Séance du 6 décembre 1999






PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'emploi et la solidarité : II. - Santé et solidarité.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 35 minutes ;
Groupe socialiste, 22 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 41 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 13 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Madame le secrétaire d'Etat, lorsque, le 24 novembre dernier, vous avez, avec Mme Aubry, présenté votre projet de budget devant la commission des affaires sociales du Sénat, vous avez évoqué, en matière de santé, trois priorités que vous souhaitiez affirmer cette année, parmi lesquelles le renforcement de la sécurité sanitaire et des politiques de santé publique.
Mon intervention portera exclusivement sur ces deux volets de votre politique.
Je m'intéresserai tout d'abord au renforcement des politiques de santé publique, puis à la sécurité sanitaire, domaine auquel je porte, vous le comprendrez, une vigilance toute particulière.
S'agissant du renforcement des politiques de santé publique, je constate qu'au-delà de l'effet d'annonce cette priorité a un contenu, à vrai dire, bien léger.
Certes, des crédits sont censés répondre aux fléaux que constituent l'hépatite C, le sida, le tabagisme, l'alcoolisme et la toxicomanie.
Mais, en matière de santé publique - je le dis chaque année - on manque d'un objectif clair, s'appuyant sur des données épidémiologiques indiscutables, à savoir faire reculer la mortalité prématurée évitable, comme on manque d'une stratégie s'inscrivant nécessairement dans la durée.
Tel paraissait être d'ailleurs l'objectif de l'article 20 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, qui visait à mettre en place des programmes de dépistage et de lutte contre les maladies aux conséquences mortelles évitables.
Un an plus tard, nous attendons toujours les textes d'application et la liste des maladies qui seraient concernées. En cette matière, comme dans d'autres, les déclarations d'intention ne sauraient suffire.
Je citerai un exemple particulièrement éloquent : le cancer colorectal tue chaque année entre 15 000 et 16 000 Français, et seulement 3 % des explorations endoscopiques du côlon et du rectum permettent d'en faire le diagnostic. Depuis 1993, neuf enquêtes épidémiologiques, en France et à l'étranger, ont démontré que l'utilisation d'un test, l'Hemoccult II, tous les deux ans au-delà de cinquante ans, permet de réduire de 30 % à 44 % une telle mortalité.
La conférence de consensus organisée par l'ANAES sur cette question a d'ailleurs mis en évidence que « le test Hemoccult II a une sensibilité et une spécificité acceptables dans le cadre d'un programme de dépistage réalisé dans de bonnes conditions : il permet de dépister environ 50 % des cancers et 20 % des adénomes de plus de 1 centimère. »
Ce dépistage permettrait, en outre, de réduire significativement le nombre de coloscopies pratiquées dans notre pays, dont la pratique n'est pas anodine et dont le rendement est faible. De nombreux médecins ont alerté les pouvoirs publics et l'opinion sur cette question ; selon eux, 3 000 décès au moins pourraient être évités chaque année si ce dépistage était institué.
Or, malgré les engagements pris l'an dernier visant à étendre le dépistage du cancer du côlon, aucun texte d'application, décret ou arrêté, n'est publié à ce jour. Les deux premiers textes sont annoncés pour publication au cours du dernier trimestre 1999. Nous sommes déjà le 6 décembre ; pourriez-vous, madame le secrétaire d'Etat, nous apporter davantage de précisions quant à leur date de parution ?
L'exemple du dépistage du cancer colorectal n'est pas - hélas ! - le seul qui montre le décalage entre les paroles et les actes, entre les déclarations d'intention et la réalité des faits.
En matière de santé publique, c'est inacceptable. Et l'on est amené à s'interroger sur l'utilité de créer des structures au nom de la démocratie sanitaire, telles que le Haut comité de santé publique ou les conférences régionales et nationales de santé, si leurs propositions restent lettre morte.
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé qu'un débat d'orientation sur la santé publique se tiendrait au printemps.
Un débat supplémentaire chaque année risque d'être un débat pour rien. Les choix de santé publique ne peuvent en effet se traduire que par des engagements pluriannuels, répondant à des objectifs précis et pour lequels des données épidémiologiques permettent d'évaluer les actions et d'en mesurer les effets.
Parmi les causes de iatrogénies qu'il définit comme « toute pathologie d'origine médicale », le Haut comité de santé publique souligne d'ailleurs les conséquences d'une absence ou d'un report de décision de soins sur la santé de nos concitoyens.
Une autre priorité de votre action pour 2000, madame le secrétaire d'Etat, porte sur le renforcement de la sécurité sanitaire.
Mme le ministre a annoncé, je la cite, que la montée en charge des agences de sécurité sanitaire était assurée. J'aimerais revenir plus en détails sur leur financement et sur leur fonctionnement.
En ce qui concerne le financement, vous avez mentionné en commission un chiffre global de 495 millions de francs, en augmentation de 157 millions de francs, ces crédits couvrant l'ensemble des agences, c'est-à-dire pas uniquement celles qui ont été créées pas la loi du 1er juillet 1998. Les chiffres concernent donc l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS ; l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA ; l'Institut de veille sanitaire, l'IVS ; l'Agence française du sang, l'AFS, qui deviendra, au 1er janvier 2000, l'Etablissement français du sang ; l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES ; l'Office de protection contre les rayonnements ionisants, l'OPRI, et l'établissement français des greffes, l'EFG.
Je ne conteste pas l'effort entrepris par l'Etat pour doter ces structures de moyens supplémentaires. Je note toutefois que l'effort portant sur les seules agences créées par la loi du 1er juillet 1998 se monte à 108 millions de francs.
Je m'interroge sur l'adéquation entre les missions nouvelles que l'on souhaite confier notamment à l'AFSSAPS et à l'AFSSA et le montant des crédits qui leur sont affectés.
En ce qui concerne l'AFSSAPS, je note ainsi que, si l'Etat prévoit en 2000 de lui verser une subvention de 174 millions de francs, en augmentation de 55 millions de francs par rapport à 1999, l'agence, quant à elle, a prévu un budget de fonctionnement de 405 millions de francs, dont les deux tiers proviendront de taxes et de redevances versés par les industriels.
Faisant miennes les observations formulées ce matin par l'excellent rapporteur de la commission des affaires sociales, je m'interroge sur le ratio entre le financement public et privé, dont je considère comme lui qu'il est déséquilibré. Seule l'industrie pharmaceutique contribue massivement au financement de l'agence, alors même que les nouvelles mission de celle-ci couvrent bien plus largement tous les produits de santé et les produits cosmétiques. Il paraît nécessaire et urgent de mettre en place une autre répartition du financement.
Dois-je vous rappeler, madame le secrétaire d'Etat, que lorsque l'Agence du médicament avait été créée, l'équilibre qui avait été considéré comme pertinent était de 60-40 ? Nous constatons, au fil des années, que cet équilibre est compromis et nous nous demandons pourquoi.
Si l'AFSSAPS dépend trop, pour son financement, d'un seul secteur industriel avec, de la part de certains, une suspicion, à mes yeux, non fondée quant aux conséquences sur l'indépendance même des décisions de l'agence, l'AFSSA, quant à elle, à l'exception des redevances liées à l'activité de l'Agence du médicament vétérinaire, ne doit ses moyens financiers qu'à la puissance publique. Encore doit-elle les négocier, comme cela a été rappelé par M. Louis Boyer, auprès de trois ministère différents : santé, agriculture, économie et finances. Il y a, là encore, tout lieu de craindre que ce financement, au gré des arbitrages des uns et des autres, ne permette par une action pérenne de cette agence dont le devenir, comme vous le savez, me donne, ainsi qu'à d'autres, quelques soucis.
Je remarque également que, pour l'année 2000, le financement de l'AFSSA par le ministère de l'agriculture fait l'objet de subventions, bien distinctes et que les activités de l'ex-CNEVA, le Centre national d'études vétérinaires et alimentaires, sont présentées indépendamment des activités nouvelles de l'agence. Il faut espérer que cette présentation comptable n'est que temporaire et qu'elle ne témoigne pas d'une volonté de conserver des structures qui doivent désormais faire partie d'un ensemble.
En outre, alors même que le législateur a créé ces agences dans un souci de contribuer au renforcement de la sécurité sanitaire de nos concitoyens, alors même que l'impératif de santé publique doit y être prédominant, il voit, et avec inquiétude, la part de la subvention du ministère de la santé dans le budget de l'AFSSA s'élever à seulement 4,8 % du budget total. Connaissant les pesanteurs auxquelles le législateur s'est déjà heurté maintes fois, comment être assuré que le ministre en charge de la santé et, par là même, garant de la santé publique, sera toujours entendu ?
En 1999, l'institut de veille sanitaire recevra une dotation de 101 millions de francs. Son budget de fonctionnement pour 1999 atteignait 105 millions de francs, dont 62,6 millions de francs provenaient de l'Etat. Cela laisse présager la poursuite de la montée en charge de cet institut.
Pour conclure sur ce point, je voudrais rappeler qu'au cours des débats qui ont précédé l'adoption de la loi du 1er juillet 1998 j'ai, à plusieurs reprises, évoqué la question du financement et constamment réaffirmé que cette réforme ne pouvait pas se faire à moyens financiers constants. En effet, l'exigence de sécurité sanitaire nécessite que les agences disposent des moyens de remplir correctement leurs missions. La volonté politique doit se retrouver dans la réalité des budgets mis en oeuvre et dans leur lisibilité. La présentation actuelle ne permet pas, en effet, de connaître précisément les moyens financiers dont disposent les agences, ni l'origine des financements ni, à plus forte raison, leur évolution dans le temps.
S'agissant de l'ANAES, je souligne la nécessité de poursuivre les efforts entrepris. Grâce à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, l'ANAES a été recentrée sur ses deux missions de base, l'accréditation et l'évaluation en santé. L'ANAES a été chargée de la mise en place des références médicales opposables. Or les délais d'attente dans ce domaine se sont considérablement allongés, pour atteindre parfois plus de dix-huit mois. Sachant l'importance de ces règles pour améliorer les pratiques médicales, il y a lieu de renforcer les moyens de l'ANAES dans ce domaine.
Quant au fonctionnement des agences, je voudrais revenir sur le rôle de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments dans ce que les médias ont baptisé la « guerre du boeuf ».
Comme je l'ai exprimé publiquement déjà, j'ai apprécié les capacités d'expertise de l'agence dans ce domaine. Chacun a pu en juger.
Mais je déplore, une fois encore, la manière dont le Gouvernement a géré cette crise. En refusant d'accorder à l'agence un pouvoir de décision en matière de gestion du risque, contrairement à l'Allemagne, en faisant du ministre de l'agriculture le pilote de ce dossier difficile, on a donné à penser que la priorité de santé publique n'était pas l'objectif premier.
La gestion de la crise a fragilisé l'agence. Votre ministère, madame le secrétaire d'Etat, a été le grand absent de ce conflit. Je ne peux que le déplorer, vous aussi, peut-être.
Je ne voudrais pas terminer ce tour d'horizon sur l'application de la loi du 1er juillet 1998 sans évoquer deux points qui, chacun à leur manière, illustrent la difficulté de l'administration à tenir compte de la volonté du législateur.
Il s'agit, d'abord, du retard inadmissible dans la parution des textes d'application. Certes, les décrets constitutifs, après plus de neuf mois d'attente, ont fini par voir le jour, mais la loi du 1er juillet 1998 comporte également des dispositions réglementaires applicables à différents produits de santé, tels que les dispositifs médicaux à risque particulier, les produits cosmétiques, les réactifs, les produits thérapeutiques annexes, etc., pour lesquelles aucun décret d'application n'est encore paru. Plus de quatorze articles de cette loi restent ainsi en attente. C'est profondément regrettable.
Il serait judicieux d'affecter en priorité les nouveaux effectifs de votre ministère à la préparation des décrets d'application en souffrance.
Concernant également l'augmentation de l'encadrement de votre ministère, je souhaiterais que vous me précisiez, parmi ces nouveaux postes, combien seront affectés au renforcement des moyens d'inspection des services extérieurs de l'Etat, qui ont aussi leur rôle à jouer dans la mission de contrôle de la sécurité sanitaire. Je pense en particulier à la nécessité de renforcer le nombre de postes de médecin et de pharmacien inspecteur de la santé publique, dont les missions sont essentielles et les effectifs chroniquement insuffisants.
Ma deuxième remarque portera sur la mise en place du comité national de sécurité sanitaire. Créé sur l'initiative de nos collègues députés, ce comité avait pour but, selon le rapporteur à l'Assemblée nationale, M. Alain Calmat, de permettre « de confronter régulièrement les informations disponibles sur les risques sanitaires et les situations épidémiologiques et de coordonner l'intervention des trois structures ». Ce comité, suivant le souhait même du législateur, doit être une structure légère, coordonnant les actions des uns et des autres ; il n'a, en aucun cas, reçu pour mission de procéder à un travail d'évaluation, qui est par ailleurs déjà entrepris au sein des agences.
Quelle n'a pas été ma surprise d'apprendre que ce comité a décidé de créer des groupes de travail dont les avis et rapports sont attendus dans six mois ! L'un de ces groupes a pour tâche de travailler sur l'évaluation des risques sanitaires faibles, tels que les expositions à la dioxine qui apparaissent parmi les priorités de l'Institut de veille sanitaire.
Le dévoiement des missions du comité national de sécurité sanitaire me semble contraire à la volonté de lisibilité et de cohérence qui avait présidé à l'élaboration de la loi tout au long des travaux préparatoires.
Madame le secrétaire d'Etat, telles sont les interrogations, les réserves et les critiques que j'ai voulu exprimer au nom du groupe de l'Union centriste. Elles sont suffisamment graves et sérieuses pour que, suivant l'avis de la commission des affaires sociales, nous rejetions les crédits de votre ministère. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je limiterai mon propos aux restructurations hospitalières, en particulier au rôle de ce que j'appelle l'« hôpital général de proximité » et aux difficultés qu'il rencontre.
La grande réforme initiée par les ordonnances de 1996 avait donné l'espoir que les restructurations se réaliseraient dans un cadre intégrant simultanément les notions de services rendus à la population, d'égalité d'accès aux soins de qualité et de maîtrise des coûts.
Qu'en est-il aujourd'hui ?
Les expériences sont variées, les résultats très inégaux. Certaines mutations bien préparées, conduites par des hommes et des femmes de qualité, réussissent. D'autres butent sur de grandes difficultés d'ordre divers.
A cet égard, M. le rapporteur pour avis a relevé, à la suite de la Cour des comptes, le bilan très critique du fonctionnement du Fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, qui rassemble désormais l'intégralité des subventions d'Etat aux équipements hospitaliers.
La procédure de sélection des dossiers et leur instruction ont pris un grand retard, ce qui s'est traduit par un faible taux de consommation des crédits.
On peut s'interroger légitimement sur les raisons, alors que les besoins existent.
Le précédent directeur de la santé ne disait-il pas lui-même, quand il a renoncé à ce poste, qu'il avait dû « mener son action à la direction générale de la santé (...) au prix de grosses difficultés dues à l'organisation administrative du ministère, organisation qui ne permet pas toujours d'oeuvrer aussi vite et aussi efficacement qu'il le faudrait ». Dur constat !
Il est également regrettable que les procédures d'accréditation des établissements de santé aient pris du retard. Cela est très dommageable car elles permettraient de « donner au public des informations plus fiables que celles qui résultent du classement dans la presse ». Grâce à la constitution de vraies communautés d'établissements et aux contrats d'objectifs avec les agences régionales de l'hospitalisation, on pourrait sans doute éviter de fermer des services ou des établissements « à l'aveugle ».
J'en reviens à l'hôpital général de proximité, ce mal-aimé des théoriciens, pourtant plébiscité par les populations, aussi bien dans les sondages que par les manifestations de masse qui ont lieu chaque fois qu'un établissement est discrédité et menacé ou en cas de fermeture, celle-ci étant ressentie comme une véritable amputation.
S'agissant de discrédit, dans l'union hospitalière que je préside, vingt et un établissements - grands et petits - injustement attaqués dans la presse ont porté plainte et ont gagné très récemment devant le tribunal, l'hebdomadaire concerné ayant été condamné à de lourdes amendes. Dont acte. Mais on ne le sait pas suffisamment.
Par ailleurs, j'ai peine à croire que l'on fera systématiquement des économies en regroupant dans des hôpitaux plus lointains et plus spécialisés, donc plus chers, les patients des services fermés, d'autant que ces hôpitaux d'accueil manquent aussi, la plupart du temps, d'anesthésistes, d'obstétriciens et de chirurgiens. Il faudra bien embaucher et la difficulté sera la même puisque, nous le savons bien, au niveau national l'écart se creuse entre les postes à pourvoir et les postulants.
Ne serait-il pas temps d'examiner le problème en face, ainsi que les séries de mesures susceptibles de combler ce déficit dramatique ? Il faudrait rééquilibrer un besoin de postes sans cesse amplifié par l'inflation d'exigences réglementaires et une désaffection de plus en plus marquée pour ces métiers, due à la fois à des problèmes de rémunération, de temps de garde mal payés et, il faut bien le dire, d'inquiétude devant une opinion qui pousse à traduire les médecins devant les tribunaux comme de vils délinquants.
Ce que j'appelle l'« hôpital général de proximité », car il n'y a pas de terminologie officielle, comporte au moins les trois services actifs - chirurgie, obstétrique et anesthésie - auxquels il faut bien sûr adjoindre un serviced'urgences.
S'agissant des urgences, tout a été dit, mais seules ont été retenues les études des grands professeurs de l'université, qui n'ont jamais travaillé qu'en CHU, centre hospitalier et universitaire, et ne conçoivent guère que l'on puisse être soigné ailleurs. Mais que feront-ils si leurs services sont submergés par une population nouvelle qui ne relève pas de leur indéniable et haute compétence ? Je précise que cette question a été posée récemment dans un journal par le directeur des urgences d'un CHU de Basse-Normandie. Comme on ne dénombre qu'un CHU dans cette région, on le situera facilement ! (Sourires.)
Oui, nous avons besoin de médecins performants, de spécialistes éminents, de plateaux techniques sophistiqués, de chercheurs de haut niveau, mais il est bien évident qu'il faut une hiérarchie des soins et des compétences, reposant sur une complémentarité des établissements, en fonction de la gravité des états ou des interventions. Or, c'est ce qui est bafoué, chaque fois que les mutations nécessaires sont imposées d'en haut, de façon parfois abusive ou mal préparée. J'en ai, hélas ! un exemple criant dans mon département de la Manche.
En fait, madame le secrétaire d'Etat, ce que la population veut pour ses hôpitaux généraux de proximité est simple : un accueil humain et compétent - ce qui pose notamment le problème du tri et de l'organisation des urgences - des premiers secours bien organisés et rapides - ce qui suppose une coordination entres services - et des soins de base relativement proches, tout au moins facilement accessibles.
Contrairement à ce que l'on dit, la population n'est nullement hostile au fait d'aller dans un hôpital plus éloigné, si besoin est. Bien au contraire, c'est pour elle une garantie de qualité et de sécurité des soins.
L'hôpital général de proximité, quant à lui, travaille en réseau depuis déjà bien longtemps, car il connaît ses propres limites. Qu'il soit nécessaire d'améliorer ou de transformer nombre d'entre eux, certes, mais je ne suis pas la seule à estimer qu'il est possible d'allier exigence de qualité et exigence de proximité pour une part de dépenses raisonnables.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Excellent !
Mme Anne Heinis. Je rappelle que les trois quarts de la population passent par des hôpitaux généraux publics ou privés de tous niveaux, pour seulement un quart de la dépense hospitalière, et qu'ils assurent, au sein de l'hôpital public, 60 % des actes de médecine, de chirurgie et d'obstétrique ; c'est dire l'importance de leur rôle.
Ce sont les chiffres qui nous avaient été communiqués par les services du ministère lorsque j'étais au Haut conseil de la réforme hospitalière, voilà cinq ans environ. Ils n'ont guère dû changer.
Il faut cesser de faire croire et de proclamer que la sécurité sanitaire dépend uniquement de la sophistication des plateaux techniques, parce que c'est un argument facile qui s'appuie sur la peur. En réalité, la qualité des soins dépend du nombre et de la compétence des médecins, ainsi que de la bonne organisation des réseaux qui doivent prendre en compte aussi bien le secteur public que le secteur privé.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Anne Heinis. Cela figure d'ailleurs dans les nouveaux textes.
Le problème fondamental des hôpitaux généraux de proximité, c'est le recrutement médical et infirmier, en nombre et en formations adaptés aux besoins, ce qui nous ramène bien sûr au problème que je viens d'évoquer et à la réforme des études médicales, dont je vais dire un mot.
Nous sommes dans une spirale infernale dont le rythme s'est accéléré depuis la réforme de M. Ralite, à l'époque ministre de la santé, instituant l'internat qualifiant et supprimant les CES, qui étaient les sources des recrutements de nos hôpitaux généraux de proximité, en particulier pour les services actifs de chirurgie, obstétrique, anesthésie.
Il faut reconnaître que le processus avait déjà été entamé avec la baisse programmée du nombre des internes en formation, et sans lesquels nos hôpitaux ne pourraient pas fonctionner. Et bien que ce soit clairement prévisible - je me souviens d'avoir fait une étude avec le médecin de mon hôpital et la région de Basse-Normandie ; on connaissait les chiffres - jamais aucun gouvernement n'a programmé un système de remplacement adapté avec le personnel nécessaire. Ce fut le premier coup meurtrier porté à l'hôpital général de proximité.
Alors qu'il faudrait former de nouvelles générations d'internes en nombre suffisant, sans oublier les internistes et les urgentistes - j'ai entendu maintes fois qu'on les réclamait - spécialités encore quasi inexistantes en tant que telles, les instructions actuelles limitent de façon draconienne le nombre des internes dans les spécialités dont nous avons besoin : obstétrique et anesthésie, voire - et ce sont les instructions dans ma région - quand elles ne les diminuent pas, pour la chirurgie, alors que l'on manque cruellement de personnels dans ces disciplines. Etrange façon de régler les problèmes, sauf s'il y a derrière une volonté cachée de fermer des services, ce qui m'apparaît hélas ! de plus en plus clairement.
En matière de formation, ce n'est pas de sciences humaines dont nous avons besoin en priorité dans les études médicales. Elles n'enseignent pas l'art du comportement en face de l'autre. En matière médicale, et les médecins me l'ont répété, c'est de formation au lit du malade dont nous avons besoin, là où se passe une bonne partie de l'apprentissage du diagnostic qui, hélàs ! est de plus en plus défaillant, ce qui entraîne la multiplication des examens.
Pour des raisons de coût mal étudiées à l'époque, comme on ne pouvait pas faire baisser autoritairement le nombre des malades, il avait été tout simplement décidé de réduire le nombre des médecins, afin d'abaisser les coûts. C'est simple, mais il fallait y penser ! Cependant, il s'agit tout de même là d'un étrange raccourci, qui fait que nous occupons le douzième rang mondial en matière de santé. Ce n'est tout de même pas très brillant, et cela devrait nous amener à nous interroger sur la pertinence de notre politique. La maîtrise médicalisée des dépenses de santé, l'aménagement du territoire, dont le maillage en réseau des hôpitaux est un élément fort, et les aspirations de la population ne sont pas antinomiques. C'est la façon dont on aborde ces questions qui les rend antinomiques.
En effet, nous sommes obsédés par des solutions techniques à caractère universel qui ne permettent aucune adaptation aux besoins du terrain, alors même que, précisément, cette adaptation constitue l'une des clés à la fois d'un aménagement opérationnel du territoire et d'un bon service de santé. On brandit comme un drapeau le grand concept de l'égalité d'accès aux soins pour tous, mais on organise insidieusement un système qui aggrave la situation de toute une partie de la population, déjà handicapée par son éloignement des infrastructures. Si par malheur, après étude, il apparaît qu'il est impossible de faire autrement que fermer l'hôpital, parce que cela peut également arriver, que l'on ait au moins le courage de le dire, mais que l'on n'explique pas aux gens, sans la moindre vergogne, que c'est pour leur sécurité, et que l'on organise au moins des relais entre l'hôpital et les territoires concernés. Ce n'est pas le cas, et cela m'inquiète.
On sait très bien, par exemple, qu'il y a environ 10 % d'accouchements à risque, que l'on sait maintenant détecter, et 10 % de cas graves, dans le flot des urgences, qui nécessitent une intervention chirurgicale immédiate. Ne vaudrait-il pas mieux mettre sur pied un tri de bonne qualité, qui serait effectué par des médecins expérimentés dans les hôpitaux généraux de proximité, dont le coût de fonctionnement est quand même beaucoup moins élevé, afin de transférer dans de bonnes conditions les patients relevant de services spécialisés, bien équipés sur le plan technique ?
Mais cela pose, là encore, le problème de la mise en place de réseaux bien conçus et celui de la formation d'urgentiste, que l'on évacue. Si j'insiste sur ce dernier point, c'est parce que nous connaissons bien ce problème dans ma région, où l'on va probablement fermer l'hôpital, au motif qu'il manque un urgentiste. Mais un tel poste est très difficile à pourvoir, et c'est pourquoi je suis très sensibilisée à ce problème.
On comprend bien que l'approche que je défends va totalement à l'encontre de la politique actuelle, qui s'appuie exclusivement sur une approche bien trop strictement administrative et macro-économique. Celle-ci est certes nécessaire en tant que moyen de mesure et élément de stratégie générale, mais elle ne suffit pas. L'homme souffrant a besoin, plus encore que les autres, de proximité, y compris sur le plan social.
La sécurité sanitaire, comme la sécurité tout court d'ailleurs, le bien-être de la population, comme ses moyens d'existence, relèvent d'une autre approche, complémentaire de la première, et imposent l'étude réelle des besoins et des solutions possibles, des contraintes et des coûts réels, qui ne doivent pas être occultés simplement parce qu'ils nous dérangent.
Mes chers collègues, ce que j'ai voulu faire, c'est plaider pour l'homme souffrant, l'homme en détresse qui a peur de la maladie et de la mort, mais qui affronte aussi les difficultés de l'existence, le chômage et la détresse sociale, qui sont au coeur de toutes les exclusions.
Aussi, pour conclure, poserai-je une question : comment peut-on espérer avoir une vision claire des coûts et de leur influence sur l'équilibre des comptes de la sécurité sociale si l'on mélange le financement de celle-ci avec celui du passage aux 35 heures ?
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Très bien ! Très bonne question !
Mme Anne Heinis. Le débat est plus que jamais faussé, ce qui permet, en toute impunité, de supprimer ce qui dérange, au nom bien sûr de l'égalité d'accès aux soins, de la sécurité et de la maîtrise des coûts, qui, en l'occurrence, ont plutôt bon dos. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi d'aborder les problèmes dans un ordre chronologique. Je commencerai bien entendu par la contraception.
Le débat sur cette question vient d'être relancé par la récente décision de Mme Ségolène Royal. A chacun son style ; je crois être fondé à penser, eu égard à certaines réactions, que la concertation préalable avec les associations de parents d'élèves et les associations familiales n'a peut-être pas été assez complète,...
M. Claude Huriet. Il n'y en a pas eu du tout !
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Lucien Neuwirth. ... ce qui est dommage sur un tel sujet, qui concerne au premier chef familles et éducateurs.
Cependant, et c'est une évidence, mieux vaut, pour une adolescente, recourir à une contraception d'urgence plutôt que de débuter sa vie de femme par un avortement qui, quelles que soient les conditions dans lesquelles l'acte est effectué, ne manque pas de provoquer une profond traumatisme, et, quelquefois, de laisser des traces indélébiles.
Depuis des années, j'ai l'impression de prêcher dans le désert en demandant que l'information sur la contraception soit poursuivie à l'intention des nouvelles générations : c'est un silence assourdissant, mes chers collègues, qui me répond. A ce sujet, qu'est devenu le Conseil supérieur de l'information sur la contraception, où était représenté l'ensemble des syndicats et des associations familiales ? Grâce à cet organisme, nous pouvions faire passer les messages dans le langage qui était compris par les différentes catégories d'enfants concernées. Par ailleurs, le planning familial est-il suffisamment soutenu dans l'accomplissement de ses missions ?
De la même façon, une sorte de complicité du silence s'était établie autour de la pilule du lendemain, sorte de « roue de secours » de la contraception, qui, néanmoins, relève de la politique contraceptive.
Je ne peux pas non plus passer sous silence le fait qu'il existe un problème de coût : en effet, un certain nombre de produits mieux dosés, plus adaptés, ne sont pas remboursables. Je sais que, de même, d'autres méthodes contraceptives moins astreignantes - vaccinations, implants, etc. - pourraient être développées par l'industrie pharmaceutique. De plus, nous avons la certitude que ces nouvelles méthodes sont attendues par le marché immense des pays à démographie galopante, laquelle va de pair, hélas ! avec une mortalité féminine considérable. Savez-vous, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que dans ces pays une femme meurt toutes les trois minutes en avortant ou en accouchant ? Est-il vraiment impossible, en élargissant le débat, d'engager des discussions sur le fond avec les laboratoires et l'industrie pharmaceutique ?
Voilà pour la contraception.
J'évoquerai aussi, à l'occasion de cette discussion budgétaire, les soins palliatifs. Mon intervention - vous m'en excuserez, madame la secrétaire d'Etat - se présentera essentiellement sous forme interrogative.
En effet, au cours de votre présentation devant la commission des crédits consacrés à la santé, vous n'avez pas prononcé les mots : « soins palliatifs ». Dois-je comprendre qu'aucun crédit budgétaire n'est destiné à améliorer la prise en charge sanitaire des personnes en fin de vie ou à former les professionnels de santé dans ce domaine ?
L'annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale n'a malheureusement pas été plus explicite : elle mentionne en effet seulement que « le dispositif de prise en charge à domicile des personnes en fin de vie sera renforcé ». Soit ! Mais de quel dispositif s'agit-il ? Comment ? Avec quels crédits ? Que se passera-t-il à l'hôpital ? Par ailleurs, est-il vraiment impossible de reconsidérer la situation des associations de soins et de services à domicile, qui risque de devenir critique ?
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Absolument ! C'est un véritable problème !
M. Lucien Neuwirth. Pour 1999, un financement de 180 millions de francs a été dégagé pour soutenir le développement des soins palliatifs ; il devrait y avoir, à la fin de l'année, au moins une équipe mobile ou une unité de soins palliatifs dans tous les départements - je m'en félicite - à l'exception, hélas ! de la Guyane et de la Guadeloupe. Mais ce n'est pas suffisant.
De même, en 1999, le fonds national d'action sanitaire et social de l'assurance maladie a débloqué 50 millions de francs, qui seront consacrés à la formation des bénévoles et à l'accompagnement. A ce sujet, où en est la procédure d'agrément des associations ?
J'avais proposé, lors de la discussion de la loi du 9 juin 1999, que ce financement soit pérenne et que l'assurance maladie finance chaque année ce type d'actions au profit d'associations agréées de bénévoles. Je regrette que cette disposition n'ait pas été acceptée par le Gouvernement, alors qu'elle avait été adoptée à l'unanimité par la commission des affaires sociales du Sénat. Quels crédits seront, cette année, consacrés par l'assurance maladie à la formation des bénévoles, et où en est la procédure d'agrément des associations ?
Par ailleurs, je voudrais savoir, madame la secrétaire d'Etat, quand seront pris les décrets d'application de la loi du 9 juin 1999. Je suis en effet saisi de nombreuses demandes de personnes qui savent que le Parlement a voté la création d'un congé d'accompagnement et qui voudraient pouvoir en bénéficier, et je suis contraint de leur répondre qu'il faut attendre la parution des décrets. Sur un tel sujet, j'estime que celle-ci ne devrait pas trop tarder.
Je voudrais aussi savoir si le projet de loi de modernisation du système de santé, que vous nous avez annoncé pour le printemps, comprendra des dispositions relatives à l'hospitalisation à domicile, et si le verrou que constitue le fameux « taux de change » sera enfin levé pour les soins palliatifs ou, pour le moins, adapté aux réalités du moment.
Enfin, en matière de prise en charge de la douleur, je voudrais connaître le nombre de postes de praticien hospitalier « fléché douleur » qui seront ouverts cette année.
J'ai aussi le plaisir de vous annoncer que j'ai participé mercredi 1er décembre, au Parlement européen, à la réunion de l'intergroupe « europe contre la douleur », qui compte des représentants de tous les groupes et qui prépare une résolution afin de désigner la lutte contre la douleur comme une priorité de santé publique en Europe.
J'ose espérer que la France, qui prendra prochainement la présidence de l'Union européenne, saura démontrer que, dans le domaine de la lutte contre la douleur, elle veut se hisser au rang que nous souhaitons unanimement lui voir occuper : le premier.
Relancer, pour l'établir d'une façon permanente, l'information sur la contraception pour les nouvelles générations, tenir les engagements de votre prédécesseur s'agissant du plan de trois ans de lutte contre la douleur, dynamiser le processus de soins palliatifs, voilà, madame la secrétaire d'Etat, trois lignes forces qui, toutes, vont dans la même direction : celle d'une vision humaniste d'une même qualité de vie, de la naissance à la fin de cette vie. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Unioncentriste.).
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de budget de la santé et de la solidarité est très particulier. Pour presque la moitié de son montant, qui atteint 90,8 milliards de francs, il témoigne de l'effort spécifique de l'Etat en faveur des laissés-pour-compte de ce que j'appelle la solidarité nationale, et particulièrement de ceux qui en sont exclus depuis longtemps parce qu'ils sont exclus du droit au travail.
Aussi, madame la secrétaire d'Etat, nous proposez-vous un projet de budget en progression de 13 %, parce qu'il inclut les 7 milliards de francs de contribution de l'Etat au financement de la couverture maladie universelle. A périmètre égal, cette progression est de 5 % par rapport à 1999. Nous ne pouvons que saluer et soutenir l'effort fait dans un certain nombre de directions, notamment en ce qui concerne la sécurité sanitaire, même si l'intervention privée est trop importante - ce qui, soit dit au passage, m'avait amené à m'abstenir lors du vote de la loi portant création des agences - la lutte contre le tabagisme, l'alcoolisme et la toxicomanie, la lutte contre la maltraitance des enfants, l'éducation à la santé et le renforcement des interventions en faveur de la reconnaissance des droits des femmes.
A ce propos, je souhaite que les 100 millions de francs inscrits à ce titre au projet de budget pour 2000 témoignent de la priorité donnée par le Gouvernement à la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines et à l'affirmation des droits de celles-ci, s'agissant notamment de l'accès à la contraception, que M. Neuwirth vient d'évoquer, et de l'IVG.
Il est bon, à mes yeux, que le Gouvernement s'engage à présenter, en annexe de la loi de finances, un état retraçant l'ensemble des crédits des différents ministères en faveur des droits des femmes, rendant ainsi plus lisibles les politiques menées en ce domaine. Cela répond à un besoin.
En même temps, je ne peux que déplorer la persistance de difficultés majeures pour un nombre trop important de nos concitoyens.
Le nombre de RMIstes continue d'augmenter, même si l'on observe un ralentissement.
Le nombre de personnes vivant de minima sociaux, c'est-à-dire au-dessous du seuil de pauvreté, n'a pas diminué et, au-dessus de ce seuil de pauvreté de 3 800 francs par mois, il y a les salariés précaires !
Cela me conduit à formuler deux remarques concernant l'action de l'Etat et la politique du Gouvernement.
La première, c'est qu'il y a urgence à répondre durablement, par l'emploi, par la protection sociale, par la lutte contre la précarité, aux besoins de nos concitoyens.
C'est ce que nos concitoyens attendent d'une politique de gauche, madame la secrétaire d'Etat, et c'est ce qu'ils expriment dans les enquêtes ou dans la rue quand ils réclament une politique plus à gauche !
Comment s'en étonner quand coexistent records boursiers, profits des entreprises supérieurs à 2 000 milliards de francs et licenciements massifs, précarité, qui produisent chômage de masse et exclusions ?
Qui plus est, les entreprises supportent de moins en moins le poids du chômage. En effet, comme chacun sait, seulement quatre chômeurs sur six sont indemnisés.
Comme le disait mon ami Guy Fisher, ce matin, il est vraiment urgent de s'attaquer à une réforme en profondeur de l'assurance chômage pour responsabiliser les entreprises, au regard tant de la réparation provisoire que du retour à l'emploi.
Est-ce à dire que l'Etat ne peut pas faire un peu plus, tout de suite, pour les plus démunis ?
Cela me conduit à formuler ma seconde remarque : le maintien de la croissance, les rentrées fiscales supplémentaires, le « mieux » économique ne font que rendre plus insupportables encore les inégalités croissantes et les exclusions.
Aussi les revalorisations prévues des minima sociaux ne me paraissent-elles pas à la hauteur, même si les efforts consentis en matière de cumul de revenu salarié et de RMI depuis l'an dernier sont positifs. L'augmentation est en effet de 1,2 % pour le RMI et l'AAH, soit 0,2 % hors inflation. Il convient aussi de rappeler que le RMI sera de 2 530 francs l'année prochaine, soit une augmentation de 30 francs.
La revendication des chômeurs d'une prime de Noël de 3 000 francs s'en trouve d'autant plus justifiée. Nous souhaitons, vous le savez, qu'elle fasse l'objet d'un collectif budgétaire.
Une augmentation plus substantielle des minima sociaux serait le signe que les fruits de la reprise économique profitent d'abord à la justice sociale.
Cette revalorisation des minima sociaux devrait se conjuguer avec un accroissement des moyens attribués aux structures qui les mettent en oeuvre, comme les caisses d'allocations familiales, les CAF.
En effet, c'est un nombre croissant de bénéficiaires que doivent traiter les CAF, et ce avec des moyens humains et matériels insuffisants.
Les CAF, malheureusement, font vivre de nombreuses familles, en leur fournissant parfois jusqu'à 80 % de leur budget. C'est dire à quel point les retards de versement, qui peuvent atteindre plusieurs mois, peuvent avoir des conséquences dramatiques pour les familles et conduire à des comportements qui rendent plus difficiles encore les conditions de travail des personnels.
Je réitère donc ma demande, madame la secrétaire d'Etat, que l'on dote très rapidement les CAF de moyens et de ressources suffisants.
Je souhaite maintenant faire quelques commentaires sur d'autres aspects de ce budget.
Les crédits de la CMU s'élèvent à 7 milliards de francs, soit les deux tiers de la progression totale du budget. En même temps, ces 7 milliards de francs - selon les prévisions, ce devait être 7,2 milliards de francs - correspondent, pour la majeure partie, à un transfert de dépenses existantes. L'intervention nouvelle de l'Etat est donc, en fait, cette année de 1,5 milliard de francs.
Aujourd'hui, je me dois d'exprimer quelques craintes quant à l'application de la CMU, déjà bridée, avant même d'avoir vu le jour, par une logique de limitation des remboursements, de paniers de soins indépassables en matière de remboursement, comme l'ont exigé la CNAM et les partenaires complémentaires, limitation que le Gouvernement a acceptée, si j'en juge par les décrets.
Les conditions très restrictives pour les étrangers - que le Conseil d'Etat ne fait pas siennes - et pour les étudiants, si j'en crois toujours les décrets d'application, vont dans le même sens.
Par ailleurs, les effets de seuil résultant du plafond de 3 500 francs, que nous avions estimé trop bas, ont pour résultat d'exclure un grand nombre de personnes du dispositif et de les faire retomber dans la démarche stigmatisante du recours à l'aide sociale.
On ne peut pas se contenter de recommander au personnel médical et social de traiter ces cas avec bienveillance, il est nécessaire d'instaurer, par exemple, une cotisation sociale sur les revenus financiers des entreprises, qui permettrait de dégager des moyens, notamment pour ces salariés précaires à peine mieux lotis que les personnes qui sont en dessous du seuil de 3 500 francs.
La volonté affirmée par le Gouvernement de pénaliser les entreprises qui recourent indûment au travail précaire va évidemment dans ce sens.
J'ajoute que la mise en application de la loi au 1er janvier suppose également que l'on donne les moyens nécessaires aux différents centres de la CNAM, qui verront augmenter leur charge de travail alors que nombre d'entre eux sont déjà asphyxiés.
Les personnels ont exprimé, à ce sujet, de fortes inquiétudes, auxquelles le Gouvernement devra répondre rapidement. En effet, l'on peut se demander si les 1 400 postes dont la création a été confirmée lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale seront suffisants pour faire face aux besoins existants et nouveaux.
Je dirai quelques mots sur la politique du Gouvernement en matière de lutte contre la toxicomanie.
L'approche globale, fondée sur les comportements plus que sur les produits consommés, est intéressante, et j'apprécie les efforts budgétaires en faveur de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT, et du développement du dispositif actuel des programmes d'échanges de seringues et des lieux d'accueil des toxicomanes.
Mais cette politique de réduction des risques ne peut exempter l'Etat d'un effort important en matière de prise en charge médico-sociale, encore très insuffisante en France. Il est également nécessaire de développer fortement une politique de prévention et de recherche à la hauteur de la gravité du problème.
S'agissant de la lutte contre le sida et les maladies sexuellement transmissibles, les crédits restent stables et d'ailleurs quelque peu opaques puisque globalisés, ce qui empêche de distinguer entre maladies transmissibles, hépatite C, etc.
Si les thérapies font que l'on meurt moins du sida - c'est heureux ! - les cas de sida continuent de progresser, en France, de 3 % cette année.
En outre, les personnes touchées par la maladie sont dans une situation de « grande vulnérabilité » comme le montre une étude de l'association AIDES publiée au mois d'octobre et selon laquelle les trois quarts des personnes séropositives qui fréquentent l'association ont un revenu inférieur à 4 000 francs par mois, 6 % n'ont aucun revenu, 25 % ont moins de 3 000 francs par mois et près de 50 % touchent à peine les minima sociaux.
Pourtant, la gravité de la situation justifierait que l'on redouble d'efforts, d'autant que - je tiens à le préciser - au niveau mondial, le sida n'a jamais autant tué qu'en 1999. Selon le directeur de l'ONUSIDA, le sida est devenu la menace numéro un pour le développement de nombreux pays, car 70 % à 80 % des malades vivent dans les pays du Sud.
Votre prédécesseur s'est honoré en appelant à la solidarité internationale contre ce fléau, madame la secrétaire d'Etat. Selon nous, la France ne doit pas hésiter à donner l'exemple en ce domaine.
Dans notre pays, la prise en charge médicale et sociale des malades du sida nécessite des améliorations profondes et rapides. La grille de l'allocation aux adultes handicapés, qui n'a pas évolué depuis une dizaine d'années, semble trop rigide pour les malades frappés par cette maladie. Elle devrait leur permettre un retour progressif à l'emploi, par une modulation de l'aide en fonction des possibilités offertes, la plupart d'entre eux souhaitant retrouver un travail, sans toujours y parvenir.
S'agissant de la lutte contre le saturnisme, les mesures actuelles semblent trop limitées aux pathologies déclarées. La présence de plomb dans le sang concerne, au-delà des cas les plus dramatiques, comme ceux des enfants, que j'ai eu, hélas ! à connaître en tant qu'élue parisienne, un éventail important de la population, contaminée notamment par l'eau issue des canalisations en plomb et par l'environnement. C'est un véritable problème de santé publique.
Il faudrait procéder à des investigations plus larges - c'est possible et pas très coûteux - permettant une réelle prévention, plutôt que d'attendre que les pathologies se déclarent.
Permettez-moi d'ailleurs, au travers de cet exemple, de regretter l'absence de moyens supplémentaires pour la sécurité sanitaire environnementale, alors qu'un rapport parlementaire souligne les insuffisances en la matière et que, parallèlement, des crédits supplémentaires sont accordés aux agences sanitaires.
Permettez-moi de saisir aussi l'occasion de l'examen de ce budget, dont les crédits consacrés à l'organisation hospitalière, en diminution, n'ont pas toujours été bien utilisés jusqu'à présent puisqu'ils ont surtout servi à des fermetures de lits, pour souligner, une nouvelle fois, la nécessité de repenser l'offre de soins hospitaliers.
Déjà, au mois de juin dernier, un article de l'union hospitalière de la région d'Ile-de-France, l'UHRIF, relevait que « les hôpitaux soumis à la contrainte financière n'ont pas pu faire face, en matière d'urgence notamment ».
Quant à la Fédération des médecins de France, la FMF, elle vient de dénoncer le fait que la revalorisation des cotisations CNRACL ne soit pas financée.
C'est cette contrainte financière qui est également dénoncée par les personnels actuellement en grève dans les hôpitaux parisiens. Vous le savez, cette grève risque de s'étendre parce que les personnels en ont assez. Les établissements franciliens enregistrent en effet une très faible augmentation de leur taux - 1,25 % - qui, compte tenu de l'inflation et des facteurs salariaux, se traduit par une diminution des moyens dont disposent les médecins pour traiter leurs malades.
Du fait de ces mesures, les hôpitaux, qui doivent faire face tous les jours à des situations de précarité, sont au bord de l'asphysie. Les objectifs de fermeture décidés par le schéma régional d'organisation sanitaire et sociale, le SROSS, ne font qu'aggraver les problèmes en déplaçant les malades, comme à l'hôpital Saint-Antoine, lui aussi en grève.
Outre les questions de l'indispensable démocratie sanitaire, dont nous avons, à de nombreuses reprises, souligné l'importance, et des moyens humains et matériels à débloquer, il me semble également essentiel de relever les effets pervers du mode d'évaluation de l'activité hospitalière, notamment sur les établissements qui proposent des traitements hautement spécialisés, comme c'est le cas à Paris.
En effet, ces traitements ne sont pas comptabilisés à leur valeur et risquent de conduire à des décisions purement comptables de fermeture de services, alors que les malades ont besoin de ces soins. Ce risque existe aussi, selon moi, avec la tarification à la pathologie, dont la généralisation ne devrait pas être décidée sans une très sérieuse évaluation de l'expérimentation décidée ce printemps.
Nous apprécions, par ailleurs, l'augmentation de 3,2 % du financement des centres d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS, qui permettra la création de 500 places et de centres d'accueil de 100 places.
J'aimerais cependant attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, même si cela n'est pas directement lié au débat budgétaire, sur l'inquiétude des 20 000 cadres du secteur social et médico-social, face au refus que vous avez opposé à la demande d'agrément de l'avenant n° 265 qui a été signé par les partenaires sociaux.
La signature de cet avenant rendrait effective une amélioration sensible des conditions d'exercice professionnel de ces catégories, au-delà du seul respect des salaires, et contribuerait à remédier à une situation préjudiciable aux associations, qui rencontrent des difficultés grandissantes, vous le savez, à recruter des cadres.
Concernant la prévention, je tiens à souligner que le manque de médecins du travail, de médecins scolaires et de personnels médicaux reste préoccupant.
La décision prise par Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, que M. Neuwirth a opportunément rappelée, de donner aux infirmières scolaires la difficile mission de répondre à la détresse des jeunes filles face à des grossesses non désirées - décision que je considère comme positive, faute de mieux - ne fait qu'éclairer le besoin urgent de disposer des personnels compétents en nombre suffisant. C'est loin d'être le cas, vous le savez, et je ne manquerai pas de le rappeler à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.
Pour conclure, j'indique que, bien entendu, nous ne partageons pas les critiques de la majorité sénatoriale, qui s'est opposée à la couverture maladie universelle, aux emplois-jeunes, qui critique « la croissance non maîtrisée des dépenses sociales », traque les abus de RMI et déplore la création d'emplois publics.
Sous les réserves que j'ai émises, votre budget, madame la secrétaire d'Etat, est néanmoins encourageant et nous ne suivrons donc pas l'avis de la commission : nous voterons le projet de budget de la santé et de la solidarité pour 2000. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget de la santé et de la solidarité pour 2000 progresse de 13,3 %, contre 3,1 % en 1998 et 4,5 % en 1999. Je tenais à le saluer d'emblée, puisque la progression est constante.
Cette année, le total du budget s'élève à 90,81 milliards de francs, contre 76,7 milliards de francs en 1999. Cela illustre les priorités fixées depuis deux ans par le Gouvernement et réaffirmées cette année dans le domaine de la lutte contre les exclusions, dans le domaine de la protection des populations les plus fragiles et dans le domaine de la sécurité sanitaire.
Cette progression résulte en partie des modifications de structures importantes apportées à ce budget. Je pense, bien sûr, à l'inscription de la subvention de l'Etat au fonds de financement de la couverture maladie universelle, qui s'élève à 7 milliards de francs pour la partie protection complémentaire.
Vous connaissez notre attachement à cette grande réforme sociale, qui va permettre à plus de 6 millions de Français de ne plus renoncer à se faire soigner et à quelque 700 000 d'entre eux de bénéficier d'une prestation de sécurité sociale de base.
Certes, il convient de préciser que cette dépense nouvelle n'est couverte par le budget que pour 1,4 milliard de francs, le reste provenant du retour de la dotation globale de décentralisation départementale et de la participation des organismes de protection complémentaire. Il n'en reste pas moins que la progression réelle du budget est de 5 milliards de francs, soit une augmentation de 6,2 %, ce qui est loin d'être négligeable.
Je vais maintenant m'attacher au trois grandes priorités bien lisibles de ce budget.
Le première concerne plus particulièrement la partie consacrée à la solidarité, notamment à la lutte contre les exclusions et à la protection des populations les plus fragiles.
Comme vous le rappelez, madame la secrétaire d'Etat, pour les personnes les plus démunies, des préalables doivent être levés avant de s'engager dans une démarche de retour à l'emploi. Une telle action relève de votre budget, qui bénéficie à ce titre de moyens supplémentaires.
Ces préalables sont de deux ordres.
Le premier découle des engagements du programme de la loi contre les exclusions de mars 1998, notamment en matière d'accompagnement social individualisé et d'hébergement d'urgence, avec le fonds d'aide aux jeunes et le programme TRACE.
A cet égard, le financement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale permettra de mettre en place, cette année, cinq cents places supplémentaires, et les capacités d'accueil des centres de formation des travailleurs sociaux ont été développées.
A cette occasion, je me permets d'affirmer ma satisfaction au sujet de l'affectation des crédits consacrés aux subventions d'investissement social, qui sont ciblés sur les thèmes prioritaires des volets sociaux des prochains contrats de plan Etat-région et que nous relaierons bientôt, je l'espère.
Le second préalable prend en compte l'ajustement des dotations des minima sociaux financés sur ce budget : pour le RMI, l'augmentation est de 2,3 milliards de francs, les crédits atteignant 28,7 milliards de francs.
Cette importante augmentation traduit la revalorisation de l'allocation de 3 % en 2000 ainsi que l'effet de la revalorisation des minima intervenue en 1999 et la montée en charge des mesures d'intéressement à la reprise de l'emploi, avec la possibilité de cumuler la prestation et des revenus.
A propos du RMI, je voudrais répondre à ceux qui contestent inlassablement la portée du « I » de RMI...
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Eh oui !
M. Bernard Cazeau. ... et mettre l'accent sur une évolution intéressante concernant l'insertion. En effet, selon une enquête récente, un tiers des allocataires sortent du dispositif après six mois, et la moitié après un an. Certes, il s'agit très souvent, d'après les statistiques, d'individus âgés de moins de vingt-neuf ans, mais le fait mérite d'être souligné.
Il me paraît également nécessaire d'associer le travail important des départements dans la part prise dansl'insertion de ces publics.
Le problème reste la chronicité importante de certains RMIstes de longue durée - ceux que vous appelez, monsieur le rapporteur pour avis, « le noyau dur » -,...
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Eh oui !
M. Bernard Cazeau. ... qui ont du mal, malgré un accompagnement social individualisé fort, à se réinsérer dans l'emploi.
Les crédits de l'allocation aux adultes handicapés connaîtront un accroissement de 781 millions de francs, soit une progression, cette année, de 3 %, portant la dotation à 25,55 milliards de francs.
A ce sujet, je salue votre volonté, madame la secrétaire d'Etat, ainsi que celle de Mme Martine Aubry, de poursuivre l'intégration des personnes handicapées dans la société à tous les âges et dans toutes les situations, plus particulièrement, d'ailleurs, pour ceux qui présentent les handicaps les plus pénalisants.
Tous budgets confondus, des actions nouvelles pour 1,1 milliard de francs seront mises en place en 2000 pour toutes les formes de handicap, que ce soit à travers la prise en charge par les CAT, les MAS, les FDT, sans compter les handicaps spécifiques, tels que ceux qui concernent les autistes et les traumatisés crâniens, ou que ce soit à travers l'intégration des handicapés dans le milieu scolaire, dans le monde du travail ou dans l'autonomie de vie à domicile.
Bref, c'est la poursuite d'un plan pluriannuel 1999-2003 qui, à terme, doit aboutir à la création de 16 500 places nouvelles dans les établissement spécialisés.
Cependant, malgré des efforts notables dans la politique en faveur des handicapés, certains progrès restent à accomplir en ce qui concerne tant l'intégration en milieu de vie ordinaire que la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes.
A cet égard, la réforme de la loi de 1975 est devenue urgente afin de répondre aux besoins nouveaux.
La deuxième grande priorité de ce budget concerne la sécurité sanitaire et le renforcement des politiques de santé. Il s'agit là de deux priorités bien lisibles. En effet, le poste « santé », qui regroupe les agences sanitaires et la santé publique, s'élève à 4 milliards de francs, soit une hausse de 4,9 % par rapport à l'année dernière.
Nous nous attacherons successivement, à travers ces deux priorités, aux agences de sécurité sanitaire et à quelques éléments spécifiques de la politique de santé publique.
Avec un budget de 495,3 millions de francs, soit 156 millions de francs supplémentaires, on assiste à une véritable montée en charge des agences de sécurité sanitaire.
Les trois agences nouvellement créées, à savoir l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments et l'Institut de veille sanitaire, se répartissent ainsi 300 millions de francs.
D'aucuns feront la fine bouche en critiquant l'origine et la répartition de leurs ressources. Il n'en reste pas moins que les 109 millions de francs de crédits nouveaux devraient leur donner une véritable bouffée d'oxygène.
Les crédits restants sont affectés aux établissements préexistants, tels que l'OPRI, l'Etablissement français des greffes et l'Etablissement français du sang, ainsi qu'à l'ANAES qui, grâce à 16,2 millions de francs supplémentaires, pourra, nous l'espérons très fortement, atteindre sa vitesse de croisière.
Concernant les politiques de santé publique, les orientations tournées vers la prévention sont non seulement renforcées - 149 millions de francs soit prévus à cet effet - mais aussi clarifiées grâce à un effort de ciblage et de cohérence en faveur des différentes interventions.
Notons, dans la lutte contre les fléaux sanitaires, une augmentation des crédits de 6,3 % pour la lutte contre les pratiques addictives, dont 2 millions de francs pour la formation au sevrage tabagique et 5 millions de francs pour la prévention de l'alcoolisme, tandis que la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie reçoit une subvention nouvelle d'un montant de 81,1 millions de francs.
Notons ensuite la réaffirmation de la dimension régionale, à travers la dotation supplémentaire aux observatoires régionaux et un crédit complémentaire de 3,2 millions de francs pour les politiques régionales de la santé.
Notons enfin la volonté de modernisation des offres de soins, qui doit passer par l'amélioration des crédits affectés au fonctionnement des ARH et au travail qu'elles font sur les SROS ainsi que la montée en charge des crédits en faveur du FIMHO, le Fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux : 200 millions de francs d'autorisations de programme et 265 millions de francs de crédits de paiement, soit une augmentation de 115 millions de francs, sont prévus. Cette augmentation est notamment destinée à prendre en compte le retard pris dans la montée en charge du FIMHO. En effet, les crédits ne sont pas consommés au rythme où ils devraient l'être, puisqu'une grande partie des dossiers présentés par les ARH ne sont pas recevables.
En vue de remédier à cette situation non satisfaisante, il pourrait être opportun de prendre en compte les recommandations faites par la Cour des comptes à cet égard et d'améliorer le fonctionnement de la procédure instituée pour la sélection des dossiers.
Globalement, on peut cependant se féliciter que le Gouvernement axe les orientations de notre système de santé vers une approche plus préventive que curative.
La troisième grande priorité concerne le renforcement des moyens humains du ministère.
Il s'agit d'une priorité constante. Comme pour le secteur de l'emploi, le budget de la santé et de la solidarité pour 2000 poursuit et amplifie les mesures obtenues en 1998 et 1999.
Outre la hausse très notable des crédits, madame la secrétaire d'Etat, ce budget apporte une autre satisfaction. Au-delà de la seule logique de moyens, il a le mérite de s'inscrire également dans une logique d'objectifs, traduisant une politique cohérente de santé publique.
Nous voterons donc les crédits qui vous sont attribués pour 2000.
Avant de terminer, je souhaiterais attirer votre attention sur deux points.
Le premier concerne la couverture maladie universelle : il ne s'agit pas ici de refaire le débat, mais de répondre à deux questions. D'une part, s'agissant de la critique d'atermoiement faite au Gouvernement sur la parution des décrets d'application, pouvez-vous nous préciser, madame, le calendrier de sa mise en oeuvre, dans le cas, bien sûr, où elle serait retardée ? D'autre part, serait-il possible d'obtenir des précisions sur le contenu du panier de soins, en ce qui concerne plus particulièrement l'optique et les prothèses dentaires ? En effet, les niveaux prévus à ce jour nous paraissent notablement insuffisants.
Le second point sur lequel je souhaite attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, a trait à la mise en place de la nouvelle tarification des établissements accueillant des personnes âgées, qui doit substituer au mécanisme précédent une tarification prenant en compte le degré de dépendance des personnes âgées hébergées. Si elle a le mérite d'instaurer une vérité des coûts, de définir qui finance quoi, d'insister sur l'exigence de qualité dans l'accueil et la prise en charge des personnes âgées, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, elle n'est pas sans poser des problèmes, dont certains sont peu acceptables.
Faute d'un financement adéquat, il en résulte un renchérissement des coûts. Mais, ce qui est plus grave, c'est que la vérité des coûts se traduit dans ces établissements par des augmentations substantielles de frais à la charge des résidents ou de leur famille.
Ainsi, d'après les premières simulations réalisées dans mon département, mais qui tendent à se vérifier dans bien d'autres, il en résulterait, en moyenne, une charge supplémentaire de 50 francs par jour, soit 1 500 à 2 000 francs par mois pour les personnes les plus handicapées. En outre, et toujours aux termes de ces simulations, il apparaît que les personnes les moins dépendantes paieront moins, autrement dit, les personnes en meilleure santé seront favorisées par rapport aux personnes lourdement dépendantes.
Cette situation quelque peu complexe, madame la secrétaire d'Etat, mériterait d'être réétudiée et clarifiée. Nous espérons que ce sera le cas dans les mois qui viennent.
M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget de la santé et de la solidarité me donne l'opportunité de vous entretenir de la couverture sociale des 1 800 000 Français qui vivent hors de nos frontières et dont je suis un des représentants.
Je ferai très rapidement un bref rappel historique de cette couverture sociale, notamment en ce qui concerne l'assurance maladie et les accidents du travail.
La commission Bettencourt, qui porte le nom de notre ancien collègue, s'était penchée, dès 1976, à la demande des entreprises françaises envoyant du personnel à l'étranger, sur une couverture sociale étatisée en leur faveur. De ces travaux auxquels j'avais participé, est issue la loi du 31 décembre 1976 instaurant une couverture maladie-maternité, accidents du travail et maladies professionnelles au bénéfice des salariés expatriés.
Elu sénateur en 1977, j'ai proposé et obtenu l'extension de cette couverture sociale aux non-salariés et aux pensionnés français. Ce texte avait été adopté à l'unanimité par le Sénat.
Le 13 juillet 1984, M. Bérégovoy, alors ministre des affaires sociales, a étendu par un texte, dont j'avais été le rapporteur, cette couverture sociale à tous les Français expatriés. Aux termes de ce texte, la caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger devenait autonome et était dotée d'un conseil d'administration comprenant vingt et un membres, dont dix-huit membres élus par le Conseil supérieur des Français de l'étranger - expression du suffrage universel direct de nos compatriotes - deux membres représentant le MEDEF et un la Mutualité française. La tutelle est également représentée au sein de ce conseil d'administration, madame le secrétaire d'Etat, puisque y siègent des représentants de votre ministère et de ceux du budget et des affaires étrangères, ainsi que des représentants de la caisse d'assurance vieillesse et du personnel.
Si le Conseil supérieur des Français de l'étranger avait été retenu comme corps électoral, c'est parce que, à l'époque, une étude avait montré qu'organiser des élections dans les cent quarante pays où sont installés les assujettis était tout à fait impossible. La loi Bérégovoy en avait décidé ainsi.
Depuis cette époque, mes chers collègues, de nombreux amendements sont venus améliorer les textes en vigueur.
Quelle est, madame le secrétaire d'Etat, après vingt-et-un ans d'existence, la situation de cette caisse de sécurité sociale des Français à l'étranger ?
J'ai l'honneur de présider cette caisse, dont le conseil d'administration est actuellement réuni à son siège social. Je l'ai quitté il y a très peu de temps et je le regagnerai après cette intervention.
Cent vingt mille Français sont couverts dans le monde par cette caisse de sécurité sociale. Ses finances sont saines et elle a la réputation de répondre rapidement aux besoins des expatriés. Elle doit faire face à la concurrence redoutable d'organismes privés, qu'ils soient français ou étrangers, le plus souvent des compagnies d'assurance.
Il s'agit d'un régime volontaire, c'est-à-dire non obligatoire, qui offre donc aux représentants de nos entreprises françaises à l'étranger, à la carte, un système de couverture sociale, qui n'est pas celui de la sécurité sociale mais qui peut leur convenir.
Au point où nous en sommes, madame le secrétaire d'Etat, tout est-il parfait au sein de cette caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger ?
Eh bien, je vous répondrai par la négative, car un débat récurrent déjà ancien agite son conseil d'administration, et plus largement le Conseil supérieur des Français de l'étranger, qui est l'organisme consultatif de nos compatriotes expatriés ainsi que les associations représentatives de ces derniers.
Ce débat, il faut que nous tentions, madame le secrétaire d'Etat, de le trancher.
Deux thèses s'affrontent.
La première est celle de la majorité du conseil d'administration de la caisse et du Conseil supérieur des Français de l'étranger. Elle rappelle que la caisse des Français de l'étranger est une caisse d'assurance volontaire, soumise à la concurrence redoutable d'organismes privés, qu'elle doit assurer son équilibre, qu'elle ne bénéficie d'aucune aide de l'Etat, et qu'elle a fait dans le passé un effort important pour instaurer plus de justice sociale.
Elle rappelle également que, à deux reprises, elle a diminué le taux de ses cotisations, ce qui est rare en matière de sécurité sociale, qu'elle a étendu sa couverture aux non-salariés et aux pensionnés, deux régimes fortement déficitaires, que la loi Bérégovoy a créé deux catégories de cotisants, l'une cotisant au plafond de la sécurité sociale, l'autre aux deux tiers de ce plafond ; enfin, qu'un nouveau texte a créé une troisième catégorie de cotisants ne cotisant qu'à la moitié du plafond de la sécurité sociale.
En outre, au sein de cette caisse, a été créé un fonds d'action sanitaire et sociale qui aide beaucoup de gens en difficulté, et un certain nombre de mesures importantes ont été prises au bénéfice de nos compatriotes résidant dans des pays en proie à des guerres civiles ; je pense notamment à l'Afrique, et plus particulièrement au Zaïre et au Congo, mais aussi, plus récemment, à la Bosnie.
J'ajoute que, pendant deux ans, la caisse a accompagné la dévaluation du franc CFA au profit de nos compatriotes vivant dans les zones concernées.
En bref, la petite caisse des Français de l'étranger ne peut pas couvrir toute la misère des Français de l'étranger, et ce n'est pas sa vocation. D'ailleurs, madame le secrétaire d'Etat, ma collègue Mme Cerisier-ben Guiga, s'est vu confier par Mme Aubry une mission consistant à examiner la situation de nos compatriotes en extrême difficulté. Telle est la première thèse.
La seconde thèse est celle de la minorité du conseil d'administration de la caisse et du Conseil supérieur des Français de l'étranger. Aux termes de celle-ci tout cela n'est pas suffisant, et elle préconise de créer une quatrième catégorie de cotisants, de déplafonner la première catégorie qui cotise au plafond de la sécurité sociale, de puiser dans les réserves techniques qui sont constituées pour les accidents du travail et les maladies professionnelles et de faire appel à l'aide de l'Etat. En bref, la caisse devrait s'ouvrir aux plus défavorisés, et si elle devenait déficitaire - ce qui n'est pas son cas depuis sa création - après tout, cela ne serait pas un drame !
Alors, madame le secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous rappeler ce que votre ministère a fait, avec raison, pour essayer de cerner la situation précise de cette caisse.
Nous avons d'abord eu droit à un audit de l'inspection générale du ministère des affaires sociales du mois de juin et au mois de décembre 1998. Quelles sont ses conclusions ?
Je cite son rapport : « Ces évaluations conduisent la mission de l'IGAS à conclure sur ce point que les réserves techniques sont à leur niveau actuel, à la fois nécessaires et suffisantes, et qu'elles ne doivent en aucun cas servir à gager des dépenses nouvelles de la caisse. La prudence s'impose quant à une utilisation éventuelle des cotisations, s'agissant d'une caisse où l'affiliation n'est pas obligatoire. Une telle mesure risquerait à terme de compromettre l'équilibre de la caisse, voire sa pérennité - il s'agit de son ouverture à une catégorie de cotisant beaucoup plus large. Elle aurait des conséquences sociales défavorables, spécialement pour les cotisations de troisième catégorie et pour les pensionnés.
« Sur l'idée que les adhérents de la troisième catégorie, ceux qui cotisent à la moitié du plafond de la sécurité sociale, sont moins consommateurs de soins, les tendances actuelles observées sont plutôt contraires.
« La caisse des Français de l'étranger est une caisse de taille modeste, mais qui gère de façon autonome des contraintes importantes et inhabituelles.
« La caisse doit faire face aux conséquences de son autonomie.
« La caisse est financée par ses propres cotisations à l'exclusion de tout lien financier avec d'autres régimes d'assurance maladie et doit assurer seule l'équilibre de ses dépenses et de ses recettes, alors même que la permanence de ses adhérents n'est pas garantie.
« Malgré cette fragilité constitutive, la caisse des Français de l'étranger a su évoluer de façon positive tout en favorisant, par solidarité interne, l'accès de catégories de Français expatriés plus nombreuses et moins favorisées. »
En résumé, madame le secrétaire d'Etat, vous le voyez, ce rapport conclut qu'une grande prudence doit être observée au sujet de cette caisse d'importance moyenne soumise à des risques importants qui peuvent la désé-quilibrer.
La caisse des Français de l'étranger - à son grand bonheur ! - vient de bénéficier d'un contrôle approfondi du CODEC de Seine-et-Marne, le comité départemental d'examen des comptes des organismes de sécurité sociale, auquel s'étaient joints les services financiers du ministère du budget. Ce contrôle s'est déroulé du mois de juin au mois de septembre 1999.
Que dit le rapport du CODEC dont nous venons d'avoir connaissance ? « La caisse des Français de l'étranger depuis sa création présente un bilan positif. Cette caisse autonome de sécurité sociale demeure dans l'obligation de préserver son équilibre financier, parce qu'elle ne bénéficie pas des aides compensatoires de l'Etat. »
L'IGAS précise : « Un agent chargé de la communication serait nécessaire pour l'enjeu qui est le sien. »
Le CODEC de Seine-et-Marne affirme que « la tenue de la comptabilité est assurée de façon globalement satisfaisante ». L'IGAS dit : « La gestion financière et de trésorerie réalisée n'appelle pas de commentaire particulier » et elle conclut en émettant un avis favorable avec recommandations sur l'approbation des comptes qui sont présentés par l'organisme.
Autrement dit, madame le secrétaire d'Etat, le contrôle du CODEC vient confirmer en de très nombreux points les conclusions du rapport de l'inspection générale du ministère des affaires sociales.
A la suite de ce rapport du CODEC, vos services ont demandé à la caisse des Français de l'étranger des précisions complémentaires sur les différentes branches et sur l'équilibre des comptes.
Notre direction a répondu aux questions qui lui ont été posées.
Vous avez ensuite souhaité que nous fassions vérifier par un actuaire d'une compagnie d'assurance les réserves de notre caisse de sécurité sociale. Nous vous avons demandé, madame, de nous fournir une liste d'actuaires. Vos services l'ont fait et nous avons choisi le premier de la liste, à qui nous avons confié une mission. Il a rendu son rapport il y a quelques jours.
Que dit cet actuaire dans son rapport ? « Les entreprises d'assurance se protègent contre les conséquences de catastrophes par les réassurances. La réassurance n'étant pas prévue pour les caisses de sécurité sociale, la caisse des Français de l'étranger devrait faire face, seule, aux conséquences de tels événements. »
Cet état des lieux montre que les règles de fonctionnement de la caisse des Français de l'étranger ne sont pas adaptées sur ce point.
Au terme du rapport que l'actuaire présentera demain devant le conseil d'administration, « il ressort de l'examen que le niveau des réserves de la caisse des Français de l'étranger est insuffisant, compte tenu, d'une part, des engagements qu'elle a contractés, et, d'autre part, des contraintes de fonctionnement qui lui sont imposées. »
Je constate donc, madame le secrétaire d'Etat, que, contrairement à ce qui a été dit par certains, les réserves de la caisse des Français de l'étranger, pour faire face aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, pour faire face à des explosions sur des plates-formes pétrolières sont insuffisantes. Imaginez l'ampleur des responsabilités de notre caisse quand des accidents d'une telle gravité se produisent !
Je vous interroge donc aujourd'hui, madame le secrétaire d'Etat : ce débat récurrent entre la première thèse et la seconde, que je vous ai exposé, doit-il continuer ? Pour une caisse qui est soumise à une concurrence vis-à-vis d'organismes privés, franchement, je ne le pense pas.
Personne ne le conteste, tous les rapports indiquent que la caisse des Français de l'étranger est soumise à une concurrence redoutable de la part d'organismes privés qui, bien entendu, ne sont pas là pour nous faire des cadeaux.
Mme Aubry a exprimé, à plusieurs reprises, ici même, au Sénat, le souhait que l'équilibre de la caisse soit respecté. Elle m'a indiqué que nous n'avions pas à attendre d'aide particulière de l'Etat en ce domaine. Dès lors, madame le secrétaire d'Etat, devons-nous rester figés ? Nous le pourrions, compte tenu des rapports qui viennent d'être élaborés.
Mais j'ai interrogé hier soir les membres de la majorité de mon conseil d'administration. Je leur ai fait part de tous les contrôles qui sont intervenus ainsi que de tous les audits dont nous avions pu avoir connaissance. Et je suis en mesure de vous dire aujourd'hui que, comme dans le passé - je vous ai donné la liste des avancées en matière sociale qui ont été réalisées au sein de cette caisse - ils ne sont pas figés.
Le président que je suis ne l'est pas davantage. Je l'avais réaffirmé lors de la suspension de la rétroactivité en 1998.
Il est donc temps, madame le secrétaire d'Etat, et c'est la proposition que je présenterai demain au conseil d'administration de la caisse des Français de l'étranger, d'élargir la troisième catégorie de cotisants qui paient actuellement leur quote-part à concurrence de 50 % du plafond de la sécurité sociale à de nouveaux cotisants qui cotiseraient à 40 % du plafond de la sécurité sociale si leurs revenus sont inférieurs au tiers dudit plafond, c'est-à-dire sont à peu près à un tiers en dessous du SMIC.
Si le conseil suit ma proposition, ce sera une avancée importante vis-à-vis de nos compatriotes français. Nous avons fait nos calculs et je suis en mesure de vous dire qu'avec cette proposition notre caisse serait juste en équilibre. Elle n'enregistrerait plus le moindre excédent.
Il va donc falloir que nous renforcions les contrôles sur des branches déficitaires, comme celle des non-salariés. Il faudra aussi que vos services nous aident pour réaliser ces contrôles.
Mais, madame le secrétaire d'Etat, si nous arrivons à mettre ce système au point, nous parviendrons à maintenir à nos compatriotes français qui vivent à l'étranger, qu'ils travaillent pour de grandes entreprises ou pour de petites et moyennes entreprises, une couverture sociale sans déplafonner les cotisations de ceux qui appartiennent à la première catégorie. Nous le ferons également pour nos compatriotes qui sont installés à titre individuel.
Vous savez comme moi le rôle qu'ils jouent les uns et les autres pour notre pays, pour l'exportation de la France. Si nous réussissons, nous repartirons de l'avant. C'est le souhait que j'exprime devant vous aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, chers collègues, tout observateur qui se limiterait à un examen rapide des évolutions nominales des crédits de votre ministère ne pourrait que se réjouir de la forte progression de ce budget, et ce, d'autant plus que, s'articulant autour de deux volets, l'un relatif au développement social, l'autre à l'intégration et à la lutte contre l'exclusion, il pourrait penser que ce budget affiche une réelle volonté gouvernementale de combattre l'exclusion.
Cependant, en observant le contenu de ce budget, on s'aperçoit que ce dernier reste, en réalité, très ciblé. En effet, la hausse des crédits est due principalement à la mise en place de la couverture maladie universelle.
Or, permettez-moi de le redire, madame la secrétaire d'Etat, la CMU, avec l'effet de seuil totalement inégalitaire qu'elle instaure, laissera de côté des personnes, pour quelques centaines de francs. Elle plongera ces personnes dans une exclusion réelle, puisque celles-ci ne pourront plus bénéficier des aides, notamment médicales, précises et adaptées auxquelles elles pouvaient prétendre jusqu'à présent.
Il est vrai cependant que vous allez revaloriser les minima sociaux.
En revanche, en matière de prise en charge des personnes handicapées ou inadaptées, d'hébergement d'urgence des plus démunis, d'insertion des handicapés en milieu ordinaire, domaines où les besoins sont énormes, force est de constater que, malheureusement, le présent budget ne suffira pas.
Je ne retiendrai, à ce titre, qu'un exemple, celui des personnes handicapées, bien qu'il ait déjà été abordé par notre collègue M. Cazeau.
En effet, dans ce domaine, si les perspectives budgétaires pour 2000 sont plutôt encourageantes, il n'en demeure pas moins que bien des problèmes restent posés.
Ces personnes connaissent de réelles difficultés quant à leurs ressources, à leur prise en charge et à leur intégration en milieu ordinaire. Pourtant, vous les avez exclues dans leur grande majorité du bénéfice de la CMU, parce qu'elles perçoivent l'allocation aux adultes handicapés et que, dépassant de peu le seuil couperet que j'évoquais il y a un instant, elles en seront privées.
Croyez-vous vraiment pouvoir désormais convaincre ces personnes de votre volonté de résoudre les difficultés auxquelles elles sont confrontées ? Moi, j'en doute, d'autant plus que vous avez encore repoussé, comme vous l'aviez fait en 1998, la réforme de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales, réforme que votre Gouvernement avait promis d'engager dès 1997.
La rénovation de cette loi devient urgente car ce texte permettrait de répondre aux besoins des personnes handicapées et de soulager l'anxiété de leurs familles.
J'aimerais à présent éclaicir avec vous un point sur lequel je vous avais posé une question écrite qui est malheureusement restée sans réponse : celui de la confusion qui règne actuellement entre les personnes handicapées et les personnes en situation précaire.
Il semble que, pour ces personnes marginalisées en raison d'une perte de revenu ou de logement, la réponse sociale emprunte aujourd'hui les mêmes circuits que ceux qui sont prévus pour les personnes handicapées. Ainsi ces personnes en difficulté sont-elles de plus en plus nombreuses à être reconnues par la COTOREP en tant que travailleurs handicapés. Il en est de même pour le versement de l'AAH qui est accordée de plus en plus fréquemment à des chômeurs de longue durée ou à des personnes en difficulté qui ne souffrent pourtant pas d'un handicap physique ou mental.
Cette confusion, qui n'est pas sans conséquence sur le budget de l'Etat, est particulièrement préjudiciable pour les personnes handicapées. ll serait donc souhaitable d'éviter cet amalgame, de prendre les mesures nécessaires pour clarifier l'attribution des aides qui leur sont destinées et d'adopter des mesures spécifiques pour apporter des solutions aux problèmes des personnes en situation précaire.
Un autre problème se pose : celui du vieillissement des personnes handicapées.
Le handicap ne disparaît pas avec l'âge, bien au contraire. Pourant, dès que les personnes handicapées atteignent l'âge de soixante ans, la plupart d'entre elles cessent de bénéficier de l'aide sociale aux personnes handicapées pour relever de l'aide sociale aux personnes âgées. Ce changement n'est pas anodin, qu'il s'agisse notamment de la rente de survie et de l'obligation alimentaire. C'est pourquoi il est urgent, comme vous le réclament tout les mouvements associatifs, d'élaborer des mesures qui répondent aux attentes tant des personnes âgées que des personnes handicapées âgées.
Afin d'éviter toute discrimination entre ces personnes, ne pourriez-vous envisager de moderniser le dispositif d'aide sociale aux personnes âgées, tout en préservant celui qui s'applique aux personnes handicapées ?
Enfin, pour terminer mon propos, je m'attarderai un instant sur la scolarisation des enfants et des adolescents handicapés, qui, malgré les vingt mesures annoncées par Ségolène Royal, ne bénéficient pas tous de ce qui leur est essentiel.
En effet, les structures d'accueil de ces enfants et les moyens de transport et de locomotion sont insuffisants.
En matière de soutien scolaire, ces enfants, plus encore que les autres, ont besoin d'équipements, notamment informatiques, spécifiques. On en est loin ! Or, vous le savez, la scolarisation de ces enfants, si elle était améliorée, permettrait d'accroître de manière considérable leurs chances d'insertion professionnelle et sociale.
Aussi pouvez-vous nous donner des précisions sur les échéances de financement de ces projets en liaison avec le ministère de l'éducation nationale ?
Madame la secrétaire d'Etat, dans beaucoup trop de cas encore, les familles des personnes handicapées ont le sentiment d'être dans des situations de non-droit, notamment, je vous l'ai dit, quand leur enfant ne peut être scolarisé en milieu ordinaire, quand un adolescent n'a jamais bénéficié de l'enseignement d'un instituteur ou quand le statut d'une personne âgée proche reste incertain.
Toutes mes interrogations, vous le comprendrez, correspondent à des situations pénibles pour les familles et attendent des réponses concrètes qui, si elles ne peuvent être immédiates, méritent néanmoins votre attention. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet. Monsieur le président, mesdames les secrétaires d'Etat, mes chers collègues, c'est en ma qualité de président de la commission de l'alimentation du Conseil de l'Europe que j'interviens aujourd'hui dans ce budget de la santé pour aborder la question de l'alimentation, question d'actualité, s'il en est une, brûlante, mais aussi permanente.
Mon intervention pourrait se résumer en deux phrases, deux expressions qui ne sont pas que boutades : « On creuse sa tombe avec sa fourchette. » et : « L'alimentation est notre première médecine. » En effet, la politique de la santé et celle de l'alimentation sont indéfectiblement liées.
S'agissant de la politique de la prévention, votre budget, madame le secrétaire d'Etat, est en augmentation très sensible - titre IV, chapitres 10 et 20 - ce qui est une bonne nouvelle, bien que le détail des actions ne précise pas quels fonds seront affectés à la politique d'éducation en matière d'alimentation ; je veux parler d'éducation nationale pour les jeunes, mais aussi de la campagne d'information et d'éducation pour le grand public.
En cette matière, les études sont multiples et vont toutes dans le même sens. Il en est ainsi pour les aliments fonctionnels. Les actes du colloque sur les aliments fonctionnels, organisé récemment par le Conseil de l'Europe, nous fournissent des renseignements très éclairants. On dispose aujourd'hui de données précises concernant l'impact de l'alimentation sur la santé.
Chaque année, des dizaines de milliers de personnes meurent d'un cancer. On estime que de 30 % à 40 % de ces décès auraient pu être évités grâce à des mesures diététiques. De même, des dizaines de milliers de personnes meurent des suites de maladies coronariennes et des dizaines de milliers d'autres de maladies cardio-vasculaires. On assure que 30 % de ces décès auraient pu être également évités au moyen de mesures diététiques.
Par ailleurs, on enregistre une augmentation du nombre de cas de surpoids ou d'obésité. Entre 1980 et 1993, le pourcentage d'obèses est passé de 39 % à 56 % pour les hommes et de 32 % à 46 % pour les femmes. Plus grave encore, le pourcentage d'enfants et d'adolescents qui sont menacés par des surcharges pondérales est en progression. L'obésité est donc un facteur de risques supplémentaires pour plusieurs maladies.
Tout cela rend l'alimentation importante et incite tout particulièrement à s'intéresser aux messages liant alimentation et santé.
Les messages liés à la santé doivent être en accord avec les conseils, généralement acceptés, concernant l'alimentation saine et avec les lignes directrices en matière de diététique. Ces messages ont d'ailleurs fait l'objet de très sérieuses publications, comme, par exemple, le Guide national de l'alimentation au Royaume-Uni. Je pense que nous pourrions faire aussi bien en France.
L'ingestion d'un produit qui prétend faire baisser les taux de cholestérol ou préserver la bonne santé de votre coeur ne servira à rien si, par ailleurs, votre régime comporte de nombreux aliments à forte teneur en matières grasses et en sel.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. C'est vrai !
M. Daniel Goulet. Ce qui est inquiétant, c'est qu'à force de mettre en avant les effets bénéfiques que tel ou tel aliment peut avoir sur la santé les gens risquent d'oublier les mesures simples qui permettent de rester en bonne santé : en fait, il suffit d'avoir un régime équilibré et de bonnes habitudes alimentaires.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Et faire de l'exercice aussi !
M. Daniel Goulet. Si l'on met en avant les effets positifs des produits alimentaires sur la santé, effets qui pourraient presque tous être obtenus au moyen d'un régime sain et équilibré, et que ces promesses ne sont pas contrôlées ni replacées dans le contexte de la vie réelle, il est à craindre qu'à trop vouloir améliorer leur état physique les consommateurs n'en viennent à compromettre leur propre santé et celle de l'économie nationale, en accroissant les dépenses du système de santé.
De la même façon, le président d'une commission en charge de l'alimentation de 41 pays d'Europe devrait se féliciter de la création de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Pourtant, la création et le fonctionnement de cette agence me laissent perplexe et interrogatif. Nous en avons eu la démonstration toutrécemment.
En effet, à l'heure de la grande Europe, cette Agence nationale était-elle nécessaire ou répondait-elle à un besoin politique face aux interrogations et aux inquiétudes de la population en proie à la crise de la dioxine et de la sécurité alimentaire en général ?
Mon interrogation porte sur les moyens de contrôler non pas les acteurs, mais les structures mises en place.
En effet, en matière de sécurité alimentaire, de très nombreux organismes sont chargés d'études et de travaux en tous genres.
Comment collationnez-vous les résultats de ces travaux et des recherches ?
Comment coordonnez-vous les différents intervenants et organismes en charge, de façon totale ou partielle, de cette question ?
Comment se fait l'articulation entre le ministère de la santé et celui de l'agriculture ?
Comment allez vous concilier les travaux de l'Agence française avec ceux de l'Agence européenne préparée par M. Prodi et ceux de l'Agence mondiale, dont la création est envisagée ?
Madame le secrétaire d'Etat, la seule chose qui importe est, pour moi comme pour nos concitoyens, la sécurité des aliments.
La seule préoccupation du législateur, comme celle du Gouvernement, est d'organiser non pas des structures de réflexion, encore moins des structures qui réglementent, mais des structures de contrôles efficaces et des structures capables de sanctioner non pas à l'échelle nationale, mais à l'échelle d'une Europe qui compte déjà, dans son Conseil, quarante et un pays.
Certes, cette Europe n'est pas celle qui est rèvée et prônée par M. Attali. C'est celle qui existe déjà et qui travaille au sein de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.
L'essentiel, madame le secrétaire d'Etat, est le contrôle. Les réglementations sont bien assez nombreuses. De plus, dans certains pays, pourtant membres de l'Union, leur application est sujette à quelques variations qui ne manquent pas de nous interpeller.
Ainsi, en Grèce - je l'ai vérifié - l'associé majoritaire d'un élevage de porcs - élevage qui n'est en rien comparable en qualité à ceux qui existent dans une région que je connais bien - est aussi le vétérinaire qui délivre les autorisations sanitaires !
C'est donc vers l'éducation et le contrôle qu'il faut plus particulièrement diriger vos actions et, cette fois, la formule suivante n'a jamais trouvé meilleure application : il vaut mieux prévenir que guérir. Tout naturellement, chacun de nous pense alors aux personnes en particulier, mais rien n'interdit de penser également aux comptes, et plus précisément à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Péry, secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite vous présenter ce projet de budget en quelques points synthétiques.
Je commencerai par vous faire part de ma satisfaction devant son augmentation de 24,27 %, qui marque une réelle volonté de l'ensemble du Gouvernement de faire progresser l'égalité entre les hommes et les femmes.
En 1999, ce budget avait déjà progressé fortement. En effet, aux 80 millions de francs de la loi de finances - qui marquaient déjà, je le rappelle, une augmentation de 11,5 % par rapport à l'année précédente - se seront ajoutés 20 millions de francs de crédits de communication du ministère de l'emploi et de la solidarité pour financer la prochaine campagne sur la contraception.
Cette année, les 100 millions de francs de crédits d'intervention pour 2000 consolident cette progression budgétaire.
Ce budget d'intervention en faveur de l'égalité hommes-femmes sera triplé par l'intervention du fonds social européen. En effet, les politiques qui visent à garantir l'égalité entre les hommes et les femmes, et à favoriser l'insertion des femmes dans le monde du travail, sont éligibles au FSE. Le partenariat que j'ai engagé avec l'ensemble des ministères concernés va donc nous permettre de mobiliser 200 millions de francs du fonds social européen et ainsi de tripler le budget propre aux droits des femmes. C'est une avancée d'autant plus significative que nous ne disposions que de 4 millions de francs en 1999.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, l'Assemblée nationale a adopté un amendement destiné à créer une nouvelle annexe budgétaire. Ce « jaune » permettra de mettre en évidence l'ensemble des crédits destinés à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes. J'espère que vous soutiendrez cette transparence budgétaire.
Schématiquement, le budget relatif aux droits des femmes se construit autour de trois axes.
Le premier axe est celui de l'accès aux droits, qui mobilise environ la moitié du budget. Il recouvre l'information des femmes, notamment en matière de santé et de contraception, la lutte contre les exclusions et la participation des femmes à tous les domaines de la vie sociale. Cette mission est essentiellement assurée par le secteur associatif pour le compte de l'Etat.
Le Centre national d'information et de documentation des femmes et des familles, ainsi que les centres départementaux qui assurent cette mission pour le compte de l'Etat, font l'objet d'une évaluation par l'inspection générale des affaires sociales. En effet, je souhaite évaluer les niveaux les plus adéquats, les plus efficaces pour permettre cette action des associations aux niveaux départemental, régional et national.
Le deuxième axe concerne l'égalité professionnelle, la formation, l'insertion dans le monde du travail, et, pour ce poste très important, je mobilise 40 % du budget.
L'augmentation des crédits permettra en particulier de développer les contrats d'égalité avec les entreprises les plus innovantes, d'accompagner les femmes créatrices d'entreprise ou d'aider celles qui ont des difficultés particulières d'insertion.
Enfin, le troisième axe, qui mobilise 10 % des crédits restants, concerne les violences. Le nombre de femmes battues, qui est de 2 millions, fait de ce sujet, qui reste très tabou, un véritable problème social. Au-delà du budget d'intervention, les crédits d'études du ministère seront mobilisés pour financer une grande enquête sur les violences auprès de 7 000 femmes, dans l'Hexagone et dans les départements d'outre-mer, enquête qui permettra de mesurer l'ampleur du phénomène et les circonstances de ces violences afin de mieux les combattre.
Telles sont les grandes lignes du budget relatif aux droits des femmes, tel qu'il apparaît dans le cadre du projet de loi de finances pour 2000. Il traduit notre volonté de construire des actions concrètes par une approche transversale globale de l'égalité entre les hommes et les femmes. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme Gillot, secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous m'autoriserez à intervenir un peu plus longuement que ma collègue Nicole Péry, car outre la présentation du budget à laquelle je vais me livrer, je vais tenter de répondre à vos questions de la manière la plus exhaustive possible.
J'ai donc l'honneur de présenter à votre Haute Assemblée, en mon nom et au nom de Martine Aubry, les crédits de la santé et de la solidarité pour l'année 2000.
Je tiens, avant tout, à rappeler que ce budget complexe porte les priorités de l'action de l'Etat dans les domaines de la lutte contre l'exclusion, de la protection des populations les plus fragiles, de la santé publique et de la sécurité sanitaire.
L'ampleur de la progression de ce budget - 13,3 %, soit 90,8 milliards de francs en l'an 2000 - illustre avec force la place centrale de ces domaines parmi les priorités du Gouvernement, comme de nombreux orateurs l'ont relevé, même s'il faut, bien entendu, faire la part de l'extension de périmètre qui résulte de l'inscription, pour 7 milliards de francs, de la subvention de l'Etat au fonds de financement de la CMU.
A propos de cette dernière, il faudrait que vous vous mettiez d'accord, messieurs. Ainsi, certains d'entre vous en critiquent le coût trop élevé - M. le rapporteur spécial craint même que ses crédits n'augmentent encore en 2001 d'une manière non contrôlée - alors que d'autres, comme M. Leclerc, nous reprochent des seuils trop bas, qui excluent un nombre important de personnes dont ils estiment les revenus éligibles à une prise en charge des soins par la solidarité nationale.
En fait, comme vous le savez, le seuil d'accès à la CMU résulte d'une appréciation délicate du niveau de pauvreté, qui a fait l'objet d'un long débat. Je ne pense pas qu'il faille regretter que l'AAH se situe au-delà de ce seuil.
D'une façon générale, les personnes isolées titulaires de minima sociaux ne sont pas dans le périmètre de la CMU.
Cela étant, votre remarque est opportune, monsieur le sénateur. Il faudra surveiller les conditions dans lesquelles les personnes handicapées ou les personnes âgées en établissement, par exemple, pourraient avoir à souffrir de ce seuil. Cet aspect du problème sera pris en compte lors de la mise en oeuvre de la CMU, qui fera l'objet d'un bilan à la fin de l'année 2000.
Au-delà de cette dépense, le budget de la santé et de la solidarité enregistre une hausse de 3,64 milliards de francs, soit un taux de progression de 4,5 %, ce qui porte à 9,7 % en deux ans la croissance à structure constante.
Cette croissance est justifiée par les grandes priorités que nous poursuivons pour la troisième année, à savoir : financer les dispositifs de lutte contre les exclusions conformément aux aménagements pris en 1998 ; assurer la montée en charge des agences de sécurité sanitaire et améliorer l'efficacité des politiques de santé publique ; enfin, renforcer les moyens du ministère.
L'effort budgétaire consacré à ces priorités est d'autant plus remarquable que le propre de ce budget est qu'il n'offre pas de marges de redéploiement. Contrairement au budget de l'emploi, qui réinvestit sur les grandes politiques structurelles de développement de l'emploi les dividendes de la croissance, le budget de la solidarité ne peut donner lieu à des économies. Au contraire, le contexte économique favorable auquel nous participons renforce les attentes de ceux qui restent sur le bord du chemin et qui regardent passer, avec beaucoup de frustration, le convoi de ceux qui prospèrent.
C'est ainsi que, sur les 3,64 milliards de francs de progression des crédits hors CMU que j'évoquais, 3,2 milliards de francs sont préemptés par l'évolution des trois minima sociaux portés par le budget de la solidarité, à savoir le RMI, l'allocation de parent isolé et l'allocation aux adultes handicapés. Nous verrons que l'amélioration de la situation économique commence à infléchir la tendance. Il reste, vous en conviendrez, que la marge nécessaire au financement des priorités nouvelles est étroite.
J'en viens au budget de la solidarité, dont la masse est considérable avec 81,3 milliards de francs, dont 58,6 milliards de francs pour le RMI, l'API et l'AAH.
Parmi les priorités de ce budget figurent les engagements du programme de lutte contre les exclusions associé à la loi du 29 juillet 1998.
Tous ces engagements sont honorés, qu'il s'agisse de l'accompagnement social individualisé, du renforcement des dispositifs de veille sociale et d'hébergement, de l'extension des capacités des centres de formation de travailleurs sociaux ou de l'abondement des fonds d'aide aux jeunes en accompagnement du programme TRACE.
Ces dispositifs sont fortement articulés avec la politique de l'emploi : ils se situent en amont de la démarche de retour à l'emploi, qui est au coeur des dispositifs issus de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. En effet, pour les personnes les plus démunies, pour les jeunes très désocialisés, il faut surmonter bien des préalables avant de pouvoir s'engager dans un parcours de retour ou d'accès à l'emploi durable.
Le rôle des dispositifs de lutte contre l'exclusion portés par le budget de la solidarité est d'abord d'agir, très en amont, contre la formation des exclusions, par le soutien à la parentalité, la protection des droits de l'enfant et par le renforcement de l'appareil de formation des travailleurs.
Ces dispositifs ont ensuite pour rôle de lever les verrous sociaux, familiaux et individuels qui font obstacle à l'entrée dans un parcours d'insertion.
Pour l'hébergement des personnes en déshérence, l'objectif est certes d'accroître mais aussi de diversifier l'offre et les modalités d'accueil pour les adapter à des besoins eux-mêmes divers et pour en faire un lieu de passage vers la réinsertion et le logement autonome plutôt qu'un lieu de stigmatisation. Cet effort d'adaptation de l'offre d'hébergement est profondément inscrit dans l'esprit et la lettre de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, et nous y travaillons en permanence en liaison avec M. Besson.
Il faut mentionner le rôle de l'accompagnement social individualisé, l'ASI, et saluer au passage le travail remarquable des associations qui s'y consacrent. L'ASI permet de débloquer des situations individuelles et sociales difficiles et de remettre en selle les personnes en difficulté : 340 millions de francs de moyens supplémentaires cumulés en deux ans y ont été consacrés.
Troisième outil pour lever les obstacles à l'insertion, les fonds d'aide aux jeunes, qui apportent aux jeunes en grande difficulté l'aide matérielle nécessaire pour faire la soudure entre les stages et les contrats qui ponctuent leur parcours d'insertion ; 60 millions de francs supplémentaires leur sont apportés par le budget 2000.
Enfin, il revient à l'Etat, responsable aux côtés des départements du volet insertion du revenu minimum d'insertion, le fameux « I » du RMI, de renforcer l'incitation à la reprise d'activité des bénéficiaires de l'allocation, comme l'a justement rappelé M. Cazeau. A cet effet, la loi relative à la lutte contre les exclusions a ouvert la possibilité de cumuler la prestation et les revenus d'activité pendant un an, intégralement, puis partiellement. On estime à 16 % en métropole la part des allocataires qui bénéficient de cet « intéressement ».
Cela m'amène à préciser mon propos initial sur l'évolution des effectifs du RMI. L'année s'est conclue par une hausse de 3,8 % en métropole et de 4,1 % y compris les départements d'outre-mer ; c'est la moins forte augmentation observée depuis la mise en place du RMI, monsieur Chérioux.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. C'est normal, en période d'expansion !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Pour la première fois, les entrées ont baissé en métropole de 4,4 %, alors quelles augmentaient de 6 % en 1997 ; les sorties, en revanche, se maintiennent à un tiers des effectifs, du moins en métropole.
L'amélioration profite d'abord aux jeunes allocataires, dont le nombre a baissé pour la première fois en 1998 : de 1,5 % pour les 25-29 ans et de 3,7 % pour les moins de vingt-cinq ans. Le premier semestre 1999 confirme ces évolutions.
Les crédits de l'exercice 1999 sont donc de 28,2 milliards de francs et intègrent également le coût du cumul, désormais possible, du RMI avec l'allocation pour jeune enfant versée pendant la grossesse, ainsi que les majorations pour âge des allocations familiales, disposition qui résulte d'une décision de la conférence de la famille de 1998, je vous le rappelle. La dotation 2000 marque donc, par rapport à cette base, une hausse de 500 millions de francs fondée sur une prévision réaliste d'accélération des effets de la baisse du chômage conjugués à la mobilisation active des dispositifs de la politique de l'emploi en faveur des allocataires du RMI.
Le Gouvernement poursuit donc son action déterminée en ce qui concerne les minima sociaux.
Ainsi, alors que nous étions en train de discuter de ce budget, Mme Aubry vient d'annoncer que le Gouvernement a décidé d'abandonner les dettes fiscales pour tous les bénéficiaires de minima sociaux et les personnes en situation d'urgence.
Par ailleurs, il est apparu nécessaire d'améliorer la situation des personnes qui n'ont pas encore pu bénéficier de la croissance parce qu'elles étaient trop éloignées de l'emploi et qui continuent, pour un temps, de dépendre, pour leur existence, des minima sociaux. C'est ainsi que le ministère de l'emploi et de la solidarité a annoncé une série de mesures en faveur des plus démunis, parmi lesquelles l'attribution d'une prime particulière de fin d'année d'au moins 1 000 francs et la hausse de 2 % au 1er janvier 2000 du RMI et de l'ASS.
Cette prime particulière sera attribuée aux bénéficiaires du RMI, de l'allocation spéciale de solidarité et de l'allocation d'insertion. Elle sera modulable en fonction de la composition de la famille. Les personnes isolées percevront 1 000 francs, les personnes avec enfant et les couples 1 500 francs et les couples avec deux enfants 2 100. Cette allocation spéciale touchera 1 600 000 foyers, a indiqué Mme Aubry. Le coût pour l'Etat de ces mesures hors effacement des dettes fiscales est évalué à 2,7 milliards de francs.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Où est-ce inscrit ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. C'est une annonce que je fais à cette tribune. M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Cela ne suffit pas ! Et la procédure budgétaire ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Cette annonce vient d'être faite par Mme Aubry, au nom du Gouvernement. Il me paraissait important de la porter à la connaissance de la Haute Assemblée compte tenu des préocccupations qui ont été exprimées au sujet des personnes en situation précaire et difficile, notamment sur le devenir des minima sociaux.
M. Claude Huriet. Madame le secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Bien volontiers.
M. le président. La parole est à M. Huriet, avec l'autorisation de Mme le secrétaire d'Etat.
M. Claude Huriet. Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat.
Je vous donne acte de l'annonce que vous venez de faire, mais pouvez-vous nous préciser si cette bonne nouvelle pour ceux qui bénéficient des minima sociaux aura ou non des conséquences sur les conditions d'accès à la couverture maladie universelle ?
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Très bonnequestion !
M. le président. Madame le secrétaire d'Etat, veuillez poursuivre, je vous prie.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Huriet, cela n'a pas encore été porté à ma connaissance. Toutefois, les seuils d'accès à la couverture maladie universelle sont fondés sur des calculs effectués à partir du seuil de pauvreté. Ainsi, pour les personnes qui bénéficient des minima sociaux mais dont les revenus dépassent ce seuil, il est évident que cette mesure n'aura pasd'incidence.
J'ai dit précédemment que les personnes isolées vivant des minima sociaux ne seront pas prises en charge par la couverture maladie universelle, puisque leurs revenus dépassent le seuil fixé pour celle-ci.
En tout cas, pour l'instant, que je sache, il n'est pas question de modifier le seuil d'accès à la CMU.
Je tiens à souligner à l'intention de M. Cantegrit l'intérêt que porte le Gouvernement aux Français de l'étranger et à leur protection sociale.
Le Gouvernement étudie actuellement une réforme du régime volontaire maladie de la caisse des français de l'étranger pour en faciliter l'accès aux Français expatriés plus démunis que les cotisants actuels. Cette ouverture du régime devra, bien entendu, se faire dans le respect de l'équilibre financier de la caisse.
En ce qui concerne la CMU, sa mise en oeuvre devrait être de peu de conséquence sur l'assurance volontaire de la CFE puisque les deux champs d'application sontdifférents. Des instructions complémentaires seront prochainement données par circulaire lorsque le dispositif d'application de la CMU sera définitivement connu. Cependant, le travail effectué par M. Cantegrit sera utile à notre réflexion et nous ne manquerons pas d'accorder une attention particulière aux précisions qu'il a portées à notre connaissance.
M. André Maman. Très bien !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. La protection et l'intégration des populations étrangères est aussi un axe fort du budget de la solidarité, qui participe de l'esprit de la lutte contre les exclusions.
Tout d'abord, vous aurez noté l'orientation nouvelle donnée aux crédits d'aide médicale du fait de la mise en place de la CMU.
Une fois le relais pris par la CMU, des crédits demeurent nécessaires pour assurer la prise en charge médicale des étrangers en situation irrégulière ou bénéficiant de courtes autorisations de séjour, celle des Français non résidents, ainsi que celle des ressortissants étrangers accueillis en France pour des raisons humanitaires.
Le besoin à ce titre a été évalué à 400 millions de francs. Nous avons cependant maintenu une dotation de 495 millions de francs, de façon à faciliter l'apurement des dettes antérieures de l'aide médicale.
Je mentionne aussi, pour m'en féliciter, la consolidation du financement des soins dans les centres de rétention administrative.
Il faut également souligner l'effort réalisé dans ce projet de budget pour accroître de cent vingt places les capacités des centres d'accueil des réfugiés et demandeurs d'asile, et pour augmenter les crédits de l'allocation d'insertion versée aux demandeurs d'asile dans l'attente des décisions de l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Enfin, le projet de budget pour 2000 met en place des crédits d'investissement pour l'aménagement d'aires de stationnement pour les gens du voyage, qui viendront appuyer les efforts nécessaires des collectivités locales en ce sens.
L'effort de solidarité se déploie également en faveur des rapatriés, puisque le budget de la solidarité abrite le volet social et culturel de la politique en faveur des rapatriés.
Parmi ces mesures, il convient de citer les dispositifs spécifiques d'insertion dans l'emploi des Français rapatriés d'origine nord-africaine et de leurs familles, mis en place sous forme d'un plan d'action, en application de la loi du 11 juin 1994.
Outre ces mesures en faveur de l'emploi, une rente viagère sera versée aux harkis, avec effet au 1er janvier 1999. Les conditions d'attribution de cette rente seront prochainement définies, et le plan d'action sera reconduit jusqu'au 31 décembre 2000 par un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances rectificative pour 1999.
Les mesures qui se rapportent à l'emploi et à la formation sont améliorées et également reconduites jusqu'au 31 décembre 2000 par la circulaire du 31 mai 1999.
Par ailleurs, le décret du 4 juin 1999 a mis en place un nouveau dispositif d'aide aux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, placé sous la responsabilité d'une commission nationale de désendettement présidée par un magistrat de la Cour des comptes et qui comprend une représentation des rapatriés. Ce sont 1 940 demandes qui ont été déposées et qui sont actuellement en cours d'examen.
J'en viens maintenant à la politique en faveur des personnes handicapées, qui occupe une place centrale dans le budget de la solidarité et dans les préoccupations de nombre d'entre vous.
Cette politique se veut globale et cohérente, attentive à tous les aspects de la vie des personnes handicapées, qu'il s'agisse de l'éducation, de l'emploi ou de la vie sociale. Elle vise à favoriser prioritairement leur intégration, par application de tous les dispositifs de droit commun, en milieu de vie ordinaire, puisque telle est la demande le plus fréquemment exprimée aujourd'hui par les personnes handicapées ou leur famille.
C'est pourquoi, sans opposer en aucune manière l'intégration des personnes handicapées dans le milieu de vie ordinaire et la prise en charge en institutions spécialisées, qui sont et resteront parfois indispensables, les objectifs prioritaires que Martine Aubry et moi-même fixons à notre politique sont : la socialisation et l'intégration des jeunes handicapés, l'accompagnement des personnes handicapées dans leur vie quotidienne et la formation et l'insertion professionnelles.
Ces orientations s'inscrivent dans le cadre d'une politique d'ensemble qui est le plus souvent interministérielle.
Il faut raisonner en termes de complémentarité et de continuité, s'efforcer d'assouplir et de diversifier les modes d'intervention des établissements et des services, de les coordonner, de décloisonner les institutions entre elles comme par rapport au milieu ordinaire. Cette coordination des interventions et des structures est une nécessité qui guide les travaux préparant la réforme de la loi d'orientation de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales.
J'en profite pour rassurer M. Leclerc, qui m'a interpellée sur cette question : la révision de la loi de 1975 qu'il appelait de ses voeux est engagée puisqu'une mission parlementaire a été confiée au député Pascal Terrasse sur ce sujet. J'ai d'ailleurs eu à plusieurs reprises, au cours du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, l'occasion d'indiquer que le travail de coopération que je mène à cet égard avec la mission parlementaire, mais aussi avec les associations et les représentants du monde handicapé trouvera son aboutissement dans des dispositifs législatifs qui seront proposés à vos délibérations dans le courant du second semestre de l'année 2000.
Il faut, bien entendu, faire une lecture coordonnée de la loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances pour prendre la mesure de l'action entreprise en ce sens. Au demeurant, dans leurs interventions, Mme Heinis, MM. Huriet et Neuwirth ainsi que Mme Borvo ont bien établi cette liaison entre les textes, en exprimant leurs préoccupations sur la politique de santé publique et en formulant des suggestions.
Pour m'en tenir au budget qui nous occupe aujourd'hui, je souhaite mettre d'abord en exergue l'effort particulier que nous avons voulu consacrer, d'une part, au développement des aides techniques et, d'autre part, au renforcement des COTOREP.
S'agissant des aides techniques, il est essentiel d'offrir aux personnes handicapées qui souhaitent et peuvent rester dans leur milieu de vie des moyens de compensation fonctionnelle de leur handicap.
Des expérimentations ont été conduites avec le soutien des pouvoirs publics sur quatre sites pilotes. L'évaluation dont nous disposons aujourd'hui a montré l'intérêt qu'il y aurait à généraliser cette formule, et c'est ce que nous allons entreprendre. Une mesure nouvelle de 15 millions de francs a été dégagée pour ce faire dans le projet de budget pour 2000. Cet effort pourrait être amplifié par la contribution des caisses de sécurité sociale et des conseils généraux qui accepteraient de s'y associer.
Ainsi, nous pourrons disposer d'un centre d'expérimentation dans chaque région de France, en évaluer le fonctionnement, puis « modéliser » ce dispositif de manière à finalement « mailler » le territoire afin de répondre aux attentes des personnes handicapées.
Pour ce qui est des COTOREP, le rapport remis en 1998 par l'IGF et l'IGAS a confirmé l'existence de dysfonctionnements dans leur organisation et dans leur gestion, et il en a clairement pointé les causes : l'absence de pilotage réel des commissions et l'insuffisance de leurs moyens. Une remise à niveau s'imposait donc. Les inscriptions budgétaires dans le projet de loi de finances pour 2000 en sont la traduction forte, ce qui devrait satisfaire M. Chérioux, qui m'a précisément interpellée sur cette question.
Le projet de budget pour 2000 continue parallèlement, bien entendu, à décliner le programme pluriannuel de création de places pour adultes lourdement handicapés arrêté par le Premier ministre le 8 avril 1998 pour la période 1999-2003. Il respecte la programmation prévue avec 2 000 places de CAT et 500 places en atelier protégé. Le programme de création de places en maison d'accueil spécialisée et en foyer à double tarification - 1 100 places pour la tranche 2000 - est, quant à lui, porté par les crédits d'assurance maladie et prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, pour 230 millions de francs.
Il faut aussi mentionner l'ajustement des crédits de l'allocation aux adultes handicapés, avec une progression de 781 millions de francs, ce qui porte la dotation à 27,55 milliards de francs, sur la base d'un taux de progression en volume et en valeur de 3 %, puisque tel est le niveau sur lequel se stabilise l'évolution de l'AAH.
Je souhaite répondre brièvement à M. Cazeau, qui a exprimé son inquiétude sur le devenir des personnes âgées dépendantes, auquel nous sommes nous-mêmes très attentifs. Lorsque le maintien à domicile est devenu impossible, il faut permettre un hébergement en établissement de qualité pour personnes âgées. Tel est le but de la réforme de la tarification.
Nous savons que cette réforme suscite des interrogations, malgré l'oeuvre pédagogique de la mission d'appui conduite par M. Jean-René Brunetière.
Des mesures seront prises pour éviter tout ressaut tarifaire pour les personnes déjà hébergées. Il faut parvenir, dans la plupart des cas, à un équilibre satisfaisant entre les réductions des tarifs d'hébergement et la création des tarifs dépendance.
Pour ce faire, nous allons tirer parti des simulations chiffrées et des constats réalisés par la mission d'appui avec les professionnels pour ajuster un certain nombre de paramètres et mutualiser une part des frais liés à la dépendance, avant même que la réforme n'entre effectivement en vigueur dans les établissements. Il y sera procédé dans les meilleurs délais, afin de permettre la signature dès 2000 de conventions tripartites dans les nombreux établissements où les besoins sont urgents quant à l'amélioration de la prise en charge et de la qualité des prestations que cette réforme leur apportera.
Enfin, les données chiffrées recueillies par la mission nous donnent les moyens de préparer une programmation, sur la période 2001-2005, des crédits nouveaux que l'assurance maladie consacrera à la médicalisation des établissements.
Il faut souligner que, d'ores et déjà, pour 2000, les moyens nouveaux progressent de 50 % par rapport à 1999.
Je ne voudrais pas terminer mon propos sur le projet de budget de la solidarité sans évoquer deux sujets qui, bien que très différents, touchent néanmoins à la vie des structures associatives concourant fortement à la conduite des politiques d'action sociale de l'Etat.
Il s'agit, d'une part, de la problématique de la réduction de la durée du travail dans le secteur sanitaire, social et médico-social et, d'autre part, du sujet jusqu'ici récurrent des dettes de l'Etat vis-à-vis des organismes d'accueil des objecteurs de conscience.
S'agissant de ce dernier point, nous nous sommes donné les moyens d'apurer complètement les dettes de l'Etat dans des délais très brefs puisqu'une partie est en train ou sur le point d'être réglée grâce à l'ouverture de 86 millions de francs dans le décret d'avances du 2 septembre dernier, et que, par ailleurs, la dotation dans le budget 2000 est maintenue au niveau de 1999, soit 106 millions de francs, c'est-à-dire un montant supérieur de 45 millions de francs environ aux besoins prévisibles de l'exercice, ce qui permettra de solder totalement la dette de l'Etat.
Quant à la mise en oeuvre de la nouvelle durée légale du travail, c'est évidemment un sujet essentiel pour un secteur associatif qui est clairement dans le champ de la nouvelle législation sur les 35 heures mais qui, largement financé sur fonds publics et tenu à de hautes exigences de qualité de service, est confronté à des sujétions particulières.
Lorsqu'elle en parlait l'an dernier, Martine Aubry indiquait qu'elle y voyait une chance pour un secteur qui avait souvent donné la preuve de sa capacité d'adaptation. Et, de fait, le secteur s'est fortement mobilisé. Ainsi, 1 400 accords sont aujourd'hui enregistrés, qui concernent une multiplicité d'établissements dans les secteurs du handicap, de l'aide sociale à l'enfance, des maisons de retraite et des établissements sanitaires.
Après avis favorable de la Commission nationale d'agrément, Mme Aubry a agréé plusieurs accords collectifs nationaux dans ce champ, notamment un accord de branche étendu au niveau de l'UNIFED, les accords des centres de lutte contre le cancer, de la Croix-Rouge, de la convention du 15 mars 1966 et, tout récemment, de la convention FEHAP du 31 octobre 1951.
Nous sommes à présent dans la phase d'instruction des accords locaux, soumis aux autorités qui, sur le terrain - DDASS, conseils généraux, agences régionales de l'hospitalisation - autorisent et financent les établissements.
C'est à ce niveau que pourront être appréciés, de manière partenariale, la réalité des efforts de solidarité financière et le souci de la qualité du service rendu qu'ont manifestés les partenaires sociaux dans leurs accords nationaux.
Pour autant, il ne pourrait être question de définir un scénario unique de la réduction de temps de travail dans ce champ. L'hétérogénéité de celui-ci, l'importance des temps partiels - ces derniers concernent 40 % des emplois - la variété des activités, des métiers, des modes d'organisation, la diversité des conventions collectives excluaient toute démarche mécanique et réductrice des différences ou négatrice des réalités.
Les accords agréés sont équilibrés à la fois par rapport aux aides prévues par la première loi et au regard des contreparties salariales importantes que, au nom de l'esprit de solidarité qui anime ces professionnels dans leur action, ceux-ci ont acceptées. J'ajoute que l'équilibre des accords sera facilité par les dispositions de la seconde loi sur les allégements de charges sociales sur les bas salaires dans un secteur qui compte une proportion importante de salariés concernés.
Je ne doute pas que ce secteur réduira sa durée de travail et créera des emplois en respectant les contraintes posées en termes de financement comme de maintien de la qualité du service rendu.
Vous le savez, les accords locaux sont instruits par les services déconcentrés, qui recueillent l'avis des financeurs. En tout état de cause, les délais nécessaires à l'agrément de ces accords ne seront pas préjudiciables aux salariés de ce secteur ni à l'équilibre financier des établissements qui les emploient, d'une part, parce que les aides applicables seront celles en vigueur à la date de la signature de l'accord - soit le taux le plus élevé puisque beaucoup d'entre eux ont été signés avant le 30 juin de cette année, quand bien même les accords nationaux n'étaient pas encore signés - d'autre part, parce qu'un amendement au projet de loi sur la réduction du temps de travail exonère de la contribution de 10 % sur les heures supplémentaires les établissements qui ont signé un accord mais qui sont dans l'attente d'une décision d'agrément pour le début de l'an 2000.
Il n'y a donc pas de raison de s'inquiéter : les choses doivent avancer au rythme que permet le travail en partenariat dans les services déconcentrés.
A ce stade de mon intervention, je répondrai à Mme Borvo, qui s'est inquiétée de la situation des caisses d'allocation familiales et des caisses primaires d'assurance maladie.
Les CAF de la région parisienne ont été confrontées, l'été dernier, à des difficultés liées à la mise en oeuvre d'un nouveau système informatique, qui était déjà implanté dans les CAF de province. Le passage au nouveau système a été rendu difficile par les spécificités du système informatique antérieur de l'Ile-de-France, différent de celui du reste de la France. Ce passage était nécessaire avant le 31 décembre 1999, pour éviter d'avoir à transposer au 1er janvier 2000.
Les directeurs des CAF d'Ile-de-France ont procédé à des redéploiements internes afin de renforcer temporairement les services concernés.
Par ailleurs, avec l'aide de la CNAF, des techniciens chargés de ces prestations sont venus de différentes caisses de province pour résorber au plus vite les retards qui avaient été pris.
Tout est maintenant en bonne voie pour rentrer dans l'ordre. La plus grande attention a été portée à la situation difficile de certains allocataires pour que leurs dossiers soient traités au plus vite.
Concernant les caisses primaires d'assurance maladie, la situation est différente. L'inquiétude portait sur la mise en oeuvre de la CMU et sur les négociations relatives à la réduction du temps de travail.
La CNAM a été autorisée à créer 1 400 postes. Elle va donc maintenant procéder à ces recrutements puis à la formation de ces personnels nouveaux, ainsi qu'à laréorganisation des services. Mais il s'agit là, je vous le rappelle, d'une responsabilité qu'assument complètement les responsables de la CNAF et de la CNAM. C'est l'une des conséquences du paritarisme, que nous respectons avec une grande conviction.
J'aborderai maintenant le budget de la santé, qui est caractérisé, en 2000, par plusieurs évolutions marquantes.
La première et la plus évidente est son taux de croissance de 5 %, taux qui est supérieur à celui du budget global santé-solidarité. Encore ce taux de croissance est-il minoré par plusieurs transferts externes d'un montant total de 184 millions de francs, sur le détail desquels je reviendrai dans un instant. A structure constante, la progression réelle, de 1999 à 2000, est de 10 %, ce qui est considérable.
Vous le savez comme moi, le budget de la santé publique n'est qu'un élément finalement modeste - son montant s'élève tout de même à 4 milliards de francs - de l'ensemble de la politique de santé, qui repose sur les politiques structurelles traduites depuis deux ans, bientôt trois, dans les lois de financement de la sécurité sociale.
Mais, avec ses 4 milliards de francs, ce budget est bien sûr essentiel, compte tenu des actions qu'il permet de financer, mais aussi, et surtout, parce qu'il permet à des besoins de santé qui émergent du terrain d'être transformés en choix de santé publique.
Ces choix de santé publique sont bien lisibles dans le projet de budget pour 2000.
Il faut d'abord rappeler que la santé est un enjeu de la lutte contre les exclusions et qu'une place importante a été faite, à concurrence de 250 millions de francs au total, aux programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, les PRAPS, dans le budget de 1999, qui leur avait affecté 194 millions de francs de mesures nouvelles.
Des moyens nouveaux sont dégagés pour renforcer les moyens affectés aux programmes régionaux de santé, pour conforter le financement du réseau des centres d'éducation pour la santé, pour accroître la portée des interventions en matière de prévention du suicide et de traitement des délinquants sexuels, ainsi que pour la mise en place du dépistage organisé des cancers.
J'ai bien noté la préoccupation de M. Huriet à cet égard.
Lors de l'adoption de la loi de financement de la sécurité sociale de 1999, le législateur a introduit, dans le code de la santé publique, un article permettant d'organiser la lutte contre les maladies aux conséquences mortelles évitables, en proposant à la plus grande partie possible de la population concernée l'accessibilité et l'égalité d'accès à un dépistage de qualité respectant l'éthique et la justice sanitaire. Cet article confie à l'Etat la responsabilité de la mise en oeuvre du dépistage, qui repose sur le principe de la gratuité des actes techniques.
Le Gouvernement n'a pas sous-estimé la complexité de la mise en place du dispositif législatif et l'importance des problèmes soulevés pour la première fois à cette échelle. C'est pourquoi un important travail de concertation et de mobilisation des acteurs a été accompli. Cinq groupes de travail nationaux ont été constitués.
Quatre groupes thématiques sont chargés d'élaborer les référentiels techniques assurant la qualité et l'accessibilité du dépistage à propos de trois cancers - ceux du sein, du colon et du col de l'utérus - ainsi que les instruments nécessaires à la formation et à l'information des professionnels concernés. Ces référentiels sont, vous le savez, en voie de finalisation.
Un cinquième groupe travaille sur l'organisation opérationnelle du programme, l'élaboration du texte conventionnel, l'adaptation de la nomenclature des actes professionnels, la résolution des questions relatives au fichier permettant la gestion du système, tout en respectant l'anonymat et la confidentialité nécessaires, et l'organisation, à l'échelon régional et départemental, du pilotage et de la mise en oeuvre concrète des programmes.
Cet important dispositif justifie la mise en place progressive des mesures, car il s'agit de respecter les acquis dans le domaine du dépistage du cancer du sein. Trente-deux départements regroupant 45 % de la population féminine concernée offrent déjà un programme organisé pour le dépistage du cancer du sein et il a fallu surmonter de nombreuses difficultés matérielles, professionnelles, vous le savez bien.
Le dépistage du cancer du col de l'utérus par le frottis cervical, à l'exception de quatre sites expérimentaux, relève aujourd'hui de la pratique courante des médecins.
Le dépistage du cancer colorectal est aujourd'hui expérimenté dans deux départements, dans la perspective de sa généralisation éventuelle au vu des résultats. Mais c'est une procédure qui n'est pas sans poser de problème.
L'ambition de la politique entreprise est donc d'assurer une couverture quasi universelle de la population par ce dispositif. Toutefois, la montée en charge est assez lente et elle justifie que des précautions soient prises, aussi bien dans les procédures que dans les pratiques de mise en oeuvre.
J'ai également été interpellée à propos des soins palliatifs et du plan pluriannuel de lutte contre la douleur. Il est vrai qu'il n'existe pas de chapitre particulier dans l'exposé du budget qui vous a été remis. Mais le plan pluriannuel de lutte contre la douleur se poursuit avec la même intensité que précédemment ; j'y apporte ma détermination. Il en va de même pour les soins palliatifs.
Comme vous le savez, monsieur Neuwirth, en matière d'accès aux soins palliatifs, la loi du 9 juin 1999 prévoyait trois textes d'application ; je me permettrai de vous les rappeler.
Il s'agit, d'abord, du décret d'applications de l'article L. 162-1-10 du code de la sécurité sociale, qui prévoit un contrat type entre les organismes d'assurance maladie et les professionnels. Les mesures réglementaires, qui sont en cours de rédaction, viseront à permettre la participation et la rémunération de tous les acteurs de santé sans exclusive, à la condition qu'ils puissent respecter l'obligation légale de continuité et d'interdisciplinarité, à domicile comme en établissement.
Il s'agit, ensuite, du décret d'application de l'article 10 qui prévoit un contrat type portant sur les conditions d'intervention des associations de bénévoles dans les établissements de santé publics et privés et dans les établissements sociaux et médico-sociaux.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. M. Neuwirth le sait très bien, madame le secrétaire d'Etat ! Il est l'auteur de ce texte !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oui, mais je me permets de le rappeler, afin que cela figure au compte rendu intégral des débats ! Ainsi, les lecteurs assidus du Journal officiel y trouveront et la question de M. Neuwirth et la réponse du ministre concerné.
Ce texte, qui devrait être publié à la fin de l'année, doit faciliter les interventions des bénévoles qui accompagnent les personnes en fin de vie dans les établissements, en complémentarité et sans interférence avec les soins qui leur sont prodigués.
La publication du décret devant déterminer, en tant que de besoin, les modalités du congé d'accompagnement paraît encore prématurée à ce jour. Il semble en effet opportun d'observer le niveau auquel se situeraient d'éventuelles difficultés, afin d'apporter, le moment venu, une réponse d'ordre réglementaire.
Plusieurs initiatives parlementaires visent actuellement à définir des congés d'opportunité ou des congés de convenance pour satisfaire à des besoins familiaux. Il serait intéressant de globaliser ces différentes demandes, de façon que la procédure réglementaire reprenne l'ensemble de ces dispositions.
M. Jean Chérioux, raporteur pour avis. Madame le secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vous en prie, monsieur Chérioux !
M. le président. La parole est à M. Chérioux, rapporteur pour avis, avec l'autorisation de Mme le secrétaire d'Etat.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. J'avoue que je suis quelque peu étonné, madame le secrétaire d'Etat. Vous parlez de travaux actuels, mais la loi a été votée !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Effectivement !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi elle n'est pas mise en oeuvre immédiatement ! Je vous rappelle que M. Neuwirth était l'auteur et le rapporteur de ce texte ! Pour quelle raison les décrets d'application de cette loi ne sont-ils pas publiés ? Vous faites état de travaux parlementaires. Il s'agit peut-être de l'Assemblée nationale, du Sénat, peu importe ! Pour le moment, cette loi existe, et il faut s'y tenir !
M. le président. Madame le secrétaire d'Etat, veuillez poursuivre, je vous prie.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je reprends le fil de mon explication, monsieur Chérioux. Je rassurais M. Neuwirth sur la détermination du Gouvernement à mettre en oeuvre la loi visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs du 9 juin 1999 et j'indiquais les raisons pour lesquelles les trois décrets d'application étaient encore en attente : les deux premiers sont en cours de rédaction et ils seront publiés incessamment ; le troisième nécessite une évaluation globale des demandes concernant des congés d'opportunité ou des congés de convenance pour des raisons familiales.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. La loi est votée !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. On a vu des lois pour lesquelles les délais de publication des décrets d'application étaient très longs ! En l'espèce, ils sont tout à fait raisonnables : j'espère que les décrets d'application seront publiés d'ici à la fin de l'année ou au tout début de l'année prochaine.
En tout état de cause, la promotion et le développement des soins palliatifs restent une priorité du Gouvernement, mais cette dernière doit s'exprimer, d'une part, au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, dans lequel ont été inscrits 75 millions de francs au titre de la deuxième tranche du plan pluriannuel - ces crédits seront intégrés dans les enveloppes régionales déléguées aux agences régionales de l'hospitalisation pour être distribuées par celles-ci aux établissements de santé mettant en oeuvre des actions dans ce domaine - et, d'autre part, dans les programmes de formation continue des médecins.
L'enjeu n'est donc pas strictement budgétaire, monsieur le rapporteur pour avis. Le Gouvernement veillera néanmoins à ce que ces actions soient promues et favorisées.
Une attention particulière est également portée à l'évaluation et à la gestion des risques sanitaires liés à l'environnement et aux milieux de vie. Je reviendrai dans un instant sur l'Institut de veille sanitaire, qui en est une pièce maîtresse.
Sans être exhaustive, je citerai deux mesures nouvelles notables : le renforcement des moyens des observatoires régionaux de santé, soit plus de 2 millions de francs ; par ailleurs, l'Institut de veille sanitaire aura les moyens de financer plus amplement les prestations et la mise en place du dispositif de gestion des risques liés à l'amiante - 12 millions de francs sont prévus à cet effet - ce qui traduit une attention soutenue du Gouvernement.
Les enjeux de santé prennent, de plus en plus, une dimension internationale. Il importe que la France joue pleinement son rôle et réponde aux attentes qui s'adressent à elle. Tel est l'objet de l'augmentation de 2 millions de francs des crédits alloués à l'OMS et, surtout, de l'abondement de 16 millions de francs du Fonds de solidarité thérapeutique internationale, ce qui porte ses moyens à 42 millions de francs, 21 millions de francs provenant du secteur de la santé et les 21 autres millions de francs du secteur de la coopération.
Cela permettra au fonds de lancer une série de programmes de prévention et de soins, notamment pour les femmes enceintes et les mères de jeunes enfants dans les pays d'Afrique les plus touchés, hélas ! par le sida.
La lutte contre les pratiques addictives et les maladies infectieuses reçoit des moyens supplémentaires considérables, pour atteindre 867 millions de francs en l'an 2000.
Un volume important de moyens budgétaires nouveaux - 51,3 millions de francs - vient abonder ces dispositifs de prévention et de prise en charge globale des comportements liés à la prise de drogues licites ou illicites, dont la lutte contre le sida avait montré la voie, ou les réorienter sur les cibles les plus urgentes. Cette priorité donnée à la prévention n'a pas échappé à la sagacité de vos rapporteurs et je les en remercie.
Au-delà des 16 millions de francs dont j'ai parlé pour le FSTI, le projet de budget pour 2000 apporte des crédits supplémentaires pour poursuivre le programme de lutte contre l'hépatite C - 15 millions de francs - la lutte contre la résistance aux antibiotiques - 1 million de francs - la lutte contre le tabagisme - 2 millions de francs ; la dotation des centres de cure ambulatoire en alcoologie - 5 millions de francs ; enfin, 10,8 millions de francs permettront d'assurer, sur les crédits de la Direction générale de la santé, les actions de réduction des risques du programme triennal de lutte contre les drogues et la toxicomanie.
Plusieurs d'entre vous ont fait allusion à la contraception et à l'information sur la maîtrise de la fécondité. Bien évidemment, madame Borvo, monsieur Neuwirth, il s'agit là de préoccupations majeures du Gouvernement.
Le comité de pilotage que Mme Aubry a réuni avec les associations et les partenaires concernés pour mettre au point une campagne d'information sur la contraception montre bien l'intérêt, mais aussi la difficulté de diffuser de nouveau une information qui, effectivement avait été laissée à l'abandon depuis de nombreuses années, vous avez eu raison de le dire.
Les chiffres qui sont portés à notre connaissance à la suite de différentes études montrent qu'il est indispensable de reprendre une information très précise, très ciblée...
M. Lucien Neuwirth. Et permanente !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... et permanente, en direction des jeunes générations, je vous l'accorde tout à fait.
La contraception d'urgence, dont on a annoncé la mise à disposition dans les collèges et les lycées par le biais des infirmières scolaires, a ramené la question sur le devant de l'actualité. Il est vrai qu'il s'agit d'une grande avancée médicale : le produit est bien toléré, son utilisation est simple et le fait qu'il soit en vente libre dans les pharmacies donne aux femmes une plus grande chance de réussite. Cela étant, c'est une méthode de rattrapage qui, bien évidemment, doit s'intégrer dans une politique de prévention globale des grossesses non désirées.
Pour ce qui est de la délivrance du produit dans les collèges et dans les lycées, un climat de confiance et un dialogue avec les jeunes filles concernées est indispensable.
M. Lucien Neuwirth. Manque de concertationpréalable !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, la concertation a été menée dans le cadre du comité de pilotage et les différents groupes se positionnent maintenant les uns par rapport aux autres.
Toute mobilisation médiatique n'est pas inutile, me semble-t-il, car cela permet de mener plus loin cette concertation que vous appelez de vos voeux.
Il faut enfin préciser que ces apports de crédits nouveaux ont été également permis par un travail de reclassement plus rationnel des financements entre l'Etat et l'assurance maladie, dont vous avez vu l'effet dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit, d'une part, du transfert à l'assurance maladie des 15 % résiduels de financement par l'Etat du dépistage dans les centres de dépistage anonyme et gratuit, d'autre part, de l'abandon du principe du remboursement aux hôpitaux des frais de cure des toxicomanes hospitalisés.
Par ailleurs, ma détermination m'incite à agir en faveur de la nécessaire politique de nutrition évoquée par M. Goulet. Chacun doit pouvoir, en effet, savoir se nourrir correctement et, surtout, ne pas nuire à sa santé en mangeant n'importe comment.
La nutrition est un déterminant de santé puissant et la France portera ce thème dans le cadre de sa présidence de l'Union européenne, durant le second semestre de l'année 2000.
Le financement de la montée en charge des agences de sécurité sanitaire était certainement l'un des enjeux clés du projet de budget pour 2000, ce que M. Louis Boyer, en tant que rapporteur pour avis, n'a pas manqué de souligner.
En 2000, 495 millions de francs, c'est-à-dire 156,6 millions de francs de plus qu'en 1999, seront affectés aux sept établissements nationaux généralement désignés depuis la loi du 1er juillet 1998 sous le nom d'« agences de sécurité sanitaire ».
Quatre d'entre eux ont été créés ou transformés par cette loi. Il s'agit de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, dont la compétence inclut, au-delà du médicament, les dispositifs médicaux et les cosmétiques ; de l'Agence française de sécurité sanitaire alimentaire, cofinancée par les trois ministères de tutelle pour les missions nouvelles qui lui sont conférées par la loi ; de l'Institut de veille sanitaire et de l'Agence du sang qui est appelée à se transformer, le 1er janvier 2000, en Etablissement français du sang.
Les trois autres établissements, créés antérieurement à la loi de 1998, n'ont pas pour autant terminé leur montée en charge, notamment l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, dont le plan de charge en matière d'accréditation doit se développer rapidement, la procédure, totalement nouvelle dans notre pays, ayant nécessité un temps d'appropriation par les acteurs.
L'Office de protection contre les rayonnements ionisants, l'OPRI, est aussi confronté à de lourdes adaptations imposées, notamment, par des directives communautaires.
Seul l'Etablissement français des greffes est aujourd'hui proche d'un niveau de croisière, si tant est que cette notion ait un sens dans le paysage extrêmement exigeant et évolutif de la sécurité sanitaire.
Sans détailler ici les montants de crédits supplémentaires affectés à chacune des agences, ce que j'ai déjà eu l'occasion de faire en commission, je voudrais, pour illustrer les ordres de grandeur, préciser que 125 millions de francs sont affectés aux quatre agences issues de la loi de 1998, soit une hausse de 55 % du niveau de ces subventions par rapport à 1999. Leur ampleur s'explique aussi par le choix de ne pas multiplier les taxes prélevées sur les secteurs de production placés sous le contrôle des agences. Ayant fait ce choix, l'Etat prend ses responsabilités budgétaires.
Monsieur Huriet, telle est la réponse à votre question : nous avons tiré les conséquences de ce choix, qui ne devrait pas vous choquer, en mettant en place les crédits nécessaires à la montée en charge des agences. Ce financement entre donc en effet dans les discussions budgétaires normales : négocier, ce n'est pas mendier. Nous avons fait la preuve que l'Etat est responsable et sait mettre en place les moyens adaptés aux besoins et à la montée en puissance de ces agences, même lorsque trois ministères sont concernés, comme c'est le cas pour l'Agence française de sécurité sanitaire alimentaire.
J'ajoute que l'ensemble de ce dispositif est coordonné par le comité national de sécurité sanitaire, désormais opérationnel, et que je réunis tous les trois mois.
Ce comité s'est réuni en octobre dernier. Il a présenté un bilan des alertes et des crises sanitaires des six derniers mois, en particulier à l'occasion de l'éclipse et de l'épidémie de légionellose, ainsi que la démarche en cours pour les encéphalites suraiguës transmissibles à l'homme.
Conformément à ses missions, ce comité se réunit, travaille et mène une réflexion en mutualisant les différentes réflexions des acteurs et des experts convoqués devant lui.
C'est dans ce cadre qu'a été proposée la mise en place de trois groupes de travail, présidés par des experts reconnus, chargés de travailler sur les facteurs de décision dans les différents organismes, l'estimation quantitative et qualitative des risques et les priorités de sécurité sanitaire.
Il s'agit bien de réfléchir et de coordonner l'action des différentes agences et non pas d'alourdir le fonctionnement de ce comité, ce qui serait source d'inefficacité pour un véritable lieu de réflexion et de proposition comme celui-là.
Concernant le principe de précaution, s'il revient aux scientifiques d'évaluer les risques, en revanche, la décision, c'est-à-dire la gestion du risque, revient aux pouvoirs publics, au Gouvernement, comme on l'a vu pour la levée de l'embargo de la viande bovine. Le dossier a été géré de manière interministérielle, sous la responsabilité du Premier ministre, et si c'est le ministre de l'agriculture qui a été le porte-parole de la France à Bruxelles, c'est parce que tel est l'usage.
Ces questions, en effet, sont traitées par le ministère de l'agriculture et par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. En l'occurrence, M. le Premier ministre a tenu à ce que les préoccupations de santé publique soient véritablement intégrées dans la réflexion et les exigences portées par la France. C'est ce qui m'a conduite à accompagner Jean Glavany à plusieurs reprises dans ces commissions, à la grande surprise, je dois le dire, des acteurs présents qui n'avaient jamais vu un ministre de la santé venir parler de ces questions. D'ailleurs, la manière dont la France les a abordées, a fait évoluer de façon tout à fait positive et novatrice la réflexion collective au sein de la Communauté européenne.
Le dernier domaine couvert par le budget de la santé est celui de l'offre de soins, dénomination qui donne sa logique à un contenu malgré tout diversifié.
Sous cet agrégat sont en effet regroupés les crédits affectés au fonctionnement des agences régionales de l'hospitalisation, à la formation des professions paramédicales, à l'organisation des systèmes de santé dans les territoires d'outre-mer ainsi que les crédits de subventions aux investissements hospitaliers.
Le fonctionnement des agences régionales de l'hospitalisation est désormais stabilisé. Je vous remercie, monsieur Cazeau, de l'avoir relevé.
Les schémas régionaux d'organisation sanitaire de deuxième génération sont désormais presque tous opérationnels.
La formation des professions médicales et paramédicales, heureusement regroupée avec les bourses d'études dans la nouvelle nomenclature, prolonge également le niveau des dotations 1999, tant pour les écoles de sage-femmes et d'infirmiers - 256 millions de francs - que pour la formation extrahospitalière des étudiants - 250 millions de francs - et l'année-recherche des internes.
Je m'arrête un instant sur les territoires d'outre-mer, pour souligner les efforts mis en oeuvre pour régler un certain nombre de situations difficiles, tant dans le budget 2000 - il s'agit de la revalorisation du minimum vieillesse et des crédits d'action sociale pour les personnes handicapées à Wallis-et-Futuna - qu'en gestion 1999, avec l'apurement d'une tranche de dettes de 17,4 millions de francs au profit du système de santé de Wallis-et-Futuna, un apport de 5 millions de francs à la convention en cours avec le Polynésie française pour amorcer une aide au logement mise en place sur le territoire, et enfin 10 millions de francs pour abonder la convention d'action sociale à Mayotte.
Le dernier domaine relevant de l'offre de soins est celui des investissements hospitaliers. Ils se répartissent entre un chapitre qui, à l'avenir, ne devrait plus porter que les opérations non finançables par nature sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, notamment outre-mer, et un chapitre constitué par le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, le FIMHO.
Créé en 1998, le FIMHO poursuit sa montée en charge à un rythme commandé par le respect scrupuleux de l'éligibilité au regard de critères de sélection stricts des opérations. Ces critères sont stricts, car il me semble essentiel de préserver la fonction impartie au FIMHO, qui est d'appuyer la logique de restructuration de l'offre de soins, en faisant jouer au financement de l'Etat un rôle de complément et de levier là où il est nécessaire, et là seulement.
Le budget 2000 accompagne cette montée en charge avec un nouvel apport de 200 millions de francs d'autorisations de programme, qui porte à 265 millions de francs, soit 115 millions de francs de plus qu'en 1999, le besoin de crédits de paiement en 2000.
Mme Heinis a formulé quelques propositions concernant la réforme des études médicales et la démographie médicale. Elle a longuement parlé des hôpitaux de proximité et de l'importance d'assurer des soins de qualité par des professionnels reconnus.
J'aimerais vous rappeler les différentes mesures qui ont été prises depuis deux ans dans ce domaine, même si elles concernent davantage le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
Ainsi, l'augmentation du numerus clausus, qui passe de 3 700 en 1999 à 3 850 pour 2000, devrait apporter des réponses en termes de démographie médicale. Pour tenir compte des pénuries hospitalières, trois disciplines, l'anesthésie, l'obstétrique et la pédiatrie, ont été individualisées afin d'orienter les internes et de répondre aux besoins constatés.
Pour les praticiens hospitaliers, l'harmonisation des carrières à temps plein et des carrières à temps partiel est en cours, ainsi que la mise en oeuvre du périmètre de sécurité après une garde, la prime pour l'exercice dans plusieurs établissements, l'amélioration de la situation sociale, l'amélioration du statut des praticiens adjoints contractuels, la revalorisation du statut des urgentistes et la création de trente postes d'urgentistes en 1999, de cent en 2000 et de cent en 2001.
Je souhaite conclure en évoquant le renforcement des moyens en personnel de l'administration sanitaire et sociale, sans m'attarder, parce que Martine Aubry l'a fait ce matin en vous exposant en détail la stratégie qui la guide en la matière.
Monsieur Oudin, l'une des raisons du rejet du budget de la solidarité serait, pour vous, le recours à des agents mis à disposition par des organismes tiers, notamment par des hôpitaux. Vous savez mieux que personne que cette situation n'est pas nouvelle, tout simplement parce que cette administration a connu, jusqu'à notre arrivée, une dégradation de ses moyens humains qui a conduit à ce recours à des formes, il est vrai, irrégulières de recrutement. Cependant, je récuse vivement votre assertion selon laquelle, s'agissant des hôpitaux, on n'est jamais mieux servi que par soi-même, ce qui laisse à penser que ce ministère fait bon marché de la déontologie.
Cette situation est donc installée depuis longtemps, et je ne doute pas que vous l'avez dénoncée auprès des ministres précédents.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Absolument !
M. Jean Chérioux. rapporteur pour avis. Nous, nous savons reconnaître nos erreurs !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je ne sais si vous l'avez fait avec la même force, mais les résultats n'étaient pas concrets.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. C'est ce que nous déplorions !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. En revanche - et c'est nouveau - nous nous donnons aujourd'hui les moyens d'y remédier.
Vous critiquez les créations d'emplois budgétaires, alors qu'ils constituent le moyen le plus sain de répondre à la charge accrue des services. Or, contrairement à ce que l'on pourrait déduire de votre analyse, la mise en place des agences de sécurité sanitaire n'exonère nullement les services de l'Etat de la gestion des risques sur le terrain.
Quant aux mises à disposition héritées du passé, nous mettons en place dans le budget 2000, et c'est la première fois, un crédit de rémunération de 10 millions de francs destiné à régulariser ces personnels. Il est évident que ce n'est pas suffisant pour cette année, mais c'est un premier pas significatif qui marque bien la détermination de Mme Aubry et de moi-même à poursuivre cet effort dans les budgets à venir. Je pensais que vous pourriez nous en donner acte. Je suis quelque peu déçue, mais je ne désespère pas !
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. C'est un trop petit pas !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Soyez assurés que nous en ferons un autre l'année prochaine !
Comme Martine Aubry, je suis convaincue de la nécessité absolue, pour un ministère qui porte une part essentielle des grands projets du Gouvernement, de veiller à donner les moyens nécessaires à l'administration pour mener à bien ces projets et leur faire produire les effets que chacun en attend.
Les moyens qui conviennent, ce sont des emplois budgétaires en plus. Le Premier ministre en a reconnu la nécessité. C'est ainsi que le projet de budget pour 2000 permet une augmentation nette de 100 emplois, 137 en réel, à raison de 53 en administration centrale et de 84 dans les services déconcentrés, notamment pour renforcer les corps techniques, qui sont les chevilles ouvrières des services en matières d'inspection et d'expertise.
En 2000, seront donc créés vingt et un emplois d'inspecteur des affaires sanitaires et sociales, vingt-deux emplois de médecin inspecteur et huit emplois d'infirmier, dix emplois de pharmacien inspecteur, dix emplois d'ingénieur de génie sanitaire et huit emplois de technicien sanitaire pour la filière santé-environnement.
C'est aussi une meilleure adaptation des emplois aux métiers, par la requalification des emplois, et plus de fluidité.
C'est, enfin, avec 32,2 millions de francs, après les 33,5 millions de francs obtenus l'an dernier, plus de reconnaissance, en termes de rémunération indemnitaire, de la charge de travail supportée et des résultats accomplis.
Ces orientations, simples à dire, difficiles à obtenir, trouvent une traduction forte dans le budget pour 2000. Je sais que beaucoup d'entre vous qui côtoient fréquemment l'administration sanitaire et sociale s'en réjouissent également. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et C concernant l'emploi et la solidarité : II. - Santé et solidarité.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 348 539 873 francs. »