II. UNE HAUSSE ATTENDUE DES DÉPENSES DE PERSONNEL NOTAMMENT DU FAIT DE NÉCESSAIRES MESURES DE REVALORISATION

A. DES DÉPENSES DE PERSONNEL CROISSANTES, POSTE MAJEUR DE LA MISSION

1. Les dépenses de titre 2 constituent l'essentiel des dépenses de la mission
a) Le ministère de l'éducation nationale est le premier employeur public

La mission « enseignement scolaire » se caractérise par l'ampleur des dépenses de personnel. Le ministère de l'éducation nationale (MENJS) constitue le premier employeur public avec plus d'un million d'agents .

Ainsi, 1,2 million de personnes sont rémunérées par le ministère de l'Éducation nationale au titre de l'enseignement scolaire, dont 726 800 enseignants dans le secteur public et 142 500 dans le secteur privé , 274 000 agents au titre d'autres missions, et 11 000 agents n'étant pas en poste 1 ( * ) .

Le nombre d'enseignants dans le secteur public a augmenté de 2,2 % au cours des dix dernières années , soit une hausse plus rapide que dans le secteur privé, où le nombre d'enseignants a cru de 1,3 % en 10 ans.

Évolution du nombre d'enseignants

Source : commission des finances du Sénat d'après la DEPP

Le personnel non enseignant a quant à lui très fortement augmenté sur la même période (+ 7 % depuis 2015) , du fait du recrutement accéléré des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). On compte 176 000 AESH en 2021 .

Répartition des personnels de l'Éducation nationale par corps et par mission

Corps enseignants titulaires ou assimilés premier degré

Corps enseignants titulaires
ou assimilés second degré

Enseignants non titulaires

Corps non enseignants et cas particuliers

Ensemble des personnels

Professeurs des écoles

Instituteurs

Agrégés et chaires supérieures

Certifiés

PLP 2 ( * )

Autres corps titulaires ou assimilés

Enseignement du premier degré public

329 218

1 504

å

49

30

3 413

334 219

Enseignement du second degré public

9 165

17

52 059

241 646

53 518

916

35 215

392 536

Total enseignement du secteur public

338 383

1 521

52 064

241 695

53 548

916

38 628

726 755

Enseignement du premier degré privé

38 299

70

å

7 104

45 475

Enseignement du second degré privé

511

4 098

60 869

10 953

1 150

19 462

97 043

Total enseignement du secteur privé

38 810

70

4 098

60 871

10 953

1 150

26 566

142 518

Total autres missions (non-enseignement)

12 284

51

542

2 787

2 521

27

1 300

301 310

320 822

Aucune affectation

4 037

57

614

3 758

896

99

145

1 814

11 420

Ensemble des personnels

393 514

1 699

57 318

309 111

67 918

2 192

66 639

303 124

1 201 515

Source : commission des finances d'après Repères et références statistiques, DEPP

Le montant des crédits demandés au titre des dépenses de personnel (titre 2) représente 71,6 milliards d'euros, soit 92 % des dépenses totales de la mission . En norme pilotable, ces crédits s'élèvent à 49 milliards d'euros, en tenant compte des 21 milliards d'euros versés au CAS « Pensions » .

L'essentiel des effectifs est concentré dans les programmes 140 et 141, pour lesquels les dépenses de personnel représentent la quasi-totalité des crédits demandés . Seul le programme 230 fait exception, ses crédits sont majoritairement constitués de dépenses hors rémunération.

Ventilation des dépenses de la mission par titre

(en CP en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

b) Une hausse des dépenses de personnel de la mission malgré une stabilité du schéma d'emplois
(1) Des dépenses de personnel en hausse sur tous les programmes de la mission

Les dépenses de personnel continuent d'augmenter par rapport à l'année précédente.

Dépenses de personnel (titre 2)

en millions d'euros

LFI 2021

PLF 2022

Variation 2022/2021

Part des dépenses de personnel dans les dépenses totales en 2022

Programme 140
Enseignement public 1 er degré

23 614

24 162

+ 2,32

99,8 %

Programme 141
Enseignement public 2 nd degré

33 981

34 500

+ 1,51

99,8 %

Programme 230
Vie de l'élève

2 826

2 935

+ 3,85

42,8 %

Programme 139
Enseignement privé 1 er et 2 nd degrés

6 952

7 175

+ 3,21

89,7 %

Programme 214
Soutien

1 781

1 819

+ 2,09

70 %

Programme 143
Enseignement technique agricole

973

996

+ 2,28

65,2 %

Total T2 sur la mission

70 127

71 587

+ 2,07

92 %

Total T2 hors CAS pension

49 285

50 569

+ 2,06

70,6 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

(2) Une relative stabilité du schéma d'emplois

Le schéma d'emplois est quasiment stable en 2022 (+ 70) pour l'ensemble de la mission, à la différence des dernières années. Il était en effet négatif lors des trois dernières années .

Aucune extension n'est prévue pour le 1 er degré, contrairement aux années précédentes où s'était mise en place une bascule d'emplois d'enseignants du second vers le premier degré. Les effets du schéma d'emplois 2021 se traduisent par le recrutement de 1 359 enseignants dans le 1 er degré et une contraction de - 1 200 enseignants dans le secondaire, prolongée par un schéma d'emploi négatif (- 117 en 2022) . Sur le programme 214, 210 postes sont ouverts en 2022 et 117 sur le programme 230.

Décomposition du solde de création d'emplois en équivalent temps plein (ETP) entre 2017 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Au titre du schéma d'emploi 2021, 10 600 postes ont été proposés en 2021 pour les concours externes et troisièmes concours du second degré public . Dans le premier degré public, 9 890 postes ont été offerts au titre de la session 2021 . Par ailleurs, une session supplémentaire du concours de professeurs des écoles (300 postes) a été ouverte spécifiquement pour l'académie de Créteil, du fait des difficultés de recrutement structurelles dans cette académie.

(3) La poursuite de la politique de professionnalisation des AESH influe sur les dépenses du programme 230

La politique de dé-précarisation et de professionnalisation des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) se poursuit comme l'année précédente. Celle-ci concerne plus spécifiquement le programme 230 et est mise en oeuvre au travers de la généralisation du recrutement de ces personnels en contrat de droit public de trois ans, renouvelable une fois, avant signature d'un contrat à durée indéterminée (CDI) pour les AESH ayant plus de 6 ans d'ancienneté.

Les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) représentent 59 % des effectifs du programme 230 et sont rémunérés sur le titre 2.

Il est prévu une augmentation de la dotation au titre de la rémunération des AESH à hauteur de 139,7 millions d'euros , qui devrait permettre de financer 41 606 AESH en moyenne annuelle en 2022. Cette hausse fait suite à celle prévue en 2021 pour financer les 4 000 AESH recrutés à la rentrée scolaire 2021. 4 000 AESH supplémentaires devraient être recrutés à la rentrée 2022 afin de répondre à l'augmentation des prescriptions des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Toutefois, si cette politique a engendré une hausse des dépenses de personnel du programme 230 plus rapide que celle des autres programmes au cours des années précédentes, l'influence de la « CDI-sation » des AESH est moindre en 2022.

La dynamique des dépenses de titre 2 du programme 230 devrait en effet s'aligner sur les mouvements des autres composantes de la mission.

2. Les dépenses de personnel des opérateurs

Le programme 214 est chef de file de cinq opérateurs.

Le centre d'étude et de recherches sur les qualifications (Cereq) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère du travail. Il anime un réseau régional de chercheurs étudiant la relation entre formation et emploi.

France Éducation international (FEI) élabore des diplômes et certifications en Français langue étrangère (FLE), labellise des centres d'apprentissage en langue française, participe à des projets de formation au profit de systèmes éducatifs étrangers et organise des colloques et séminaires à l'international. FEI a remplacé en 2020 le Centre international d'études pédagogiques (CIEP) 3 ( * ) , sans modification de ses missions. La première année de cet opérateur s'inscrit donc dans la continuité du CIEP.

Le Centre national d'enseignement à distance (CNED) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur. Il dispense et promeut l'enseignement à distance.

L' Office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep) est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'enseignement supérieur. Disposant d'implantations au niveau régional, il participe à l'information en matière d'orientation et met à disposition des usagers les documentations afférentes.

Les emplois sous plafond pour l'Onisep prévus au PLF pour 2022 diminuent de 25 ETPT par rapport à 2021 (379 ETPT) prenant en compte la poursuite du transfert de certaines compétences des directions régionales de l'Onisep aux régions effectué par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel 4 ( * ) .

Le réseau Canopé est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale. Il exerce une mission d'édition, de production, de développement et de mise à disposition des ressources pédagogiques à destination des communautés éducatives. En outre, il participe à la mise en oeuvre du service public du numérique éducatif.

En 2022, le montant des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs s'élèvera à 149,6 millions d'euros en AE=CP , en baisse de 4 millions d'euros par rapport à 2021. 3 023 ETPT seraient rémunérés par les opérateurs en 2021, soit 25 de moins que l'année précédente. Plus d'un tiers d'entre eux sont rattachés au réseau Canopé.

Dépenses des opérateurs de la mission en 2022

(en millions d'euros en AE=CP et en ETP)

SCSP 2021

SCSP

2022

Évolution du schéma d'emploi en 2022

Réseau Canopé

85,9

83,9

- 5

CNED

29,5

32,7

0

ONISEP

25,5

23,1

- 25

Cereq

6,9

7,41

+ 5

FIE

3,5

3,7

0

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

3. Une hausse à l'échelle de la mission notamment due à une accélération des mesures catégorielles
a) Une part importante de la hausse demeure attribuable à des facteurs structurels

La hausse des crédits demandée concerne essentiellement les dépenses de personnel. Elle peut être décomposée en deux facteurs. Les mesures catégorielles pérennes , en particulier de revalorisation des traitements des enseignants, ont un impact positif à hauteur de 740 millions d'euros toutes mesures confondues, contre 450 millions l'année précédente .

L'impact des mouvements structurels, en particulier le glissement vieillesse technicité (GVT), qui correspond au déroulement des carrières à l'ancienneté, est également essentiellement positif et explique pour moitié la hausse des dépenses de personnel.

Une provision est prévue au PLF 2022 au titre du GVT solde pour un montant total de 381 millions d'euros hors CAS « Pensions » .

Part des différents facteurs d'évolution dans la hausse des dépenses
de personnel de la mission en 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Contrairement aux années précédentes, les mouvements structurels ont donc un impact inférieur à celui des diverses mesures catégorielles.

Les mesures catégorielles, et en particulier la première tranche de la prime d'attractivité versée en début de carrière, avaient en 2021 un coût de 444 millions d'euros. Celui-ci a presque doublé en 2022 pour atteindre 726 millions d'euros, dont 600 de mesures nouvelles . Au total, sur les deux dernières années, les mesures de revalorisation salariale auront eu un coût de 1,16 milliard d'euros.

b) La fin de la mise en oeuvre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR)

Le dernier volet du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) prévoit une augmentation du taux d'accès à la classe exceptionnelle pour tous les corps enseignants. 300 millions d'euros supplémentaires auront été accordés jusqu'à présent au total au titre de la revalorisation des carrières .

La hausse prévue en 2022 au titre du PPCR est de 17,22 millions d'euros hors CAS « Pensions ».

Cette revalorisation est notamment axée sur le soutien aux jeunes professeurs au travers d'une revalorisation progressive portant sur les débuts de carrière. Sur la période 2017-2022, pour l'ensemble des personnels du ministère chargé de l'éducation nationale, le coût de la mise en oeuvre du PPCR s'élèvera à environ 1 milliard d'euros , dont 26,4 millions en 2021 et 17,1 millions d'euros en 2022. Le nombre de bénéficiaires pour l'ensemble du protocole est d'un million d'agents.

La mise en oeuvre de l'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » par le ministère de l'éducation nationale

Le protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) est le fruit d'une négociation entre le précédent gouvernement et les organisations syndicales, ouverte le 7 octobre 2014 et clôturée le 17 juillet 2015.

Couvrant les trois versants de la fonction publique, ce protocole comprend deux mesures principales :

- transformer une partie des primes des fonctionnaires en points d'indice, pour harmoniser les rémunérations des agents mais aussi augmenter les pensions des futurs retraités ;

- rénover les grilles indiciaires, pour étendre l'amplitude entre le début et la fin de carrière et conforter le traitement indiciaire des fonctionnaires.

Le protocole a une portée interministérielle mais sa déclinaison s'adapte aux spécificités des métiers de l'éducation nationale.

L'accord PPCR se traduit concernant le personnel de l'éducation nationale par :

- pour tous les corps enseignants, une revalorisation des grilles ainsi qu'une augmentation du taux des heures supplémentaires ;

- pour les professeurs des écoles, une augmentation du taux d'accès à la hors classe ;

- pour tous les corps enseignants, une augmentation du taux d'accès à la classe exceptionnelle. Un enseignant qui accède à la classe exceptionnelle bénéficie d'un gain de rémunération d'environ 1150 euros bruts annuels en fonction de son échelon d'appartenance.

Source : Ministère de l'éducation nationale

Le gain moyen résultant de ces mesures s'élève à 900 euros bruts annuels pour un stagiaire recruté en 2019 par rapport à un stagiaire recruté en 2016 et à 1 000 euros bruts annuels pour un stagiaire recruté en 2020.

Pour un professeur des écoles ou un professeur certifié en milieu de carrière, la hausse attendue se situe aux environs de 690 euros bruts annuels en janvier 2019 et de 1 250 euros bruts annuels en janvier 2020 par rapport à 2016 .

Les parcours de carrières auront été revalorisés pour près de 900 000 agents entre 2017 et 2022 .


* 1 Insee, L'état de l'École 2019 , DEPP.

* 2 Professeur de lycée professionnel.

* 3 Décret n° 2020-956 du 31 juillet 2020.

* 4 Loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

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