Séance du 6 décembre 1999







M. Jacques Oudin, raporteur spécial. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Tout à l'heure, à la fin de mon exposé, j'ai indiqué que, à l'issue de l'examen de l'ensemble des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité, la commission des finances proposait au Sénat de rejeter lesdits crédits.
Mme le secrétaire vient de me répondre sur les mises à disposition des agents par la sécurité sociale, les caisses ou les hôpitaux au ministère, c'est-à-dire 375 agents. Pourquoi, m'a-t-elle dit, est-ce la première fois que vous posez cette question ? Je tiens à préciser que ce n'est pas la première fois et que je formule cette remarque depuis que je rapporte ce budget. Ces situations me paraissent totalement anormales et irrégulières au regard de la compensation. En effet, vous surdotez les hôpitaux qui transfèrent des postes à votre administration alors que, vous le savez, celle-ci est systématiquement condamnée par les instances qui sont amenées à juger ces litiges.
Par ailleurs, même si vous faites un petit pas en inscrivant 10 millions de francs, l'ensemble du dispositif n'est pas satisfaisant. Le fait qu'un organisme contrôlé mette des personnes à la disposition de l'organisme chargé de le contrôler fausse toute logique du contrôle. Vous n'ignorez pas la déontologie qui prévaut dans l'administration et selon laquelle le fonctionnaire qui contrôle un secteur ne doit pas être détaché dans ce même secteur. Vous, vous faites l'inverse : vous prenez une personne dans le secteur contrôlé pour la mettre dans l'organisme contrôleur.
Si j'avais à rapporter les crédits du ministère de l'industrie, madame le secrétaire d'Etat, je dirais la même chose. En effet, EDF met à la disposition de la direction générale de l'électricité des personnes qui la contrôlent. Je dirais la même chose de l'aviation civile, Air France mettant à disposition de l'administration des personnes qui contrôlent Air France. Au bout du compte, cela aboutit à des situations comme celle qu'a connue le Crédit lyonnais.
Je déposerai bientôt une proposition de loi visant à interdire toute mise à disposition. Ainsi, nous reviendrons à la situation qui prévalait avant 1984. C'est en effet le gouvernement socialiste de l'époque qui a autorisé l'extension des mises à disposition, avec un principe de compensation à titre exceptionnel, et une loi de 1992 a étendu ces facilités. Tout cela n'est pas normal. Comme je rapporte le budget de votre ministère, c'est votre ministère que je critique.
Je vous ai interrogé sur le coût de la régularisation de ces 375 emplois. Vous m'avez répondu : nous avons fait un pas en inscrivant 10 millions de francs. Cela, je le sais.
Ce que je ne sais pas, c'est combien il faudra l'année prochaine pour régulariser l'ensemble des personnels concernés. Et ne me dites pas que c'est impossible : on a vu les centaines de millions de francs qui ont été mis dans d'autres actions. Cela signifie que, à vos yeux, la régularisation n'est pas la priorité. Voilà ce qui nous sépare !
En revanche, vous ne m'avez pas répondu sur d'autres points. Si nombre de mes collègues ont reçu des réponses, tel n'est hélas ! pas mon cas. S'agissant des 4,7 milliards de francs de l'allocation de rentrée scolaire, je n'ai pas reçu de réponse. Sur le milliard du FASTIF, je n'ai pas reçu de réponse.
Quant aux différences d'évaluation du coût de la CMU, je n'ai pas reçu de réponse ou, plutôt, vous avez précisé que 1 400 personnes vont être recrutées. Lorsque nous avions examiné le texte relatif à la CMU, j'avais indiqué que ce dispositif aurait un coût en termes de personnels. Il m'avait alors été répondu que tel ne serait pas le cas. Or, nous le constatons aujourd'hui, il faut recruter 1 400 personnes à ce titre.
Par ailleurs, vous avez dit que le coût du plan de Mme Aubry s'élèvera à 2,7 milliards de francs, qui seront probablement inscrits dans le collectif. Nous en prenons acte. Toutefois, nous constatons que cette annonce intervient après le dépôt de ce texte. Nous espérons que la situation sera régularisée pendant l'examen de celui-ci.
A la fin de mon intervention, j'ai cité les observations de la Cour des comptes qui concernaient plus directement votre ministère. Je vous ai alors demandé de quelle manière vous aviez mis en oeuvre ces observations, qu'il s'agisse de la clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, de la réorganisation des systèmes d'information, de la clarification du partage des responsabilités, des réformes des méthodes comptables pour aboutir à une plus grande fiabilité. C'est le rapport de septembre 1999.
Il s'agit là de quelques exemples parmi les questions que vous ai posées et sur lesquelles je n'ai pas eu de réponse. C'est pourquoi je confirme que la commission des finances propose au Sénat de rejeter l'ensemble des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. La question des mises à disposition et de la compensation nous préoccupe. D'ailleurs, Mme Aubry a saisi le Premier ministre voilà quelques mois sur cette question et nous réfléchissons pour y apporter des solutions durables et définitives. Simplement, je vous interroge, monsieur le rapporteur spécial : où recruter les contrôleurs sinon dans les établissements contrôlés ? En effet, c'est là que l'on trouve les meilleurs spécialistes de la question. Peut-être devrions-nous élaborer des dispositifs empêchant le retour de ces personnels dans leurs corps d'origine, par exemple. Il faut réfléchir autrement qu'en termes de sanctions aussi fortes que celles que vous annoncez. En effet, ceux qui contrôlent les établissements et procèdent aux évaluations doivent être compétents et expérimentés. Toutefois, je le reconnais, la question mérite une réflexion approfondie.
J'en viens à l'allocation de rentrée scolaire et au FASTIF. Depuis deux ans, le budget de la branche famille bénéficie d'un certain nombre de clarifications, afin que ce budget prenne en charge les prestations familiales qui concernent la politique familiale.
En 1999, l'allocation de parent isolé a été reprise par le budget de l'Etat, afin qu'un minima social ne soit pas pris sur le budget de la branche famille. En 2000, c'est le FASTIF qui sera pris en charge par le budget de l'Etat ; il ne sera donc plus à la charge de la branche famille.
En ce qui concerne les 4,7 milliards de francs au titre de l'allocation de rentrée scolaire, il s'agit d'un supplément puisque, dans le budget de la branche famille, la prestation de rentrée scolaire figure déjà à hauteur de près de 400 francs par enfant concerné. Chaque année, une décision intervenait dans le courant de l'été pour l'augmenter - et l'augmenter de manière importante ces trois dernières années - un rectificatif étant porté au collectif budgétaire de l'année en cours.
Il nous a donc paru que cette procédure méritait d'être clarifiée, d'autant que le Premier ministre s'est engagé à ce que l'allocation de rentrée scolaire soit maintenant régulièrement portée à 1 600 francs. Par ailleurs, dorénavant elle sera versée y compris aux familles avec un seul enfant. En outre, certains, dont je suis - et dont j'étais lorsque je rapportais ce projet de budget - considéraient que cette allocation devrait être modulée en fonction de l'âge et des coûts réels de scolarité de l'enfant.
Il était donc nécessaire que l'allocation de rentrée scolaire devienne une véritable prestation familiale. Nous nous sommes engagés dans cette voie en prévoyant une compensation du budget de l'Etat au budget de la famille à hauteur de la prise en charge du FASTIF et de la récupération de l'excédent de recettes de la branche famille. Nous poursuivrons en ce sens dans les années à venir afin que l'allocation de rentrée scolaire devienne une prestation familiale inscrite dans le budget de la branche famille.
Concernant les 1 400 personnes recrutées par la CNAM pour faire face au surcroît d'activités lié à la mise en oeuvre de la CMU, cela va effectivement avoir un coût. Toutefois, un problème de calendrier se pose dans cette opération. Normalement, l'informatisation et la carte Vitale auraient dû intervenir au début de l'année 2000, ce qui aurait permis aux caisses primaires d'assurance maladie de réaliser des gains de productivité et de faire des économies en termes de fonctionnement.
Cela n'a pas été possible pour des raisons diverses, mais interviendra avec un certain décalage. Cette autorisation de créations de poste est donc une anticipation, qui pourra être récupérée ensuite par les caisses d'assurance maladie en fonction des gains de productivité qu'elles pourront faire dans la mise en oeuvre de l'informatisation et de la réorganisation du travail et par le départ à la retraite d'un certain nombre de fonctionnaires. Par conséquent, nous verrons dans la durée comment cette gestion de personnel sera absorbée par le budget concerné.
Voilà ce que je pouvais vous répondre s'agissant des questions que vous m'aviez posées et auxquelles je n'avais pas répondu.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Les crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 10 222 434 346 francs. »