II. LES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS À LA RECHERCHE EN DEHORS DU PÉRIMÈTRE DU MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE CONNAISSENT DES ÉVOLUTIONS DIFFÉRENTIÉES SELON LES DOMAINES

A. EN APPLICATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION DE LA RECHERCHE, LA RECHERCHE SPATIALE BÉNÉFICIE D'UNE HAUSSE DE SES CRÉDITS POUR LA TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE

La politique spatiale fait partie, en application du traité de Lisbonne15(*), du domaine des compétences partagées entre les États membres et l'Union européenne. Par conséquent, la politique spatiale française s'insère dans la stratégie spatiale européenne.

Les crédits qui financent la politique spatiale française sont retracés dans le programme 193 « Recherche spatiale ». Les crédits budgétaires de ce programme sont en outre complété par les financements publics accordés dans le cadre du plan France 2030, qui représentent une enveloppe de 1,5 milliard d'euros sur l'ensemble de la durée du plan.

La trajectoire des crédits du programme 193 a été inscrite à l'article 2 de la LPR qui prévoit une hausse globale des crédits du programme de 294 millions d'euros par an à horizon de 2030.

Après avoir bénéficié de deux hausses de crédits successives en 2022 puis 2023, le programme 193 bénéficiera à nouveau d'une hausse des crédits ouverts par le projet de loi de finances 2024 à hauteur de 35 millions d'euros en CP, conformément à la trajectoire pluriannuelle fixée par la loi de programmation pour la recherche (LPR). Entre 2022 et 2024, la croissance globale des crédits du programme atteint, en CP, 16 %.

Pour animer la politique spatiale française et la mettre en oeuvre, l'État s'appuie sur un opérateur de référence, le Centre national d'études spatiales (CNES), qui est un établissement public à caractère industriel et commercial créé en 1961.

Le CNES, qui bénéficie d'une subvention versée par le programme 193 à hauteur de 768 millions d'euros, est également financé par le programme 191 « Recherche duale (civile et militaire) » à hauteur de 128 millions d'euros.

Alors que la hausse des moyens dédiés au programme 193 inscrite dans la LPR avait pour objectif de renforcer l'activité du CNES et de soutenir le développement de la politique spatiale européenne, l'évolution du contexte socio-économique depuis le vote de la LPR en décembre 2020 se traduit par une dégradation des perspectives de croissance de l'activité du CNES.

En effet, le centre fait face à des coûts de gestion croissants liés notamment à la hausse des prix de l'énergie depuis le début de l'année 2022. En 2024, le CNES estime à 50 millions d'euros le surcoût lié à l'inflation, soit 5 % de son budget global.

Si ce montant peut être pris en charge par l'opérateur à travers sa trésorerie ou la réorganisation de ses activités, le rapporteur spécial relève qu'il a pour effet de neutraliser la croissance de la dotation prévue par la LPR. Dans cette perspective, la situation du CNES illustre, une nouvelle fois, la nécessité d'actualiser la programmation inscrite dans la LPR pour tenir compte des effets de l'inflation.

L'enveloppe de financement par la France de l'Agence spatial européenne (ESA16(*)) continue de représenter la majorité des crédits du programme 193

L'Agence spatiale européenne est une agence intergouvernementale regroupant 22 pays européens. Elle constitue l'une des principales agences spatiales dans le monde avec la National Aeronautics and Space Administration (NASA). Elle est dotée d'un budget annuel de 7 milliards d'euros en 2023.

Évolution de la contribution de la France à l'ESA

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La contribution de la France à l'ESA est constituée d'une enveloppe annuelle de crédits qui transite par le programme 193 et par le budget du CNES. Avec un montant programmé de 1 067 millions d'euros en 2024, l'enveloppe de financement de l'ESA représente plus de 50 % des crédits de paiement du programme 193.

La conférence ministérielle de l'ESA qui s'est réunie en novembre 2022 à Paris (CMIN22) a fixé le montant des souscriptions à 16,9 milliards d'euros pour les trois années à venir. Par conséquent, la dotation annuelle de la France devrait être stable.

Les conséquences du report d'Ariane 6

Le développement de la fusée Ariane 6 a été lancé en 2014 par l'ESA pour un vol inaugural initialement prévu en 2020. Plusieurs fois repoussé dans le temps, le vol inaugural est désormais programmé en 2024, soit plus de quatre ans après la date initialement envisagée.

Le report de la qualification d'Ariane 6 soulève plusieurs problèmes sur les plans budgétaires et extrabudgétaires.

Sur le plan extrabudgétaire, le retard d'Ariane 6 fait peser un risque sur l'autonomie stratégique européenne étant donné que la dernière fusée Ariane 5 a été lancée en juillet 2023 et que le lancement des fusées Soyouz depuis la Guyane a été suspendu après le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022.

Sur le plan budgétaire, le surcoût du programme Ariane 6 a été estimé à 600 millions d'euros par l'ESA. La contribution française à ces surcoûts a été financée par un abondement ponctuel inclus dans le plan « France Relance ».

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire


* 15 v. traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, article 4.

* 16 European Space Agency.

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