Rapport général n° 163 (2021-2022) de MM. Vincent ÉBLÉ et Didier RAMBAUD , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021

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N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 8

CULTURE

Rapporteurs spéciaux : MM. Vincent ÉBLÉ et Didier RAMBAUD

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 3,491 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,461 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces chiffres traduisent une nette progression par rapport à la loi de finances pour 2021. La hausse s'élève en effet à 8,12 % en AE (+ 262,21 millions d'euros) et à 8,11 % en CP (+ 259,74 millions d'euros).

Évolution des crédits de paiement de la mission « Culture »
par programme

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Les rapporteurs spéciaux relèvent, en tout état de cause, un véritable engagement budgétaire en faveur de la culture depuis le début de la crise sanitaire. Les crédits de paiement dédiés à la mission ont, en effet, progressé de 17,42 % entre l'exécution 2019 et le présent projet de loi de finances (+ 513,6 millions d'euros). L'écart entre la dotation budgétaire prévue en 2022 et celle retenue pour 2020 en loi de programmation des finances publiques atteint, quant à lui, 680 millions d'euros. Reste à déterminer si ce niveau de dotation peut perdurer à l'avenir, tant en raison de l'équilibre budgétaire en général que du risque d'extrême dépendance aux fonds publics d'une partie des filières couvertes par la mission.

La mission « Culture » ne résume pas le financement public de la culture et de la communication. L'agrégation des crédits budgétaires et des dépenses fiscales destinés directement et indirectement à la culture et à la communication devrait ainsi atteindre 15,6 milliards d'euros en 2022. Ce montant n'intègre pas les crédits dédiés au sein de la mission « Plan de relance », soit 463 millions d'euros.

I. LE PROGRAMME 131 « CRÉATION » DES MOYENS RENFORCÉS POUR AFFRONTER UN CONTEXTE TOUJOURS INCERTAIN

Le présent projet de loi de finances se traduit par une majoration des crédits du programme 131 « Création » de 4,22 % en AE et 6,30 % en CP par rapport à la loi de finances pour 2021. Comme l'an dernier, cette majoration profite pour l'essentiel aux actions dédiées au soutien aux arts visuels (+ 18,6 % en CP) et au soutien à l'emploi (+ 11,11 % en CP). Le montant des crédits de paiement devrait ainsi atteindre 914,87 millions d'euros, soit une progression de 54,19 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021.

Répartition des crédits de paiement prévus par le projet de loi de finances
pour 2022 au sein du programme 131

Source : commission des finances du Sénat

A. UNE AIDE AUX ACTEURS QUI DÉPASSE LE PROGRAMME 131

L'action 05 « Culture » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance» prévoit deux enveloppes appelées à compléter le programme 131 pour un montant total de 81,1 millions d'euros en CP, soit 9 % du montant des crédits dédiés au programme 131.

44,1 millions d'euros sont fléchés vers le soutien aux opérateurs du programme, ce qui permet de majorer les crédits qui leurs sont dédiés de 16 % . À cette somme, il convient d'ajouter les crédits prévus par le collectif budgétaire de fin d'année 2021 appelés à être reportés en 2022. Au total, la dotation prévue dans le projet de loi de finances 2022 pour les opérateurs au titre du programme 131 devrait être majorée de 85 millions d'euros (AE = CP). Cette dotation complémentaire illustre les difficultés traversées par les opérateurs en 2021 - 65,68 millions d'euros de pertes annoncées contre 48,34 millions d'euros en 2020 - et les doutes qui entourent un retour à la normale de l'activité en 2022.

Cet appui budgétaire doit être appuyé tant il peut éloigner le spectre d'une cessation de paiement pour ces établissements et favoriser leur renflouement. La crise frappe logiquement plus nettement les opérateurs les plus dépendants de leurs ressources propres. L'hypothèse d'un changement des habitudes culturelles post Covid doit de fait inciter à une réévaluation du prix des billets pour accéder à certaines salles publiques, à l'image de l'Opéra de Paris. La question de la billetterie est d'autant plus cruciale que les recettes liées au mécénat tendent à s'amoindrir tant pour des raisons fiscales que sociétales.

Les autres crédits prévus par le plan de relance (commande publique, soutien à la programmation, fonds de transition écologique) peinent quant à eux à être exécutés. Le taux d'exécution s'établit ainsi à 51,3 %.

B. DES CRÉDITS DE NOUVEAU MAJORÉS EN 2022 POUR ACCOMPAGNER LA SORTIE DE CRISE ET L'INVESTISSEMENT

Le présent projet de loi de finances prévoit 48 millions d'euros de mesures nouvelles à périmètre constant. Ces crédits sont principalement orientés dans trois directions : le soutien à la création dans les territoires (20 millions d'euros), l'appui aux investissements des opérateurs (16,65 millions d'euros dédiés aux travaux des salles de l'Odéon et de Chaillot et à la relocalisation du centre national des Arts plastiques à pantin) et le renforcement des mesures de soutien à l'emploi (5 millions d'euros dédiés au Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS). S'agissant de ce dernier sujet, la prolongation du dispositif d'année blanche pour les intermittents jusqu'au 31 décembre 2021 et la sortie par paliers en 2022, dont le coût global est estimé à 1,3 milliard d'euros vient compléter les dispositifs prévus au sein du programme 131.

II. LE PROGRAMME 175 « PATRIMOINES » : UNE RELANCE COMPLIQUÉE

Le programme 175 devrait être doté en 2022 de 1,035 milliard d'euros en AE et 1,023 milliard d'euros en CP, soit une progression de 27,4 millions d'euros en AE (+ 2,78 %) et 10,3 millions d'euros en CP (+ 1,02 %) par rapport à la loi de finances pour 2021.

Répartition des crédits au sein du programme 175

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

A. UN SOUTIEN AU PATRIMOINE COMPLÉTÉ PAR LE PLAN DE RELANCE

Le présent projet de loi de finances prévoit 10,1 millions d'euros en CP de mesures nouvelles pour le programme 175, fléchées vers des mesures de personnels au sein des opérateurs (4,2 millions d'euros), la revalorisation des crédits dédiés à la promotion de l'architecture via les réseaux territoriaux type Villes et Pays d'art et d'histoire (2,9 millions d'euros), la poursuite du déploiement du plan de mise en sécurité des cathédrales (2 millions d'euros) et la revalorisation de la dotation du fonds incitatif et partenarial qui accompagne les collectivités à faibles ressources en vue de financer des opérations de restauration de monuments historiques. (1 million d'euros). À cette somme s'ajoutent 16 millions d'euros supplémentaires en AE destinés au financement de schémas directeurs de travaux (Versailles, Archives nationales, Fontainebleau...) Cette priorité accordée aux travaux, louable dans un contexte de réduction des ressources propres des principaux opérateurs, s'inscrit cependant dans un contexte d'incertitude quant à leur bonne exécution.

Cette question n'est pas anodine au regard de l'exécution des crédits dédiés à la restauration du patrimoine au sein du Plan de relance. Ainsi si, au 1 er octobre 2021, 93 des 136 opérations prévues (hors château de Villers-Cotterêts) ont pu être lancées, le taux d'exécution des crédits de paiement relatifs à celles-ci s'avèrent relativement faible : 29,86 %. Ces retards ont conduit au report en 2023 d'une partie (42 millions d'euros en CP) de la dotation prévue en 2022, qui devrait s'établir en conséquence à 227,3 millions d'euros en CP.

B. UN SOUTIEN HORS BUDGET : NOTRE-DAME DE PARIS ET LE LOTO DU PATRIMOINE

L'apport du Plan de relance ne saurait occulter l'absence de financement public pour les travaux de conservation et de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris , en dehors de la dépense fiscale liée au mécénat. Les donateurs privés contribuent aujourd'hui seuls au financement de l'établissement public en charge des travaux, ce qui peut apparaître en contradiction avec la loi du 29 juillet 2019 et semble trahir l'intention des donateurs.

Le Loto du patrimoine a, de son côté, permis de dégager en trois ans 71,8 millions d'euros en faveur du petit patrimoine. Le ministère complète cet apport en dégelant en fin de gestion un montant représentant le produit des taxes perçues sur le produit du jeu. Au regard de l'ampleur du défi que représente la restauration du petit patrimoine, notamment rural, une exonération complète du produit du jeu aurait pu être décidée en amont, le dégel venant ensuite éventuellement en complément. Une telle solution est déjà retenue au Pays-Bas ou au Royaume-Uni.

C. UNE CRISE APPELÉE À DURER POUR LES OPÉRATEURS

Les pertes cumulées pour les opérateurs devraient atteindre 310 millions d'euros en 2021 et 182 millions d'euros en 2022. Dans ces conditions, les dispositifs de soutien exceptionnels mis en oeuvre en 2020 (collectifs budgétaires) et 2021 (mission « Plan de relance » en loi de finances) ont pu apparaître, malgré leur caractère exceptionnel, insuffisants. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 tend à pallier à ces difficultés et l'exercice 2022 sera par ailleurs marqué par un apport complémentaire de 102,3 millions d'euros via la mission « Plan de relance ». Au final 567,2 millions d'euros auront été dégagés entre 2020 et 2022, hors subventions pour charges de service public, afin de compenser des pertes nettes estimées de leur côté à 745 millions d'euros.

La perspective d'un retour à la normale est désormais repoussée à l'horizon 2024. Elle interroge quant à l'avenir des opérateurs du programme 175 à l'issue de l'exercice 2022. Il existe un risque réel d'effet ciseau, conjuguant progression inévitable des charges et perspective de recettes limitées voire incertaines. Les rapporteurs spéciaux tablent dans ces conditions sur un maintien lors des prochains exercices budgétaires d'un soutien financier de l'État destiné à pallier le manque de recettes, qui rompt avec la trajectoire de réduction de l'intervention de l'État et le développement des ressources propres.

III. LE PROGRAMME 361 « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE » : UNE PROGRESSION DES CRÉDITS DOPÉE PAR LA MONTÉE EN CHARGE DU PASS CULTURE

Le projet de loi de finances prévoit une majoration de la dotation du programme 361 de 30,07 % en AE et 29,70 % en CP, les crédits atteignant 756,39 millions d'euros en AE et 747,93 millions d'euros en CP.

Répartition des crédits prévus en 2022 au sein du programme 361

Source : commission des finances du Sénat

A. LA PROGRESSION DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR CULTUREL ET À L'INSERTION PROFESSIONNELLE

Les crédits dédiés aux établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 8,82 % en 2022 . Ces crédits seront complétés par le Plan de relance qui prévoit, pour 2022, 20 millions d'euros en CP pour la rénovation du réseau des écoles d'architecture et de création et la modernisation de leurs outils informatiques. Pour l'heure celui-ci peine à s'incarner, avec un taux d'exécution des crédits 2021 établi à 34 %, faisant réapparaître un risque de non-consommation. Ce risque est récurrent s'agissant des travaux au sein de ce programme, alors même que le projet de loi de finances pour 2022 prévoit de nouveaux crédits au sein du programme 361 aux fins de financement de travaux.

Par ailleurs, si l'insertion des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur culturel est érigée au rang de priorité, le Gouvernement ne propose pas d'améliorer significativement les cibles retenues en la matière dans l'indicateur contenu dans le projet annuel de performances 2022 . Les rapporteurs spéciaux sont particulièrement vigilants à la situation des diplômés des écoles d'art plastiques, La crise sanitaire actuelle est un élément à ne pas négliger, le ralentissement de l'activité culturelle fragilisant l'entrée sur le marché du travail. Aucun dispositif particulier n'est cependant présenté dans le programme 361, ni au sein de la mission « Plan de relance » afin de répondre à ce défi. Au regard des retards pris par ailleurs dans la rénovation des écoles nationales d'art, un recalibrage en faveur d'un mécanisme d'insertion des sommes dédiées à compléter le programme 361 pourrait être opportun.

B. L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE AU DÉFI DU PASS CULTURE

Le Pass culture, déployé dans toute la France depuis mai 2021, devrait être étendu, en 2022, aux jeunes de 15 ans et plus et aux élèves à partir de la 4 ème . Le coût de cette montée en charge est établi à 140 millions d'euros en année pleine (AE = CP), pour la mission Culture. Le succès du déploiement est indéniable : plus de 770 000 jeunes avaient ainsi activé leur Pass en octobre 2021, soit 80 % de la population visée.

L'exercice 2022 devrait permettre une évaluation du niveau qualitatif de l'application, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs. Il s'agira notamment de vérifier que le Pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue à faire évoluer des pratiques culturelles. Le Pass ne saurait, en effet, se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit être éditorialisé en vue de mettre en place un véritable parcours culturel, ciblant notamment le spectacle vivant. Au-delà de la question de la médiation culturelle, un accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au Pass. Il conviendra également de contribuer à faire du Pass une véritable plateforme en faveur de l'éducation artistique et culturelle accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que le Pass Culture qui agrège 54 % des crédits dédiés à cette politique ne se résume pas à une offre limitée dans le temps. Une attention devra enfin être portée sur les frais de fonctionnement de la SAS Pass Culture.

Il est indispensable en tout état de cause que le Pass Culture ne résume pas l'effort de l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle et que la montée en charge budgétaire de l'application ne s'effectue au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement dédiés. La loi de finances pour 2021 avait déjà tenté de répondre à cette objection (11 millions d'euros de mesures nouvelles). Le projet de loi de finances poursuit dans cette direction avec 23,5 millions d'euros en AE et 11,5 millions d'euros en CP de mesures nouvelles. Cette majoration des crédits s'avère indispensable si le Gouvernement entend atteindre ses objectifs en matière d'éducation artistique et culturelle. Les indicateurs rattachés au programme tablent en effet sur une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle et de l'effort en faveur des territoires prioritaires.

IV. LE PROGRAMME 224 « SOUTIEN AUX POLITIQUES DU MINISTÈRE » EST LARGEMENT DÉDIÉ À LA MODERNISATION DU MINISTÈRE

Le programme 224 recense les crédits dédiés aux fonctions de soutien (99 % du programme) et ceux affectés à l'action culturelle internationale. Il devrait être doté de 777,4 millions d'euros en AE et 775,5 millions d'euros en CP en 2021. 99 % des crédits sont fléchés vers les fonctions de soutien.

A. LA PROGRESSION DES DÉPENSES DE PERSONNEL

En dépit d'une diminution de 50 ETPT, la masse salariale devrait continuer à croître en 2022, passant de 473,03 millions d'euros à 493,36 millions d'euros (+4,39 %). 13 millions d'euros devraient être fléchés vers le plan de rattrapage indemnitaire pluriannuel destiné à combler le retard indemnitaire des agents du ministère sur leurs homologues des autres administrations. La revalorisation de la grille indemnitaire des agents du ministère de la culture doit permettre de renforcer son attractivité et d'éviter des vacances de postes prolongées.

B. L'AVANT-DERNIÈRE ÉTAPE DU PROJET IMMOBILIER CAMUS

Le projet immobilier Camus (43,3 millions d'euros, financés par les produits de la cession de deux immeubles sis rue des Pyramides et rue de Richelieu en 2023) devrait permettre au ministère de la culture de ne plus se déployer que sur trois sites parisiens, contre sept actuellement, dont celui de la rue de Beaubourg dont le loyer est estimé à 2 millions d'euros annuels, financé par le programme 224. La réduction de ses sites parisiens participe, de la part du ministère, d'un effort de rationalisation de la dépense publique qu'il convient de saluer.

C. UNE MAJORATION DES CRÉDITS POUR PARTIE DÉDIÉE À LA TRANSFORMATION NUMÉRIQUE DU MINISTÈRE

4,5 millions d'euros de crédits supplémentaires devraient être dédiés à la mise en oeuvre du plan pluriannuel de transformation numérique du ministère, qui a débuté en 2019 et devrait se terminer en 2022. Cette majoration des crédits permet de répondre à un double impératif : une réorganisation nécessaire suite à la crise sanitaire mais aussi un rattrapage indispensable compte tenu de l'écart observé avec d'autres administrations.

Réunie le mardi 16 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission « Culture ». Elle a confirmé son vote lors de sa réunion du jeudi 18 novembre 2021.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, les rapporteurs spéciaux avaient reçu 100 % des réponses du ministère de la culture et de la communication à leur questionnaire budgétaire.

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « CULTURE »
ET LE FINANCEMENT PUBLIC DE LA CULTURE

La « mission Culture » du budget général recense les crédits dédiés à l'action du ministère de la culture en faveur du patrimoine, de la création artistique, de la démocratisation et de la transmission des savoirs ainsi que ceux affectés au financement de ses fonctions supports.

Elle ne couvre pas, cependant, tous les moyens budgétaires mis en oeuvre en faveur de la culture. Les crédits dédiés au soutien aux industries culturelles sont, en effet, présentés au sein de la mission « Médias, livre et industries culturelles » également pilotée par le ministère de la culture. Le financement du cinéma fait, quant à lui, l'objet d'un traitement séparé, via l'action du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Enfin, comme en, 2021, l'exercice 2022 est marqué, par ailleurs, par la mise en oeuvre de nouveaux moyens budgétaires en faveur de la culture via la mission « Plan de relance ».

La mission « Culture » regroupe quatre programmes :

- le programme 131 « Création », dédié au soutien de la diversité et du renouvellement de l'offre artistique ;

- le programme 175 « Patrimoines » dédié au financement de la politique de préservation et d'enrichissement du patrimoine culturel français. ;

- le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture » , dédié au financement de l'action culturelle internationale et des fonctions supports du ministère. Il couvre ainsi les dépenses de personnel ;

- le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisations de la culture » , mis en place en 2021, agrège les crédits dédiés aux politiques transversales du ministère (éducation artistique et culturelle, enseignement supérieur de la culture, recherche culturelle et diffusion de la culture scientifique) et à la politique pour la langue française et le plurilinguisme.

Répartition des crédits de paiement de la mission « Culture »
par programme prévue en 2022

Source : commission des finances du Sénat

I. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION DE 8 % À PÉRIMÈTRE COURANT

A. LE BUDGET 2022 TRADUIT UN ENGAGEMENT RÉEL EN FAVEUR DE LA CULTURE DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR UNE REPRISE DÉCALÉE DE L'ACTIVITÉ

1. Un budget atteignant près de 3,5 milliards d'euros

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 3,491 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,461 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).

Ces chiffres traduisent une nette progression par rapport à la loi de finances pour 2021. L'écart entre les deux textes s'élève à 8,12 % en AE (+ 262,21 millions d'euros) et à 8,11 % en CP (+ 259,74 millions d'euros). Corrigée des mesures de périmètre, la progression est légèrement supérieure : 8,22 % en AE et 8,21 % en CP.

Évolution des crédits de la mission « Culture » par programme

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

65 % de la progression des crédits de paiement attendue en 2022 résulte de la montée en charge du Pass Culture (programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »).

Évolution des crédits de paiement de la mission « Culture»
à périmètre courant

(en euros)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

Programme 131 - Création

860 687 775

914 874 024

+6,30 %

Action 01 : Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant

725 690 787

758 142 007

+ 4,47 %

Action 02 : Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels

89 977 828

106 712 857

+ 18,60 %

Action 03 : Soutien à l'emploi et structurations des professions

45 019 160

50 019 160

+ 11,11 %

Programme 175 - Patrimoines

1 012 331 538

1 022 662 444

+1,02 %

Action 01 : Monuments historiques et patrimoine monumental

430 021 998

433 174 534

+0,73 %

Action 02 : Architecture et espaces protégés

32 226 588

35 105 088

+8,93 %

Action 03 : Patrimoine des musées de France

363 210 632

364 484 220

+ 0,35 %

Action 04 : Patrimoine archivistique et célébrations nationales

34 124 248

34 547 248

+1,32 %

Action 08 : Acquisition et enrichissement des collections publiques

9 775 311

9 775 311

-

Action 09 : Patrimoine archéologique

142 972 761

145 549 043

+1,80 %

Programme 361 - Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

576 647 061

747 929 511

+ 29,70 %

Action 01 : Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle

241 185 090

262 460 825

+ 8,82 %

Action 02 : Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle

220 353 805

369 386 722

+ 67,63 %

Action 03 : Langues française et langue de France

3 224 338

4 224 338

+ 31,01 %

Action 04 : Recherche culturelle et culture scientifique et technique

111 883 828

111 857 626

-0,02 %

Programme 224 - Soutien aux politiques du ministère de la culture

751 513 112

775 455 660

+ 3,19%

Action 06 : Action culturelle internationale

7 385 969

7 385 969

-

Action 07 : Fonctions de soutien du ministère

744 127 143

768 069 691

+3,22 %

Total

3 201 179 486

3 460 921 639

+8,38 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Les rapporteurs spéciaux relèvent, en tout état de cause, un véritable engagement budgétaire en faveur de la culture depuis le début de la crise sanitaire. Les crédits de paiement dédiés à la mission ont, en effet, progressé de 17,42 % entre l'exécution 2019 et le présent projet de loi de finances (+ 513,6 millions d'euros). L'écart entre la dotation budgétaire prévue en 2022 et celle retenue pour 2020 en loi de programmation des finances publiques atteint, quant à lui, 680 millions d'euros. Reste à déterminer si ce niveau de dotation peut perdurer à l'avenir, tant en raison de l'équilibre budgétaire en général que du risque d'extrême dépendance aux fonds publics d'une partie des filières couvertes par la mission.

Aux crédits de la mission « Culture » viennent s'ajouter, en outre, ceux prévus par l'action 05 « Culture » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance ».

943 millions d'euros étaient initialement prévus pour la période 2021-2022 afin de couvrir des projets portés par les programmes 131 « Création », 175 « Patrimoines » et 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». 572,6 millions d'euros en CP ont été dégagés en loi de finances initiale pour 2021. Le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 328,4 millions d'euros. Le solde restant - 42 millions d'euros - devrait être ouvert en 2023. Plus de 69 % des crédits prévus en 2022 sont fléchés vers le programme « Patrimoines ».

Répartition par programme des crédits
prévus par le Plan de relance en 2022

(en pourcentages)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

2. Un soutien dopé en 2020 et 2021 par l'accès aux dispositifs transversaux

Ces crédits budgétaires ne doivent pas occulter l'accès pour les entreprises culturelles aux dispositifs transversaux en 2020 et 2021 : activité partielle, exonération de cotisations sociales, reports de charges, accès au Fonds de solidarité et aux prêts garantis par l'État (PGE). Les intermittents du spectacle ont vu, par ailleurs, le dispositif d'année blanche garantir leur indemnisation en dépit d'une baisse d'activité prolongée jusqu'en décembre 2021 (cf infra ).

La Cour des comptes relève que le coût global pour l'État de ces dispositifs pour le seul secteur culturel atteint ainsi 5,1 milliards d'euros 1 ( * ) , cette estimation intégrant des entreprises culturelles dont l'activité est soutenue par la mission « Médias, Livre et industries culturelles ». En cumulant PGE et accès au Fonds de solidarité, l'aide en subvention ou en trésorerie octroyée de mars 2020 à février 2021 représentait 38 % de l'excédent brut d'exploitation 2019 du secteur culturel.

L'accès des opérateurs de l'État à certains de ces dispositifs a, cependant, été contrarié en raison de leur structure de financement. Les établissements disposant d'un subventionnement public représentant plus de la moitié de leurs ressources ont ainsi été écartés du mécanisme de prise en charge de l'activité partielle. Les établissements publics de coopération culturelle (EPCC) n'ont pu également y accéder.

En tout état de cause, la fin de ce soutien financier devrait constituer un véritable test pour la solidité des entreprises culturelles en 2022 dans un contexte marqué par une incertitude quant à une reprise normale des habitudes culturelles.

3. Un financement des opérateurs en trois temps
a) Un financement complété par la mission « Plan de relance »

Les sommes directement versées aux opérateurs de la mission « Culture » - 31,7 % des crédits de paiement prévus au sein du présent projet de loi de finances - sont relativement stables. 1,099 milliard d'euros seront ainsi versés aux opérateurs, soit une minoration de 5 millions d'euros par rapport au montant retenu en loi de finances pour 2021 :

- les opérateurs du programme 175 « Patrimoine » - Réunion des musées nationaux (RMN-GP) et grands musées, Centre des monuments nationaux (CMN) et Institut national de recherches archéologiques et préventives (INRAP) - concentrent près de la moitié de cette somme : 551,7 millions d'euros ;

- les opérateurs du programme 131 « Création » - théâtres nationaux, salles de spectacles, Philharmonie de Paris et Opéra de Paris - bénéficient de 299,3 millions d'euros ;

- les opérateurs du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » - les établissements de l'enseignement supérieur culturel - devraient percevoir 252,4 millions d'euros ;

- l'opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture, seul opérateur du programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture », devrait bénéficier d'une dotation de 12,22 millions d'euros.

Ce financement est complété par des crédits prévus en 2022 au sein de la mission « Plan de relance » en vue de permettre aux opérateurs des programmes 131 et 175 de mieux faire face aux conséquences budgétaires de la crise sanitaire pour 146,4 millions en CP.

b) Le collectif budgétaire de fin d'année 2021 anticipe des impasses budgétaires en 2022

Le projet de collectif budgétaire de fin d'année 2021 prévoit de majorer les crédits de la mission de 275,44 millions d'euros en AE et 269,2 millions d'euros en CP.

Répartition des ouvertures nettes de crédits prévues par le projet de loi de finances rectificative n°2 pour 2021

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Ces ouvertures de crédits visent en large partie (84 % d'entre elles) à compenser les pertes de billetterie des opérateurs des programmes 131, 175 et 361 liées au prolongement des mesures de restriction administrative en raison de la crise sanitaire en 2021. 234 millions d'euros (AE=CP) sont ainsi dégagés à cette fin. Compte-tenu des délais d'examen du texte, ces sommes devraient faire l'objet d'un report de paiement à début 2022. Les rapporteurs spéciaux s'interrogent dans ces conditions sur l'opportunité d'un tel montage budgétaire, le projet de loi de finances pour 2022 ne reflétant donc qu'imparfaitement les besoins de financement des opérateurs.

B. VERS UN RETOUR À LA NORMALE DE LA DÉPENSE FISCALE EN MATIÈRE CULTURELLE ?

1. Une estimation optimiste ?

Les crédits budgétaires de la mission « Culture » sont, par ailleurs, complétés par différentes dépenses fiscales : crédit d'impôts, taux réduit de TVA, abattement sur le bénéfice imposable, aménagement de l'imposition et exonération.

Le montant de la dépense fiscale est estimé à 1 078 millions d'euros, soit un niveau comparable à celui prévu en 2019 : 1 077 millions d'euros. Après un exercice 2020 marqué, en raison de la crise, par une chute de l'ordre de 33,4 % des sommes reversées au secteur culturel par rapport à 2019, 2021 devrait constituer une année de transition en raison de la reprise progressive mais limitée des activités culturelles (+ 23,2 % par rapport à 2020 mais - 17,7 % par rapport à 2019).

Les rapporteurs spéciaux porteront un regard particulier, en exécution, sur le démarrage du crédit d'impôt pour les représentations théâtrales, instauré en loi de finances pour 2021 2 ( * ) , et qui reprend les contours du crédit d'impôt spectacle vivant (CISV). Les représentations ouvrant droit au crédit d'impôt doivent être réalisées par des entreprises établies en France ou au sein d'un autre État membre de l'Union européenne ou dans un État partie de l'Espace économique européen. Les coûts de production doivent être majoritairement engagés sur le territoire français. Le spectacle concerné doit être inédit : sa mise en scène et sa scénographie doivent être nouvelles. Son interprétation doit être assurée par au moins 90 % d'artistes professionnels, le plateau devant par ailleurs comporter au moins six artistes professionnels. La représentation doit, enfin, être programmée pour plus de vingt dates sur une période de douze mois consécutifs dans au moins deux lieux différents.

Le crédit d'impôt est égal à 15 % du montant des dépenses engagées : frais de personnels, permanents et non permanents de l'entreprise, redevances versées aux organismes de gestion collective de droits d'auteur, frais de location de salle et de matériels, dotations aux amortissements, frais d'assurance, dépenses liées à la promotion et à l'organisation des tournées et frais afférents à la numérisation des représentations. Ces dépenses sont prises en compte dans la limite des 60 premières représentations par spectacle, à l'exception de celles visant l'acquisition du petit matériel utilisé dans le cadre du spectacle ou aux fins d'accueil du public. Le montant des dépenses éligibles est plafonné à 500 000 euros. Le taux est porté à 30 % pour les micro-entreprises et les petites et moyennes entreprises. Le crédit d'impôt ne peut, quelle que soit la taille de l'entreprise, dépasser 750 000 euros par entreprise. Les subventions publiques non remboursables sont déduites des bases du calcul du crédit d'impôt. Le projet de loi de finances table sur une dépense fiscale chiffrée à 10 millions d'euros en 2022.

Évolution prévisionnelle du montant des dépenses fiscales rattachées
à la mission « Culture » de 2019 à 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La dynamique de la dépense fiscale attendue en 2022 tient aux taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les entrées à des événements culturelles, qui représentaient 80,8 % de la dépense fiscale rattachée à la mission. Cette appréciation peut être jugée optimiste aux regards de l'incertitude entourant un retour à la normale en matière d'habitudes culturelles. 11 % des Français interrogés pour le ministère de la culture pensent sortir moins qu'avant, 11 % étant encore incertains 3 ( * ) .

Évolution du rendement des réductions de TVA rattachées
à la mission « Culture » de 2019 à 2022

(en millions d'euros)

Chiffrage 2019

Chiffrage 2020

Chiffrage 2021

Chiffrage 2022

Taux réduit de TVA de 5,5 % applicable aux théâtres, cirques, concerts, spectacle de variété, sur les droits d'entrée dans les salles de cinéma et les parcs zoologiques

500

260

380

500

Taux réduit de TVA de 10 % applicable aux droits d'admission aux expositions, sites et installations à caractère culturel, ludique, éducatif et professionnel ainsi qu'aux loteries foraines

290

150

220

290

Taux réduit de TVA de 2,10 % applicable aux droits d'entrée des 140 premières représentations de certains spectacles

80

47

50

52

Total

870

447

650

842

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Seule l'estimation de la dépense fiscale visant le taux réduit de TVA de 2,10 % applicable aux droits d'entrée des 140 premières représentations de certains spectacles semble attester d'une réelle prise en compte d'une possible modification durable des comportements culturels.

2. L'inconnue du mécénat culturel

La dépense fiscale est répartie entre les programmes 131 et 175. Elle n'intègre pas les dispositifs de réduction d'impôts au titre des dons effectués par des entreprises ou des particuliers dans le cadre du mécénat culturel 4 ( * ) alors même que le domaine culturel était, avant la crise sanitaire, le deuxième domaine prioritaire investi par les mécènes (26 % d'entreprises engagées) et représentant près d'un cinquième des budgets mécénat (18 % du montant global du budget du mécénat). Ces dispositifs sont, en effet, rattachés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Aucune distinction n'est opérée au sein de celle-ci pour isoler les dépenses dédiées au secteur de la culture.

Cette absence de distinction apparaît regrettable car elle ne permet notamment pas de préciser les incidences de la réforme du régime fiscal du mécénat d'entreprise intervenue en loi de finances pour 2020 mais aussi les changements de comportements en matière de dons observés avec la crise sanitaire , le soutien à l'accompagnement des populations vulnérables, la lutte contre le décrochage scolaire et l'aide aux hôpitaux et autres établissements de santé (40 %) devenant prioritaires aux yeux des donateurs 5 ( * ) . Le contexte de fermeture des institutions culturelles et d'annulation des événements programmés a également pu dissuader le recours au mécénat. Le baromètre du mécénat d'entreprise Admical-IFOP publié en décembre 2020 met ainsi en avant que l'impact de la crise sur le mécénat serait important sur l'attribution des dons de 65 % des grandes entreprises, 80 % des entreprises de taille intermédiaire et 86 % des PME.

L'instauration du seuil de 2 millions d'euros en loi de finances pour 2020, destiné à contenir la dépense fiscale générée par le mécénat des grandes entreprises, a, de son côté, été perçue comme un signal négatif de la part de l'État. Le baromètre du mécénat d'entreprise Admical-IFOP fait ressortir que 27 % des entreprises ont adapté leur stratégie et/ou leur budget de mécénat suite à la réforme du dispositif. Les PME semblent avoir été les plus sensibles à la réforme, 30 % d'entre elles déclarant que la réforme aurait un impact sur leur politique de mécénat, contre 16 % des grandes entreprises et 17 % des entreprises de taille intermédiaire.

II. LA PART DU FINANCEMENT DE LA CULTURE DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT

La mission « Culture » ne résume pas le financement public en faveur de la culture. Le ministère de la culture gère ainsi une autre mission dont l'objet est pour partie culturel : « Médias, livres et industries culturelles ». Celle-ci regroupe deux programmes :

- le programme 180 « Presse et médias », pour lequel le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 350,76 millions d'euros (AE=CP) ;

- le programme 334 « Livre et industries culturelles », dont l'objet est spécifiquement culturel : 347,46 millions d'euros en AE et 324,43 millions d'euros en CP sont prévus par le présent projet de loi de finances.

Dépassant les seuls crédits dédiés au ministère, le Gouvernement estime que l'effort de l'État en faveur de la culture et de la communication devrait atteindre 15,6 milliards d'euros en 2022, soit 1 milliard de plus qu'en 2019, dernier exercice avant le déclenchement de la crise sanitaire. Ce montant intègre les crédits budgétaires et les dépenses fiscales destinés directement et indirectement à la culture et à la communication.

Trajectoire de l'effort de l'État en faveur de la culture et de la communication entre 2019 et 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les annexes aux projets de loi de finances pour 2021 et 2022 « Effort financier de l'État dans le domaine de la culture et de la communication »

Quatre grandes catégories de dépenses permettent de calculer le montant de cet effort :

- les crédits de l'ensemble des ministères dédiés à la culture, soit 8,9 milliards d'euros prévus en 2022 ;

- les dépenses du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », qui regroupe les sommes versées aux sociétés d'audiovisuel public, soit 3,7 milliards d'euros prévus en 2022 ;

- l'ensemble des taxes affectées au domaine de la culture et de la communication pour les personnes morales autres que l'État, soit 641,7 millions d'euros en 2022 ;

- l'ensemble des dépenses fiscales rattachées aux programmes des missions « Culture » et « Médias, livre et industries culturelles », soit 2,4 milliard d'euros prévus en 2022.

Si elle permet de quantifier des efforts disparates, cette estimation agrège cependant des dépenses budgétaires, des taxes affectées et des dépenses fiscales de nature relativement différentes.

Dépenses de l'État directement ou indirectement rattachées
à des objets d'ordre culturel

(en millions d'euros)

Exécution 2019

Exécution 2020

LFI 2021

PLF 2022

Budget général (par ministère) et budgets annexes

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Agriculture

34,17

34,17

34,60

34,60

34,95

34,95

39,60

39,60

Armées

86,95

97,10

119,98

119,92

83,24

88,50

105,84

101,63

Cohésion des territoires

128,75

119,07

135,31

133,68

120,76

126,98

121,25

124,58

Culture

3 783,65

3 633,09

4 417,75

4 417,78

3 851,52

3 805,47

4 188,86

4 136,11

Économie et finances

117,51

117,90

109,80

109,73

100,55

100,55

90,20

90,20

Éducation nationale, jeunesse et sports

2 648,56

2 648,81

2 842,27

2 842,18

2 824,86

2 824,66

2 876,09

2 876,09

Enseignement supérieur, recherche et innovation

602,75

602,78

617,84

617,85

590,28

590,28

597,21

597,21

Europe et affaires étrangères

727,96

727,96

805,76

805,88

773,97

773,97

856,86

857,16

Intérieur

5,75

5,51

5,81

5,36

3,43

6,22

5,14

3,50

Justice

11,76

9,24

45,90

17,05

10,84

28,98

20,93

46,00

Outre-mer

5,48

2,96

6,06

3,50

19,53

3,29

4,05

2,05

Services du Premier ministre

0,93

1,55

5,09

1,36

2,43

3,44

1,15

4,09

Transition écologique et solidaire

6,99

6,48

8,51

8,58

9,97

10,29

9,82

10,16

Budgets annexes

0,32

0,38

0,34

0,35

0,35

0,35

0,35

0,35

Total Budget général et BA

8 161,54

8 006,92

9 154,68

9 117,47

8 426,33

8 397,77

8 917,00

8 888,38

Avance à l'audiovisuel public

Contribution à l'audiovisuel public

3 859,62

3 859,62

3 789,02

3 789,02

3 719,02

3 719,02

3 701,32

3 701,32

Dépenses fiscales et taxes affectées

Dépenses fiscales

1 931

1 996

2 135

2 396

Taxes affectées

719,62

618,99

638,30

641,70

Total

2 650,62

2 614,99

2 773,30

3 037,70

Total général (CP + CAP + fiscalité)

14 517,16

15 521,48

14 890,09

15 627,40

Source : commission des finances du Sénat, d'après les annexes aux projets de loi de finances pour 2021 et 2022 « Effort financier de l'État dans le domaine de la culture et de la communication »

Un tel mode de calcul permet de présenter une nette progression du montant des crédits dédiés à la culture entre la loi de finances pour 2019, dernier exercice avant la crise, et le projet de loi de finances prévu pour 2022 : + 1,11 milliard d'euros soit une majoration de 7,6 %.

Cette méthode présente cependant quelques limites. Elle intègre ainsi les crédits dédiés aux espaces protégés (Programme 113 « Paysage, eau et biodiversité ») ou la totalité des crédits dédiés à l'audiovisuel public, sans qu'il ne soit totalement certain que l'ensemble des sommes financent véritablement des projets culturels.

Cette estimation n'intègre pas, par ailleurs, les crédits de l'action 05 « Culture » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » doté sur la période 2021-2022 de 1 600 millions d'euros.

Les crédits de paiement prévus en 2022 au titre du plan de relance devraient atteindre 463,4 millions d'euros. Ils permettent ainsi de majorer de 2,97 % les montants dédiés à la culture et à la communication au sein du budget de l'État en 2022 , ceux-ci atteignant près de 16,1 milliards d'euros .

Répartition des crédits de l'action 05 « Culture » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de Relance »

Source : commission des finances du Sénat

DEUXIÈME PARTIE
UN BUDGET POUR ACCOMPAGNER LA SORTIE DE CRISE

I. LE PROGRAMME 131 « CRÉATION » : DES MOYENS RENFORCÉS POUR AFFRONTER UN CONTEXTE TOUJOURS INCERTAIN

Le programme 131 « Création » est structuré autour de trois actions :

- l'action 01 dédiée au spectacle vivant, qui regroupe, au sein du projet de loi de finances pour 2022, 782,39 millions d'euros en autorisation d'engagement (AE) et 758,14 millions d'euros de crédits de paiement (CP) ;

- l'action 02 qui vise à soutenir les arts visuels, dotée de 89,36 millions d'euros en AE et 106,71 millions d'euros en CP au sein du présent projet de loi de finances ;

- l'action 06, créée en loi de finances pour 2020 et appelée à financer le soutien à l'emploi et la structuration des professions. 50,02 millions d'euros (AE = CP) sont prévus au sein du présent projet de loi de finances.

Répartition des crédits de paiement prévus par le projet de loi de finances pour 2022 au sein du programme 131 « Création »

Source : commission des finances du Sénat

Le présent projet de loi de finances se traduit par une majoration des crédits de 4,22 % en AE et 6,30 % en CP par rapport à la loi de finances pour 2021 . Comme l'an dernier, c ette majoration profite pour l'essentiel aux actions dédiées au soutien aux arts visuels (+ 18,6 % en CP) et au soutien à l'emploi (+ 11,11 % en CP).

Le montant des crédits de paiement devrait ainsi atteindre 914,87 millions d'euros, soit une progression de 54,19 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021.

Il convient de rappeler à ce stade que les marges de manoeuvre du programme restent étroites au regard des charges fixes qui structurent son budget. Celles-ci représentent 80,3 % du montant des crédits de paiement dédiés au programme 131 :

- les crédits de paiement prévus pour les dépenses d'intervention déconcentrées représentent 434,81 millions d'euros, soit 47,5 % des crédits de paiement prévus ;

- les versements aux opérateurs (subventions pour charges de service public et dotations en fonds propres) devraient atteindre 275,72 millions d'euros, soit 30,1 % des crédits du programme ;

- les dépenses dédiées à l'entretien et aux travaux devraient représenter, quant à elles, 23,65 millions d'euros, soit 2,6 % des crédits.

A. UNE AIDE AUX FILIÈRES QUI DÉPASSE LE PROGRAMME 131

L'action 05 « Culture » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » prévoit deux enveloppes appelées à compléter le programme 131. 259 millions d'euros (AE=CP) sont ainsi prévus en 2021 et 2022 Cette dotation complémentaire est particulièrement bienvenue au regard de l'absence de grandes marges de manoeuvres budgétaires du programme 131.

Fonds prévus pour la création par le plan de relance

(en millions d'euros)

LFI 2021

PLF 2022

AE

CP

AE

CP

Renouveau et reconquête de notre modèle de création et de diffusion artistique

216

144,9

71,1

Soutien aux opérateurs nationaux

126

81,9

44,1

Relance de la programmation des institutions de spectacle vivant en région (musique)

30

23

7

Relance de la programmation des institutions de spectacle vivant en région (théâtre, arts de la rue, danse, cirque)

30

20

10

Fonds de transition écologique pour les institutions de la création en région sur deux ans

20

10

10

Soutien au théâtre privé

10

10

Effort spécifique pour soutenir l'emploi artistique, redynamiser la jeune création et la modernisation des réseaux d'enseignement supérieur de la culture

43

33

10

Programme de commande publique dans les domaines de la littérature, des arts visuels et du spectacle vivant

30

20

10

Soutien aux artistes fragilisés par la crise et non pris en charge par les dispositifs transversaux

13

13

Total

259

177,9

81,1

Source : commission des finances du Sénat

Le présent projet de loi de finances prévoit ainsi 81,1 millions d'euros en CP, soit 9 % du montant des crédits dédiés au programme 131, en vue de compléter la dotation accordée en loi de finances pour 2021.

1. Un soutien réaffirmé aux opérateurs dans le Plan de relance et le collectif de fin de gestion 2021

44,1 millions d'euros, soit 54,7 % des CP prévus dans le cadre du Plan de relance sont fléchés vers le soutien aux opérateurs du programme 131, ce qui permet de majorer les crédits qui leurs sont dédiés de 16 %. À cette somme, il convient d'ajouter les crédits prévus par le collectif budgétaire de fin d'année 2021 qui prévoit de dégager 41,9 millions d'euros en vue de compenser les pertes de billetterie. Ces crédits sont appelés à être reportés en 2022. Au total, la dotation prévue dans le projet de loi de finances 2022 pour les opérateurs au titre du programme 131 devrait être majorée de 85 millions d'euros (AE = CP).

Cette dotation complémentaire, qui représente 31 % de la subvention accordée en 2022 dans le cadre du programme 131, illustre les difficultés traversées par les opérateurs en 2021 - 65,68 millions d'euros de pertes annoncées contre 48,34 millions d'euros en 2020 - et les doutes qui entourent un retour à la normale de l'activité en 2022.

Le lancement de la saison 2021-2022 est ainsi marqué par un infléchissement des ventes (entre -10 % et -40 %) qui pourrait tout à la fois relever d'un bouleversement des habitudes culturelles que d'un changement de comportement d'achat des spectateurs, privilégiant des achats plus tardifs pour se prémunir d'une évolution de la situation sanitaire. Le remplissage est notamment faible sur les places de catégories supérieures : l'afflux limité de touristes ou une limitation de la prise de risque par les spectateurs habituels peut justifier une telle évolution.

Les rapporteurs spéciaux estiment, comme l'an dernier, que cet appui budgétaire doit être appuyé tant il peut éloigner le spectre d'une cessation de paiement pour ces établissements et favoriser leur renflouement. Ils relèvent que la crise frappe logiquement plus nettement les opérateurs les plus dépendants de leurs ressources propres. L'hypothèse d'un changement des habitudes culturelles doit de fait inciter à une réévaluation du prix des billets pour accéder à certaines salles publiques, à l'image de l'Opéra de Paris.

Impact de la crise sur la trésorerie des opérateurs

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La question de la billetterie est d'autant plus cruciale que les recettes liées au mécénat tendent à s'amoindrir (cf supra ). Il convient de rappeler à ce stade que le mécénat représentait par exemple 16,5 % des ressources propres de l'Opéra de Paris en 2019 ou 22,6 % des ressources propres du théâtre national de Chaillot 6 ( * ) . Le cas du théâtre national de l'Odéon est assez éloquent. 3 entreprises mécènes ont été perdues entre 2019 et 2020, pour un total de 90 000 euros (soit 9 % du montant de la subvention accordée par le ministère). Un recul du mécénat des entreprises de 50 000 euros supplémentaires est attendu en 2021. Les pertes de recettes de mécénat des entreprises avaient été compensées exceptionnellement en 2020 par les dons de billets (180 000 euros). Les recettes de mécénat de l'Opéra de Paris devraient, quant à elles, atteindre, comme en 2020, 13 millions d'euros, contre 18 millions d'euros en 2019.

Aux pertes de recettes de mécénat s'ajoute également la chute des recettes de privatisation , arrêtées avec la pandémie. Le théâtre national de l'Odéon enregistre ainsi un recul de 75 % entre 2019 et 2020. Le recul s'est confirmé avec un niveau de recettes bas en 2021 : 40 000 euros, là où le budget initial tablait sur un montant cinq fois supérieur. Le changement de pratique observé par ailleurs pourrait affecter durablement ce type de recettes.

Dans ces conditions, il y a également lieu de s'interroger sur une réévaluation à la hausse des subventions pour charges de service public à compter de 2023. Les rapporteurs spéciaux relèvent à ce titre que le présent projet de loi de finances prévoit, dès 2022, 2,5 millions d'euros (AE = CP) pour le rebasage des opérateurs de la création en fonctionnement et en investissement : en ciblant principalement les moyens d'intervention du Centre national des arts plastiques à l'égard des artistes et les capacités d'investissement courant de l'établissement public de La Villette et de la Philharmonie - Cité de la musique.

2. Une exécution du Plan de relance pour l'heure inégale

La direction générale de la création artistique a indiqué aux rapporteurs spéciaux que les crédits du Plan de relance fléchés vers les objectifs du programme 131 faisant l'objet d'une exécution satisfaisante. 133,5 millions d'euros en AE et 124 millions d'euros en CP auraient ainsi été consommés au 28 septembre 2021, soit des taux d'exécution de respectivement 78 % et 73 %.

Cette consommation reste cependant dopée par le versement direct des crédits prévus pour compensation des pertes de billetterie aux opérateurs (soit 74,9 millions d'euros). Ces sommes représentaient 81,4 % des CP prévus en loi de finances pour 2021.

Hors versement aux opérateurs, le taux d'exécution des CP atteint 51,3 %. Le prolongement de la crise sanitaire, la méconnaissance des dispositifs de la part des acteurs de la filière 7 ( * ) ou l'absence de ressources humaines adaptées au sein des DRAC contribuent à donner l'impression d'un mauvais calibrage des décaissements prévus en 2021.

Le Gouvernement avait ainsi souhaité consacrer 30 millions d'euros sur 2021 et 2022 à un programme de soutien à la conception et à la réalisation de projets artistiques, visant, en particulier les jeunes créateurs . Ce programme de commande publique a pris la forme d'un appel à manifestation d'intérêt (AMI). La phase de candidature et de sélection des artistes a pris fin le 22 août 2021. La notification des projets était en cours de finalisation début octobre 2021. Il n'est pas étonnant, dans ces conditions, que le taux d'exécution de cette enveloppe soit pour l'instant proche de 0 % en AE et CP. Les phases de réalisation des oeuvres et de leur présentation au public devraient intervenir d'ici décembre 2022.

La mise en place d'un fonds de transition écologique visant les bâtiments des structures de spectacle vivant subventionnées en région (institutions labellisées et réseaux de théâtre, danse, arts de la rue et cirque, ensembles, opéras, orchestres et festivals) témoigne également d'un décalage entre les annonces et leur réalisation. Cette enveloppe (20 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP en 2021) a été répartie entre les directions régionales des affaires culturelles, après examen des projets d'investissements proposés. Cette phase de sélection a débouché sur un retard en matière de consommation de CP. Ainsi, au 28 septembre dernier, le taux d'exécution atteignait 16 % en CP. 104 opérations d'investissement ont d'ores et déjà été retenues.

Le volet musical du plan de relance de la programmation des institutions de spectacle vivant en région a, quant à lui, été affecté par le prolongement de la crise sanitaire. Si 691 subventions avaient été versées au 28 septembre 2021, les taux d'exécution atteignaient 52 % en AE (11,9 millions d'euros) et 50 % en CP (11,4 millions d'euros).

Les taux d'exécution du volet non-musical du plan de relance de la programmation sont, en revanche, plus élevés : 73 % en AE (14,6 millions d'euros) et 70 % en CP (14 millions d'euros en CP). Les dispositifs de soutien au théâtre privé (via la subvention à l'association de soutien au théâtre privé - ASTP, 100 % des crédits consommés) et aux artistes les plus fragilisés par la crise (93 % des CP consommés) permettent également de majorer le taux d'exécution global.

3. Des décaissements plus importants que prévus en 2022

Compte-tenu du faible taux d'exécution hors opérateurs en 2021, les décaissements prévus au titre du plan de relance devraient être supérieurs aux 37 millions d'euros prévus par le présent projet de loi de finances.

Ceux-ci visent quatre dispositifs :

- la relance de la programmation des institutions musicales classiques installées en région. Ces crédits sont destinés, sous l'égide des DRAC, à accompagner la reprise d'activité des artistes, ensembles et orchestres. Ce plan doit permettre de relancer la mise en oeuvre de programmations ambitieuses, de financer de nouvelles créations, de relancer l'emploi artistique, notamment par le recrutement des équipes artistiques fragilisées par la crise sanitaire ;

- le programme dédié aux institutions de spectacle vivant (théâtre, arts de la rue, danse, cirque) installées en région. Celui-ci est un soutien en faveur des festivals et prend ainsi le relais du fonds mis en place en 2020 ;

- le fonds de transition écologique pour les institutions de la création installées en région, qui vise à favoriser la remise aux normes et la transition écologique des bâtiments, dans une logique de cofinancement avec les collectivités territoriales propriétaires de ces équipements. Ces crédits doivent permettre la mise en oeuvre de travaux de remise aux normes et de performance énergétiques, de rénovations thermiques ou de favoriser des investissements dans la transition numérique des salles de spectacle et des lieux d'exposition d'arts visuels ;

- le programme de commande publique dans les domaines de la littérature, des arts visuels et du spectacle vivant.

Reste à déterminer si un complément ne devrait pas être mis en oeuvre s'agissant du théâtre privé, dont les crédits ont été consommés sur une année et non sur deux comme prévus initialement. Plus largement les montants dédiés à la relance des institutions culturelles en région peuvent apparaître obsolètes, au regard de l'effet décalé de la reprise et d'un possible changement des habitudes culturelles.

B. DES CRÉDITS DE NOUVEAU MAJORÉS EN 2022 POUR ACCOMPAGNER LA SORTIE DE CRISE ET L'INVESTISSEMENT

Le présent projet de loi de finances prévoit 48 millions d'euros de mesures nouvelles à périmètre constant. Ces crédits sont orientés dans trois directions : le soutien à la création, l'appui aux investissements des opérateurs et le renforcement des mesures de soutien à l'emploi (cf infra ).

1. Le soutien à la création

20 millions d'euros (AE = CP) devraient être dédiés au renforcement des politiques en faveur de la création dans les territoires.

Dans le prolongement de la loi de finances pour 2021 qui prévoyait 12 millions d'euros de mesures nouvelles (AE = CP) vers ces structures, 10 millions d'euros (8 millions d'euros en faveur du spectacle vivant et 2 millions d'euros en faveur des arts visuels) devraient être orientés vers :

- les équipes artistiques indépendantes ;

- le développement des résidences d'artistes ;

- les labels et réseaux pour les arts vivants et visuels ;

- les artistes plasticiens via des aides individuelles à la création ou une allocation d'installation en atelier.

10 millions d'euros complètent cette aide en visant spécifiquement les festivals.

L'appui au spectacle vivant apparaît indispensable dans un contexte de reprise décalée de l'activité. L'étude commandée par le ministère de la culture en septembre 2021 sur les pratiques culturelles post-crise laisse en effet entendre un changement de celles-ci, qui, même s'il n'apparaît pas massif, pourrait cependant fragiliser une partie de la filière et particulièrement les structures les plus petites.

Pour mémoire, 33 % seulement des Français qui déclaraient assister à des spectacles vivants y sont retournés au cours de l'été 2021. Dans le détail seul 25 % des habitués du théâtre y sont retournés, ce ratio atteignant 27 % pour les concerts et 31 % s'agissant des spectacles de danse. Plus largement 44 % des Français amateurs de spectacle vivant déclarent avoir repris leurs habitudes à la réouverture des salles.

Un tiers des personnes (42 % pour les festivals) déclarant se rendre dans les différents lieux culturels avant la crise estiment aujourd'hui que leurs sorties vont diminuer d'ici à décembre 2021 :

- 36 % de ce panel iront moins souvent à un concert ;

- 35 % fréquenteront moins les théâtres ;

- 38 % iront moins souvent assister à un ballet ;

- 42 % limiteront leur présence dans les cirques.

La contrainte sanitaire (72 % des personnes interrogées), le recours à des biais numériques (24 %) et la perte de revenus (22 %) justifieraient ce changement de comportement. Une fois la pandémie terminée, 12 % des habitués de salle de spectacle vivant pensent toujours limiter leurs sorties. L'inquiétude sanitaire (30 %), la perte de revenus (25 %) et l'accès aux contenus numériques conditionnent cette perspective.

2. L'appui aux investissements des opérateurs et des établissements

Le projet de loi de finances prévoit de dégager 16,65 millions d'euros supplémentaires (AE = CP) aux fins d'accélération de divers chantiers.

3 millions d'euros supplémentaires devraient être dédiés au chantier de la Cité du théâtre. L'État et les établissements publics de la Comédie-Française, du Théâtre national de l'Odéon et du Conservatoire national supérieur d'art dramatique de Paris sont désormais réunis dans un groupement d'intérêt public (GIP) mis en place fin 2019 pour assurer la maîtrise d'ouvrage des travaux de construction et d'aménagement.

7 millions d'euros seraient orientés vers le projet de rénovation complète de la salle Jean Vilar du théâtre national de la danse de Chaillot qui, lancé en 2021, est censé se poursuivre jusqu'en 2025. Il vise à remettre en conformité réglementaire l'ensemble des équipements de la salle principale du théâtre de Chaillot tout en améliorant le confort des spectateurs et la performance énergétique du bâtiment.

4,65 millions d'euros sont dédiés à la poursuite du chantier de relocalisation du CNAP à Pantin.

Le chantier a débuté en 2019 avec des études de maîtrise d'oeuvre. Le site de Pantin doit regrouper à terme, en un lieu unique, le siège de l'établissement ainsi que les réserves abritant les 100 000 oeuvres de la collection, tout en offrant des possibilités de mutualisation plus large des réserves du ministère, notamment pour celles du Mobilier national.

2 millions d'euros sont enfin dédiés au financement des travaux inscrits dans le schéma directeur immobilier du Mobilier national : réfection du système de chauffage, des couvertures et des menuiseries sur le site de Beauvais et rénovation des bâtiments (façades) de Lodève.

Cette majoration s'inscrit dans la continuité de la loi de finances qui prévoit une majoration des crédits dédiés aux travaux de 14,6 millions d'euros (AE=CP). Deux priorités avaient alors été retenues :

- la relocalisation du Centre national des arts plastiques à Pantin. (10,6 millions d'euros) ;

- l'accélération des travaux concernant les équipements des deux cages de scènes de l'Opéra national de Paris. 4 millions d'euros supplémentaires sont dégagés pour faire face à ces travaux .

La préservation des outils des opérateurs fait figure de priorité aux yeux des rapporteurs spéciaux. Les dépenses d'investissement en ce sens doivent donc être appuyées. Reste cependant plusieurs écueils :

- un contexte propice à une montée des prix comme en témoigne la progression du taux d'infructuosité des appels d'offre (cf infra ) ;

- un risque de sous-consommation des crédits au regard des retards constatés sur un certain nombre de chantiers, comme ceux enregistrés sur le projet de Cité du théâtre ou celui de la relocalisation du Centre national des arts plastiques.

Ils notent par ailleurs que la crise semble avoir eu raison de projets plus ambitieux à l'image de la création d'une salle modulable au sein de l'Opéra Bastille, abandonnée en septembre dernier. Le coût du dispositif était estimé à 59 millions d'euros, dont 10 millions d'euros financés par le mécénat. La loi de finances pour 2020 prévoyait 16 millions d'euros en AE pour le lancement de ce projet.

Ils rappellent enfin le contre-exemple absolu qu'a pu représenter le chantier de la Philharmonie de Paris . La sous-évaluation initiale des coûts et les retards de chantier concomitants ont généré d'importants dépassements d'honoraires, sans que les responsabilités ne soient aujourd'hui clairement établies. Le coût a en effet été établi à 534,7 millions d'euros HT en mai 2016 (dont 210,98 millions d'euros pour l'État) par la chambre régionale des comptes d'Île-de-France 8 ( * ) , le devis initial tablant sur une dépense de 173,1 millions d'euros HT, supportée à 45 % par l'État. Une bataille juridique s'est engagée - la Philharmonie de Paris demandant 170,6 millions d'euros aux ateliers Jean Nouvel, maîtres d'oeuvre du projet, en raison des retards constatés, la société ayant, en retour porté plainte auprès du Parquet national financier contre l'établissement public pour favoritisme et concussion. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 prévoit d'ailleurs 15 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP aux fins de financement des travaux complémentaires prévus dans le cadre de la transaction effectuée entre la Philharmonie de Paris et la société Ateliers Jean Nouvel (AJN). Cette expérience doit inspirer, en tout état de cause, la plus grande transparence en matière de choix de la maitrise d'oeuvre, de la maîtrise d'ouvrage et de la répartition des coûts entre acteurs publics. Les rapporteurs spéciaux seront, à ce titre, vigilants sur le projet de Cité du théâtre qui tend à opposer le ministère à la ville de Paris.

C. UN SOUTIEN À L'EMPLOI ARTISTIQUE QUI PASSE ESSENTIELLEMENT PAR DES MESURES HORS BUDGET

1. 50 millions d'euros sont prévus au sein de l'action 06

L'action 06 « Soutien à l'emploi et structuration des professions » est structurée autour de plusieurs dispositifs.

Le premier d'entre eux, le fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS), est destiné aux entreprises du spectacle vivant et enregistré et aux artistes et techniciens qu'elles emploient. Ce fonds a été mis en place en 2017 avant d'être refondu en 2019, l'entrée en vigueur du nouveau dispositif intervenant le 1 er octobre 2019 9 ( * ) . Les exercices 2019, 2020 et 2021 ont été marqués par une sous-budgétisation. Les crédits prévus en 2022 - 27 millions d'euros (AE = CP) - traduisent donc une majoration de 5 millions d'euros par rapport au montant retenu en loi de finances pour 2021.

La dotation versée au FONPEPS couvre le fonds de professionnalisation et de soutien , mis en place le 1 er avril 2017, qui prévoit, de son côté, un volet indemnisation en faveur des artistes et techniciens en fin de droits, géré par Pôle Emploi. Une allocation de professionnalisation (APS) et une allocation de fin de droits (AFD) sont ainsi versées. Le dispositif comporte également un volet professionnel et social, géré par le groupe AUDIENS pour le compte du ministère de la culture. Il est destiné à accompagner la structuration d'un projet professionnel.

L'action 06 finance également une mesure de soutien au pouvoir d'achat des artistes-auteurs , qui vise à compenser l'augmentation de la contribution sociale généralisée, décidée en 2018 10 ( * ) (18 millions d'euros prévus en AE = CP pour 2022, soit un montant inchangé par rapport à la loi de finances pour 2021).

Les aides aux organismes professionnels et syndicaux aux fins de financement de leur participation aux instances de dialogue social (Conseil national des professions du spectacle) et de soutien à leur rôle de conseil juridique, économique, social et culturel (3,02 millions d'euros AE = CP prévus en 2022, soit un montant inchangé par rapport à 2021).

Depuis 2021, le soutien à l'emploi intègre un programme de travail artistes-auteurs. Doté de 2 millions d'euros (AE=CP) il doit permettre la mise en oeuvre des recommandations du rapport de Bruno Racine « L'auteur et l'acte de création » remis en janvier 2020 au ministre de la culture. Ce document a débouché, en février 2020, sur un plan artistes-auteurs. Ce plan doit permettre de renforcer leur accès aux droits sociaux fondamentaux, d'améliorer leur situation économique et de mieux les associer aux réflexions et négociations qui les concernent. La dotation prévue en 2022, inchangée par rapport à la loi de finances, doit permettre :

- la recomposition du conseil d'administration de l'organisme de gestion de sécurité des artistes-auteurs ;

- la mise en place d'un portail numérique recensant les règles juridiques, sociales et fiscales applicables aux auteurs ;

- l'amélioration des dispositifs d'aides en faveur des auteurs, notamment l'accompagnement social et professionnel.

2. Une « année blanche » qui ne résout pas toutes les difficultés

Deux fonds spécifiques temporaires de solidarité ont par ailleurs été mis en place en 2021 , en partenariat avec le Guichet unique du spectacle occasionnel (Guso) et le Groupement d'intérêt public (GIP) Cafés Cultures. Abondés à hauteur de 10 millions d'euros chacun, via des redéploiements , ces fonds doivent permettre de soutenir l'emploi des artistes et techniciens du spectacle recrutés par des employeurs n'ayant pas pour objet principal le spectacle, afin de favoriser la reprise d'activité . 60 000 structures sont potentiellement concernées.

Au-delà de ces crédits budgétaires, le secteur a également bénéficié de la mise en oeuvre en 2020 du dispositif dit de l'« année blanche ». Celui-ci permet aux intermittents du spectacle de voir leur indemnisation prolongée jusqu'au 31 août 2021 11 ( * ) . Une période d'affiliation de 12 mois entre le 1 er septembre 2020 et le 1 er septembre 2021 est ainsi mise en place pour accomplir les 507 heures nécessaires pour demeurer dans le régime. Le coût de ce dispositif est estimé à 949 millions d'euros. Face à la persistance de la crise sanitaire au premier semestre 2021 et à ses conséquences sur la reprise de l'activité culturelle, le dispositif a été prorogé jusqu'au 31 décembre 2021 12 ( * ) , majorant son coût de 210 millions d'euros.

Cette prolongation est complétée par différentes mesures d'aménagement :

- une date anniversaire « plancher », fixée au 30 avril 2022, doit permettre aux intermittents du spectacle dont la dernière date de fin de contrat serait très éloignée de la date du 31 décembre 2021, de disposer de davantage de temps pour reconstituer des droits ;

- une date spécifique, également fixée au 30 avril 2022, doit permettre aux intermittents du spectacle qui seraient en congé maladie, maternité, paternité ou adoption au 31 décembre 2021 de bénéficier des mêmes dispositions de sortie d'année blanche que les autres intermittents ;

- une clause de rattrapage doit permettre aux intermittents ayant totalisé entre 338 et 506 heures de bénéficier d'une indemnisation pendant une durée de six mois maximum après l'épuisement de leurs droits à l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) ;

- l'allocation de professionnalisation et de solidarité (APS), pourra, en outre, être versée pendant une durée de douze mois à tous les intermittents admis au bénéfice de cette allocation, et ceci même à l'issue des six mois de la clause de rattrapage, qui déclenchent habituellement une durée de versement de l'APS de six mois seulement.

Le coût de ces mesures d'aménagement a été estimé à 136 millions d'euros.

Par ailleurs, les intermittents âgés de moins de 30 ans ouvrant pour la première fois des droits au titre de ce régime devront cumuler 338 heures contre 507 heures sur la période de référence pour se voir ouvrir des droits. Les intermittents âgés de moins de 30 ans, dont la dernière fin de contrat de travail se situe entre le 1 er septembre 2021 et le 28 février 2022 pourront en bénéficier dès lors qu'ils auront travaillé au moins 338 heures auprès d'employeurs relevant du régime des intermittents. Ces heures pourront être recherchées sur une période de référence allongée afin de tenir compte des périodes de confinement. L'allocation pourra leur être versée pendant six mois maximum, le temps qu'ils atteignent les 507 heures, ce qui permettra ensuite de leur ouvrir des droits dans les conditions de droit commun. Le coût de ce mécanisme est estimé à 18 millions d'euros.

Au total, le coût de l'année blanche et des dispositifs qui l'accompagnent peut être évalué à 1,313 milliard d'euros. La pertinence de ce financement pourra être analysée à l'aune de la reprise. Un changement possible d'habitudes culturelles tel que mis en avant par l'enquête du ministère de la culture commandée en septembre 2021 aurait une incidence certaine sur le revenu des artistes et contribuerait à décaler la reprise. Le rapport d'André Gauron remis aux ministres du travail, de l'emploi et de l'insertion et de la culture en avril 2021 qui concluait à la prolongation du dispositif jusqu'au 31 décembre 2021 et à la mise en place de dispositifs d'aménagement relevait ainsi que les mesures proposées n'étaient par elles-mêmes, de nature à lever l'incertitude actuelle quant à la réalité et l'ampleur de la reprise 13 ( * ) . Elles ne pourraient ainsi atteindre leur objectif d'amplifier la reprise de l'emploi que si les conditions sanitaires permettaient la réouverture des lieux de spectacle dans des conditions viables et qu'elles ne se dégradent pas à nouveau à l'automne 2021. Le document estimait la probabilité d'une reprise avortée assez faible mais n'écartait pas la possibilité, le moment venu, de procéder à de nouveaux ajustements.

II. LE PROGRAMME 175 « PATRIMOINES » : UNE RELANCE COMPLIQUÉE

Le programme 175 « Patrimoines » est dédié au financement des politiques publiques destinées à la constitution, à la préservation, à l'enrichissement et à la mise en valeur du patrimoine muséal, monumental, archéologique, archivistique et architectural. Il vise à en assurer la diffusion auprès du public le plus large .

Trois priorités sont assignées au programme :

- contribuer au projet national d'éducation artistique et culturelle et à l'accueil du public ;

- assurer la transmission du patrimoine aux générations futures ;

- oeuvrer pour la cohésion et le développement des territoires à travers leur mise en valeur patrimoniale et architecturale.

Afin d'assurer cette mission, le programme 175 devrait être doté en 2022 de 1,035 milliard d'euros en AE et 1,023 milliard d'euros en CP, soit une progression de 27,4 millions d'euros en AE (+2,78 %) et 10,3 millions d'euros en CP (+1,02 %) par rapport à la loi de finances pour 2021 .

Le programme 175 agrège 6 actions :

- l'action 01, dédiée aux monuments historiques et au patrimoine monumental, qui devrait bénéficier de 433,2 millions d'euros de crédits de paiement en 2022 ;

- l'action 02, centrée sur l'architecture et les espaces protégés, qui mobiliserait 35,1 millions d'euros en crédits de paiement en 2022 ;

- l'action 03, dédiée au patrimoine des musées de France et dont le montant des crédits de paiement dédiés devrait atteindre 364,5 millions d'euros en 2022 ;

- l'action 04, qui vise le patrimoine archivistique et les célébrations nationales et qui serait dotée de 34,6 millions d'euros de crédits de paiement en 2022 ;

- l'action 08, qui agrège les sommes dédiées à l'acquisition et l'enrichissement des collections publiques, 9,77 millions d'euros de crédits de paiement devant lui être affectés en 2022 ;

- l'action 09, centrée sur le patrimoine archéologique, qui devrait être dotée de 145,6 millions d'euros de crédits de paiement en 2022.

L'action 08 n'est pas concernée par la majoration des crédits enregistrée entre la loi de finances pour 2021 et le présent projet de loi de finances.

Répartition des crédits au sein du programme 175 « Patrimoines »

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

A. DES CRÉDITS EN LÉGÈRE HAUSSE MAIS LARGEMENT COMPLÉTÉS PAR LE PLAN DE RELANCE ET LE COLLECTIF DE FIN DE GESTION 2021

1. Une progression limitée des crédits axée sur quatre priorités

Le présent projet de loi de finances prévoit 10,1 millions d'euros en CP de mesures nouvelles. À cette somme s'ajoutent 16 millions d'euros supplémentaires en AE destinés au financement de schémas directeurs de travaux (Versailles, Archives nationales, Fontainebleau...). Cette priorité accordée aux travaux, louable dans un contexte de réduction des ressources propres des principaux opérateurs, s'inscrit cependant dans un contexte d'incertitude quant à leur bonne exécution (cf infra ).

a) Le financement de mesures de personnels

4,2 millions d'euros (AE = CP) sont ainsi destinés à financer des mesures de personnels au sein des opérateurs :

- 1,7 million d'euros devrait être consacré à la participation de certains opérateurs à la protection sociale complémentaire de certains employeurs ;

- 1,5 million d'euros doit concourir à la réforme du régime indemnitaire des agents contractuels de l'Institut national de recherches archéologiques et préventives (INRAP) ;

- 1 million d'euros sont fléchés vers le Centre des monuments nationaux (CMN) aux fins de recrutement d'agents en vue de la prochaine ouverture au public de la Cité internationale de la langue française, située dans le château de Villers-Cotterêts.

b) De nouveaux crédits en faveur de la promotion de l'architecture

2,9 millions d'euros devraient être fléchés vers la promotion de l'architecture via les réseaux régionaux : conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement - CAUE, maisons de l'architecture et actions menées avec les collectivités territoriales à l'image du réseau Villes et Pays d'art et d'histoire. La dotation accordée à ces réseaux devrait ainsi atteindre 6,5 millions d'euros (AE = CP).

Comme le relève le projet annuel de performance, les crédits dédiés à l'architecture et aux sites patrimoniaux (action 04) sont complétés par le dispositif dit Malraux de réduction d'impôt sur le revenu au titre des dépenses de restauration d'immeubles situés au sein des sites patrimoniaux remarquables (SPR), des quartiers anciens dégradés et des quartiers du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) 14 ( * ) . Le taux de réduction est établi à 22 % mais peut être porté à 30 % selon la situation de l'immeuble. La dépense fiscale est estimée à 29 millions d'euros en 2022. Celle-ci n'est plus dynamique : elle s'élevait en effet à 34 millions d'euros en 2017, 8 093 foyers fiscaux ayant eu recours à ce dispositif. Le montant des dépenses éligibles fait pourtant de celui-ci un auxiliaire indispensable de l'action du ministère de la culture en vue de la préservation des monuments historiques et de la restauration des centres villes. L'Inspection générale des finances (IGF), l'inspection générale des affaires culturelles (IGAC) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) ont remis, en décembre 2018, un rapport évaluant le dispositif, qui concluait à une perte d'efficacité et de lisibilité du mécanisme, dans un contexte marqué par une multiplicité de crédits d'impôts destinés à soutenir l'investissement locatif (Pinel réhabilitation et classique, Cosse, Denormandie ancien). Ils avaient dans la foulée préconisé un certain nombre de pistes d'amélioration (unification du taux de réduction d'impôt à 30 %, possibilité de diversification des usages du bâti notamment) en vue de renforcer l'attractivité du dispositif et contribuer en premier lieu à l'arrêt de son déclin. Les rapporteurs spéciaux regrettent qu'aucune suite n'ait été donnée à ces propositions de réforme.

c) La poursuite du déploiement du plan de mise en sécurité des cathédrales

Lancé fin 2019, le plan de mise en sécurité des cathédrales voit sa dotation progresser au fil des exercices budgétaires. Doté initialement de 2 millions d'euros (AE = CP), son montant a été porté à 12 millions d'euros en AE et 7 millions d'euros en CP en 2021. Le présent projet de loi de finances prévoit un montant identique en AE mais une progression de 2 millions d'euros en CP .

Ces crédits viennent compléter la dotation de 40 millions d'euros allouée annuellement, selon le ministère de la culture, à la conservation des cathédrales au sein de l'enveloppe « Monuments historiques hors grands projets » de l'action 01 (329,14 millions en AE et 312,08 millions d'euros en CP prévus en 2022).

Ces sommes ne couvrent aucune opération liée à la mise en sécurité et à la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris (cf infra).

d) Le renforcement des moyens accordés au Fonds incitatif et partenarial (FIP)

Le fonds incitatif et partenarial (FIP), créé en loi de finances pour 2018, accompagne les collectivités à faibles ressources en vue de financer des opérations de restauration de monuments historiques. Doté dès l'origine de 15 millions d'euros en AE, il a vu son enveloppe de CP progresser chaque année pour atteindre 15 millions d'euros en 2021. Le présent projet de loi de finances propose de majorer de 1 million d'euros (AE=CP) ses crédits.

Depuis sa création, plus de 500 opérations ont été lancées en région , visant principalement des édifices religieux (86 % des projets financés), appartenant à des communes (89 % des collectivités concernées). 76 % des financements sont fléchés vers les communes de moins de 2 000 habitants. Le financement de l'État d'élève en moyenne à 47 %, le reste étant réparti entre les départements (13 %), les régions (18 %) et les propriétaires accompagnés par des associations (22 %).

Les rapporteurs spéciaux approuvent cette progression des crédits, qui témoigne d'une réelle ambition pour le petit patrimoine, notamment rural. Ils seront cependant vigilants sur la bonne exécution des crédits. Le taux de consommation des CP relevé en 2020 s'établit en effet à 67 %, après deux exercices marqués par une surconsommation.

2. Des crédits complétés par le plan de relance
a) Une dotation de 227,3 millions d'euros à laquelle va s'ajouter le collectif budgétaire de fin de gestion 2021

L'action 05 Culture du programme 363 « Compétitivité » de la mission Plan de relance vient largement compléter les crédits prévus au titre du programme 175. Elle comprend en effet un plan d'investissement culturel en faveur des patrimoines et pour l'emploi, doté de 614 millions d'euros en AE sur la période 2021-2022.

Fonds prévus pour le patrimoine par la mission « Plan de relance »

(en millions d'euros)

LFI 2021

PLF 2022

AE

CP

AE

CP

Plan d'investissement culturel en faveur des patrimoines dans les territoires et pour l'emploi

614

344,7

227,3

Soutien aux opérateurs patrimoniaux

334

231,7

102,3

Accélération du chantier de restauration de Villers-Cotterêts

100

43

40

Réinvestissement dans les monuments nationaux relevant du Centre des monuments nationaux

40

20

20

Plan « cathédrales »

80

30

40

Soutien aux investissements réalisés par les propriétaires de monuments historiques n'appartenant pas à l'État

40

10

15

Réinvestissement dans les autres équipements patrimoniaux appartenant aux collectivités territoriales

20

10

10

Le présent projet de loi de finances prévoit une enveloppe de 227,3 millions d'euros en CP. Cette somme représente 22,2% de crédits supplémentaires pour le programme 175.

Ce plan vient pour partie financer des dispositifs existants. 125 millions d'euros en CP viendront ainsi renforcer plusieurs actions déjà lancées.

Le tiers restant des crédits de paiement du plan d'investissement (102,3 millions d'euros) est fléché vers le réarmement budgétaire des établissements patrimoniaux, afin de relancer leur activité, fragilisée par la crise. Cette aide répond à une double logique : renflouer les opérateurs en effaçant leurs pertes et permettre un rebond de leurs investissements, générant ainsi de l'activité chez leurs prestataires. Ces crédits viennent compléter ceux ouverts en collectif budgétaire de fin de gestion 2021. 169,1 millions d'euros (AE=CP) devraient ainsi être versés aux opérateurs afin de compenser les pertes de billetterie.

b) Une exécution 2021 lestée par les chantiers

La direction générale des patrimoines met en avant une bonne consommation en 2021 de la plupart des crédits dédiés à ses missions au sein du Plan de relance. Au 1 er octobre 2021, le taux d'exécution des AE atteignait ainsi 72 % et celui des CP 82 %.

Cette exécution reste dopée par le reversement, en début d'exercice, des dotations dédiées aux opérateurs. Au-delà de ces mesures de réarmement budgétaire, le soutien est exclusivement concentré sur des chantiers, dont la réalisation peut s'avérer longue. Ainsi si, au 1 er octobre 2021, 93 des 136 opérations prévues (hors château de Villers-Cotterêts) ont pu être lancées, le taux d'exécution des crédits de paiement relatifs à celles-ci s'avère relativement faible : 29,86 %.

Exécution des crédits dédiés aux chantiers patrimoniaux (hors château de Villers-Cotterêts) au sein de la mission Plan de relance au 1 er octobre 2021

Nombre d'opérations

AE exécutées (en millions d'euros)

Taux d'exécution

CP consommés

(en millions d'euros)

Taux d'exécution

Plan cathédrales

39

24,2

30,3 %

2,6

8,6 %

Monuments historiques n'appartenant pas à l'État

35

23,3

58,1 %

5,5

54,9 %

Monuments nationaux

12

40

100 %

12

60 %

Autres équipements patrimoniaux

7

8,6

43,0 %

0,9

8,7 %

Total

96

96,1

53,4 %

20,9

29,86 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Il n'est pas étonnant dans ces conditions que la totalité des crédits de paiement initialement prévus ne soit pas ouverts au sein du projet de loi de finances pour 2022. Les crédits de paiement restants devraient ainsi être ouverts en 2023 à hauteur de 42 millions d'euros :

- 10 millions d'euros aux fins de financement du Plan Cathédrales ;

- 17 millions d'euros aux fins de financement des travaux du château de Villers-Cotterêts ;

- 15 millions d'euros à destination des monuments historiques n'appartenant pas à l'État.

La bonne exécution des crédits en 2022 pourrait également être remise en cause par un contexte peu propice à une maitrise des coûts (cf infra ). Interrogé par les rapporteurs spéciaux, le Centre des monuments nationaux, largement concerné par ces travaux (140 millions d'euros au total) a ainsi pointé le risque de tension sur la main d'oeuvre et les difficultés d'approvisionnement. Il conviendra d'ailleurs d'évaluer l'impact de ces aides massives à la restauration sur un éventuel renchérissement des coûts. La Cour des comptes observe de son côté, dans un audit publié en septembre 2021, un risque de surchauffe pour les services du ministère en charge du patrimoine confrontés à un afflux de demandes d'autorisation et d'avis. Les unités départementales de l'architecture et du patrimoine (UDAP) comme les architectes en chef des monuments historiques sont particulièrement concernés 15 ( * ) .

Les rapporteurs spéciaux rappellent enfin la tendance constatée ces dernières années à la progression des restes à payer, soit le solde des engagements n'ayant pas donné lieu à consommation de crédits de paiement au 31 décembre, au sein des programmes de la mission Culture, et particulièrement ceux du programme 175. En 2020, ceux-ci représentaient 732,57 millions d'euros, soit 74,8 % de l'ensemble des restes à payer de la mission.

Évolution du montant des restes à payer de la mission « Culture »,
par programme, de 2016 à 2020

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

B. UN SOUTIEN HORS BUDGET : LES TRAVAUX DE RESTAURATION DE LA CATHÉDRALE NOTRE-DAME DE PARIS ET LE LOTO DU PATRIMOINE

1. L'absence de crédits budgétaires dédiés à la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris

151 millions d'euros ont d'ores et déjà été engagés pour les travaux de sécurisation et de consolidation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et 9 millions d'euros ont déjà été fléchés vers la réalisation d'études préalables en vue de la phase de restauration. Aucun crédit budgétaire n'est venu abonder ce financement . La dépense fiscale afférente aux dons constitue de son côté un financement indirect. Le montant des dons et versements ayant bénéficié du taux de réduction d'impôt de 75 % prévu à l'article 5 de la loi du 29 juillet 2019 s'élève ainsi à 22,2 millions d'euros.

Le coût de la maîtrise d'ouvrage est, depuis le début des travaux, estimé à 6 millions d'euros. Celle-ci est assumée par l'établissement public administratif chargé de la restauration et de la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris (EP RNDP), institué par la loi du 29 juillet 2019 16 ( * ) et entré en fonction le 2 décembre 2020. Cette structure fait partie de la liste des opérateurs de l'État du programme 175.

La commission des finances avait, à l'occasion des débats sur le projet de loi, exprimé ses réserves quant au coût de l'établissement public 17 ( * ) . Cette préoccupation a été rejointe par la Cour des comptes qui soulignait, dans un rapport public thématique publié en septembre 2020 18 ( * ) . Le nombre d'ETPT, établi 32 en mai 2021 devrait passer à 39 en 2022, soit le plafond retenu au sein du présent projet de loi de finances. Le montant total des rémunérations est estimé à 4 millions d'euros.

Reste que ce coût apparaît indolore pour l'État, car l'établissement ne bénéficie pas pour son financement de fonds publics et voit son financement presque intégralement assumé par les dons perçus. 271,3 millions d'euros de dons ont été collectés au 30 juin 2021, les promesses de dons atteignant au total 841,3 millions d'euros. Seul le loyer de l'établissement, évalué à 195 250 euros annuels, est pris en charge par le ministère de la Culture depuis le mois d'octobre 2020. Les locaux utilisés appartiennent aux services du Premier ministre et donnent lieu au versement d'un loyer à France Domaine.

Le ministre de la culture s'était pourtant engagé au Sénat sur une participation de l'État, lors des travaux préparatoires sur le projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale. La loi elle-même prévoit, à l'article 2, que « les fonds recueillis au titre de la souscription nationale sont exclusivement destinés au financement des travaux de restauration et de conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et de son mobilier dont l'État est propriétaire ». La maîtrise d'ouvrage devrait en conséquence, être exclue du financement par les dons. La Cour des comptes a par ailleurs noté que plus du quart des effectifs (11 employés, 7 étant affectés au pôle communication et 4 au pôle opération, en charge de la valorisation du parvis) n'ont qu'un lien ténu avec la conservation et la restauration de la cathédrale.

Cet absence de financement public n'est pas sans susciter d'interrogation au regard de l'aspect symbolique de ce chantier. Elle semble par ailleurs trahir l'intention du donateur. Il convient de rappeler à ce stade que le coût du chantier de restauration générera des recettes de TVA qui auraient pu largement financer la charge administrative.

2. L'utilisation de la réserve de précaution en faveur du Loto du Patrimoine

Le président de la République a confié à M. Stéphane Bern une mission de recensement du patrimoine local en péril et de réflexion sur des financements innovants pour le restaurer en septembre 2017. L'article 90 de la loi n°2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 est venu compléter cette annonce en prévoyant qu'un prélèvement soit affecté à la Fondation du patrimoine sur le produit du « loto du patrimoine » ainsi que sur des jeux de grattage afin de financer cette mission. La Fondation du patrimoine a ainsi perçu, aux termes des trois premières éditions, 71,8 millions d'euros.

453 sites dits de maillage (au moins 1 par département) et 56 sites emblématiques (au moins 1 par région) ont dans le même temps été sélectionnés, soit au total 509 sites. 26 millions d'euros avaient été engagés au 31 décembre 2020 par la Fondation du patrimoine en faveur de ces projets. 111 édifices ont d'ores et déjà été restaurés et 184 sont en cours de restauration. La quatrième édition (2021) a permis de sélectionner 100 sites de maillage et 18 édifices emblématiques.

Le Sénat avait souhaité, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019, exonérer le produit du Loto du patrimoine d'une partie des prélèvements opérés par l'État (CSG et CRDS). Cette demande avait été réitérée lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020. Le Gouvernement avait émis un avis défavorable à ce projet mais s'engage désormais à reverser la réserve de précaution au profit de la mission « Patrimoine en péril » afin de compenser ces prélèvements. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 prévoit ainsi un dégel de 25 millions d'euros. 21 millions d'euros avaient été obtenus en 2018 puis 14 millions en 2019 et 2020.

Financements permis par le Loto du Patrimoine

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les rapporteurs spéciaux appuient ce financement complémentaire qui permet aux DRAC de majorer les taux des subventions versées aux propriétaires publics et privés de monuments historiques retenus dans le cadre du Loto du patrimoine et financer ainsi leurs travaux de restauration. Il n'en demeure pas moins, qu'au regard de l'ampleur du défi que représente la restauration du petit patrimoine, notamment rural, une exonération complète du produit du jeu aurait pu être décidée en amont, le dégel venant ensuite éventuellement en complément. Une telle solution est déjà retenue au Pays-Bas ou au Royaume-Uni.

C. QUELLES PERSPECTIVES POUR LES OPÉRATEURS DU PROGRAMME 175 ?

Le prolongement de la crise sanitaire en 2021 - les établissements étant fermés jusqu'au 19 mai dernier - a conduit à remettre en cause la trajectoire de reprise élaborée en loi de finances 2021, via la mission « Culture » et la mission « Plan de relance ».

1. Une crise appelée à durer

Si la durée de la période de fermeture des établissements patrimoniaux a été la même en 2021 qu'en 2020, cette dernière était néanmoins caractérisée par un premier trimestre meilleur qu'en 2019. Les pertes cumulées pour les opérateurs devraient ainsi atteindre 310 millions d'euros en 2021. Celles-ci visent les revenus issus de la billetterie, de la privatisation ou du mécénat, mais aussi des boutiques. Le développement numérique reste, à ce titre, insuffisant pour combler les pertes de recettes liées à la fermeture des boutiques : le e-commerce ne représente ainsi que 10 % des recettes en boutique de la Réunion des musées nationaux - Grand Palais.

L'estimation de ces pertes, élaborée en juin 2021, n'intègre pas un effet potentiel de l'instauration du Pass sanitaire, même si certains opérateurs à l'image du Centre Georges Pompidou estiment que cette contrainte n'apparaît pas dissuasive. Ces pertes devraient, en tout état de cause être supérieures à celles enregistrées par les mêmes opérateurs en 2020 : 254 millions d'euros.

Ces pertes ne reflètent pas totalement une situation contrastée. Certains monuments gérés par le Centre des monuments nationaux (CMN) ont ainsi enregistré une fréquentation supérieure à celle constatée en 2019. Sous l'effet d'un tourisme local et européen (Allemagne, Italie, Pays-Bas), le Mont-Saint-Michel et les remparts de Carcassonne sont désormais les sites les plus visités, devant les monuments parisiens confrontés à la disparition du tourisme asiatique et américain. Le nombre de visiteurs des sites gérés par le CMN devrait cependant n'atteindre que 4,1 millions de personnes en 2021, contre 10 millions de personnes en 2019, fragilisant de fait la trésorerie du Centre, fondée sur le principe de péréquation totale des ressources. L'enquête commandée par le ministère de la culture en septembre 2021 souligne à ce titre un changement d'habitude des Français : 29 % des personnes interrogées pensaient se rendre, d'ici décembre 2021, moins souvent dans un musée ou un monument historique qu'avant le déclenchement de la pandémie. Cette proportion atteint respectivement 33 % et 32 % pour les personnes fréquentant souvent ces lieux avant la crise.

L'exercice 2022 devrait être marqué par de nouvelles pertes nettes, estimées pour l'heure à 182 millions d'euros. Le retour limité et progressif de la clientèle touristique extra-européenne, les dispositifs mis en place pour respecter les barrières sanitaires mais aussi la modification des pratiques culturelles justifient une telle prévision. Le CMN table ainsi sur un nombre de visiteurs compris entre 6 et 7 millions de personnes en 2022. Les opérateurs comme le ministère de la culture tablent désormais sur une reprise très progressive entre 2022 et 2024, avec la perspective à cette date des Jeux olympiques.

Hypothèses moyennes de fréquentation et de recettes par rapport à 2019
des opérateurs du programme 175

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

2. Un soutien budgétaire exceptionnel appelé à être renouvelé au-delà de 2022

Dans ces conditions, les dispositifs de soutien exceptionnels mis en oeuvre en 2020 (collectifs budgétaires) et 2021 (mission « Plan de relance » en loi de finances) ont pu apparaître, malgré leur caractère exceptionnel, insuffisants. Deux établissements ont ainsi été identifiés comme présentant un risque d'impasse de trésorerie fin 2021 : le musée du Louvre et les musées d'Orsay et de l'Orangerie. Le versement à la Réunion des musées nationaux - Grand Palais des crédits du programme investissement d'avenir destinés au financement des travaux du Grand Palais a, par ailleurs, été avancé à juillet 2021 pour prévenir une éventuelle rupture de trésorerie.

Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 tend à pallier à ces difficultés en dégageant 169,1 millions d'euros (AE=CP) dédiés à la compensation des pertes de billetterie. L'exercice 2022 sera par ailleurs marqué par un apport complémentaire de 102,3 millions d'euros via la mission « Plan de relance ».

Crédits du Plan de relance dédiés aux opérateurs du programme 175 et dotations complémentaires prévues en collectifs budgétaires 2020 et 2021 19 ( * )

(en millions d'euros)

Château de Chambord

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Au final 567,2 millions d'euros auront été dégagés entre 2020 et 2022, hors subventions pour charges de service public, afin de compenser des pertes nettes estimées de leur côté à 745 millions d'euros.

Pertes nettes des opérateurs du programme 175 et mesures de soutien budgétaire entre 2020 et 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

La perspective d'un retour à la normale désormais repoussée à l'horizon 2024 interroge quant à l'avenir des opérateurs du programme 175 à l'issue de l'exercice 2022. La RMN - Grand Palais a ainsi exprimé une réelle crainte lors de son audition quant à l'après 2022, si l'appui budgétaire venait à retrouver un étiage normal. Il existe un risque réel d'effet ciseau, conjuguant progression inévitable des charges (les économies de fonctionnement liées aux fermetures administratives ne sont plus de mises : 11 millions d'euros attendues en 2022 contre 43 millions d'euros en 2021) et perspectives de recettes limitées voire incertaines. Les rapporteurs spéciaux tablent dans ces conditions sur un maintien lors des prochains exercices budgétaires d'un soutien financier de l'État destiné à pallier le manque de recettes, qui rompt avec la trajectoire de réduction de l'intervention de l'État et le développement des ressources propres.

III. LE PROGRAMME 361 « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTRE » : UNE PROGRESSION DES CRÉDITS DOPÉE PAR LA MONTÉE EN CHARGE DU PASS CULTURE

Issu pour partie du programme 224, le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » - géré par la délégation générale à la transmission et à l'éducation artistiques et culturelles - répond à cinq objectifs :

- permettre la participation à la vie culturelle de tous les habitants, quels que soient leur âge et leur situation géographique ;

- améliorer l'attractivité de l'enseignement supérieur de la culture et assurer l'insertion professionnelle des diplômés ;

- promouvoir et développer la politique linguistique de l'État ;

- produire des connaissances scientifiques et techniques reconnues au niveau international ;

- promouvoir auprès de tous les publics la recherche culturelle et la culture scientifique et technique.

Le projet de loi de finances prévoit une majoration de la dotation du programme 361 de 30,07 % en AE et 29,70 % en CP. Cette progression résulte principalement de la montée en charge du Pass culture, élargi depuis mai 2021 à l'ensemble du territoire et appelé en 2022 à être déployé au collège (cf. infra ). Dans ces conditions, le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 756,39 millions d'euros en AE et 747,93 millions d'euros en CP.

Ces crédits sont répartis au sein de quatre actions :

- l'action 01 « soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle », à laquelle seraient affectés 262,46 millions d'euros en crédits de paiement ;

- l'action 02 « soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle » qui serait dotée de 369,39 millions d'euros en crédits de paiement en 2022 ;

- l'action 03 « langue française et langue de France » dont les crédits de paiement dédiés pourraient atteindre 4,22 millions d'euros en 2022 ;

- l'action 04 « recherche culturelle et culture », pour laquelle le présent projet de loi de finances prévoit 111,86 millions d'euros. Cette action reprend les crédits affectés jusqu'en 2021 au programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique » au ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur.

Répartition des crédits prévus en 2022 au sein du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »

Source : commission des finances du Sénat

A. LA PROGRESSION DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR CULTUREL ET À L'INSERTION PROFESSIONNELLE

Les crédits dédiés aux établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 8,82 % en 2022 . Le montant des crédits de paiement dédiés devrait ainsi atteindre 262,5 millions d'euros, 26 millions d'euros de mesures nouvelles étant intégrées dans le projet de loi de finances pour 2022.

Celles-ci répondent à deux objectifs :

- le renforcement du soutien aux étudiants de l'enseignement supérieur culturel, qui se matérialise par une réévaluation des bourses sur critères sociaux de 4 millions d'euros et une dotation de 2 millions d'euros supplémentaires dédiée à la vie étudiante et à l'insertion professionnelle ;

- un appui aux investissements réalisés par les écoles nationales d'art et d'architecture (11,8 millions d'euros supplémentaires) et les écoles territoriales (7,5 millions d'euros).

1. Un financement complémentaire par le plan de relance qui peine à s'incarner

L'action 01 du programme 361 porte l'ensemble des crédits affectés à la rénovation des établissements d'enseignement supérieur culturel. 5,79 millions d'euros en AE et 11,48 millions d'euros en CP sont ainsi prévus dans le présent projet de loi de finances. Les mesures nouvelles visent cinq projets :

- la construction de la nouvelle école supérieure d'art de Cergy (2 millions d'euros en CP) ;

- les travaux de construction et de réhabilitation des écoles nationales supérieure d'architecture (ENSA) de Paris-Malaquais (0,3 million d'euros en CP), Marseille (2 millions d'euros en CP) et Toulouse (2 millions d'euros en CP) ;

- la restauration des bétons de la villa Arson à Nice (2 millions d'euros en CP).

S'agissant des écoles d'art territoriales, le projet de loi de finances prévoit 11,50 millions d'euros en AE et 9,90 millions d'euros en CP , ces crédits servant pour partie à finaliser des opérations retenues dans les contrats de plan État région (CPER) 2015-2020 (relocalisation de l'école d'art de Toulon Chalucet ou construction de l'Institut d'enseignement supérieur de la musique - IESM d'Aix-en-Provence). Les rapporteurs spéciaux ne peuvent que relever une nouvelle fois les retards pris dans l'exécution des chantiers culturels. Les mesures nouvelles (7,5 millions d'euros en CP) seront cependant fléchées vers les projets retenus au sein des CPER 2021-2027.

Le financement des écoles nationales devrait être largement complété par l'action 05 du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » qui prévoit, pour la période 2021-2022, 70 millions d'euros pour la rénovation du réseau des écoles d'architecture et de création et la modernisation de leurs infrastructures informatiques (50 millions d'euros en loi de finances pour 2021 et 20 millions d'euros dans le cadre du présent projet de loi de finances). Ce soutien complémentaire devrait permettre de dynamiser les établissements d'enseignement supérieur culturel et de renforcer leur attractivité.

Cette ambition est appuyée par les rapporteurs spéciaux. Ils avaient cependant relevé, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, le risque de non-consommation des crédits. Les rapporteurs spéciaux seront ainsi vigilants quant à la consommation des crédits prévus. Les restes à payer des chantiers aujourd'hui couverts par le programme 361 ont connu une forte progression en 2019 avant de se stabiliser en 2020 à 108,41 millions d'euros (+ 60,5 % par rapport à 2018). Plus de la moitié de ces restes à payer (57,86 millions d'euros) relèvent des travaux de réhabilitation ou à des projets immobiliers. L'exécution des crédits 2021 de la mission « Plan de relance » tend à confirmer cette crainte. Au 1 er octobre 2021, le taux d'exécution des AE s'élevait à peine à 39,7 % et celui des CP à 34,2 %.

2. La question de l'insertion : un sujet crucial dans un contexte délicat

Si l'insertion des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur culturel est érigée au rang de priorité, le Gouvernement ne propose pas d'améliorer significativement les cibles retenues en la matière dans l'indicateur contenu dans le projet annuel de performances 2022. Pire, il semble même acter, à l'horizon 2023, une diminution du taux d'insertion professionnelle des étudiants en arts plastiques. Ainsi seuls 66 % des diplômés devraient obtenir un emploi dans leur secteur de compétence dans les trois ans suivant l'obtention de leur titre, contre 73 % en 2020.

Taux d'insertion professionnelle des diplômés
de l'enseignement supérieur Culture (ESC)

2018

Réalisation

2019

Réalisation

2020

Réalisation

2021

Prévision

2022

Prévision

2023

Cible

Architecture et patrimoine

87 %

90 %

88 %

91 %

91 %

91 %

Arts plastiques

58 %

61 %

73 %

75 %

75 %

66 %

Spectacle vivant et cinéma

90 %

93 %

89 %

94 %

94 %

94 %

Tous établissements ESC

80 %

82 %

84 %

85 %

85 %

84 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le ralentissement de l'activité culturelle lié à la crise sanitaire fragilise bien évidemment l'entrée sur le marché du travail, mais l'horizon 2023 apparaît plutôt être celui d'un retour à la normale et non d'une dégradation.

Les rapporteurs spéciaux relèvent qu'aucun dispositif particulier n'est, par ailleurs, présenté dans le programme 361 afin de répondre à ce défi. 33,86 millions d'euros (AE = CP) sont bien dédiés aux étudiants mais dans le cadre de leur formation, via des aides individuelles ou des bourses d'études.

La mission Plan de relance n'a de son côté prévu qu'un dispositif de soutien aux artistes fragilisés par la crise, qui ne seraient pas couverts par les dispositifs transversaux mis en place, doté de 13 millions d'euros (AE = CP) en 2021. Ce fonds, dont les crédits étaient consommés à 92 % au 1 er octobre dernier, ne consiste pas spécifiquement en une aide à l'insertion professionnelle. Au regard des retards pris par ailleurs dans la rénovation des écoles nationales d'art (cf supra ), un recalibrage en faveur d'un mécanisme d'insertion des sommes dédiées à compléter le programme 361 pourrait être opportun.

B. L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE AU DÉFI DU PASS CULTURE

1. La montée en charge attendue et nécessaire du Pass Culture
a) Une dynamique initialement entravée par une expérimentation limitée

Expérimenté depuis juin 2019 dans 14 départements 20 ( * ) , le Pass Culture consiste en une application gratuite, qui révèle et relaie les possibilités culturelles et artistiques accessibles à proximité. Chaque jeune de 18 ans résidant dans ces territoires peut demander l'octroi d'une enveloppe de 500 euros à dépenser sur cette application, parmi un large choix de spectacles, visites, cours, livres, musique, services numériques proposés par 11 000 offreurs (offres payantes et gratuites). La durée de consommation initialement fixée à 12 mois a été portée, en 2020, à 24 mois.

Le crédit de 500 euros est soumis à des sous plafonds : si les utilisateurs peuvent consacrer la totalité du crédit à des sorties culturelles ou des cours de pratique artistique, un seuil est prévu pour les services numériques. L'utilisation du Pass aux fins d'acquisition de biens physiques (livres, CD, DVD, instruments de musique) prend la forme d'une réservation dudit bien en boutique.

L'ambition initiale du Gouvernement consistait en une généralisation du dispositif à l'horizon 2022 sur l'ensemble du territoire. Un élargissement de la phase d'expérimentation était prévu le 20 avril 2020. Il a été différé en raison de la crise sanitaire. La totalité des départements des régions Île-de-France et Grand Est et le département de La Réunion devaient initialement mettre en place le dispositif à cette date.

S'agissant du dispositif en tant que tel, le projet a d'abord été porté par le ministère lui-même, par l'intermédiaire d'une start-up d'État. Une société par actions simplifiée (SAS) , chargée du développement du Pass Culture a finalement pris le relais courant 2019, en vue notamment d'élargir son financement à des acteurs privés 21 ( * ) . La SAS reste pour l'heure détenue à 70 % par l'État et à 30 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), via sa Banque des territoires.

Au financement de l'État s'ajoute celui des offreurs, via les conditions de remboursement des offres physiques aux acteurs (barème spécifique ou dégressif selon les offres). Les offres numériques sont décomptées de l'enveloppe de 300 euros, mais ne sont pas remboursées par la SAS pass Culture aux offreurs, les réservations étant plafonnées à 100 euros. Au final, le taux de cofinancement par les offreurs atteint aujourd'hui 10,3 % et pourrait atteindre 20 % à l'horizon 2023.

b) La nécessaire généralisation du dispositif en 2021

Sans remettre en cause l'utilité du dispositif, qui peut s'avérer être un véritable outil d'émancipation culturelle, la commission des finances avait exprimé des doutes lors de l'examen des projets de loi de finances pour 2019 et 2020 sur la stratégie mise en oeuvre pour rendre accessible ce dispositif. Celui-ci apparaissait mal connu. Le lancement d'une campagne de publicité nationale et d'action de sensibilisation à destination de publics éloignés (jeunes salariés, apprentis etc.) semblait à ce titre impossible compte-tenu du caractère expérimental du Pass.

Les rapporteurs spéciaux avaient par ailleurs souhaité lors de l'examen des crédits pour 2021 que soit favorisée une meilleure articulation avec le parcours d'éducation artistique et culturelle, notamment dans les dernières années du lycée, afin de permettre aux futurs utilisateurs de mieux connaître l'application.

Ils avaient en outre appuyé l'idée d'une accélération du déploiement national dès 2021, ce qui semblait être la seule option possible en vue de mieux faire connaître le dispositif et une utilisation des crédits dédiés. Le ministère de la Culture semblait y être favorable sans l'afficher comme objectif. Elle serait assortie d'une réduction du montant accordé de 500 euros à 300 euros, somme plus proche des usages observés dans le cadre de l'expérimentation.

Le projet de loi de finances pour 2021 traduisait cette prudence en tablant sur une majoration des crédits dédiés au dispositif de 20 millions d'euros, pour atteindre 59 millions d'euros (AE = CP), avec pour objectif 200 000 bénéficiaires en 2021. La généralisation du Pass Culture dès 2021, a finalement été annoncée par le président de la République le 21 mai dernier, assortie d'une diminution du montant accordé de 500 à 300 euros.

Le succès est indéniable : plus de 770 000 jeunes avaient ainsi activé leur Pass en octobre 2021, soit 80 % de la population visée. Le montant moyen des réservations s'élève, quant à lui, à 136 euros Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 prend acte de cette généralisation en prévoyant une dotation complémentaire de 27 millions d'euros (AE = CP).

c) Le projet de loi de finances pour 2022 intègre la généralisation et l'extension du dispositif

Le présent projet de loi de finances prévoit 199 millions d'euros de crédits (AE = CP) pour le financement du dispositif, soit une majoration des crédits de 140 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021.

Évolution des crédits affectés au financement du Pass culture entre 2019 et 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette majoration des crédits intègre l'élargissement du Pass, évalué à 83 millions d'euros, dont 38 millions d'euros au titre de la mission Culture . Le Pass sera en effet, à partir de janvier 2022, ouvert :

- aux élèves à partir de la classe de 4 ème , qui sous la responsabilité des enseignants, bénéficieront d'un crédit (25 euros par élève en quatrième et en troisième, 30 euros, en seconde et 20 euros en première et en terminale) à dépenser dans un cadre collectif : sortie culturelle, accueil d'un professionnel... Ce volet collectif du Pass est financé sur le programme 230 « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire » à hauteur de 45 millions d'euros ;

- aux jeunes de 15 ans non scolarisés, ou ceux inscrits en seconde qui bénéficieront d'un crédit individuel de 20 euros. Les élèves de première et de terminale ou les jeunes non scolarisés de 16 ou 17 ans bénéficient d'un crédit individuel porté à 30 euros. Cette extension aux moins de 18 ans n'intègre pas les offres numériques (à l'exception de la presse numérique) et les jeux vidéo. Le cout de cet élargissement est supporté par la mission « Culture » à hauteur de 38 millions d'euros.

2,4 millions de jeunes sont concernés par cet élargissement. Une expérimentation de l'utilisation du Pass pour les jeunes de moins de 18 ans dans les académies de Versailles et Rennes est menée depuis septembre 2021.

Le surcoût lié à la généralisation est, quant à lui, évalué à 96 millions d'euros. À compter de 2023, le besoin annuel est estimé à ce stade pour le volet concernant les jeunes de plus de 18 ans à près de 155 millions d'euros. Cette évaluation se fonde sur un taux d'activation supérieur à 80 % et une hypothèse de 95 % de consommation de l'enveloppe.

La majoration des crédits, prévue en 2022, intègre, en outre, la progression des coûts de fonctionnement et de développement de la SAS Pass Culture, à hauteur de 6 millions d'euros .

d) Une évaluation qualitative doit désormais être menée

L'exercice 2022 devrait permettre une évaluation du niveau qualitatif de l'application, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs. Il s'agira notamment de vérifier que le Pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue à faire évoluer des pratiques culturelles.

Le Pass ne saurait, en effet, se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit être éditorialisé en vue de mettre en place un véritable parcours culturel. La SAS Pass Culture, auditionnée par les rapporteurs spéciaux, partage cette ambition. Pour l'heure, 50 % des achats liés au Pass sont orientés vers le livre (34,4 millions d'euros consommés). Ces acquisitions concernent pour 76 % le manga. Le ministère de la culture comme la SAS PAss Culture tablent cependant sur le rôle de médiateur des libraires en vue de diversifier le profil des oeuvres achetées. 35 % des utilisateurs ayant réservé un manga ont d'ailleurs réservé un ouvrage d'un autre genre littéraire et plus d'un quart d'entre eux ont effectué des réservations dans d'autres catégories culturelles. Les rapporteurs spéciaux rappellent cependant que la mise en place d'un sous-plafond, à l'image de celui mis en place pour les achats numériques, peut constituer une option en vue d'assurer un plus grand éventail de réservations . Le cinéma (11 millions d'euros consommés) et l'achat d'instruments de musique (8 millions d'euros) constituent les deux autres priorités d'utilisation du Pass. Reste la question de l'accès au spectacle vivant. Pour l'heure les réservations pour ce type de produit culturel représentent à peine 1,5 % - 2 % des crédits consommés. Le contexte sanitaire peut expliquer un tel ratio. L'absence de volonté des producteurs de conventionner avec la SAS Pass culture a également contribué à fragiliser l'utilisation du Pass à cet escient. Les festivals ont néanmoins constitué une amorce qu'il convient de prolonger.

Au-delà de la question de la médiation culturelle, un accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au Pass. Pour l'heure, on observe une réelle surpondération des lycées et des étudiants parmi les jeunes ayant ouvert un compte.

Il conviendra également de contribuer à faire du Pass une véritable plateforme en faveur de l'éducation artistique et culturelle accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que le Pass Culture qui agrège 54 % des crédits dédiés à cette politique ne se résume pas à une offre limitée dans le temps.

e) Une attention particulière sera portée sur les frais de fonctionnement de la société Pass Culture

Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit une majoration des crédits dédiés au fonctionnement de la SAS. Cette progression peut s'entendre compte-tenu du développement à marche forcée de l'application.

La SAS table désormais sur des frais de fonctionnement limités à 5 % de la dotation accordée en loi de finances pour le Pass. Les rapporteurs spéciaux veilleront à ce que ce ratio soit respecté. Cette ambition passe notamment par l'internalisation d'un certain nombre d'activités actuellement gérées par une trentaine de prestataires. La SAS compte actuellement 90 salariés.

2. Au-delà du Pass Culture, quels moyens pour l'éducation artistiques et culturelle ?

La commission des finances a, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, exprimé sa crainte que le Pass Culture tende à résumer l'effort de l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle et que la montée en charge budgétaire de l'application ne s'effectue au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement dédiés.

La loi de finances pour 2021 avait déjà tenté de répondre à cette objection avec plusieurs mesures nouvelles (11 millions d'euros de mesures nouvelles). Le projet de loi de finances poursuit dans cette direction avec 23,5 millions d'euros en AE et 11,5 millions d'euros en CP de mesures nouvelles :

- 8,5 millions d'euros (AE = CP) sont ainsi fléchés vers les actions en faveur de l'action culturelle territoriale (déploiement des centres culturels de rencontre, financement des Olympiades culturelles en prévision des jeux olympiques de 2024, appui aux initiatives de proximité) ;

- 15 millions d'euros en AE et 3 millions d'euros en CP sont dédiés au soutien au projet d'implantation des Ateliers Médicis, résidence d'artistes actuellement située à Clichy-sous-Bois et à Montfermeil, appelée à déménager d'ici 2025 afin d'être directement reliée à une ligne du métro Grand Paris Express.

Cette majoration des crédits s'avère indispensable si le Gouvernement entend atteindre ses objectifs en matière d'éducation artistique et culturelle. Reste une interrogation quant à l'efficacité de la dépense publique en la matière. L'indicateur 2.2 rattaché au programme visant la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle a ainsi été revu à la baisse en 2021. L'objectif assigné avait déjà été minoré en 2019 et en 2020.

Accès des enfants et adolescents à une action d'éducation artistique et culturelle Prévision et réalisation 2021

Indicateur

Prévision PAP 2021

Réalisation

Part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle (%)

88

70

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les rapporteurs spéciaux relèvent, en outre, que la mesure de l'effort en faveur des territoires prioritaires ne répond pas non plus aux objectifs initialement assignés.

Effort en faveur des territoires prioritaires - Prévision et réalisation 2021

Indicateur

Prévision PAP 2021

Réalisation

Part des crédits de l'action 2 (éducation artistique et culturelle et accès à la culture) dirigés vers les territoires prioritaires par rapport à la totalité des crédits de l'action 02 (en %)

30

25

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Si le contexte sanitaire a pu fragiliser cette ambition en 2021, les rapporteurs spéciaux seront extrêmement vigilants quant à la réalisation de ces objectifs en 2022.

C. UNE PROGRESSION MODÉRÉE DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA PROMOTION DE LA LANGUE FRANÇAISE

0,6 % des crédits du programme 361 sont dédiés à la promotion de la langue française. Le montant des crédits est majoré, pour la première fois depuis 2018, de 1 million d'euros pour atteindre 4,2 millions d'euros (AE = CP).

Ces nouveaux moyens, appelés de leurs voeux par les rapporteurs spéciaux l'an dernier, permettent de répondre à l'accélération des travaux de construction de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts , prévue par la mission « Plan de relance » (100 millions d'euros sur la période 2021--2022).

Les rapporteurs spéciaux relèvent cependant, comme l'an dernier, que l e projet annuel de performance ne comporte aucun indicateur visant l'efficacité de cette action et donc portant sur l'efficience de cette dépense publique.

D. LE FINANCEMENT DE LA RECHERCHE CULTURELLE ET DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE, PRINCIPALEMENT FLÉCHÉ VERS UNIVERSCIENCE, SERA COMPLÉTÉ PAR LE COLLECTIF DE FIN DE GESTION 2021

L'action 04 « Recherche culturelle et culture scientifique et technique » reprend les crédits affectés jusqu'en 2021 au programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique », rattaché au ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur.

Ce transfert avait coïncidé, en loi de finances pour 2021, avec une revalorisation des crédits de 2 millions d'euros (AE = CP) par rapport à la loi de finances pour 2020. Cette progression constituait une première depuis sept ans ; le programme enregistrant chaque année, durant cette période, une diminution de ses crédits. Le projet de loi de finances pour 2022 est quant à lui marqué par une relative stabilité , les AE diminuant de 0,14 % et les CP de 0,02 % pour atteindre respectivement 112,42 millions d'euros et 111,86 millions d'euros.

100,99 millions d'euros, soit 90,2 % des crédits de paiement de l'action ; consistent en des subventions pour charges de service public :

- 0,02 million d'euros concourent au financement de la recherche dans le domaine de l'art et avec les écoles d'art ;

- 0,28 million d'euros sont affectés à l'institut national d'histoire de l'art (INHA) aux fins de mises en oeuvre de programmes de recherche dans ce domaine ;

- 0,49 million d'euros sont versés à l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) ;

- 1,19 million d'euros sont fléchés vers les écoles nationales supérieures d'architectures en vue de dynamiser la recherche relative à l'amélioration du cadre de vie, du devenir des villes et aux enjeux du développement durable ;

- 99 millions d`euros concourent au financement d'Universcience, l'établissement public du Palais de la découverte et de la Cité des Sciences et de l'industrie (EPPDCSI), cette somme étant complétée par ailleurs par une dotation en fonds propres de 1,65 million d'euros. Universcience agrège 91,3 % des crédits de l'action 04.

La relative stabilité des crédits peut cependant apparaître comme un leurre, le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 prévoyant une dotation complémentaire de 23 millions d'euros (AE = CP) pour compenser les pertes de billetterie d'Universcience. Cette somme est appelée à être reportée en 2022.

Après avoir enregistré une baisse de ses recettes de 10,2 millions d'euros en 2020, l'établissement table en effet sur une réduction de ses prévisions de ses recettes propres 2021 et 2022 à hauteur respectivement de - 30 et - 15 %.

IV. LE PROGRAMME 224 « SOUTIEN AUX POLITIQUES DU MINISTÈRE » EST LARGEMENT DÉDIÉ À LA MODERNISATION DU MINISTÈRE

Le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère » recense, depuis la loi de finances pour 2021, les crédits dédiés aux fonctions de soutien et ceux affectés à l'action culturelle internationale. Piloté par le secrétariat général du ministère, il devrait être doté de 777,4 millions d'euros en AE et 775,5 millions d'euros en CP en 2022.

99 % des crédits sont fléchés vers les fonctions de soutien. Le montant des crédits de paiement atteint 768,1 millions d'euros, enregistrant une progression de 23,94 millions d'euros sur une année (+3,22 %).

Les crédits dévolus à l'action culturelle internationale restent, quant à eux, stables : 7,39 millions d'euros (AE = CP). Il est possible de s'interroger sur l'intérêt de maintenir ces crédits au sein du programme 224. La plupart des actions menées (soutien à l'export des industries culturelles françaises, accueil des artistes et des cultures étrangères en France, contribution à la protection du patrimoine mondial, valorisation de l'expertise culturelle française sur le marché internationale, soutien à la mobilité des artistes) pouvant être assumées par les directions générales du ministère (Patrimoines, Création, Médias et industries culturelles).

A. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES DE PERSONNEL

1. L'augmentation de la masse salariale n'est pas remise en cause par la réduction des effectifs du ministère

Le plafond d'emploi du ministère de la culture devrait s'établir à 9 528 équivalents temps plein travaillé (ETPT), soit 50 unités de moins qu'en 2021. Cette diminution du nombre de postes, dans la lignée de celle retenue en loi de finances pour 2021 (- 52 ETPT), concerne l'administration centrale du ministère et, principalement, le secrétariat général du ministère.

La masse salariale devrait continuer à croître en 2022, passant de 473,03 millions d'euros à 493,36 millions d'euros (+ 4,29 %). 75 % de cette progression résulte de mesures catégorielles, dont le plan de rattrapage indemnitaire cf infra ). Les rémunérations d'activité devraient, dans ces conditions, croître de 11,5 millions d'euros en 2022 pour atteindre 414,9 millions d'euros (+ 2,86 %).

2. La poursuite du plan de rattrapage indemnitaire

La mise en place en 2018 du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) a permis de mettre en avant un décrochage indemnitaire du ministère de la culture par rapport à la moyenne interministérielle . Des écarts entre corps compris entre - 15% et - 115% au détriment des agents du ministère de la culture ont ainsi été relevés, conduisant à la mise en oeuvre d'un plan de rattrapage indemnitaire . 26 millions d'euros ont ainsi été dégagés entre 2018 et 2021 , le montant moyen du régime indemnitaire d'un agent est passant de 6 226 euros annuels en 2017 à 8 867 euros en 2020. L'effort s'est concentré prioritairement sur les catégories B et C, avec pour objectif la revalorisation des bas salaires.

Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit une accélération du déploiement de ce plan, avec une dotation de 13 millions d'euros ciblant en majorité les agents de la catégorie A.

Cette amélioration s'inscrit dans un contexte de baisse des inscriptions aux concours de la fonction publique et de concurrence accrue entre employeurs publics. Les rapporteurs spéciaux rappellent que la revalorisation de la grille indemnitaire des agents du ministère de la culture doit permettre de renforcer son attractivité et d'éviter des vacances de postes prolongées.

Ce plan ne résout pas toutes les difficultés. Certains corps souffrent toujours d'un déficit d'attractivité, à l'image de celui des architectes urbanistes de l'État (AUE) rattachés au ministère de la culture, dont le régime indemnitaire reste moins favorable que ceux rattachés au ministère de la transition écologique. Les montants versés au sein de celui-ci varient entre 21 500 et 43 500 euros annuels, contre une somme comprise entre 10 000 et 17 000 euros au sein du ministère de la culture.

B. L'AVANT-DERNIÈRE ÉTAPE DU PROJET CAMUS

Lancé en 2019, le projet immobilier Camus prévoit la rénovation des locaux et l'aménagement de nouveaux bureaux au sein du Quadrilatère des archives ainsi que des travaux au sein des sites de la rue des Bons-enfants et de l'hôtel de Valois au Palais-Royal. Le ministère de la culture devrait, à l'horizon 2023, passer de 7 à 3 sites.

Les travaux visant les sites des rues de Valois et des Bons-Enfants devraient se terminer en 2022. La mise en oeuvre des premiers déménagements et opérations de transfert entre les sites devrait intervenir dans la foulée.

Les travaux de gros oeuvre et de démolition du Quadrilatère des archives ont, quant à eux, démarré durant l'été 2021. Une remise des travaux est prévue au deuxième semestre 2023.

Ce projet est financé sur la mobilisation des droits de tirage du ministère de la Culture sur le compte d'affectation spéciale « Immobilier de l'État ». Le budget prévisionnel est établi à 43,3 millions d'euros :

- 37,45 millions d'euros visent la rénovation et l'aménagement du Quadrilatère des archives ;

- 3,1 millions d'euros dédiés aux les travaux de densification des sites des Bons-Enfants et de Valois ;

- 1,9 million d'euros au titre des frais d'accompagnement et d'études préalables ;

- 0,8 million d'euros de provisions pour frais de transfert des agents et d'équipement mobilier ;

- 0,1 million d'euros de provision pour une étude de refonte de la signalétique des trois sites.

L'opération fait également l'objet d'un certain nombre d'investissements annexes financés sur crédits budgétaires à l'image du plan d'équipement multimédia ou des travaux de gros entretien et de maintenance. Le budget de ces différentes opérations n'est, cependant, pas encore arrêté. Un bilan devrait être effectué à la fin des travaux.

Le coût total devrait être compensé par les recettes issues de la valorisation ou de la cession des sites de Pyramides, que la direction de l'Immobilier de l'État chiffre à 74 millions d'euros, et Richelieu, estimé, quant à lui, à 12 millions d'euros. Le lancement des procédures de cession-valorisation de ces deux sites devrait intervenir en 2022. Les économies engendrées par l'abandon du site de la rue de Beaubourg, loué par le ministère jusqu'au 31 décembre 2023, sont évaluées de leur côté à 2 millions d'euros.

C. UNE MAJORATION DES CRÉDITS POUR PARTIE DÉDIÉE À LA TRANSFORMATION NUMÉRIQUE DU MINISTÈRE

4,5 millions d'euros de crédits supplémentaires devraient être dédiés à la mise en oeuvre du plan pluriannuel de transformation numérique du ministère, qui a débuté en 2019 et devrait se terminer en 2022.

Les rapporteurs spéciaux relèvent que cette majoration des crédits permet de répondre à un double impératif : une réorganisation nécessaire suite à la crise sanitaire mais aussi un rattrapage indispensable compte tenu de l'écart observé avec d'autres administrations. Le budget informatique moyen par agent du ministère de la culture était, en effet, de 30 % inférieur à la moyenne constatée au sein des autres ministères. En découlent des réseaux moins solides mais aussi des logiciels et des équipements lacunaires. Le ministère ne disposait pas ainsi de salle dédiée aux visioconférences.

La progression de la dotation informatique doit également, permettre d'accélérer la dématérialisation des procédures et de répondre plus rapidement aux usagers, notamment en ce qui concerne la gestion des aides.

D. L'OPÉRATEUR DU PATRIMOINE ET DES PROJETS IMMOBILIERS DE LA CULTURE (OPPIC) ACTEUR DE LA RELANCE DANS UN CONTEXTE INCERTAIN

L'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture (OPPIC) est le seul opérateur rattaché au programme 224. Celui-ci ne couvre cependant que le budget de fonctionnement de l'OPPIC. Le présent projet de loi de finances pour 2022 prévoit une dotation équivalente à celle retenue en loi de finances pour 2021 : 12,22 millions d'euros (AE = CP).

Le plafond d'emplois est établi à 125 ETPT dont 10 sont considérés comme « activables ». Ils ne sont, en effet, utilisés que s'ils oeuvrent pour des mandants n'appartenant pas au champ « culture » de l'État. L'OPPIC n'oeuvre pas en effet uniquement pour le ministère de la culture mais supervise également les chantiers de la présidence de la République et du ministère de la défense.

L'exercice 2022 devrait être marqué par la livraison de plusieurs chantiers : le site Richelieu de la Bibliothèque nationale de France, le parcours muséographique du Musée de Cluny - Musée national du Moyen-Âge, les façades du château de Saint-Germain-en-Laye, le remplacement des coupoles textiles de la Cité des sciences et de l'industrie et le réaménagement du quadrilatère des Archives au profit du ministère de la culture (cf supra ).

L'encours, soit le montant cumulé des opérations en portefeuille, devrait s'établir entre 860 et 870 millions d'euros en fin d'exercice 2021. Les prévisions d'engagements sur le même exercice devraient atteindre 170 millions d'euros et les décaissements 160 millions d'euros , contre 130 millions d'euros en engagements et 117 millions d'euros en décaissements en 2020, ce qui dénote une véritable reprise .

38 % des engagements prévus en 2021 visent des opérations financées par le Plan de relance. L'OPPIC est en effet concerné par trois volets de celui-ci :

- le volet « performance énergétique des bâtiments publics » ;

- le volet « écoles d'enseignement supérieur culturel » à hauteur de 32 millions d'euros (70 millions d'euros sont prévus par le ministère de la culture pour ce projet) ;

- le volet « ouvrages hydrauliques » : 3 millions d'euros sont ainsi dédiés à l'opération de confortement du grand canal du château de Fontainebleau.

65,7 millions d'euros devraient ainsi être engagés en 2021 en vue de financer ces opérations de relance dont 39 millions d'euros pour la réhabilitation de l'ancien siège du journal L'Humanité à Saint-Denis et 23 millions d'euros pour la rénovation de l'école nationale supérieure d'architecture de Versailles.

Cet investissement s'inscrit dans un contexte incertain lié aux effets de la crise. La désorganisation des chaines d'approvisionnement en matière première pourrait, en effet, affecter la durée et le coût de certains chantiers. Par ailleurs, si les prix avaient pu être contenus en 2020 en raison du faible nombre de consultations publiques , celles-ci sont, depuis juin 2021, largement infructueuses . En témoignent les consultations visant la construction d'un bâtiment d'exploitation sur le parc de la Villette (+ 14 % par rapport au montant prévu) ou celle du restaurant administratif des archives nationales de Pierrefitte (+ 30 % par rapport au montant prévu).

Les rapporteurs spéciaux craignent que la perspective des Jeux olympiques de Paris en 2024 contribue à majorer un peu plus les tarifs des prestataires dans un contexte de multiplication des chantiers. Il s'agit donc d'anticiper cette progression dans l'évaluation budgétaire du coût des travaux.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, en première délibération, les crédits de la mission « Culture » avec modifications.

À l'initiative du Gouvernement, elle a adopté un amendement revalorisant les crédits de la mission à hauteur de 0,435 million d'euros (AE = CP) . Cette somme affectée au programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture » est destinée à soutenir la trajectoire pluriannuelle de création de postes d'enseignants au sein des écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA). Elle correspond à la création de 5 ETPT.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 16 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Vincent Éblé et Didier Rambaud, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Culture ».

M. Claude Raynal , président. - Nous examinons désormais les crédits de la mission « Culture ».

M. Didier Rambaud , rapporteur spécial de la mission « Culture » . - Je vous prie d'excuser l'absence, pour des raisons de santé, de Vincent Éblé.

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 3,491 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 3,461 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces chiffres traduisent une nette progression par rapport à la loi de finances pour 2021, avec une hausse de 8,11 % en crédits de paiement, soit 259,74 millions d'euros.

Nous relevons un véritable engagement budgétaire en faveur de la culture depuis le début de la crise sanitaire. Les crédits de paiement de la mission ont, en effet, progressé de 17,42 %, soit 513,6 millions d'euros, par rapport à 2019. Reste à déterminer si ce niveau de dotation peut perdurer à l'avenir, tant en raison de l'équilibre budgétaire en général que du risque d'extrême dépendance aux fonds publics d'une partie des filières couvertes par la mission.

La mission « Culture » ne résume pas le financement public de la culture et de la communication. L'agrégation des crédits budgétaires et des dépenses fiscales destinés directement et indirectement à la culture et à la communication devrait ainsi atteindre 15,6 milliards d'euros en 2022. Ce montant n'intègre pas les crédits consacrés à la culture et à la communication au sein de la mission « Plan de relance », soit 463 millions d'euros.

La progression des crédits de paiement attendue en 2022 résulte pour 65 % de la montée en charge du pass Culture, couvert par le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Le pass Culture, déployé dans toute la France depuis mai 2021, devrait être étendu, en 2022, aux jeunes de 15 ans et plus, et aux élèves à partir de la quatrième. Le coût de cette montée en charge est établi à 140 millions d'euros en année pleine pour la mission. Le projet de budget pour 2022 prévoit ainsi une dotation de 199 millions d'euros à laquelle viennent s'ajouter 45 millions d'euros en provenance de la mission « Enseignement scolaire ».

Le succès du déploiement, que nous appelions de nos voeux l'an dernier, est indéniable : plus de 770 000 jeunes avaient ainsi activé leur pass en octobre 2021, soit 80 % de la population visée.

L'exercice 2022 devrait donc permettre une évaluation du niveau qualitatif de l'application, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs. Il s'agira notamment de vérifier que le pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue à faire évoluer des pratiques culturelles. Le pass ne saurait, en effet, se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit être éditorialisé en vue de mettre en place un véritable parcours culturel, ciblant notamment le spectacle vivant. Au-delà de la question de la médiation culturelle, un accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non scolarisés au pass. Il conviendra également de contribuer à faire du pass une véritable plateforme en faveur de l'éducation artistique et culturelle accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que le pass Culture, qui agrège 54 % des crédits dédiés à cette politique, ne se résume pas à une offre limitée dans le temps. Une attention devra enfin être portée sur les frais de fonctionnement de la société par actions simplifiée « pass Culture ».

En tout état de cause, il est indispensable que le pass Culture ne résume pas l'effort de l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle et que la montée en charge budgétaire de l'application ne s'effectue au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement affectés. Le projet de loi de finances prévoit à ce titre 23,5 millions d'euros en AE et 11,5 millions d'euros en crédits de paiement de mesures nouvelles. Cette majoration des crédits s'avère indispensable si le Gouvernement entend atteindre ses objectifs en matière d'éducation artistique et culturelle. Les indicateurs rattachés au programme tablent en effet sur une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle et de l'effort en faveur des territoires prioritaires.

Le programme 361 appelle, par ailleurs, deux remarques.

D'abord, les crédits dédiés aux travaux des établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 8,82 % en 2022.Ces crédits seront complétés par le Plan de relance à hauteur de 20 millions d'euros. Pour l'heure, le plan de relance peine à s'incarner, avec un taux d'exécution des crédits 2021 établi à 34 %, faisant réapparaître un risque de non-consommation.

Ensuite, une attention particulière devrait être portée à la situation des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur culturel. Aucun dispositif particulier n'est cependant présenté dans le programme 361 ni au sein de la mission « Plan de relance ». Au regard des retards pris dans la rénovation des écoles nationales d'art, un recalibrage en faveur d'un mécanisme d'insertion des sommes destinées à compléter le programme 361 pourrait être opportun.

J'aborderai pour conclure le programme 224 consacré au soutien des politiques du ministère, doté de 775,5 millions d'euros en crédits de paiement en 2022.

La masse salariale devrait continuer à croître en 2022 en dépit de la réduction des effectifs : 13 millions d'euros seront fléchés vers le nécessaire plan de rattrapage indemnitaire pluriannuel destiné à combler le retard des agents du ministère sur leurs homologues des autres administrations. La majoration des crédits dédiés à l'informatique de 4,5 millions d'euros doit, de son côté, permettre un rattrapage indispensable de l'écart observé avec d'autres administrations. En ce qui concerne les économies, l'année 2022 devrait coïncider avec la réduction effective du nombre de sites parisiens du ministère.

Je vais désormais lire l'intervention de Vincent Éblé, dédiée aux crédits fléchés vers la création et le patrimoine.

« Le programme 175 « Patrimoines » devrait être doté en 2022 de 1,023 milliard d'euros en crédits de paiement. Le présent projet de loi de finances prévoit 10,1 millions d'euros en crédits de paiement de mesures nouvelles : 4,2 millions d'euros fléchés vers des mesures de personnels au sein des opérateurs ; 2,9 millions d'euros pour la revalorisation des crédits dédiés à la promotion de l'architecture via les réseaux territoriaux comme le réseau « Villes et Pays d'art et d'histoire » ; 2 millions d'euros pour la poursuite du déploiement du plan de mise en sécurité des cathédrales ; et enfin 1 million d'euros pour la revalorisation de la dotation du fonds incitatif et partenarial qui accompagne les collectivités à faibles ressources en vue de financer des opérations de restauration de monuments historiques.

« À cette somme s'ajoutent 16 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement destinés au financement de schémas directeurs de travaux, à Versailles, aux Archives nationales, ou à Fontainebleau par exemple. Cette priorité accordée aux travaux, louable dans un contexte de réduction des ressources propres des principaux opérateurs, s'inscrit cependant dans un contexte d'incertitude quant à leur bonne exécution. Cette question n'est pas anodine au regard de l'exécution des crédits dédiés à la restauration du patrimoine au sein du plan de relance. Si, au 1 er octobre 2021, 93 des 136 opérations prévues, hors château de Villers-Cotterêts, ont pu être lancées, le taux d'exécution des crédits de paiement relatifs à celles-ci s'avère relativement faible : 29,86 %. Ces retards ont conduit au report en 2023 d'une partie, à hauteur de 42 millions d'euros en crédits de paiement, de la dotation prévue en 2022, qui devrait s'établir en conséquence à 227,3 millions d'euros en crédits de paiement.

« Je relève que le programme « Patrimoines » est complété par deux dispositifs non budgétaires : les dons en faveur de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 841,3 millions d'euros de promesses de dons, 160 millions d'euros de travaux déjà engagés -et le Loto du Patrimoine - 72 millions d'euros récoltés depuis sa création. Le ministère complète cet apport en dégelant en fin de gestion un montant représentant le produit des taxes perçues sur le produit du jeu. Au regard de l'ampleur du défi que représente la restauration du petit patrimoine, notamment rural, une exonération complète du produit du jeu aurait pu être décidée en amont, le dégel venant ensuite éventuellement en complément. Une telle solution est déjà retenue au Pays-Bas ou au Royaume-Uni.

« Les pertes cumulées pour les opérateurs du programme devraient atteindre, de leur côté, 310 millions d'euros en 2021 et 182 millions d'euros en 2022. Dans ces conditions, les dispositifs de soutien exceptionnels mis en oeuvre en 2020, dans les collectifs budgétaires, et en 2021 à travers la mission « Plan de relance » en loi de finances, ont pu apparaître, malgré leur caractère exceptionnel, insuffisants. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 tend à pallier ces difficultés et l'exercice 2022 sera par ailleurs marqué par un apport complémentaire de 102,3 millions d'euros via la mission « Plan de relance ». Au final 567,2 millions d'euros auront été dégagés entre 2020 et 2022, hors subventions pour charges de service public, afin de compenser des pertes nettes estimées de leur côté à 745 millions d'euros.

« La perspective d'un retour à la normale est désormais repoussée à l'horizon 2024. Elle soulève des questions quant à l'avenir des opérateurs du programme 175 à l'issue de l'exercice 2022. Il existe un risque réel d'effet ciseau, conjuguant progression inévitable des charges et perspective de recettes limitées, voire incertaines. Un maintien, lors des prochains exercices budgétaires, d'un soutien financier de l'État destiné à pallier le manque de recettes est à attendre. Il romprait avec la trajectoire de réduction de l'intervention de l'État et le développement des ressources propres.

« Le montant des crédits de paiement du programme « Création » devrait atteindre, de son côté, 914,87 millions d'euros, soit une progression de 54,19 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021. Les mesures nouvelles sont principalement orientées dans trois directions : le soutien à la création dans les territoires pour 20 millions d'euros, l'appui aux investissements des opérateurs - 16,65 millions d'euros consacrés aux travaux des salles de l'Odéon et de Chaillot et à la relocalisation du Centre national des arts plastiques à Pantin - et le renforcement des mesures de soutien à l'emploi, avec 5 millions d'euros dédiés au Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). S'agissant de ce dernier sujet, la prolongation du dispositif d'année blanche pour les intermittents jusqu'au 31 décembre 2021 et la sortie par paliers en 2022, dont le coût global est estimé à 1,3 milliard d'euros, viennent compléter les dispositifs prévus au sein du programme 131.

« Ce dernier programme ne contient pas, en outre, toute l'aide accordée aux filières. Le Plan de relance prévoit ainsi deux enveloppes appelées à compléter le programme 131 pour un montant total de 81,1 millions d'euros en crédits de paiement.

« Ainsi, 44 millions sont fléchés vers les opérateurs du patrimoine. À cette somme, il convient d'ajouter les crédits prévus par le collectif budgétaire de fin d'année 2021 appelés à être reportés en 2022. Cette dotation complémentaire illustre les difficultés traversées par les opérateurs en 2021 - 65,68 millions d'euros de pertes annoncées, contre 48,34 millions d'euros en 2020 - et les doutes qui entourent un retour à la normale de l'activité en 2022.

« Cet appui budgétaire doit là encore être appuyé tant il peut éloigner le spectre d'une cessation de paiement. La crise frappe logiquement plus nettement les opérateurs les plus dépendants de leurs ressources propres. L'hypothèse d'un changement des habitudes culturelles post-covid doit, de fait, inciter à une réévaluation du prix des billets pour accéder à certaines salles publiques. La question de la billetterie est d'autant plus cruciale que les recettes liées au mécénat tendent à s'amoindrir, tant pour des raisons fiscales que sociétales.

« Sous réserve de ces observations, nous vous proposons d'adopter sans modification les crédits de la mission « Culture ». »

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Vous avez évoqué le déploiement du pass Culture. Dispose-t-on de statistiques quant à l'utilisation de ce chèque de 300 euros ? Quels biens culturels sont acquis en priorité via ce dispositif ? Pouvez-vous, par ailleurs, nous détailler les modalités de son extension aux jeunes de moins de dix-huit ans à partir de janvier prochain ? Comment ce dispositif s'articule-t-il avec les dispositifs existants dans certains territoires ?

M. Antoine Lefèvre . - Pourriez-vous nous donner plus de précisions concernant les travaux réalisés au château de Villers-Cotterêts pour accueillir la future Cité internationale de la langue française ? Je voudrais savoir notamment si des crédits du plan de relance sont mobilisés pour son financement.

M. Rémi Féraud . - Ma question portera sur le patrimoine. Si je comprends bien, le projet de loi de finances pour 2022, comme cela avait déjà été le cas l'an passé, ne comporte aucun crédit de l'État pour la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pourtant Paris, la région d'Île-de-France, ainsi que d'autres collectivités partout en France, ont participé à la souscription...

M. Claude Raynal , président . - Comment le secteur de la culture rebondit-il après la crise sanitaire ? Il semble que le public ne soit plus aussi nombreux dans les théâtres et les cinémas. La fréquentation a ainsi baissé de 25 % dans les cinémas. Le ministère continuera-t-il à soutenir ces secteurs après la crise ?

M. Didier Rambaud , rapporteur spécial . - La moitié des achats réalisés par le biais du pass Culture sont des achats de livres. Il s'agit principalement de mangas. Certains s'en inquiètent dans la presse, mais il me semble que cela permet d'inciter les jeunes à entrer dans une librairie : ainsi 35 % des acheteurs d'un manga ont acheté aussi une oeuvre plus littéraire. Les autres postes d'utilisation du pass sont l'achat de places de cinéma, pour 11 millions d'euros, et d'instruments de musique, pour 8 millions d'euros. Les spectacles vivants ne représentent que 1,5 % des dépenses, mais il est vrai que le contexte sanitaire est particulier. Quant à la complémentarité avec les autres dispositifs culturels, je ne suis pas sûr qu'elle existe. Les jeunes peuvent profiter de tous les dispositifs. Dans l'Isère, par exemple, un « chéquier jeunes » a été instauré pour les collégiens. Le cumul sera encore accentué à partir de 2022 dans la mesure où le pass Culture sera élargi à tous les élèves à partir de la classe de quatrième, même s'il ne pourra pas être utilisé, dans ce cadre, pour les biens numériques, à l'exception de la presse en ligne, ni pour les jeux vidéo.

En ce qui concerne les travaux au château de Villers-Cotterêts, le plan de relance prévoit une enveloppe de 100 millions d'euros, dont 83 millions doivent être consommés avant la fin 2022, et 17 millions reportés en 2023.

En effet, le projet de loi de finances ne comporte pas de crédits de l'État pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Celle-ci s'effectue pour l'instant grâce aux dons.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - En somme, le Président décide de tout, mais ce sont les dons qui financent !

M. Didier Rambaud , rapporteur spécial . - Il faut rappeler toutefois que l'État contribue par le biais de la dépense fiscale associée au mécénat.

S'agissant de la chute de la fréquentation, elle est aussi due à la baisse du nombre de touristes étrangers. Les gens, par ailleurs, ne réservent plus à l'avance leurs places de spectacle par crainte des annulations. Les opérateurs des programmes « Patrimoines » et « Création » estiment que l'on ne retrouvera qu'en 2024 les chiffres de fréquentation que l'on connaissait avant la crise.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Culture ».

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* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Secrétariat général du ministère de la culture

- Mme Aude ACCARY-BONNERY, directrice et secrétaire générale adjointe en charge du programme 224 ;

- Mme Caroline GARDETTE, cheffe du service des ressources humaines.

Direction générale des patrimoines et de l'architecture (DGPA)

- M. Jean-François HÉBERT, directeur général.

Direction générale de la création artistique (DGCA)

- M. Christopher MILLES, directeur général.

Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle (DG2TDC)

- M. Noël CORBIN, délégué général.

Direction de la SAS Pass Culture

- M. Sébastien CAVALIER, président ;

- M. Maxence DANIEL, responsable de la prospective et des relations avec les pouvoirs publics.

Centre national des arts plastiques (CNAP)

- Mme Anne-Sophie de BELLEGARDE, secrétaire générale .

Opéra national de Paris

- M. Martin AJDARI, directeur général adjoint.

Théâtre national de l'Odéon

- Mme Bethânia GASCHET, administratrice ;

- Mme Margot CHANCERELLE, directrice de la production et des budgets.

Réunion des Musées nationaux - Grand Palais

- M. Chris DERCON, président ;

- M. Emmanuel MARCOVITCH, directeur général délégué ;

- Mme Nathalie BLANC-GUELPA, directrice générale déléguée adjointe.

Centre Pompidou

- Mme Julie NARBEY, directrice générale.

Centre des monuments nationaux

- M. Philippe BELAVAL, directeur ;

- Mme Delphine SAMSOEN, directrice générale ;

- Mme Lucile PRÉVOT, directrice administrative, juridique et financière.

Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC)

- Mme Clarisse MAZOYER, présidente.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2022.html


* 1 Cour des comptes, Les dépenses publiques pendant la crise et le bilan opérationnel de leur utilisation, juillet 2021.

* 2 Article 22 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 pour 2021.

* 3 Les Français et les sorties culturelles post-crise, Harris interactive pour le ministère de la culture, septembre 2021.

* 4 Articles 200 et 238 bis du code général des impôts.

* 5 Article 134 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

* 6 Réponse au questionnaire adressé par les rapporteurs spéciaux en mai 2020.

* 7 Cour des comptes, Les outien du ministère de la culture au spectacle vivant pendant la crise de la Covid 19, audit flash, septembre 2021.

* 8 Construction de la « Philharmonie de Paris », exercices 2006 et suivants. Rapport d'observation définitive et ses réponses, chambre régionale des comptes d'Île-de-France, mai 2016 et La Philharmonie de Paris : une dérive préoccupante, Rapport d'information de M. Yann GAILLARD, fait au nom de la commission des finances du Sénat, n° 55 (2012-2013) - 17 octobre 2012.

* 9 Décret n° 2019-1011 du 1 er octobre 2019.

* 10 Décret n° 2018-356 du 15 mai 2018 instituant une mesure de soutien au pouvoir d'achat des artistes-auteurs pour l'année pour 2018 et décret n° 2019-422 du 7 mai 2019 instituant des mesures de soutien au pouvoir d'achat des artistes-auteurs pour 2019 et les années suivantes.

* 11 Arrêté du 22 juillet 2020 portant mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du code du travail et décret n° 2020-928 du 29 juillet 2020 portant mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement des artistes et techniciens intermittents du spectacle.

* 12 Décret n° 2021-1034 du 4 août 2021 portant mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement des artistes et techniciens intermittents du spectacle.

* 13 Situation des intermittents du spectacle à l'issue de l'année blanche : diagnostic et propositions, avril 2021.

* 14 article 199 tercivies du code général des impôts.

* 15 Le soutien spécifique de l'État au patrimoine pendant la crise sanitaire - septembre 2021.

* 16 Loi n° 2019-803 du 29 juillet 2019 pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale et décret n° 2019-1250 du 28 novembre 2019 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

* 17 Projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet, Avis n° 519 (2018-2019) de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 22 mai 2019.

* 18 La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris - Premier bilan, rapport public thématique de la Cour des comptes, septembre 2020.

* 19 Les montants n'intègrent pas les sommes versées par ailleurs au Centre des monuments nationaux en vue d'accélérer les travaux sur les sites dont il possède la gestion (40 millions d'euros) et ceux visant le château de Villers-Cotterêts (100 millions d'euros).

* 20 Ardennes, Bas Rhin, Côtes d'Armor, Doubs, Finistère, Guyane, Hérault, Ille-et-Vilaine, Morbihan, Nièvre, Saône-et-Loire, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Vaucluse.

* 21 Décret n°2019-755 du 22 juillet 2019.

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