B. UNE AUGMENTATION DU NOMBRE DE PLACES DE LOGEMENT ADAPTÉ QUI NE DOIT PAS FAIRE OUBLIER L'IMPORTANCE DE L'ACCOMPAGNEMENT

1. Une augmentation du nombre de places de logement adapté

En 2019, le Gouvernement entend poursuivre ses efforts en faveur du logement d'abord et plus particulièrement en faveur du logement adapté. Il a lancé en 2018 un appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour accélérer la mise en oeuvre du plan en faveur du logement d'abord. 24 territoires ont été retenus dans lesquelles les collectivités mettront en oeuvre un programme dans la perspective de diminuer le nombre de personnes sans-abris. 8 millions d'euros ont été dédiés à cet AMI en 2018 et 4 millions d'euros sont prévus pour 2019.

Pour 2019, 325,4 millions d'euros seront consacrés au logement adapté, soit une augmentation de 3,6%

Dans le cadre de son plan en faveur du logement d'abord, le Gouvernement a souhaité mettre l'accent sur l'intermédiation locative et les places en pensions de famille.

? Crédits liés à l'intermédiation locative

Le Gouvernement souhaite créer 40 000 nouvelles places en intermédiation locative d'ici la fin du quinquennat. L'objectif pour 2018 a été fixé à 5 892 places d'intermédiation locative. 3 159 places ont été créées au 11 octobre 2018. Le Gouvernement, qui table sur une accélération significative de création de places d'ici la fin de l'année, considère qu'il devrait atteindre ses objectifs en 2018.

Pour 2019, 97,2 millions d'euros sont fléchés pour ce dispositif, soit une augmentation de 3,7 %. Pour votre rapporteur, non seulement l'objectif de création de places, fixé à 8 850 places, est extrêmement ambitieux au regard du nombre de places qui devraient être créées en 2018 mais en outre le montant des crédits budgétés pourrait s'avérer insuffisant pour permettre une telle augmentation .

Évolution du nombre de places d'intermédiation locative

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Prévision 2018

Prévision 2019

Nombre de places

6 611

7 935

18 378

21 643

25 575

28 656

34 358

40 250

49 100

Nombre de places supplémentaires par rapport à l'année précédente

+ 1324

+ 10443

+ 3265

+ 3932

+ 3081

+ 5702

+ 5892

+ 8850

Source : Commission des affaires économiques d'après le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2012, pour 2013, pour 2014, pour 2015 et pour 2016, projets annuels de performances annexés au projet de loi de finances pour 2017 et pour 2018 et 2019 réponse aux questionnaires budgétaires.

? Crédits dédiés aux maisons-relais et pensions de famille

Le Gouvernement a en complément de l'intermédiation locative annoncé la création de 10 000 places en pensions de famille sur la durée du quinquennat. 748 places ont été créées au 11 octobre 2018, le Gouvernement présume une accélération des créations de places d'ici la fin de l'année mais à un rythme insuffisant pour atteindre l'objectif de 1 700  places qu'il s'était fixé. C'est pourquoi l'objectif a été revu à la baisse pour atteindre 1 300 places. Dès lors la création de 2 300 places en 2019 paraît ambitieuse à votre rapporteur.

Pour 2019, 113,3 millions d'euros sont prévus pour financer la création des maisons-relais et pensions de famille , soit une augmentation de 4,4 %.

Évolution des crédits et du nombre de places
pour les maisons relais et pensions de famille

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Prévision 2018

Prévision 2019

Crédits
(en millions d'euros)

54, 6

61, 5

70, 2

80, 4

83, 5

87, 5

92,2

108,5

113,3

Nombre de places

10 269

11 527

12 702

14 038

14 843

15 446

16 521

17 821

20 121

Nombre de places supplémentaires par rapport à l'année précédente

+1 258

+1 175

+1 336

+805

+603

+ 1 075

Initialement

+ 1 700

mais ramené à
+ 1 300

+ 2 300

Source : Commission des affaires économiques d'après le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2012, pour 2013, pour 2014, pour 2015 et pour 2016, projets annuels de performances annexés au projet de loi de finances pour 2017 et pour 2018 et 2019 réponse aux questionnaires budgétaires.

? Crédits dédiés aux résidences sociales et à l'aide à la gestion locative sociale

En 2017, on dénombrait 1 403 résidences sociales comportant plus de 123 993 places. Ces résidences sociales accueillent temporairement des ménages ayant de faibles revenus ou qui rencontrent des difficultés d'accès au logement ordinaire, et pour lesquels un accompagnement social est nécessaire.

Les gestionnaires des résidences sociales peuvent recevoir une aide à la gestion locative sociale (AGLS) pour couvrir les dépenses rendues nécessaires pour l'accueil et l'accompagnement de certains résidents.

26 millions d'euros sont prévus en 2019. Ils permettront de financer la transformation de foyers de jeunes travailleurs ou de travailleurs migrants en résidences sociales.

? Crédits dédiés au financement de l'aide au logement temporaire des personnes défavorisées (ALT1)

L'aide au logement temporaire des personnes défavorisées (ALT1) permet de couvrir les dépenses engagées par les organismes qui mettent à disposition des logements pour les personnes sans domicile. Cette aide remplace les aides personnelles qui ne peuvent être octroyées faute pour la personne de remplir certaines conditions en matière de ressources ou encore de titre de séjour. Cette aide est prise en charge intégralement par le budget de l'État depuis 2018. Les crédits prévus pour 2019 sont en augmentation de 2,8% et atteignent 73,5 millions d'euros.

2. Malgré la création de places pérennes, le parc d'hébergement d'urgence demeure insuffisant pour répondre à la demande

Depuis plusieurs années, les gouvernements successifs se sont engagés dans une politique de baisse du recours aux nuitées hôtelières et dans la création de places pérennes d'hébergement d'urgence qui permettent une meilleure prise en charge des personnes hébergées.

Le plan de réduction du recours aux nuitées hôtelières lancé en février 2015 avait vocation à limiter le recours aux nuitées hôtelières. La délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL) a estimé que, trois ans après la mise en place de ce plan, l'objectif d'éviter 10 000 nuitées en trois ans était quasiment atteint avec 9 061 nuitées évitées au regard de la tendance qui était observée en 2015.

La DIHAL rappelle que 12 606 places d'intermédiation locative, 2 440 places de logement adapté et 2 771 places spécifiques en Ile-de-France pour les ménages sortant d'hôtel ont été créées. En outre, deux appels d'offres ont permis de créer 3 675 places sur le programme 177 et 5 351 places sur le programme 303 par le biais d'un rachat d'hôtels transformés en résidences hôtelières à vocation sociale (RHVS).

La DIHAL souligne également les efforts engagés par l'administration pour permettre une meilleure répartition territoriale des nuitées hôtelières. En effet, l'existence d'hôtels anciens avec des prix abordables conduisait en mai 2015 à ce que 28 % des nuitées soient localisées en Seine-Saint-Denis. Ce taux est aujourd'hui de 22 %.

La pression sur le parc demeurant forte, le manque de foncier ne permettant pas de construire des structures pérennes et le nombre de logements sociaux étant insuffisant, le nombre de places d'hébergement d'urgence continue de croître. En 2018, ont ainsi été ouvertes 49 000 places dans les centres d'hébergement d'urgence et 45 000 dans les CHRS, auxquelles s'ajoutent 48 000 places dans les hôtels. Si on observe un ralentissement de la progression de ces nuitées hôtelières (6 % en 2017 contre 12 % précédemment) , leur diminution n'est pas encore enclenchée .

Capacités d'accueil en matière d'hébergement d'urgence

NB : pour 2013, le PAP ne mentionne pas le détail des places en centre d'hébergement d'urgence. En raison d'une difficulté pour les territoires à distinguer place de stabilisation et place d'insertion, le tableau donne un nombre cumulé à compter de 2017

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et réponse au questionnaire budgétaire.

Évolution du nombre de nuitées d'hôtel

Source : Commission des affaires économiques d'après les réponses au questionnaire budgétaire.

3. L'accompagnement des personnes, une des conditions de réussite du plan en faveur du logement d'abord

S'agissant des conditions d'accueil et d'accompagnement des familles, le bilan du plan de réduction des nuitées hôtelières est plutôt décevant. Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur que malgré les efforts fournis les conditions d'accompagnement ne sont pas satisfaisantes. « Les constats quant aux conditions de vie des ménages à l'hôtel restent sévères : insécurité alimentaire (près de 8 familles sur 10 et 2 enfants sur 3 souffrent d'insécurité alimentaire ; 11 % des ménages à l'hôtel souffrent d'insécurité alimentaire sévère (4 % en CHRS)), santé mentale affectée (un trouble dépressif maternel est repéré chez 29 % des mères à l'hôtel, soit 4 fois plus qu'en population générale), promiscuité, déscolarisation (taux importants de non scolarisation des enfants entre 6 et 12 ans au moins 10 fois plus importants qu'en population générale). »

Les conditions et les moyens de l'accompagnement demeurent un sujet prégnant pour les familles hébergées à l'hôtel mais aussi dans les autres structures d'hébergement. Votre rapporteur estime que cette question ne doit pas être éludée et que le plan relatif au logement d'abord ne permettra une sortie plus rapide vers le logement abordable qu'à la condition que la personne soit accompagnée.

Des crédits en matière d'accompagnement sont prévus via le fonds national d'accompagnement dans et vers le logement (FNAVDL). Votre rapporteur constate que la situation ne s'est pas améliorée, le passage de crédits budgétaires à un financement par le biais des astreintes prononcées en matière de DALO plus irrégulières ne permettant pas d'avoir de la visibilité sur les crédits disponibles. En 2017, 23,9 millions d'euros ont été engagés en AE et 24,5 millions d'euros en CP.

Un quatrième appel à projets a été lancé en juillet dernier dans le cadre du programme « 10 000 logements accompagnés » mais contrairement aux appels à projet précédents, le FNAVDL a limité sa participation à un million d'euros en raison des tensions sur les crédits que le fonds a rencontrées. Dans les réponses au questionnaire budgétaire, le Gouvernement a indiqué manquer de recul sur les effets de la réforme engagée en 2016 permettant une liquidation plus régulière des astreintes.

Les députés ont adopté un amendement de Mme Vignon et plusieurs de ses collègues tendant à prévoir la remise par le Gouvernement, avant le 1 er septembre 2019, au Parlement d'un rapport analysant « la pertinence du financement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) via la seule mission budgétaire cohésion des territoires, compte tenu des enjeux relatifs à l'accompagnement social des personnes hébergées » (article 74 sexies ). Votre rapporteur est par principe circonspecte sur les demandes de rapports, estimant qu'il appartient au Parlement de procéder aux évaluations et contrôles qui lui paraissent nécessaires. Néanmoins, elle estime que ce rapport pourrait amener le Gouvernement à réfléchir aux moyens que l'État apporte en matière d'accompagnement des personnes hébergées et à l'opportunité de créer une ligne budgétaire spécifique.

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