B. D'IMPORTANTS EFFORTS SONT NÉANMOINS MENÉS POUR RENFORCER L'ATTRACTIVITÉ DES POSTES ET LA FIDÉLISATION DES EFFECTIFS

Pour faire face à ces difficultés, le ministère des Armées mène d'importants efforts pour renforcer l'attractivité des postes et la fidélisation des effectifs. Le PLF 2024 prévoit ainsi à cette fin des crédits de masse salariale (T2) supplémentaires à hauteur de 570 millions d'euros dont :

- 65 millions d'euros au titre de mesures indiciaires et indemnitaires nouvelles. S'agissant du personnel militaire, des mesures indemnitaires nouvelles ciblent certaines filières particulièrement exposées aux tensions de recrutement : service de santé des armées (SSA), numérique, renseignement, et nucléaire (18,3 millions d'euros) ;

- 284 millions d'euros au titre de l'impact de mesures ministérielles déjà lancées, au premier rang desquelles la troisième marche de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM) (263 millions d'euros) ;

- 223 millions d'euros au titre de l'impact en 2024 de mesures générales décidées en 2023, notamment dans le cadre du « Rendez-vous salarial » du 12 juin engagé par le Ministère de la Transformation et de la Fonction publique : revalorisation du point d'indice (74 millions d'euros), attribution de 5 points d'indice au 1er janvier 2024 (108 millions d'euros), attribution ciblée de 1 à 9 point d'indice aux agents de catégorie B et C et équivalents militaires (militaires du rang, sous-officiers, aspirants) (18 millions d'euros), renforcement de la participation aux frais de transports ( 3 millions d'euros) etc.

Il est à noter que l'exercice 2024 serait le premier exercice d'application de l'ensemble des mesures de la NPRM (voir encadré).

Le ministère mène également une politique active de fidélisation du personnel, identifiée comme une priorité par l'ensemble des responsables des états-majors auditionnés par le rapporteur spécial.

Dans le souci de rentabiliser au mieux l'investissement consenti au profit du personnel, cette politique consiste se donne pour objectif de conserver l'expérience acquise et les compétences détenues, notamment au sein des forces, et en particulier s'agissant de compétences en tension (cybersécurité, systèmes d'information et de communication, maintien en condition opérationnelle, santé). La fidélisation est aussi gage d'efficacité opérationnelle dans un contexte d'augmentation du nombre de missions et de durcissement des opérations.

Les politiques sont déclinées selon trois volets :

- le volet indemnitaire : outre la NPRM, des dispositifs spécifiques ont été déployés dans le cadre de la politique de fidélisation, au premier rang desquels la prime de lien au service (PLS), qui permet de cibler les compétences à fidéliser en orientant les flux et en définissant annuellement les viviers prioritaires, avec une grande souplesse laissée aux gestionnaires.

- le volet carrière, avec notamment des assouplissements des conditions pour passer du statut de contractuel au statut de carrière pour les officiers (2020) et des conditions d'âge pour l'accès aux commandements d'unités opérationnelles (2021) et l'objectif de modernisation des outils de formation ;

le volet « conciliation entre vie professionnelle et vie privée », avec notamment la mise en oeuvre du plan Famille 2, doté de 750 millions d'euros sur 2024-2030 (dont 70 millions d'euros en 2024) et centré autour de trois priorités : l'accompagnement de la mobilité (par exemple avec des mesures visant à atténuer la charge administrative, à accompagner les conjoints vers l'emploi...), la compensation des contraintes opérationnelles les plus fortes (par exemple avec des mesures visant l'augmentation de l'offre de garde de jeunes enfants, notamment en horaires atypiques, à proposer au personnel une offre d'accès gratuit à interner en haut débit, y compris à l'étranger et dans certains bâtiments de la Marine) et l'amélioration de la vie quotidienne des familles dans les territoires (infrastructures de loisirs...).

Pour améliorer l'efficience de la politique de fidélisation, une évaluation de la prime de lien au service pourrait utilement être lancée. D'après certains responsables auditionnés par le rapporteur spécial, le dispositif serait d'autant plus efficace lorsqu'il est mobilisé pour verser des primes importantes de façon ciblée, le « saupoudrage » s'avérant inefficace car peu incitatif pour les agents. En 2022, une PLS a été versée à 18 594 militaires, pour un coût de 62,2 millions d'euros.

La nouvelle politique de rémunération des militaires

Le vaste chantier de refonte de la rémunération des militaires baptisé « nouvelle politique de rémunération des militaires » (NPRM) a été engagé en 2017. Il concerne l'ensemble du personnel relevant du statut général des militaires et s'étend à la majorité des éléments de rémunération servis à ce personnel (hors éléments de rémunération interministériels).

Cette nouvelle politique salariale poursuit plusieurs objectifs :

- permettre aux armées de conduire les politiques de ressources humaines dont elles ont et auront besoin demain (recrutement et conservation de compétences concurrentielles, adaptation aux évolutions des métiers) ;

- réaffirmer et mieux prendre en compte les sujétions et obligations inhérentes au statut de militaire ;

- s'adapter aux nouveaux enjeux sociaux de la communauté militaire (logement, mobilité, absence, nouvelles formes de vie familiale, etc.) ;

- permettre de simplifier la solde pour la rendre plus compréhensible et plus lisible par le militaire.

Ce projet bénéficie de ressources programmées dans la loi de programmation militaire 2019-2025. La réforme repose sur un aménagement ciblé des grilles indiciaires et une rénovation complète du dispositif indemnitaire, réorganisée autour de trois volets et huit indemnités rémunérant chacune une seule sujétion :

- le volet « militarité », traitant des sujétions liées au milieu militaire, avec l'indemnité d'état militaire (IEM), l'indemnité de garnison (IGAR) et l'indemnité de mobilité géographique des militaires (IMGM) ;

- le volet « finalités », valorisant l'engagement opérationnel et l'exercice de responsabilités militaires, avec l'indemnité de sujétions d'absence opérationnelle (ISAO) et la prime de commandement et de responsabilité militaire (PCRM) ;

- le volet « capacités », favorisant la génération des ressources en quantité et en qualité nécessaires à l'accomplissement de la mission, avec la prime de parcours professionnels des militaires (3PM), la prime de performance (PERF) et la prime de compétences spécifiques des militaires (PCSMIL).

Ces primes ont été progressivement instituées à compter de 2021, engendrant à chaque marche un surcoût par rapport aux dispositifs remplacés :

- la « première marche » mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2021 s'est traduite par la mise en place de l'IMGM, et a engendré un surcoût de 40,5 millions d'euros ;

- la « deuxième marche » mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2022 s'est traduite par la mise en place de l'ISAO, de la PCRM et de la PERF, qui ont engendré un surcoût cumulé de 62 millions d'euros ;

- la « troisième marche » mise en oeuvre à compter du 1er octobre 2023 s'est traduite par la mise en place de l'IEM, de l'IGAR, de la 3PM et de la PCSMIL (remplaçant à elle seule 19 primes) qui ont engendré un surcoût cumulé de 88 millions d'euros en 2023 et un surcoût en année pleine de 351 millions d'euros.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

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