B. L'ENCADREMENT JURIDIQUE DES CENTRES ET LOCAUX DE RÉTENTION

1- Les textes règlementant la création des CRA et les LRA

Les centres de rétention administrative ont été créés le 5 avril 1984 par décision du Premier ministre et mis en place par le biais de simples circulaires sur le fondement de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. Avant le décret du 19 mars 2001, aucun texte réglementaire ne fixait les lieux d'implantation et le nombre de centre autorisés.

Lors de son entrée en vigueur le 1 er mars 2005, le Ceseda dispose que « peuvent être maintenus dans des lieux de rétention ne relevant pas de l'administration pénitentiaire les étrangers faisant l'objet d'une mesure administrative de reconduite à la frontière ». Pris en application de ce code, le décret du 30 mai 2005 relatif à la rétention administrative et aux zones d'attente a fixé les conditions de leur création.

Les centres de rétention administrative, qui ont une vocation nationale, sont créés sur proposition du ministre chargé de l'intérieur, par arrêté conjoint des ministres chargés de l'intérieur, de la justice, de la défense et des affaires sociales. Onze arrêtés ont été pris depuis 2005 pour adapter l'évolution de la liste des CRA, le dernier datant du 21 mai 2008. Ces textes mentionnent les centres susceptibles d'accueillir des familles.

Le préfet peut en outre créer par arrêté préfectoral, à titre permanent ou pour une durée déterminée, un local de rétention administrative (LRA) lorsqu'en raison de circonstances particulières, notamment de temps ou de lieu, des étrangers ne peuvent être placés immédiatement dans un CRA.

2- La règlementation commune aux lieux de rétention

Les principales dispositions applicables autant aux CRA qu'aux LRA, sont récapitulées dans le Ceseda.

a- Les textes législatifs

Ces textes ne définissent pas de statut juridique pour les centres ou les locaux de rétention administrative. Les lieux de rétention administrative sont placés sous la responsabilité du préfet territorialement compétent et, à Paris, du préfet de police. Les principales dispositions portent sur :

- l'obligation de tenue d'un registre, mentionnant l'état civil des retenus ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien. Il doit être précisé sur ce registre les dates et heures du début de placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les dates et heures des décisions de prolongation (article L. 553-1) ;

- la possibilité, en cas de nécessité, pour l'autorité administrative de décider de déplacer l'étranger d'un lieu de rétention vers un autre lieu de rétention sous réserve d'en informer les procureurs de la République compétents ainsi que, après la première ordonnance de prolongation, les juges des libertés de la détention (JLD) compétents (article L. 553-2) ;

- l'existence, dans chaque lieu de rétention, d'un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers retenus. Ce local doit être accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat, sauf en cas de force majeure (article L. 553-4) ;

- l'obligation d'informer l'étranger par le responsable du lieu de rétention de toutes les prévisions de déplacement le concernant, sauf « menace à l'ordre public à l'intérieur ou extérieur du lieu de rétention ou si la personne ne paraît pas psychologiquement à même de recevoir ces informations » (article L. 553-5) ;

- la mise à disposition des personnes retenues d'un document rédigé dans les langues les plus couramment utilisées et décrivant les droits de l'étranger et leurs conditions d'exercice (article L. 553-5) ; l'arrêté du 2 mai 2006 indique les langues en question : l'anglais, l'arabe, le chinois, l'espagnol, le portugais et le russe.

b- Les dispositions réglementaires

Elles ont été fixées par le décret n° 2005-617 du 30 mai 2005, repris dans le titre V du Ceseda et qui abroge le décret du 19 mars 2001. Il introduit certaines améliorations sur les aménagements exigés, mais a reculé au 31 décembre 2006 l'obligation de mise aux normes des locaux.

Dès son arrivée, chaque étranger doit pouvoir communiquer avec toute personne de son choix avec les autorités consulaires du pays dont il déclare avoir la nationalité et avec son avocat. Quel que soit le lieu de rétention, un procès-verbal de la procédure de notification des droits en rétention est établi. Il est signé par l'intéressé, qui en reçoit un exemplaire, le fonctionnaire qui en est l'auteur et, le cas échéant, l'interprète. Ses références sont portées sur le registre du lieu de rétention (art R. 551-4).

Outre le local pour les avocats, déjà prévu par la loi, il est prévu (art R. 553-8) des locaux et des moyens matériels pour permettre au personnel de santé de donner des consultations et de dispenser des soins. Les conditions d'intervention du service public hospitalier doivent être précisées par voie de convention passée entre le préfet territorialement compétent et un établissement public hospitalier, selon des modalités définies par arrêté ministériel.

Enfin, c'est le préfet ayant procédé au placement en rétention de l'étranger qui exécute la mesure d'éloignement jusqu'au terme de la procédure engagée, quel que soit le lieu où l'étranger en cause est maintenu en rétention.

3- Le dispositif de contrôle des lieux de rétention

Le Ceseda prévoit que le Procureur de la République visite les locaux concernés au moins une fois par semestre.

§ La commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d'attente, instituée par la loi du 26 novembre 2003 et organisée par le décret du 30 mai 2005 est chargée de veiller au respect des normes d'hygiène, de salubrité, de sécurité et d'aménagement ainsi que des droits des étrangers dans les lieux de rétention. Le Ceseda lui consacre les articles R 511.25 à R 511-32. Un rapport annuel formule des observations et des recommandations. Ses fonctions sont dorénavant dévolues au contrôleur général des lieux de privation de liberté, sans que la commission ait été formellement supprimée.

§ Institué par la loi n°2007-1545 du 30 octobre 2007, le contrôleur général des lieux de privation de liberté est une autorité administrative indépendante chargée, sans préjudice des prérogatives que la loi attribue aux autorités judiciaires ou juridictionnelles, de contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté, afin de s'assurer du respect de leurs droits fondamentaux.

A l'issue de chaque visite, le contrôleur général fait connaître aux ministres intéressés ses observations concernant en particulier l'état, l'organisation ou le fonctionnement du lieu visité, ainsi que la condition des personnes privées de liberté. Les ministres formulent des observations en réponse chaque fois qu'ils le jugent utile ou lorsque le contrôleur général l'a expressément demandé.

S'il constate une violation grave des droits fondamentaux d'une personne privée de liberté, le contrôleur général communique sans délai aux autorités compétentes ses observations, leur impartit un délai pour y répondre et, à l'issue de ce délai, constate s'il a été mis fin à la violation signalée. S'il l'estime nécessaire, il rend alors immédiatement public le contenu de ses observations et des réponses reçues.

§ La commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), créée par la loi n° 2000-494 du 6 juin 2000, intervient enfin sur ces sujets. Autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité, elle a porté ces dernières années une attention croissante aux lieux de privation de liberté et aux procédures en matière d'interpellation, de rétention et de reconduite.

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