EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 27 octobre 2011, sous la présidence de Mme Marie-France Beaufils, vice-présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Dominique de Legge, rapporteur spécial, sur la mission « Sécurité civile ».

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial . - Depuis sa création, la mission « Sécurité civile » pâtit d'une structuration très artificielle entre ses deux programmes. Le programme « Intervention des services opérationnels » rassemble les moyens propres de l'Etat en matière de sécurité civile, tandis que le programme « Coordination des moyens de secours » a pour objectif de coordonner les acteurs nationaux et locaux de la sécurité civile. D'apparence cohérente, cette distinction se révèle en pratique assez peu opérationnelle.

Dotée de 448,4 millions d'euros en 2012, la mission « Sécurité civile » ne contribue que marginalement à l'effort global de la France dans ce domaine :

- les dépenses des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ne rentrent pas stricto sensu dans le champ de cette mission. Pourtant elles se sont élevées à 5,5 milliards d'euros en 2011 ;

- huit autres programmes répartis sur quatre missions (« Ecologie, développement et aménagement durables », « Santé », « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », « Administration générale et territoriale de l'Etat ») totalisaient ensemble 560 millions en 2011.

Quoiqu'il en soit, la progression de 3,1 % de l'enveloppe budgétaire en crédits de paiement (CP) respecte tout à la fois les évolutions inscrites dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et celles annoncées par la loi du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI 2 ».

L'impact de la révision générale des politiques publiques (RGPP) se fait sentir sur la mission.

Tout d'abord, l'optimisation de l'organisation et du fonctionnement de cette mission s'est traduite, le 7 septembre dernier, par la création de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), résultat de la fusion des directions de la sécurité civile et de la prospective et de la planification.

En outre, les fonctions support des flottes d'hélicoptères de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et de la sécurité civile ont été mutualisées.

Enfin, la suppression de 23 emplois pour 21 départs à la retraite est à apprécier au regard d'un effectif de 2 464 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT).

S'agissant des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), on ne peut manquer de relever que les collectivités territoriales financent 96 % de leurs dépenses de fonctionnement et que la part relative des conseils généraux dans ce financement tend même à croître pour représenter, en 2011, 2,35 milliards d'euros, soit 57 % du total.

Aussi semble-t-il important de pouvoir mieux cerner, dans la dynamique de la dépense des SDIS, ce qui relève des contraintes ou des transferts imposés par l'Etat et ce qui résulte de décisions prises dans les départements.

Le fonds d'aide à l'investissement (FAI) sera doté de 18,36 millions d'euros, soit une baisse de 14 % par rapport à 2011. Cette contraction s'explique par le besoin de maintenir le montant de la subvention de fonctionnement de l'Ecole nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers (ENSOSP).

Une part prépondérante du FAI est par ailleurs absorbée par le raccordement au réseau ANTARES.

S'agissant d'ANTARES, ce réseau équipera, en 2012, 70 % des SDIS. Son fonctionnement représente 23,2 millions d'euros et il convient de rappeler que le coût global en investissement s'élèvera à 154 millions d'euros, dont 30 % financés au travers du FAI.

Enfin, alors que des craintes s'étaient exprimées en 2011, la subvention de fonctionnement en faveur de l'ENSOSP est finalement maintenue. Elle se montera à 4,47 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter une dotation en fond propre pour un montant de 5,17 millions d'euros. Toutefois, après un pic d'activité en 2010, on ne peut manquer de s'interroger sur un éventuel surdimensionnement de cette école au regard des besoins de formation. Je m'interroge également sur la formation des lieutenants de sapeurs-pompiers professionnels. Ne pourrait-on pas imaginer, par exemple, que l'ENSOSP se rapproche des écoles départementales pour les sous-officiers et accueille certains d'entre eux ?

En conclusion, et compte tenu du respect de la programmation budgétaire pluriannuelle, je vous propose d'adopter, sans modification, les crédits proposés pour la mission et chacun de ses deux programmes.

Mme Marie-France Beaufils, présidente . - La formation et le devenir de l'ENSOSP constituent effectivement des questions récurrentes devant trouver leurs réponses.

M. François Marc . - Mon explication de vote aura pour toile de fond les relations entre les collectivités territoriales et l'Etat. Il existe aujourd'hui une profonde inquiétude sur les moyens mis en oeuvre par les départements dans le domaine de la sécurité civile.

Concernant les crédits d'investissement, le FAI demeure restreint dans ses capacités d'action. Le projet ANTARES reste lui aussi problématique, tant du point de vue de l'investissement réalisé que du fonctionnement à financer. Les SDIS vont se tourner vers les départements pour assumer ce fonctionnement et nous allons assister à un nouveau transfert de charges de l'Etat vers les collectivités territoriales. Je remarque par ailleurs que ces services départementaux ont fait beaucoup d'efforts au cours des dernières années pour limiter leurs autres dépenses de fonctionnement.

Notre collègue Claude Haut, qui vous a précédé dans vos fonctions de rapporteur spécial de la mission « Sécurité civile », m'a aussi fait part de sa préoccupation concernant le renouvellement de la flotte d'avions de lutte contre les feux.

Pour l'ensemble de ces motifs, notre groupe est dans l'idée de voter contre les crédits de cette mission.

M. Yannick Botrel . - Beaucoup de choses ont été faites dans les départements en faveur des SDIS, en matière de politique immobilière et de moyens opérationnels notamment. Ces dépenses ont représenté un lourd coût budgétaire pour les collectivités territoriales. Mais je m'étonne que certaines dispositions soient décrétées par l'Etat, puis que leurs conséquences soient à la charge des collectivités. C'est par exemple le cas de décisions relatives au régime indemnitaire des personnels. L'Etat doit assumer ses choix.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx . - Nous examinons un budget important et je crois qu'il ne faut pas opposer l'Etat et les collectivités territoriales. Il y a au contraire une convergence entre les actions des uns et des autres. J'observe en outre avec intérêt que l'action n° 1 « Préparation et gestion des crises » du programme « Coordination des moyens de secours » voit ses crédits de paiement augmenter considérablement. J'interprète cette hausse comme la volonté de mieux préparer, de mieux protéger et de mieux informer les populations en cas de crise.

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial . - Le débat autour de la sécurité civile et du rôle respectif de l'Etat et des collectivités territoriales n'est pas nouveau. C'est dans les années 2000 que se sont opérés de substantiels transferts aux départements.

Je crois qu'il est aujourd'hui important de mieux distinguer les dépenses qui relèvent des décisions de l'Etat et celles qui découlent d'orientations prises au niveau départemental. En tant que rapporteur spécial de cette mission, je compte bien m'y atteler. Il faut être honnête sur cette question. Quand je discute avec les principaux acteurs de la sécurité civile, chacun se renvoie la balle. Il nous arrive pourtant de visiter certains garages très modernes par exemple, mais personne ne veut assumer la responsabilité de la dépense a posteriori .

Pour ANTARES, le fonctionnement est pris en charge par l'Etat. Cette infrastructure fonctionne un peu comme les réseaux d'assainissement des eaux que nous connaissons bien dans nos communes : elle repose sur un investissement initial de l'Etat et un financement par les départements du raccordement à ce réseau. Le coût global du déploiement d'ANTARES sera légèrement supérieur à 150 millions d'euros, pris en charge à hauteur d'environ 40 millions d'euros par le FAI.

La question bien sûr se pose de savoir s'il fallait, il y a quelques années, lancer ce nouveau réseau de communication. Je rappelle, à cet égard, que l'idée de relier toutes les forces contribuant à l'action de sécurité civile paraît judicieuse. En revanche, certains acteurs vont moins vite que d'autres pour se raccorder à ANTARES. Je déplore en particulier que les services d'aide médicale urgente (SAMU) ne témoignent pas dans ce domaine du même engouement que les SDIS.

S'agissant de la lutte contre les feux, la question du remplacement éventuel des Canadairs n'est pas encore réglée. Celle des Trackers le sera de façon imminente. Je veux toutefois souligner que, lors de mes échanges avec les responsables de la sécurité civile, il ne m'a pas été fait part de difficultés particulières sur ces questions.

Enfin, comme l'a observé Marie-Hélène des Esgaulx, les crédits de l'action n° 1 « Préparation et gestion des crises » du programme 128 ont augmenté de 89,7 % entre 2011 et 2012.

Mme Michèle André . - Certains équipements mis à la disposition des pompiers sont-ils trop luxueux ou surdimensionnés ? Il faut se souvenir que la mise en place des SDIS demeure relativement récente. Elle a été difficile, mais elle correspondait à une belle idée : mettre en commun les moyens de sécurité civile. Au moment de la mise en place des SDIS, on a pu s'apercevoir que certaines communes n'avaient pas investi depuis longtemps dans les bâtiments de ces services. Parmi les sapeurs-pompiers volontaires, on comptait un certain nombre de femmes et celles-ci ne pouvaient décemment pas se changer dans le même vestiaire que les hommes, par exemple. La remise en état des casernes de pompiers était donc une nécessité. Certes, quelques communes n'ont pas pu s'empêcher de chercher à rivaliser sur le terrain de l'investissement en faveur de leurs centres de secours. Toutefois, l'organisation telle qu'on la connaît désormais avec les SDIS a grandement favorisé la mise à niveau des moyens de secours.

Mme Marie-France Beaufils, présidente . - Je mets aux voix les crédits de la mission « Sécurité civile » : sept voix pour, six voix contre. Ils sont adoptés.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Sécurité civile ».

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Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2011, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission des finances a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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