SEANCE DU 27 NOVEMBRE 2000


M. le président. Par amendement n° I-90 rectifié, MM. Arnaud, Franchis, Huchon, Badré, Fréville et Machet proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le quatrième alinéa (c) du 2° de l'article 31 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Il en est de même des dépenses d'arrachage et de replantation des vignobles dont l'objectif est de maintenir dans un état normal de production un bien dont le fermage est encadré par des décisions réglementaires et dont l'entretien, la replantation et la remise en état du patrimoine constituent des améliorations non rentables".
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux taxes prévues aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. L'article 31 du code général des impôts établit la distinction, pour les propriétés rurales, entre les dépenses d'amélioration rentables non déductibles pour la détermination du revenu net et les dépenses d'amélioration non rentables qui sont déductibles.
Toutefois, les dépenses engagées pour la construction d'un nouveau bâtiment agricole, mieux adapté aux techniques modernes et destiné à remplacer un bâtiment vétuste de même nature, sont qualifiées de dépenses non rentables, sous réserve qu'il n'y ait pas augmentation du fermage.
L'amendement n° I-90 rectifié, que j'ai cosigné avec un certain nombre de mes collègues du groupe de l'Union centriste, vise à adapter l'article du code à la situation spécifique de la viticulture. Il est proposé de considérer comme non rentables, et donc comme éventuellement déductibles du revenu, les dépenses d'arrachage et de replantation des vignobles.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 31 du code général des impôts établit, pour les propriétés rurales, une distinction qui semble d'application un peu délicate entre les dépenses d'amélioration rentables, considérées comme non déductibles, et les dépenses d'amélioration non rentables, considérées comme déductibles. C'est une notion quelque peu curieuse, mais c'est une notion fiscale.
L'administration considère traditionnellement les dépenses d'arrachage et de replantation des vignobles comme rentables, et donc non déductibles. A l'inverse, les dépenses engagées pour la construction d'un nouveau bâtiment agricole sont qualifiées de dépenses non rentables, sous réserve qu'il n'y ait pas augmentation du fermage.
Tout cela semble extrêmement artificiel.
Actuellement, les dépenses de plantation et de replantation des propriétaires exploitant leur vignoble sont des dépenses d'investissement amortissables dont l'amortissement est réputé couvert par une déduction forfaitaire du revenu net. Les propriétaires non exploitants, en revanche, ne peuvent procéder à ce type de déduction.
L'amendement de nos collègues vise à remédier à cette situation inéquitable entre les propriétaires exploitants et les propriétaires non-exploitants.
La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Les dépenses d'arrachage et de replantation de vignes conduisent généralement à une augmentation de la valeur de la propriété agricole, en assurant une meilleure productivité aux vignobles, ce qui confère à ces dépenses, conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat, le caractère d'amélioration rentable, donc non immédiatement déductible.
En tout état de cause, admettre la déduction réelle des travaux de cette nature devrait conduire, en contrepartie du coût qu'aurait une telle mesure, à diminuer substantiellement le taux de la déduction forfaitaire, ce qui, je pense, n'aurait pas la faveur de l'ensemble des propriétaires bailleurs de vignes plantées.
Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer l'amendement, faute de quoi j'en demanderai le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-90 rectifé, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de la loi de finances, après l'article 11.
Mes chers collègues, je vous propose d'appeler en priorité l'amendement n° I-171.
La commission en est-elle d'accord ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, monsieur le président.
M. le président. Et le Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Egalement, monsieur le président.
M. le président. Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Par amendement n° I-171, MM. Goulet, Descours, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Gaillard, Joyandet, Ostermann, Trégouët, Cornu, Martin, Vasselle, Murat, Rispat, Neuwirth, Darcos, Fournier, Ginésy, Vial, Leclerc, Blanc, Bizet, Bernard, César, Le Grand, Lanier et Mme Olin proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 63 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils ne comprennent pas les sommes perçues au titre des indemnisations des pertes de cheptels bovins résultant de l'encéphalopathie spongiforme bovine. »
« II. - Les pertes pour l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. La crise de la vache folle a entraîné - et ce n'est pas terminé - des situations critiques, voire dramatiques, chez les agriculteurs, principalement chez les éleveurs, en particulier s'ils ont eu la malchance de trouver dans leur cheptel un animal malade. Ainsi, demain matin, dans mon département, trois jeunes éleveurs iront conduire à l'abattage obligatoire 220 de leurs bêtes.
Quelle que soit la nécessité de cette mesure, qui n'est pas ici en cause, le législateur doit prendre en considération la nature de la réparation versée à ces exploitants agricoles. En effet, les fonds reçus - on l'a déjà dit - sont jusqu'à ce jour considérés comme un revenu, soumis à ce titre à l'impôt. Cette situation n'est pas supportable, car elle tend à pénaliser les éleveurs deux fois, l'Etat reprenant d'une main ce qu'il a donné de l'autre. Cette réparation ne peut en aucun cas être assimilée à un revenu, et encore moins à une cession d'actif.
Aussi, pour abonder dans le sens du ministre de l'agriculture, qui a dit que son plan n'était pas « pour solde de tout compte », j'offre une bonne occasion de montrer qu'effectivement nous pouvons aider les agriculteurs sur le plan fiscal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est, bien sûr, très favorable à cet amendement. C'est une question de simple justice, de bon sens et d'équité.
M. Daniel Goulet. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il serait vraiment absurde que les indemnités versées à ces éleveurs soient ensuite comprises dans l'assiette de leur impôt. Il faut manifestement, et sans se poser aucune question, voter d'enthousiasme le présent amendement.
M. Daniel Goulet. Merci, monsieur le rapporteur général !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est évidemment particulièrement attentif à la situation des éleveurs affectés par les cas d'ESB dans leur cheptel. M. le premier ministre a annoncé une série de mesures le 14 novembre dernier, mesures complétées par des aides à la filière bovine qui ont été annoncées par le ministre de l'agriculture.
Mais, exonérer purement et simplement l'indemnité d'abattage serait inéquitable, dès lors qu'une telle mesure aurait pour conséquence d'engendrer une perte d'exploitation égale à la valeur du stock abattu.
Mes services étudient, en concertation avec les représentants de la profession et le ministère de l'agriculture, les moyens qui permettraient de limiter autant que possible les ressauts d'imposition résultant de la perception de l'indemnité d'abattage. C'est un dossier que nous examinons avec beaucoup de soin.
Sous le bénéfice de ces explications, je demande à ses auteurs de bien vouloir retirer l'amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est incroyable !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-171.
M. Philippe Nogrix. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Je ne comprends vraiment pas ! Cette indemnité est versée pour remplacer le cheptel qui vient d'être abattu. L'éleveur ne fait aucune plus-value. La plus-value sera, éventuellement, réalisée quand il revendra son cheptel après l'avoir engraissé.
Alors qu'il n'y a aucune plus-value, je ne vois pas pourquoi on paierait un impôt sur l'indemnité qui ne sert qu'à remplacer un cheptel abattu par mesure sanitaire.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-171, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 11.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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