B. L'AGREMENT MINISTERIEL PREVIENT LES INCONVENIENTS INHERENTS A TOUT MECANISME D'INCITATION FISCALE

1. Toute dépense fiscale est susceptible d'induire des effets pervers

Le gouvernement et le Parlement, qui déterminent la politique fiscale, peuvent légitimement instaurer des incitations à l'investissement et à l'épargne dans les secteurs qui leur paraissent importants pour la Nation.

Cependant, tout dispositif d'incitation fiscale à l'investissement puissant et efficace est porteur d'effets pervers potentiels, comme l'a relevé le rapport "Ducamin" 9 ( * ) .

(1) Un effet de concurrence "déloyale" envers les investissements existant qui, par définition, n'ont pas pu bénéficier de la mesure avant sa création. Cet effet pervers s'est exercé à plein dans le secteur de l'hôtellerie au cours des dernières années, avant la modification du régime des BIC non professionnels. Dans le cas présent, ce risque devrait être limité dans la mesure où, le plus souvent, ce sont les mêmes armateurs qui géreront à la fois des navires anciens et des navires acquis dans le cadre du nouveau régime d'exonération fiscale.

(2) Un effet de détournement des flux d'investissements des secteurs demeurés en dehors du champ de la mesure incitative. Ce risque est sérieux, et motive d'ailleurs les amendements proposés par votre commission pour étendre le champ du dispositif à l'ensemble des navires.

(3) Un effet de rentabilisation artificielle de projets intrinsèquement peu viables. Ce risque devrait être contenu par le professionnalisme des armateurs et des banques associées aux projets de copropriétés de navires.

(4) Un effet de perturbation des choix économiques des investisseurs. Cet effet est inhérent au mécanisme de l'incitation fiscale, qui a précisément pour but de susciter des décisions d'investissements qui n'auraient pas été prises spontanément. Il ne se pose pas tant pour les particuliers, qui rechercheront surtout l'avantage fiscal personnel, que pour les entreprises : l'exonération totale des sommes que celles-ci placent dans les navires rend ces investissements de "diversification" plus rentable que leurs propres investissements dans leur secteur d'activité. Toutefois, on peut supposer que la capacité d'arbitrage des responsables des sociétés et le contrôle des actionnaires feront en sorte que l'attrait fiscal des quirats ne conduira pas les entreprises à négliger le financement de leurs propres activités.

(5) Un effet d'aubaine, qui se traduirait par l'afflux d'investisseurs motivés uniquement par des considérations de pure optimisation fiscale, mais parfaitement indifférents aux activités maritimes. Cependant, les armateurs gérant les copropriété de navires préféreront sans doute s'associer avec leurs partenaires naturels, c'est-à-dire les entreprises qui ont un rôle ou un intérêt dans le transport maritime : chargeurs, assureurs maritimes ou même constructeurs de navires.

L'agencement de la mesure proposée par le gouvernement est tel que les effets pervers évoqués ci-dessus ne se concrétiseront pas. De plus, le dispositif est doté d'un "cran de sûreté" : l'agrément ministériel.

* 9 MM. Bernard Ducamin. Robert Baconnier et Raoul Briet - Rapport au ministre du Budget -"Etudes des prélèvements fiscaux et sociaux pesant sur les ménages" - p. 103 et suivantes

Page mise à jour le

Partager cette page