II. AMÉLIORER LA GESTION COMPTABLE ET L'ÉVALUATION DES POLITIQUES D'INVESTISSEMENT

A. LE CONTRÔLE DES PORTS MARITIMES DONNE DES RÉSULTATS

1. Les observations de la Cour des comptes sur la gestion des ports maritimes

En tant qu'établissements publics de l'Etat, les ports autonomes sont régulièrement contrôlés par la Cour des comptes. Depuis 1995, ont été contrôlés les ports de Nantes Saint Nazaire, Rouen, Dunkerque, Pointe-à-Pitre, et Marseille pour leur gestion sur des exercices compris entre 1989 et 1995.

Au cours de ces contrôles, la Cour des comptes a relevé plusieurs éléments :

1) L'absence d'approbation, par les autorités de tutelle, des états prévisionnels de recettes et de dépenses et des comptes exécutés en application de l'instruction n° 9352 M 9-5 de la direction de la comptabilité publique.

2) Une insuffisance de la procédure comptable en vigueur , qui est celle applicable aux établissements publics à caractère industriel et commercial et qui ne tient pas compte des spécificités de l'activité portuaire. La Cour relève par ailleurs que le cumul des fonctions d'agent comptable et de directeur financier peut nuire à la complète indépendance du comptable public par rapport à l'ordonnateur.

3) L'insuffisante précision du code des ports maritimes pour les procédures des achats.

4) La nécessité de renforcer le rôle de l'Etat dans la coordination des investissements portuaires , afin d'éviter des surcapacités globales sur le territoire national (la Cour juge de nombreux projets portuaires trop ambitieux) et de procéder à une clarification des règles dans le financement des investissements portuaires . Par ailleurs, comme l'avait fait le Comité des investissements à caractère économique et social (CIES), la Cour critique l'insuffisance de maîtrise des prévisions budgétaires.

2. Des améliorations ont été apportées au cadre budgétaire et comptable régissant les ports maritimes

Des solutions ont été apportées aux observations soulevées par la Cour des comptes

Les autorités de tutelle ont ainsi procédé, par arrêté interministériel conjoint du ministre de l'Equipement, des transports et du logement et du secrétaire d'Etat au budget, le 28 octobre 1997, à l'approbation des comptes financiers des ports autonomes maritimes pour des exercices portant sur les années 1986 à 1995 pour sept ports autonomes. Cette procédure a été renouvelée en 1998 pour les comptes financiers du port de Rouen en 1995 et les exercices 1996 de l'ensemble des ports maritimes.

Cette approbation a été précédée d'un travail de vérification des comptes (contrôle de cohérence des soldes de fin et de début d'exercice, examen du bilan et du compte de résultat) avec le concours des services du contrôle d'Etat.

Il reste toutefois à améliorer l'approbation des états prévisionnels primitifs de recettes et de dépenses (EPRD) qui devraient intervenir au plus tard le 15 janvier de l'année.

Concernant l'amélioration du plan comptable applicable aux ports, un groupe de travail interministériel doit être mis en place pour aboutir à une instruction budgétaire et comptable courant 1999.

S'agissant du cumul des fonctions d'agent comptable et de directeur financier, cette question n'est pas propre aux ports maritimes, mais il semble qu'elle concerne de nombreux établissements publics à caractère industriel et commercial. Le sujet mérite donc une réflexion interministérielle.

Concernant les marchés publics, un projet de décret prévoit l'application de la réglementation des marchés publics à tout marché passé par un port autonome donnant lieu non seulement à une participation financière de l'Etat, mais aussi des collectivités locales ou des communautés européennes.

Enfin, un certain nombre de situations particulières ont dû être redressées : le port de Rouen a ainsi dû constituer des provisions pour dépréciation des stocks et appliquer un plan de redressement de sa situation financière. Le port de Dunkerque a dû régulariser certaines écritures comptables et développer des contrôles internes. La gestion du port de Guadeloupe a également été améliorée. 7( * ) .

B. LES PROGRAMMES D'INVESTISSEMENT DANS LES PORTS MARITIMES FONT L'OBJET D'UN CONTROLE ACCRU

1. Accroître les études préalables à la réalisation des investissements

Les remarques de la Cour des comptes sur les programmes d'investissement dans les ports maritimes portent davantage sur des questions d'opportunité que de régularité comptable et budgétaire.

Le ministère de l'Equipement, des transports et du logement partage l'avis de la Cour des comptes, à savoir que s'agissant des investissements, le contenu initial de certains contrats de plan "Etat-région" était surdimensionné, faute d'avoir été précédé d'études économiques suffisantes.

Un certain nombre de recentrages ont été effectués, concernant des projets à Rouen (approfondissement du chenal), à Nantes-Saint-Nazaire (extension du site de Donges-Est), et à Bordeaux. Désormais, tous les projets d'investissement "font l'objet d'études économiques approfondies".

Votre rapporteur reste toutefois perplexe quant à l'idée que les programmes d'investissement antérieurs n'auraient pas fait l'objet d'études économiques préalables.

Quoiqu'il en soit, le projet "port 2000" entre dans le champ des projets d'investissement faisant l'objet d'une étude technique et d'une concertation approfondies.

Ce projet devrait concentrer les crédits d'investissement en infrastructure des ports maritimes. Il apparaît, en effet, que le ministère de l'Equipement, des transports et du logement souhaite éviter de procéder à des équipements portuaires qui auraient pour effet d'accroître la concurrence entre les ports.

En revanche, il dit souhaiter placer l'effort financier sur l'entretien des infrastructures portuaires, en prenant notamment en compte les enjeux liés à la sécurité. Cet objectif ne peut qu'être approuvé, mais encore faut-il que les crédits soient régulièrement revalorisés, ce qui n'est actuellement pas le cas.

Le souhait du ministère de l'Equipement, des transports et du logement est que les investisseurs privés s'impliquent davantage dans le développement de certaines superstructures portuaires, pour lesquelles il serait dès lors intéressés à leur rentabilité . Cet objectif est effectivement raisonnable, mais il faudra pour cela faciliter ces investissements privés, notamment par l'amélioration du régime des concessions portuaires.

2. Un projet modèle : le projet "Port 2000" au Havre

a) L'enjeu du projet "Port 2000"

Le projet port 2000 vise à développer l'escale du Havre sur les lignes de porte-conteneurs de la nouvelle génération, afin de le positionner sur un axe stratégique important, l'axe "Est-Ouest".

Le trafic du port du Havre s'est renforcé ces dernières années : il est passé de 6,8 millions de tonnes en 1992 à 11 millions de tonnes en 1997 (+ 62% en cinq ans).

Si cette croissance se poursuit, le trafic du port du Havre devrait doubler son trafic entre 1996 et 2005, pour atteindre 2 millions d'EVP.

Actuellement, le port dispose d'installations et d'équipements dispersés avec 5 terminaux isolés de part et d'autre du chenal maritime et de l'écluse. Le fait de disposer de terminaux isolés et non de linéaires de quais rectiligne fait perdre près de 50% de trafic de conteneurs.

Le projet "Port 2000" a donc pour objet de regrouper les installations portuaires autour d'équipements de haute technologie et d'accompagner ce programme de modernisation des équipements par une amélioration de la desserte du port.

b) Une procédure de concertation

Une concertation a été lancée en novembre 1997. Une commission particulière du débat public, présidée par M. Jean-Luc Mathieu, conseiller-maître à la Cour des comptes, a pris en charge le dossier "Le Havre-Port 2000". D'autre part, deux procédures de concertation ont été engagées, l'une au niveau local et l'autre au niveau interministériel.

c) Les différentes options possibles

Plusieurs propositions ont été faites pour l'aménagement du port autonome du Havre.

Certaines visent à engager un aménagement purement intérieur au port du Havre. Cependant, ces solutions ont pour inconvénient de poser des difficultés en matière de sécurité de la navigation, et elles limiteraient les possibilités d'extension du port.

Le port autonome du Havre a présenté un schéma de développement. Il s'agit de la création à terme de douze postes à quai au sud du port et de deux postes à l'intérieur du port. Une première tranche de travaux consisterait en la création de trois postes à quai, la création d'une digue permettant de mettre en place une vasière artificielle et l'amélioration des accès terrestres, pour un coût global estimé à 2,3 milliards de francs.

d) Le calendrier des décisions

La décision ministérielle autorisant l'engagement des travaux devrait intervenir très prochainement . Elle aurait pour effet de solliciter le budget des ports maritimes pour un montant important (chapitre 53-30) et éventuellement le Réseau Ferré de France et le compte spécial du Trésor "Fonds d'investissements des transports terrestres et des voies navigables" pour les accès ferroviaires et fluviaux.

Le financement pourrait intervenir selon deux modalités différentes :

- un financement par l'Etat dans le cadre du contrat de plan Etat-région.

- un financement par l'Etat par le biais d'un accord spécifique entre l'Etat et les collectivités locales.

Les travaux devraient s'étendre entre 2000 et fin 2002.

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