LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement de Sylvie Charrière tendant à majorer les crédits de l'action 7 « Aide à l'insertion professionnelle » du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré » de 1,7 million d'euros en AE et en CP.

Cette modification vise à restaurer les crédits de la mission de lutte contre le décrochage scolaire au niveau des crédits accordés en loi de finances pour 2020 . Cet amendement minore à due concurrence les crédits du programme « Soutien de la politique de l'éducation nationale » pour accroître ceux accordés à d'autres programmes.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 9 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, prédisent, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Gérard Longuet, rapporteur spécial, sur la mission « Enseignement scolaire » (et articles 42 terdecies ).

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - Dans le contexte un peu surprenant du PLF 2022, la mission « Enseignement scolaire » apparaît calme. Les chiffres étaient prévisibles et correspondent à la politique mise en oeuvre par le ministre Jean-Michel Blanquer depuis qu'il exerce ses responsabilités, en rupture nette avec celle qui a été menée lors des cinq années précédentes. Je rappelle en effet que François Hollande avait favorisé l'extension quantitative des effectifs, ce qui n'était pas la meilleure réponse. Il a, hélas, respecté ses engagements...

Par ailleurs, François Hollande a lancé le protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), qui a eu pour effet de mieux rémunérer les enseignants, mais dans des conditions exagérant la structure des rémunérations, qui favorise beaucoup trop largement l'ancienneté et, a contrario , décourage les jeunes dans les secteurs les plus difficiles.

Quelles sont les caractéristiques de continuité du budget 2022 ?

Les effectifs sont stables, avec une augmentation de 70 équivalents temps plein (ETP) pour 2022. Le budget représente 77,8 milliards d'euros avec le compte d'affectation spéciale « Pensions » et 56 milliards d'euros sans celui-ci. Il est en croissance de 2,6 %, comme la majeure partie des missions.

Cette stabilité des effectifs est-elle en elle-même rassurante ? Non, pour deux raisons.

La première est le sous-encadrement dans l'enseignement primaire. Malgré le dédoublement des CP, CE1 et grande section de maternelle dans les réseaux d'éducation prioritaire (REP), la France reste le pays d'Europe où le nombre d'élèves par enseignant dans le préélémentaire et le primaire est le plus élevé, ce qui n'est pas un gage de réussite pour l'enseignement primaire. J'ajoute que le dédoublement des classes de primaire mériterait une analyse plus objective et circonstanciée de ses effets. Les résultats sont réels, mais modestes.

La seconde raison est la décrue démographique - c'est, du reste, une tragédie nationale. Nous avons perdu un sixième des effectifs des élèves du primaire en moins de dix ans. Cela rend d'ailleurs la gestion des personnels extraordinairement compliquée : certaines régions de France continuent de gagner des effectifs, tandis que d'autres en perdent plus fortement que la moyenne nationale. L'adaptation de l'offre et de la demande en fonction des réalités démographiques est un casse-tête sans nom.

La stabilité des effectifs n'est ni une réponse ni une certitude de pertinence pour l'avenir. Il faut une nouvelle fois interroger le ministre sur sa vision de l'adaptation des effectifs, en particulier du primaire et, bientôt, des collèges, à l'évolution démographique.

L'augmentation du pouvoir d'achat a été mise en avant par l'un des candidats à l'élection présidentielle, de façon d'ailleurs assez enthousiasmante pour les potentiels bénéficiaires. Force est de reconnaître que le gel du point d'indice conduit l'OCDE comme la direction de l'évaluation, de la prévision et de prospective (DEPP) à constater une perte de pouvoir d'achat, que l'OCDE fixe à 15 % sur les vingt dernières années. Le gel du point d'indice est heureusement corrigé par l'effet du glissement vieillesse technicité (GVT) et par des mesures catégorielles. Cependant, il est incontestable que, compte tenu de leur parcours, de leur diplôme ou du niveau de rémunération dans les pays proches, comme l'Allemagne ou la Belgique, la situation matérielle des enseignants est très en deçà des situations comparables à l'échelle européenne.

Les ministères successifs ont tenu à mastériser l'accès à la fonction d'enseignant, mais les écarts salariaux entre les titulaires de master qui s'orientent vers l'enseignement et ceux qui s'orientent vers l'économie privée sont spectaculairement élevés - de l'ordre de 23 % d'écart pour le préélémentaire et au primaire et d'environ 12 % pour les professeurs de collège. Il n'y a que dans les lycées et les classes préparatoires que l'on note une certaine similitude. En Allemagne, les enseignants du secondaire, à diplôme égal, gagnent en général 15 à 20 % de plus que les salariés du secteur privé.

Le pouvoir d'achat a heureusement été soutenu par des mesures catégorielles.

En termes de répartition, l'augmentation de 2,6 %, qui correspond grosso modo à une dépense supplémentaire de 1,7 milliard d'euros, correspond, pour un quart, au GVT, pour un autre quart, à des mesures en faveur de l'inclusion, en particulier pour les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), et, pour moitié, à des mesures catégorielles orientées vers les enseignants en début de carrière et vers ceux qui sont les plus exposés à des situations difficiles, ce qui n'était pas le cas des mesures du protocole PPCR.

La commission des finances s'interroge légitimement sur le rendement de notre éducation nationale. Nous avons travaillé ensemble sur le sujet de l'enseignement des mathématiques, qui, manifestement, se dégrade dans notre pays, notamment parce que les professeurs du secondaire peuvent prétendre à des rémunérations largement supérieures, en particulier dans l'informatique. Se pose donc la question - à ce jour sans réponse - de l'effort qualitatif à réaliser pour certaines disciplines qui connaissent manifestement des difficultés de recrutement.

Je veux évoquer le caractère assez étonnant du nouveau baccalauréat, sorte de mystère que personne ne parvient à élucider. Je veux citer, à son sujet, des chiffres éclairants : à l'échelon national, 458 combinaisons des trois enseignements de spécialité ont été recensées en première, mais les deux tiers d'entre elles - 316 - n'ont été choisies que par 100 élèves sur l'ensemble du territoire, quand 71 ne l'ont été que par un seul élève en France !

Nous devons interroger le ministre et peut-être conduire une enquête spécifique sur le baccalauréat, sa réforme et la diversité de l'offre. Nous savons tous que l'une des raisons du coût élevé de l'enseignement secondaire en France par rapport à la moyenne de l'OCDE tient au fait que les professeurs sont mieux payés que les enseignants du primaire, ce qui paraît légitime. En revanche, l'offre est tellement dispersée que le nombre d'élèves par enseignant est parfois absurde... La nouvelle formule du baccalauréat devait permettre de remettre un peu d'ordre. Ce n'est pas le sentiment que nous avons pour l'instant !

Le financement de la dépense intérieure d'éducation est une donnée peu connue. Il faudra bien, à un moment ou à un autre, s'interroger sur ce point.

Je veux évoquer trois problèmes spécifiques qui ont des conséquences très concrètes sur le budget de l'éducation nationale.

La formation continue est totalement insuffisante : elle représente moins de trois jours en moyenne par enseignant et par an.

Le travail d'équipe des enseignants dans les écoles, les collèges et les lycées est lui aussi très insuffisant. Cette réalité nous distingue de la plupart des pays qui réussissent, où, contrairement à chez nous, le professeur n'est pas considéré comme une profession libérale autonome, travaillant seule dans sa classe et ne recevant qu'une visite épisodique de l'inspecteur... De ce point de vue, le concept de chef d'établissement, en France, est vide de sens. Le chef d'établissement devrait s'employer à établir des liens entre les enseignants des différentes disciplines, notamment pour assurer le suivi des élèves d'une année sur l'autre, comme c'est le cas dans l'enseignement agricole et dans l'enseignement privé sous contrat. Cette fonction n'est pas assumée, car elle n'est pas de tradition. Nous devons nous atteler à créer des établissements avec des chefs qui dirigent, c'est-à-dire qui aient un certain droit de regard.

Assez curieusement, le Président de la République a annoncé à Marseille qu'il allait autoriser les chefs d'établissement à recruter les enseignants. Cette approche est en revanche assez désarmante : l'expérimentation ponctuelle peut sans doute ouvrir les esprits obtus, mais c'est une réflexion d'ensemble sur le rôle du chef d'établissement et le travail d'équipe qui doit être engagée.

J'ajoute que la France est le pays d'Europe où les relations entre les professeurs et les élèves sont jugées les plus mauvaises, où le lien entre ces derniers est le plus dégradé. Nous en ignorons les raisons. Cependant, je vous renvoie au remarquable colloque sur l'éducation qui a été organisé cette année par Jean-Pierre Chevènement. Le responsable de l'OCDE qui est intervenu et que j'ai auditionné a mis en avant le fait que les enseignants, en France, ne parvenaient pas à établir entre eux une collaboration suffisamment forte. Nous savons que, s'ils ne sont pas tenus, les enfants ont très vite fait d'établir leur propre autorité. Nos difficultés tiennent au fait que nous avons refusé de créer un esprit de corps propre à chaque établissement.

Le projet de budget de l'enseignement agricole est bon. Il est en progression. Il accompagne la réalité du recrutement et du fonctionnement.

À titre personnel, j'estime que ce budget ne constitue pas une surprise et qu'il ne s'inscrit pas dans une démarche de séduction. Aussi, je vous propose de le soutenir.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je vous remercie d'avoir soulevé ces enjeux.

Je retiens les données que vous avez évoquées sur la réforme du baccalauréat, qui, il est vrai, est complexe.

Le Grenelle de l'éducation consacre une somme de 600 millions d'euros à la revalorisation des rémunérations des enseignants. Tous les enseignants en bénéficient-ils de la même façon, qu'ils travaillent dans le primaire ou le secondaire ?

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - C'est une question importante. Nous avons, cette année, 600 millions euros de revalorisation stricto sensu , dont 195 millions d'euros pour la protection sociale complémentaire dès janvier 2022 - 15 euros par mois et par agent, soit 180 euros sur l'année -, une prime d'attractivité de 245 millions d'euros, tournée vers les enseignants de début et de milieu de carrière, et 24 millions d'euros pour les AESH. Il faut y ajouter la prime informatique de 150 euros pour les 860 000 enseignants et l'extension du taux d'accès à la hors-classe, qui répond à une demande ancienne et justifiée et permet de récompenser la fidélité des enseignants, même si l'enjeu, aujourd'hui, est moins de fidéliser les enseignants que de recruter des jeunes - au reste, cette mesure n'est pas celle qui coûte le plus cher.

M. Bernard Delcros . - Si les effectifs sont globalement stables, quelles sont les évolutions des effectifs des différentes catégories de personnels - titulaires, contractuels, vacataires ?

S'agissant des spécialités au baccalauréat, la formule ne crée-t-elle pas des inégalités territoriales entre les établissements ayant beaucoup d'effectifs, donc d'enseignants, et les lycées des territoires ruraux, qui ont du mal à diversifier l'offre proposée ?

M. Roger Karoutchi . - Quels que soient les efforts apparents du Gouvernement, la France se situe toujours dans les bas-fonds du classement du programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA). Clairement, nous ne parvenons pas à faire la révolution de l'enseignement dans ce pays.

Il est vrai que les enseignants sont mal payés, mais les syndicats d'enseignants s'opposent à ce que l'on touche au volume horaire, ce qui maintient les salaires à un niveau très bas.

S'agissant du lien entre élèves et enseignants, j'observe que, dans les autres pays, quand on construit un lycée, on prévoit des bureaux pour les enseignants, qui peuvent y recevoir les élèves. En France, il n'y a qu'une salle des professeurs, et les élèves ne peuvent rencontrer personne... Il faut des établissements plus conviviaux pour les enseignants et accepter de payer ces derniers davantage, en fonction de leur nombre d'heures de présence dans les établissements.

Il faut changer la donne et cesser de se contenter de pseudo-réformes.

Lorsque j'étais inspecteur général, j'ai contrôlé un établissement qui proposait une option russe pour passer pour un lycée de talent attirant des élèves de partout et éviter les mauvais élèves, qui privilégient l'anglais.

Le système est devenu fou. Il faut réduire le nombre d'options et changer le système lui-même.

Mme Sylvie Vermeillet . - Monsieur le rapporteur spécial, j'ai toujours beaucoup de plaisir à assister à la présentation annuelle de votre rapport.

En mars 2019, le Président de la République a annoncé qu'il n'y aurait pas de fermeture d'écoles en milieu rural sans l'accord du maire. J'imagine que cela pourrait changer l'an prochain. Savez-vous combien d'écoles rurales seraient alors dans le collimateur ?

Quelles sont vos préconisations en matière de harcèlement en milieu scolaire ?

M. Marc Laménie . - La crise sanitaire a impacté l'éducation nationale, avec des élèves qui se sont trouvés en décrochage scolaire total.

A-t-on une idée de la répartition des personnels entre l'administration centrale, les inspections, les académies et les rectorats par rapport aux enseignants qui sont sur le terrain ?

Autre sujet de préoccupation : la carte scolaire. Les suppressions de classes génèrent-elles réellement des économies ?

Quid de la médecine scolaire ? Voilà des années que l'on dénonce ses moyens humains réduits.

M. Victorin Lurel . - Je serai très heureux de pouvoir disposer d'une cartographie des taux d'encadrement par département. En avez-vous une à me communiquer ?

S'agissant des doublettes de spécialités en terminale, disposons-nous d'éléments sur les choix respectifs des garçons et des filles ? Il semble que le choix des options soit en partie dicté par le genre.

Mme Christine Lavarde . - L'année dernière, on a déversé des millions d'euros pour la numérisation de l'éducation. Des programmes financés dans le cadre des investissements d'avenir visaient aussi à faire entrer le numérique à l'école. Où en est-on de cette politique ? J'espère que ce n'était pas qu'une parenthèse.

M. Emmanuel Capus . - Comment s'explique, historiquement, le faible niveau des salaires en début de carrière ? Est-ce pour fidéliser les enseignants qu'on les augmente au fur et à mesure ?

M. Thierry Cozic . - Je veux revenir sur le remplacement des professeurs absents. La FCPE a fait état de 11 000 heures de cours non remplacées rien qu'au début de l'année. Les crédits des programmes 140 et 141 qui sont dédiés au remplacement sont lacunaires, alors que la tension en matière de remplacement est de plus en plus importante et touche l'ensemble du territoire. Dans un certain nombre de matières, les rectorats peinent à trouver des professeurs.

Le ministère prévoit des suppressions de postes dans le secondaire : pensez-vous que les moyens alloués sont de nature à pallier les carences qui en résulteront ?

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - Monsieur le rapporteur général, il faut vraiment travailler sur le sujet de la réforme du baccalauréat, qui est très ambiguë, même si l'on peut lui accorder le bénéfice du doute compte tenu de sa jeunesse.

L'un des problèmes de la rémunération des enseignants tient à la grille de la fonction publique : ce qui s'applique aux uns doit s'appliquer aux autres. Or les métiers sont différents. Nous n'avons pas vraiment de difficultés pour recruter des professeurs d'éducation physique et sportive, les débouchés hors enseignement n'étant pas nombreux. Nous disposons d'un certain monopole d'embauche pour le latin et le grec. C'est déjà beaucoup moins vrai pour l'anglais et le français.

Le faible niveau des salaires tient à la logique du régime général de la fonction publique : tout mouvement d'une catégorie entraîne le mouvement d'une autre, ce qui rend les choses extraordinairement rigides. Cependant, la fonction publique est suffisamment avisée pour s'adapter en cas de concurrence du secteur privé : durées hebdomadaires fictives, aménagements relatifs aux heures supplémentaires ou aux hiérarchies de salaires...

Auparavant, on recrutait des enseignants beaucoup plus jeunes : les salaires étaient bas, mais l'étudiant se réjouissait d'accéder à une situation stable. Ce n'est absolument plus vrai aujourd'hui. La rigidité du système se traduit par des mesures catégorielles et des adaptations ponctuelles, mais aussi par une insatisfaction générale.

Monsieur Delcros, nous recensons environ 30 000 contractuels équivalents temps plein. Si l'on évalue ce chiffre à l'aune des 900 000 titulaires, il ne me paraît pas excessif. Les concours n'ont pas permis de pourvoir tous les postes, et les mutations ne sont pas toujours suivies d'effets. Il faut être capable de tolérer un certain nombre de contractuels. L'éducation nationale ne privilégie pas ce mode de gestion ; c'est une réalité qu'elle accepte et supporte.

Il existe, de fait, des inégalités entre les établissements. Un lycée incapable d'orienter ses meilleurs élèves vers des classes préparatoires reconnues est un « boulet » pour une ville. Je suis favorable à une certaine forme de décentralisation et à une implication plus forte des élus locaux dans la gestion des établissements. Si l'on parvient à définir la vocation d'un établissement public et qu'on l'aide ensuite à accomplir celle-ci, ce sera un facteur de réussite territoriale. En tant que président de la région Lorraine, j'avais, à l'époque, signé les premiers accords avec Sciences Po Paris permettant l'accès de l'école à des élèves de lycées situés en zone d'éducation prioritaire.

M. Victorin Lurel . - Il s'agissait des conventions éducation prioritaire (CEP).

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - Exactement.

Les élus locaux, avec les moyens financiers dont ils disposent, sont les seuls capables de soutenir de manière efficace la qualité d'un établissement. En outre, ils ont un intérêt objectif à la réussite de l'établissement, ce qui n'est pas forcément le cas d'un haut fonctionnaire de l'éducation de passage.

Roger Karoutchi a hélas raison. Les enquêtes PISA montrent que nous ne parvenons pas à rattraper notre retard. Quand on entre dans le détail des différences pédagogiques, on s'aperçoit que l'isolement de l'enseignant est le facteur d'affaiblissement le plus grave en France. Les positions, de part et d'autre, sont très fermées : du côté du ministère, car la moindre virgule s'évalue en centaine de millions d'euros ; et du côté des syndicats, car l'on sait ce que l'on a et on ignore ce que l'on aurait. Le système est donc figé.

Si je dois adresser un reproche politique au ministre Blanquer, je dirais qu'il termine moins bien qu'il n'a commencé : on pensait qu'il allait se passer des choses qui, pour des raisons qui m'échappent, ne se sont pas passées. Au-delà d'une communication ponctuelle, il aurait fallu une réflexion de fond pour l'ensemble des territoires, en précisant le niveau de souplesse accordé aux chefs d'établissements en matière de recrutement.

Concernant le lien entre les professeurs et les élèves, il existe des différences fondamentales selon les pays. En France, les enseignants vivent dans leur classe, alors que, dans d'autres pays, ils vivent dans l'établissement et parviennent ainsi à nouer des liens avec les élèves en dehors de ceux, strictement hiérarchiques et pédagogiques, de la classe. Je reviens sur le rôle des élus locaux ; nous avons tous construit des établissements et, en général, nous avons essayé de créer des lieux ouverts et accueillants.

Je ne suis pas capable de répondre à Sylvie Vermeillet concernant les écoles en milieu rural. Si nous n'avons pas de politique durable sur le sujet, annoncer le statu quo ou la suspension des fermetures équivaut à monter la marche et rendre le franchissement de cette marche impossible ultérieurement ; cela n'est pas satisfaisant. S'il n'y a pas d'enfants, il faut en tenir compte et s'organiser de manière différente. Les écoles sont faites pour les enfants, et non pour les élus.

Je n'ai pas de réponse particulière à apporter concernant le harcèlement en milieu scolaire. Il existe un programme dédié : le programme de lutte contre le harcèlement à l'école (pHARe). Cependant, je n'ai pas entendu dire qu'il ait réglé tous les problèmes...

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Il ne permet pas d'actions rapides.

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - C'est un peu frustrant, en effet. Avec 77,8 milliards d'euros à la clé, nous n'aurons que quelques minutes pour présenter ce budget en séance. Vous avez devant vous un rapporteur quelque peu désabusé...

Pour répondre à Marc Laménie, la crise sanitaire a révélé des choses, et en premier lieu que notre administration n'était pas si mauvaise, car l'école a fonctionné.

Pour évaluer le nombre de fonctionnaires qui ne sont pas devant les élèves, il nous faudrait des chiffres plus précis. Parmi ceux qui sont devant les élèves, on recense 320 000 agents non enseignants, notamment 170 000 AESH, et 11 000 agents en situation de disponibilité, donc non payés par le ministère.

Pour ce qui concerne la carte scolaire ou la suppression des classes, il faut laisser les élus départementaux jouer leur rôle.

Le ministère a revalorisé le statut des médecins scolaires. Le même problème se pose que pour la médecine de ville : on constate une pénurie de candidatures, les jeunes médecins ne souhaitant pas exercer dans ces conditions.

Monsieur Lurel, les chiffres des taux d'encadrement par département doivent exister ; je vous les communiquerai.

La sexualisation des études est un vrai sujet. Si l'on veut réindustrialiser la France, il faut que les femmes s'intéressent aux métiers de la science et de l'industrie ; elles ont, en tout cas, toutes les qualités requises pour réussir dans ces métiers.

Madame Lavarde, 10 millions d'euros ont été consacrés au numérique éducatif en 2020 et 2021. On peut également évoquer la prime informatique de 150 euros par enseignant. Le numérique a permis de limiter la chute de niveau des élèves pendant le confinement. Mais, objectivement, nous n'en tirons pas encore le meilleur parti.

Pourquoi les salaires sont-ils si bas ? C'est une affaire historique. La fonction publique a toujours échangé la sécurité et la retraite contre un salaire plus élevé. Aujourd'hui, les gens ont tous des diplômes et, attirés par des métiers où on les paie plus et plus vite, ils n'ont plus envie d'être enseignant.

Thierry Cozic a raison : le remplacement est un problème difficile. Cela passe notamment par l'augmentation des heures supplémentaires. Sur ce point, le ministère a fait un effort, puisque 550 000 heures supplémentaires ont permis d'économiser un recrutement équivalent à 26 000 postes.

Sur cette problématique des remplacements, le critère de la sexualisation compte également. Quand un enfant est malade et que la crèche refuse de l'accueillir, ce sont les femmes qui, en général, assument la charge de la garde, et, comme les femmes sont majoritaires parmi les enseignants, il est logique que les besoins de remplacements soient plus importants. C'est le prix à payer si l'on souhaite conserver un pays vivant, avec une forte natalité.

M. Claude Raynal , président . - Nous allons maintenant procéder au vote des crédits de la mission.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 42 terdecies

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - L'Assemblée nationale demande au Gouvernement de remettre un rapport sur le coût des décharges pour les directeurs d'école. Cela nous permettra de savoir ce qu'il est nécessaire de faire pour que les directeurs dirigent vraiment les écoles, ce qui n'est pas toujours le cas actuellement.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Cette évaluation permettra également de mieux mesurer les enjeux liés au regroupement scolaire. Un des sujets, en effet, concerne les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI), concentrés dans les territoires non urbains, la menace étant régulièrement évoquée par les directeurs des services départementaux de l'éducation (Dasen).

M. Pascal Savoldelli . - Il aurait été intéressant qu'un amendement vise à évaluer le coût du dédoublement des classes. Cette évaluation aurait été importante pour les collectivités territoriales et pour l'État.

M. Gérard Longuet , rapporteur spécial . - La direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) travaille actuellement sur le coût et le rendement du dédoublement ; les résultats obtenus nous permettront d'y voir plus clair sur le sujet.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 terdecies .

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Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Enseignement scolaire », ainsi que de l'article 42 terdecies

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