DEUXIÈME PARTIE : COMMENTAIRES RELATIFS AUX MODALITÉS PARTICULIÈRES D'APPLICATION ET DE MISE EN APPLICATION DES LOIS

A. CINQ LOIS DE LA PÉRIODE DE RÉFÉRENCE SONT D'APPLICATION DIRECTE

1. Loi organique n° 2014-1392 du 24 novembre 2014 portant application de l'article 68 de la Constitution

La loi constitutionnelle du 23 février 2007 portant modification du titre IX de la Constitution consacre le principe d'irresponsabilité du Président de la République pour les « actes accomplis en cette qualité » (article 67 de la Constitution) et établit par conséquent un régime d'inviolabilité absolue tout le long de son mandat. Suivant les recommandations de la commission de réflexion sur le statut pénal du Président de la République présidée par Pierre AVRIL, le constituant s'est doté d'un mécanisme de protection de la fonction de chef de l'État contre son propre titulaire, dans le but de « préserver la dignité de la fonction présidentielle ». L'article 68 de la Constitution prévoit ainsi une procédure de destitution du Président de la République, « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat ». Cette destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour, à la majorité des deux tiers de ses membres. La Haute Cour se réunit sur proposition conjointe de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Sept années auront été nécessaires pour que soit adoptée la loi organique n° 2014-1392 du 24 novembre 2014 qui prévoit les modalités d'une telle destitution. Elle définit dans un premier temps les conditions d'engagement de la procédure. La proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour doit être motivée et recueillir la signature d'au moins un dixième des membres de l'assemblée devant laquelle elle est déposée (article 1 er ), le Bureau de cette dernière examinant sa recevabilité (article 2). En outre, en cas d'adoption par l'une des deux assemblées, la proposition de résolution est inscrite de droit à l'ordre du jour de la seconde (article 3) tandis que son rejet par l'une des assemblées met un terme à la procédure (article 4).

La loi organique consacre enfin trois articles au déroulement des travaux de la Haute Cour. Elle définit la composition et le rôle du Bureau de la Haute Cour et prévoit sa réunion sans délai dès la résolution adoptée (article 5). Elle fixe les prérogatives de la commission chargée de réunir toute information nécessaire à l'accomplissement de sa mission par la Haute Cour. Elle est composée à parité de vice-présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat (article 6). Enfin, la loi organique prévoit le principe de publicité des débats devant la Haute Cour (article 7).

Aucune mesure réglementaire n'étant requise, cette loi organique est d'application directe.

2. Loi n° 2015-264 du 9 mars 2015 autorisant l'accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire

La loi du 9 mars 2015 autorisant l'accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire, issue d'une proposition de loi de MM. Alain Richard et Jean-Pierre Sueur, remédie aux conséquences résultant pour les intercommunalités de la déclaration d'inconstitutionnalité des dispositions de la loi du 16 décembre 2010 encadrant l'accord amiable adopté par les conseils municipaux concernés pour la fixation du nombre de sièges communautaires et leur répartition entre les communes membres d'une communauté d'agglomération ou d'une communauté de communes.

La décision du Conseil constitutionnel n° 2014-405 QPC du 20 juin 2014, qui est applicable aux opérations réalisées postérieurement à sa date de publication, préserve les accords locaux antérieurement conclus tant que la composition du conseil communautaire n'a pas à être modifiée. En revanche, elle impose la désignation de tous les délégués communautaires par stricte application des règles de proportionnalité entre le nombre de représentants et la population de chaque commune à chaque composition ou recomposition d'un conseil communautaire.

La loi réintroduit donc la faculté de composer l'organe délibérant des communautés d'agglomération et de communes par accord entre les communes membres dans des limites compatibles avec la jurisprudence constitutionnelle.

À cette fin, elle autorise un écart de représentation d'une commune à la limite des 20 % par rapport à la moyenne permis par la jurisprudence constitutionnelle dans deux cas précisément déterminés et renforce la condition de majorité qualifiée exigée pour l'adoption de l'accord local en y intégrant le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population totale.

Elle permet aux intercommunalités touchées par la censure de l'accord local résultant de la décision du Conseil constitutionnel, d'y recourir dans sa version rénovée par le présent texte pendant une période de six mois à compter de sa promulgation.

La loi a été déférée « préventivement » au Conseil constitutionnel par des sénateurs tant de la majorité que de l'opposition aux fins de se prononcer sur sa conformité au principe d'égalité. Elle a été déclarée conforme à la Constitution.

Cette loi est d'application directe .

3. Loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes

Pour inciter au regroupement communal, la loi du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes, assouplit le régime de fusion de communes rénové par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales instituant les communes nouvelles. Dans ce but, elle institue plusieurs mesures destinées à faciliter l'intégration des anciennes communes.

? La mise en place d'un passage en paliers des anciennes communes à la commune nouvelle

Il s'agit essentiellement de deux dispositifs :

- le premier permet de lisser la réduction du nombre des mandats municipaux en conséquence de la fusion des communes.

Il institue une période transitoire en deux temps jusqu'au deuxième renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la commune nouvelle : de la création de la commune nouvelle jusqu'au scrutin municipal suivant, la loi autorise le maintien en fonction de l'ensemble des élus des anciennes communes sur la décision de celles-ci adoptée par délibérations concordantes avant la création de la commune nouvelle ; puis au cours de la période s'étendant entre les deux renouvellements généraux des conseils municipaux suivant la création de la commune nouvelle, l'effectif du conseil municipal de la commune nouvelle est déterminé par référence à la strate démographique immédiatement supérieure à celle dont il relève ;

- le second dispositif garantit, à titre transitoire pendant trois ans, le niveau des ressources des communes nouvelles :

1. garantie du maintien, durant cette période, des dotations forfaitaires de la dotation globale de fonctionnement (DGF) perçues par chacune des anciennes communes au profit des communes nouvelles créées au plus tard le 1 er janvier 2016 et regroupant au plus 10 000 habitants ou toutes les communes membres d'un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre ;

2. majoration de 5 % de la dotation forfaitaire des communes nouvelles dont la population est comprise entre 1 000 et 10 000 habitants, pour les trois années suivant leur création ;

3. bénéfice de la part « compensation » et de la dotation de consolidation antérieurement détenues par le ou les EPCI intégrés attribué aux communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d'un ou plusieurs EPCI.

Ces dispositions financières ont été étendues par la loi de finances pour 2016 aux communes nouvelles dont l'arrêté de création est pris entre le 2 janvier 2016 et le 30 septembre 2016 en application de délibérations concordantes des conseils municipaux prises avant le 30 juin 2016.

? Des résultats pertinents

Les effets attendus par la loi du 16 mars 2015 semblent probants. Au 1 er mars dernier, 340 communes nouvelles regroupant plus de 1 161 communes et 1,16 million habitants ont été recensées. 230 d'entre elles ont été créées au 1 er janvier 2016, se substituant à 772 communes, alors qu'entre le 1 er janvier 2013 et le 1 er janvier 2015, seules 25 communes nouvelles avaient été enregistrées.

Cette envolée s'explique aussi par la mise en oeuvre de la réforme territoriale, spécialement l'élargissement des périmètres intercommunaux résultant du relèvement du seuil minimal de constitution des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre fixé par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ainsi que la révision de la carte régionale.

Cette loi est d'application directe .

4. Loi n° 2015-382 du 3 avril 2015 ratifiant l'ordonnance n° 2014 1543 du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de Lyon

La loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles du 27 janvier 2014 (loi Maptam) a créé au 1 er janvier 2015 une collectivité territoriale à statut particulier issue de la fusion de la communauté urbaine de Lyon et du département du Rhône dans les limites du périmètre intercommunal.

Le législateur a élaboré un statut spécifique à cette nouvelle collectivité et accordé au Gouvernement une habilitation législative pour adapter le droit en vigueur à sa création.

L'ordonnance n° 2014-1543 du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de Lyon y a procédé en conséquence. Elle comporte un ensemble de dispositions de nature et de portée très diverses : un certain nombre d'entre elles sont de simples adaptations de l'organisation territoriale à la création de la métropole ; d'autres prévoient des dispositions dérogatoires du droit commun ; certaines, enfin, sont de portée générale pour assurer un fonctionnement harmonieux de la nouvelle collectivité.

Elle a été ratifiée par la loi du 3 avril 2015 qui a procédé, dans le même temps, à l'initiative de la commission des lois et de son rapporteur, M. Jean Patrick Courtois, à trois modifications destinées à préciser ou à rectifier certaines de ses dispositions.

Cette loi est d'application directe.

5. Loi n° 2015-714 du 24 juin 2015 tendant à préciser l'infraction de violation du domicile

Déposée au Sénat le 5 juin 2014 par Mme Nathacha Bouchart et plusieurs de ses collègues, la loi n° 2015-714 du 24 juin 2015 a été adoptée en termes identiques par le Sénat et l'Assemblée nationale en première lecture.

L'article unique de cette loi modifie l'article 226-4 du code pénal afin de lever toute ambiguïté quant à la nature continue du délit de violation de domicile et permettre aux forces de l'ordre d'intervenir pour flagrant délit de violation de domicile, tout au long du maintien dans les lieux.

Aucune mesure réglementaire n'était requise pour l'application de cette loi relevant de la matière pénale.

Cette loi est d'application directe .

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