TITRE V
SIMPLIFIER LES RÈGLES DU CONTENTIEUX
RELATIF À L'ENTRÉE, AU SÉJOUR ET À L'ÉLOIGNEMENT DES ÉTRANGERS

CHAPITRE IER
CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

Articles 21 à 23
Simplification du contentieux des étrangers

Les articles 21 à 23 opèrent une simplification du contentieux des étrangers en réduisant d'une douzaine à cinq le nombre de procédures applicables, avec une répartition qui entend à la fois tenir compte du degré réel d'urgence de la situation de l'étranger et de la nécessité de maintenir l'efficacité de la politique de l'éloignement.

La commission a estimé que le dispositif proposé ne remplissait que partiellement ses objectifs et, à l'initiative des rapporteurs, a réduit à trois le nombre de procédures applicables, conformément aux préconisations émises par le Conseil d'État en mars 2020 et par son rapport d'information de mai 2022 « Services de l'État et immigration : retrouver sens et efficacité ». Elle a également approuvé le projet de faire le recours à la vidéo-audience un principe, tout en renforçant les garanties associées à ce recours.

La commission a adopté les articles 21 à 23 ainsi rédigés.

1. Le contentieux des étrangers : un morcellement et une complexité sources de difficultés pour l'administration comme pour les étrangers

1.1. Une accumulation de procédures contentieuses nuisible à la lisibilité de l'ensemble

La réforme du contentieux des étrangers était attendue de longue date, tant ce régime est devenu inintelligible, voire obscur, sous l'effet de l'empilement des législations . L'urgence de la simplification est en effet patente et fait l'objet d'un large consensus. Mandaté par le Premier ministre, le Conseil d'État a ainsi rendu un rapport en ce sens le en mars 2020 intitulé « 20 propositions pour simplifier le contentieux des étrangers dans l'intérêt de tous ». Deux ans plus tard, la commission a également adopté le rapport d'information de François-Noël Buffet, intitulé « Services de l'État et immigration : retrouver sens et efficacité », parvenant aux mêmes constats et reprenant à son compte l'intégralité des recommandations du Conseil d'État.

Cette complexité s'explique d'abord par une surabondance de procédures qui, loin de répondre une quelconque logique sous-jacente, est uniquement l'effet collatéral d'une construction par sédimentation du contentieux des étrangers . Comme le relève le Conseil d'État, « si les procédures se ressemblent souvent et peuvent en réalité être regroupées en une douzaine de catégories, il n'en demeure pas moins que, pour déterminer avec certitude le régime juridique applicable, les requérants et leurs conseils, l'administration, les greffes des juridictions et le juge lui-même doivent vérifier, pour plus de trente situations dans lesquelles peut se trouver un étranger , le délai de recours contentieux, le délai de jugement, le caractère suspensif ou non du recours, la formation de jugement, l'éventuelle dispense de conclusions du rapporteur public, le délai pour faire appel ou la possibilité de solliciter le juge des référés [...] » 211 ( * ) . À titre d'illustration, le tableau de synthèse des procédures applicables produit par le Conseil d'État s'étend sur pas moins de sept pages.

Un nombre si important de procédures pourrait se justifier si chacune d'entre elles avait ses spécificités propres et une raison d'être évidente ; mais tel n'est pas le cas . Les différences entre deux procédures sont bien souvent marginales et parfois inexplicables. À titre d'exemple, il est bien difficile de discerner l'utilité de la coexistence de deux procédures distinctes selon le motif d'édiction d'une OQTF émise avec délai de départ volontaire 212 ( * ) . Cette situation affecte profondément la lisibilité de l'ensemble et place de facto les requérants dans une situation d'insécurité juridique .

Comme le résumait la commission des lois dans son rapport précité, le contentieux des étrangers est « d'une insondable complexité, fruit de l'empilement successif de réformes aux objectifs pas toujours clairement articulés entre eux ».

2.1. Un contentieux de masse à l'origine d'un engorgement des juridictions administratives et d'un sentiment de perte de sens chez les magistrats

Le contentieux des étrangers occupe également une part croissante de l'activité des juridictions administratives . Alors que ces recours ne représentaient en 2011 « que » 29,2 % de l'activité des tribunaux administratifs, ce taux était de 41,6 % une décennie plus tard. Le contentieux des étrangers représente même plus d'un dossier sur deux traités par les cours administrative d'appel (54,4 %).

Part du contentieux des étrangers
dans l'activité des juridictions administratives (2021)

TA

CAA

Conseil d'État

Affaires enregistrées

241 384

34 012

11 313

Dont contentieux des étrangers

100 332

18 494

1 975

En %

41,6 %

54,4 %

17,5 %

Source : Rapport public 2021 des juridictions administratives

Les difficultés générées par la complexité et la masse de ce contentieux pour la juridiction vont en s'accroissant, et ce d'autant plus que de nouvelles « filières » contentieuses parfois aux limites de l'absurde se sont créées au cours des dernières années . Il en va ainsi de la multiplication des référés dit « mesures utiles » intentés contre l'administration par des étrangers qui n'ont pas réussi à obtenir un rendez-vous pour demander ou renouveler un titre de séjour . Cette pratique transforme de fait les tribunaux administratifs en « pré-guichet » des préfectures et alimente un fort sentiment de découragement et de perte de sens chez des magistrats dont l'office n'est plus de trancher des litiges mais de pallier les carences de l'administration. Une analyse identique peut être effectuée s'agissant du contentieux dit « des décisions implicites de rejet » qui se forment lorsque l'administration n'a pas apporté de réponse à une demande de titre de séjour dans un délai de quatre mois.

Le contentieux des OQTF est également source de nombreuses interrogations de la part de magistrats administratifs qui doivent régulièrement statuer dans des délais contraints sur des décisions d'éloignement pour lesquelles il n'existe aucune perspective crédible d'exécution à court terme .

Au cours de leurs auditions et déplacements, les rapporteurs ont ainsi été frappés par ce sentiment de découragement et de perte de sens qui semble s'être profondément enraciné dans les juridictions administratives .

2. Une simplification du contentieux des étrangers voulue plus claire et plus ambitieuse par la commission

2.1. Une proposition de simplification qui n'est pas totalement conforme aux recommandations du Conseil d'État et de la commission des lois

Les articles 21 à 23 ramènent à cinq le nombre de procédures applicables , avec une répartition qui entend à la fois tenir compte du degré


réel d'urgence de la situation de l'étranger et de la nécessité de maintenir l'efficacité de la politique d'éloignement :

- une procédure ordinaire (délai de recours d'un mois et délai de jugement de 6 mois), applicable principalement aux OQTF assorti d'un délai de départ volontaire ;

- une procédure prioritaire (délai de recours de 72 h et délai de jugement de 6 semaines), applicable aux OQTF sans délai de départ volontaire ;

- une procédure spéciale (délai de recours de 7 jours et délai de jugement de 15 jours), applicable principalement aux OQTF et aux remises avec assignation à résidence, aux OQTF à l'encontre des déboutés du droit d'asile, aux transferts Dublin « simples » ou avec assignation à résidence et aux contestations liées aux refus d'octroi des conditions matérielles d'accueil ;

- une procédure d'urgence (délai de recours de 48 h et délai de jugement de 96 h), applicable principalement aux OQTF, aux transferts Dublin et aux réadmissions avec placement en rétention, ainsi qu'aux refus d'entrée aux titres de l'asile.

S'agissant des modalités de l'audience, un jugement en formation collégiale est retenu pour la procédure ordinaire, tandis que le formalisme serait allégé pour les trois autres procédures. La décision serait rendue par un juge unique, avec une dispense de conclusions du rapporteur public. Sur ce point, les articles 21 à 23 n'impliquent ni une généralisation du juge unique, ni même un recours accru à cette modalité de jugement . En effet, le juge unique est déjà la norme dans la plupart des recours, à l'exception notable des OQTF dites « trois mois », et se justifie largement par l'urgence à statuer dans les situations impliquant des mesures privatives de liberté.

En complément de ces quatre procédures, le Gouvernement a souhaité maintenir la procédure spécifique applicable aux OQTF émises contre des étrangers détenus et dont la libération est susceptible d'intervenir en cours d'instance. Leur régime est fixé par les articles L. 614-14 et L. 614-15 du Ceseda qui accordent un délai de 8 jours au juge administratif pour statuer.

Par ailleurs, le projet du Gouvernement confirme l'unification du contentieux de l'éloignement et du séjour . Il prévoit expressément la possibilité pour le même juge de statuer, y compris en urgence, par une même décision sur l'OQTF et sur l'ensemble des décisions qui l'accompagnent.

L'article 21 crée, d'une part, un nouveau livre IX au sein du Ceseda où sont décrites les nouvelles procédures applicables et, d'autre part, insère des renvois à ce livre IX dans l'ensemble des dispositions contentieuses particulières actuelles. Les articles 22 et 23 procèdent aux ajustements correspondants respectivement dans le code de justice administrative et la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

2.2. Une proposition de simplification qui reste au milieu du gué

La commission a estimé que le projet du Gouvernement ne répondait que partiellement à son objectif de simplification . De fait, il s'éloigne des propositions défendues par le Conseil d'État et la commission sur deux points.

a) Un nombre de procédures applicables encore trop important

Le premier a trait au nombre de procédures . L'architecture retenue par le Conseil d'État comme par la commission des lois en retenait trois, correspondant aux procédures ordinaires, spéciales et d'urgence proposées par le Gouvernement mais auxquelles ce dernier ajoute la procédure prioritaire applicable aux OQTF sans délai de départ volontaire.

La direction générale des étrangers en France (DGEF) a en effet estimé au cours de son audition qu'une procédure ad hoc se justifiait en la matière car il « convient de donner un délai le plus bref possible aux individus susceptibles de présenter un risque de fuite » et que « un droit au recours suspensif d'un mois, dans tous les cas, aurait un effet équivalent à un délai de départ volontaire de 30 jours puisque la mesure ne pourrait être mise à exécution avant l'expiration de ce délai ». Suivant un raisonnement opposé, le Conseil d'État relève que 70 000 des 124 000 OQTF émises en 2021 n'étaient pas assorties d'un délai de départ volontaire , ce qui est la conséquence directe des instructions adressées aux préfets par le ministre de l'intérieur 213 ( * ) . S'il peut se défendre, le maintien de cette pratique combinée à la réforme du contentieux aurait pour effet de juger sur un régime de « semi-urgence » une très grande majorité des OQTF dont l'exécution effective ne serait en rien garantie . Le Gouvernement n'est pas en mesure de communiquer le taux d'exécution des OQTF sans délai de départ volontaire, mais il est difficile d'imaginer que celui-ci soit bien supérieur à celui, dérisoire, de l'ensemble des OQTF (6,9 % au premier semestre 2022).

La commission a estimé qu'il n'était pas nécessaire de mettre davantage sous pression les juridictions administratives pour statuer en urgence sur des OQTF aux faibles, voire très faibles, perspectives d'exécution. Du reste, il resterait loisible au préfet d'assortir a posteriori une OQTF d'une mesure de contrainte, ce qui entraînerait automatiquement l'activation de l'une des « passerelles » prévues dans le projet de loi vers l'une des deux procédures d'urgence.

La commission a également estimé que le maintien d'une procédure spécifique applicable aux étrangers détenus ne se justifiait pas . Les défaillances pouvant intervenir dans la communication entre les préfectures, l'administration pénitentiaire et les juridictions administrations se traduisent aujourd'hui régulièrement par le placement en rétention de sortants de prisons , faute de pouvoir juger leur recours dans les délais impartis. Comme le relève le Conseil d'État, « l'application du délai de jugement de quinze jours permettrait [au contraire] d'assurer un traitement accéléré de ce contentieux, qui le justifie objectivement, sans que cette accélération repose sur les diligences de l'administration ».

La commission a donc considéré que l'application de la procédure spéciale aux « OQTF détenus » ne se heurtait à aucun obstacle matériel évident, préviendrait plus efficacement le placement en rétention d'anciens détenus et contribuerait, par la suppression d'une procédure supplémentaire, à une meilleure lisibilité d'ensemble du nouveau régime contentieux des étrangers .

Par l'adoption d'un amendement COM-237 des rapporteurs, la commission a donc assuré la transposition stricte de l'architecture à trois procédures préconisée par le rapport du Conseil d'État et par François-Noël Buffet dans son rapport d'information de mai 2022. Suivant le même raisonnement, elle a étendu d'un à deux ans le délai des OQTF permettant l'assignation à résidence ou le placement en rétention .

b) L'application injustifiée d'un régime d'urgence aux OQTF « déboutés du droit d'asile »

La seconde différence entre le projet du Gouvernement et celui du Conseil d'État et de la commission des lois concerne la soumission des OQTF adressées aux déboutés du droit d'asile à une procédure d'urgence .

Selon la position défendue par le Gouvernement, la CNDA ayant rejeté au fond la demande d'asile « il n'y a pas lieu que le tribunal administratif, appelé à statuer sur la légalité de l'OQTF mais pas sur le fond de la demande d'asile, dispose, pour statuer, d'un délai aussi important que pour les autres OQTF » 214 ( * ) . Là encore, la commission aurait pu accepter cet argument si les OQTF concernées avaient de réelles chances d'être exécutées à court terme. Cela n'étant pas davantage démontré que pour les autres OQTF, elle a estimé qu'il était préférable de ne pas imposer aux tribunaux administratifs de statuer en urgence sur des OQTF ayant, malheureusement, tout aussi peu de chances d'être suivies d'effets. La commission a également relevé que l'application d'un régime dérogatoire aux seules OQTF fondées sur le 4° de l'article L. 611-1 du Ceseda pouvait aller à l'encontre de l'objectif de simplification et de lisibilité du contentieux des étrangers.

Par l'adoption d'un même amendement COM-237 , la commission a donc supprimé le régime dérogatoire auxquelles ces OQTF étaient soumises . Pour plus de lisibilité, les procédures applicables, la proposition du Gouvernement et les modifications de la commission sont synthétisées dans le tableau ci-après 215 ( * ) .

Acronymes : délai de départ volontaire (DDV) et conditions matérielles d'accueil (CMA)

3) Un recours par principe à la vidéo-audience qui se justifie mais qui doit être assorti de garanties supplémentaires

Les articles 21 à 23 du projet de loi proposent par ailleurs de faire du recours à l'audience délocalisée et, le cas échéant, à la vidéo-audience le principe lorsque le requérant est placé en rétention administrative ou en zone d'attente . Aux termes de l'article L. 614-11 du Ceseda, il s'agit actuellement d'une simple possibilité.

Sans nier les défauts de l'audience délocalisée et de la vidéo-audience, la commission a considéré qu'il s'agissait de la moins mauvaise des options, en particulier pour éviter d'imposer la multiplication de missions d'escorte à des agents de la PAF déjà très sollicités. Pour des raisons d'efficacité et de bonne administration de la justice, elle a donc accepté la systématisation du procédé, tout en l'assortissant de garanties . Par l'adoption d'un amendement COM-238 des rapporteurs elle a donc explicitement garanti la mise à disposition du requérant de son dossier et la possibilité pour le juge de suspendre l'audience en cas de difficultés techniques.

Afin de tenir compte du nombre réduit d'interprètes pour certaines langues ou dans certains territoires, et dans la mesure où cela ne remet pas en cause le droit du requérant à bénéficier de leurs services , elle a enfin adopté un amendement COM-197 de Marc-Philippe Daubresse revenant sur l'obligation de présence physique de l'interprète aux côtés du requérant, du juge ou, à défaut, dans toute autre salle d'audience.

La commission a adopté les articles 21 à 23 ainsi modifiés .

Article 23 bis (nouveau)
Aménagement de certaines dispositions contentieuses

En complément de la réforme structurelle du contentieux des étrangers opérée par les articles 21 à 23 et afin de répondre à des difficultés d'application identifiées par le rapport de mars 2020 du Conseil d'État sur la simplification du contentieux des étrangers, la commission , à l'initiative des rapporteurs, a ajusté les procédures existantes sur quatre points : l'instruction des litiges relatifs au refus de titres de séjours « étranger malade », la date d'édiction d'une mesure d'éloignement lorsque le juge de l'asile statue par ordonnance, la durée de validité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la visite domiciliaire d'un étranger assigné à résidence ainsi que le délai dont il dispose pour statuer sur le placement en rétention et la prolongation de la rétention d'un même étranger.

La commission a adopté l'article 23 bis ainsi rédigé.

Au-delà de la réduction d'une douzaine à trois du nombre de procédures applicables en droit des étrangers, le rapport dit « Stahl », établi en mars 2020 par le Conseil d'État, ainsi que le rapport d'information de la commission des lois « Services de l'État et immigration : retrouver sens et efficacité » de mai 2022 identifient plusieurs autres dispositions contentieuses dont la rédaction est source de difficultés pratiques pour les magistrats ou l'administration et gagnerait à être optimisée. Par l'adoption d'un amendement COM-239 des rapporteurs, la commission a donc introduit dans le Ceseda les recommandations de ces rapports et a procédé à trois ajustements techniques des règles contentieuses.

Ces modifications portent premièrement sur l'instruction des litiges relatifs au refus de titres de séjours « étranger malade » . Il s'agit de permettre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de présenter ses observations sans être tenu par le secret médical, dans le cadre du recours formé par un étranger qui s'est vu refuser ce titre de séjour par le préfet, après avis d'un collège de médecins de l'OFII. En l'état du droit, le contenu de cet avis n'est en effet pas transmis au préfet en raison du secret médical, ce qui le prive des éléments de contradiction indispensables dans le cadre du contentieux portant sur son refus de titre.

Deuxièmement, elles ont trait à la possibilité d'édicter une décision d'éloignement dès la date de l'ordonnance rejetant le recours contre la décision de l'OFPRA . Sur ce point, le Conseil d'État relève dans son rapport que, lorsque le juge de l'asile a statué par ordonnance, « l'articulation entre la date de fin du droit au maintien sur le territoire au titre d'une demande d'asile et la date d'adoption d'une mesure d'éloignement alimente des débats contentieux artificiels ». La notification régulière de l'ordonnance étant une condition de légalité de la décision d'éloignement, les déboutés du droit d'asile se prévalent en effet systématiquement d'un défaut de notification régulière pour se soustraire à l'exécution de la mesure d'éloignement dont ils font l'objet. Reprenant la proposition du Conseil d'État, l'amendement COM-239 des rapporteurs dissocie donc l'adoption de la mesure d'éloignement, qui pourra intervenir légalement dès la date de signature de l'ordonnance, de son exécution, qui sera quant à elle conditionnée à sa notification régulière .

Troisièmement, la commission a ajusté le délai dont dispose le JLD pour statuer sur le placement en rétention et la prolongation de la rétention administrative d'un même étranger . La rédaction actuelle de l'article L. 743-4 du Ceseda, qui prévoit que ce dernier statue « dans les quarante-huit heures suivant sa saisine », peut en effet conduire à ce que le juge tienne deux audiences successives dans une même journée sur le placement en rétention puis sur la prolongation de la rétention. Cela se produit notamment lorsque la personne retenue forme un recours en application de l'article L. 741-10 du Ceseda dans les premières heures de sa rétention et que le préfet demande la prolongation de la mesure peu de temps avant l'expiration de la période de quarante-huit heures prévue à l'article L. 741-1 du Ceseda. Conformément aux recommandations du rapport « Stahl » et afin d'éviter que le JLD n'ait à tenir deux audiences consécutives sur un même dossier, la commission a donc prévu que le délai de jugement commence à courir à compter de l'expiration du délai de recours contre la décision de placement en rétention .

Enfin, la commission a fixé à 144 heures, au lieu de 96 heures, la durée de validité de l'ordonnance du JLD autorisant la visite domiciliaire d'un étranger assigné à résidence en application de l'article L. 733-10 du Ceseda. Lors de l'examen en 2018 du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, la commission s'était en effet prononcée contre la réduction de ce délai à 96 heures 216 ( * ) , estimant qu'elle privait les forces de l'ordre d'un outil utile pour procéder aux éloignements , en particulier lorsque l'ordonnance est obtenue au début d'un week-end ou la veille d'un jour férié. Aucun élément n'étant par la suite venu remettre en cause cet argument, la commission a tenu à réaffirmer la position constante du Sénat sur le sujet.

La commission a adopté l'article 23 bis ainsi rédigé .


* 211 Conseil d'État, « 20 propositions pour simplifier le contentieux des étrangers dans l'intérêt de tous », p. 16 (mars 2020).

* 212 Délai de recours de 30 jours et de jugement de 3 mois pour les OQTF émises sur le fondement des 3°, 5° et 6° de l'article L. 611-1 du CESEDA (article L. 614-4 du CESEDA) contre un délai de recours de 15 jours et un délai de jugement de 6 semaines pour les OQTF émises sur le fondement des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 du CESEDA (article L. 614-5 du CESEDA).

* 213 Instruction du 17 novembre 2022.

* 214 Étude d'impact p. 380.

* 215 Réalisé à partir du modèle communiqué par le syndicat de la juridiction administrative au cours de son audition.

* 216 Par l'adoption de deux amendements du rapporteur (COM-234) et de Roger Karoutchi (COM-39).

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