B. UN COÛT LIÉ À LA MIGRATION SOUS-ESTIMÉ

1. La migration vers ANTARES se traduit par un surcoût pour les SDIS

Pour les SDIS, le basculement vers ANTARES se traduit, en plus des coûts d'investissement liés à la migration, par des coûts de fonctionnement permanents qui peuvent s'interpréter comme un « abonnement » à l'INPT.

Le principe d'une contribution financière des services utilisateurs apparaît pleinement justifié sur le plan économique : en l'absence de l'INPT, les SDIS auraient été contraints de moderniser leurs réseaux analogiques . D'après les données recueillies par la mission IGA-IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'INPT, le coût annuel des frais de modernisation et de maintenance pour l'ensemble des SDIS se serait élevé à 20,3 millions d'euros en l'absence d'ANTARES 22 ( * ) .

Aussi, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours a accepté dès 2005 le principe de la participation des services utilisateurs au fonctionnement, à la maintenance et au renouvellement de l'INPT. L'article 1 er de l'arrêté du 10 mai 2011 portant répartition des contributions financières des services utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions prévoit ainsi la répartition des contributions à hauteur des deux tiers pour les services de sécurité intérieure et d'un tiers pour les services de sécurité civile et des SAMU.

Cette clé de répartition, issue des conclusions de la mission IGA-IDSC précitée, résulte du croisement de deux critères : le nombre de terminaux (50 000 pour la police, 92 000 pour les services de secours) et le mode d'utilisation (le mode « conférence », qui caractérise la police, consomme quatre fois plus de ressources que le mode « talk group », propre aux SDIS) 23 ( * ) .

Par ailleurs, l'étroite corrélation constatée entre la population protégée, le nombre d'interventions et l'usage du réseau a conduit à répartir les contributions des SDIS en fonction de la population au sens de la dotation globale de fonctionnement.

Un tiers du coût de fonctionnement de l'INPT, d'un montant stable de 54 millions d'euros par an, est ainsi mis à la charge des services de sécurité civile et des SAMU :

- 9,75 millions d'euros à la charge des SDIS et du bataillon des marins pompiers de Marseille (BMPM), au prorata de leur population ;

- 0,9 million d'euros pour la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) ;

- 6,1 millions d'euros pour la DGSCGC, dont 2,25 millions d'euros au titre de la prise en charge par l'État des SDIS non encore raccordés ;

- 1,5 million d'euros pour les SAMU.

En prenant en compte non seulement les coûts d'investissement liés au basculement vers ANTARES mais également le coût de « l'abonnement » à l'INPT pour les SDIS - et en comparant ce montant au coût annuel des frais de modernisation et de maintenance des réseaux analogiques - l'IGA et l'IDSC ont ainsi réalisé un bilan financier global du passage vers ANTARES .

Estimation initiale du bilan financier global du basculement vers ANTARES pour les SDIS

(en millions d'euros)

Rénovation des réseaux analogiques

Basculement sur ANTARES

Surcoût lié au basculement

Dépenses

Amortissement

24,5 24 ( * )

36,1 25 ( * )

Frais de fonctionnement 26 ( * )

11,7

26,4

Recettes et gains

Contribution du FAI

1,2

0,5 ETP du fait de l'utilisation du mode "status" 27 ( * )

11,1

Total estimé 28 ( * )

36,2

50,2

14

Note de lecture : Les calculs sont conduits avec une durée d'amortissement de huit ans.

Source : IGA-IDSC

D'après les calculs de la mission, le basculement se traduit pour l'ensemble des SDIS par un surcoût de 14 millions d'euros , qui doit être comparé à l'intérêt opérationnel de la technologie numérique pour les services utilisateurs 29 ( * ) .

L'enquête menée auprès des SDIS semble confirmer le résultat obtenu , 85 % des SDIS considérant que la migration vers ANTARES s'est traduite par un surcoût .

Existence d'un surcoût lié à la migration vers ANTARES

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses à l'enquête)

Toutefois, il apparaît que le coût global du basculement vers ANTARES pour les SDIS a été sous-estimé.

2. L'absence de prise en compte de certains coûts induits

Deux principaux facteurs expliquent l'existence d'un surcoût non anticipé pour les SDIS.

Premièrement, l'extinction du FAI , dont l'impact financier peut être calculé en croisant la contribution moyenne du FAI par SDIS et le nombre de SDIS qui ne pourront bénéficier du FAI à la suite de son extinction.

Deuxièmement, les dépenses supplémentaires liées au renouvellement des clés de chiffrement. Sur l'INPT, la confidentialité est garantie par le chiffrement des communications. Une crypto-période de deux ans a été retenue, ce qui oblige chaque SDIS à reprogrammer l'ensemble des terminaux tous les deux ans. D'après les résultats de l'enquête menée auprès des SDIS par l'ANDSIS et les informations obtenues par votre rapporteur spécial lors des auditions et des déplacements, cette intervention mobilise en moyenne 0,5 équivalent temps plein par an dans chaque SDIS. À partir de la méthode retenue par la mission IGA-IDSC pour évaluer le gain financier lié à la moindre mobilisation des opérateurs du fait de l'utilisation du mode « status » 30 ( * ) , il est ainsi possible d'estimer le surcoût global, pour les SDIS, lié à la crypto-période de deux ans.

Une fois ces surcoûts non anticipés pris en compte , le bilan financier global du basculement vers ANTARES pour les SDIS est plus défavorable qu'escompté : la migration se traduit par un surcoût minimum de 25 millions d'euros, pour une estimation initiale de 14 millions d'euros.

Dans une situation où le moindre intérêt opérationnel du basculement vers ANTARES se conjugue à des surcoûts non anticipés, il apparaît déterminant de concrétiser les marges de progrès qui demeurent tant sur le plan opérationnel que financier.


* 22 IGA / IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions, juillet 2010, p. 27.

* 23 IGA / IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions, juillet 2010, p. 6.

* 24 Il s'agit principalement des coûts liés aux terminaux analogiques, au remplacement des réseaux analogiques et à l'acquisition des interfaces CODIS.

* 25 Il s'agit principalement des coûts liés aux terminaux numériques, à l'acquisition des interfaces CODIS et à l'évolution des logiciels de traitement des alertes.

* 26 Il s'agit non seulement des frais de fonctionnement liés à l'abonnement à l'INPT mais également des frais de fonctionnement liés à la maintenance des terminaux.

* 27 Rapport IGA / IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions, juillet 2010, annexe 11.

* 28 Rapport IGA / IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions, juillet 2010, p. 85.

* 29 IGA / IDSC sur la répartition de la contribution aux frais de fonctionnement entre les utilisateurs de l'infrastructure nationale partageable des transmissions, juillet 2010, p. 85.

* 30 Voir le 2 du I de la première partie du présent rapport.

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