DEUXIÈME PARTIE : LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROTOCOLE N° 11

I. UN NÉCESSAIRE AMÉNAGEMENT DES STRUCTURES DE CONTRÔLE

A. LES MOTIFS D'UNE RESTRUCTURATION

Par le champ des droits individuels qu'elle recouvre et la précision de leur description, par l'efficience de son système de contrôle, la Convention européenne des droits de l'homme répond bien, après 40 années de fonctionnement, aux espérances que ses initiateurs avaient placées en elle. Par sa jurisprudence exigeante et riche, la Cour a su faire progresser la protection des droits et libertés individuels en Europe, tant par les arrêts qu'elle a pu rendre que par le rôle d'aiguillon qu'elle a su tenir pour inciter certains Etats à aménager leurs législations intérieures dans une perspective plus respectueuse des droits fondamentaux.

Mais, victimes de leur propre succès, il est apparu indispensable de procéder à une restructuration de ses organes de contrôle, pour plusieurs raisons.

l'abondance des requêtes individuelles : si le nombre de requêtes étatiques est resté relativement limité, celui des requêtes individuelles a connu une croissance exponentielle : de 1955 à 1993, 23 114 requêtes ont été enregistrées par la Commission (2 037 en 1993). Si la moyenne annuelle des requêtes était de 444 entre 1975 et 1984, elle a atteint 1 313 de 1985 à 1993. La Cour a été confrontée à un phénomène identique : si elle n'a eu à rendre que 31 décisions entre 1959 et 1978, ce chiffre est passé à 417 entre 1979 et 1994 et ,depuis 1991, elle rend une moyenne de 71 arrêts par an.

la lenteur de la procédure. Celle-ci est directement liée à l'engorgement dont il vient d'être fait mention. De la saisine de la Commission à l'arrêt de la Cour, la durée de la procédure est en moyenne de 5 ans et demi. Même si les aménagements de procédure (constitution du comité de trois membres au sein de la commission pour procéder au filtrage des requêtes) ont récemment permis une réduction de ce délai, il reste néanmoins excessif, singulièrement pour une Cour qui peut être amenée à sanctionner tout manquement à l'obligation de "délai raisonnable du procès équitable".

on a également mis en relief le manque de clarté de la procédure pour les particuliers : la multiplicité des scénarios possibles après une saisine individuelle -rejet éventuel de la requête par la Commission, rapport de la même Commission, décision du Comité des ministres, arrêt de la Cour, règlement amiable avec l'Etat en cause- est susceptible de décourager, par sa complexité apparente, des requérants potentiels.

il convient enfin de rappeler que la dualité des instances Commission/Cour a abouti sinon à des arrêts divergents -la Commission n'est pas à proprement parler un organe juridictionnel- du moins à des appréciations différentes du fond d'une affaire, la Commission se montrant souvent plus libérale que la Cour dans son interprétation de la convention. Sans aller jusqu'à évoquer le terme de "guerre des juges", on ne peut manquer de relever, ici et là, des divergences de jurisprudence entre les deux instances de contrôle.

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