SEANCE DU 18 NOVEMBRE 2002
M. le président.
L'amendement n° 123, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au deuxième alinéa du I de l'article 235
ter
ZC du code général des
impôts, substituer au pourcentage : "3,3" le pourcentage : "5". »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés est l'un des outils de
financement de la politique d'allégement des cotisations sociales.
Nous estimons pour notre part que cet outil est insuffisamment efficace
puisqu'il rapporte environ 920 millions d'euros, soit une somme tout de même
relativement marginale comparée au total des ressources mobilisées à ce titre,
ressources qui comprennent notamment le reversement d'une part des droits sur
le tabac, pour près de 8 milliards d'euros, et les droits sur les alcools, pour
un peu plus de 2,6 milliards d'euros. Il doit donc être quelque peu
amélioré.
Tel est le sens de cet amendement, qui tend donc à dégager entre 470 et 480
millions d'euros supplémentaires de recettes pour le financement des politiques
incitatives à l'emploi.
Il ne risque pas de mettre en question de manière insupportable la situation
de nos entreprises, qui, compte tenu de l'objet du FOREC, seront en dernière
instance destinataires du produit de la perception de cette majoration.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La position de la commission n'étonnera personne, pas même
nos collègues communistes, qui veulent une nouvelle fois alourdir les
prélèvements obligatoires des entreprises et l'impôt sur les sociétés.
(Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Cela ne correspond
nullement à l'esprit de ce que souhaitent le Gouvernement et la majorité du
Parlement.
La commission émet par conséquent un avis défavorable sur cette initiative, au
demeurant contre-productive.
M. Guy Fischer.
Cela nous aurait surpris !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 123.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 125, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la
variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale, ratio pour le
contrôle duquel sont associés le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués
du personnel. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également les
amendements n°s 126 et 124. Nos débats y gagneront en clarté et en
efficacité.
Un sénateur du RPR.
Et en temps ! Or le temps, c'est de l'argent.
M. le président.
J'appelle donc également en discussion les amendements n°s 126 et 124,
présentés par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 126 est ainsi libellé :
« Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la
variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale, ratio pour le
contrôle duquel sont associés le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués
du personnel. »
L'amendement n° 124 est ainsi libellé :
« Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le 1° de l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale, les mots :
"proportionnelles à l'ensemble des rémunérations ou gains perçus par les
salariés des professions non agricoles" sont remplacés par les mots : "modulées
pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur
ajoutée globale, ratio pour le contrôle duquel sont associés le comité
d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel". »
Veuillez poursuivre, monsieur Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Les amendements n°s 125, 126 et 124 ont le même objet, bien que leur rédaction
diffère légèrement. Tous trois visent en effet à apporter des ressources
nouvelles et pérennes à la sécurité sociale au moyen d'une modulation des
cotisations sociales patronales selon le ratio masse salariale/valeur ajoutée
de l'entreprise. C'est la raison pour laquelle je vous ai proposé de les
défendre ensemble.
Le projet de loi a pour objet le financement de la sécurité sociale pour
l'année 2003. Le squelette de la position gouvernementale en la matière, telle
qu'elle ressort des débats, est structuré autour de deux axes : d'abord, le
constat d'un déséquilibre financier majeur ; ensuite, la mesure d'exonération
pour les employeurs du paiement des charges des cotisations sociales. Il nous
semble nécessaire de formuler la question sous un autre angle en nous attachant
plus particulièrement à l'enjeu des ressources.
S'attacher aux ressources ne signifie pas que l'on mésestime l'enjeu des
dépenses, bien au contraire. Cela implique de prendre acte des motifs du
déséquilibre financier de la sécurité sociale, qui ne s'explique pas autrement
que par les besoins croissants de la population française en matière de
sécurité sociale, face aux risques sociaux. Cela implique aussi d'y répondre de
façon mesurée mais réelle et efficace. Nous ne sommes pas des
jusqu'au-boutistes ! Encourager les allégements de charges pour les entreprises
ne permettra donc, à notre sens, ni de répondre efficacement aux besoins de la
population ni d'apporter de solution structurelle aux défaillances des recettes
de la sécurité sociale. Pire, ne risque-t-on pas de créer des « trappes à bas
salaires » qui ne seront bénéfiques ni pour les recettes de la sécurité
sociale, ni pour les salariés, ni même, d'ailleurs, pour les entreprises ?
En revanche, puisque nous sommes à la veille d'une grande réforme de la
sécurité sociale - dont il faudra discuter les fondements -, interroger les
modalités de constitution des ressources de la sécurité sociale nous apparaît
être une approche plus pertinente. Très simplement, nous pensons que deux
solutions sont envisageables pour apporter des ressources nouvelles et pérennes
à la sécurité sociale. La première est fictive, puisqu'elle ne consiste qu'en
la réduction du volume et de la valeur des prestations et conduit à un
rééquilibrage des ressources et des dépenses qui n'est que comptable. Son
corollaire, le transfert de charges sur la population, est quant à lui bien
réel, tout comme le sont les ravages sociaux qu'il induit. Chacun de nous, ici,
pourrait en témoigner pour sa propre région. Les options contenues dans le
projet de loi de financement de la sécurité sociale risquent d'ailleurs fort
d'amplifier ces ravages.
La seconde solution, en revanche, est réelle, dans la mesure où elle implique
de dégager de nouvelles recettes. Mais, là encore, les choix antérieurs n'ont
abouti qu'à l'accroissement de la contribution financière des ménages et à
l'intervention de l'Etat dans le système de sécurité sociale, par la
fiscalisation d'une part croissante des ressources et par la création des lois
de financement de la sécurité sociale.
Or, parmi les pistes envisagées, la proposition ancienne de moduler les
cotisations sociales des entreprises en fonction de l'usage qu'elles font de la
valeur ajoutée créée, constitue un outil bien plus efficace pour dégager de
nouvelles recettes.
En effet, contrairement à ce que ferait une ponction fiscale supplémentaire,
une telle modulation des cotisations sociales ne mine pas le moteur de
l'économie, à savoir la demande effective des ménages, dont on sait combien
elle peut être déterminante pour l'activité des entreprises et, par conséquent,
pour les ressources de la sécurité sociale.
En outre, grâce au principe de solidarité entre entreprises, l'assiette de
calcul des cotisations patronales ne subirait aucune modification sensible -
elle resterait fondée sur les salaires et les rémunérations -, mais elle serait
susceptible de correction en fonction des politiques salariales menées dans les
entreprises et deschoix d'affectation de la valeur ajoutée globale. Plus une
entreprise créerait d'emplois et sortirait des stratégies de modération
salariale, plus sa contribution au financement de la sécurité sociale se
trouverait réduite. A l'inverse, toute stratégie visant à réduire la part de la
masse salariale dans la valeur ajoutée serait pénalisée par un accroissement de
la contribution au financement de la sécurité sociale.
Cette mesure, qui aurait pour effet positif une réduction ciblée du coût du
travail pour les entreprises, notamment pour les petites et moyennes
entreprises à forte intensité de main-d'oeuvre, présenterait aussi l'avantage
d'encourager la dynamique globale de l'emploi ou de pouvoir y répondre, et par
voie de conséquence, de consolider les ressources de la sécurité sociale.
Enfin, cette proposition de fonder la cotisation sociale sur l'usage de la
valeur ajoutée créée permettrait de restaurer le sens originel de la cotisation
sociale : celui d'un prélèvement sur la richesse de la nation au bénéfice de la
satisfaction de besoins collectifs.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je tiens à dire à M. Fischer - mais il s'en doute ! - qu'il
n'aura guère plus de succès aujourd'hui qu'il n'en a eu hier avec une
initiative de même nature, quelles que soient les majorités qui se succèdent à
l'échelon national !
M. Guy Fischer.
Je vais passer une mauvaise nuit, monsieur le rapporteur !
(Sourires.)
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La commission des affaires sociales a donc émis un avis
défavorable sur ces trois amendements. Je fais grâce au Sénat d'une explication
plus poussée sur le sujet, car nous l'avons donnée à maintes reprises, chaque
fois que le groupe communiste a déposé des amendements comparables. Vous la
connaissez donc tous par coeur, mes chers collègues !
M. Guy Fischer.
Oh ! les choses peuvent changer !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei,
ministre.
Le Gouvernement est également défavorable à ces trois
amendements.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 125.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 126.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 124.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3