C. LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DES POLITIQUES DE L'INTÉRIEUR, DES MISSIONS INDISPENSABLES, HEUREUSEMENT SANCTUARISÉES

Le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » porte les fonctions de pilotage du ministère de l'intérieur au travers des activités d'état-major, d'expertise, de conseil et de contrôle.

Le programme regroupe également les crédits relatifs aux affaires juridiques et contentieuses du ministère, ceux du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) et, depuis le 1 er janvier 2020, ceux de la nouvelle direction numérique et ceux du fonctionnement des secrétariats généraux pour l'administration (SGAMI).

D'après les informations transmises à la rapporteure spéciale, la stratégie pour 2022 est principalement structurée autour de trois axes :

- poursuivre les efforts engagés en termes d'amélioration de la prévision et de pilotage des dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle des fonctionnaires ;

- assurer la mise en oeuvre des programmes d'action de prévention de la délinquance et de la radicalisation ;

- maintenir la qualité des prestations réalisées au profit des directions et services du ministère en améliorant l'efficience de la gestion des moyens dont ils disposent et la maîtrise du coût des fonctions support.

1. Des efforts de chiffrage des dépenses de contentieux qui doivent être poursuivis

Dans le cadre de la mise en oeuvre du PPNG , sept pôles d'appui juridique ont été créés : trois en matière de police administrative, deux en matière de contentieux statutaire et deux en matière de concours de la force publique et responsabilité de l'État. La direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ) pilote ces différents pôles, dont le principal objectif consiste à prévenir les contentieux et à renforcer la défense de l'État.

D'après les informations transmises à la rapporteure spéciale, la DLPAJ a mené d'importants efforts en termes de prévision budgétaire, pour identifier le plus en amont possible les contentieux à fort enjeu financier ainsi que ceux qui n'ont pas vocation à être imputés sur le programme 216.

La maitrise du coût des différents contentieux reste l'un des enjeux majeurs de maîtrise de la dépense par le ministère. En 2019, les dépenses de contentieux avaient en effet dépassé de 10 % les ouvertures prévues en loi de finances initiale, alors même que la DLPAJ avait assuré avoir entamé dès 2018 son effort de sincérisation de la budgétisation de ces dépenses. En 2020, un dépassement de plus de 2 millions d'euros sur l'action a également été constaté.

2. Le renforcement du rôle du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation
a) La hausse des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation

Les missions du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) sont définies à l'article D. 132-2 du code de la sécurité intérieure 19 ( * ) . Le secrétariat général du CIPDR (SG-CIPDR) coordonne l'animation des réseaux des services déconcentrés de l'État et des réseaux associatifs . L'objectif du secrétariat général est de décliner les politiques de prévention de la délinquance et de la radicalisation sur tous les territoires.

Le comité s'appuie notamment sur les conseils locaux ou intercommunaux de prévention de la délinquance, issus de la loi du 5 mars 2007 (CLSPD ou CISPD), leurs groupes opérationnels, leur articulation avec les autres services de l'État, les élus locaux et les acteurs associatifs.

Le comité doit veiller à la mise en oeuvre des politiques publiques de prévention et permettre de coordonner l'action des ministères et l'utilisation des moyens budgétaires consacrés à ces deux politiques.

Les politiques menées par le SG-CIPDR s'appuient principalement sur deux cadres d'intervention : le plan national de prévention de la radicalisation « prévenir pour protéger » du 23 février 2018 et la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024. En 2022, les crédits demandés sur l'action dédiée au fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (FIPD) sont en hausse, passant de 65,98 millions d'euros en 2021 à 69,4 millions d'euros en 2022.

Le FIPD porte des dépenses d'intervention destinée à accompagner des projets au niveau départemental (85 %) et des porteurs de projets associatifs exerçant des actions à rayonnement national (15 %).

Le premier poste de dépense concerne les actions de prévention (47 %), suivi par la sécurisation des sites sensibles et la vidéo protection représentent une part importante des crédits du FIPD (30 % des dépenses).

Les dépenses de prévention de la radicalisation (15,8 millions d'euros) recouvrent à la fois les dépenses relatives aux actions de prévention de la radicalisation, au contre-discours républicain et à la lutte contre les dérives sectaires. La rapporteure spéciale estime que se trouvent ainsi mêlés des crédits qui devraient, du fait de la différence entre les objectifs poursuivis, être plus nettement distingués .

De nouvelles actions de prévention doivent en particulier permettre de renforcer la prévention de la pauvreté et intégrer la lutte contre l'islamisme radical dans le programme du service national universel .

La stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024

Succédant à la stratégie précédente de 2013, cette nouvelle stratégie a été adoptée par le Premier ministre le 5 mars 2020. Elle fixe les orientations gouvernementales de la politique de prévention de la délinquance pour cette période.

La stratégie a vocation à être déclinée sur l'ensemble du territoire national, dont les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et les quartiers de reconquête républicaine. Une place plus large a été faite à l'initiative locale et à l'expérimentation.

La stratégie comporte 40 mesures et vise notamment à proposer un panel d'actions sous forme de « boîte à outils » à destination des acteurs de la prévention de la délinquance. Les évolutions de la stratégie concernent principalement :

- la prévention de la délinquance dès le plus jeune âge (moins de 12 ans) par la mobilisation plus systématique des familles et la mise en oeuvre d'actions de sensibilisation et d'éducation sur des nouvelles formes de délinquance (par exemple la cyberdélinquance), l'éducation aux médias et à la citoyenneté, la prévention de l'entrée dans les trafics et les phénomènes de bande, avec le maintien du volet prévention de la récidive des jeunes ;

- la protection, le plus en amont possible, des personnes vulnérables dans une approche « d'aller vers » les victimes invisibles : les personnes âgées, les personnes en situation de handicap, les femmes victimes de violences, les mineurs. Leur accompagnement sera en particulier renforcé par le déploiement des postes d'intervenants sociaux en commissariat et en gendarmerie ;

- une implication plus forte de la population et de la société civile dans la prévention de la délinquance et la production de tranquillité publique : la population doit être davantage associée et consultée (y compris sur l'installation de la vidéo-protection), la société civile sollicitée pour faciliter l'insertion des jeunes : monde sportif, entreprenariat engagé ;

- une gouvernance rénovée par une adaptation à chaque territoire et une coordination entre les différents acteurs (préfets, autorité judiciaire, maires et présidents d'intercommunalités), accompagnée de nouveaux outils d'évaluation et de formation, notamment pour les nouveaux élus.

Source : audition du SG-CIPDR

Dans la lignée du discours du Président de la République à Mulhouse le 18 février 2020, le rôle du SG-CIPDR en matière de lutte contre le séparatisme islamiste a été renforcé, en lien avec les préfets de département. D'après les informations communiquées par le SG-CIPDR, une unité de contre-discours républicain a ainsi été créée en son sein.

b) Le rattachement de la Miviludes au CIPDR

Le décret du 15 juillet 2020 20 ( * ) a rattaché la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) au ministère de l'intérieur, en en confiant la présidence au secrétaire général du CIPDR. Le rattachement prend la forme du transfert de deux ETP.

Le rattachement de la Miviludes
au secrétariat général du comité interministériel
de prévention de la délinquance et de la radicalisation

La mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) participe à la détection et la lutte contre les différentes formes d'emprise et de manipulation dans le cadre de dérives sectaires.

L'intégration de la Miviludes au sein du SG CIPDR a été présentée comme permettant de renouveler et d'asseoir sa coopération avec des services de l'État les plus impliqués dans la lutte contre les dérives sectaires, à savoir les services du ministère de l'intérieur. Ce rattachement aurait permis, d'après le secrétariat général du CIPDR, de coupler à l'expertise de la Miviludes les capacités juridiques et d'enquête du ministère.

Les effectifs de la Miviludes devraient se stabiliser autour de 10 agents, avec l'arrivée progressive de nouveaux conseillers mis à disposition par différents ministères.

Source : secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation

La rapporteure spéciale considère que les missions de la Miviludes ne doivent pas être confondues avec la prévention de la délinquance et la radicalisation . Il s'agit de problématiques différentes dont il ne faut pas faire l'amalgame. Elle salue néanmoins l'effort financier réalisé, alors que les transferts financiers depuis la mission « Direction de l'action du Gouvernement » avaient été relativement limités en 2021.

Ainsi, d'après la réponse au questionnaire de la rapporteure spéciale « la ministre déléguée a lancé un appel à projets national d'un million d'euros pour soutenir la politique publique de lutte contre les dérives sectaires, assurer la prévention contre ce phénomène, renforcer la prise en charge des victimes et familles de victimes de dérives sectaires et permettre à travers des travaux de recherches notamment, de développer une analyse plus fine du sujet et des thématiques connexes . »


* 19 Décret n° 2016-553 du 6 mai 2016.

* 20 Décret n° 2020-867 du 15 juillet 2020 modifiant le décret n° 2002-1392 du 28 novembre 2002 instituant une mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.

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