N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 17

INVESTIR POUR LA FRANCE DE 2030

Rapporteur spécial : M. Thierry MEIGNEN

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

I. UNE MISSION REGROUPANT DEUX PROGRAMMES D'INVESTISSEMENTS D'AVENIR

A. UNE MISSION DOTÉE DE 3,5 MILLIARDS D'EUROS DE CP EN 2022

La mission « Investissements d'avenir » comprend, depuis 2021, deux programmes d'investissements d'avenir distincts :

- le troisième programme d'investissements d'avenir (PIA 3), adopté en loi de finances initiale pour 2017, doté de 10 milliards d'euros ;

- le quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4), issu de la loi de finances initiale pour 2021, regroupant 20 milliards d'euros.

En 2022, le montant de crédits de paiements (CP) demandés pour la mission « Investissements d'avenir » s'élève à 3 505,1 millions d'euros , contre 3 976,0 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2021, soit une diminution de 12 % .

B. UN BUDGET INFÉRIEUR À LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE

S'agissant du PIA 3, le budget 2022 est inférieur de 772 millions d'euros à l'objectif fixé dans la programmation triennale 2020-2022, en raison des nombreux redéploiements de crédits effectués notamment dans le contexte de la crise sanitaire.

Pour ce qui est du PIA 4, l'échéancier initial des crédits de paiement prévoyait l'ouverture de 3 938 millions d'euros en 2022 , soit un montant près de deux fois supérieur au budget pour 2022 , qui s'élève à 1 996 millions d'euros.

Programmation triennale 2020-2022
et au-delà

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Échéancier des crédits de paiement
du PIA 4

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

II. PLUS DE QUATRE ANS APRÈS SON LANCEMENT, UN PIA 3 AMORÇANT DÉSORMAIS SA DERNIÈRE LIGNE DROITE

Entre 2018 et 2020, plus de 4,70 milliards d'euros de CP ont été exécutés pour couvrir les 10,16 milliards d'euros d'AE ouvertes en 2017, auxquels s'ajoutent les 1,75 milliard d'euros de CP votés en loi de finances initiale pour 2021. Partant, au 31 décembre 2021 - et nonobstant les aléas de l'exécution 2021 - la couverture en CP des AE initiales s'élèvera à 63,5 % .

Le PIA 3 est par ailleurs engagé à hauteur de 6,3 milliards d'euros, contractualisés à hauteur de 4,9 milliards d'euros et décaissés à hauteur de 1,7 milliard d'euros. Enfin, la quasi-totalité du PIA 3 est à ce jour programmée - c'est-à-dire que les crédits qui ne sont pas encore décaissés sont fléchés vers des dispositifs ouverts, en cours de lancement ou d'instruction.

Dans ce contexte, l'année 2022 devrait être caractérisée par :

- un ralentissement du versement des crédits de paiement. Jusqu'en 2023, des CP resteront à ouvrir en subventions et en fonds, mais au-delà de cette date, seuls les crédits de paiement en dotations décennales seront à ouvrir - et ce au maximum jusqu'en 2028 ;

- une intensification des décaissements, puisqu'une grande partie des fonds a d'ores et déjà été engagée et que le plan de relance implique des versements à très courte échéance.

III. UN PIA 4 DONT LES CONTOURS SE SONT PRÉCISÉS EN 2021, LAISSANT AUGURER D'UNE ACCÉLÉRATION EN 2022

A. UNE ARCHITECTURE JURIDIQUE ET UNE GOUVERNANCE DÉSORMAIS FINALISÉES

Selon les informations transmises au rapporteur spécial, le premier semestre 2021 a été essentiellement consacré à l'adoption du cadre juridique applicable au PIA 4 , préalable à la mise en oeuvre par action et au lancement des premiers appels à projets.

L'architecture juridique a été profondément réformée, et repose dorénavant sur un nombre restreint de conventions entre l'État et les opérateurs , dont la majorité ont été signées et publiées au Journal officiel - les conventions financières par opérateur et les conventions plus spécifiques encadrant les fonds propres demeurant en cours d'élaboration.

L'adoption de ce nouveau cadre juridique devrait permettre de consommer en grande partie les 16,56 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 1,5 milliard d'euros de crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale pour 2021.

Le lancement d'un quatrième programme d'investissements d'avenir s'est également accompagné de l'élaboration d'une nouvelle gouvernance , avec notamment la création d'un nouvel échelon de supervision, le Conseil interministériel de l'innovation, présidé par le Premier ministre.

B. UN VOLET « DIRIGÉ » DONT LES GRANDES LIGNES SEMBLENT DÉSORMAIS ARRÊTÉES, EN DÉPIT D'UNE BUDGÉTISATION ENCORE TRÈS INDICATIVE

Doté de 12,5 milliards d'euros dont 2,5 milliards d'euros en fonds propres, le programme 424 « Financement des investissements stratégiques » (volet « dirigé » du PIA 4) a vocation à financer des investissements exceptionnels dans le cadre de stratégies d'accélération permettant de mobiliser tous les leviers de l'intervention publique .

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, un certain nombre de stratégies étaient évoquées, mais aucune n'avait été officiellement validée. Dans le budget 2022, le volet « dirigé » tend à se préciser, puisque 19 stratégies ont été validées par le comité exécutif du Conseil interministériel de l'innovation, dont 10 ont pu faire l'objet d'une présentation détaillée .

En 2022, comme en 2021, 1,5 milliard d'euros de crédits de paiement sont demandés au titre de ce programme. Au sein de chaque action, ces crédits ont vocation à être répartis entre les opérateurs au prorata de l'enveloppe totale qui leur est affectée. Il ressort néanmoins des travaux du rapporteur spécial que le contenu de ces actions demeure encore très indicatif, les dispositifs étant encore, pour la plupart, en cours de construction .

C. UN VOLET « STRUCTUREL » DESTINÉ À RENDRE PLUS LISIBLE LE FINANCEMENT DES ÉCOSYSTÈMES DE RECHERCHE ET D'INNOVATION

Le programme 425 « Financement des écosystèmes d'innovation », est doté de 7,5 milliards d'euros, qui se répartissent en deux actions :

- l'action 01 « Financement de l'écosystème ESRI et valorisation » , visant à garantir un financement récurrent aux structures issues des précédents PIA, bénéficie de 1,25 milliard d'euros de crédits budgétaires sur 5 ans, auxquels s'ajoutent les intérêts des dotations non consomptibles (DNC) issues des PIA 1 et 2, pour un montant de 3 milliards d'euros entre 2021 et 2025, soit un total de 4,25 milliards d'euros .

Financement des écosystèmes d'innovation (action 01)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

- l'action 02 « Aides à l'innovation bottom-up » , pour laquelle 2,812 milliards d'euros (en AE) sont inscrits, a vocation à centraliser les aides publiques aux entreprises innovantes, auparavant portées par différents instruments : le PIA 3, les budgets interministériels et les intérêts du Fonds pour l'innovation et l'industrie (FII).

Répartition des aides à l'innovation « Bottom-up »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

En 2022, ces deux actions bénéficieront, respectivement, de 125 millions d'euros et 437,5 millions d'euros en CP .

IV. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. LE VOLET « DIRIGÉ » DU PIA 4 : EN DÉPIT D'AVANCÉES INDÉNIABLES DANS L'ÉLABORATION DES STRATÉGIES, UNE BUDGÉTISATION TOUJOURS AUSSI OPAQUE

Un an après le lancement du PIA 4, le volet dirigé s'est largement précisé, avec la présentation détaillée d'une dizaine de stratégies d'accélération. Néanmoins, ce programme n'est pas encore finalisé, puisqu'à ce stade, seuls 6,3 milliards d'euros de stratégies d'accélération ont été formellement validés , sur les 10 milliards d'euros qui y seront finalement consacrés, hors fonds propres.

Dans ce contexte, la répartition des crédits par outil et par stratégie n'a pu être communiquée au rapporteur spécial. La budgétisation pour 2022 revêt donc un caractère particulièrement opaque , puisqu'elle n'indique pas l'emploi des crédits demandés autrement que par outil d'intervention, sans préciser les montants qui seront alloués à chaque stratégie.

Il est regrettable que, près d'un an après le lancement du PIA 4, le Parlement ne soit toujours pas en mesure de disposer d'une vision d'ensemble des stratégies qui seront déployées , et ce alors même que par construction, la sélection des stratégies et la définition des moyens financiers destinés à les accompagner échappent entièrement à son contrôle.

B. UNE PRISE EN COMPTE ACCRUE DES TERRITOIRES, QU'IL CONVIENDRA DE CONFIRMER DANS LES ANNÉES À VENIR

Parmi les principales caractéristiques du PIA 4 figurait le doublement de l'enveloppe « régionalisée » , permettant de cofinancer des projets avec les Conseils régionaux, laissant augurer d'une intensification de la territorialisation des investissements d'avenir.

Cet effort en faveur d'une territorialisation plus marquée des investissements d'avenir, qui n'en était qu'à ses prémices lors du lancement du PIA 4 , tend désormais à se concrétiser , le SGPI ayant entrepris plusieurs actions afin de faire connaître les PIA dans les territoires, d'y favoriser l'émergence de projets éligibles à un financement au titre des PIA, et enfin de mieux détecter ces projets.

Ces initiatives, encore très récentes et relativement timides, témoignent de la volonté d'accorder une place accrue aux territoires ; il faudra néanmoins veiller à ce qu'elles se concrétisent effectivement dans les années à venir. Pour le rapporteur spécial, l'effort de territorialisation des investissements d'avenir doit demeurer une des priorités du SGPI.

C. DEUX POINTS DE VIGILANCE IDENTIFIÉS : L'ALOURDISSEMENT DE LA GOUVERNANCE ET LA MOBILISATION INTENSE DES OPÉRATEURS

Les observations relatives à la mise en route du PIA 4 permettent de dégager deux points de vigilance, qui devront faire l'objet d'un suivi attentif dans les mois à venir : le caractère opérationnel de la gouvernance et la capacité des opérateurs à mener de front de très nombreux dispositifs.

1. Conserver une gouvernance simple et agile pour le PIA 4

La nouvelle gouvernance mise en place dans le cadre du PIA 4 présente l'intérêt d'associer tous les opérateurs ainsi que plusieurs directions ministérielles pour garantir une plus grande cohérence dans l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques publiques d'innovation.

Néanmoins, la multiplication des instances dans la gouvernance du PIA 4 - conseil interministériel de l'innovation, comité exécutif, comités stratégiques, comités techniques - pourrait à terme engendrer des lourdeurs préjudiciables à une mise en oeuvre rapide et fluide des stratégies d'accélération .

2. Prévenir tout risque de surchauffe des opérateurs

Les opérateurs du PIA 4 ont fait face à une importante surcharge de travail au cours des derniers mois , avec la mise en oeuvre du PIA 3, les travaux relatifs à l'élaboration des stratégies du PIA 4, mais aussi la participation au plan d'urgence, puis au plan France Relance, qui se sont traduits par l'ouverture de très nombreux appels à projets en 2021.

Une certaine vigilance s'impose donc à l'avenir : les opérateurs doivent être en mesure de remplir correctement les missions qui leurs sont confiées au titre du PIA, en consacrant notamment des effectifs suffisants à l'instruction et au suivi des dossiers - ces derniers devant être rigoureusement sélectionnés pour satisfaire aux critères d'excellence.

D. UN CONTRÔLE PARLEMENTAIRE ENTRAVÉ PAR LA PERSISTANCE D'UN DÉFICIT DE LISIBILITÉ ET D'ÉVALUATION DES ACTIONS ENGAGÉES

1. Un déficit de lisibilité particulièrement préjudiciable au suivi des crédits

Depuis le lancement des investissements d'avenir, le suivi des montants alloués aux politiques publiques de la recherche et de l'innovation se révèle particulièrement ardu .

Or, ces difficultés ont été aggravées par le lancement d'un quatrième programme d'investissements d'avenir, alors même que l'intégralité des crédits de paiement du PIA 3 n'a pas encore été versée aux opérateurs. En effet, le chevauchement de deux programmes d'investissement d'avenir donne lieu à des financements croisés , rendant malaisé le traçage des crédits et l'identification des dispositifs existants .

Pour le rapporteur, non seulement cette situation obère ainsi considérablement la capacité de la représentation nationale à suivre et contrôler effectivement l'emploi des crédits , mais en plus elle peut se révéler préjudiciable pour les acteurs économiques .

2. Une évaluation encore insuffisante de l'impact des investissements consentis

Comme l'a rappelé le Comité de surveillance, compte tenu du caractère dérogatoire du cadre budgétaire applicable, la pérennisation des investissements d'avenir ne pourra être acceptable vis-à-vis du Parlement que si « les exigences en termes de reporting et d'évaluation des actions sont respectées » 1 ( * ) .

À cet égard, le récent bilan dressé par la Cour des comptes dans un référé du 28 juillet 2021 2 ( * ) est sans appel . Ainsi, plus de dix ans après le lancement des investissements d'avenir, si les travaux disponibles font ressortir un impact réel du PIA sur la mobilisation des écosystèmes de recherche et d'innovation, ce dernier demeure difficile à quantifier .

Alors que le lancement d'un quatrième programme semble augurer d'une pérennisation de ces outils d'investissement originellement conçus pour demeurer exceptionnels, il est impératif que la représentation nationale dispose d'éléments d'appréciation plus étayés pour se prononcer sur l'opportunité de prolonger ou non ces programmes dans les années à venir.

E. UNE ARTICULATION À CLARIFIER ENTRE LES PIA ET LES AUTRES PLANS D'INVESTISSEMENT

Le PIA 4 devait initialement contribuer à hauteur de 11 milliards d'euros sur trois ans au plan de relance. Néanmoins, deux inflexions significatives ont été actées dans la manière de comptabiliser les actions du PIA participant au plan de relance :

- les données présentées pour la mise en oeuvre du plan de relance correspondront finalement aux engagements opérationnels autorisés auprès des lauréats bénéficiaires, et non aux crédits budgétaires ouverts en loi de finances ;

- toutes les décisions prises depuis le lancement du plan de relance en septembre 2020 seront valorisées dans le suivi général de la relance sans établir de distinction entre le PIA 3 et le PIA 4.

Pour le rapporteur spécial, si ces clarifications vont dans le bon sens en permettant de rendre compte plus sincèrement de l'état d'avancement du PIA dans l'effort de relance , elles témoignent également du caractère peu réaliste des annonces réalisées à l'automne 2020 , ainsi que du retard pris dans la mise en oeuvre du PIA 4 .

La question de l'articulation entre les PIA et le plan « France Relance » s'inscrit, dans la problématique, plus large, de la multiplication des programmes publics d'investissement à visée générale ou sectorielle, qui semble peu compatible avec la définition, dans le cadre des PIA, d'une stratégie unique et globale d'investissement de l'État .

Réunie le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 » et l'article 42 quaterdecies

Au 10 octobre 2021, le rapporteur spécial avait reçu la totalité des réponses au questionnaire budgétaire.

I. UNE MISSION BUDGÉTAIRE REGROUPANT DEUX PROGRAMMES D'INVESTISSEMENT D'AVENIR

A. DEUX PROGRAMMES RÉGIS PAR DES MODALITÉS DE BUDGÉTISATION DÉROGATOIRES

La mission « Investissements d'avenir » comprend, depuis 2021, deux programmes d'investissements d'avenir distincts :

- le troisième programme d'investissements d'avenir (PIA 3), adopté en loi de finances initiale pour 2017 et doté de 10 milliards d'euros ;

- le quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4), issu de la loi de finances initiale pour 2021, regroupant 20 milliards d'euros .

Ces programmes succèdent ainsi au PIA 1, lancé en 2010 3 ( * ) et doté de 35 milliards d'euros et au PIA 2, lancé en 2014 4 ( * ) et doté de 12 milliards d'euros , portant le montant total consacré aux programmes d'investissements d'avenir à 77 milliards d'euros .

Le premier PIA était lui-même issu du rapport « Juppé-Rocard » 5 ( * ) de 2009, publié au lendemain de la grande crise financière et proposant, pour augmenter le potentiel de croissance de l'économie française , de mobiliser massivement l'investissement public en faveur de projets ciblés, principalement dans les domaines de la recherche, du numérique, de l'industrie et du développement durable .

Il s'agit notamment, dans le domaine de la recherche, d'augmenter la dépense intérieure de recherche et de développement (DIRD), qui s'élève aujourd'hui à 2,22 % du PIB - soit un montant bien deçà de l'objectif des 3 % fixé dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.

Historique des Programmes d'investissements d'avenir

(en milliards d'euros)

PIA
(année de lancement)

Montant
(en milliards d'euros)

PIA 1 (2010)

35

PIA 2 (2014)

12

PIA 3 (2017)

10

PIA 4 (2021)

20

Total

77

Source : commission des finances du Sénat

Au 30 juin 2021, sur l'enveloppe des 73,47 milliards d'euros que totalisent les PIA, plus de 49 milliards d'euros ont fait l'objet d'une décision du Premier ministre, permettant de formaliser l'engagement financier .

Plus de 45,6 milliards d'euros ont été contractualisés et près de 29 milliards d'euros ont été décaissés , dont 4,8 milliards d'euros d'intérêts issus des dotations non consommables.

Situation financière des investissements d'avenir au 30 juin 2021
par nature de financement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du bilan financier des programmes d'investissements d'avenir au 30 juin 2021

1. L'inscription de la majorité des crédits au sein de la mission « Investissements d'avenir »

Dès l'origine, le rapport « Juppé-Rocard » préconisait le respect d'un « principe d'additionnalité » et d'un « principe d'étanchéité » du PIA. Fondés sur le constat selon lequel le financement public de projets d'avenir nécessite un effort budgétaire supplémentaire, ces principes veulent que les crédits des PIA s'additionnent aux crédits « habituels » des ministères et ne s'y substituent pas, d'où le fait qu'ils soient exclusivement portés par des opérateurs et fléchés vers des actions prédéfinies .

Les crédits du PIA obéissent donc à une logique largement extrabudgétaire, ce qui soulève la question de leur budgétisation dans les textes financiers.

En pratique, les crédits budgétaires portés par les PIA 1 et 2 ont initialement été répartis sur des programmes éphémères au sein de chaque mission. A contrario , lors de l'élaboration du PIA 3, le choix a été fait de créer une mission budgétaire pérenne , regroupant dans leur grande majorité les crédits issus des PIA.

De ce point de vue, le PIA 4 s'inscrit dans la continuité du PIA 3, puisque son lancement en 2021 s'est accompagné de la création de deux nouveaux programmes budgétaires au sein de la mission « Investissements d'avenir », portant 83 % des crédits afférents au PIA 4 - le solde étant composé des versements provenant des dotations non consommables des PIA 1 et 2 et des intérêts versés par le Fonds pour l'innovation et l'industrie (FII).

2. Une ouverture intégrale des autorisations d'engagement, associée à un vote annuel sur les crédits de paiement

Pour les PIA 1 et 2, les crédits ont été votés en autorisations d'engagement et crédits de paiement, puis intégralement consommés l'année de leur ouverture .

En revanche, pour le PIA 3, les autorisations d'engagement ont été ouvertes dès 2017, les crédits de paiement faisant ensuite l'objet d'un vote annuel.

Il en va de même pour le PIA 4, puisque l'intégralité des autorisations d'engagement a été ouverte en loi de finances pour 2021 (voir infra ). Néanmoins, à la différence du PIA 3 pour lequel aucun crédit de paiement n'était prévu l'année de lancement, la création du PIA 4 s'est accompagnée de l'ouverture de 2 063 millions d'euros de crédits de paiement dès 2021 6 ( * ) , à savoir 1 500 millions d'euros pour le programme 424 « Financement des investissements stratégiques » et 562,5 millions d'euros pour le programme 425 « Financement structurel des écosystèmes d'innovation ».

3. Une gestion des crédits dérogeant largement aux règles budgétaires

Les règles budgétaires applicables au PIA 3 et au PIA 4 dérogent largement aux grands principes des finances publiques , à commencer par les principes d'annualité et d'universalité budgétaires.

Ainsi, les crédits inscrits ne sont pas soumis à la régulation budgétaire et, de ce fait, ne peuvent faire l'objet de mise en réserve .

Par ailleurs, la gestion des crédits du PIA reste très largement extrabudgétaire :

- les fonds sont directement versés aux opérateurs , sans transiter par le budget des ministères ;

- les décisions d'investissement ou de réallocation sont prises par le Premier ministre, si bien que les ministres ou directeurs d'administration ne sont pas les ordonnateurs des crédits ;

- les procédures d'allocation des investissements sont plus sélectives et innovantes que les procédures administratives classiques.

Enfin, la mission « Investissements d'avenir » ne fait pas l'objet de lettre de cadrage dans le cadre du projet de loi de finances.


* 1 Comité de surveillance des investissements d'avenir, « Le programme d'investissements d'avenir, un outil à préserver, une ambition à refonder, novembre 2019.

* 2 Cour des comptes, 20 juillet 2021, « La mise en oeuvre du programme d'investissements d'avenir (2010-2020) ».

* 3 Article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

* 4 Article 59 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 5 Alain Juppé et Michel Rocard, « Investir pour l'avenir : priorités stratégiques d'investissement et d'emprunt » , Rapport au Premier ministre, novembre 2009.

* 6 Il s'agit ici des crédits nouveaux ; il n'est pas tenu compte des intérêts versés par les dotations non consomptibles et le FII.

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