du 9 juillet 1966 portant organisation de la police nationale.

* 26 Réponses au questionnaire adressé à la préfecture de police.

* 27 Jean-Marc Berlière et René Lévy, Histoire des polices en France. De l'ancien régime à nos jours , précité, p. 59.

* 28 Discours de Manuel Valls, Premier ministre, sur la sécurité à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône, 9 février 2015.

* 29 Cf. décret n° 2012-1151 du 15 octobre 2012 relatif à l'organisation et à l'action des services de l'État dans le département des Bouches-du-Rhône et décret n° 2014-134 du 17 février 2014 relatif à l'organisation des services de l'État dans le département des Bouches-du-Rhône et aux attributions du préfet de police des Bouches-du-Rhône.

* 30 Article 78-3 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'État dans les régions et départements.

* 31 Cf. pour un exemple : Maryline Baumard, Laurent Borredon et Sylvia Zappi, « Marseille disposera d'un préfet de police de plein exercice », Le Monde, 7 septembre 2012.

* 32 Conseil d'État, 5 e sous-section jugeant seule, 10 octobre 2013, 370154.

* 33 Rapport n° 258 (1989-19990) de Lucien Lanier, fait au nom de la commission des lois du Sénat sur la proposition de loi relative à l'exercice du pouvoir de police municipale à Paris, p. 24-25.

* 34 Olivier Renaudie, La préfecture de police , précité, p. 467-468.

* 35 Au cours de l'examen en séance publique, le 21 mai 2015, de la proposition de loi précitée tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police, Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, observait ainsi qu'à Londres, « les missions de la Metropolitan police sont très similaires à celles de la préfecture de police, et le responsable est nommé par le pouvoir central ». De ce fait, elle concluait qu'en « aucun cas la France n'est donc isolée dans sa conception de la sécurité au sein de sa capitale ».

* 36 Simon Bacik, Timothée Delacote, Gaëlle Galand, Mayeul Places, Aude Le Rest et Nicolas Salvagno, « La métropole du Grand Londres », Étude commanditée par la mission de préfiguration de la Métropole du Grand Paris, Institut national des études territoriales, novembre 2015, p. 44.

* 37 Olivier Renaudie, La préfecture de police , précité, p. 468.

* 38 Loi n° 75-1331 du 31 décembre 1975 portant réforme du régime administratif de la ville de Paris.

* 39 Cf. pour une description détaillée : rapport n° 433 (2014-2015) de Alain Marc, fait au nom de la commission des lois et déposé le 12 mai 2015.

* 40 Article L. 2512-14 du code général des collectivités territoriales.

* 41 Fabien Jobard, « La police en banlieue après les émeutes de 2005 », Mouvements , La découverte , 2015/3 (n° 83), p. 75-86.

* 42 Décret n° 2009-898 du 24 juillet 2009 relatif à la compétence territoriale de certaines directions et de certains services de la préfecture de police.

* 43 Olivier Renaudie, La préfecture de police , précité, p. 351.

* 44 Cf. « Renforcer l'efficacité du renseignement intérieur », rapport d'information n° 36 (2015-2016) de Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances et déposé le 7 octobre 2015, p. 21.

* 45 Rapport relatif à l'activité de la délégation parlementaire au renseignement pour l'année 2014, fait par Jean-Jacques Urvoas, décembre 2014, p. 124.

* 46 Olivier Renaudie, La préfecture de police , précité, p. 350.

* 47 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », mars 2016, p. 16.

* 48 Décret n° 67-220 du 17 mars 1967 fixant certaines modalités d'application des arts 12, 13, 16 et 17 de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne, relatifs au transfert des biens, droits et obligations des anciens départements de la Seine et de la Seine-et-Oise vers les nouveaux départements composant la région parisienne.

* 49 Service des affaires immobilières de la préfecture de police, « Avant-projet - Schéma pluriannuel de la stratégie immobilière de la préfecture de police », 2016, p. 9.

* 50 Rapport fait par Georges Fenech et Sébastien Pietrasanta au nom de la commission d'enquête relative aux moyens mis en oeuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 juillet 2016, p. 162.

* 51 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 12-13.

* 52 Réponses au questionnaire.

* 53 Article 1 er du décret n° 2009-1347 du 29 octobre 2009 portant création d'une commission consultative de gestion de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris auprès du préfet de police et modifiant le code général des collectivités territoriales.

* 54 Chambre régionale des comptes d'Île-de-France, « Budget spécial de la préfecture de police de Paris », précité, p. 14.

* 55 Chambre régionale des comptes d'Île-de-France, « Budget spécial de la préfecture de police de Paris », précité, p. 4.

* 56 Conseil d'État, 5 / 3 SSR, du 11 décembre 1991, 110949 110954, publié au recueil Lebon. Les départements du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis estimaient que, « du fait de l'obligation qui leur est faite de supporter une partie de la charge » des dépenses de la préfecture de police relatives à la brigade de sapeurs-pompiers à Paris, « et notamment de verser les acomptes prévus par le décret attaqué, sur la base du budget prévisionnel du service, à l'élaboration duquel les représentants élus des départements ne participent pas, le décret attaqué porterait atteinte à la libre administration des collectivités locales et instituerait une tutelle de la ville de Paris sur les trois départements ».

* 57 Cour des comptes, rapport au président de la République, 1998, p. 134-135.

* 58 Réponses au questionnaire adressé à la préfecture de police.

* 59 Chambre régionale des comptes d'Île-de-France, « Budget spécial de la préfecture de police de Paris », précité, p. 19.

* 60 Le périmètre retenu comprend la direction de la police générale, le service interdépartemental de protection civile, qui est l'équivalent des services interministériels de défense et de protection civile (SIDPC) dans les autres préfectures, et les activités d'une congrégation intervenant auprès des personnes placées au dépôt du palais de justice ou au centre de rétention administrative de l'Île de la Cité (qui sont financées ailleurs par des crédits des ministères de la justice ou de l'intérieur).

* 61 Réponse du préfet de police au rapport d'observations de la chambre régionale des comptes d'Île-de-France précité, disponible en ligne, p. 5.

* 62 Réponses au questionnaire budgétaire.

* 63 Par exemple, sous la forme d'une unité opérationnelle de gestion (UO).

* 64 Amendement au projet de loi de finances pour 2016 n° II-252, présenté par le Gouvernement et adopté par le Sénat en séance publique le 26 novembre 2015.

* 65 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, annexe 15.

* 66 IAU, « Victimation et sentiment d'insécurité en Île-de-France », rapport final de l'enquête de 2013, septembre 2014.

* 67 Il s'agit du taux de victimation global, comprenant à la fois les « victimations personnelles » et les « victimations ménages ».

* 68 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 26 et annexe 15.

* 69 Déclaration de Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur la réforme des missions de la préfecture de police, notamment le maintien de l'ordre public, le développement d'une police de proximité, la sécurité et la lutte contre la délinquance, Paris, le 16 mars 1999.

* 70 Il convient de préciser que les 130 faits d'homicides liés aux attentats de novembre 2015 ne sont pas pris en compte dans ce volume.

* 71 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, annexe 6.

* 72 Cf. pour un exemple : Richard Bellet, « La délinquance ville par ville », Le Journal du Dimanche, 4 septembre 2011.

* 73 Richard Bellet, « La délinquance ville par ville », Le Journal du Dimanche, 4 septembre 2011.

* 74 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 60-61.

* 75 En application de l'article 6 du décret du 23 décembre 2004 portant statut particulier du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, les gardiens de la paix affectés dans la région parisienne sont soumis à une obligation minimale de service de huit ans.

* 76 Cf. pour une illustration : UNSA Police Grand-Paris, « Les policiers parisiens privés artificiellement du droit à mutation ??? », juin 2015.

* 77 Rapport fait par Georges Fenech et Sébastien Pietrasanta au nom de la commission d'enquête relative aux moyens mis en oeuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 juillet 2016, précité.

* 78 Rapport d'information n° 36 (2015-2016) précité, p. 21.

* 79 Rapport n° 82 (2016-2017) de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois et déposé le 26 octobre 2016, p. 67.

* 80 Étude d'impact, p. 37.

* 81 Rapport n° 433 (2014-2015) de Alain Marc, précité, p. 16.

* 82 Compte rendu n° 21 de l'audition de Mme Anne Hidalgo par la commission des lois de l'Assemblée nationale sur le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, mercredi 23 novembre 2016.

* 83 Ibid .

* 84 IGA et IGPN, « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 154.

* 85 Insee, « Unité urbaine », Définitions, 13 octobre 2016.

* 86 Atelier parisien d'urbanisme, « Atlas de l'agglomération parisienne - Premiers éléments cartographiques », décembre 2012, p. 2.

* 87 IAU, « Le Grand Paris de la sécurité », Note rapide, n° 702, octobre 2015, p. 2.

* 88 Ibid .

* 89 AEF, « La région Île-de-France adopte un budget de 21,8 millions d'euros pour la sécurité en 2017 », dépêche n° 554830, 26 janvier 2017.

* 90 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 63-64.

* 91 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », mars 2016, p. 16.

* 92 Réponse au questionnaire budgétaire adressé par votre rapporteur spécial.

* 93 Ibid .

* 94 Ibid .

* 95 Depuis le 1 er janvier 2016, ce périmètre s'est de nouveau élargi dans le cadre de la mise en place du SGAMI, le service étant devenu le service constructeur de la gendarmerie pour la région.

* 96 Service des affaires immobilières de la préfecture de police, « Avant-projet - Schéma pluriannuel de la stratégie immobilière de la préfecture de police », 2016, p. 1.

* 97 Insee Première, « En 2015, les prix en région parisienne dépassent de 9% ceux de la province », n° 1590, avril 2016.

* 98 Insee Première, « En 2015, les prix en région parisienne dépassent de 9 % ceux de la province », précité, p. 1.

* 99 Informations recueillies dans le cadre des auditions menées par votre rapporteur spécial.

* 100 Mairie de Paris, « 73 logements pour les jeunes actifs de la Préfecture de Police », 11 janvier 2017.

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