2. L'agrément préalable constitue un verrou suffisant

Certes, le renvoi à un agrément ministériel en matière fiscale est toujours délicat au regard des principes constitutionnels. Comme le rappelle M. Bernard Ducamin dans sa contribution au dernier rapport public du Conseil d'État 10 ( * ) , on peut se demander si, "lorsqu'il subordonne à un agrément par le ministre des finances l'octroi d'un avantage fiscal, le législateur ne viole pas l'obligation que lui fait la Constitution de déterminer les règles d'assiette, car le renvoi à un agrément revient en fait à subordonner le bénéfice de l'exonération - donc le champ de l'application de la loi au niveau du contribuable - à l'appréciation des services fiscaux, voire à l'arbitraire d'un ministre." Mais, en l'occurrence, les conditions de l'agrément seront fixées par la loi, ce qui liera la compétence de l'administration et assurera, en cas de litige, un contrôle juridictionnel efficace.

Le gouvernement n'a pas souhaité, pour cette nouvelle exonération fiscale, enserrer les services fiscaux dans un délai de réponse qui leur serait opposable. Dans le silence de la loi, c'est donc le principe général du droit administratif selon lequel le silence de l'administration vaut rejet au terme de quatre mois, qui s'appliquera. Le régime d'exonération fiscale pour les investissements dans les DOM prévoit un délai de trois mois au-delà duquel le silence de l'administration vaut acceptation tacite. Mais cette dérogation légale aux principes du droit administratif ne semble pas, en l'espèce, opportune au regard du montant et de l'importance stratégique des investissements concernés.

Toutefois, votre rapporteur appelle l'attention du gouvernement sur la nécessité d'adapter la procédure d'agrément, qui sera fixée par voie de circulaire, au cas particulier des navires d'occasion.

Ceux-ci sont acquis sur un marché international organisé (par des courtiers spécialisés), où les décisions doivent être prises en quelques semaines lorsqu'un navire intéressant se présente. Il conviendrait donc qu'un agrément de principe puisse être donné sur la base d'un projet dont tous les éléments seraient connus (armateur, conditions de financement, caractéristiques du navire) à l'exception de l'identité du navire. L'agrément ne serait juridiquement parfait qu'après l'achat effectif du navire d'occasion, sous réserve qu'il corresponde bien aux caractéristiques notifiées, ce qui pourra être rapidement vérifié. La souscription des parts de copropriété pourrait alors être ouverte, sur la base de l'agrément définitivement donné.

* 10 Conseil d'État - Rapport public 1995 - p. 493-494

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